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TROISIÈME PARTIE TOME III : LES 5 VRAIS PILIERS
DE L’ENSEMBLE CORAN HADITH SIRA ET CHARIA FIQH MADHAHIB.
(La distinction/discrimination musulman/non musulman, djihadiste /non-djihadiste *, homme/femme, libre/esclave, Gens du Livre/autres non croyants.)
La fermeture des portes de l’Ijtihad, Insidad bab al Ijtihad en arabe, ordonnée par le calife al Qadir en 1019 (Rissala al Qadiriya) est certes difficile à dater dans la pratique, mais elle coïncide à tout le moins avec la montée en puissance des quatre écoles de droit du sunnisme et avec l’extinction concomitante des derniers feux du Moutazilisme c’est-à-dire à une période allant du 11e au 13e siècle…
ET A CONSTITUÉ UN RECUL CIVILISATIONNEL SANS PRÉCÉDENT POUR L’HUMANITÉ,
un crépuscule de la vieillesse avant l’heure où l’imagination est réduite, les facultés créatrices diminuées et la pensée ankylosée (Mohamed Charfi, Islam et liberté. Paris 1999).
*Sourates 4 :95, 9 :19-20, 57 : 10. Traduction Le Coran annoté par un sceptique.
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TROISIÈME PARTIE TOME III : LES 5 VRAIS PILIERS
DE L’ENSEMBLE CORAN HADITH SIRA ET CHARIA FIQH MADHAHIB.
(La distinction/discrimination musulman/non musulman, djihadiste /non-djihadiste *, homme/femme, libre/esclave, Gens du Livre/autres non croyants.)
La fermeture des portes de l’Ijtihad, Insidad bab al Ijtihad en arabe, ordonnée par le calife al Qadir en 1019 (Rissala al Qadiriya) est certes difficile à dater dans la pratique, mais elle coïncide à tout le moins avec la montée en puissance des quatre écoles de droit du sunnisme et avec l’extinction concomitante des derniers feux du Moutazilisme c’est-à-dire à une période allant du 11e au 13e siècle…
ET A CONSTITUÉ UN RECUL CIVILISATIONNEL SANS PRÉCÉDENT POUR L’HUMANITÉ,
un crépuscule de la vieillesse avant l’heure où l’imagination est réduite, les facultés créatrices diminuées et la pensée ankylosée (Mohamed Charfi, Islam et liberté. Paris 1999).
*Sourates 4 :95, 9 :19-20, 57 : 10. Traduction Le Coran annoté par un sceptique.
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ODE AUX TRÈS-SACHANTS.
La moitié du malheur de l’Humanité vient du fait que, il y a plusieurs milliers d’années, quelque part au Moyen-Orient, des peuples de par leur langue ont conçu la spiritualité ou la mystique…
— Non comme une quête de sens, d’espoir ou de libération avec les concepts qui s’y rattachent (distinction opposition ou différence entre matière et esprit, éthique, discipline personnelle, philanthropie, vie après la vie, méditation, quête du Graal, pratiques…).
— Mais comme une loi (DIN) gigantesque et protéiforme devant régir la vie quotidienne des hommes avec tout ce que cela implique.
Des obligations ou des interdits que tout un chacun doit respecter jour et nuit. Des infractions ou des contraventions à cette multitude d’interdits quand ils ne sont pas suivis à la lettre. Des jugements quand une ou plusieurs de ces lois sont violées. Des condamnations. Pour les coupables.
Des non-lieux ou des relaxes pour les innocents APPELÉS JUSTES…CETTE CONFUSION ENTRE LE NUMINEUX ET LE RELIGIEUX PUIS ENTRE LE SACRÉ ET LE PROFANE NOUS POURRIT LA VIE DEPUIS 4000 ANS VIA ISRAËL ET SURTOUT LES NOUVEAUX ISRAËL QUE VEULENT ÊTRE LE CHRISTIANISME ET L’ISLAM.
Le principe de base de notre Ollotouta nous a été donné, il y a longtemps déjà, par notre maître à tous en ce domaine ; le grand barde gaélique fondateur de la Libre-pensée moderne, que l’on évoque habituellement sous le nom anglicisé de John Toland. Il ne peut pas y avoir par définition de choses contraires à la Raison dans de Saintes Écritures émanant vraiment du Divin.
S’il y en a, il s’agit alors, soit d’erreurs, soit de mensonges !
Ou il n’y a aucun mystère, ou alors il ne s’agit en aucune façon d’une révélation divine !
Il n’y a aucun moyen terme…Nous ne reconnaissons pas d’autre orthodoxie que celle de la Vérité car, où qu’elle soit en ce monde, doit également se tenir, nous en sommes totalement convaincus, l’Église de Dieu, et pas celle de telle ou telle faction humaine… Nous sommes par conséquent partisans de ne faire aucun quartier à l’erreur sous quelque prétexte que ce soit, chaque fois que nous aurons la possibilité ou l’occasion de l’exposer sous ses vraies couleurs.
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1696. Le christianisme sans mystère.
1702. Vindicius Liberus. Réponse de John Toland aux détracteurs de son « christianisme sans mystère ».
1704. Lettres à Serena contenant l’origine de l’idolâtrie et les raisons du paganisme, l’histoire de la doctrine de l’immortalité de l’âme chez les païens, etc. (Version baron d’Holbach, un philosophe allemand).
1705. Le vrai socinianisme * en tant qu’exemple de débat courtois en matière de théologie *.
Précédé de l’Indifférence dans les disputes, recommandée par un panthéiste à un ami orthodoxe.
1709. Adeisidaemon ou l’homme sans superstition. Les origines juives.
1712. Lettre contre le papisme, et en particulier contre le fait d’admettre l’autorité des Pères ou des Conciles dans les controverses religieuses, par Sophie Charlotte de Prusse.
1714. Défense des juifs, victimes des préjugés antisémites, et plaidoyer pour leur naturalisation.
1718. Le destin de Rome, des papes, et la fameuse prophétie de saint Malachie, archevêque d’Armagh au treizième siècle.
Nazarenus ou le christianisme juif, goy, et mahométan (version d’Holbach), contenant :
I.L’histoire de l’ancien évangile de Barnabé, ainsi que le moderne évangile apocryphe des mahométans, attribué à ce même apôtre.
II. Le projet original du christianisme expliqué par l’histoire des Nazaréens, résolvant du même coup diverses polémiques à propos de cette divine (mais si hautement pervertie) institution.
III. L’analyse d’un manuscrit des quatre Évangiles irlandais avec un résumé de l’ancien christianisme d’Irlande et de ce que fut la réalité des culdées (un ordre mi-laïc, mi-religieux opposé aux deux derniers évêques de Worcester).
1720. Pantheisticon, sive formula celebrandae sodalitatis socraticae.
Tetradymus.
I. Hodegus. La colonne de feu et de nuée qui a guidé les israélites dans le désert n’était pas un miracle, mais, comme le relate précisément l’Exode, une pratique également connue des autres nations ; et dans ces contrées non seulement utile, mais même nécessaire.
Il. Clidophorus.
III. Hypatie ou l’histoire de la plus belle, de la plus vertueuse, de la plus instruite, de la plus accomplie des femmes ; qui fut lapidée par le clergé d’Alexandrie, afin de satisfaire l’orgueil, l’ambition, voire la cruauté, de l’archevêque Cyrille, communément, mais très improprement, appelé saint Cyrille.
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1726. Histoire critique de la religion celte, contenant un aperçu sur les druides, ou les prêtres et les juges, sur les vates, ou les devins et médecins, et enfin sur les bardes, ou les poètes ; des anciens Bretons, Irlandais ou Écossais. Avec en plus l’histoire d’Abaris l’Hyperboréen, prêtre du soleil.
Un spécimen de la langue armoricaine (dictionnaire breton, irlandais, latin).
1726. Compte-rendu du livre de Giordano Bruno, sur l’infini de l’univers et la pluralité des mondes, traduit de l’édition italienne.
1751. Le Panthéisticon ou le mode de célébration de la société socratique. S. Paterson Londres. Traduction du livre publié en 1720.
« Le Druidisme » est une revue indépendante (indépendante de toute association religieuse ou politique) et qui n’a qu’un seul but : la recherche théorique ou fondamentale en matière de néopaganisme. La double question à laquelle essaie de répondre cette revue d’études théoriques pourrait se résumer ainsi :
« Que pourrait être ou que devrait être, un néo-druidisme actuel, moderne et contemporain ? »
Le « Druidisme » est une revue néopaïenne, strictement néopaïenne, héritière de tous les mouvements authentiques (c’est-à-dire non chrétiens) qui se sont succédé depuis deux mille ans, l’héritière indirecte, mais l’héritière, quand même !
À propos de notre tradition de référence ou de notre filiation intellectuelle soulignons que si les « poètes » du royaume de Domnall mac Muirchertach Ua Néill avaient toujours les imbas forosnai, les teimn laegda ainsi que les dichetal do chennaib1) à leur répertoire (cf. la conclusion de l’histoire du pillage du château de Maelmilscothach, d’Urard Mac Coisé, un poète mort au XIe siècle), ils étaient peut-être déjà chrétiens quand même depuis plusieurs générations. Il est vrai que ces pratiques (imbas forosnai, teimn…) étaient formellement interdites par l’Église, mais qui sait, il y a eu peut-être des accommodements analogues à ceux des astrologues ou alchimistes du Moyen Âge.
Quoi qu’il en soit notre « Druidisme » est aussi une volonté, la volonté de se rapprocher, au maximum, du druidisme antique, tel qu’il fut (scientifiquement parlant). La volonté aussi néanmoins de moderniser ce druidisme, un retour total au druidisme antique étant exclu (il serait de toute façon impossible).
Exemples de modernisation de ce druidisme païen.
— Abandon aux associations laïques du côté culturel (médecine, poésie, mathématique, etc.). Principe de séparation de l’Église et de l’État.
— Spécialisation par contre dans la spiritualité celtique, ou païenne en général, l’histoire de la religion, la philosophie et la métapsychique (dite aujourd’hui parapsychologie).
— Utilisation dans certains cas du vocabulaire actuel (Église, religion, baptême, et ainsi de suite).
Un juste milieu est évidemment à trouver entre un retour total au druidisme antique (fondamentalisme ou intégrisme) et une modernisation radicale trop révolutionnaire (plus de saie).
L’AAP (athée agnostique panthéiste) celte ayant accepté d’être l’avocat du paganisme celtique antique et de cosigner cette petite bibliothèque **, dont il n’est que le rassembleur, le druide Hesunertus (Pierre de La Crau), ne se considère pas comme l’auteur de cet ouvrage collectif. Mais comme le simple porte-parole de l’équipe l’ayant composé. Pour ce qui est des autres sources de cet essai sur le druidisme, voir les remerciements de la bibliographie.
* Les sociniens, puisque c’est ainsi qu’ils furent appelés par la suite, désiraient plus que tout restaurer le vrai christianisme qu’enseigne la Bible. Ils considéraient que la Réforme n’avait fait disparaître qu’une partie de la corruption et du formalisme, présents dans les Églises, tout en laissant subsister le mauvais fond : les enseignements non bibliques (ce qui est très discutable d’ailleurs).
** Ce petit camminus est néanmoins important aussi pour les jeunes… de 7 à 77 ans ! Mantalon siron esi.
1) Do ratath tra do Mael Milscothach iartain cech ni dobrethaigsid suide sin etir ecnaide 7 fileda 7 brithemna la taeb ogaisic a crech 7 is amlaidsin ro ordaigset do tabairt a cach ollamain ina einech 7 ina sa[ru]gad acht cotissad de imus forosnad [di]chetal do chollaib cend 7 tenm laida .i. comenclainn fri rig Temrach do acht co ti de intreide sin FINIT.
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AVERTISSEMENT AU LECTEUR.
LA PLUPART DE NOS TRADUCTIONS DES VERSETS DU CORAN SONT TIRÉES DU SITE INTERNET LE CORAN DU SCEPTIQUE, ANNOTÉ. Et nous appliquerons ici dans ce bref essai la méthode d’analyse utilisée jusque-là dans notre étude des légendes irlandaises et développée dans nos nombreux contre-lais (pas de jaloux !) et nous allons donc procéder à 100 COUPS DE SONDE DANS LE FAUX ISLAM (nous ne parlons pas ici du vrai islam qu’est le soufisme ou le moutazilisme évidemment).
Cet opuscule n’est pas destiné à faire du prosélytisme pour une religion quelconque, mais il va de soi que l’on peut faire à cet islam les mêmes critiques de fond que celles que l’on peut adresser aux autres religions sur le plan ontologique.
À part l’évidence brute « qu’il y a quelque chose » (mais ce peut être un quelque chose prenant conscience de lui-même) et non « le néant », rien ne prouve qu’il y ait eu un jour une création ex nihilo et donc un démiurge créateur. Il y a peut-être tout simplement un être cosmique passant alternativement par des phases de déploiement OU de repli.
Dans ce cas exit Dieu Allah ou Jéhovah.
S’il existe quelque chose qui transcende la matière brute, rien ne prouve que ce quelque chose ne lui est pas également immanent. Rien ne prouve que ce quelque chose au-delà de la matière a une personnalité que l’on peut qualifier (qu’il est jaloux, clément, miséricordieux, juste, grand, bon, qu’il est amour, etc. bref voir ce que dit à ce sujet la théologie apophatique…) et qu’il fait plus que sous-tendre le monde matériel, un peu comme un océan porte une bulle ou un navire.
Il va de soi également que les enfer ou paradis si souvent évoqués par le Coran et les hadiths ne sauraient être des lieux, que ce ne sont que des états de l’être évoqués plus ou moins grossièrement par des images empruntées au langage humain (les houris les boissons délicieuses, etc.)
N.B. Le paradis selon l’islam est sur ce point très comparable à l’autre-monde des légendes celto-druidiques conservées en Irlande (les bagarres éternelles en moins) et son enfer fait tout à fait penser aux visions médiévales, toujours irlandaises sur le même sujet (exemple celle d’Adomnan, de Tondale, de Saint Patrice, etc. ce qui dans notre bouche n’est pas forcément un compliment). Avec quelques spécificités en plus, mais beaucoup d’imagination en moins.
Nous vivons une époque formidable où l’anti-essentialisme est roi (les nations n’existent pas l’individualisme n’existe pas, la pollution n’existe pas, le racisme existe, mais les races n’existent pas, ni les idéologies religieuses). Dans ce modeste essai consacré à la religion fondée par un homme appelé Mahomet nous partirons néanmoins du principe qu’il y a depuis plus de 1500 ans sur terre quelque chose qui fait que des femmes et des hommes, qui s’appellent ou sont appelés « Musulmans », et donc qu’il peut y avoir un groupe ou ensemble de groupes religieux associés à cette notion de soumission (au Seigneur) appelée islam. Puisque telle est l’étymologie du mot. Le mot islam vient de la quatrième forme verbale de la racine SLM /ASLAMA « se soumettre » et signifie « soumission » (sous-entendu à Dieu). Musulman, en est le participe actif : « celui qui se soumet » (toujours sous-entendu à Dieu).
Mais…… Alors qu’un certain nombre de musulmans, suite à une lecture littérale du Coran, comme d’aucuns faisaient avec la partie Ancien Testament de la Bible au Moyen Âge, essentialisent les koufar les polythéistes les juifs ou les chrétiens. Exemple « Que Dieu les anéantisse – les chrétiens – ils sont tellement stupides (youfakouna) ». Chapitre 9, verset 30. Alors que nombre de journalistes ou d’intervenants dans la sphère médiatico-politique, sans être pour autant des idiots utiles, essentialisent inversement les hommes et les femmes qui sont critiques vis-à-vis des idéologies religieuses et notamment de celle qui a été instrumentalisée par le salafisme (tous des intégristes chrétiens, ignorants et hypocrites, etc.) ; EN CE QUI NOUS CONCERNE NOUS NE FAISONS PAS COMME LE CORAN, NOUS N’ESSENTIALISONS PERSONNE ET SURTOUT PAS LES PAÏENS CAR IL Y A TOUTES SORTES DE PAGANISMES, depuis le paganisme philosophique et réfléchi jusqu’au panthéisme du libre penseur John Toland.
Cet essai vise donc précisément…
— NON LE VRAI ISLAM (le vôtre cher ami d’islamophile org).
— NON L’ISLAM EN GÉNÉRAL…
— dont nous avouons ne pas savoir ce qu’il est (et qui ne nous intéresse pas d’ailleurs), MAIS LES FORMES EXTRÊMES, POLITIQUES, VIOLENTES, INÉGALITAIRES, ET INTOLÉRANTES (en bref contraires aux droits de l’Homme ; car nous avouons humblement ne pas savoir ce que sont les droits de Dieu, qui ne nous intéressent pas d’ailleurs non plus) DU SALAFISME SUNNITE TRADITIONNEL (non-soufi, non-moutazilite).
Que pour différentes raisons……
NOUS DISTINGUONS SOIGNEUSEMENT DE L’ISLAM CHIITE.
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Le radicalisme chiite est en effet d’invention beaucoup plus récente que son homologue sunnite, le hanbalisme. C’est l’ayatollah Khomeiny qui a présidé à sa naissance au XXe siècle en formulant sa doctrine de la velayat-e-faqih, c’est-à-dire de la prééminence du religieux sur le politique, alors que les mollahs chiites avaient, jusqu’alors, privilégié une approche quiétiste de la question où le religieux se devait de garder une attitude neutre et prudente vis-à-vis du politique. Ce quiétisme originel du chiisme, façonné par des siècles de persécution par les sunnites, est toujours fermement représenté par le grand ayatollah Ali al Sistani, la plus haute autorité du chiisme irakien, qui s’oppose à Moqtada Al-Sadr, le leader extrémiste des chiites de Bagdad, dans la volonté de ce dernier d’importer la révolution iranienne en Irak.
L’islam ce n’est pas ses hérésies ou ses minorités comme les soufis. L’islam ce n’est pas non plus le Coran (un anti livre ça c’est sûr), l’islam c’est : le Coran + les hadiths+ la vie de Mahomet (isma)+ la tradition les concernant (sunna = 85 % des musulmans) + la réflexion des docteurs en droit musulman (charia et fiqh). Voilà quels sont les cinq vrais piliers de l’islam.
Étymologiquement parlant, « salafisme » vient du terme arabe salaf, « prédécesseur » ou « ancêtre », qui désigne les compagnons du fondateur de l’islam ainsi que les deux générations qui leur succèdent. L’expansion de l’islam est généralement attribuée à la pureté de leur foi.
Au sein du monde musulman, le mouvement salafiste contemporain fait néanmoins problème. On lui reproche, en particulier d’avoir une compréhension étroite des différents textes religieux, notamment du Coran et de la Sunna, en privilégiant une approche littéraliste, et en négligeant le contexte de ces écrits.
Le salafisme est aussi un mouvement musulman revendiquant un retour à l’islam des origines, fondé sur le Coran et la Sunna c’est-à-dire l’ensemble des hadiths, les faits et paroles prêtés à Mahomet ou à ses compagnons, en négligeant le contexte ainsi que nous l’avons dit. Or les circonstances ont beaucoup changé depuis. Nous ne sommes plus au Moyen Âge que Diable !
Le terme désigne aujourd’hui un mouvement composite fondamentaliste, constitué en particulier d’une mouvance traditionaliste et d’une mouvance djihadiste. Toutes ces mouvances affirment constituer la continuation sans changement de l’islam des premiers siècles. Les salafistes prétendent ainsi imiter Mahomet en tout, y compris dans leur façon de s’habiller ou de manger (ISMA).
La volonté de retrouver l’islam des Salafis dans toute sa pureté n’est pas récente.
On trouve chez Ahmed Ibn Hanbal, au IXe siècle, la première interprétation littéraliste de l’islam, appuyée sur un appel aux ancêtres et une condamnation des innovations théologiques (bid’a). Ibn Taymiyya au XIVe siècle y a également recours, alors que le Moyen-Orient subit les invasions mongoles. Ibn Taymiyya et ses élèves (Ibn Al-Qayyim et Ibn Kathir) sont donc une des principales références des mouvements salafistes contemporains.
Au XVIIIe siècle Mohamed ben Abdel Ouahab (1703-1792) prêchera également une lecture littéraliste et puritaine de l’islam, s’inscrivant dans la tradition hanbaliste et s’inspirant d’Ibn Taymiyya. Dans sa prédication, il s’allie avec Ibn Saoud, fondateur de la dynastie qui dirige aujourd’hui l’Arabie saoudite. Le Ouahhabisme deviendra ainsi et jusqu’à aujourd’hui la doctrine religieuse officielle de l’Arabie saoudite.
Dès lors, le salafisme devient une idéologie politico-religieuse dont la pensée sera largement diffusée successivement par les principaux prédicateurs de l’État saoudien moderne, avec à leur tête les oulémas Mohammed Ibn Ibrahim Ali Ach-Cheikh (1893-1969), Abdoul Aziz ibn Baz (1910-1999) et Mohammed ibn Salih Al-Outhaïmine (1925-2001).
Éléments théologiques communs aux courants salafistes.
Les divers courants salafistes se perçoivent comme un mouvement de renaissance de l’islam, par un retour à la foi des origines, celle des « pieux prédécesseurs ». Ils rejettent tout ce qu’ils perçoivent comme des interprétations humaines postérieures à la révélation faite à Mahomet.
Il s’agit donc d’un mouvement qui condamne à la fois les pratiques de l’islam populaire, accusées d’être des « superstitions », mais également une grande partie de la réflexion théologique musulmane, considérée comme porteuse « d’innovations » (bidah), c’est-à-dire de créations de la raison humaine s’éloignant du message divin originel. Les salafistes refusent en particulier la démocratie et la laïcité, qu’ils accusent de corrompre la foi musulmane.
À côté de cette dénonciation de tout ce qu’ils considèrent comme des « innovations » (bidah) par rapport au Coran et à la Sunna, les divers courants salafistes insistent sur le principe de l’unicité divine, taouhid. Dieu est l’unique et seul créateur (Taouhid ar rouboubiya, unicité dans la seigneurie). Tout acte d’adoration ne doit aller qu’à lui (Taouhid oul Oulouhiya, unicité dans son adoration). Tous les noms et attributs divins qui apparaissent dans le Coran et la Sunna sont acceptés, mais ne sont pas traités de façon métaphorique ou anthropomorphique (Taouhid asma oua s-sifat, unicité dans ses noms et attributs).
Le salafisme quiétiste.
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Cette tendance salafiste, développée en particulier par des imams proches du régime saoudien, refuse la voie djihadiste qui cherche à imposer un régime musulman par l’action violente et révolutionnaire. Cette voie lui semble vouée à l’échec. Une des grandes figures de cette tendance, des années 1960 jusqu’à sa mort en 1999, le cheikh Mohammed Nassirouddine al-Albani (car né en Albanie) pensait que l’action politique la plus efficace passe davantage par la prédication d’une foi régénérée, de la réislamisation des sociétés musulmanes, plutôt que par une action directement politique de prise de contrôle du pouvoir.
Pour al-Albani, il était donc nécessaire de poursuivre une stratégie de « at tasfiyatou oua tarbiyah » (purification et d’éducation) : c’est-à-dire d’une part de régénérer la foi en la purifiant des « innovations » théologiques (bidah) l’éloignant de la foi authentique, celle des origines, telle qu’il la définissait ; d’autre part, éduquer les musulmans à cette foi régénérée, de manière à ce qu’ils abandonnent toutes les pratiques religieuses jugées corrompues. C’est de la diffusion générale dans la société de cette piété musulmane que doit naître le changement politique.
Cette tendance salafiste quiétiste poursuit donc une stratégie de « réislamisation » des sociétés musulmanes à travers une prédication non violente et non directement politique, mais en recourant éventuellement au principe musulman bien connu de la dissimulation ou taqiya. Elle entend transformer ces sociétés à travers la diffusion d’une foi littéraliste qui doit les régénérer et leur donner, ainsi la prééminence dans le monde.
Ces salafistes quiétistes, souvent proches du pouvoir saoudien, critiquent les salafistes djihadistes qui cherchent pour certains à renverser la famille royale saoudienne. Ils critiquent également les Frères musulmans, accusés de ne pas suivre une pratique rigoriste de l’Islam, d’oublier le principe du taouhid, et de chercher à obtenir le pouvoir plutôt que de sauver les âmes des musulmans en transformant leurs pratiques religieuses.
La mouvance djihadiste du salafisme se refuse à limiter l’action religieuse à la prédication et fait du petit djihad le cœur de son activité. Les salafistes de cette tendance sont ainsi favorables à la lutte armée, afin de renverser les régimes des pays musulmans comme la Syrie des années 2010 qu’ils jugent impies, et y instaurer un État authentiquement islamique.
Cette branche du salafisme est née, dans les années 1980, en Afghanistan, à l’occasion de la guerre contre l’occupation soviétique. Durant cette guerre, des salafistes venus d’Arabie saoudite ont rencontré des Frères musulmans. Cela les a conduits à intégrer au discours politique des Frères musulmans la prédication littéraliste traditionnelle des salafistes, centrée sur la piété et la moralité musulmanes. Pour ces salafistes, les salafistes traditionalistes, favorables à la seule prédication, en particulier les Cheikhs proches des autorités séoudiennes, comme Ibn Baz et Ibn Salih Al-Outhaymine, sont alors apparus comme des hypocrites, à la solde des États-Unis. Ces salafistes critiquent plus encore les Frères musulmans qui sont condamnés en raison de leur foi jugée insuffisamment littéraliste et, pour les plus modérés des Frères, pour leur engagement dans le jeu politique d’États jugés impies et devant être éliminés par la force.
Cette tendance poursuit donc une stratégie révolutionnaire violente qui vise à renverser les États des pays musulmans comme la Syrie dans la deuxième décennie de ce siècle afin d’instaurer un État islamique par la force. Cela les conduit également à entreprendre des actions violentes à l’encontre des pays occidentaux perçus comme les soutiens de ces États, en particulier les la Russie ou les États-Unis. Ils sont appelés takfiri ou kharidjites par les salafistes quiétistes à cause des crimes de guerre qui les caractérisent : profanation de tombes, destruction des mausolées, et de lieux de cultes ; atrocités, parfois filmées, utilisées pour intimider et terroriser les populations.
Chacun de ces courants salafistes prétend évidemment incarner le vrai salafisme et ils se critiquent vivement voire de manière virulente.
NDLR. « Après avoir vaincu le fascisme, le nazisme et le stalinisme, le monde fait face à une nouvelle menace globale de type totalitaire : l’islamisme. Nous, écrivains, journalistes, intellectuels appelons à la résistance au totalitarisme religieux et à la promotion de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité pour tous… Nous plaidons pour l’universalité de la liberté d’expression, afin que l’esprit critique puisse s’exercer sur tous les continents, envers tous les abus et tous les dogmes. Nous lançons un appel aux démocrates et aux esprits libres de tous les pays pour que notre siècle soit celui de la lumière et non de l’obscurantisme ».
Ayaan Hirsi Ali, Chahla Chafiq, Caroline Fourest, Bernard-Henri Lévy, Irshad Manji, Mehdi Mozaffari, Maryam Namazie, Taslima Nasreen, Salman Rushdie, Antoine Sfeir, Philippe Val, Ibn Warraq.
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LE PROBLÈME DES SOURCES (PAS CELLE DE ZEM-ZEM).
Il y a très peu d’éléments du Coran concernant la vie de Mahomet, alors que les 4 évangiles en contiennent de nombreux sur la vie de Jésus. La vie de Mahomet nous est donc connue par deux séries de sources.
— Une biographie officielle dans tous les sens du terme (il s’agissait de répondre à une demande du calife Mansour).
Les premiers rudiments d’évangile apparaissent vers 70 de notre ère soit quelques décennies après la mort du grand rabbi nazaréen que fut Jésus. Dans le cas du fils d’Amina devenu le dernier des prophètes il faudra attendre environ 150 ans et la Sira d’Ibn Ichaq.
Quatre copies de sa Sirât Rasûl Allah ont été faites.
Une première copie due à Salama ibn-Fadl al-Ansari, qui cite l'original d'après Ibn Fadl.
Une deuxième copie de l'original fut écrite par Younoûs b. Bukayr. Elle fut employée par Ibn al-Athir dans son Ousoud al-Ghâbah, ce qui veut dire que jusqu'au premier tiers du XIIIe siècle encore une copie complète de l'original existait.
Deux copies enfin par Al-Bakka’î, un de ses élèves, ont été reprises et éditées par Ibn Hichâm vers 834. Or ce dernier reconnaît lui-même avoir procédé à un certain filtrage.
La première hagiographie de Mahomet fut donc celle que rédigea Ibn Ichâq vers 767. Le texte en a été perdu, mais il fut largement repris par un second biographe, Ibn Hichâm (vers 834) qui le cite abondamment, tout en déclarant dans sa préface qu’il en a rejeté certaines données douteuses selon lui.
Dieu merci, les mœurs de l’époque n’ayant rien à voir avec les nôtres, Ibn Hicham a cru faire œuvre utile en gardant de cette sira ou biographie de Mahomet nombre d’épisodes guerriers devenus aujourd’hui bien embarrassants, mais très instructifs. Cette compilation fournit donc maints détails permettant de mieux comprendre certains passages du Coran.
— Mais nous avons aussi les indications biographiques contenues dans les millions de hadiths recueillis plusieurs générations après sa mort. Les recueils de hadiths les plus connus sont celui de Boukhari, celui de Muslim et celui d’Abou Daoud.
Les chiites ont en commun avec les sunnites les hadiths compilés par Al Boukhari, mais ont également leurs propres recueils de hadiths plus tardifs, recueillant principalement les paroles des imams de la famille de Mahomet (Ali et Fatima).
Ils jouent un grand rôle dans l’élaboration de la Charia. Par exemple pour ce qui est de la lapidation. « Découvertes » ou « fabrications » de ces hadiths ont évidemment été instrumentalisées ou encouragées, voire téléguidées, par les différents pouvoirs en place. Les chiites (20 %) ont donc leurs propres recueils de hadiths, mais ils concernent moins Mahomet lui-même que son cousin et gendre Ali. Il y a dans ces millions d’anecdotes des choses peu vraisemblables. Là encore, donc se pose la question de leur authenticité. Un expert de Téhéran estimait jadis à guère plus de 30 ou 40 (sur des millions) le nombre de hadiths authentiques.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir avec le travail de R.B. Serjeant sur la prétendue Constitution de Médine, quand on parle du véritable islam ou disons de l’islam historique, des faits ayant réellement existé, il nous faut donc toujours nous méfier des hagiographies infantilisantes et larmoyantes et procéder à des recoupements.
Un autre ensemble de données sur la biographie de Mahomet sera donc constitué par ce que l’on appelle en arabe les « asbab al-nouzoul » ou « circonstances de la révélation ».
Le Coran est un corpus dont les rares indications historiques ne sont qu’allusives : aucun cadre narratif ne précise de qui ni de quoi il s’agit. II fallait donc fournir aux textes coraniques le cadre narratif qui leur faisait défaut et pouvoir dire que c’était en telle et telle circonstance que tel passage du Coran, tel chapitre, tel verset était « descendu » sur le prophète.
On retrouve d’ailleurs un peu le même phénomène avec le Nouveau Testament, et certains passages des évangiles ; qui ont visiblement été introduits dans le texte original afin de justifier des prises de position postérieures en matière de rituel ou d’organisation. Voir notre essai sur le sujet.
Les biographes anciens de Mahomet vivaient à une époque trop éloignée de son temps pour avoir de vraies données ; loin d’être objectifs, ces éléments reposaient sur de la fiction tendancieuse ; souvent de l’autojustification des plaidoyers pro domo d’avocat marron ou des pleurnicheries niveau cour de récréation, du genre « ce n’est pas moi qui ai commencé c’est l’autre ! » À les en croire, les musulmans auraient toujours été le peuple le plus persécuté au monde et du lointain sud de l’Espagne aux lointaines rives de l’inde ils n’auraient bâti leur immense empire qu’à coups de légitimes guerres défensives « bien obligées ».
Le but de ces hagiographes larmoyants n’était pas de connaître les choses telles qu’elles s’étaient passées réellement, mais de construire une vision idéale du passé. Sur le canevas vide des versets
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du Coran qui avaient besoin d’être expliqués, les érudits ont brodé avec une grande hardiesse des scènes adaptées aux désirs ou aux idéaux de leur groupe particulier.
Contrairement aux prétentions affichées en sens inverse en effet, la personnalité de Mahomet a donc joué un rôle considérable dans l’élaboration de la nouvelle religion. Dans le Coran Dieu est même sans arrêt obligé de prendre la défense de Mahomet contre les accusations qui fusent de toutes parts à son sujet.
Le cas le plus flagrant de ce phénomène est celui des sourates 33 et 66 qui ne peuvent s’expliquer que par le désir de Mahomet d’avoir des relations sexuelles avec sa belle-fille Zénobie (Zeinob). Ce qui a eu pour lourde conséquence l’interdiction de l’adoption plénière en terre d’Islam et la survalorisation raciste des seules filiations biologiques.
Nous ferons donc l’impasse sur les données à caractère hagiographique et nous nous contenterons ici des grandes lignes ou données factuelles vraisemblables ce qui ne veut pas dire avérées , en leur appliquant le principe méthodologique bien connu élaboré par les chrétiens avec la crucifixion : « ce qui est embarrassant, ce que personne n’aurait eu l’idée d’inventer tellement ça nuit à l’image de marque, mais qui s’est quand même imposé comme une constante dans les récits… n’a pu l’être que parce qu’il y avait eu trop de témoins ».
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L’ARABIE D’ABD MANAF DIT ABOU TALIB ONCLE DE MAHOMET.
La religion la plus sincère ou la plus intéressée devait jouer un grand rôle dans La Mecque du temps de Mahomet, et ceci explique sans doute cela.
Il reste maintenant à dire deux mots d’une question explosive par excellence : quelles étaient les croyances religieuses de Mahomet avant ses premières visions à ce sujet, survenues vers l’âge de quarante ans ?
La partie de la vie de Mahomet antérieure au début de la « Révélation » et donc païenne par définition a toujours constitué un angle d’attaque idéal pour les chrétiens. La question, anodine pour nous, et presque sympathique, ne fait pas rire les pieux musulmans, car elle contredit le dogme musulman fondamental de l’isma : l’idée que le prophète fut toujours impeccable donc qu’il n’a jamais été souillé par le paganisme.
La honte est une force redoutable dans l’établissement de toute idéologie religieuse. Or ici, contrairement aux autres fondateurs de grandes religions, il est évident que Mahomet méprise son état antérieur qu’il appelait la Djahiliya (la barbarie, les âges sombres).
Pour Jésus la question ne se pose pas : Jésus était juif et le resta jusqu’à sa mort. Il n’eut même pas conscience ni même la volonté de fonder une nouvelle religion.
Mais pour Mahomet il en va différemment.
A cette question les musulmans pieux répondent donc : Mahomet était un hanif, c’est-à-dire une sorte de monothéiste avant la lettre, mais dans ce bref exposé sur la Djahiliya (l’Arabie d’avant l’islam) faute de temps nous glisserons sur les dogmes du genre…
— La véritable religion a été révélée par Dieu lui-même à Adam et Eve.
— Adam et Abraham ont habité La Mecque et y ont construit la Kaaba.
— La tribu de Mahomet avait gardé des éléments venus de ce monothéisme abrahamique primitif.
Nous emprunterons plutôt notre réponse au site internet “Islam-documents”. Sans hésiter à recourir à des sources musulmanes classiques, mais aussi des sources chrétiennes qui évidemment ne sont pas susceptibles de tomber dans l’hagiographie infantilisante et larmoyante, bien au contraire.
Il s’y trouve ce qu’il faut de malveillance, mais elles peuvent être parfois plus fiables que les sources musulmanes elles-mêmes. Ce qui les amuse, c’est justement la partie d’avant la “révélation”, qui à elle seule, disqualifie Mahomet. Car le héros de leur roman initiatique ou de leur plaidoirie est d’emblée bénéficiaire du statut de Messie fils de Dieu alors que Mahomet lui met quarante ans et plus pour se révéler. Ce retard dans la vocation est donc pour eux un signe de non-sincérité.
Il était en effet impossible à un Arabe des années 600 de se maintenir en dehors d’une quelconque religion : soit il suivait les coutumes de sa tribu, et vénérait des dieux, soit il était plus ou moins juif ou chrétien, même très vaguement. S’il n’était pas dans l’une ou l’autre de ces situations, il était alors athée, et ce statut était impossible à vivre.
Il est évident en effet dans un milieu aussi structuré que celui des tribus arabes du 6e siècle, aux relations personnelles si affirmées, Mahomet n’a pu que pleinement vivre avec les siens pendant les 40 premières années de sa vie.
Les textes qui ont échappé à la censure sont rares et difficiles d’accès, mais le Coran pourtant, reconnaît lui-même indirectement cette évidence et la vie de Mahomet aussi, car tout l’activisme religieux de Mahomet tendit à confirmer puis renforcer la prééminence du sanctuaire mecquois sur tous les autres sanctuaires arabes.
L’examen des sources permet de distinguer soit de véritables preuves de sa participation y compris au culte des dieux, soit la transformation par la tradition de rituels coutumiers, soit des rituels suivis tels quels, mais dans une intention différente.
Dans la masse incontrôlable des informations charriées par la Tradition islamique, quelques rares et précieux éléments sont passés à travers le crible des censeurs, et sont parvenus jusqu’à nous. Ils ont dû abonder dans la première version de la biographie officielle de Mahomet, la Sira écrite par Ibn Ichaq vers 767. Le fait qu’un autre auteur l’ait réécrite et corrigée (Ibn Hicham) confirme cette impression. La version originale retrouvée à l’état de fragments au Maroc par l’orientaliste anglais Alfred Guillaume recèle justement quelques-unes de ces données exceptionnelles.
Ce sont donc les biographies, surtout dans leurs versions non expurgées, qui livrent les informations ; dans les hadiths, le sujet est brûlant, et il est ignoré.
Mais la vérité comme d’habitude se trouve dans le Coran.
Corpus osmanien : 4, 113. « Dieu a fait descendre sur toi l’Écriture et la sagesse. Il t’a enseigné ce que tu ne savais pas… »
Corpus osmanien : 42, 52. « Tu ne connaissais pas ce que sont l’Écriture et la foi, antérieurement ».
Corpus osmanien : 28, 87. « Qu’ils ne te détournent pas des signes de Dieu après qu’elles t’ont été révélées ! Appelle ton seigneur ! Ne sois point parmi les associateurs ! »
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Corpus osmanien : 40, 55. « Demande pardon pour ton péché et exalte la louange de ton seigneur, soir et matin ! »
Et enfin…
Corpus osmanien : 93,7 : « Dieu ne t’a-t-il point trouvé égaré » ?
Le terme employé est celui de DALLAN. L’exégèse musulmane tente de rejeter cette évidence, en feignant de croire que Mahomet s’était vraiment un jour perdu dans le désert.
Autres indices.
— Les sacrifices offerts aux dieux (ou déesses) par Mahomet jeune.
Hicham ibn al Kalbi, le livre des idoles (kitab al asnam). Traduction de l’arabe Nabih Amin Faris 1952.
« On nous a dit que l’apôtre de Dieu a un jour parlé d’al Ouzza en disant : j’ai offert une brebis blanche à Al Ouzza du temps où je suivais la religion de mon peuple ».
Les Couraïchites avaient coutume de tourner autour de la Kaaba en disant : par Allat al Ouzza et Manaf la troisième des idoles. Ce sont vraiment les plus hautes déesses dont l’intercession peut être recherchée ».
On les appelait aussi « les filles d’Allah » et elles étaient censées intervenir auprès de Dieu. Quand l’apôtre de Dieu fut envoyé en mission, Dieu lui révéla (à leur sujet) ce qui suit : Avez-vous considéré Allat et Al Ouzza, etc. ».
Sahih al-Boukhari 7, 407. « Narré par Abdoullah : l’apôtre de Dieu a déclaré qu’il avait rencontré u jour Zaïd bin Amr Noufail dans un endroit situé près de Baldah et ce avant que l’apôtre de Dieu ait reçu l’inspiration divine. L’apôtre de Dieu présenta un plat de viande (qui lui avait été offerte par les païens) à Zaïd bin Amr, mais Zaïd refusa d’en manger et dit (aux païens) : « Je ne mange pas de ce que vous sacrifiez sur les autels de pierre (ansabs) et je ne mange plus que ce qui a été abattu au nom de Dieu ».
Boukhari, dans son recueil marqué par l’obsession de l’orthodoxie, tente de remettre de l’ordre dans cette confusion gênante. Mais malgré le fait que les déclarations entre parenthèses – « qui lui avait été offerte par les païens » et « aux païens » – ne font pas partie du texte original, il n’en demeure pas moins que Mahomet a mangé de la viande sacrifiée aux dieux alors que Zaïd lui a refusé d’en manger.
Alfred Guillaume nous rapporte aussi une tradition enregistrée par le premier biographe musulman, Ibn Ishaq, mais non publiée.
« Ibn Ishaq : 'On m’a appris que l’apôtre de Dieu, parlant de ibn Amr ibn Noufaïl, a dit : 'Il a été le premier à me reprocher d’adorer des idoles et m’a interdit de le faire. Je venais d’al-Ta'if avec Zaïd ibn Haritha lorsque je suis passé devant Zayd ibn 'Amr sur les hauteurs de la Mecque, car les Couraïchites avaient dénoncé publiquement son abandon (shaharathou) de leur religion, de sorte qu’il avait rompu avec eux et (était resté) sur les hauteurs de la Mecque. J’y suis allé et je me suis assis avec lui. J’avais avec moi un sac de viande provenant de nos sacrifices à nos idoles que Zayd ibn Haritha portait, et je le lui en ai offert. J’étais un jeune garçon à l’époque. Je lui ai dit : « Mange un peu de cette nourriture, ô, mon oncle. Il m’a répondu : « Mon neveu, c’est une partie des sacrifices que tu offres à tes idoles, n’est-ce pas ? Quand j’eus répondu que c’était bien le cas, il m’a dit : « Si tu avais demandé aux filles d’Abdou'l-Moutalib, elles t’auraient dit que je ne mange jamais de ces sacrifices et que je ne veux rien avoir à faire avec. Puis il me blâma pour ça, ainsi que ceux qui adorent les idoles et leur offrent des sacrifices, en disant : « Elles sont inutiles : elles ne peuvent faire ni bien ni mal », ou quelque chose comme ça. L’apôtre a ajouté : « Après avoir appris ça, je n’ai jamais touché à une de leurs idoles et je ne leur ai jamais offert de sacrifice jusqu’à ce que Dieu m’honore de son apostolat ». (Guillaume, Nouvel éclairage sur la vie de Mahomet).
Commentaire d’Alfred Guillaume : « Cette tradition montre clairement comment Mahomet enfant a été influencé par un monothéiste dont nous ne savons que peu de choses. L’interdiction de manger de la viande offerte aux idoles est bien sûr d’origine juive, mais comme elle a été reprise par le christianisme [non paulinien], il est impossible de dire si Zaïd était un prosélyte juif ou chrétien. La tradition arabe le représente comme un homme insatisfait à la fois du judaïsme et du christianisme et totalement hostile au paganisme » (Alfred Guillaume Islam)
À côté des rituels, qu’il respecte nécessairement, Mahomet était donc neutre vis-à-vis du système arabe polythéiste et ritualiste de son époque et de sa tribu. Un exégète comme Tabari l’admet d’ailleurs sans ambiguïté dans son commentaire (tafsir) sur le verset 7 de la sourate 93, mais la Sira non expurgée d’Ibn Ishaq reste la source fondamentale. Le Sira original est en effet toujours capable de distinguer le paganisme de la souillure du paganisme.
Dans ses phrases, simples en apparence, on retrouve toutes les contradictions qui affectent Mahomet avant sa transformation en statue du Commandeur.
Cette tradition a été complètement supprimée de la recension d’Ibn Hicham, mais on en trouve des traces dans la Sira (p.146) et Boukhari. Ce témoignage est capital, car il nous montre à nouveau
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Mahomet pratiquant la « religion de sa tribu », selon l’expression consacrée. Il prouve que Mahomet n’est absolument pas un hanif, un précurseur de la religion monothéiste, à ce moment-là, car il est représenté justement au moment où il se rend compte de la rupture qu’il doit accomplir avec le paganisme (sous l’influence de ces hanifs justement). La maladresse des documents prouve indirectement qu’il avait jusque-là suivi la religion de sa tribu puisqu’il rompt avec elle.
L’historien israélien M.J. Kister a consacré un article entier à cette question passionnante. Il y constate la grande quantité de versions divergentes ayant relation avec l’événement, signe manifeste de nervosité et d’angoisse de la part des auteurs musulmans, qui se rongent les poils de barbes. Les chiites, eux, ont rejeté totalement de tels récits, qui sont autant d’attaques contre la notion d’impeccabilité (isma) du personnage, y compris avant la révélation.
Quand Mahomet « jeune » s’adonne aux retraites spirituelles typiquement païennes (tahannouth, sur le mont Hira ou Nour) évoquées par certaines traditions (pas toutes), il n’abandonne pas pour autant la religion traditionnelle de sa tribu : en d’autres termes, il continue à tourner avec les autres autour de la Kaaba.
Ibn Hisham, As-Sira an-Nabaviyya. Biographie du prophète. « L’apôtre se retirait à Hira chaque année pour prier pendant un mois en faisant le tahannouth comme c’était la coutume chez les Couraïchites du temps du paganisme. Le tahannouth est une pratique religieuse. Abou Talib a déclaré… Chaque année, au cours de ce mois-là, l’apôtre se retirait pour prier et donnait à manger aux pauvres qui venaient-là. Le mois une fois écoulé il sortait de sa retraite, mais avant de rentrer chez lui il se rendait à la Kaaba et en faisait le tour sept fois ou autant qu’il plaisait à Dieu ; ensuite seulement il rentrait chez lui, jusqu’au jour où Dieu…… ».
Le fait est d’importance : il montre en effet que Mahomet participait toujours alors aux rituels de sa tribu dans le sanctuaire commun, la Kaaba, bien qu’ayant déjà eu ses premières visions. Les conséquences de celles-ci ont dû en effet être lentes à se concrétiser au niveau du rite et du comportement social. Pour le public du sanctuaire, rien ne différenciait ces fidèles des autres participants au rituel.
Le verset 189 du chapitre 2 du Coran (la piété ne consiste pas à pénétrer dans vos maisons par-derrière. La piété consiste à craindre Dieu. Entrez dans vos maisons par les portes habituelles…) laisse à penser que Mahomet, comme d’autres citoyens de la Mecque, a fait partie d’une confrérie vouée au sanctuaire de la Kaaba : les Houms, des dévots prêts à tout pour assurer la prééminence de la Kaaba sur les autres sanctuaires mecquois, Safa, Maroua, Arafat, Mouzdalifa, etc. Bref ce sont donc de fervents partisans de l’hénothéisme ou de la monolâtrie, de la domination (qui en devient exclusive)) d’un dieu sur les autres.
La vie de Mahomet. Traduction de la Sirat rassoul Allah d’Ibn Ichaq par Alfred Guillaume. « Les Houms respectaient strictement les mois sacrés et ne faisaient jamais de tort à leurs protégés ni de mal à quelqu’un. Ils tournaient autour de la Kaaba habillés. Si l’un d’entre eux avant ou au début de l’islam était dans un état tabou, s’il vivait dans une habitation en dur, c’est-à-dire habitait dans une maison ou un village, il creusait un trou à l’arrière de sa maison et entrait et sortait par-là afin ne pas passer la porte…… On les appelait Houms à cause de leur rigueur en matière de religion… L’année d’Houdaïbiya, le prophète revint chez lui. Un des Ansar qui l’accompagnait s’arrêta devant sa porte en expliquant qu’il était Ahmasi. L’apôtre lui répondit : « Mais moi aussi je suis un Ahmasi. Ma religion et la tienne sont les mêmes », alors l’Ansar entra dans la maison par la porte en voyant l’apôtre faire de même ».
CONCLUSION.
Avant la césure de la « révélation », le comportement de Mahomet est strictement païen. Après elle, il est complexe et ambigu, puisqu’on y retrouve des actions, des paroles, des pensées qui restent dépendantes du système ancien, d’autres issues du christianisme, du judaïsme, d’autres enfin qui sont de pures et simples inventions.
Signé Abd al Uzza, pour le site internet Islam-Documents.
But et philosophie de ce site selon ses auteurs. Les religions et les dieux sont des inventions humaines, sans exception aucune. L’islam n’échappe pas à cette loi d’airain et quiconque la conteste et se prétend scientifique est un homme dont la foi n’a rien à voir avec la raison.
Pour résumer, et à titre d’exemple ci-dessous quelques axiomes de ce site.
1-L’islam est un agrégat de rituels, de sanctuaires et de divinités arabes, associés à une tradition juive hétérodoxe, et à des tendances chrétiennes marginales, le tout recomposé de façon à sembler un ensemble plus ou moins cohérent.
2-L’islam est une idéologie qui s’est élaborée pendant plusieurs décennies voire siècles, au gré des expansions, des schismes, des influences. L’islam a peu à peu, au cours de ce processus, reconstitué son propre passé, selon les impératifs qui lui étaient contemporains.
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3-Le personnage de Mahomet est très largement synthétique, et idéalisé, jusqu’à ne plus sembler être un homme. Il y a sans doute eu un véritable individu à la base, un réformateur arabe, très judaïsé, et redoutable chef de guerre, mais nous ne savons presque rien de lui. Ensuite, pour concurrencer les Abraham, Moïse, Mani et Jésus, on a fabriqué un Mahomet.
4-Le Coran est un recueil de documents datant d’un siècle avant et d’un siècle après Mahomet, témoin de l’état religieux et culturel du Proche-Orient de cette époque. Le tout a été hâtivement mis en forme, de manière à donner aux conquérants arabes de quoi en remontrer les juifs et aux chrétiens, qui avaient leurs livres.
À partir de là, il est loisible de se mettre à réfléchir, et de présenter toutes les thèses possibles. Proposées puis rejetées, puis transformées, elles forment justement la démarche scientifique, qui doit se développer hors de toute contrainte. Or, quiconque connaît le monde universitaire français sait que les recherches sur les véritables origines de l’islam sont découragées ou marginalisées, voire taboues.
Ce site internet a donc pour but de provoquer une réaction, en amassant de la documentation, pour que chacun s’en empare, et que la recherche se libère de toutes contraintes.
Ensuite, nous tenons à présenter, pour ce qui est de la méthode, comment une religion qui se construit élabore sa propre Histoire en même temps que sa conception de l’Homme, du monde et des autres. Elle le fait en publiant une multitude de documents, et nous tenons à en présenter le plus possible sur ce site, afin de contrer celles et ceux qui veulent imposer leur vision de la doctrine musulmane en n’en présentant que des extraits soigneusement choisis. Par la masse de la documentation, par la critique, par l’ironie parfois, nous visons à ce que la recherche historique sur les origines de l’islam ne soit pas confisquée par quelques tartuffes.
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LA DOCTRINE DE L’I’DJAZ (DU CORAN).
L’inimitabilité ou la nature miraculeuse du Coran (arabe : Ida) est le dogme qui veut que le Coran, en tant que révélation divine faite à Mahomet, ne puisse être imité, que ce soit dans la beauté de sa langue ou dans les idées qu’il exprime. D’élaboration relativement tardive, ce dogme a fait l’objet de nombreuses divergences avant de se fixer.
Ce dogme de l’inimitabilité du Coran est évidemment à rapprocher de celui de « l’infaillibilité morale du Prophète » (isma).
L’inimitabilité (i’djâz) du Coran est un article de foi qui fut établi par le grammairien ar-Roummani (mort en 994), mais l’auteur irano-arabe Ibn al-Mouqaffa (720-757) avait déjà été impliqué dans des polémiques concernant cette caractéristique du Coran.
Fondements coraniques.
Saint Coran chapitre 2, verset 23 : « Si vous êtes dans le doute à propos de ce que nous avons fait descendre sur notre serviteur, venez donc avec une sourate semblable ».
Saint Coran chapitre 5, verset 3 : « Aujourd’hui j’ai rendu votre religion parfaite, j’ai parachevé ma grâce sur vous, j’agrée l’islam comme étant votre religion ».
Saint Coran chapitre 6, verset 114 : « chercherai-je un autre juge que Dieu ? C’est lui qui a fait descendre sur vous ce Livre au contenu parfaitement expliqué ».
Saint Coran chapitre 10, verset 38 : « Produisez-donc une sourate semblable [à celle – ci] ».
Saint Coran chapitre 11, verset 13 : « Produisez donc une dizaine de sourates façonnées comme celle-ci ».
Saint Coran chapitre 17, verset 88 : « Quand bien même hommes et djinns s’uniraient pour apporter le semblable de ce coran, ils n’en sauraient apporter un comparable, même s’ils se soutenaient les uns les autres ».
Une grande partie du complexe de supériorité de certains musulmans repose donc sur ce mantra ou sur cette méthode Coué de l’inimitabilité du Coran, Parole de Dieu faite livre, comme le Christ est Parole de Dieu faite homme pour les chrétiens.
Couplé avec l’idée que l’on trouve ainsi exprimée : « Vous formez la meilleure communauté suscitée pour les hommes. Vous interdisez le mal et vous ordonnez le bien » (chapitre 3, verset 110 du saint Coran), tout cela fait peur, à tout le moins a de quoi légitimement inquiéter.
Ce dogme a aussi été mis en avant par certains arabophones pour interdire la traduction du Coran. Ils s’appuient pour cela sur le lien entre religion, langue et écriture sacrée. Certains courants de l’islam prétendent d’ailleurs toujours que le Coran ne peut exister qu’en arabe et qu’il ne peut pas et ne devrait pas être traduit. Cette insistance sur la langue arabe peut évidemment donne naissance à toutes sortes de dérives racistes nationalistes ou xénophobes du moins aux yeux des populations non arabophones.
NDLR. En plus d’être inimitable ou insurpassable (i’djaz) le Coran prétend être complet, prétend que rien ne manque dans son corpus. Verset 2, chapitre 2. « Voici le Livre, il ne renferme aucun doute ». Verset 38, chapitre 6. « Nous n’avons rien négligé dans le livre ». Verset 111, chapitre 12. « Exposé détaillé de tout chose ». Verset 89, chapitre 16. « Éclaircissement de toute chose ». Etc.
ABSURDITÉ ET NON-SENS DE CE DÉFI.
Puisque tout repose sur un défi qui n’a ni règle, ni juge, ni sens, l’affirmation du caractère indépassable ou inimitable du corpus osmanien (i’djaz al Qurani) n’est donc qu’un dangereux mantra.
Notons en effet qu’on ignore les critères qui, comme dans un concours (par exemple pour noter des pur-sang), permettraient de départager les concurrents. Il ne servirait donc à rien de présenter une œuvre susceptible de rivaliser avec les qualités littéraires ou spirituelles supposées du corpus osmanien. En effet, sans critères ou règle, aucun jugement ne peut être prononcé…
Si les critères du jugement ne sont pas donnés, les juges éventuels eux non plus ne sont pas désignés. Sachant que ces juges ne sauraient être des musulmans, puisque l’on ne peut être à la fois juge et partie, quels juges les musulmans sont-ils prêts à accepter pour déterminer si ce défi aura été ou non relevé avec succès ?
La troisième raison est qu’un chef-d’œuvre est nécessairement inimitable en soi, du fait qu’il est toujours l’œuvre d’un auteur singulier ayant une sensibilité, une culture et des dons naturels propres. Deux génies ne se ressemblent pas et toute imitation de leur œuvre ne peut être qu’un plagiat. C’est pourquoi on ne peut établir un classement entre eux sans faire appel à l’arbitraire de la subjectivité. Les chrétiens pourraient tout aussi bien présenter le style de la Bible comme indépassable, les mormons faire de même pour le Livre de Mormon, les hindous pour les Vedas, les taoïstes pour le Tao-Té-King, etc.
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De toute façon si les musulmans répètent à l’envi le défi qu’il est impossible d’imiter le corpus osmanien, cela ne signifie pas pour autant qu’ils permettent une telle imitation. Toute personne qui propose un ouvrage concurrent au Coran subit les pires critiques et risque sa vie comme ce fut le cas du grand prophète rival d’Arabie centrale, Moussaïlima (mort en 633) et avant lui d’Al Nadr Ibn al-Harith le grand poète de la Mecque (mort en 624)
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MAIS TOUT D’ABORD DE QUEL TEXTE PARLONS-NOUS ?????
HISTOIRE DE L’ÉDITION DU CORAN.
Cette affirmation de l’idjaz du Coran outre le caractère moralement inacceptable de ses conséquences en ce qui concerne les relations humaines puisqu’elle induit un incontestable sentiment de supériorité chez les musulmans pieux, convaincus, intégristes, pose problème. Voyons cela ensemble. Et tout d’abord de quoi parlons-nous ?
D’anciennes versions du Coran nous sont parvenues, tel le Codex de Samarcande (daté de 654), conservé au musée Topkapi d’Istamboul ; le Codex de Londres (daté de 772), conservé au British Museum ; ou encore les Corans découverts en 1972 dans la Grande Mosquée de Sanaa (Yémen), datés des deux premières décennies du 8e siècle. Elles contiennent toutes des variations textuelles et graphiques importantes par rapport au Coran actuel (environ 750 pour les deux premiers) et un ordre des chapitres différent. C’est ainsi qu’après avoir étudié les manuscrits de Sanaa, Gerd-Rüdiger Puin a pu écrire que le corpus osmanien « était une sorte de coquetel de textes qui n’étaient déjà pas entièrement compris même à l’époque de Mahomet. Beaucoup d’entre eux peuvent même être plus vieux que l’islam lui-même d’une centaine d’années. Même dans les traditions islamiques, il existe une énorme quantité d’informations contradictoires, y compris un important substrat chrétien ».
Selon la tradition musulmane, Le Coran aurait été écrit par Dieu lui-même avant la création du monde, dans l’arabe le plus clair (almoubinou chapitre 12, versets1-2), parce que Dieu parle arabe. Tout musulman contestant cette affirmation est hérétique et mérite la mort. Or pour les chercheurs occidentaux, y compris pour ceux qui reprennent la thèse théologique musulmane, les particularités linguistiques du texte coranique font problème et entrent mal dans le système de la langue arabe. Car si la langue arabe CLASSIQUE ET LITTÉRAIRE n’existait pas à l’époque supposée de la descente du Coran, existait l’araméen.
« Chaque prophète envoyé par nous ne s’exprimait, pour l’éclairer, que dans la langue du peuple auquel il s’adressait. » (14.4). Parce que cela aurait eu un intérêt de s’adresser à un peuple dans une langue qu’il ne connaît pas, ou bien s’agit-il ici de justifier la prédication en arabe d’un texte écrit en araméen ? Le terme même de « Coran » et la majeure partie du vocabulaire de la langue arabe viennent du syro-araméen, la langue de culture alors dominante dans toute l’Asie occidentale et utilisée par les chrétiens du nord de l’Irak (siège épiscopal dès 410).
Si le Coran est un livre descendu (3,7) en un arabe parfait (12, 2 ; 26 ,195 ; 41, 44), comment expliquer qu’on y trouve entre 107 et 275 mots et suffixes grammaticaux qui ne sont pas arabes ? Afin de surmonter cette difficulté, plusieurs hypothèses ont été proposées, selon lesquelles l’origine de la langue coranique se trouverait dans un dialecte – disons plutôt une « koinè (langue commune) vernaculaire » – de l’Arabie occidentale marqué par l’influence du syriaque, et donc de l’araméen.
La péninsule arabique, où le Coran est censé être né, n’était pas fermée aux idées véhiculées dans la région au sens large du terme. Quand Mahomet rapportait ses premières révélations, un de ses opposants objectait qu’il avait déjà entendu cela (83,13 ; 8,31…). Dans un autre passage du Coran, il est reproché à Mahomet de se faire apprendre cela par un étranger qui parlait soit un mauvais arabe soit une autre langue (16,103).
Il est vrai qu’un grand nombre d’expressions réputées obscures du Coran s’éclairent si l’on retraduit certains mots apparemment arabes à partir du syro-araméen, la langue de culture dominante au temps. Certains spécialistes reconnaissent dans le Coran des traces évidentes de syriaque. À commencer par le mot Quran lui-même qui, en syriaque, signifie « recueil » ou « lectionnaire ». Sans l’influence syriaque comment comprendre que le Coran a pu reprendre le thème des sept dormants d’Éphèse qui est d’origine chrétienne ? De plus, la christologie du Coran est une christologie basse influencée par certains évangiles apocryphes. On peut donc penser que le groupe dans lequel le Coran primitif a vu le jour était l’un des rejetons de groupes judéo-chrétiens attachés à une christologie pré-nicéenne, avec aussi quelques accents manichéens.
Verset 12 du chapitre 46 : un livre confirmant les autres, écrit en arabe.
Il y a eu au 19e siècle en France des Celtomanes comme Le Brigand, Le Clec'h, La Tour d’Auvergne, Bullet, Pezron (Antiquité de la Nation et de la langue celtes autrement appelez Gaulois) ayant été jusqu’à dire que le breton était la langue originelle de l’Humanité, que Dieu avait parlé en Breton à Adam et Ève quand ils vivaient encore au paradis terrestre. Dans le même ordre d’idée, il est inexact de relever que le dogme musulman fondamental du Coran incréé en arabe est un article de foi n’ayant rien à voir avec la Raison. Il serait plus juste de dire que cette idée est une offense à la raison humaine. Comment penser un seul instant que la langue maternelle de Dieu ou de l’Humanité ait été
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l’Arabe. Ou l’Hébreu ? Ou le Javanais ? Je laisse une telle aberration, une telle régression intellectuelle, aux racistes de tout poil.
Il va de soi que la langue de Dieu ne peut pas être plus l’Arabe qui n’existait pas à l’origine du monde qu’une autre langue et que de toute façon Dieu s’il existe n’a pas besoin du truchement d’une langue humaine pour se faire comprendre.
Ce qui est intéressant c’est que cette affirmation vient en réponse à l’objection suivante : « Ils disent : c’est seulement un mortel qui l’instruit ! Mais celui auquel ils pensent parle une langue étrangère » (chapitre 16, verset 103).
L’insistance sur le fait que c’est du « bon » arabe est peut-être simplement destinée à souligner la qualité d’une éventuelle traduction à partir de documents écrits en syriaque ou en un quelconque dialecte de l’araméen.
Chapitre 16, verset 103 : le Coran est du pur arabe…
Il n’y a qu’une seule explication vraisemblable à cette affirmation contradictoire avec la notion de Coran incréé (car il va de soi que la langue maternelle de Dieu ne saurait être l’arabe pas plus que l’hébreu ou le Chinois) : faire oublier, sous l’effet de la répétition ou de la méthode Coué, que des pans entiers des pseudo-révélations divines faites à Mahomet sont en fait des traductions ou des emprunts à des documents écrits en araméen voire plus précisément peut-être en syriaque.
Il existe en effet dans le Coran des passages visiblement inspiré du christianisme de l’époque. En voici un exemple.
Verset 286, chapitre 2.
« Dieu n’impose à chaque homme que ce qu’il peut porter.
Le bien qu’il aura accompli lui reviendra,
Ainsi que le mal qu’il aura fait.
Notre Seigneur !
Ne nous punis pas pour des fautes commises
Par oubli ou par erreur.
Notre Seigneur !
Ne nous charge pas d’un fardeau semblable
À celui dont tu chargeas ceux qui ont vécu avant nous.
Notre Seigneur !
Ne nous charge pas de ce que nous ne pouvons pas porter.
Efface nos fautes !
Pardonne-nous !
Fais-nous miséricorde ! »
Cette sourate étant médinoise il y a gros à parier que ces versets ont été démarqués d’une prière chrétienne syriaque parvenue à la connaissance de Mahomet ou d’un de ses collaborateurs.
Les influences des christianismes nestorien et monophysite, largement répandus en Arabie à l’époque de Mahomet, sont manifestes. Environ 25 % du texte coranique est le recopiage littéral de livres apocryphes tels que l’Évangile du pseudo Matthieu, l’Évangile de Jacques le Mineur (3, 35-37), l’Évangile de Thomas (5,110), l’histoire de la Nativité de Marie et de la petite enfance de Jésus (19), le Livre des Jubilés, qui contient l’histoire de Satan le lapidé (3,36) et les remontrances d’Abraham à son père (19,41). La négation de la crucifixion de Jésus qui aurait été remplacé par un sosie, crucifié à sa place au dernier moment (4,157) était déjà le credo de plusieurs mouvements gnostiques qui pensaient que Simon de Cyrène avait été crucifié à la place du Christ.
Même par une analyse du style poétique, on peut déceler des phrases supplémentaires qui ont été ajoutées, car elles rompent le rythme et la versification.
Une rupture de rythme affecte ainsi visiblement le verset 51 du chapitre 5 : « Ô les croyants ! Ne prenez pas pour amis les Juifs et les Nasaras : ils sont amis les uns des autres ».
On peut constater que c’est la mention « et les Nasaras » qui est de trop, car elle rompt le phrasé originel. Il s’agit donc d’un ajout tardif, probablement inséré pour discréditer les Nasaras en question. D’ailleurs on peut même remarquer que les passages contenant le mot « Nasara » sont pratiquement tous des interpolations. Par exemple dans les chapitres 2,111, 2,120, 2,135, 2,140 et 5,18.
Le terme nasara est habituellement traduit par « chrétiens ». On peut néanmoins douter de la pertinence de ce terme, car on sait aujourd’hui qu’il a existé une secte juive appelée les Nazaréens et que Yehoshoua Bar Yossef de Jérusalem lui-même (Jésus) en fut un des membres les plus écoutés. Voir notre essai sur ou plus exactement contre, le christianisme.
De même, une glose a été ajoutée au chapitre 104 pour « expliquer » ce que signifie le terme houtama car c’est un hapax.
Le Coran reprend aussi tels quels certains contes et légendes moyen-orientaux, tels les histoires de la fourmi et de la huppe parlant avec Salomon (27,18), celle de la chamelle devenue prophète (7,73-77 ;
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91,14 ; 54,9), celle des douze sources (2.60), le fameux mur de fer qui figure dans le pseudo-Callisthène, la légende d’Alexandre le Grand (18, 92-97), ou les légendes juives montrant tous les habitants d’un village transformés en singes pour ne pas avoir respecté le sabbat (2, 65 ; 7,163-166)…
Ces différentes influences, repérables aussi par la diversité de leurs styles, suffisent à montrer que, contrairement à ce qu’imaginent les musulmans, le Coran n’est pas la Parole descendue du Ciel où elle demeure immuable. Ces différentes sources, n’expliqueraient-elles pas l’aspect décousu si caractéristique du corpus osmanien ? Ce qui rejoint le constat que le grand savant et philologue irakien chrétien Al-Kindi (l’auteur de la célèbre apologie) faisait déjà au IXe siècle : « Il est évident, pour quiconque a lu le Coran et a vu de quelle façon, dans ce livre, les récits sont assemblés n’importe comment et entremêlés, que plusieurs mains – et nombreuses – s’y sont mises et ont créé des incohérences, ajoutant ou enlevant ce qui leur plaisait ou leur déplaisait ».
Plus philosophiquement parlant, comment comprendre la notion théologique musulmane QUE MAHOMET EST LE SCEAU DES PROPHÈTES, LE DERNIER DES PROPHÈTES ? C’est-à-dire que depuis que Mahomet est mort DIEU NE PEUT PLUS PARLER AUX HOMMES ? QUE DEPUIS QUE MAHOMET EST MORT LE DIVIN NE PEUT PLUS PARLER AUX HOMMES ? Nous reviendrons sur la critique d’Al Kindi dans le chapitre suivant.
À la mort de Mahomet, personne par définition ne disposait d’une édition complète et définitive des révélations faites par l’archange Gabriel. La tradition cette fameuse et irremplaçable tradition qui joue également un si grand rôle dans le catholicisme, la tradition musulmane donc nous dit que certains compagnons de Mahomet les avaient mémorisées, en les apprenant et en les récitant par cœur. Certaines, toutefois, avaient été transcrites sur divers matériaux, telles des feuilles de palme ou des omoplates de chameaux.
Le coran dont le texte définitif ne fut fixé que bien après la mort de Mahomet était alors illisible. Dans les faits, il pouvait être lu de quatorze manières différentes et pour cause, l’arabe s’écrivait alors sans voyelles et certaines consonnes n’étaient pas définies. Les voyelles dites courtes modifiant profondément le sens étaient également absentes.
Une première mise par écrit « complète » aurait été faite à la demande d’Omar qui craignait que le Coran ne disparût parce que ceux qui l’avaient mémorisé mouraient au combat. Il convainquit le calife Abou Bakr (632-634) de faire consigner par écrit ce que les gens en savaient et ce qui en avait été écrit sur divers matériaux. Ce travail de collecte fut dirigé par l’un des scribes de Mahomet, le Médinois Zaïd ibn Thâbit. L’intention d’Omar était sans doute de disposer d’un corpus et non de faire une « édition » définitive. À la mort d’Abou Bakr, ces premiers feuillets du Coran furent transmis à Omar, devenu calife (634-644), puis à sa fille Hafsa, l’une des veuves de Mahomet.
Le calife suivant, Osman reprit le corpus détenu par Hafsa et le fit compléter par d’autres personnages, toujours sous la direction de Zaïd ibn Thâbit. Il fit ensuite détruire tous les matériaux originels, et imposa une première version « canonique » du Coran en l’adressant aux métropoles les plus importantes du jeune empire.
La tradition musulmane connaît néanmoins une quinzaine de textes pré-osmaniens principaux et une douzaine de textes secondaires. Nous ne possédons aujourd’hui aucune de ces variantes de la « vulgate » osmanienne. Mais nous savons par ailleurs qu’en 934 et en 935, les exégètes Ibn Miqsam et Ibn Shannaboudh furent condamnés pour avoir récité des variantes non approuvées. Ce qui montre que celles-ci ont circulé longtemps.
Il convient également de remarquer que le texte diffusé par Osman pouvait lui-même susciter différentes lectures et interprétations. Et cela pour deux raisons. La première est que le texte ne comportait pas de voyelles brèves et pas toujours les longues, ce qui induit des choix dans l’interprétation des mots. Deuxièmement, l’écriture arabe primitive n’était pas dotée des points diacritiques qui fixent la valeur exacte des signes et qui distinguent une consonne d’une autre. Des vingt-huit lettres de l’alphabet arabe, seules sept ne sont pas ambigües et dans les plus anciens fragments du Coran, les lettres ambigües constituent plus de la moitié du texte.
C’est sous la période omeyyade, et le règne d’Abd al-Malik (685-705) plus précisément, que l’on peut placer la troisième phase de l’histoire du Coran. Car en tant que texte écrit le Coran a une histoire évidemment.
Certains attribuent au redoutable gouverneur de l’Irak, al-Hadjaj ibn Yousouf (714), plusieurs modifications apportées au texte coranique, mais à ce propos, les sources sont contradictoires. Pour les uns, il aurait seulement remis en ordre les versets et des chapitres, et rectifié des lectures déficientes ; pour les autres, il aurait précisé l’orthographe en introduisant des points. En dépit des contradictions, le califat d’Abd al-Malik constitua un moment déterminant pour la constitution des textes qui nous sont parvenus.
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Les premières critiques vinrent de certains compagnons de Mahomet qui avaient leur propre texte. D’autres sont allés jusqu’à considérer certains textes comme inauthentiques pour des raisons théologiques et éthiques. Ils visaient notamment les versets 111,1-3 contre Abou Lahad, l’un des grands adversaires de Mahomet, et 74,11-26. Des théologiens de Bassora mirent en doute l’authenticité de ces passages, tout comme certains kharidjites pensaient que le chapitre 12 (sourate de Joseph) ne faisait pas partie du Coran, car, selon eux, ce conte profane ne pouvait avoir sa place dans le Coran.
On trouve évidemment les accusations les plus vigoureuses dans les sources chiites avant le milieu du Xe siècle. Pour ces derniers, seul Ali, successeur légitime de Mahomet, avait détenu les authentiques révélations faites par l’archange Gabriel. À cette époque, avec l’établissement de l’orthodoxie sunnite sous le califat abbasside dont un des dogmes majeurs était le caractère divin et éternel du Coran officiel (thèse du Coran incréé), il devint extrêmement périlleux de mettre en doute l’intégrité de celui-ci. Seule une minorité parmi les chiites continua à soutenir discrètement la thèse de la falsification, et ce jusqu’à notre époque. L’obscurité du texte coranique fut alors considérée par ces chiites comme résultant de cette falsification du Coran initial. Des suppressions et des ajouts, œuvre des ennemis de Mahomet ou d’Ali, auraient altéré la Révélation et entamé sa clarté initiale (cf. Le Coran silencieux et le Coran parlant. Les sources scripturales de l’Islam entre histoire et ferveur. Mohammad ‘Ali ‘Amir-Moezzi).
La version qui est aujourd’hui considérée comme LE Coran officiel est celle d’Othman (644-656), un calife despotique qui a détruit toutes les sources antérieures (mais Omar et Abou Bakr avaient déjà fait disparaître de nombreuses versions auparavant).
La version la plus répandue de ce corpus osmanien est celle du Caire, préparée sous le patronage du roi d’Égypte, Fou'ad 1er, en 1923. Elle compte 114 chapitres (sourates). Le titre provient soit de l’un des premiers mots du chapitre (53 : Étoile ; 55 : Bienfaiteur), soit d’un récit caractéristique (14 : Abraham ; 19 : Marie), soit d’un épisode considéré comme caractéristique (16 : Abeilles ; 29 : Araignée).
Ces titres n’appartiennent pas à la révélation et ne figurent pas dans les premiers manuscrits coraniques connus ; ils furent ajoutés par les scribes pour distinguer les chapitres.
Même phénomène avec les évangiles : les titres ont été inventés ou rajoutés pour les besoins de la cause.
Certains cependant font remonter ces titres à Mahomet qui les aurait fixés.
Les chapitres sont classés à peu de chose près dans l’ordre décroissant de leur longueur, à l’exception de la première la fatiha qui fait très chrétienne à part le dernier verset qui est sans doute une glose anti chrétienne ou anti juive surajoutée.
La tradition musulmane soutient que du vivant de Mahomet, ses compagnons mettaient par écrit les passages révélés comme ils le pouvaient. Durant le dernier mois de Ramadan précédant le décès de Mahomet, l’archange Gabriel aurait revu avec Mahomet l’ensemble du Coran et indiqué l’ordre final des versets et des chapitres.
Certains soutiennent que cet ordre a été établi par accord des musulmans afin de faciliter la mémorisation et l’apprentissage par cœur. On signale néanmoins à cet égard qu’Ali (mort en 661) avait un Coran, aujourd’hui perdu, classé par ordre chronologique.
On trouve en tête de 29 chapitres des lettres appelées faouatih as-souwar ou al-hourouf al-mouqatta'ah : ALM (chapitres 2, 3, 29, 30, 31, 32), ALMR (chapitre 13), ALMS (chapitre 7), ALR (chapitres 10, 11, 12, 14, 15), HM (chapitres 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46), KHYA Ç (chapitre 19), N (chapitre 68), Q (chapitre 50), S (chapitre 38), TH (chapitre 20), TS (chapitre 27), TSM (chapitre 26, 28), YS (chapitre 36).
On peut douter que ces lettres puissent dater du vivant de Mahomet puisque personne ne s’est avisé de lui demander leur sens. De ce fait, on peut penser qu’il s’agit d’ajouts ultérieurs servant probablement de repères pour la classification des passages coraniques, les lettres de l’alphabet ayant alors des valeurs de chiffres, comme en syriaque, en hébreu et en latin.
On constate d’ailleurs que cinq chapitres du Coran ont gardé comme titre un tel groupe de lettres : chapitres 20 (TaHa), 36 (YaSin), 38 (Sad), 50 (Qaf) et 68 (Noun, appelé aussi Al-Qalam).
Bref, le Coran actuel n’est bien évidemment pas celui de Mahomet (ce n’est pas le texte complet du Coran incréé trônant dans les cieux, ni les extraits que l’archange Gabriel a rapportés à Mahomet pendant ses transes, ni la transcription par écrit de tout ce que Mahomet a pu réciter durant les 23 années (13 à La Mecque 10 à Médine) qu’a duré la révélation ; il a été compilé après sa mort selon le gré de divers personnages. En conséquence, il a existé plusieurs Corans dont le contenu et l’organisation des versets étaient totalement différents 1).
Retenons pour finir que le texte n’a pas été rédigé en arabe dialectal de La Mecque, la ville natale de Mahomet, ni en arabe dialectal de Yathrib/Médine, la cité-État dont Mahomet devint chef avant de
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mourir, mais d’emblée en une koinè arabe sans doute due à la plume des différents secrétaires utilisés par Mahomet pour noter ses visions. Le Coran se contredit d’ailleurs quelque peu à ce sujet. Il insiste lourdement sur le fait qu’il a été rédigé en pur arabe (chapitre 16, verset 103) comme si la langue maternelle de Dieu était l’arabe (ou le breton ou l’Hébreu, etc.), mais ajoute ailleurs que seul Dieu sait ce qu’il veut dire et que les athées ou les mécréants n’y comprennent rien (chapitre 3, verset 7). Bien pratique tout ça !
Et venons-en maintenant à l’étude du style de ce corpus osmanien.
1) Selon les chiites, le texte révélé n’a été compilé sous sa forme originale et dans son intégralité que par Ali. Des membres d’un cercle très fermé de l’élite chiite prétendent connaître néanmoins le contenu de cette compilation. Mais ils n’ont pas le droit de la dévoiler au grand public (même au sein des chiites) : ce n’est que lorsque celui qu’ils considèrent comme étant leur douzième imam infaillible (« le Mahdi », caché dans une grotte depuis douze siècles) reviendra parmi les hommes, qu’il dévoilera à nouveau en public la véritable et authentique compilation du Coran.
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STRUCTURE ET QUALITÉ DU RAISONNEMENT POUR CE QUI EST DU FOND.
De la reconnaissance de ce miracle coranique dépend évidemment la crédibilité de Mahomet ainsi que l’authenticité du Coran.
— Le premier procédé caractéristique de la rhétorique du Coran est celui de l’amalgame, technique qui consiste à présenter ensemble deux affirmations, dont l’une est vraie, et à suggérer que l’autre l’est aussi du seul fait de leur rapprochement. Par exemple, en 4,34, à propos du droit de correction des femmes infidèles, nous lisons : « Admonestez celles dont vous craignez la désobéissance, enfermez-les dans une chambre à part, et frappez-les. Mais ne leur cherchez plus querelle si elles vous obéissent. Dieu est élevé et grand ! ».
Dieu est élevé et grand, c’est entendu, mais quel rapport entre le fait que Dieu est grand et la jalousie ou la violence conjugale ? Qui peut percevoir ce rapport sinon celui qui est heureux d’y trouver de quoi légitimer ses agissements ?
— Le 2e procédé est celui de la répétition, méthode qui a le pouvoir magique de rendre une chose d’autant plus vraie qu’elle est plus souvent répétée. Ce procédé capable de transformer même l’absurde en raisonnable est très prisé pour les lavages de cerveau. Comme l’aurait dit Francis Bacon : « Calomniez calomniez ! Il en restera toujours quelque chose ! »
— Le 3e procédé est la culpabilisation de toute interrogation, de tout questionnement, de toute remise en cause de l’autorité de Dieu. Cette perversion fait passer pour intelligents ceux qui renoncent à l’usage de la raison, et pour fauteurs de trouble (fitna : méritant de ce fait le sort des ennemis publics), ceux qui posent des questions : « Ceux qui disputent à propos des révélations de Dieu sans qu’aucun argument d’autorité ne leur soit venu sont exécrés par Dieu et les vrais croyants » (40,35). Peut-on imaginer plus grave manipulation mentale ? Dit autrement, le Coran est-il autre chose qu’un instrument de pouvoir ?
Il existe néanmoins quelques courants ou quelques sensibilités de l’Islam comme les Chiites Ismaéliens qui interprètent le corpus osmanien de façon allégorique. Cette notion de perfection ou d’exhaustivité du Coran (i’djaz) est donc conçue différemment selon les auteurs.
Le théologien Fakhr al-Dîn al-Râzî (1150-1210), a pour sa part affirmé que le miracle du Coran était à situer, non pas au niveau de la qualité stylistique du texte, non pas quant aux signifiants, mais au niveau des significations.
Ibrahim ibn Saar al-Nazim (mort en 846), théologien rationaliste moutazilite a également avancé en son temps la théorie du sarfa. Les opposants païens à Mahomet n’étaient pas incapables par nature de produire quelque chose de comparable au point de vue linguistique à ses visions, mais temporairement « rendus incapables » d’utiliser leurs compétences rhétoriques et poétiques.
Le Coran n’est donc pas imitable en tant que texte arabe, sa supériorité réside dans son contenu plutôt que dans son style. Cette théorie du sarfa considère donc le Coran comme un miracle en soi (mou'djiza), une œuvre au-delà des capacités humaines. Il est à ranger dans la même catégorie que les miracles accomplis par les prophètes anciens comme la transformation d’un bâton en serpent par Moïse ou la guérison des maladies et le retour à la vie des morts, opérés par Jésus. Dit autrement Dieu est délibérément intervenu pour empêcher les hommes de produire un texte semblable au Coran. Sans cette intervention divine, les Arabes musulmans auraient pu facilement relever le défi. Cette intervention divine était un miracle au sens strict du terme (mou'djiza). Le texte n’a rien de particulier en tant que texte, sa supériorité est due aux informations qu’il recèle, à propos des événements du passé ou de ceux à venir.
Mais même l’idée que le contenu du Coran, ce qu’il dit, qui était resté jusque-là inconnu ou bien qui concerne l’avenir, serait la seule matière du « défi » (tahaddl) soulève des difficultés théologiques, même dans une perspective moutazilite. Dans la mesure où le savoir divin est absolu, quelles que soient les limites du savoir humain, il est impossible que Dieu – dont la justice est absolue – lance à l’homme un défi dépassant les capacités humaines. La justice divine (al-adl), le deuxième principe du taouhid dans la théologie rationaliste moutazilite, autorise seulement un défi qui serait à la portée des capacités de l’être humain.…
Passons donc sur le dogme du Coran insurpassable au point de vue du style, car il est bien connu que les goûts et les couleurs ne se discutent pas, et venons-en maintenant à la qualité de sa dialectique.
Après avoir étudié les manuscrits découverts à Sanaa au Yémen en 1972, le spécialiste allemand Gerd-Rüdiger Puin en a conclu ce qui suit. Le Coran lui-même proclame qu’il est « moubinoun »,
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c’est-à-dire clair, mais si on le regarde de près, on remarque qu’une phrase sur cinq ou à peu près n’a tout simplement pas de sens. Beaucoup de musulmans vous diront le contraire, bien sûr, mais c’est un fait qu’un cinquième du texte coranique est absolument incompréhensible. Ce qui n’empêche pas que seul Dieu sait vraiment ce que ces versets signifient, car il y a des versets transparents et d’autres imagés (verset 7, chapitre 3). D’où les problèmes de traduction récurrents. Si le Coran n’est pas compréhensible, si même en arabe, on ne peut pas le comprendre, alors il n’est traduisible dans aucune langue. Puisque le Coran répète à plusieurs reprises qu’il est clair alors qu’il ne l’est pas, il y a là une contradiction évidente et très grave.
Pourquoi la version du Coran telle que l’on peut la trouver aujourd’hui en librairie n’a-t-elle été arrêtée qu’en 1923 par l’Institut de recherches islamiques Al-Azhar du Caire ? Parce qu’environ 30 % du texte étant incompréhensible, les conjectures jusqu’alors proposées n’ont jamais fait l’unanimité.
Les musulmans pieux ont donc beau dire que le Coran est écrit en arabe parfait, les liens indispensables aussi bien pour décrire l’enchaînement des événements que pour les raisonnements, manquent très souvent ; ce qui contribue à produire cet aspect si caractéristique du texte. C’est une suite de phrases généralement sans relations et le plus souvent contradictoires.
Les nombreuses répétitions de versets entiers sont sans lien avec les contextes dans lesquels ils sont insérés. Il y a des erreurs grammaticales, par exemple : en 4,162, le mot utilisé pour dire « ceux qui s’acquittent de la prière » est à l’accusatif, alors qu’il devrait être au nominatif ; dans 49,9 le verbe « combattre » est à la forme plurielle alors qu’il devrait être à la forme duelle
Il y a environ trois cents erreurs de grammaire, comme celle-ci dans le Coran : « Allez donc tous deux chez Pharaon, puis dites : Nous sommes l’envoyé (rasoul) du Seigneur des mondes » (26,16), alors qu’il faudrait écrire : « Nous sommes les envoyés, etc.… ENVOYÉS AU PLURIEL : ROUSOUL… »
Le Coran ne connaît pas la ponctuation moderne, mais de minuscules signes au sens imprécis et à l’emplacement discuté. Un même verset peut s’étirer sans ponctuation sur une demi-page, tandis que d’autres s’arrêtent brusquement, ou se terminent dans un autre verset.
D’après le juriste suisse Sami Aldeeb : « Le Coran dont nous disposons aujourd’hui ne représente même pas un tiers de l’original selon les auteurs musulmans classiques. Le reste s’est volatilisé. Il y a donc des versets tronqués ».
— Si « environ 20 % des mots et expressions du Coran ne sont pas compréhensibles pour 99 % des universitaires arabes musulmans », comment ceux-ci peuvent-ils prétendre que le Coran est un livre « clair ou explicite » (34, 3 ; 43, 2 ; 44, 2) ?
— Si « le Coran est facile à comprendre » (54,17 ; Malik et Yousouf Ali), n’est-ce pas lui faire insulte que de le publier avec moult notes et explications de texte ?
— Si le Coran est un livre « clair ou explicite » (34, 3 ; 43, 2 ; 44, 2), dans lequel il n’y a « aucun doute » (10, 37), « aucune équivoque » (39, 28), parce qu’il contient des versets « clairs » (16, 35), « d’une totale clarté » (24,54 ; 36,12), « clairs, voire lumineux » (24, 46 ; 27,1 ; 35, 25 ; 37,117), pourquoi s’y trouve-t-il des versets « figuratifs », nécessitant une « explication » (3,7) ?
— Si Dieu est seul à comprendre ce qu’il dit (3,7), tous les idiots utiles de l’islam qui prétendent faire connaître ce que le Coran veut dire sont-ils autre chose que des imposteurs ?
Plusieurs passages du Coran ne peuvent d’ailleurs manifestement pas être attribués à Dieu.
« C’est toi que nous adorons et c’est toi de qui nous demandons l’aide. Dirige-nous sur le droit chemin » (1, 5-6) *.
Or Dieu ne peut s’adorer lui-même… Il ne peut pas non plus implorer la grâce d’un seigneur.
« Seigneur ! Ne fais pas dévier nos cœurs, après nous avoir mis dans le droit chemin ! Étends sur nous Ta grâce, car Tu es le Dispensateur de toutes les grâces ! » (3,8)
Il y a ainsi plus de cent versets qui ne peuvent être dits par Dieu ! Certains ont alors fait remarquer qu’il suffisait d’ajouter l’injonction « Dis ! » au début de ces versets pour donner à entendre que Dieu ordonne de dire ce qui suit et éliminer ainsi la troublante preuve que le Coran ne pouvait être la Parole immuable de Dieu.
L’astuce a dû être jugée efficace puisque le verbe dire à l’impératif est répété pas moins de 315 fois… Si la thèse du Coran incréé de Ibn Handball (780-855) ne s’est imposée qu’au début du Xe siècle, comment ne pas voir dans ce verbe (dis) un témoin de l’initiative destinée à faire passer le texte original du Coran au statut de Parole de Dieu ?
Dieu peut-il se bénir se louer ou se glorifier lui-même (1,2 ; 7, 54 ; 28, 68 ; 36,36 ; 43, 82) ? Comment dire que le Coran est la parole de Dieu puisqu’il est aussi celle des anges (19, 64 ; 37, 164-166) et des djinns (72) ?
Si le Coran est la Parole de Dieu et si Dieu est Un, un avec sa Parole qui procède de Lui (comme le Fils procède du Père dans le christianisme), le Coran est-il Dieu ? Et il faudrait alors également adorer Jésus, puisque le Coran affirme que Jésus est la « Parole ou Esprit de Dieu » (3, 45 ; 4,171) !
Les Moutazilites se sont sortis de la difficulté avec leur thèse du Coran CRÉÉ.
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Mais serait-ce parce que les scribes abbassides se lassèrent de corriger un texte fait de rajouts divers et dont ils maîtrisaient mal la langue qu’ils eurent recours au principe de l’abrogation ; car enfin, Dieu a-t-il sauvé le fils de Noé (21,78 ; 37, 77) ou non (11,42-43) ? La femme de Lot, l’a-t-il sauvée (26,170-171) ou non (7,83) ? Pharaon, a-t-il été sauvé (10, 92) ou non (17,103 ; 28,40 ; 43,55) ? Les chrétiens seront-ils sauvés (2,62 ; 5,69) ou non (3,85 ; 5,72) ? Et les damnés porteront – ils leur acte d’accusation dans le dos (84,10) ou bien dans la main gauche (69,25) ?
Et d’ailleurs que veut dire le fait que le Coran garde des versets « mansoukh = abrogés » (13, 39), c’est-à-dire des versets qui n’ont plus de pertinence pour aujourd’hui, des versets qui ne veulent plus rien dire ? Pourquoi sont-ils encore dans le Coran s’ils ont été abrogés ? À travers eux, Dieu parle-t-il donc pour ne rien dire ?
Cela étant, qu’est-ce qui empêche que les versets reconnus aujourd’hui « nasikh = abrogeant » soient à leur tour abrogés, puisque c’est ce qui est déjà arrivé aux versets qu’ils ont évincés ? Et si les musulmans disent que ce n’est pas possible, il leur faut alors admettre que ces versets sont d’une essence différente de celle des versets qui ont été abrogés.
Certains prétendent que la révélation ne pouvait qu’être graduelle ou évoluer comme le traitement d’un médecin, et que les versets « abrogés » (mansoukh) sont ceux qui correspondent à l’époque où les musulmans n’étant pas encore assez nombreux, il valait mieux pour leur avenir ne pas répondre aux provocations des mécréants.
Si le Coran est la Parole éternelle de Dieu, alors, dans son ciel, Dieu ne cesse pas de parler de sa chamelle, qu’il faut laisser paître tranquillement, sans lui faire le moindre mal, sous peine d’un prompt châtiment (11,64). Dieu ne cesse donc pas, avant même que le monde existe, et même une fois que celui-ci aura fini d’exister, de demander que sa chamelle soit laissée tranquille.
Si Dieu ne dit pas éternellement que cela, mais aussi autre chose, alors le Coran n’est pas TOUTE la Parole de Dieu…
Il est faux de dire que le Coran est la Parole de Dieu puisqu’il n’en est au mieux qu’un extrait.
En 2, 221 le mariage avec des non-musulmanes est interdit, mais en 5,5 il est autorisé ; en 2, 219 et 5, 90-91, l’usage du vin est interdit, mais en 4,43 seul le fait d’en boire trop est condamné et de toute façon au paradis d’Allah il coule à flots (47, 15 ; 56,17,83, 25). « On leur donnera à boire un vin rare, cacheté par un cachet de musc – ceux qui en désirent peuvent le convoiter – mélangé à l’eau du Tasnim » **.
Les versets contradictoires, témoins de cette rédaction non systématique du corpus osmanien, n’ont manifestement pas tous été abrogés… Mais puisqu’en 4,82, Dieu reconnaît que celui qui trouvera des contradictions dans le Coran aura la preuve que ce livre n’est pas de Dieu, que manque-t-il aux musulmans pour quitter l’islam et devenir agnostiques ou athées ?
* Cette première sourate est en fait une prière juive ou chrétienne, à l’exception des quelques mots de la fin qui, au contraire, visent les juifs et les chrétiens.
** Explication des Témoins d’Allah : il ne s’agit pas du vin que l’on connaît sur terre, il s’agit d’un vin spécial, sans alcool. Mais pourquoi le couper avec de l’eau dans ce cas ?
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AUTRES OBSCURITÉS DU TEXTE.
« Quand tu vois des gens plongés dans des discussions à propos de Nos versets, éloigne-toi d’eux jusqu’à ce qu’ils entament une autre discussion. Et si le Diable te le fait oublier, alors, dès que tu t’en souviens, ne reste pas avec les mécréants » (Verset 68 chapitre 6).
Et…
« Dans le Livre, il vous a déjà révélé ceci : lorsque vous entendez qu’on renie les versets (le Coran) de Dieu et qu’on s’en moque, ne vous asseyez point avec ceux-là jusqu’à ce qu’ils entreprennent une autre conversation. Sinon vous serez comme eux. Dieu assurément rassemblera tous les mécréants et les hypocrites en enfer » (Verset 140, chapitre 4).
Que le musulman pieux veuille bien néanmoins pardonner à l’avance ce qui va suivre et qui tombe hélas sous le coup de l’interdiction par Dieu de toute contestation de toute discussion ou de tout dialogue. Car nous allons effectivement maintes fois dans les pages qui suivent discuter des versets du Coran ; de leur sens, de leur pertinence, de leur adéquation, de leur valeur éthique philosophique ou scientifique. Comment faire autrement ?
Le Corpus osmanien affirmant lui-même être parfait et complet, nous nous permettrons donc d’étudier attentivement le texte en question et de l’examiner à la loupe.
En dépit du dogme islamique du caractère inimitable ou miraculeux du Coran (i’djaz), élément clé du lavage de cerveau musulman et du sentiment de supériorité qu’il inculque (« Vous formez la meilleure communauté suscitée pour les hommes. Vous interdisez le mal et vous ordonnez le bien », 3, 110) peu d’auteurs ont procédé à une étude d’ensemble approfondie de ce texte qui constitue une des plus grandes catastrophes intellectuelles de l’histoire de l’Humanité. L’absence totale de plan ou de tentative de plan, logique, thématique (les chapitres sont, à une exception près, édités par ordre de longueur décroissante – les plus longs en premier), et la quasi-absence de contexte, font que l’on ne sait jamais très bien avec le Coran qui parle – Dieu, les adversaires de Mahomet, l’ange Gabriel, des anges, des djinns, Mahomet lui-même ? – et de qui on parle d’ailleurs. Résultat de ce naufrage intellectuel sans précédent, quand il s’agit des juifs par exemple, on se demande toujours s’il s’agit des Hébreux, des juifs du temps de Mahomet, ou des juifs essentialisés, dit autrement y compris les juifs d’aujourd’hui.
Même chose avec les chrétiens (les Nasara) : on ne sait pas toujours s’il s’agit des chrétiens trinitaristes ou des chrétiens considérant Jésus simplement comme un homme, extraordinaire, mais nullement fils de Dieu NI Dieu lui-même (christologie basse).
Le résultat de cette catastrophe intellectuelle sans précédent dans l’histoire de la civilisation est donc que le texte même du Coran est rarement publié sans être accompagné de volumineux commentaires trahissant généralement les préférences personnelles du traducteur ».
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le dire, il existe en effet de nombreuses contradictions dans le Coran.
En voici quelques exemples.
N.B. Nous répartirons principalement ces contradictions en deux grandes catégories.
LES CONTRADICTIONS LOURDES DE CONSÉQUENCES DOCTRINALES.
Et…
LES CONTRADICTIONS DE DÉTAIL OU PUREMENT FORMELLES, SANS GRANDE IMPORTANCE SI CE N’EST, BIEN SÛR, QU’ELLES METTENT À MAL LE DOGME MUSULMAN DU CARACTÈRE INCRÉÉ INIMITABLE ET DIVINEMENT INSPIRÉ DU CORAN (I’DJAZ).
Sans être certain que les unes ne devraient pas être dans l’autre catégorie ou vice versa. Qu’est-ce qui importe en effet dans une religion ? Dieu seul le sait.
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LES CONTRADICTIONS DU CORAN
LOURDES DE CONSÉQUENCES DOCTRINALES.
— Et tout d’abord, y – a-t-il un créateur ou plusieurs. Le Coran utilise deux fois l’expression « Dieu est le meilleur des créateurs » (verset 14 chapitre 23 et verset 125 chapitre 37. Ce qui peut laisser supposer qu’il y aurait donc d’autres créateurs, d’autres entités que lui ayant participé à la création du monde ou capables elles aussi de créer. Exemple Baal ?
— Où Dieu demeure-t-il ?
Nous rangeons cette problématique dans le sous-chapitre des contradictions importantes, car il importe de savoir si Dieu est immanent au monde (panthéisme) ou très au-dessus de lui, comme un deus otiosus indifférent à son sort.
Versets en faveur de l’immanence.
Verset 16 du chapitre 50 : « Nous sommes plus près de lui [l’homme] que la veine de son cou ».
Versets allant dans le sens de la transcendance absolue.
Verset 4 du chapitre 57 : « C’est lui qui a créé les cieux et la terre en six jours, il s’est ensuite assis en majesté sur le Trône ». Trône qui s’élevait alors sur les eaux (réminiscence de la Genèse) d’après le verset 7 du chapitre 11. En tout cas si éloigné qu’il faut 1000 ou 50 000 ans pour l’atteindre (verset 5 du chapitre 32, verset 4 du chapitre 70).
— Origine du mal ?
Le Diable si l’on en croit le verset 41 du chapitre 38 (Job : le démon m’a infligé souffrance et châtiment).
Dieu si l’on en croit le verset 78 du chapitre 4 (tout vient de Dieu).
Nous-mêmes d’après le verset 79 du chapitre 4 (tout mal qui t’atteint vient de toi-même).
C’était d’ailleurs la position des druides antiques qui ne croyaient pas en l’existence de l’enfer d’après les scholies bernoises commentant la Pharsale de Lucain.
Hermann Usener. Scholia in Lucani bellum civile/Commenta Bernensia. Liber I (1869).
451 « Les druides nient que les âmes puissent périr
[Driadae negant interire animas]
OU ALLER EN ENFER »
[aut contagione inferorum adfici] et
454 « Ils ne disent pas que les Mânes existent
[Manes esse, non dicunt].
Le point numéro 25 de la petite liste annexée au concile de Leptines en 743, sous le titre latin d’indiculus superstitionum et paganiarum (évidemment, il s’agit de condamner ou dénigrer tout cela) va d’ailleurs clairement en ce sens ; il évoque le fait d’imaginer que tout défunt est saint.
Et en 851, Jean Scot Érigène a aussi noté dans son « De la prédestination » : Dieu ne prévoit ni peines, ni péchés, ce sont des fictions. Pour Érigène également, donc, l’enfer n’existe pas, ou alors il l’appelle le remords.
— Dieu peut-il commander ou cautionner que l’on fasse le mal ?
Non.
Verset 28, chapitre 7. « Dieu ne vous ordonne pas la fornication ».
Verset 90, chapitre 16. « Dieu interdit la turpitude, l’acte répréhensible et la cruauté ».
NDLR. Reste évidemment à définir ce qu’est une abomination, une turpitude, etc.…
Oui.
Verset 16, chapitre 17. « Lorsque nous voulons détruire une cité, nous ordonnons à ceux qui y vivent de se livrer à leurs iniquités ». Voilà qui est en effet assez paradoxal.
Verset 229, chapitre 2. « Reprendre quelque chose de ce que vous lui avez donné ne vous est pas permis, à moins que tous deux craignent de ne pas observer les lois de Dieu ». Qu’est-ce à dire ?
— Dieu guide-t-il les hommes vers la vérité ou égare-t-il qui il veut ?
Verset 35, chapitre 10. Dieu dirige les hommes vers la vérité.
Verset 4, chapitre 14. Dieu égare qui il veut, il dirige qui il veut.
CE QUI NE NOUS AVANCE GUÈRE.
— Quand le destin des hommes et du monde est-il ou a-t-il été arrêté ?
D’après le verset 22 du chapitre 57, il a été fixé de toute éternité : « Aucune calamité n’atteint la terre ni vous-mêmes, sans que cela ne soit écrit dans un Livre, avant même d’être créé ».
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D’après le verset 13 du chapitre 17, le destin futur des hommes dans l’autre monde dépend de leurs œuvres ici-bas : « Nous attachons son destin au cou de chaque homme ».
D’après le verset 4 du chapitre 97, il est fixé chaque année lors de la célèbre nuit du décret (Laïlat al Qadr).
— Qui a transmis la révélation divine à Mahomet ?
Le Saint-Esprit (l’esprit de sainteté) selon le verset 102 du chapitre 16. L’affirmation est suivie d’une énième réponse de Mahomet à l’objection qui lui était alors faite, à savoir que tout cela n’était qu’emprunt à des écrits non arabes.
Le Saint-Esprit également (l’esprit fidèle) selon le verset 193 du chapitre 26.
L’ange Gabriel selon le verset 97 du chapitre 2.
NDLR. Le nom propre Gabriel n’apparaît que tardivement et rarement. Il apparaît par exemple également dans le verset numéro 4 du chapitre 66. Autre sourate médinoise d’après Anne-Marie Delcambre.
Pour en revenir à la sourate N° 2, elle ne fait certainement pas partie des révélations initiales (elle est trop longue pour être mecquoise). C’est donc surtout la tradition musulmane postérieure qui a insisté sur l’attribution à l’ange Gabriel de toutes ces révélations. L’apparition initiale n’est pas nommée. Ou est désignée par des expressions du genre le puissant, le fort, le seigneur des mondes », etc.
Coran 81, 15-23. Non ! Je le jure par les planètes ! […] Votre compatriote n’est pas possédé ! Il l’a vu à l’horizon lumineux, il n’est pas avare de l’inconnaissable, ce n’est pas la parole d’un démon maudit, où allez-vous donc ? Ceci n’est qu’un rappel adressé aux mondes pour celui d’entre vous qui veut suivre le droit chemin. Mais vous ne le voudrez que si Dieu le veut, lui, le seigneur des mondes ».
Coran 53, 1-18.
« Par l’étoile quand elle disparaît ! Votre compatriote n’est pas égaré ! Il n’est pas dans l’erreur.
Il ne parle pas de son propre mouvement. C’est seulement une révélation qui lui a été transmise, le puissant, le fort, la lui a fait connaître ; celui qui possède la force s’est tenu majestueusement alors qu’il se trouvait à l’horizon supérieur, puis il s’approcha et demeura là comme suspendu dans les airs. Il était à une distance de deux portées d’arc ou moins, et il révéla donc à son esclave ce qu’il lui a révélé. Son cœur n’a rien inventé, il l’a vu ; allez-vous donc élever des doutes sur ce qu’il vu de ses propres yeux ?
Il avait déjà vu le même être près du jujubier qui borne le séjour des délices, auprès duquel se trouve le jardin de la demeure éternelle, au moment où le jujubier était enveloppé par ce qui le couvrait.
Sa vue a soutenu l’éclat de la magnificence divine.
Il a vu les plus grands signes de son Seigneur.
Avez-vous considéré al Lat et al-Ouzza, et l’autre, Manat, la troisième ? »
— Dieu peut-il pardonner le chirk c’est-à-dire le fait de lui associer une autre entité dans une même adoration, ce qui est le plus grave des péchés selon l’islam.
Non !
Verset 48 du chapitre 4. « Dieu ne pardonne pas qu’on lui associe quoi que ce soit, il pardonne à qui il veut des péchés moins graves que celui-ci. Celui qui associe quoi que ce soit à Dieu commet un crime immense ».
Verset 116 du chapitre 4. Idem.
Attitude diamétralement opposée à la réaction très « zen » à ce sujet de l’auteur de la Bhagavad Gita ci-dessous.
« Même ceux qui rendent un culte à d’autres dieux que moi, et qui leur sacrifient avec ferveur, me rendent aussi par là même hommage, ô fils de Kounti, bien que ce soit en dehors des règles. Car je suis le seul véritable bénéficiaire et seul seigneur de tout sacrifice même s’ils l’ignorent en vérité. Qui m’offre avec dévotion ne serait-ce qu’une feuille, une fleur, un fruit, de l’eau, cette offrande faite d’une âme pure eh bien je l’accepte. Car je suis le même pour tous et personne n’est spécialement haï ou élu par moi. Mais ceux qui m’aiment avec dévotion demeurent en moi et moi je suis en eux » (Bhagavad Gita, 9,23-29, dialogue entre le dieu Krishna/Vishnou et le prince Arjouna).
— Jésus est-il Dieu ou non ?
Verset 45, chapitre 3 : Jésus est à la droite de Dieu. Le critère pour distinguer LE vrai dieu d’un faux dieu est donné par le verset 2 du chapitre 6 et le verset 71 du chapitre 38 : la création des hommes par Dieu à partir d’argile.
Or d’après les versets 49 et 55 du chapitre 3, les versets 156 et 157 du chapitre 4, le verset 110 du chapitre 5 et le verset 71 du chapitre 38, Jésus semble bien doté de ce pouvoir surhumain.
Verset 49 du chapitre 3 : « Je vais créer pour vous avec de l’argile comme une forme d’oiseau. Je souffle en lui et il est oiseau…… je guéris l’aveugle et le lépreux, je ressuscite les morts ».
Note de l’éditeur. L’anecdote de l’oiseau fait à partir d’argile est sans doute tirée d’évangiles apocryphes parvenus à la connaissance de Mahomet ou de ses scribes.
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Verset 55 du chapitre 3 : « Dieu dit : Ô Jésus ! Je vais en réalité te rappeler à moi, t’élever vers moi… »
Le verset 98 du chapitre 21 précise néanmoins que qui est adoré en dehors de Dieu le Père ira brûler en enfer.
Versets 156-157 du chapitre 4 : « Nous les avons punis [les juifs] parce qu’ils ont proféré une horrible calomnie contre Marie et parce qu’ils ont reconnu avoir tué le messie Jésus fils de Marie ».
Note de l’éditeur : ce qui suit semble être la position gnostique docétiste classique en la matière, l’homme Jésus n’a été crucifié qu’en apparence.
Verset 110 du chapitre 5 : « Dieu dit : O Jésus fils de Marie, rappelle-toi mes bienfaits à ton égard et à l’égard de ta mère. Je t’ai doté de l’Esprit saint. Dès le berceau tu parlais aux hommes comme un ancien… tu ressuscites les morts ».
— Verset 21, chapitre 19 : Si Dieu le veut, Marie peut engendrer sans avoir de compagnon. Cela Lui est même facile précise notre texte.
Le verset 101 du chapitre 6 déclare néanmoins que Dieu ne saurait engendrer puisqu’il n’a pas de compagne.
Le verset 4 du chapitre 39 admet par contre que Dieu peut adopter un être humain particulier.
— Les chrétiens et les juifs iront-ils au Paradis ou en Enfer ?
Au Paradis.
Verset 62, chapitre 2. « Ceux qui croient, ceux qui pratiquent le judaïsme, ceux qui sont chrétiens ou sabéens, ceux qui croient en Dieu et à la fin du monde, ceux qui font le bien, voilà ceux qui trouveront leur récompense auprès de leur seigneur. Ils n’éprouveront plus aucune crainte, ils ne seront pas affligés.
Verset 69, chapitre 5. « Ceux qui croient, les juifs, les Sabéens et les chrétiens, quiconque croit en Dieu et à la fin du monde et fait le bien n’éprouveront plus aucune crainte et ils ne seront pas affligés ».
En Enfer.
Verset 72 de ce même chapitre 5. « Oui, ceux qui disent ‘Dieu est le messie fils de Marie’ sont impies ».
Verset 85, chapitre 3. « Le culte de celui qui recherche une religion en dehors de la soumission (à Dieu) n’est pas accepté. Cet homme sera, dans la vie future, au nombre des perdants ».
NDLR. Pour ce qui est des chrétiens il doit s’agir du lancinant problème de la trinité par rapport à la monolâtrie. On peut supposer que cette contradiction formelle n’est qu’apparente et qu’elle signifie en fait que les chrétiens croyant en la Sainte Trinité (c’est-à-dire 95 % des chrétiens actuels, les catholiques les orthodoxes les Réformés, etc.) iront en enfer, et que seuls les chrétiens qui ne voient en Jésus qu’un grand prophète (christologie basse), iront au Paradis.
De toute façon, la répétition étant la plus forte des figures de rhétorique (ars docendi) n’hésitons pas ici à soumettre de nouveau à la sagacité nos lecteurs ci-dessous cet extrait de la religion de haine (kafir) qu’est l’Hindouisme.
« Même ceux qui rendent un culte à d’autres dieux que moi, et qui leur sacrifient avec ferveur, me rendent aussi par là même hommage, ô fils de Kounti, bien que ce soit en dehors des règles. Car je suis le seul véritable bénéficiaire et seul seigneur de tout sacrifice même s’ils l’ignorent en vérité. Qui m’offre avec dévotion ne serait-ce qu’une feuille, une fleur, un fruit, de l’eau, cette offrande faite d’une âme pure eh bien je l’accepte. Car je suis le même pour tous et personne n’est spécialement haï ou élu par moi. Mais ceux qui m’aiment avec dévotion demeurent en moi et moi je suis en eux » (Bhagavad Gita, 9,23-29, dialogue entre le dieu Krishna/Vishnou et le prince Arjouna).
— Comme dans tout monolâtrie l’éternel problème de la prédestination et du libre arbitre…
Verset 56 du chapitre 51 : « Je n’ai créé les djinns et les hommes que pour qu’ils m’adorent ».
Verset 179 du chapitre 7 : « nous avons voué à l’enfer un grand nombre de djinns et d’hommes ».
— Intercession possible ou pas lors du Jugement dernier ?
OUI.
Verset 86, chapitre 43 : « Ceux qu’ils invoquent en dehors de lui [Dieu] ne possèdent aucun pouvoir d’intercession à l’exception de ceux qui rendent témoignage à la Vérité et qui possèdent la Science ».
NDLR Ces versets visent peut-être Jésus.
Verset 26, chapitre 53 : « Que d’anges dans les cieux dont l’intercession sera inutile sinon après que Dieu l’aura permise pour qui il voudra et avec son agrément ».
Verset 109, chapitre 20 : « Ce jour-là l’intercession ne profitera qu’à celui en faveur de qui le Miséricordieux l’aura permise, en faveur de qui il agréera une parole ».
NDLR. La notion d’intercession figure en toutes lettres dans le texte, mais à côté de celle de prédestination. Toujours l’éternel problème de ces conceptions du Divin.
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Verset 23, chapitre 34 : Idem. « Nulle intercession ne sera utile devant Dieu à part l’intercession pour la personne en pour qui il l’aura permise ».
NON.
Verset 123 du chapitre 2 : « Redoutez un jour où nul ne sera récompensé pour autrui, où nulle compensation ne sera admise, où nulle intercession ne sera utile ».
Verset 254 du même chapitre 2 : « Ô vous qui croyez donnez à titre d’aumône une partie de ce que nous vous avons accordé avant la venue d’un jour où ni marchandage, ni amitié, ni intercession ne vaudront ».
Verset 51 du chapitre 6 : « Avertis ceux qui ont peur d’être rassemblés devant leur Seigneur qu’ils ne trouveront, en dehors de lui, ni protecteur ni intercesseur ».
Verset 19 du chapitre 82 : « Ce jour-là aucune âme ne pourra rien en faveur d’une autre âme ».
— Le jugement dernier partagera-t-il les hommes en deux groupes distincts, ceux devant aller en enfer et ceux devant aller au paradis, ou y aura-t-il une troisième catégorie ?
Les chapitres 90 versets 18-19, 99 versets 6-8, etc. sont catégoriques : il n’y aura que des élus destinés au paradis ou des maudits voués à l’enfer. C’est une logique binaire ou manichéenne.
Le chapitre 56 verset 7 aussi sauf qu’il commence par mentionner TROIS groupes (nous disons bien TROIS). Sans donner de précision sur ceux qui composeront ce troisième groupe d’hommes (destinés à un équivalent musulman du purgatoire ?)
— Dieu récompensera-t-il d’une façon ou d’une autre les bonnes actions des non-croyants ? Le verset 7 du chapitre 99 semble le dire. Mais le verset 17 du chapitre 9 et le verset 69 du chapitre 9 s’y opposent catégoriquement. Les œuvres des polythéistes seront vaines. N.B. Nous ne parlerons pas ici des chrétiens qui, suivant qu’ils croient ou non en la Sainte Trinité, divisent les docteurs de la foi musulmane.
— Les anges peuvent-ils protéger les êtres humains ? Dit autrement : Dieu agit-il directement ou au moyen d’intermédiaires ?
Non selon le verset 107 chapitre 2. « En dehors de Dieu il n’est pour vous ni garde ni défenseur ».
Idem selon verset 22, chapitre 29. « Vous n’avez en dehors de Dieu ni garde ni défenseur ».
Oui selon le verset 31 du chapitre 41. Les anges disent « nous sommes pour vous des amis dans la vie de ce monde et dans la vie future ».
Oui selon le verset 11 du chapitre 13. « Des anges le protègent sur l’ordre de Dieu ».
Idem selon le verset 10 du chapitre 82. « Des gardiens veillent sur vous ».
— Une ambiguïté qui n’est pas sans importance dans les rapports sunnites/chiites.
Qui peut être maître et défenseur protecteur ou ami d’une communauté (ouali) ?
Dieu seul : verset 116, chapitre 9, verset 111 chapitre 17, verset 4, chapitre 32, verset 28, chapitre 42.
Des hommes choisis ou envoyés par Dieu : Verset 75, chapitre 4. « Donne-nous un protecteur choisi par toi. Donne-nous un défenseur choisi par toi ». NDLR. Voir la notion de Paraclet dans le christianisme.
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LES CONTRADICTIONS SECONDAIRES QUI NE METTENT EN CAUSE
QUE LE CARACTÈRE DIVINEMENT INSPIRÉ DE CES RÉVÉLATIONS.
— Peut-on voir Dieu ?
Oui !
Versets 1 à 18 du chapitre 53, un des plus beaux poèmes du Coran d’ailleurs, visiblement inspiré (une vision) et datant de la période mecquoise initiale. Verset 23 du chapitre 81. Même remarque que ci-dessus. À moins bien sûr qu’il s’agisse de l’ange Gabriel. Avec le Coran on ne sait jamais !
Non !
Verset 103 du chapitre 6. Et aussi en un sens le verset 51 du chapitre 42 (Dieu n’a jamais parlé directement à un être humain).
— Le vin et les boissons fortes, des bénédictions ou des malédictions ?
Comment des œuvres du démon ici-bas peuvent-elles participer aux charmes et délices du paradis ? Car dans le paradis selon le Coran en effet il y a des fleuves de vin, délice pour ceux qui en boivent (verset 15, chapitre 47). « On leur donnera à boire un vin rare, cacheté par un cachet de musc – ceux qui en désirent peuvent le convoiter – mélangé à l’eau du Tasnim » (verset 25, chapitre 83).
Or ce qu’il faut penser du vin sur cette terre est dit sans ambiguïté dans les versets suivants : chapitre 5, verset 90 : « Le vin (khamr), les jeux de hasard… sont une abomination et une œuvre du démon ». Chapitre 2, verset 219 : « À propos du vin et des jeux de hasard… le péché qui s’y trouve est plus grand que leur utilité ».
Note de la rédaction. En fait ce qui s’est passé est très simple. Mahomet n’était pas complètement contre le vin au départ. Mais comme certains des premiers musulmans en abusaient vraiment, il a préféré (ou doit-on dire Dieu a préféré ?) l’interdire complètement. On est donc passé du « buvez avec modération » à « pas une seule goutte ! ».
— Nourriture des damnés en enfer ?
Seulement des épines (verset 6, chapitre 88).
De la charogne (verset 36, chapitre 69).
Des fruits du Zaqquoum (verset 66, chapitre 37).
Plus dramatique…
— Verset 4, chapitre 33 : interdiction de l’adoption plénière (on se demande bien pourquoi ?)
Par contre verset 37 du même chapitre 33 : les musulmans peuvent avoir des fils adoptifs (puisqu’on parle de leurs épouses).
— Les musulmans doivent-ils bien traiter ou honorer leurs parents quand ils ne sont pas strictement monothéistes ?
Oui d’après les versets 8 du chapitre 29 (le début) et 14 du chapitre 31 (qui se répètent d’ailleurs).
Non d’après le verset 23 du chapitre 9 et le verset 22 du chapitre 58.
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CONTRADICTIONS OU ÉCARTS AVEC LES DONNÉES BIBLIQUES.
Avertissement préalable. Nous ne considérons pas comme dénué de tout intérêt (cela fait partie de la méta histoire des religions, de leurs justificatifs), mais simplement comme non historique tout ce qui, dans l’Ancien Testament ou la Torah, est antérieur aux règnes de David et Salomon.
Or il y a dans le Coran beaucoup de passages parlant visiblement des mêmes événements et des mêmes personnages, de façon très similaire, ou en s’en écartant notablement*.
Cela prouve au passage deux choses.
Premièrement même quand le Coran suit d’assez près le récit biblique qu’il n’est pas pour autant un livre inspiré par Dieu ou extrait d’une table céleste ne contenant que des vérités par définition PUISQU’IL Y A DES NON-VÉRITÉS DANS LA BIBLE. BEAUCOUP MÊME !
Deuxièmement que le Coran ne fait que reprendre ces antiques légendes bibliques, ou puise aux mêmes sources, avec plus ou moins de différences. Intentionnelles, ou pas. Si elles ne sont pas intentionnelles, cela peut venir du fait que ces récits ont été empruntés à des variantes circulant alors dans cette région du monde. Plus on s’éloigne des visions initiales et spontanées du jeune Mahomet (40 ans) ** plus on trouve de ces emprunts dans les pages du Coran humain et créé à Yathrib/Médine et plus il y a de chance que ces emprunts ne soient pas des réminiscences « régurgitées » en état de transe, mais des emprunts effectués en toute connaissance de cause pour répondre à des problèmes précis ou pour en quelque sorte « meubler » les vides du récit antérieur.
Bref, si nous pointons des contradictions entre les données bibliques traditionnelles et le Coran, ce n’est pas…
— parce que nous considérons que juifs et chrétiens ont falsifié les saintes Écritures qui leur avaient été confiées avant (dogme musulman classique. Verset 75, chapitre 2 : « Certains d’entre eux ont altéré sciemment la parole de Dieu après l’avoir entendue »).
— ni parce que nous considérons que ces récits bibliques ne sont que des récits historiques (ce sont des mythes des légendes voire de la propagande politique pour le royaume de Juda). Qu’on se le dise !
Et maintenant, commençons par le commencement, la contradiction basique ou intrinsèque par définition, le problème de la langue.
Versets 195 et 196 du chapitre 26 : “C’est une révélation en langue arabe claire, ceci se trouvait déjà dans les livres des Anciens ». Quels livres des anciens ? La Bible, c’est-à-dire la Torah et le Nouveau Testament ? La Torah était écrite en hébreu et les quatre évangiles en Grec. Comment un livre en bon arabe peut-il être contenu dans un ouvrage écrit en hébreu et un ouvrage écrit en Grec ? Dont le contenu devrait en outre se retrouver tel quel dans lesdits livres (Ancien et Nouveau testament).
Verset 49 du chapitre 28 : « Apportez donc de la part de Dieu un Livre qui, mieux que ces deux-là, dirige les hommes, et je le suivrai… ».
Versets 10 et suivants du chapitre 46 : « Alors qu’un témoin parmi les fils d’Israël reconnaît la conformité de tout ceci avec les messages antérieurs… avant lui le livre de Moïse était un guide et une miséricorde confirmant les autres, écrit en langue arabe… »
Verset 103 du chapitre 16 : le Coran est du bon arabe.
Il va de soi que la langue de Dieu ne peut pas être plus l’Arabe qui n’existait pas à l’origine du monde qu’une autre et que de toute façon Dieu s’il existe n’a pas besoin du truchement d’une langue humaine pour se faire comprendre.
Ainsi que nous avons déjà eu l’occasion de le souligner, mais la répétition est la plus forte des figures de rhétorique ; ce qui est intéressant ici c’est que cette affirmation répond à l’objection suivante : « « Ils disent : c’est seulement un mortel qui l’instruit ! Mais celui auquel ils pensent parle une langue étrangère ».
L’insistance sur le fait que c’est du « bon » arabe est peut-être simplement destinée à souligner la qualité d’une éventuelle traduction à partir de documents écrits en araméen voire même plus précisément en syriaque.
Contradictions factuelles.
— Le fils de Noé a-t-il survécu au déluge ou est-il mort noyé ?
Versets 42-43, chapitre 11 : non ! Il fut au nombre de ceux qui périrent engloutis.
Verset 76, chapitre 21 : oui !
Verset 76, chapitre 37 : oui !
30
— Abraham a-t-il brisé les idoles de ses pères ou a-t-il simplement quitté son pays ?
Versets 76 à 83 du chapitre 6. « Lorsque la nuit l’enveloppa, il vit une étoile et dit : voici mon seigneur… je ne suis pas au nombre des polythéistes. Son peuple discuta avec lui… »
Verset 48 du chapitre 19. « Je m’éloigne de vous et de ce que vous invoquez en dehors de Dieu… »
Verset 58 du chapitre 21. « Il les mit en pièces, à l’exception de la plus grande… »
— Les prophètes sont-ils uniquement de la lignée d’Abraham, donc juifs ?
Le verset 27 du chapitre 29 affirme que tous les prophètes descendent d’Abraham, mais le verset 36 du chapitre 16 affirme que Dieu a suscité au moins un prophète dans chaque nation.
— L’histoire de Lot.
Réponse donnée par le peuple de Lot.
Première version.
Verset 82, chapitre 7. « La seule réponse de son peuple fut de dire : chassez-les de votre cité… »
Verset 56, chapitre 27. « Leur seule réponse fut de dire : chassez la famille de Loth de votre cité… »
Deuxième version.
Verset 29 du chapitre 29. « La seule réponse de son peuple fut de dire : fais venir sur nous le châtiment de Dieu… »
Les deux réponses n’ont rien à voir l’une avec l’autre, ce sont objectivement parlant deux réponses différentes.
Verset 83, chapitre 7. « Nous l’avons sauvé, lui et sa famille, à l’exception de sa femme : elle se trouvait parmi ceux qui étaient restés en arrière… »
Versets 170-171 du chapitre 26. « Nous l’avons sauvé lui et toute sa famille à l’exception d’une vieille femme restée en arrière… »
Peut-on décemment considérer que cette vieille femme c’était la femme de Lot ? Simple question
— Quand le pharaon de la Bible a-t-il ordonné la mise à mort des enfants mâles du peuple hébreu ?
Le verset 38 du chapitre 20 dit que ce fut alors que Moïse était encore un tout jeune enfant.
Le verset 23 du chapitre 40 dit que c’est alors que Moïse est devenu prophète.
— Pharaon a-t-il péri ou est-il mort noyé lors de la traversée de la mer Rouge ?
Il a survécu selon le verset 92 du chapitre 10.
— L’épisode du veau d’or.
Les Israélites ou leurs ancêtres attendent que Moïse soit redescendu du mont Sinaï avant de renoncer au culte du veau (ou taureau) d’or. Verset 91 du chapitre 20.
Les Israélites se repentent de leur égarement AVANT même que Moïse ne redescende du Sinaï. Verset 149, chapitre 7.
— Aaron a-t-il également péché dans cet épisode ?
Non selon les versets 85 à 90 du chapitre 20.
Oui selon les versets 92, chapitre 20 et 151 chapitres 7.
— Verset 157 du chapitre 7. Dieu parle avec Moïse des 4 évangiles, livres qui datent du premier siècle DE NOTRE ÈRE. Peut-être du deuxième pour l’évangile selon Jean. Donc postérieurs d’au moins mille ans à Moïse.
— Jonas a-t-il été oui ou non rejeté sur une plage déserte par la baleine qui l’avait avalé ?
Oui selon le verset 145 du chapitre 37.
Non selon le verset 49 du chapitre 68.
— Annonciation de la naissance de Jésus à Marie. Combien d’anges l’ont faite ?
Chapitre 3 versets 42-45 : plusieurs anges.
Chapitre 19 versets 17-21 : un seul.
* Explication traditionnelle des musulmans pieux : les divergences entre version biblique et version coranique sont dues au fait que juifs et chrétiens ont falsifié leurs Écritures saintes. Ce qui n’est vrai QU’À MOITIÉ.
** En gros les sourates les plus courtes, celles reléguées à la fin du corpus osmanien. Les sourates 113 et 114 par exemple qui sont de simples formules magiques.
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AUTRES CONTRADICTIONS DIVERSES.
Dieu semble d’ailleurs avoir des problèmes de mémoire ou du mal à calculer : il ne sait plus en combien de temps il a fait le monde, si c’est en deux jours (41,9), en six (7,54), en huit (41,9-12) ou bien en un instant (2,117) ; s’il a d’abord créé la terre puis le ciel (2,29), ou bien le ciel puis la terre (79,27-30) ; si le ciel et la terre étaient d’abord une même masse compacte qu’il a divisée (21,30) ou bien s’ils étaient séparés et qu’il les a réunis (41,11)…
— Création instantanée ou par étape ?
D’après le verset 117 du chapitre 2 Dieu peut tout créer instantanément, mais il met 6 jours d’après la majorité des sourates.
— Combien de jours a-t-il fallu à Dieu pour créer le monde ?
Six jours selon le verset 54 du chapitre 7, selon le verset 3 du chapitre 10, selon le verset 7 du chapitre 11 et selon le verset 59 du chapitre 25.
Huit jours (2 + 4+ 2) quand on examine bien le processus évoqué par les versets 9 à 12 du chapitre 41.
— Est-ce le Ciel ou bien la Terre qui a été créé en premier ?
Le ciel d’abord d’après les versets 27 à 30 du chapitre 79.
La terre d’abord d’après le verset 29 du chapitre 2.
— Le ciel et la terre ont-ils été créés par division d’un même élément ou ont-ils été créés chacun séparément ?
Le verset 30 du chapitre dit clairement que le ciel et la terre ont été créés à partir d’un même élément préexistant.
Le verset 11 du chapitre 41 semble se référer à une création séparée du ciel et de la terre, la terre d’abord et ensuite le ciel à partir d’une fumée.
— L’homme a été créé à partir…
— de rien selon le verset 67 du chapitre 19.
— d’un peu d’argile selon le verset 26 du chapitre 15.
— de poussière selon les versets 59 du chapitre 3, 20 du chapitre 30, 11 du chapitre 35.
— d’eau selon le verset 30 du chapitre 21, selon le verset 45 du chapitre 24, et selon le verset 54 du chapitre 25.
— d’un peu de sang selon le verset 1 du chapitre 96.
— d’une goutte de sperme selon les versets 4 du chapitre 16 et 37 du chapitre 75.
— Verset 49, chapitre 16 : « Tout être vivant se prosterne devant Dieu ».
— Verset 26, chapitre 30 : « Tous lui obéissent ».
Mais il y a des exceptions, Satan d’abord et aussi de nombreux êtres humains.
— Les vrais prophètes n’ont jamais péché même un seul instant (dogme musulman dit de l’Isma).
Or Abraham a un moment commis le plus impardonnable des péchés (chirk) en prenant la lune le soleil et les étoiles comme ses dieux ou déesses.
Les versets 76 à 78 du chapitre 6 sont sans équivoque à ce sujet même si ces péchés n’ont duré que quelques heures et qu’Abraham [de toute façon personnage légendaire et non historique) s’en est repenti ensuite dans cette version de ses aventures.
— Combien de jours a-t-il fallu à Dieu pour détruire le peuple des Ad ?
Un jour selon le verset 19 du chapitre 54.
Plusieurs jours suivant le verset 16 du chapitre 41 et suivant le verset 6 du chapitre 69 (7 jours).
— Lors du Jugement dernier les hommes auront-ils la liste des mauvaises actions de leur vie…
Dans le dos selon le verset 10 du chapitre 84 ?
Dans leur main gauche selon le verset 25 du chapitre 69.
Verset 171 du chapitre 4 : « Ne dites pas Trois »… Il est donc impossible si on prend cette injonction au sens littéral de réciter cette sourate sans enfreindre le commandement qu’elle contient.
PLUS SÉRIEUSEMENT. Il s’agit d’un rejet de la notion de Trinité : un seul Dieu, mais trois personnes suivant le point de vue auquel on se place : le père le fils et le Saint-Esprit *.
ETC. ETC. ETC. CE QUI PRÉCÈDE N’ÉTAIT QU’UN ÉCHANTILLON. INNOMBRABLES EN EFFET SONT LES CONTRADICTIONS DU CORAN.
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— Certaines ne sont que des problèmes de détails dus aux limites de tout langage humain (poésie, juridisme, etc.). Elles confèrent néanmoins beaucoup de lourdeur à l’ensemble quand elles sont visiblement volontaires et destinées à convaincre ou faire peur, du style : « si vous ne faites pas ce que je dis vous irez en enfer, si vous m’obéissez par contre vous aurez droit aux délices du paradis ». Ce qui est assez primaire comme raisonnement il faut bien le reconnaître, en tout cas ni zen ni philosophique.
— D’autres donc ne sont lourdes de conséquences que dans l’éventuel autre monde qui nous attend après la mort et ne relèvent donc que de la doctrine.
— Certaines enfin sont assumées par la théologie musulmane dans le cadre de ses réflexions sur l’abrogation (nasikh oua mansoukh).
— Et notamment les versets dits de l’épée (ayat as saïf) du combat et du petit djihad (8,39 ; 9 ,5 ; 9,29 ; 47,4).
Il y a unanimité chez les musulmans pour dire que le Coran constitue la première source du droit musulman. Cela découle du fait qu’il provient de Dieu. Et la preuve qu’il est d’origine divine est son inimitabilité (doctrine de l’Idjaz). Si l’on admet qu’il vient bien de Dieu – en raison de son inimitabilité – tout le monde est donc obligé de le suivre.
Or certaines pratiques musulmanes n’y figurent pas ou du moins sans aucune des précisions indispensables à leur exercice. Mais les musulmans orthodoxes ne voient aucune contradiction entre le fait de proclamer que le Coran est complet ou insurpassable, bref parfait en un mot, et le fait qu’il leur est nécessaire de recourir à d’autres documents ou d’autres textes pour vivre au quotidien conformément à leur religion. Telle est la foi musulmane traditionnelle qui n’a rien à voir donc avec la raison et n’est qu’un réflexe conditionné à la Pavlov.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir, il existe aussi néanmoins quelques courants ou quelques sensibilités islamiques qui interprètent le Coran de façon allégorique et qui ne sont donc en aucune façon gênés par le manque de précisions concrètes ou de détails en le prenant comme guide (les ismaéliens par exemple).
Exemple donc. Les cinq piliers de l’islam, la profession de foi dite « Chaada », la prière, l’aumône, le jeûne et le pèlerinage, ne figurent pas vraiment et en tant que tel dans le Coran.
Il n’y a de Dieu que Dieu et Mahomet est son prophète. Ce kérygme ** doit être prononcé par tout musulman orthodoxe pour confirmer sa religion ou dans le cas d’une conversion à, l’islam. Mais cette chaada n’existe pas en tant que telle d’un seul bloc dans le Coran, elle est seulement composée de deux thèmes fréquemment martelés dans le Coran : le thème de l’unicité divine (qui est peut-être d’origine judéo-chrétienne ou hénothéiste si l’on considère le nom d’Allah) et l’affirmation que Mahomet est un prophète **.
Or le nom de Mahomet qui n’est en réalité qu’un nom commun signifiant « le Loué » n’apparaît que 5 fois dans le texte sacré, quatre fois sous la forme Muhammad (ce qui est relativement peu quand même pour justifier sa présence dans un kérygme) et une fois sous la forme Ahmad. Chapitre 3, verset 144, chapitre 33 verset 40, chapitre 47, verset 2, chapitre 48 verset 29, chapitre 61, verset 6 (Ahmad).
Ainsi que nous l’avons vu, le problème est qu’à chaque fois cela peut être un simple adjectif signifiant quelque chose comme « le loué » et pas un véritable nom propre.
La prière (salat). Le Coran de donne aucun détail sur la façon de prier (la pratique des 5 prières quotidiennes remonte peut-être aux Sabéens mandéens ***). Ce qui a entraîné de nombreuses divergences à ce propos. La plupart des sunnites croisent les mains sur le ventre quand ils se tiennent debout pour prier, mais les sunnites de l’École malékite les chiites et les ibadites, eux, prient les bras le long du corps.
La façon de procéder aux petites ablutions rituelles (wouzou) varie également.
Les musulmans orthodoxes ne se réfèrent pas au Coran, mais à des hadiths pour déterminer le nombre de cycles ou raquates (inclinaison du buste et prosternation) à l’occasion des prières collectives ou de certaines autres prières comme la prière pour avoir de la pluie (Salat-oul-Istisqa : et dans ce cas il faut avoir son manteau à l’envers = magie sympathique ?)
Le Coran ne précise pas explicitement le nombre fois par jour que l’on doit prier. Les musulmans sunnites pensent qu’il faut prier cinq fois par jour *** alors que les chiites disent trois fois seulement. Le matin (fajr) l’après-midi (dhourh) et le soir (maghreb).
Il existe également des divergences sur l’heure exacte du commencement de la prière du soir (après la disparition du soleil derrière l’horizon ou après la disparition des dernières lueurs) et sur sa durée. Le Coran détermine la durée de la prière en fonction de la position du soleil et de sa lumière, mais il n’a pas prévu le cas des régions polaires ou circumpolaires (comme en Scandinavie par exemple) où la durée du jour peut varier sensiblement suivant la saison.
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L’aumône obligatoire ou zakat est maintes fois recommandée dans le Quran. Les musulmans orthodoxes estiment néanmoins que 2,5 % par an (de sa richesse) suffit. Aucune précision de cette nature n’existe dans le Coran.
La pratique du jeûne est instamment demandée par le Coran, mais sans autant de détails ou de précisions que n’en donne la tradition des hadiths (sunna). Dans l’islam orthodoxe par exemple une femme ayant ses règles ne peut pas jeûner alors qu’aucune interdiction de ce genre n’existe dans le Coran.
Le Coran ne détaille guère le grand pèlerinage à faire à La Mecque. Les pratiques actuelles telles que la lapidation (symbolique ?) de Satan à l’entrée ouest de Mina, le baiser de la pierre d’angle de la Kaaba (al hadjar al asouad), sont vraisemblablement des restes de rites païens justifiés par des inventions les rattachant ultérieurement à des personnages bibliques. cf. Aboul ala Al-Ma’ari (Syrie 937-1057). Le Coran n’en dit rien. Les ismaéliens pensent que ce grand pèlerinage (hadj) n’est pas obligatoire.
Outre ces cinq piliers de l’islam, il existe d’autres pratiques de l’islam non mentionnées dans le Coran (actuel).
Le recours aux hadiths.
La lapidation des adultères.
La circoncision ou l’excision.
L’interdiction faite aux femmes ayant leurs règles de prier ou d’entrer dans une mosquée.
Le classement du chien et du chat parmi les animaux impurs.
Pour les chiites les prérogatives de l’imam ****.
Les normes vestimentaires ou somptuaires (hormis le cas très controversé du hidjab ou voile islamique).
Question débattue : à qui doivent revenir les héritages non réclamés puisque la formule de répartition indiquée par le Coran ne s’applique qu’à un cas bien précis : celui des successions en ligne directe parents-enfants.
* Ce verset précise néanmoins que Jésus est…
— Christ (Messie).
— Prophète.
— Verbe de Dieu incarné.
— Esprit de Dieu.
La théologie musulmane est encore plus compliquée que la théologie chrétienne.
** L’insistance sur l’affirmation que Mahomet est prophète trahit deux choses : à quel point cela n’allait pas de soi de son vivant, à quel point c’était contesté de son vivant, et à quel point cet argument lui était nécessaire pour se faire obéir même dans l’intimité !
*** Qatada ‘ibn Di’ama (mort vers 736) : les sabéens adoraient les anges, lisaient le livre des psaumes (Zabour), faisaient leurs prières rituelles 5 fois par jour. Il écrit en outre qu’ils priaient le soleil.
**** Simple fidèle dirigeant la prière chez les sunnites, membre d’un véritable clergé chez les chiites.
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SYNTHÈSE.
Livre indépassable (i’djaz), meilleure des communautés, « Vous formez la meilleure communauté suscitée pour les hommes. Vous ordonnez le bien et vous interdisez le mal » (chapitre 3, verset 110 du saint Coran) tout ceci appris par cœur depuis l’enfance…… il y a bien là de quoi transmettre un sacré sentiment de supériorité à des générations entières, car, ainsi que nous avons déjà eu l’occasion de le dire à propos des rapports des chrétiens avec les païens, les réflexes conditionnés ça se transmet. Le monde est dur et il si réconfortant pour des personnalités de type immature et infantile 1) qui ont besoin d’un Père divin, de se croire le nouveau peuple élu (verus Israël).
Il est bien entendu burlesque ou enfantin, bref pas sérieux du tout, indigne d’un débat de bon niveau, de tenir pour acquis que le Coran est indépassable ou insurpassable, tant du point de vue du fond que de la forme. cf. Al Nadr, Oba, Moussaïlima, Mansour Ibn Sarjoun, Al Kindi et son apologie voire Al-Moutanabbi.
Pour ce qui est de la forme tout simplement pare ce que les goûts et les couleurs ne se discutent pas et que les langues évoluent tout au long des siècles et des millénaires. Tout comme le breton n’est pas la langue parlée par Dieu au paradis terrestre, contrairement à ce qu’ont prétendu certains celtomanes, l’arabe du Coran n’est pas la langue mère de l’Humanité, il n’était pas parlé il y a 20 000 ans et il ne le sera plus dans 20 000 ans ; de même que la langue basque contient de nombreux termes non basques d’origine, le Coran contient de nombreux mots empruntés aux diverses grandes langues de la région à l’époque (syriaque perse éthiopien grec hindi, etc.), mais de grâce surtout pas au romain ou au barbare qui sont des langues… n’ayant jamais existé. Les Romains d’origine parlaient la langue du Latium c’est dire le latin, les « Roumis » ou chrétiens byzantins parlaient… le grec, et les barbares (bonjour les barbares !) parlaient des langues diverses comme le celte le germanique et ainsi de suite…
En outre une des surprenantes ou déroutantes caractéristiques du corpus osmanien est qu’il ne suit aucun plan logique. Les défenseurs de ce système, pour un livre quand même destiné aux êtres humains en un temps où l’écriture existait déjà, mettent en avant le fait que cela favorise son apprentissage par cœur. Autrement dit en terre d’islam (Dar al Islam) une application du principe « mieux vaut une tête bien pleine qu’une tête bien faite ».
À une exception près, le chapitre d’ouverture appelé la fatiha, une prière judéo-chrétienne, les chapitres du Coran sont classés par ordre d’importance décroissante : les plus longs chapitres en premier.
NB. En règle générale, plus un chapitre est court, plus il a de chance de dater de la période mecquoise, plus un chapitre est long plus il a de chances de dater de la période médinoise. Ce qui fait qu’en réalité le Coran se lit un peu en commençant par la fin. Les plus anciens chapitres, les chapitres mecquois sont rejetés à la fin, les plus récents, les chapitres médinois, figurent en tête.
Bref un beau méli-mélo qui fait que, sans le contexte, on n’y comprend généralement goutte AU POINT DE VUE HISTORIQUE (sur le plan moral ou mystique, c’est autre chose).
D’où chaque fois et pour commencer l’impérieuse nécessité de savoir si l’on parle de versets récités pour la première fois lors de la partie de la vie de Mahomet se déroulant dans sa ville natale de La Mecque, période de sa vie où il fut en quelque sorte « dans l’opposition » ; ou s’il s’agit de versets récités pour la première fois dans la deuxième et dernière partie de la vie de Mahomet, celle où il devint chef de la Cité État de Yathrib/Médine, donc non plus dans l’opposition, mais au pouvoir.
Anne-Marie Delcambre fournit dans son livre Soufi ou mufti ? Quel avenir pour l’islam ? au chapitre « Sourates du Coran ? », une liste fort précieuse des chapitres de La Mecque et de Médine.
Sur un total de 114 chapitres, 86 sont mecquois, 28 sont médinois.
Sont médinois les chapitres suivants (dans l’ordre chronologique)…
2, 8, 3, 33, 60, 4, 99, 57, 47, 55, 13, 76, 65, 98, 59, 24, 22, 63, 58, 49, 66, 64, 61, 62, 48, 5, 9, 110.
1) En tout cas pas philosophe pour deux sous.
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STYLE DU CORAN.
Pour le musulman qui l’a appris par cœur, le Coran est parfait sur le plan du style. Personne ne peut le dépasser. Cette perfection est culturellement ressentie par les musulmans pieux, comme pour tout texte dont on a été bercé depuis l’enfance. Mettre en doute cette croyance constitue un blasphème.
Mais la beauté du style coranique a été contestée par ceux qui, pour une raison ou une autre, échappaient à l’envoûtement collectif. Grand spécialiste des civilisations sémitiques et fin connaisseur de l’arabe, Théodore Nöldeke a par exemple écrit un grand article sur ce qui lui paraissait être des défauts stylistiques dans le Coran, le rendant difficile à lire.
A) le manque de ponctuation.
Le Coran est divisé en 114 chapitres. D’après François Déroche leur texte a été tardivement divisé en versets (Codex Parisino-petropolitanus). La longueur des versets varie beaucoup. Un verset peut être constitué par un ou deux mots (55,1 ; 101,1 et 103,1) ou de plusieurs phrases (2,101, 196 et 282 ; ce dernier est le plus long verset du Coran).
Les versets rattachés au début de l’activité mystique de Mahomet fils d’Amina, mis aujourd’hui à la fin du Coran, sont lapidaires, courts, avec des clausules de rythme identique.
Puis, la tendance a été à l’étirement de l’unité rimée. Le critère de la division en versets repose surtout sur l’assonance et la rime, mais il n’y a pas d’unanimité sur cette division et sur le nombre des versets.
Ainsi, l’édition du Caire et celle de Tunis comptent 6236 versets, alors qu’une tradition qui remonte à Ibn-Abbas (décédé vers 686) en compte 6616.
Dans l’édition arabe de Gustave Flügel (1834), certains versets de l’édition cairote sont découpés ou réunis.
À part la division en versets, la version arabe du Coran, même moderne, ne comporte pas de ponctuation (point, virgule, etc.), ce qui complique la lecture du Coran, surtout lorsque la phrase est coupée en deux ou plusieurs versets (9,1-2 ; 53,13-16), ou au contraire lorsqu’un verset comporte plusieurs phrases. Une des raisons pour laquelle on n’ajoute pas la ponctuation est l’incertitude quant à la fin de la phrase. D’après Sami Aldeeb un verset peut avoir un sens différent selon l’emplacement du point.
B) Interpolation.
Le manque de ponctuation est accentué par le fait que le Coran comporte de nombreuses interpolations. Ainsi, à l’intérieur du même chapitre, voire du même verset, on trouve des passages hors contexte. Le texte coranique donne de ce fait l’impression d’une œuvre décousue et raccommodée.
À l’exception des chapitres les plus courts, la plupart manquent en effet d’unité, car ce sont des compilations de divers textes repris par Mahomet ou ses successeurs. Une même sourate peut ainsi rassembler des versets de périodes et de thèmes variés.
Un bon exemple d’interpolation est le verset 2,102 qui est particulièrement long par rapport aux versets précédents et suivants.
C) Manque de systématisation.
Le Coran ne présente pas les domaines traités de façon systématique. Ceci pose un problème au juriste. S’il cherche à connaître la position du Coran concernant un domaine donné, il doit se référer à différents versets dispersés, parfois contradictoires, mêlés à des passages souvent sans lien direct.
Cette contradiction des versets a été résolue par les juristes musulmans à travers la théorie de l’abrogation (nasikh oua mansoukh) : une norme postérieure abroge une norme antérieure (ce qui est d’ailleurs logique). Ceci cependant nécessite une datation de ces versets, tâche peu aisée et controversée, surtout que certains versets en abrogent d’autres qui se trouvent dans des chapitres postérieurs du Coran.
D) Répétition.
Une même histoire ou une même norme est rapportée dans plusieurs chapitres, soit sous forme abrégée, soit sous forme détaillée. À titre d’exemple, l’histoire de Lot et de la destruction de Sodome, inspirée par la Bible (Genèse 18,16-33 et 19, 1-29), revient dans une dizaine de chapitres du Coran. On retrouve ce phénomène dans le récit du prophète Moïse ou du prophète arabe Chou'aïb. Ce qui montre que le texte coranique a fait l’objet de rédactions successives superposées.
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Parfois, un verset est répété à la lettre dans deux passages, la répétition étant sans lien avec le contexte d’un des deux passages. Ainsi, le verset 28,2 est répété au verset 28,4, mais ce dernier est hors contexte. Dans le chapitre 55 qui compte 78 versets, la même phrase revient 31 fois ; et dans le chapitre 77 qui en compte 55, la même phrase revient 11 fois.
Nous sommes donc globalement d’accord avec Al Nadr, Ouqba, Moussaïlima, Mansour Ibn Sarjoun, Al Kindi et Al-Moutanabbi, le Coran est en effet unique, mais au mauvais sens du terme ! C’est un anti-livre, une insulte ou une offense à l’intelligence humaine ou de la raison, pire même, un crime contre l’esprit, l’horreur intellectuelle absolue, un défi ou une insulte au bon sens le plus élémentaire, un lavage de cerveau sans précédent, un conditionnement à la Pavlov ! C’est un éteignoir de toute lumière, de tout esprit critique, donc de toutes les libertés (la liberté de religion la liberté d’expression et tant d’autres), le fondement du plus abouti des systèmes totalitaires : l’apprendre par cœur ne développe pas l’intelligence humaine, mais rend bête à manger du foin comme les Témoins de Jéhovah avec leur histoire de deux Goliath ! 1)
Le Coran est un livre qui contient beaucoup d’invectives d’apostrophes de commandements de menaces… mais qui parle ?
Dieu ? Par moment ça ne peut pas être lui. Voir chapitre 75 versets 1 et 2, chapitre 90, verset 1. Dieu ne peut pas jurer autrement que par lui-même ou sur lui-même.
Dieu parlant de lui à la troisième personne ?
L’archange Gabriel ?
Des anges ? Chapitre 19, verset 64 et chapitre 37 versets 164-166, ce sont les anges ou des anges qui parlent et non Dieu.
Mahomet ?
Les hypocrites (mounafiqoun) disent… qui sont ces hypocrites ?
Les associateurs (mouchrikoun) disent… qui sont les associateurs (des chrétiens trinitaristes ou des polythéistes ?)
Les juifs… de quels juifs s’agit-il, de ceux de Yathrib/Médine contemporains de Mahomet ?? De ceux des siècles, voire des millénaires passés (les Hébreux) ?
Malgré la réfutation par les opposants comme par les partisans de la Moutazila de la théorie d’al-Nazzâm 2), celle-ci resta implicitement prise en compte. Le cadi (juge) Abou Bakr al-Bâqillânî (mort en 1013), théologien acharite comme Abd al-Qâhir, consacra un ouvrage à expliquer ce qui distingue le Coran de tous les autres textes, y compris les textes sacrés antérieurs. Pour lui, le caractère unique du Coran réside précisément dans le fait qu’il n’est ni prose ni poésie ; c’est un genre littéraire en soi comme les évangiles. Aucun critère littéraire humain ne peut être utilisé pour l’évaluer. Al-Bâqillânî va même jusqu’à caricaturer les fameuses grandes odes préislamiques (mou’allaqât) qu’il considère comme inférieures au Coran.
Le fait que Muhammad était illettré tient lieu de preuve supplémentaire pour affirmer que c’est la nature même du locuteur – Dieu – qui rend impossible toute comparaison entre le Coran et un autre texte.
Selon lui en effet, le miracle coranique (al-idjâz) peut être prouvé par trois éléments :
— Le premier est qu’il contient des informations concernant l’invisible (al-ghaïb), ce qui dépasse le pouvoir des êtres humains qui n’ont aucun moyen d’atteindre ce savoir.
— Le deuxième, poursuit al-Bâqillânî, est qu’il est bien connu que Mahomet était illettré (oummî), qu’il ne pouvait écrire et pouvait à peine lire. De même, il est habituellement reconnu qu’il n’avait aucune connaissance des livres des peuples antérieurs, de leur mémoire, de leur histoire, des biographies de leurs héros. Pourtant, il a donné des résumés de ce qui est advenu dans l’histoire, il a parlé des périodes passées, et donné les récits concernant la création d’Adam. Il fait aussi mention de l’histoire de Noé, de celle d’Abraham et de tous les autres prophètes mentionnés dans le Coran. Or Mahomet selon al-Bâqillânî, n’avait aucun moyen de connaître tout cela par lui-même, sauf à en être instruit… Sa conclusion est donc qu’il n’a acquis ces connaissances que grâce à la Révélation.
— Le troisième élément est que le Coran est merveilleusement arrangé et composé, et il est si admirable dans son élégance littéraire qu’il est au-delà de ce que toute créature peut composer……
Ce livre est également censé contenir les bonnes réponses à toutes les questions possibles et imaginables que l’on peut se poser. Verset 2, chapitre 2. « Voici le Livre, il ne renferme aucun doute ». Verset 38, chapitre 6. « Nous n’avons rien négligé dans le livre ». Verset 111, chapitre 12. « Exposé détaillé de tout chose ». Verset 89, chapitre 16. « Éclaircissement de toute chose ». Etc.
Bref, le Coran a réponse à tout ! Pourquoi donc dans ces conditions aller voir ailleurs ?
Les moutazilites eurent donc bien raison en leur temps de s’élever contre une telle idolâtrie du Coran créé.
L’identification du Corpus osmanien dans son actuelle expression phonétique et graphique, au Livre céleste tel qu’il est gardé auprès de Dieu (3, 7 ; 13,39 ; 26,192 ; 43, 4 ; 69,43 et 51 ; 85, 21-22) exclut,
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pour le musulman pieux, toute question sur l’historicité du Coran. Le Coran n’a pas d’histoire, il est seulement « parole de Dieu ». C’est pourquoi la recherche historique sur les origines et la formation du texte coranique ne saurait avoir de sens pour le musulman convaincu, qui la considère comme impie.
Pour invalider toute critique de l’islam, les musulmans avancent la nécessité de connaître la langue arabe, parce que Dieu a révélé l’islam par le Coran qui est écrit en arabe (cf. 12, 2 ; 26,195 ; 41, 44). La raison en est surtout qu’étant souvent incompréhensible, le Coran est aussi souvent intraduisible… Mais cette exigence de Dieu ne voulant s’adresser qu’aux arabophones, signifie que soit il ne sait parler que l’arabe, soit que ce qu’il a à dire ne peut s’exprimer qu’en arabe, ce qui ferait des Arabes des êtres différents et supérieurs aux autres hommes, soit enfin que pouvant parler une autre langue, il a fait ce choix arbitraire (pourquoi l’arabe plutôt qu’une autre langue comme le breton ou le sumérien ?) et discriminant (il écarte l’immense majorité de la population mondiale). Dans ces trois cas, mérite-t-il d’être regardé comme Dieu ? En disqualifiant a priori les critiques non arabophones du Coran, les musulmans convaincus se disqualifient eux-mêmes.
La critique affirmant la nécessité d’apprendre la langue arabe pour critiquer l’Islam est également irrecevable du fait que l’imposition de la langue arabe a toujours fait partie des moyens mis en œuvre pour islamiser les peuples afin de les rendre progressivement étrangers à leur propre culture (par exemple berbère en Afrique du Nord).
— Le gros problème de l’islam est que toute remise en cause du livre de référence obligatoire ou de son auteur initial, Mahomet, y est passible de la peine de mort pour cause de blasphème.
— Ce livre inculque aussi un fort sentiment de supériorité (confinant à l’orgueil ?) à ses adeptes en leur répétant noir sur blanc qu’ils constituent la meilleure des communautés humaines ayant jamais existé sur terre.
Chapitre 3, verset 110. « Vous formez la meilleure communauté suscitée pour les hommes : vous ordonnez ce qui est convenable, vous interdisez ce qui est mal ».
Verset 181, chapitre 7. « Il existe dans ce que nous avons créé une communauté dont les membres se dirigent selon la Vérité et qui ; grâce à celle-ci, observent la justice ».
Le Coran dit lui-même qu’il est lui-même la Parole de Dieu telle qu’elle est au Ciel (3,7 ; 13,39 ; 43,4 ; 85, 21-22). Cela signifie que la langue parlée au Ciel est l’arabe, que Dieu pense et parle en arabe, c’est-à-dire en un langage humain. Les musulmans pieux, prisonniers d’un discours autoréférentiel qui tient pour acquis a priori que l’arabe du Coran est d’origine divine, se disqualifient donc eux-mêmes scientifiquement parlant.
Les commentateurs ont néanmoins tort de se gausser de ce dogme qu’est l’idjaz. Le Coran est bien en effet un livre assez unique dans son genre ne serait-ce que par quelques-unes de ses principales caractéristiques.
Il n’est pas conçu selon l’ordre chronologique.
Il n’est pas non plus conçu suivant un ordre thématique quelconque.
Le Coran est aujourd’hui présenté avec ses chapitres classés à peu de chose près par ordre de grandeur, de la plus longue à la plus petite, donc en désordre complet par rapport à la chronologie de sa « révélation », et notamment en mélangeant versets dictés à Médine, versets dictés à La Mecque, versets « abrogeant » (nasikh) et versets abrogés (mansoukh), etc. Seul compte pour cette présentation désastreuse d’un livre si important de faciliter sa « récitation » qui, dans ces conditions, se rapproche plus d’un rabâchage que d’une lecture approfondie, à tout le moins.
N.B. Même la fondamentale distinction en terre d’islam entre versets mecquois ou versets médinois (les derniers abrogeant les premiers) n’est pas respectée, il faut la déduire du texte à la suite de longs et savants calculs
Prions les dieux (tous les dieux possibles) pour que les lois de ce pays continuent encore longtemps à nous laisser libres…
— De ne pas être convaincu par tout ceci.
— De ne pas adhérer à ce dogme de l’idjaz.
— D’exprimer cette opinion et de la faire partager.
La théorie du Coran incréé… Mon Dieu, mais comment peut-on croire ça ??? L’œil a son point aveugle dite tache de Mariotte. Nous sommes bien obligés d’admettre que nombre de nos congénères humains ont un cerveau lui aussi doté malheureusement d’un équivalent intellectuel de la tache aveugle de Mariotte. Arrivés à certains endroits de la route (dans des courbes ou dans des côtes) leur cerveau passe au point mort, il ne fonctionne plus. Leur foi n’a plus rien à voir avec la raison. Leur religion n’a plus rien à voir avec l’intelligence.
Reste bien entendu l’hypothèse où le Coran serait une parole démoniaque ou diabolique puisque certains versets reconnaissent explicitement que Satan peut tromper même les plus grands
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prophètes : « Nous n’avons envoyé avant toi ni messager ni prophète sans que le démon n’intervienne dans ses désirs » (chapitre 22, verset 52).
— En ce qui nous concerne, nous récusons néanmoins également cette hypothèse de l’intervention du Diable (dans certains versets, qui seraient sataniques comme ceux du chapitre 53 sur les trois déesses gharaniq, les versets 20 bis et 20 ter), car nous ne croyons pas en l’existence du Diable et le Coran est bien une parole humaine. Même jusque dans sa prétention de n’être qu’une parole divine il est justement humain, trop humain, terriblement humain. L’esprit du mal n’est pas une force extérieure à l’Homme, MAIS UNE FORCE (NÉGATIVE) INTÉRIEURE À L’ÊTRE HUMAIN.
— Et nous ne respectons par conséquent l’islam et les musulmans que dans l’exacte mesure où ils nous respectent nous autres kouffar ou mouchrikoun (athées, agnostiques, panthéistes comme John Toland, ou adeptes des cultes de dulie ou hyperdulie), cela s’appelle la réciprocité, c’est un des principes de base de toute vie en société.
— Sur un plan négatif, cela donne la loi du talion théorisée par les Hébreux dans la Bible, cela donne la nécessité de sanctionner toute mauvaise action dans l’ancien druidisme, comme le reconnaît saint Patrice lui-même dans le Senchus Mor : il y a renforcement de la cohésion sociale (dans le cas des sociétés païennes en tout cas) quand une mauvaise action ne reste pas impunie (Intud i ngeindtleacht gnim olc mad indechur).
— Sur un plan plus positif cela donne cela donne eh bien le plus grand respect justement : je ne fais pas à autrui ce que je ne voudrais pas qu’il me fît (règle d’or). Alors petite question maintenant, vous qui croyez en Dieu (en la conception de Dieu que l’on désigne sous le nom d’Allah), me respectez-vous moi qui ne suis ni juif ni chrétien ni musulman ni parsi ni sabéen mandéen ni parsi, mais dont les idées oscillent suivant les sujets ou mon humeur entre panthéisme (tout est dieu) agnosticisme (je ne suis pas sûr de la voie cultuelle qui doit être suivie par tout le monde) voire athéisme ou dulies ?
— Négativement constatons qu’il n’y a dans le Coran (dans le Coran) aucun équivalent des paraboles de la femme adultère, du fils prodigue, du bon samaritain, du publicain, du centurion, des ouvriers de la onzième heure, ni d’appel au pardon dès ce bas monde ayant la grandeur du cri que l’on attribue à ce personnage christique par définition du haut de sa croix. Saint Luc 23,33. Arrivés au lieu dit du Crâne, ils l’y crucifièrent ainsi que les malfaiteurs, l’un à droite et l’autre à gauche. Jésus, lui, s’exclama : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font » [crucifier Dieu lui-même].
Je terminerai donc le présent chapitre par cette citation d’Omar Khayyam (1048-1122) : Ami musulman « referme ton Coran. Pense et regarde librement le ciel et la terre. »
1) Comme il y a dans la Bible un texte mentionnant que Goliath a été tué par David et un autre (2 Samuel 21,19) stipulant qu’il a été abattu PAR UN HOMME DE LA GARDE DU ROI DAVID, ELHANAN, FILS DE YAARÉ-ORÉGUIM, les Témoins de Jéhovah soutiennent qu’il y avait deux Goliath. Ce qui est contraire au principe du rasoir d’Ockham.
2) Ibrahim ibn Sayyâr al-Nazzâm (mort en 846), théologien rationaliste moutazilite a également avancé en son temps la théorie du sarfa. Elle consistait à dire que Dieu était délibérément intervenu pour empêcher les Arabes de produire un texte semblable au Coran.
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CRITIQUES D’ANTAN.
Le Coran, comme son nom l’indique, n’était pas à l’origine identifié à la Révélation, mais se présentait comme « un rappel » de celle-ci (11,120 ; 21,10 et 50 ; 29,51 ; 36,69), une méditation de textes déjà connus : « Ainsi, Nous te contons certains récits des temps révolus et c’est bien un rappel de Notre part que Nous t’apportons » (20,99). Comment dès lors continuer à identifier Coran et Révélation.
Le mot « Coran » signifie « récitation », « lectionnaire » et renvoie aux catéchèses en syriaque consignées sur des feuilles volantes destinées aux prosélytes arabes. NDLR. Tandis que certains chapitres commencent par d’autres séries de trois lettres, vingt-neuf chapitres commencent par la série des trois lettres « Alif, Lam, Mim ». Comme les musulmans ne connaissent plus aujourd’hui le sens de ces trois lettres, ils les mettent au nombre des miracles du Coran (voir 80,13-16). Ces feuillets ont ensuite été rassemblés et assemblés sans suite logique (par ordre de grandeur décroissante) par le calife Othman, mort en 654.
« C’est lui qui a fait descendre le livre sur toi [Mahomet]. Il s’y trouve des signes sans équivoque qui sont la Matrice du Livre et d’autres figuratifs. Ceux qui ont le cœur malade s’attachent à ce qui est figuratif, et sèment la discorde en cherchant à les interpréter. Or, nul ne connaît leur interprétation, à part Dieu. Ceux qui savent assurément disent : Nous y croyons. Tout vient de notre Seigneur ! Mais seuls ceux qui sont intelligents s’en souviennent » (3,7).
Le musulman pieux ne doit donc se poser aucune question au sujet de ce qui lui est révélé au nom de Dieu, mais se contenter d’apprendre par cœur le Coran, car : « Voilà le livre dans lequel il n’y a rien de douteux » (2,1). Et le comble est que cette attitude est même assimilée à de l’intelligence ! Celui qui se poserait des questions est d’entrée de jeu disqualifié comme ayant le cœur « malade » (2,10). N’est-il pas coupable de rechercher « la corruption » ?
« Lorsqu’on leur dit 'ne semez pas la corruption sur la terre', ils répondent : nous ne sommes que des réformateurs ! Or ne sont-ils pas eux-mêmes des corrupteurs ? Mais ils n’en ont pas conscience ! »
La foi n’a rien à voir avec l’intelligence c’est bien connu et il semble bien en l’occurrence qu’en terre d’islam (dar al islam) on préfère les têtes bien pleines aux têtes bien faites. Dans les écoles coraniques, les élèves, qu’ils soient arabophones ou pas, doivent réciter toute la journée des versets du Corpus osmanien sans comprendre le sens des mots, comme des magnétophones.
Les Moutazilites se sont sortis de cette impasse en substituant à la notion de Coran incréé celle de Coran créé. C’est à dire en proposant de distinguer le Coran incréé, parole de Dieu, restée près de Dieu, dénuée de toute équivoque, et le Coran créé, celui-là même qui est sorti de la bouche de Mahomet et doit être analysé ou interprété.
Il est d’usage chez les musulmans de répéter qu’au point de vue du style ce coran est inimitable, insurpassable (i’djaz al Qurani). Cette affirmation tout sauf objective …… la beauté est toujours subjective et tout comme la foi n’a rien à voir avec la raison, foi et science sont des modes de connaissance différents. De même qu’il serait ridicule, dans une discussion scientifique, de vouloir prouver sa thèse par un serment appelant Dieu à témoin, de même est-il ridicule dans le domaine de la foi de vouloir prouver un dogme à l’aide d’une vérité scientifique-…… est d’ailleurs mentionnée à plusieurs reprises dans le Coran lui-même qui semble étrangement beaucoup insister dessus.
« Même si les hommes et les djinns s’unissaient pour produire quelque chose de semblable à ce Coran, ils ne sauraient y parvenir, même s’ils se prêtaient mutuellement assistance » (17,88).
« Produisez un chapitre semblable à celui-ci […] si vous ne le faites pas, et vous ne le ferez pas, craignez le feu qui a pour combustible les hommes et les pierres et qui est destiné aux incroyants » (2, 23-24).
Qu’ils soient de Dieu, de Mahomet, ou de l’archange Gabriel, il y a en effet dans ce Coran humain et créé, pourquoi le nier, de nombreux passages à la poésie admirable, dignes de figurer dans les livres à emporter avec soi pour un long séjour dans une île déserte analogue à celle de Robinson Crusoé.
En voici un exemple.
Coran 53, 1-20.
« Par l’étoile quand elle disparaît ! Votre compatriote n’est pas égaré ! Il n’est pas dans l’erreur.
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Il ne parle pas de son propre mouvement. C’est seulement une révélation qui lui a été transmise, le puissant, le fort, la lui a fait connaître ; celui qui possède la force s’est tenu majestueusement alors qu’il se trouvait à l’horizon supérieur, puis il s’approcha et demeura là comme suspendu dans les airs. Il était à une distance de deux portées d’arc ou moins, et il montra donc à son serviteur ce qu’il lui a révélé. Son cœur n’a rien inventé, il l’a vu ; allez-vous donc élever des doutes sur ce qu’il vu de ses propres yeux ?
Il avait déjà vu le même être près du jujubier qui borne le séjour des délices, auprès duquel se trouve le jardin de la demeure éternelle, au moment où le jujubier était enveloppé par ce qui le couvrait.
Sa vue a soutenu l’éclat de la magnificence divine.
Il a vu les plus grands signes de son Seigneur.
Avez-vous considéré al Lat et al-Ouzza, et l’autre, Manat, la troisième ? »
Si les musulmans répètent à l’envi en effet le défi coranique qu’il est impossible de l’imiter, ceci ne signifie pas pour autant qu’ils permettent une telle imitation. Toute personne qui propose un ouvrage concurrent au Coran subit les pires critiques et risque sa vie. Il n’a pas manqué en effet, d’intellectuels arabes de La Mecque païenne, pour contester ce caractère inimitable ou insurpassable du Coran, et ce du vivant même de Mahomet, qui saura s’en venger quelques années plus tard.
L’exemple le plus connu en est Al Nadr Ibn al-harith. C’était un riche marchand qui commerçait avec al Hira (Irak) et la Perse d’où il aurait ramené des livres. Al Nadr Ibn al-harith avait l’habitude de raconter aux Mecquois des contes du Grand Rustem, d’Isfandiyar, et des rois de Perse ; en se vantant que les versets du Coran rapportés par Mahomet n’étaient pas meilleurs que les siens.
Pages 162-163 de la Vie de Mahomet, traduction de la Sirat Rasoul Allah par A. Guillaume.
« Chaque fois que l’apôtre s’asseyait dans une assemblée et invitait les gens à venir à Dieu et récitait le Coran ou menaçait les Couraïchites de ce qui était arrivé aux anciens peuples, Al-Nadr b. al-Harith b. Alqama b. Kalada b. Abdou Manaf prenait la parole quand il se levait et leur contait les histoires de Rustam le Héros et d’Isfandiyar ou des Rois de Perse, en disant : « Par Dieu, Mahomet n’est pas capable de conter une meilleure histoire que les miennes et ses discours ne sont que de vieilles fables qu’il a copiées comme je l’ai fait ».
Plusieurs des versets du saint Coran le concernent d’ailleurs tout particulièrement.
Chapitre 83, verset 13 : « Quand on récite nos versets devant lui, il dit : ce sont des contes d’anciens ! »
Chapitre 8, verset 31 : « Lorsque nos versets leur étaient récités, ils disaient : oui nous avons entendu ! Nous en dirions autant si nous le voulions ; ce ne sont que des fables des Anciens ».
Chapitre 6, verset 25 : « Il en est parmi eux qui viennent t’écouter, cependant que Nous avons entouré de voiles leurs cœurs, qui les empêchent de comprendre (le Coran), et dans leurs oreilles est une lourdeur. Quand même ils verraient toutes sortes de preuves, ils n’y croiraient pas. Et quand ils viennent disputer avec toi, ceux qui ne croient pas disent alors : « Ce ne sont que des fables des anciens ».
Chapitre 45, verset 9 : « Quand il prend connaissance de nos signes, il les tourne en dérision »
Chapitre 17, verset 85 : « Ils t’interrogent au sujet de l’esprit. Réponds : l’esprit procède du commandement de mon Seigneur ».
Un autre opposant de la même trempe, c’est-à-dire non convaincu par les versets que récitait Mahomet en état de transe, fut un dénommé Ouqba. Ci-dessous en effet les circonstances de la révélation de ce verset selon les musulmans pieux (il s’agit du genre littéraire appelé asbab-al-nouzoul en arabe).
L’auteur de la première hagiographie de Mahomet, Ibn Ishaq, nous a fourni par là même quelques informations intéressantes sur la nature du combat des idées auquel se livraient alors ces deux intellectuels avant qu’ils ne périssent dans la défense de leur caravane en 627 à Badr.
Ibn Ishaq a en effet mentionné dans sa biographie comment le chapitre 18 avait été révélé à Mahomet.
Les Couraïchites (les Mecquois) avaient envoyé An-Nadr bin Al-Harith et Ouqba bin Abi Mou'it consulter les rabbins de Yathrib/Médine avec les instructions suivantes : « Interrogez-les sur Mahomet, décrivez-le, et dites-leur ce qu’il raconte. C’est le peuple du premier livre et ils en savent plus que nous sur les prophètes.
Ils se mirent alors en route et une fois parvenus à Yathrib/Médine ils interrogèrent les rabbins à propos de Mahomet. Ils leur brossèrent son portrait et leur rapportèrent une partie de ce qu’il avait dit. Ils ajoutèrent : « Vous êtes le peuple de la Torah et nous sommes venus vous voir afin que vous puissiez nous parler de ce concitoyen à nous ».
Les rabbins répondirent : Posez-lui les trois questions que nous allons vous indiquer, et s’il y répond c’est vraiment un prophète qui a été envoyé par Dieu, s’il ne le fait pas, alors il raconte des choses qui ne sont pas vraies, auquel cas, ce sera à vous de voir quoi faire en ce qui le concerne.
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— Interrogez-le à propos des jeunes gens de la Caverne, de leur histoire.
— Demandez-lui qui a parcouru la terre du Couchant au Levant.
— Interrogez-le enfin sur le Rouh (âme ou esprit). Qu’est-ce que c’est ?
S’il répond à ces trois questions, alors c’est bien un prophète, et suivez-le, mais s’il ne vous dit rien, alors c’est un homme qui affabule, et vous déciderez à son sujet ce qui vous semblera le mieux.
An-Nadr et Ouqba s’en allèrent donc et revinrent chez les Couraïchites (à La Mecque) pour leur dire : « Ô tribu des Couraïchites, nous avons la solution qui mettra fin à vos doutes à propos de Mahomet. Les rabbins nous ont conseillé de lui poser trois questions… » et ils expliquèrent aux Couraïchites en quoi elles consistaient.
Ils allèrent ensuite trouver Mahomet et lui demandèrent : « Ô, Mahomet, dis-nous »… » et ils lui posèrent donc les trois questions qu’on leur avait demandé de poser.
Mahomet leur répondit : « Je vous donnerai demain la réponse aux questions que vous m’avez posées ». Mais il oublia de dire « Si Dieu le veut ».
Ils repartirent et Mahomet demeura quinze jours sans révélation divine à ce propos, aucune apparition de l’archange Gabriel n’eut lieu.
Les gens de La Mecque commencèrent à douter de Mahomet et se disaient : il avait promis de nous donner les réponses le lendemain, ça fait maintenant quinze jours et il ne nous a toujours rien dit pour répondre aux questions que nous avons posées.
Mahomet fut évidemment fort marri de ce que les gens de La Mecque disaient à son sujet.
Gabriel vint alors de la part de Dieu avec le chapitre sur les compagnons de la caverne [sourate 18] et des reproches sur sa compassion envers les idolâtres. Ce chapitre 18 lui donna aussi les réponses qu’ils lui avaient demandées, à propos des jeunes gens et du grand voyageur, etc. ».
NDLR. Fin de notre résumé de ce passage de la Sirat Rasoul Allah ou Vie de Mahomet par Ibn Ishaq. L’histoire de la caverne est une réminiscence un peu confuse de la légende chrétienne des 7 dormants d’Éphèse, le grand voyageur en question est Dhou al Qarnaïn autrement dit une réminiscence du Roman d’Alexandre (le Grand) par le pseudo Callisthène, quant à l’autre chapitre mis en relation avec les intellectuels faisant partie de l’opposition à Mahomet, concernés, c’est le chapitre 17 verset 85.
S’agissant du délai de 15 jours pour obtenir les réponses aux trois questions posées par ces deux intellectuels mecquois, il y a en gros trois types de réactions.
— Les hommes dotés d’une intelligence de type X (bêtes et méchants, stupides, racistes, ignorants) comme votre serviteur maître d’œuvre de cette compilation, pensent que c’est le délai qu’il fallut à Mahomet ou ses collaborateurs pour réunir la documentation nécessaire aux réponses.
— Les hommes dotés d’une intelligence de type Y (gentils et intelligents, fins, antiracistes, qui savent) pensent que ce délai est dû au fait que Dieu a été vexé que la traditionnelle formule Inch’Allah soit omise.
— La réaction des musulmans croyants. Il s’agit là d’ailleurs d’une première preuve de la véridicité de Mahomet. En effet, s’il n’était pas un Envoyé de Dieu, il aurait fourni des réponses aux questions dès le lendemain sans attendre. Mais le fait qu’il n’ait pu répondre que quinze jours plus tard, dans l’attente de la permission divine, démontre bien que ce fut révélation provenant uniquement de Dieu et que Mahomet n’était pas un faux prophète.
Al Nadr et Ouqba ayant eu la mauvaise idée quelques mois plus tard de se retrouver pris dans la bataille de Badr en mars 624 (attaque d’une caravane mecquoise par Mahomet avec l’appui de milliers d’anges invisibles), ils furent faits prisonniers puis exécutés sur ordre de Mahomet quelques jours plus tard sur le chemin du retour à Médine.
Rappelons qu’Al Nadr était celui qui s’était moqué de lui à La Mecque en disant que ses prétendues révélations n’étaient que des fables et qu’elles étaient moins divertissantes et instructives que celles des contes persans.
Rappelons enfin qu’un des rivaux de toujours de Mahomet, le grand prophète de l’Arabie centrale
Mousaïlima ibn Thimâma ibn Bani Hanifa de la Yamama se moquait d’ailleurs dans son Coran à lui de l’invraisemblable chapitre dit de l’éléphant (sourate 105), si l’on en croit divers auteurs.
« L’éléphant, qu’est-ce qu’un éléphant, qui peut te dire ce qu’est un éléphant ?
Il a une pauvre queue, et une longue trompe, c’est une partie insignifiante de la création de ton Dieu ».
Ibn Kathir mentionne un autre verset de Moussaïlima, présenté comme étant une réplique chapitre 103 du Coran (même schéma métrique) : O daman des rochers (ouabr) O daman des rochers, tu n’as que deux oreilles et un tronc, et le reste de ton corps creuse et fouit.
N.B. On peut douter de l’objectivité de l’information vu le contexte.
Ce que l’on a pu sauvegarder des fragments du Coran de Moussaïlima nous montre néanmoins qu’outre la prose bien entendu il recourait lui aussi beaucoup et tout comme le Coran de la période
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mecquoise de son concurrent Mahomet aux versets de type sadj’ des kahana (devins) ou des shou’ara (poètes : singulier sha’ir).
Plus sérieusement, on peut noter que Moussaïlima appelait son dieu Ar Rahman ce qui signifie le miséricordieux. Il est difficile d’en savoir plus, les sources musulmanes l’ayant évidemment toutes caricaturé (on se demande bien pourquoi dans ces conditions il avait commencé par contrôler plus de territoire que Mahomet avant son exil à Yathrib/Médine : une grande partie de l’Arabie centrale et orientale autour de son haram de la Yamama).
Mansour ibn Sarjoun (saint Jean damascène (676-749) qui comprenait parfaitement l’arabe puisqu’il était bilingue a également parlé du Coran dans son traité contre les hérésies.
« Beaucoup d’autres absurdités dignes de rire sont rapportées dans cet Écrit, et il se vante qu’il est descendu sur lui venant de Dieu. Mais nous disons : qui témoigne que Dieu lui a donné une Écriture, ou qui, parmi les prophètes, a annoncé qu’un tel prophète devait venir ? Nous les mettons dans l’embarras quand nous leur disons : Moïse avait reçu la Loi sur le Sinaï, à la vue de tout le peuple, quand Dieu apparut dans la nuée, le feu, les ténèbres et la tempête ; et tous les prophètes, depuis Moïse, ont tour à tour annoncé que le Christ viendra, que le Christ est Dieu et que le fils de Dieu arrivera en prenant chair, sera crucifié, qu’il mourra et ressuscitera, et que c’est lui qui jugera les vivants et les morts. Et quand nous disons : pourquoi votre prophète n’est-il pas venu de la même façon, avec d’autres pour lui porter témoignage, et pourquoi Dieu, qui a donné la Loi à Moïse aux yeux de tout le peuple, sur une montagne fumante, ne lui a-t-il pas transmis de même l’Écriture dont vous parlez, en votre présence, pour asseoir votre certitude ? Ils répondent que Dieu fait ce qu’il veut. Cela, disons-nous, nous le savons bien nous aussi, mais nous demandons comment l’Écriture a été révélée à votre prophète. Ils répondent que c’est pendant son sommeil que l’Écriture est descendue sur lui. Pour nous moquer d’eux nous disons : puisqu’il a reçu l’Écriture pendant son sommeil, sans se rendre compte de cette activité, l’adage populaire lui convient parfaitement qui dit……
Nous leur demandons à nouveau : puisque lui-même vous a ordonné, dans votre Écriture, de ne rien faire ou de ne rien recevoir sans témoins, pourquoi ne lui avez-vous pas demandé : toi le premier, prouve à l’aide de témoins que tu es prophète et que tu es envoyé de Dieu ; et quelle Écriture témoigne en ta faveur. Honteux, ils gardent le silence. Avec raison nous leur disons : puisqu’il ne vous est pas permis d’épouser une femme, ni d’acheter ni d’acquérir sans témoins, et que vous n’admettez pas de posséder ne fût-ce que des ânes ou du bétail, sans un témoin, vous ne prenez donc femmes, biens, ânes et le reste que devant témoins ; seules donc la foi et l’Écriture vous les acceptez sans un témoin ! Car celui qui vous a transmis cette Écriture ne possède de garantie d’aucun côté, et on ne connaît personne qui ait témoigné en sa faveur par avance. Bien plus, il l’a reçue pendant son sommeil !…
Ils nous accusent aussi d’idolâtrie parce que nous nous prosternons devant la croix qu’ils ont en horreur. Nous leur disons alors : pourquoi donc vous frottez-vous à cette pierre dans votre Kaaba et aimez-vous la pierre au point de l’embrasser ? Certains d’entre eux disent que c’est sur elle qu’Abraham s’est uni à Agar, d’autres qu’il y a attaché la chamelle au moment de sacrifier Isaac. Nous leur répondons : il y avait là, selon l’Écriture, une montagne buissonneuse et des arbres ; Abraham en coupa pour l’holocauste et en chargea Isaac, et il laissa les ânes en arrière avec les serviteurs. Pourquoi alors ces stupidités ? À cet endroit, en effet, il n’y a pas de bois provenant d’une forêt, et les ânes n’y passent pas. Ils éprouvent alors de la honte ; ils disent cependant que c’est la pierre d’Abraham. Ensuite nous disons : qu’elle soit d’Abraham, comme vous l’affirmez stupidement ! Vous n’avez pas honte de l’embrasser uniquement parce qu’Abraham s’est uni sur elle à une femme, ou parce qu’il y a attaché la chamelle, mais vous nous blâmez parce que nous nous prosternons devant la croix du Christ qui a ruiné la puissance des démons et les séductions du diable ! On raconte d’ailleurs que cette pierre est la tête d’Aphrodite, devant laquelle ils se prosternaient et qu’ils appelaient Khabar. Et de nos jours encore, la trace d’une effigie apparaît à ceux qui observent minutieusement.
Ce Mahomet, comme il a été dit, a composé de nombreux écrits stupides et donné un titre à chacun d’eux…
Il y a encore l’écrit de la Chamelle de Dieu. À son sujet il dit qu’une chamelle avait été envoyée par Dieu et qu’elle buvait le fleuve entier et ne pouvait plus passer entre deux montagnes, faute d’espace suffisant. Il y avait, dit-il, un peuple à cet endroit : un jour c’est lui qui buvait l’eau, et ensuite, c’était la chamelle. Quand elle buvait l’eau, elle les nourrissait en leur donnant du lait à la place de l’eau. Mais ces hommes qui, dit-il, étaient méchants, se levèrent et tuèrent la chamelle (Saint Coran 11, 64 ; 54,27-28. L’histoire ne subsiste plus qu’à l’état de fragments disjoints dans notre texte).
NDLR. Pierre de La Crau n’a rien découvert de spectaculaire à propos des origines de l’islam. L’existence à l’époque de millions de chrétiens arabes en Jordanie en Syrie ou en Irak a permis dès le début de comprendre et d’apprécier (ou pas) sans équivoque les divers versets du Coran. Voir à ce
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sujet la Risalat al-Kindi ou apologie d’Al-Kindi, un traité religieux arabe, transmis dans les milieux chrétiens,
Abd al-Masih ibn Ishaq al-Kindi est un des deux auteurs de cet ensemble de deux lettres, l’une d’un musulman l’autre d’un chrétien, chacun faisant l’apologie de sa religion et invitant l’autre à le rejoindre. Les lettres sont de longueur inégale, Al-Hachemi se contentant de présenter l’islam, tandis qu’Al-Kindi réfute dans un premier temps les affirmations de son correspondant avant de faire une présentation du christianisme.
Cette correspondance aurait eu lieu à l’époque du calife Al-Ma'moun (813-834). Ce que l’on sait de l’ouverture d’esprit du Calife ne vient pas contredire cette assertion.
Cet Abd al-Masih ibn Ishaq al-Kindi est visiblement chrétien (nestorien ?) vu son nom. Ce texte a été traduit en latin en 1142.
Abd al-Masih ibn Ishaq al-Kindi y écrit donc que le Coran n’est nullement une preuve de la mission prophétique de Mahomet, pour plusieurs raisons.
Premièrement ce n’est pas un livre unique en son genre. Il y en a de plus éloquents.
La composition et la rédaction du Coran sont loin d’être parfaites. C’est de la prose rimée, brisée.
En outre le Coran manque de précision dans les termes et dans les récits.
Le Coran n’est donc pas un miracle merveilleux d’après lui et il l’est seulement pour des gens illettrés, des étrangers ou des barbares.
Il n’est pas inimitable. D’autres ont produit des œuvres semblables (toujours selon Al Kindi), mais n’ont pas eu le soutien qu’a eu Mahomet.
Et enfin, la maîtrise de la langue arabe n’était pas un privilège des Couraïchites (la tribu de Mahomet), les Kindites furent aussi des hommes puissants de grands orateurs et des poètes éloquents.
Pour ce qui est du Coran proprement dit, la réponse d’Al Kindi commence ainsi.
« Nous en arrivons maintenant à ce que tu considères comme ta forteresse, à savoir, le Livre qui est dans tes mains. Ton argument est que les récits parlant des prophètes et du Messie prouvent qu’il a été révélé par Dieu, parce que ton maître était analphabète 1) et qu’il ne pouvait acquérir aucune connaissance semblable sauf par inspiration. Tu dis « qu’aucun homme ni aucun génie ne pourrait en produire de semblable » ; et que, « Si vous avez des doutes quant à ce que nous avons révélé à notre serviteur, apportez une sourate du même genre, et appelez qui vous voulez pour en attester sauf Dieu si vous êtes des hommes véridiques. » Et, encore « si Nous avions envoyé ce Coran à une montagne ; tu aurais vu s’humilier, et s’écrouler, sous l’effet de la crainte de Dieu, etc. ». C’est à tes yeux la principale preuve de la revendication de ton Maître, à l’instar du miracle de la Mer Rouge, de l’arrêt de la course du Soleil dans le ciel, de la résurrection des Morts et d’autres prodiges, œuvres des Prophètes de jadis ou du Messie. Par ma vie ! Cet argument en a effectivement trompé beaucoup. Mais c’est un subterfuge vide et creux. La réponse se trouve à portée de main, et pas très loin, comme je vais te le montrer. Sa révélation en sera peut-être amère, mais elle finira par être salutaire ».
Al Kindi poursuit en ajoutant que « Tout ce que j’ai dit (au sujet du coran) est conforme aux faits et à l’évidence tels qu’ils sont admis par vous. Pour preuve nous nous référons au texte du coran lequel porte à confusion par absence d’ordre et de logique. Les différents passages se contredisent et bien souvent n’ont aucun sens. Comment, sans trahir son ignorance, peut-on présenter un tel écrit comme un message à l’appui d’une mission prophétique et le placer à égalité avec les miracles de Moïse et de Jésus ? Assurément aucune personne ayant un grain de bon sens ne pourrait penser une telle chose, encore moins nous-mêmes qui, versés en histoire et en philosophie, ne pouvons-nous laisser ébranler par un raisonnement aussi trompeur.… Il est évident, pour quiconque a lu le Coran et a vu de quelle façon, dans ce livre, les récits sont assemblés n’importe comment et entremêlés, que plusieurs mains – et nombreuses – s’y sont mises et ont créé des incohérences, ajoutant ou enlevant ce qui leur plaisait ou leur déplaisait…
Il y a eu ensuite les agissements de Hadjâdj ibn Yousouf, qui a rassemblé toutes les copies qu’il a pu saisir, et a fait omettre de nombreux passages du texte.
… Six exemplaires du texte ainsi révisé ont été envoyés en Égypte, en Syrie, à Médine, à La Mecque, à Koufa et Bassora. Après cela, il a rappelé et fait détruire toutes les autres copies précédentes, comme Osman l’avait fait avant lui en son temps ».
Plus près de nous, il y eut le cas d’al-Moutanabbi. Abou l-Tayyib Ahmad ibn al-Houssaïn dit al-Moutanabbî (né en 915, mort en 965) est considéré comme le plus grand poète arabe de tous les temps, celui qui a pu au mieux maîtriser la langue arabe et ses rouages.
Il naquit dans l’actuel Irak, dans la ville de Koufa. Son père était porteur d’eau, mais exercera plus tard le métier de panégyriste professionnel. Il fut élevé dans un milieu bédouin d’obédience chiite, ce qui lui donna une solide formation religieuse. En 924, après une attaque qarmate à Koufa, il partit vivre dans le désert avec eux. À l’âge de dix-sept ans il se déclara prophète lui aussi, prétendit pouvoir faire
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un Coran similaire à celui de Mahomet, puis fomenta une rébellion qarmate contre Lattaquié en Syrie. La tentative échoua et il fut emprisonné à Homs. C’est alors qu’on lui décerna le surnom d’al-Moutannabi ce qui signifie « celui qui se dit prophète ». Il ne fut libéré qu’en 935 après avoir fait preuve d’un repentir apparemment sincère. En 948 il entra au service de l’émir Ali Saïf al-Daoula et tomba amoureux de sa sœur Khaoula. Moutannabi quitta sa cour après une violente dispute qui l’opposa au grammairien Khalaouaih, qui n’avait pas hésité à le gifler devant l’émir lui-même. Il rejoignit donc en 957 une autre cour princière, celle des Ikhchidides, et écrivit des poèmes pour Abou al-Misk Kafour. Il fut ensuite nommé gouverneur de Sidon, mais à cause de ses poésies satiriques à l’encontre du prince forcé dès 961 de quitter la région. Il partit alors pour Chiraz en Iran, où il se mit au service du prince Adoud al-Daoula. Il trouve la mort accidentellement à l’âge de 41 ans, après avoir été attaqué par des brigands dans le désert irakien.
1) Que Mahomet ait été analphabète est une légende ! En tant qu’homme d’affaires (caravanier), il devait au moins savoir signer et faire des rudiments de calcul. Cette légende est née en fait d’une incompréhension du terme arabe oummi (singulier) oummiyoun (pluriel) qui ne désigne pas quelqu’un ni un peuple ne sachant ni lire ni écrire, MAIS UN PEUPLE DÉPOURVU DE SAINTES ÉCRITURES COMME CELLES DES JUIFS OU DES CHRÉTIENS. UN HOMME OU UN PEUPLE NI JUIF NI CHRÉTIEN, DONC PAÏEN. Et de toute façon si Mahomet était analphabète, il ne manquait pas dans son entourage d’hommes sachant lire et écrire et pouvant pallier cette lacune pour lui.
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LES VERSETS TOLÉRANTS DU CORAN.
Par verset tolérant nous entendons les versets n’appelant pas à la contrainte ni à l’usage de la force immédiate dès ce monde ci, car il va de soi que dans le Coran, comme dans les évangiles, la menace d’un sort douloureux dans l’autre monde (l’enfer) est constamment brandie comme alternative primaire au paradis.
Le recteur de la grande Mosquée de Paris a publié en 2007 un petit livre très diffusé (il s’agissait d’une importante maison d’édition) intitulé « le Coran tolérant ».
Le fait est qu’il y a bel et bien des versets du Coran qu’on peut qualifier de tolérants ou de positifs (hors contexte !) Des versets qui encouragent le pardon, la générosité et même une attitude conciliante envers les non-musulmans !
Le verset 256 du chapitre 2 est un des plus souvent cités on se demande bien pourquoi. Il figure dans une sourate médinoise mais il s’agit peut-être d’un verset mecquois. Enfin bref peu importe, car il est de toute façon abrogé par les versets de l’épée (9,5) et similaires (9,29, sans oublier 8,39 ni 47,4).
Texte : « Nulle contrainte en religion, car le bon chemin se distingue de l’erreur ».
Notons que sa signification est discutée, car rien ne prouve que cela s’applique aux autres religions. Cela veut peut-être tout simplement dire : « nulle contrainte en matière de… culte musulman ».
Verset 63 du chapitre 4. Texte : « Voilà ceux dont Dieu sait ce qu’ils ont dans le cœur… exhorte-les, et adresse-leur des paroles convaincantes à propos du salut de leur âme ».
Verset concernant les « hypocrites ».
Verset 32 du chapitre 5. Texte : « Nous avons prescrit pour les Enfants d’Israël que quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes ».
Pour être sûr que ce verset est vraiment porteur d’un message de tolérance, il faudrait savoir si la « guerre à Dieu et à son messager » inclut le refus de se convertir, d’obéir ou de payer la djizya (impôt réservé aux gens du livre = chrétiens et juifs).
Verset 54, chapitre 6. « Votre Seigneur s’est prescrit à Lui-même la miséricorde. Et quiconque d’entre vous a fait du mal par ignorance, et ensuite s’est repenti… Il est celui qui pardonne ».
Il est important avant d’envisager de s’en repentir de savoir de quel mal il s’agit.
Verset 108, chapitre 6. « N’injuriez pas ceux qu’ils invoquent, en dehors de Dieu, car alors ils injurieraient aussi Dieu… Nous avons embelli (aux yeux) de chaque communauté ses propres actions ».
Embelli… ce qui explique aussi ce culte de dulie ou hyperdulie rendu à d’autres que Dieu… Si même Dieu nous induit en erreur maintenant, où allons-nous ?
Verset 151, chapitre 6. « Ne tuez qu’en toute justice la vie que Dieu a faite sacrée. Voilà ce que Dieu vous a recommandé de faire ».
Pour savoir de quelle vie il est question dans ce verset, il faut se rapporter au hadith suivant.
« Ô, Abou Hamza, qu’est-ce qui fait que la vie et les biens d’un homme sont sacrés ? – Celui qui atteste qu’il n’y a pas d’autre divinité en dehors de Dieu, qui prie comme nous en se tournant vers la Qibla, et suit nos préceptes alimentaires est un musulman, a les mêmes droits et les mêmes devoirs que nous » (Boukhari).
Tout est donc dans la restriction (taqiya) « en toute justice », car la charia prévoit la peine de mort pour tout musulman qui apostasie ou qui commet l’adultère. La loi du Talion permet aussi le meurtre en réparation d’un meurtre (2,178). Enfin, les versets 9, 5 et 9, 29 autorisent le meurtre de ceux qui ne croient pas en Dieu ni au « jugement dernier »…
Verset 164, chapitre 6. « Chercherais-je un autre Seigneur que Dieu alors qu’il est le Seigneur de toute chose ? Nul ne commet le mal qu’à son propre détriment. Personne ne portera le fardeau d’un autre ».
Nombreux exemples de châtiments collectifs de la part de Dieu y compris dans l’Ancien Testament (destruction de peuples, de villes).
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Verset 60, chapitre 9. « Les aumônes ne sont que pour les pauvres, les indigents, ceux qui y travaillent, ceux dont les cœurs sont à gagner (à l’Islam), le rachat des captifs, ceux qui sont lourdement endettés, suivent le sentier de Dieu et pour le voyageur (en détresse).
Des cœurs à gagner… Il vaut mieux évidemment des conversions obtenues par de l’argent que par l’usage de la force, mais enfin LA PARABOLE DU BON SAMARITAIN A QUAND MÊME PLUS DE GRANDEUR D’ÂME.
Verset 99, chapitre 10. « Si ton Seigneur l’avait voulu, tous ceux qui sont sur la terre auraient cru. Est-ce à toi de contraindre les gens à devenir croyants ? ».
Réponse oui si on en croit les célèbres versets de l’épée (8,39 ; 9, 5 ; 9,29 ; 47,4) ainsi que la vie même de Mahomet.
Verset 3, chapitre 15. « Laisse-les manger et jouir de la vie, ils sauront assez tôt ! »
Cela ressemble fort à la menace d’un châtiment dans l’autre monde… ou celui-ci.
Verset 88, chapitre 15. « Ne regarde point avec envie les choses dont Nous avons donné jouissance temporaire à certains couples d’entre eux, ne t’afflige pas à leur propos et n’abaisse ton aile que sur les croyants ».
Même principe. Ce « à titre temporaire » ne fait pas très zen.
Verset 82, chapitre 16. « Il t’incombe seulement de transmettre (le message) en toute clarté ».
Non si l’on en croit les célèbres versets de l’épée déjà mentionnés (8,39 ; 9,5 ; 9,29 ; 47,4) ainsi que la vie même de Mahomet.
Verset 119, chapitre 16. « Ton Seigneur, envers ceux qui ont fait le mal par ignorance puis se sont repentis et amendés… sera celui qui pardonne et fait miséricorde ».
Même chose que pour verset 54 chapitre 6, il est important avant d’envisager de s’en repentir de savoir de quel mal il s’agit.
Verset 126, chapitre 16. « Si vous punissez, infligez [à l’agresseur] une punition égale au tort qu’il vous a fait. Mais si vous supportez, c’est encore mieux ».
Ce qui vient à l’esprit de Dieu en premier c’est quand même la loi du talion.
Verset 15, chapitre 17. « Quiconque suit le droit chemin ne le prend que pour lui-même ; et quiconque s’égare, ne s’égare qu’à son propre détriment. Nul ne portera le fardeau d’autrui. Et Nous n’avons jamais puni [un peuple] avant de [lui] avoir envoyé un Messager ».
Mais il faut lire le verset suivant : l’horreur absolue, le génocide, l’Ancien Testament : « Et quand Nous voulons détruire une cité, Nous ordonnons à ceux qui y vivent dans l’aisance de se livrer à leurs iniquités… puis nous la détruisons entièrement ».
Verset 33, chapitre 17. « Ne tuez pas l’homme que Dieu vous a interdit de tuer sinon pour une juste raison. Lorsqu’un homme est tué injustement nous donnons à ses proches parents le pouvoir [de le venger] ».
Même remarque que pour le verset 151 chapitre 6. Que veut dire « injustement » ?
Verset 130, chapitre 20. « Supporte ce qu’ils disent ».
Parfait ! Ne parlons donc plus de blasphème !
Verset 63, chapitre 25. « Les serviteurs du Tout Miséricordieux sont ceux qui marchent humblement, qui, lorsque les ignorants s’adressent à eux répondent : « Paix ».
Verset 54, chapitre 28. « Voilà ceux qui recevront deux fois leur récompense pour leur patience, pour avoir répondu au mal par le bien, et pour avoir dépensé de ce que Nous leur avons attribué ».
Verset 55, chapitre 28. « Quand ils entendent des futilités, ils s’en détournent et disent : « À nous nos actions, à vous les vôtres. La paix soit sur vous. Nous ne recherchons pas la compagnie des ignorants ».
Ces versets sont incontestablement tolérants, quoique pas très polis pour les « ignorants » (les non-musulmans sans doute) et un peu intéressés (double récompense dans l’autre monde). Mais enfin c’est mieux que de sortir son épée.
Verset 46, chapitre 29. « Ne discutez que de la meilleure façon avec les gens du Livre, sauf ceux d’entre eux qui sont injustes. Et dites : « Nous croyons en ce qu’on a fait descendre vers nous et descendre vers vous, notre Dieu et votre Dieu sont le même Dieu et c’est à Lui que nous nous soumettons ».
Première remarque : qui sont les « injustes », que veut dire « injustes » dans ce cas ?
Pour savoir si ce verset est tolérant, il faut d’abord savoir ce que le Coran entend par « injustes ». Les versets 6,21 et 18,57 disent clairement que ce sont les mécréants qui sont les injustes. Ce verset est donc abrogé par 9.30 qui appelle à l’anéantissement des chrétiens qui disent que Jésus est le fils de Dieu et des juifs qui disent que c’est Uzair (Esdras ???) qui est le fils de Dieu.
Deuxième remarque : qu’Allah dieu suprême du panthéon mecquois soit le dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob ainsi que le dieu trine des chrétiens pose la question de savoir ce qu’est… un dieu ?
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Verset 18, chapitre 35. « Personne ne portera le fardeau d’autrui. Et si une âme surchargée [de péchés] demande à l’aide, rien de sa charge ne sera supporté par une autre même si c’est un pr0che parent. Tu n’avertis en fait que ceux qui craignent déjà le Seigneur en secret ».
Donc pas d’intercession, mais pas de responsabilité collective non plus, surtout des siècles après !
Verset 15, chapitre 39. « Adorez donc, en dehors de Lui, qui vous voudrez ! Le jour de la résurrection, les perdants seront, etc.… »
La fin du verset contredit les versets 6,164 et 35,18 au sujet des fautes assumées par d’autres personnes que celles qui les ont commises et revient au principe de la responsabilité collective.
Verset 34, chapitre 41. « La bonne action et la mauvaise ne sont pas pareilles. Repousse [le mal] par ce qui est meilleur ; et ton ennemi deviendra un ami intime. Mais (ce privilège) n’est donné qu’à ceux qui supportent patiemment ».
Parfait ! Le reste de la sourate est simpliste par contre.
Verset 14, chapitre 45. « Dis aux croyants de pardonner à ceux qui n’attendent pas les jours de Dieu afin qu’il rétribue [chaque] peuple pour ce qu’il aura fait ! ».
Encore le principe contradictoire de la punition collective. Or même un dieu d’amour déterminé à punir par la damnation éternelle tout scepticisme au sujet de la vie après la mort devrait savoir qu’il y a dans tous les peuples des enfants, des handicapés mentaux, des malades mentaux et les vieillards atteints de sénilité, qui ne sont pas ou ne sont plus en mesure de comprendre le concept de vie après la mort.
Verset 45, chapitre 50. « Nous savons parfaitement ce qu’ils disent. Tu n’as pas pour mission d’exercer sur eux une contrainte ».
D’accord ! Mais l’enfer attend quand même les non-croyants !
Verset 8, chapitre 60. «Dieu ne vous interdit pas d’être bons et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures ».
Encore heureux ! Notons que quelques lignes plus haut il est question d’inimitié de la part de ceux qui suivent Abraham et que quelques lignes après il est conseillé au musulman de pas avoir de telles gens (mécréants) comme maîtres ni patrons.
Verset 10, chapitre 73. « Supporte ce qu’ils disent ; et écarte-toi d’eux d’une façon convenable ».
Il est difficile de savoir avec précision de quels non-musulmans il est question, mais Dieu seul [s’il existe] jugera ! Parfait !
Verset 45, chapitre 79. « Tu n’es que l’avertisseur de celui qui le craint [le jugement dernier].
Même remarque que précédemment.
Sourate 109, incontestablement mecquoise (on sent que Mahomet n’était pas encore parvenu au pouvoir et qu’il n’était seulement que dans l’opposition).
« Je n’adore pas ce que vous adorez.
Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore.
Je ne suis pas adorateur de ce que vous adorez.
Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore.
À vous votre religion, et à moi ma religion ».
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LES VERSETS SATANIQUES.
Le problème est que cette apparemment tolérante sourate 109 est sans doute liée à la période des Gharaniq c’est-à-dire au moment où Mahomet [ou Dieu] crut plus judicieux d’arriver à une sorte de compromis avec ses compatriotes mecquois à propos des cultes à vouer à Allât, al-Ouzza et al-Manât (Coran 53.19-20) en tant qu’intermédiaires (anges ou démons). Cela signe plus exactement la fin de la tentative de syncrétisme en question et le passage à un autre essai de modus vivendi : la vie en communautés distinctes (Mahomet renonce à convertir au judéo-christianisme ses compatriotes, par la seule force de son verbe) qui constitua un véritable tournant dans la naissance de l’islam (615-619, rupture des relations commerciales et matrimoniales, émigration en Éthiopie).
Rappel des faits
La question dite des « versets sataniques » est depuis longtemps traitée par les orientalistes qui ont écrit sur le sujet : c’est le cas notamment de Montgomery Watt (1958), plus près de nous de Salman Rushdie, et de beaucoup d’autres.
Il ne peut évidemment exister aucune certitude dans ce genre de faits. Les seuls indices sont l’insistance des auteurs arabes à relater soit la totalité du récit, soit des bribes (comme la mention d’une adhésion des Mecquois à l’Islam suivie d’une rétractation) soit l’attestation d’un rapport entre cet épisode et l’émigration en Abyssinie d’une partie des premiers musulmans (mais cette émigration est placée parfois après l’incident, soit plus souvent avant).
L’incidence théologique de cet incident est néanmoins très importante, puisque cette intervention du Diable sur le texte sacré porte atteinte évidemment au dogme de l’infaillibilité de Mahomet (isma) et du coran (idjaz).
La tradition musulmane s’est donc attachée à minimiser, voire à nier, l’incident : ce qui était aussi une façon de le transmettre.
Deux passages du Coran sont habituellement mis en relation avec cette question : le premier est le chapitre de l’Étoile, où se trouvaient les versets contestés, mais où il demeure une trace de la mention en termes positifs des trois déesses (gharaniq) ; le second est le chapitre du Pèlerinage, où est mentionnée l’intervention de Dieu pour réparer l’erreur due à Satan.
Chapitre 53.
19 Avez-vous considéré al-Lât et al-'Ouzza
20 et Manât, la troisième ?
20 bis Ce sont les Sublimes Déesses Grues
20 ter et leur intercession est certes possible
21 Avez-vous les Mâles et Lui, les Femelles !
23 Ce ne sont que des noms dont vous les avez nommées, vous et vos pères. Dieu n’a fait descendre, avec elles, aucun pouvoir, etc.
Chapitre 22, 51-52.
C’est toujours dans le commentaire de ce passage qu’est rapporté l’épisode des versets sataniques, et jamais à sa vraie place (53,19-20) : passage qui est compris comme étant venu réparer le « faux pas » de Mahomet.
52. « Avant toi, Nous n’avons jamais envoyé de messager ni de prophète, sans que le Démon n’intervienne de par ses désirs, quand ils récitaient le message. Mais Dieu abroge donc ce que le Démon suggère, puis il confirme ses versets. Dieu est omniscient et sage ».
Une traduction plus littérale dirait : « Nous n’avons jamais envoyé avant toi ni apôtre ni prophète sans que, quand il désirait quelque chose – ida tamannâ –, le diable n’ait interféré au moyen de ce désir – oumniyati-hi –» .
L’interprétation du terme « umniya » a été au cœur de l’apologétique islamique visant à sauvegarder l’isma de Mahomet (son impeccabilité et son infaillibilité), car qu’est-ce qui prouve qu’il n’y a pas dans
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le Coran d’autres passages plus inspirés par les désirs personnels de Mahomet que par la parole divine ? Et on ne peut s’empêcher ici de penser à son mariage avec Zénobie femme de son fils adoptif Zaïd.
Chapitre 33, verset 37 : « Ô Mahomet, tu as dit un jour à cet homme envers lequel Dieu a été plein de bonté, et qu’il a comblé de ses faveurs : garde ta femme et crains Dieu ; et tu cachais dans ton cœur ce que Dieu devait bientôt mettre au grand jour. Il était cependant plus juste de craindre Dieu. Mais lorsque Zaïd prit un parti et résolut de répudier sa femme, nous te l’unîmes par mariage, afin que ce ne soit pas pour les croyants un crime d’épouser les femmes de leurs fils adoptifs après leur répudiation. La loi divine doit être suivie ».
C’était d’ailleurs l’avis d’Aïcha, l’épouse favorite de Mahomet, à propos des désirs en question, si l’on en croit ce hadith rapporté par Boukhari : « Ô Prophète, j’ai l’impression que ton Dieu s’est empressé de t’exaucer » (Sahih Boukhari, Livre 60, Hadith 311).
C’est Tabari (chroniqueur mort en 923) qui a rapporté l’essentiel des versions de l’événement, qui ont été reprises ensuite par la majorité des commentateurs, y compris dans leur infantilisme et leur puérilité (tristesse, intervention du diable, puis du bon dieu qui materne son prophète, etc. quel univers psychologiquement puéril que tout cela !)
Histoire des prophètes et des rois. L’envoyé de Dieu était attaché à l’intérêt des siens, et voulait les faire venir à lui par tous les moyens possibles. On rapporte qu’il souhaitait ardemment (tamanna) trouver un moyen de gagner leur cœur et un des moyens auquel il eut recours pour cela fut ce qu’Ibn Houmaïd m’a dit, d’après Samala, qui le tenait lui-même de Mohammed ibn Ishaq…
« Lorsque l’envoyé de Dieu vit que les gens se détournaient de lui, et qu’il lui fut pénible de constater qu’ils s’éloignaient de la révélation qu’il leur avait apportée de la part de Dieu, il souhaita (tamannâ) en lui-même que lui vienne de Dieu ce qui le rapprocherait des siens et il eut été heureux, à cause de son amour pour les siens et son attachement pour eux que quelque adoucissement fût apporté à ce qu’ils enduraient, à tel point qu’il s’en entretint lui-même et le souhaita (tamannâ-h) et le voulut, et Dieu fit descendre : Par l’étoile quand elle s’abîme, votre compatriote n’est pas égaré ! Il n’erre point. Il ne parle pas de son propre mouvement (chapitre 53, An-Najm] ; et quand il arriva à cette parole : « Avez-vous considéré al-Lât et al-'Ouzza et Manât, la troisième ? » (versets 53,19-20), le diable mit sur sa langue ce dont il s’entretenait lui-même et qu’il souhaitait (yatamannâ) que fût révélé pour les siens : Ce sont les Sublimes Grues (Déesses) et on peut demander leur intercession » (« tilka al-gharânîq al-'oulâ oua inna shafâ'ata-hounna tourtadhâ ») Quand les Couraïchites entendirent cela, ils se réjouirent et furent remplis de joie et d’étonnement de ce qu’il avait mentionné leurs divinités et ils tendirent l’oreille, tandis que les croyants approuvaient leur prophète pour ce qui leur était venu de leur seigneur, et ils ne l’accusaient ni de faute, ni d’illusion, ni de faux pas (glissement de langue, lapsus). Et lorsqu’il arriva à la prosternation et que la sourate fut terminée, il se prosterna, et les musulmans se prosternèrent comme leur prophète, en approbation de ce qu’il avait apporté et en allégeance à sa cause, et les mécréants (mouchrikoun) couraïchites ou autres qui étaient dans la mosquée se prosternèrent, ayant entendu mentionner leurs divinités et il ne resta personne dans la mosquée, croyant ou mécréant (kafir), qui ne se prosternât, à l’exception de Oualid ibn Moughaïra : car c’était un très vieux monsieur et il ne put se prosterner ; il prit donc de sa main une poignée de terre et se prosterna dessus. Ensuite les gens se dispersèrent et les Couraïchites sortirent de la mosquée, tout heureux qu’on ait fait mention de leurs divinités, disant « Mahomet a fort bien parlé de nos divinités, il a déclaré dans ce qu’il récitait : ce sont de sublimes grues (Déesses) et leur intercession est certes possible. »
La nouvelle de cette prosternation parvint à ceux des disciples du prophète qui se trouvaient en Abyssinie, où l’on ajouta que les Couraïchites avaient adopté l’Islam et certains d’entre eux se levèrent aussitôt pour revenir, mais d’autres prirent leur temps.
Gabriel alla donc trouver le prophète et lui dit : « Mahomet, qu’as-tu fait, tu as dit aux gens quelque chose qui ne t’est pas venu de Dieu, et tu as répété ce qui ne t’a jamais été dit ! ». Le prophète de Dieu fut alors profondément attristé et eut très peur de Dieu. Mais Dieu lui révéla, car il compatissait, pour le consoler et alléger sa peine, Dieu donc lui apprit qu’il n’était jamais venu avant lui de prophète ni d’apôtre qui n’ait eu de désir (tamannâ) semblable à celui qu’il avait eu (Tammana) ni qui n’ait eu de volonté semblable à celle qu’il avait exprimée sans que le Diable n’interfère (alqâ fî umniyati-hi) dans ledit souhait de la même façon qu’il était intervenu par sa bouche. Ensuite Dieu abrogea ce qu’avait suggéré le diable et confirma ses versets, c’est-à-dire : « Tu es comme certains prophètes et envoyés ».
Et Dieu révéla la sourate : « Avant toi, Nous n’avons jamais envoyé d’apôtre ni de prophète, sans que le Diable n’intervienne de par ses désirs. Mais Dieu abroge donc ce que le Démon suggère, puis il confirme ses versets. Dieu est omniscient et sage (22,52) ».
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Dieu dissipa ainsi la tristesse qui accablait son prophète et le rassura. Il abrogea ce que Satan avait mis dans sa bouche en se référant à leurs dieux : « Ce sont des grues sublimes dont l’intercession est acceptée ». [En faisant à la place suivre ces mots] Allat, al-'Ouzza et Manate la troisième, l’autre… quand ils sont mentionnés, par les paroles de Dieu : « Devrais-tu avoir toi des mâles comme descendance, et Lui que des filles ! Ce serait une répartition bien injuste. Ce ne sont que des noms que vous et vos pères ont inventés « jusqu’à « que d’anges dans les cieux dont l’intercession sera inutile sauf avec la permission et l’agrément de Dieu, et pour qui il voudra » (53, 21-26). Ce qui signifie, comment l’intercession de leurs dieux pourrait-elle lui être d’une quelconque utilité ?
Quand sont tombées de la part de Dieu les paroles qui abrogeaient ce que Satan avait jeté dans la bouche du prophète, les Couraïchites s’exclamèrent : « Mahomet est revenu sur ce qu’il avait déclaré à propos du statut de nos dieux par rapport à Dieu, il l’a changé et a mis autre chose à la place », car les deux phrases que Satan avait mises dans la bouche du prophète avaient trouvé leur place dans la bouche de tous les polythéistes. Ils accentuèrent donc leurs attaques et leur pression à l’encontre de ceux qui s’étaient convertis à l’islam et suivaient le prophète.
NDLR. En bref ils avaient l’impression d’avoir été trahis.
Le groupe des disciples du Prophète qui avaient quitté d’Abyssinie sur la foi de la nouvelle que le peuple de La Mecque avait accepté l’islam en se prosternant avec le Prophète s’était mis en route. Mais lorsqu’ils furent arrivés non loin, ils apprirent que les nouvelles sur l’acceptation de l’islam par le peuple de la Mecque étaient fausses. En conséquence de quoi ne rentrèrent-ils à La Mecque que secrètement ou après avoir obtenu des garanties pour leur vie.
* On ne peut s’empêcher aux célèbres trois grues de la tradition galate même si cela ne peut pas avoir de rapport historique. Ce symbolisme de la grue vient du fait que certaines variétés d’Anatolie ou de Mongolie peuvent voler très haut, au-dessus même de l’Himalaya, afin de passer l’hiver en Inde, donc être alors au plus près du dieu trônant dans les cieux. Ce qui ressort du texte en tout cas c’est que ces déesses sont effectivement assimilées à des êtres intermédiaires de type « anges ».
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LE PROBLÈME DES VERSETS CONTRADICTOIRES OU ABROGEANT (NASIKH) DANS LE CORAN.
« Quand tu vois ceux qui pataugent dans des discussions à propos de Nos versets, éloigne-toi d’eux jusqu’à ce qu’ils entament une autre discussion. Et si le Diable te le fait oublier, alors, dès que tu t’en souviens ne reste pas en compagnie des pervers » (Verset 68, chapitre 6 : les troupeaux).
Et…
« Dans le Livre, il vous a déjà révélé ceci : lorsque vous entendez qu’on renie les versets de Dieu et qu’on s’en moque, ne vous asseyez point avec eux jusqu’à ce qu’ils entreprennent une autre conversation. Sinon vous serez comme eux. Dieu rassemblera tous les mécréants et les hypocrites en enfer » (Verset 140, chapitre 4 : les femmes).
Que le musulman pieux veuille bien néanmoins pardonner à l’avance ce qui va suivre et qui tombe hélas ! sous le coup de l’interdiction par Dieu de toute contestation de toute discussion ou de tout dialogue. Car nous allons effectivement dans les pages qui viennent discuter des versets du Coran : de leur sens, de leur pertinence, de leur adéquation, de leur valeur éthique philosophique ou scientifique. Comment faire autrement ?
Aucun lecteur un tant soit peu attentif ne peut en effet manquer de remarquer les nombreux versets contradictoires du Coran. L’existence dans le Coran de nombreuses contradictions est…
— Sans grande importance du point de vue littéraire (ce sont des questions de style de poésie…).
— Lourdes d’importance au point de vue doctrinal, mais en ce qui concerne le sort de l’âme après la mort du corps seulement : enfer ou paradis ?
— Lourdes d’importance dans la vie présente quand il s’agit de prescriptions c’est-à-dire de commandements du type « faites ceci » ou « ne faites pas cela » ! Notamment quant au petit djihad.
Et des prescriptions dans le Coran Dieu sait qu’il y en a, beaucoup plus que des paraboles dans les quatre évangiles.
Les premiers musulmans ont donc dû trancher. Et fort logiquement, comme dans le cas des simples lois humaines, ils ont considéré que les dernières annulaient ou rendaient caduques ou abrogeaient les précédentes en cas de contradiction.
Les oulémas ont donc d’abord été déroutés quand il se révéla nécessaire de déterminer les versets à appliquer.
Pour se tirer de cet embarras et suite à l’humiliante affaire des versets sataniques, les commentateurs ont mis au point la doctrine de l’abrogation, qui affirme pour l’essentiel qu’en cas de désaccord, les versets révélés plus tard prennent le pas sur les versets antérieurs.
Certes, d’autres écritures sacrées contiennent des contradictions, mais le Coran est le seul livre dont les commentateurs ont bâti toute une doctrine pour expliquer les très visibles différences qui apparaissent d’une injonction à l’autre. Pour savoir quels versets abrogeaient quels autres, il est donc apparu toute une scientologie vouée à la chronologie des versets coraniques (on l’appelle an-Nasikh oua'l Mansoukh, l’abrogeant et l’abrogé).
Mais pourquoi y a-t-il des contradictions, tant de contradictions, dans le Coran ?
La première réponse qui vient spontanément à l’esprit est « parce ce que livre n’est en aucune façon divin, dicté par Dieu voulu par Dieu inspiré par Dieu » ou (variante) « parce que ce livre a été totalement ou partiellement inspiré par le Diable ». Ce serait là raisonner trop simplement, en judéo-chrétien en quelque sorte.
— Les oulémas eux ont préféré développer la théorie du Coran incréé, des tablettes célestes existant de toute éternité à côté de Dieu et contenant (soigneusement écrit en arabe) tout, absolument tout. Le Coran humain en notre possession depuis Mahomet n’étant qu’un pâle reflet, très partiel, de ce Coran céleste. Pour tout dire, l’entité apparue au jeune Mahomet (40 ans) et assimilée plus tard, beaucoup plus tard, à l’archange Gabriel, n’a fait qu’en lire des extraits à Mahomet fils d’Amina afin qu’il les récite ensuite à ses contribules.
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— La deuxième réponse qui vient à l’esprit est « parce que ce livre, outre les premières visions spontanées initiales du jeune Mahomet, a été fait d’éléments composites empruntés sur plusieurs années à diverses sources judéo-chrétiennes ou autres, mais tout aussi éparses (roman d’Alexandre avec Dhou al Qarnaïn, légendes arabes), n’ayant jamais fait l’objet d’une réflexion d’ensemble.
— La troisième réponse qui vient à l’esprit est « parce ce livre dans son état final reflète l’évolution de la vie de son auteur, ainsi que ses revirements tactiques bien humains, Mahomet fils d’Amina, ou ceux de son entourage ».
Voir notamment l’affaire des versets sataniques
— La quatrième réponse qui vient à l’esprit en ce qui concerne les versets relativement tolérants envers les autres religions et les célèbres versets dits de l’épée, du combat, ou du petit djihad, qui ordonnent aux croyants de combattre tous les non-musulmans jusqu’à obtenir leur conversion ou, au moins, leur soumission à l’islam (8,39 ; 9,5 ; 9,29 ; 47,4) ; est que, dans les premières années de l’islam, Mahomet et sa communauté étant bien moins nombreux que les non-musulmans alors qu’ils vivaient pourtant à côté d’eux à La Mecque, un message de paix et de coexistence était à l’ordre du jour. Mais après que les musulmans ont émigré à Yathrib/Médine en 622 et ont acquis de la puissance militaire, les versets les incitant à passer à l’offensive ont lentement été « révélés » en accord avec les capacités croissantes de l’islam. La force croissante des musulmans est donc en réalité le seul paramètre expliquant ce changement progressif de politique.
D’après le père Zakaria Boutros certains témoignages laissent donnent d’ailleurs à penser que Mahomet a peut-être été le premier à utiliser la notion d’abrogation.
« Abou-Imama m’a raconté qu’un groupe de compagnons du prophète lui avait déclaré que l’un d’eux se réveilla au milieu de la nuit pour réciter un chapitre du Coran qu’il avait appris par cœur, mais il ne put se souvenir d’aucun de ces versets sauf : « Au nom de Dieu, le Miséricordieux ». Aussi alla-t-il voir le prophète pour l’interroger sur ce chapitre, et d’autres vinrent avec lui pour cela. Tous l’interrogeaient. Mais il resta silencieux pendant une heure puis leur fit cette réponse : « Ils ont été abrogés hier » (Ibn Al Jaouzi : Naouasikh al quran, Les abrogés du Coran p.589).
La manœuvre avait déjà été bien comprise par les Couraïchites de La Mecque de cette époque, restés sceptiques vis-à-vis de Mahomet ou faisant partie de ses opposants, puisqu’ils disaient : « Quand nous remplaçons un verset par un autre – et Dieu sait mieux que quiconque ce qu’il fait entendre – ils disent : tu n’es qu’un faussaire » (chapitre 16 « Les abeilles », verset 101).
La difficulté a été résolue par les exégètes et théologiens musulmans. Le principe du verset abrogeant (nâsikh) et du verset abrogé (mansoukh) figure en effet dans le Coran lui-même…
Chapitre 2 (« La vache »), verset 106 : « Quand nous abrogeons un verset ou que nous le faisons oublier, nous en fournissons un meilleur ou un semblable. Rien n’est impossible à Dieu ! »
Chapitre 13 (« Le tonnerre »), verset 39 : « Dieu efface ce qu’il veut ou confirme ce qu’il veut ; c’est auprès de lui qu’est La Mère (l’origine) du Livre ».
Ainsi que nous avons eu l’occasion avec l’affaire des trois gharaniq (des versets sataniques, cf. chapitre 53 versets 19-21) la théologie musulmane pour défendre le dogme de l’isma de Mahomet, a été peu à peu amenée à développer la notion de versets abrogés par de nouveaux versets dits abrogeant (nasikh).
1) Les 114 chapitres du Coran sont censés avoir été révélés sur une période de 23 ans : 13 ans à la Mecque et 10 ans à Yathrib/Médine. Contrairement aux sourates médinoises, (où l’on retrouve la majeure partie des versets violents et intolérants), les sourates mecquoises correspondent à une époque où les musulmans n’étaient qu’une poignée et ne possédaient aucun pouvoir militaire ou politique pour imposer leur doctrine. Le calendrier musulman commence en 622, soit avec l’Hégire (départ des musulmans pour Yathrib/Médine).
2) Ils ne sont pas classés par ordre chronologique, mais en ordre inverse approximatif de longueur (à l’exception du premier qui est une prière judéo-chrétienne), afin d’en faciliter la mémorisation et la récitation (« récitation » est d’ailleurs la traduction exacte du mot « Coran »). Voici dans quel ordre on devrait peut-être lire les sourates pour avoir une meilleure idée de leur chronologie. Sourates médinoises : 2, 8, 3, 33, 60, 4, 99, 57, 47, 13, 55, 76, 65, 98, 59, 24, 22, 63, 58, 49, 66, 64, 61, 62, 48, 5, 9, 110.
3) Quand deux versets se contredisent, le verset révélé en dernier abroge donc (supprime) le verset révélé en premier. D’où l’importance en islam de savoir si un verset peut être considéré comme mecquois, c’est-à-dire révélé à Mahomet lors de sa vie à La Mecque, ou médinois, c’est-à-dire révélé à Mahomet à la fin de sa vie alors qu’il gouvernait Yathrib/Médine. Ce principe fondé sur la chronologie relève du bon sens élémentaire, ce bon sens élémentaire qui fait tant défaut de nos jours en Occident.
Il existe plusieurs catégories de versets abrogés.
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— Il y a d’abord pour commencer bien sûr le cas des fameux versets sataniques : des versets n’ayant pas, ou n’ayant plus, de valeur normative, et dont il est vigoureusement contesté qu’ils aient jamais existé.
Voici les faits, exposés par Ibn Ouarraq dans son livre intitulé « Pourquoi je ne suis pas musulman ».
Coran 53, 1-20.
« Par l’étoile quand elle disparaît ! Votre contribule n’est pas égaré ! Il n’est pas dans l’erreur. Il ne parle pas de par sa propre impulsion. C’est seulement une révélation qui lui a été transmise, le puissant, le fort, la lui a fait connaître ; celui qui possède la force s’est tenu majestueusement alors qu’il se trouvait à l’horizon supérieur, puis il s’approcha et demeura là comme suspendu dans les airs. Il était à une distance de deux portées d’arc ou moins, et il montra donc à son serviteur ce qu’il lui a révélé. Son cœur n’a rien inventé, il l’a vu ; allez-vous donc mettre en doute ce qu’il vu de ses propres yeux ?
Il avait déjà vu le même être près du jujubier qui borne le séjour des délices, auprès duquel se trouve le jardin de la demeure éternelle, au moment où le jujubier était enveloppé par ce qui le couvrait. Sa vue a soutenu l’éclat de la magnificence divine.
Il a vu les plus grands signes de son Seigneur.
Avez-vous considéré al Lat et al-Ouzza, et l’autre, Manat, la troisième ? »
C’est alors que Mahomet aurait prononcé les fameux « versets sataniques » suivants :
20 bis. Ce sont des grues (déesses) de haut vol.
20 ter : Leur intercession est à demander.
Cet épisode a toujours embarrassé les musulmans, qui ont la plus grande peine à croire que Mahomet aurait pu faire une telle concession. Il est cependant impossible de l’ignorer si l’on accepte l’authenticité des documents musulmans évoquant cet épisode. Il semble d’ailleurs impensable qu’une telle histoire ait pu être inventée par un musulman aussi dévot que Tabari, ou qu’il aurait pu l’accepter d’une source douteuse.
Alors, si cette phrase a bien été prononcée par Mahomet, comme tout semble nous le montrer, la question est de savoir pourquoi. Les ennemis de l’islam naissant pouvaient, certes, participer sciemment au gauchissement de la parole révélée, ce que le Coran expose dans les versets (3, 71-72) ; mais c’est de tout autre chose dont il s’agit là, puisque l’altération en question, d’après la tradition, serait un acte du Démon ayant pris l’apparence de l’archange Gabriel. De toute évidence, il ne peut s’agir d’une soudaine défaillance de Mahomet. Il a, au contraire, minutieusement manœuvré ou mis en œuvre sa campagne de communication pour convertir les Mecquois au judéo-christianisme.
Quand Mahomet reviendra plus tard sur ces déclarations, disons « à la laïcité un peu trop ouverte ou trop positive », pour s’en excuser ; il fera dire à Dieu (chapitre N° 22, chapitre du pèlerinage, verset 52) : nous n’avons envoyé aucun prophète ni aucun apôtre avant toi, sans que le Démon intervienne de par ses désirs dans ce qu’il récite. Mais Dieu abroge ce que suggère le Démon *.
QUE POUVONS-NOUS RETENIR DE TOUTE CETTE HISTOIRE DE DÉESSES-GRUES ?
L’hypothèse venant immédiatement à l’esprit est celle d’une initiative de Mahomet destinée à calmer ses compatriotes. Un compromis en quelque sorte, une synthèse des principes que développe la théologie chrétienne à propos des anges et de la Sainte Vierge. Affaibli et inquiété par le départ en exil en Éthiopie d’une partie de ses fidèles (son noyau dur) ou en toute sincérité, Mahomet aurait trouvé judicieux de faire une pause dans ses tentations iconoclastes ; et de réaffirmer, à l’intention des Mecquois, qu’il considérait bien toujours comme des hypostases valables du Dieu supérieur, un peu à l’instar des anges ou des saints, les trois grandes déesses en question. Vu le rapport de force de l’époque, Mahomet n’avait pas d’autre choix que de tolérer les autres religions et les autres dieux. Va également dans ce sens la célèbre sourate 109 et sa conclusion « À vous votre religion à moi la mienne ».
— Ensuite les versets abrogés tant dans leurs préceptes que dans leur graphie ou leur récitation. Autrement dit ce sont des versets qui ont disparu bien qu’ayant été révélés à Mahomet. Ils ne figurent plus dans le Coran, mais sont seulement évoqués par certains hadiths. Il existe donc pour les théologiens musulmans des versets qui ont disparu du Coran, et ne sont donc plus jamais récités, mais qui gardent néanmoins toute leur valeur normative.
Exemple : la lapidation de l’homme et de la femme adultères.
Le Sahih Boukhari, le livre le qui fait le plus autorité après le Coran aux yeux de la majorité des musulmans, mentionne plusieurs hadiths concernant la lapidation. Par exemple.
Rapporté par Ibn Abbas : Omar a dit : « Je crains qu’après un certain temps, les gens puissent dire : « Nous ne trouvons pas les versets de la radjam (lapidation) dans le Livre saint » et, par conséquent qu’ils puissent s’égarer en délaissant une obligation que Dieu a révélée. Je confirme donc que la peine de radjam doit être infligée à celui qui a des rapports sexuels illicites, s’il est déjà marié et que le crime est prouvé par des témoins une grossesse ou un aveu ». Soufiane ajouta : « J’ai retenu ainsi
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cette histoire. Omar a ajouté : « L’apôtre de Dieu a bien appliqué la peine de radjam, et nous avons continué après lui ».
Sahih Boukhari. Volume 8, livre 82, hadith Nº 817.
D’après Ibn Abbas, la lapidation était infligée à n’importe quelle personne mariée (homme ou femme), qui avait des rapports sexuels illicites, si la preuve requise en avait été administrée, ou si les faits avaient été reconnus.
Nous avions alors l’habitude de réciter le verset suivant du Livre de Dieu : « Ne prétendez pas être les enfants d’autres personnes que vos pères ; car prétendre être la progéniture de quelqu’un d’autre que son vrai père ce n’est pas agir en bon croyant ».
Dieu ou Diable merci, ce verset divin a été abrogé voire carrément retiré du Livre saint.
— Enfin les derniers cas, mais non des moindres, les versets qui sont conservés dans le texte même du Coran, mais qui n’ont plus aucune valeur normative.
Autrement dit de tels versets sont considérés comme invalides et leur enseignement sans valeur, bien que figurant toujours dans le Coran. Cas des quelques rares versets « tolérants » de la période mecquoise ? médinoise ? de Mahomet et notamment du célèbre verset qui se lit ainsi : « pas de contrainte en religion » (verset 256, chapitre 2 : la vache) ; abrogés par les non moins célèbres versets de l’épée, du combat, et du petit djihad. À savoir les versets 39 du chapitre 8, 5 du chapitre 9, 29 du chapitre 9, 4 du chapitre 47.
* Afin que ne subsiste aucun doute et ne pas faire de jaloux précisons qu’en ce qui nous concerne nous considérons comme proprement satanique (inspirée par le diable ou le démiurge) toute la partie Ancien Testament de la Bible.
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LA TAQIYA DES VERSETS ABROGÉS.
Pour bien comprendre la scientologie des circonstances de la révélation (asbab al nouzoul) et de l’abrogé ou de l’abrogeant il est important de connaître les quatre sciences suivantes : le clair et l’équivoque (mohkem/moutachabih), le médinois et le mecquois, le général et le particulier, la correspondance entre les versets.
Ce point de théologie musulmane connu sous les noms de « nasikh » et « mansoukh » : peut être défini comme étant l’opération qui consiste à abroger un précepte par le biais d’un argument religieux et à le remplacer par un autre.
Afin de mieux comprendre le pourquoi de ce genre d’abrogation, il est aussi important de rappeler que le Coran a été révélé par étape, en fonction des événements et des circonstances qui prévalaient à l’époque de Mahomet, pour rendre plus facile aux premiers musulmans la transition entre leurs habitudes et leurs pratiques préislamiques et la noble voie apportée par le Coran (sic).
Cette révélation graduelle avait donc pour objectif de former le caractère des nouveaux musulmans, afin de les préparer à accepter les préceptes divins qui étaient révélés de façon successive. C’est ainsi que tout au long de la période de la Révélation, avec l’évolution des conditions de vie, de la mentalité et du contexte, certains commandements révélés ont été abrogés pour être remplacés par des commandements plus en phase avec la nouvelle situation des musulmans.
En théologie islamique tout l’enjeu consiste donc à déterminer quels versets sont abrogés et lesquels ne le sont pas. En théorie, les plus récents abrogent les plus anciens traitant du même sujet. Cependant, l’ordre des versets tel que retranscrit dans le corpus osmanien n’est pas l’ordre chronologique de leur révélation. Du coup le débat sur l’ordre de la révélation des versets devient un enjeu majeur en théologie musulmane.
Il est difficile de dresser une liste complète des versets abrogés, car cela varie suivant les auteurs.
Le traité intitulé An-Nasikh – oual – Mansoukh, d’Ibn Khouziam considère que 113 versets ou ayah sont abrogés par le verset de l’épée (9 : 5), et que 9 versets sont abrogés par le verset du combat (9 : 29).
En voici quelques autres exemples.
Verset 3, chapitre 2. « Ceux qui croient au mystère ceux qui s’acquittent de leur prière et ceux qui font l’aumône avec les biens que nous leur avons accordés… voilà ceux qui sont heureux ».
Abrogé par Verset 103, chapitre 9.
« Prélève une aumône sur leurs biens pour les purifier et les rendre sans tache ».
Verset 62, chapitre 2. “Ceux qui croient, ceux qui pratiquent le judaïsme ceux qui sont chrétiens ou Sabéens, ceux qui croient en Dieu et au Dernier jour, ceux qui font le Bien, voilà ceux qui trouveront leur récompense auprès de leur Seigneur, ils n’éprouveront plus alors aucune crainte, ils ne seront pas affligés ».
Abrogé par Verset 85, chapitre 3. « Le culte de celui qui recherche une religion en dehors de la soumission (à Dieu) n’est pas accepté. Cet homme sera, dans la vie future, au nombre de ceux qui ont tout perdu ».
Verset 83, chapitre 2. « Nous avons fait alliance avec les fils d’Israël : vous n’adorerez que Dieu, soyez bons à l’égard de vos parents, de vos proches, des orphelins et des pauvres. Usez envers les hommes de paroles de bonté ; acquittez-vous de la prière ; faites l’aumône ».
Abrogé par le verset 5 du chapitre 9 (le verset de l’épée).
Verset 109, chapitre 2. « Poussés par la jalousie un grand nombre de gens du Livre voudraient, bien que la vérité se soit manifestée à eux, vous faire revenir à l’incroyance. Pardonnez et oubliez… »
Abrogé par verset 29 du chapitre 9 (le verset du combat).
Verset 115, chapitre 2. « L’Orient et l’Occident appartiennent à Dieu. Quel que soit le côté vers lequel vous vous tournez, la face de Dieu est là. Dieu est présent partout et il sait ».
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Verset plein de bon sens abrogé par le verset 144 du chapitre 2. « Nous te voyons souvent la face tournée vers le ciel, nous t’orienterons vers une Qibla qui te plaira. Tourne donc ta face dans la direction du lieu de culte sacré. Ou que vous soyez tournez-vous dans sa direction ».
Verset 139, chapitre 2. « Discuterez-vous avec nous au sujet de Dieu ? Il est notre seigneur et votre seigneur. Nos actions nous appartiennent et vos actions vous appartiennent ».
Abrogé par le verset 5 du chapitre 9 (le verset de l’épée).
Verset 215, chapitre 2. « Ils t’interrogent au sujet de ce que vous devez dépenser. Dis : ce que vous dépensez sera pour vos père et mère, vos proches, pour les orphelins, les pauvres et pour le voyageur ».
Abrogé ou considérablement élargi par le verset 60 du chapitre 9. « Les aumônes sont destinées aux pauvres et aux nécessiteux ; à ceux qui sont chargés de les recueillir et de les répartir ; à ceux dont les cœurs sont à rallier, au rachat des captifs, à ceux qui sont chargés de dettes, à la lutte dans le chemin de Dieu et au voyageur ».
NDLR. Il est évident que ce verset 60 du chapitre 9 est venu après le verset 215 du chapitre 2, afin de légaliser ou légitimer en quelque sorte le financement de l’État islamique naissant. C’est une interpolation ou une insertion politique intéressée. Financièrement intéressée. La version initiale doit être représentée par le verset 215 de la sourate 2.
Un cas d’école à connaître absolument (est utilisé par les propagandistes musulmans ou les idiots utiles de l’islam pour nous faire croire que l’islam est tolérant) est le célèbre verset 256 du chapitre 2 qui stipule : « Nulle contrainte en religion ».
Il est censé nous laisser croire que l’on peut entrer ou sortir de l’islam librement. Certes c’est un verset médinois souvent utilisé dans les émissions télévisées comme preuve que l’islam serait respectueux des personnes appartenant à d’autres religions que. Mais ce verset ne dit pas : « Nulle contrainte vis-à-vis des membres des autres religions », mais « dans la religion », au singulier, c’est-à-dire « en islam », car il n’y a pas d’autre vraie religion que l’islam (3, 85 ; 9,29 ; 24,2 ; 110, 2). Les légistes musulmans ont toujours compris que ce verset signifie « le droit des non-musulmans à embrasser l’islam sans qu’on les en empêche » parce que l’islam ouvrirait à une vie de liberté absolue où il n’y a « nulle contrainte » : « Dieu ne vous a imposé aucune gêne dans la religion » (22,78). Ce qui est bien commode, en effet, et explique pourquoi il faudrait préférer l’islam. Mais qu’une fois entré en islam, on y serait « sans contrainte », relève du mythe, et la vie quotidienne en pays musulman (dar al islam) témoigne bien du contraire, même pour les musulmans… De plus, que l’on vive « sans contrainte » parce que l’on est musulman ne signifie pas que l’on doive renoncer à exercer la contrainte à l’encontre des non-musulmans, ou de ceux qui ne le sont pas assez, ainsi que de nombreux versets, notamment dans la même sourate, en témoignent, ils appellent au petit djihad (2, 193, 216)… La « tolérance » de ce célèbre verset a-t-elle donc quelque chose à voir avec celle que les idiots utiles se plaisent à imaginer ?
Enfin, à quoi cela sert-il de présenter les versets prétendument tolérants du Coran, comme l’a fait le recteur de la grande mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, en faisant publier par les prestigieuses éditions Dalloz, éditions françaises de référence en matière juridique, Le Coran tolérant (novembre 2007) ? Puisque les versets dits « tolérants » sont censés avoir tous été « abrogés » par les versets, disons « moins tolérants » comme celui qui suit.
— Le verset de l’épée dans les évangiles.
Hadith de saint Luc 22, 47. Comme il parlait encore survint une troupe. À sa tête marchait le nommé Judas, l’un des douze, qui s’approcha de Jésus pour lui donner un baiser. Jésus lui dit : « Judas, c’est par un baiser que tu livres le Fils de l’homme ? » Voyant ce qui allait arriver, les compagnons de Jésus lui demandèrent : « Seigneur, faut-il frapper du glaive ? » Et l’un d’eux frappa le serviteur du grand prêtre et lui trancha l’oreille droite. Mais Jésus prit la parole et dit « laissez ; cela suffit » et, lui touchant l’oreille, il le guérit.
Tafsir.
1) L’évangile de Jean nous donne l’identité du compagnon de Jésus ayant tiré l’épée pour le défendre, il s’agissait de saint Pierre.
2) Le grand rabbi nazaréen Jésus a donc accepté l’usage de la violence en cas de légitime défense, mais à un niveau symbolique et comme dans certaines catégories de duel avec arrêt au premier sang (versé).
3) Quant à la fameuse phrase « Tous ceux qui prennent le glaive périront par le glaive » mentionnée par saint Matthieu ; ce n’est pas une malédiction ou une condamnation, mais un simple constat de bon sens. Du genre « qui roule trop vite et ivre mourra un jour dans un accident de voiture ». Napoléon par exemple est mort empoisonné ou de maladie. En tout cas dans son lit.
À propos de la violence du grand rabbi nazaréen Jésus, notre position est la suivante.
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Différents indices donnent à penser que l’homme a participé à un mouvement religieux à conséquences ou répercussions sociopolitiques pouvant aller jusqu’à une lutte armée de type zélote. Nous donnons acte aux premiers chrétiens d’avoir fait ce que n’ont pas fait les musulmans, à savoir éliminer au maximum tous ces « exemples » de violence.
Différents témoignages attestent que les premiers apôtres et notamment le futur saint Pierre ont été à un moment donné armés sans doute dans l’optique d’une légitime défense bien compréhensible. Nous donnons acte aux premiers chrétiens d’avoir fait dire au héros de leur roman initiatique qu’il fallait s’arrêter alors au premier sang versé (voir l’épisode où le futur saint Pierre coupe l’oreille du serviteur du grand prêtre venu arrêter son maître).
Quelques paraboles enfin valorisent un comportement que l’on peut légitimement qualifier de violent, mais ce ne sont que des paraboles, non des actions du grand rabbi nazaréen.
Il y a enfin le fameux épisode de Jésus chassant les marchands de la Kaaba (pardon, du Temple de Jérusalem).
Le point de vue chrétien traditionnel sur cette affaire qui a peut-être précipité la perte du grand rabbi nazaréen.
La tentation face à une injustice est de ne rien dire et de ne rien faire, de peur d’avoir des ennuis. Or Jésus a refusé une collaboration de ce genre avec les marchands, pourtant installés légalement dans l’enceinte du Temple. Jésus n’a pas voulu être complice de ce qui se passait au Temple de Jérusalem. Il est passé de l’indignation à une juste colère, rompant ainsi courageusement le lourd silence de ses contemporains.
Pour comprendre la portée de la colère de Jésus au Temple, il faut avoir en toile de fond la rencontre de Jésus avec une femme de Samarie (Jean 4, 16-35). Les Samaritains adorent le Dieu Unique sur leur montagne, le mont Garizim. Les Juifs pratiquants adorent également Dieu, mais au Temple de Jérusalem. Plus qu’une querelle de clocher, ce différend signifie, pour les uns comme pour les autres, la terrible impossibilité d’adorer le même Dieu ! « Crois-moi, femme, dit Jésus, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. L’heure vient – et maintenant elle est là – où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité » (Jean 4,21-23). Dit autrement : crois-moi, femme, avec celui qui te parle, c’en est fini des édifices de pierres qui divisent Juifs et Samaritains. Le Temple de Jérusalem, la circoncision, les offrandes d’animaux et les encensements n’étaient jusqu’à maintenant que des figures, elles sont désormais dépassées. Ce qui était déjà inaudible pour les Juifs pratiquants à l’époque de Jésus l’est tout autant aujourd’hui pour les Juifs intégristes (Haredim). Ce qui compte pour le Père de toute l’Humanité, dit Jésus, c’est ce qui anime l’esprit et le cœur des hommes.
Il est significatif que la seule personne rencontrée au Temple, dont Jésus chantera les louanges, est une pauvre veuve qui donne là deux piécettes, manifestant que la charité ne consiste pas à donner de son superflu, mais de son nécessaire (Luc 21, 1-4).
L’étude attentive des textes ne prouve pas qu’il y ait eu des violences physiques exercées à l’encontre des marchands eux-mêmes.
Selon Jean, Jésus a pris un fouet pour chasser brebis et bœufs. Aucun texte, absolument aucun, ne dit qu’il l’a utilisé pour frapper des marchands. Le fouet dont il se sert est l’instrument dont usent les marchands pour guider le bétail. Jésus l’utilise pour guider les bêtes vers la sortie ! Que font les marchands ? Ils courent après leur bétail pour le récupérer. L’affolement devient général dans ce coin de l’esplanade. Jésus, continuant son chemin, voit un peu plus loin d’autres marchands. Mû par la même indignation, il renverse donc les tables des changeurs de monnaie, et il demande aux vendeurs de colombes d’enlever leurs oiseaux. Cela suscite un vrai remue-ménage, mais nulle part il n’est question de violence physique contre tous ces commerçants, dans aucun texte de l’Évangile, absolument aucun !
Et tout d’abord qu’est-ce que ce temple dont il est question ?? Ce monument, magnifiquement reconstruit par Hérode le Grand, se dresse au milieu d’une grande esplanade fermée par une enceinte. Dans le Saint-des-Saints, qu’un rideau sépare du reste du bâtiment, le grand prêtre pénètre une fois par an. Là, avaient été déposées, avant l’Exil, les Tables de la Loi, transmises par Moïse ; si l’on en croit la tradition juive (mais Moïse n’est pas un personnage ayant réellement existé).
Dans le Temple, en face du Saint-des-Saints, il y a un gigantesque autel de pierre. C’est ici que les prêtres immolent taureaux, génisses, agneaux, colombes et tourtereaux. Le sanctuaire proprement dit est entouré de l’esplanade. Elle fait partie du Temple. Cette esplanade, appelée encore « parvis des païens », est de fait une grande place publique entourée de colonnes. Des centaines de marchands s’y tiennent, surtout les jours de fête où affluent les pèlerins. C’est là que les changeurs de monnaie et les marchands d’animaux font leur commerce.
Toute l’esplanade du Temple se transforme en vaste bazar à l’époque des pèlerinages. Il faut nourrir les voyageurs. Jérusalem est une ville chère. Un texte de l’époque rapporte que pour un as on
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obtenait vingt figues à la campagne, mais seulement quatre ou cinq à Jérusalem. Un couple d’oiseaux pour le sacrifice coûtait un denier d’argent à la campagne, mais il s’achetait un denier d’or à Jérusalem, soit vingt-cinq fois plus. Les produits des villages environnants, destinés à nourrir les pèlerins, passaient directement des producteurs aux consommateurs, mais le prétexte du voyage et les taxes du Temple faisaient que les prix étaient parfois multipliés par cinquante.
Sur l’esplanade du Temple, on trouve des vendeurs à la sauvette, des petits boutiquiers et de gros commerçants. Ces derniers appartiennent à la famille du grand-prêtre. Ils vendent le petit et le gros bétail. À l’occasion du pèlerinage de la Pâque, la demande en agneaux est très forte. L’historien Josèphe, à l’époque romaine, parle de 255 600 têtes. À d’autres occasions, on immole sur l’autel du Temple des dizaines de bœufs. On parle alors d’« hécatombe » ! Ces multiples sacrifices rituels ont un but, selon le discours des autorités religieuses, celui d’observer les prescriptions de la Loi pour recouvrer la pureté et honorer Dieu.
Le Temple de Jérusalem est donc au centre de la vie religieuse du peuple d’Israël. L’occupant romain laisse les Juifs gérer eux-mêmes ce lieu de prière, devenu aussi un lieu de commerce.
Mais entre le discours officiel et la volonté de Dieu, il y a un fossé que Jésus refuse de franchir. À quoi sert pour l’homme d’offrir des animaux en sacrifice s’il ne change pas son cœur et ses pensées ? Déjà par le passé, les prophètes de l’Ancien Testament – les devanciers de Jésus – ont critiqué le système sacrificiel prétendument voulu par Dieu.
— Osée : « Car c’est l’amour qui me plaît et non les sacrifices, la connaissance de Dieu plutôt que les holocaustes » (Os 6, 6 ; voir aussi Mt 9, 13).
— Isaïe : « Écoutez la parole du Seigneur : (…) que m’importent vos prières, moi je ne les écoute pas. Vos mains sont pleines de sang, lavez-vous, purifiez-vous ! Ôtez de ma vue vos actions perverses ! Cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien ! » (Isaïe 1, 10-16).
— Jérémie n’y va pas non plus par quatre chemins : « Vous vous fiez à des paroles mensongères, à ce qui est vain. Quoi ! Vous volez, vous tuez ! Et ensuite vous vous présentez au Temple et vous dites : " Nous voilà en sûreté », pour continuer toutes ces abominations ! À vos yeux, est-ce un repaire de brigands, ce Temple qui porte mon nom ? » (7, 8-11).
Enfin quand le grand rabbi nazaréen Jésus a-t-il chassé les marchands du Temple ? L’évangéliste Jean place l’incident quelque part au commencement du ministère de Jésus (2, 13-22). Selon Luc, c’est à la fin : le Nazaréen chasse les vendeurs juste après son entrée à Jérusalem, le jour des Rameaux (19, 45-46) ; il en va de même, à quelques détails près, chez Marc (11, 15- 19) et chez Matthieu (21, 12-17). Il importe peu, en fait, de savoir à quel moment précis de sa vie Jésus a chassé les marchands du Temple. Ce qu’il faut surtout de retenir, c’est que les quatre évangélistes rapportent l’événement et qu’il est donc riche d’enseignements.
Que s’est-il passé concrètement ? Les seules sources dont nous disposons sont les quatre Évangiles. Le récit de Jean est le seul à parler d’un fouet. Celui de Luc rapporte seulement que Jésus « se mit à chasser les vendeurs » (19, 45), alors que dans les récits de Matthieu et de Marc, il y est dit que Jésus « culbuta les tables des changeurs, ainsi que les sièges des marchands de colombes » (Mt 21, 12 ; Mc 11, 15).
Revenons au récit de Jean. Il est, sans le vouloir, à l’origine de l’interprétation faisant de Jésus un homme violent. Le texte dit pourtant avec précision : « Jésus trouva dans le Temple les vendeurs de bœufs, de brebis et de colombes et les changeurs assis. Se faisant un fouet de cordes, il les chassa tous du Temple, et les brebis et les bœufs ; il répandit la monnaie des changeurs et renversa leurs tables, et aux vendeurs de colombes il dit : « Enlevez tout ça d’ici. Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de mercantis » (Jean 2, 14-16).
Alors que la plupart des traductions de l’Évangile disent bien, comme ici la Bible de Jérusalem : « Se faisant un fouet de cordes, il les chassa tous du Temple, et les brebis et les bœufs », une autre circule qui signifie : se faisant un fouet de cordes, il les chassa tous avec en plus leurs brebis et leurs bœufs. Soit « tous » se rapporte aux brebis et aux bœufs, comme l’affirment les grandes traductions, soit « tous » se rapporte aux marchands mentionnés dans la phrase précédente, et, dans ce cas-là, les brebis et les bœufs auraient reçu des coups de fouet APRÈS les marchands. Comment expliquer cette interprétation, du reste contredite par le texte grec de l’Évangile, puisque dans la phrase suivante, Jésus s’adresse aux vendeurs de colombes ? « Tous » ne peut donc pas se rapporter aux marchands.
En s’en prenant au commerce qui se tient dans le Temple, Jésus s’attaque au système sacrificiel, non au lieu de prière (Luc 19, 46 ; Jean 2, 16). Un précieux indice chez Marc abonde dans ce sens : « Et Jésus ne laissait personne transporter d’objet à travers le Temple » (Mc 11, 16). Un juif ne pouvait pas passer de l’esplanade au Temple proprement dit avec son bâton de pèlerin, ses sandales ou même sa besace. Aussi le mot « objet » se rapporte-t-il au matériel cultuel nécessaire aux sacrifices. Non seulement Jésus fait déguerpir les animaux, les marchands et tout leur fatras, mais il tente même
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d’arrêter la bonne marche du culte sacrificiel qui nécessitait, dans le Temple, divers objets, principalement des récipients.
L’affaire du Temple manifeste que Jésus met radicalement en question les sacrifices sanglants, et c’est pour ce faire qu’il en chasse les marchands. Ceux-ci étaient à leurs places pour qui acceptait les carnages rituels d’animaux. Pour Jésus, le Temple comme lieu de prière reste valable, il veut cependant l’en débarrasser des sacrifices. C’est parce que les marchands coopèrent au système sacrificiel que Jésus les chasse de l’esplanade du Temple.
Pour le grand rabbi nazaréen, Dieu ne saurait se laisser enfermer dans aucun rituel, car il exige l’adhésion du cœur et de l’intelligence. Jésus est seul à agir. Il a en face de lui des centaines de marchands, tous des trafiquants et des voleurs. Où se trouve la violence ? Dans l’attitude combative et risquée de Jésus, seul contre tous, ou plutôt dans l’état de fait des marchands qui exploitent la piété populaire, de connivence avec les prêtres ? Ne nous y trompons pas, la non-violence n’a jamais rien eu à voir avec la passivité ou la résignation, elle exige au contraire une force combative.
L’agressivité a mauvaise presse de nos jours. Elle peut, certes, être riche en déviations plus ou moins morbides, mais pourrions-nous vivre sans agressivité, sans élan vital ? « L’agressivité est une forme normale de l’instinct, à la fois saine dans sa source, et dangereuse dans ses débordements. » La solution au problème n’est pas de refouler ou de défouler son agressivité, mais de l’orienter, en la contrôlant, sur des œuvres utiles et positives.
Différence entre bonne colère et mauvaise colère. Il y a mauvaise colère quand on ne sait plus ce qu’on ne dit ni ce qu’on fait. Le plus souvent, on vocifère des propos haineux, accompagné parfois d’actes violents. Qui entre dans cette forme de colère perd alors la raison. Il fait alors n’importe quoi. Comme on dit familièrement : « Il est sorti de ses gonds ; il ne tourne plus rond. » La violence est alors au rendez-vous : injures, coups, blessures…
Une bonne colère – une colère juste – se manifeste tout autrement. Son auteur sait ce qu’il fait et pourquoi il le fait ; il reste parfaitement maître de son agir, il ne déraisonne aucunement. Son indignation est si grande face à l’injustice, qu’il a non seulement le droit, mais encore le devoir d’intervenir. Ce point est essentiel pour comprendre la signification et la portée d’une juste colère.
— Le verset de l’épée dans le Coran maintenant.
Le verset 5 du chapitre 9 révélé à Yathrib/Médine en 631 (à Médine, donc abrogeant toutes celles de La Mecque allant en sens contraire) est dit « verset de l’épée » (ayat as saïf).
Et comme une des caractéristiques du Coran est sa non-contextualisation, on ne sait pas si le commandement qui suit a une valeur universelle et intemporelle, c’est-à-dire s’il est encore valable aujourd’hui, ou s’il doit être considéré comme ayant visé uniquement les païens de l’époque en Arabie et plus précisément de La Mecque.
Ce verset, dit verset de l’épée, s’énonce comme suit…
Chapitre 9, verset 5 :« Tuez les polythéistes partout où vous les trouverez… Si ensuite ils se repentent, célèbrent le culte et s’acquittent de la Zakat (l’aumône), alors laissez-leur la voie libre, car Dieu est clément et Miséricordieux » (accomplissent la salat et acquittent la zakat… autrement dit s’ils se convertissent).
Le sens en a été clairement explicité ultérieurement par divers hadiths comme celui-ci (Sahih Muslim 33). « Abdallah Ibn Omar a déclaré que le Messager de Dieu a dit : ‘J’ai reçu l’ordre de combattre ces gens jusqu’à ce qu’ils reconnaissent qu’il n’y a pas d’autre dieu méritant un culte qu’Allah et que Mahomet est le messager d’Allah ; s’acquittent de la prière et payent l’aumône (zakat). Ce verset (ayah) fut appelé Verset de l’épée, c’est un verset dont Ad-Dahhak bin Mouzahim a dit : « il a abrogé tout accord de paix entre le prophète et les idolâtres quels qu’ils soient, tout traité et toute clause en ce sens ». Al Aoufi dit qu’Ibn Abbas l’a ainsi commenté : « Aucun idolâtre ne peut plus bénéficier d’un traité de paix ou d’un sauf-conduit depuis que la sourate Baraah a été révélée ».
— Le verset du combat.
Le verset 29 du chapitre 9 est appelé verset du combat.
Que dit ce verset 29 du chapitre 9 ?
« Combattez ceux qui ne croient ni en Dieu ni au Jour dernier, qui n’interdisent pas ce que Dieu et son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre, jusqu’à ce qu’ils versent leur impôt personnel (djizya) après s’être humiliés » (an yadin oua – houm saghirouna).
Le verset 29 de ce chapitre 9, révélée en 631, dit verset du combat, abroge donc également toutes les dispositions antérieures autorisant une attitude plus douce envers les polythéistes, les juifs, les chrétiens, les sabéens et les zoroastriens. Ce verset en effet ne fait plus de différence entre les idolâtres et les monolâtres dits « gens du Livre ».
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Le verset du petit djihad.
Le verset 4 du chapitre 47 (95e chapitre dans l’ordre chronologique) est appelé « verset du petit djihad » : il abroge tous les versets antérieurs prônant la paix.
Que dit en effet ce « verset du petit djihad » ?« Lorsque vous rencontrez (au combat) ceux qui sont restés mécréants, frappez-les au cou. Puis, quand vous les avez dominés, enchaînez-les solidement. Ensuite, c’est soit la libération gratuite, soit la rançon, jusqu’à ce que la guerre dépose ses fardeaux. Il en est ainsi, car si Dieu voulait, Il se vengerait Lui-même contre eux, mais c’est pour vous éprouver les uns par les autres. Et ceux qui seront tués sur le sentier de Dieu, Dieu ne rendra jamais leurs actions vaines ».
Il faut donc avoir constamment à l’esprit cette règle musulmane de l’abrogation lors de toute discussion au sujet de l’islam, que ce soit avec des gens qui l’ignorent et à qui alors il faut l’expliquer, ou avec des gens qui la connaissent, mais comptent sur notre ignorance pour avancer leurs pions et nous induire en erreur…
Tant que cette règle de l’abrogation ne sera pas abrogée, les tentatives de ceux qui conseillent de ne tenir compte que des chapitres mecquois n’ont hélas ! aucune chance d’aboutir
Le Soudanais Mahmoud Muhammad Taha (1908-1985), pour l’avoir proposé (il suggérait même carrément de ne garder que les versets mecquois du Coran), l’a payé de sa vie : il fut déclaré
coupable d’apostasie et pendu le 20 janvier 1985.
Qu’il repose en paix ! Quant à nous Dieu merci comme l’islam ne nous séduit en aucune façon (cette foi n’ayant rien à voir avec la raison) nous n’en serons donc jamais apostat !
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LE POIDS ÉCRASANT DE LA PERSONNALITÉ
DE MAHOMET (ISMA).
« Dieu se rit des créatures qui déplorent les effets dont elles chérissent les causes ». La personnalité de Mahomet a bien entendu joué un rôle considérable dans la naissance de l’islam et dans ce qu’il est devenu aujourd’hui (un véritable naufrage intellectuel y compris de ses idiots utiles).
Car c’est faire injure au fils d’Amina que de croire un seul instant qu’il n’a été qu’un magnétophone, qu’une cassandre se contentant d’avertir explicitement ou de rappeler sans ajouter quoi que ce soit un antique message judéo-chrétien.
La personnalité du fils d’Amina peut être cernée en plus du Coran (les circonstances de certaines révélations ou asbab-al-nouzoul)
— par les millions de hadiths nous ayant rapporté ses faits et gestes voire ses absences de réaction.
— par le récit de sa vie.
Car l’islam ce n’est pas que le Coran, ce sont aussi les hadiths et l’exemple à suivre en tout point que constitue sa vie pour tout musulman salafiste (pieux).
Le problème majeur de l’islam d’aujourd’hui c’est en effet le poids écrasant de la personnalité et donc de l’exemple donné par le fils d’Amina lui-même, pour le meilleur (le soufisme), mais aussi pour le pire (l’État islamique).
Le problème d’ailleurs n’est pas tant la personnalité du fils d’Amina, qui est faite d’ombre et de lumière, comme toute personnalité humaine, mais le fait que, pour les musulmans pieux ou convaincus ou les hypocrites que cela arrange, il n’est que lumière : CE QU’ILS APPELLENT L’ISMA. ET QUI EST PLUS QUE L’INFAILLIBILITÉ PONTIFICALE D’UN ALEXANDRE VI BORGIA qui n’est reconnue par les catholiques qu’en matière de dogme énoncé ex cathedra et qui n’équivaut en aucun cas à de la sainteté CAR CETTE ISMA QUI CONFINE À L’IDOLÂTRIE S’APPLIQUE À TOUS LES DOMAINES DE SA VIE.
Ce qui amène donc fatalement et par définition les musulmans à constamment nier minimiser ou relativiser ses fautes morales. CAR IL Y A EU INCONTESTABLEMENT DES FAUTES MORALES TRÈS GRAVES DANS LA DERNIÈRE PARTIE DE LA VIE DE MAHOMET, À YATHRIB/MÉDINE. Une telle isma assimilant infaillibilité doctrinale et sainteté des faits et gestes de Mahomet y compris au quotidien ne peut que justifier tous les excès de ceux qui entendront le singer (esclaves sexuelles yézidies décapitations après égorgement, etc. voir cas des takfiri que nous avons soutenus en Syrie et en Irak au cours de la deuxième décennie du 21e siècle).
Les millions de hadiths nous parlant de la vie de Mahomet sont un peu comme une auberge espagnole, on y trouve n’importe quoi. Ils n’ont rien d’une biographie sérieuse et relèvent plutôt du genre littéraire bien connu de l’hagiographie infantilisante et larmoyante, y compris dans ses aspects les plus négatifs, qui ne choquaient pas à l’époque.
Un premier fait, outre la date approximative de sa naissance, sa ville et sa tribu natales (les Couraïchites), semble en tout cas émerger avec une relative certitude de tout ce fatras : Mahomet aurait été orphelin de père puis de mère, très jeune, et pauvre, et ces deux faits auraient eu des conséquences incalculables sur son psychisme. Mahomet faisait partie des hommes ou des femmes AYANT UNE REVANCHE À PRENDRE SUR LA VIE.
L’Hagiographie de Mahomet suggère également des problèmes de santé précoces. C’est ainsi qu’on explique généralement l’épisode des anges venus ouvrir la poitrine de Mahomet enfant.
Sahih Muslim, Livre 001, Numéro 0314 : rapporté par Anas b. Malik qui le tenait lui-même de Malik b. Sa sa ', peut-être quelqu’un de sa tribu, que le Prophète a déclaré un jour : J’étais près de la Maison (c’est-à-dire de la Kaaba) en train de somnoler quand j’ai entendu quelqu’un dire…………… Puis il vint vers moi et m’emmena. Ensuite, un bassin d’or contenant l’eau de Zamzam fut apporté et ma poitrine fut ouverte… Mon cœur en fut extrait puis lavé avec l’eau de Zamzam ensuite remis son
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emplacement d’origine, après quoi il fut rempli de foi et de sagesse » (sic). Pour plus de détails, voir nos deux ouvrages précédents.
On peut y ajouter ce qui ne semble contesté par personne le fait que son premier mariage ait été inégal (lui jeune et pauvre, elle riche, très riche, et ayant deux fois son âge) ce qui eut pour conséquence incalculable que Mahomet n’eut jamais d’héritier mâle.
Pour en revenir à l’hypothèse de l’épilepsie rappelons que ce n’est pas là une idée neuve, l’historien byzantin Théophane (750-817) en parlait déjà un siècle et demi après la mort de Mahomet.
« Cette année-là [632] mourut Mohamed, le chef et faux prophète des Sarrasins, après avoir nommé son parent Aboubacharos (pour lui succéder). Sa réputation s’était répandue à l’étranger et tout le monde en avait peur. Au début de son avènement, les juifs égarés pensèrent que c’était le Messie qu’ils attendaient, de sorte que certains de leurs dirigeants se joignirent à lui et acceptèrent sa religion en abandonnant celle de Moïse. Ceux qui l’ont fait étaient dix et ils restèrent avec lui jusqu’à son assassinat (par empoisonnement?)… Ces misérables lui enseignèrent des choses illégitimes dirigées contre nous, chrétiens, et restèrent avec lui.
Je considère qu’il est nécessaire de donner un compte rendu de l’origine de cet homme. Il était… devenu indigent et orphelin, ledit Mouamed accepta d’entrer au service d’une riche femme riche qui était sa parente, appelée Chadiga, en tant que domestique employé au transport de marchandises à dos de chameau en Égypte et en Palestine. Peu à peu, il devint plus hardi et s’attira les faveurs de cette femme, qui était veuve, la prit comme épouse et s’empara de ses chameaux et de sa richesse. Chaque fois qu’il venait en Palestine, il rencontrait des juifs et des chrétiens et leur posait des questions relatives aux saintes Écritures. Il était aussi atteint d’épilepsie. Quand sa femme s’en aperçut, elle en fut très affligée, dans la mesure où elle, une noble femme, avait non seulement épousé un homme pauvre, mais aussi épileptique. Il essaya de la rassurer en lui disant mensongèrement : « l’ange appelé Gabriel m’apparaît sans arrêt, et comme je ne peux pas supporter cette vision, je m’évanouis et tombe par terre ».
Or il y avait là un moine ami des siens (qui avait été exilé là en raison de sa doctrine dépravée) *, et elle lui raconta donc tout, y compris le nom de l’ange en question. Désireux de lui plaire, ce dernier lui répondit : « Il a dit la vérité, car c’est l’ange qui est envoyé aux prophètes. » Après avoir entendu ces paroles du faux moine, elle fut la première à croire en Mouamed et raconta aux autres femmes de sa tribu que c’était un prophète, etc. »
Notons à ce sujet (les crises d’épilepsie de Mahomet) que les historiens ultérieurs furent partagés. Humphrey Prideaux considérait l’épilepsie de Mahomet comme une totale duperie, mais l’orientaliste du 19e siècle D. S. Margoliouth lui pensait vraiment que Mahomet souffrait vraiment d’épilepsie, mais qu’à l’occasion il simulait surtout dans les dernières années de sa vie.
Sur l’épilepsie supposée de Mahomet, William Montgomery Watt a même pu écrire : « De tels témoignages ont conduit certains critiques occidentaux à suggérer qu’il était atteint d’épilepsie, mais cette vision des choses est sans fondement réel. L’épilepsie entraîne une certaine dégénérescence physique et mentale, or il n’y en a aucun symptôme chez Mahomet, il fut visiblement en pleine possession de toutes ses facultés jusqu’à la fin de sa vie « (Mahomet prophète et homme d’État).
NDLR. La fin de Mahomet fut tout le contraire de ce qu’écrit notre auteur. Gravement malade, à la fois enfermé dans sa chambre et délaissé par son entourage qui le manipule et le trompe (on l’empêche par exemple de faire son testament) et se préoccupe surtout de sa succession en l’oubliant dans son coin ; Mahomet mourut certes dans son lit, mais dans des souffrances atroces.
Plus près de nous le neuropsychologue Abbas Seghia, a pu coucher par écrit dans son livre intitulé Épée et Crises le résultat de ses recherches à ce sujet. Selon lui Mahomet souffrait bien d’épilepsie. Les symptômes qu’il évoque sont tous décrits dans le coran, mais l’intérêt du travail de Sadeghian est d’avoir analysé des sources historiques variées et pas uniquement le texte du corpus osmanien. Les symptômes qui l’on amené à ce diagnostic sont les suivants : hallucinations olfactives, gustatives, sueur abondante, hallucinations auditives et visuelles, manies obsessions et religiosité excessives.
Le grand philosophe français Malek Bennabi par contre réfute aussi la thèse, selon lui imparfaite de l’épilepsie. « En effet, chaque révélation s’accompagnera, chez lui, de symptômes particuliers. Par la suite, il confiera à ses compagnons qu’au moment où le phénomène va se manifester, il entend un bourdonnement annonciateur : parfois semblable à celui d’un essaim d’abeilles se ruant hors de la ruche et parfois plus métallique comme un tintement de cloche. (…) D’autre part, ses compagnons pouvaient remarquer chaque fois que la « révélation » se manifestait, la soudaine pâleur suivie d’une rougeur congestionnée du visage chez Mahomet. D’ailleurs, lui-même s’en rendait compte puisqu’il ordonnait qu’on lui couvrît la tête d’un voile, chaque fois que le phénomène avait lieu. (…) Cette précaution ne signifie-t-il pas que ce phénomène était indépendant de la volonté de l’homme puisque celui-ci se trouvait momentanément paralysé, incapable de se couvrir la face lui-même et gémissant dans un état extrêmement douloureux comme l’a noté la tradition ? (…) S’emparant de ces indices
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physiologiques, certains critiques se hâtent d’y reconnaître les symptômes de l’épilepsie. (…) Les symptômes physiologiques eux-mêmes ne sont pas propres à un diagnostic de l’épilepsie, laquelle déclenche une paralysie convulsive chez le sujet, privé momentanément de ses facultés intellectuelles ».
Maxime Rodinson rapproche cette personnalité de celle des poètes arabes illuminés de la période préislamique, les kouhan (au singulier kâhin) qui avaient des visions et se sentaient accompagnés d’esprits familiers, sortes de génies qui leur inspiraient un texte saccadé, murmuré à toute vitesse pour impressionner le public. Ils étaient capables de retrouver les chameaux perdus et d’expliquer les songes.
Mais comme il était doué d’une personnalité singulièrement plus riche et plus puissante que celle des Kouhan ordinaires, cette insatisfaction le poussait aussi à réfléchir. Après une longue comparaison, sur une quarantaine de pages, de Mahomet avec certains mystiques comme Thérèse d’Avila et appuyé l’idée que Mahomet croyait sincèrement à la Voix qui lui dictait ces choses, Rodinson conclut : « Mohammed dut aussi éliminer, trier, inconsciemment sans doute, et ne retenir que ce qui édifiait, exhortait, consolait. Il attendait de Dieu des messages dans un sens donné et son attente modelait le verbe… »
Notons au passage que cet islamologue sous-estime deux choses.
— L’influence de l’entourage dans la réception de ce message (il y avait des juifs des chrétiens et peut-être même des manichéens dans l’Arabie de Mahomet.
— L’évolution au fil du temps de la présentation de ce « message ».
Il n’en reste pas moins que ce sont là des aperçus intéressants sur la personnalité de Mahomet et qui nous aident à compléter l’image que nous nous formons de lui d’après sa conduite des affaires publiques, mais en ce qui nous concerne le plus important est de rappeler encore une fois QUE FOI ET RAISON N’ONT RIEN À VOIR ET QUE SE CONVERTIR N’EST PAS UNE PREUVE D’INTELLIGENCE, MAIS UNE PREUVE DE LA FOI QU’ON A EN SOI.
* Ce témoignage n’est évidemment pas objectif et il tombe dans l’excès inverse, c’est une anti-hagiographie ainsi que l’a bien vu le théologien libanais Adel Théodore Khoury. Certains ont néanmoins pensé que le moine en question était peut-être Nestorius, mais les dates ne s’accordent pas. Or alors il s’agissait d’un certain Sergius dit Bahira moine NESTORIEN. Ce témoignage est donc prendre avec des pincettes tout comme celui de l’Histoire d’Héraclius de l’Arménien Sébéos un siècle et demi plus tôt. « A cette époque, il y avait un des enfants d’Ismaël, du nom de Mahomet, un marchand ; il se présenta à eux comme sur l’ordre de Dieu, en prédicateur, comme étant le chemin de la vérité, et leur apprit à connaître le Dieu d’Abraham ; car il était très instruit et très versé dans l’histoire de Moïse. Comme l’ordre venait d’en haut, ils se rallièrent tous, sur l’autorité d’un seul, à l’unité de loi et, abandonnant les cultes de vanité, retournèrent au dieu vivant qui s’était révélé à leur père Abraham. Mahomet leur prescrivit de ne manger la chair d’aucun animal mort [naturellement], de ne pas boire de vin, de ne pas mentir et de ne pas forniquer. Il ajoutait : « Dieu a promis par serment ce pays à Abraham et à sa postérité après lui en toute éternité ; il a agi selon sa promesse, lorsqu’il aimait Israël. Or vous, vous êtes les fils d’Abraham et Dieu réalise en vous la promesse faite à Abraham et à sa postérité. Aimez seulement le dieu d’Abraham, allez vous emparer de votre territoire, que Dieu a donné à votre père Abraham, et personne ne pourra vous résister dans le combat, car Dieu est avec vous.
Alors ils se rassemblèrent tous, depuis Ewiwlay jusqu’à Sur et en face de l’Égypte, etc. »
Le reste est de la même veine et fournit une vision très approximative de la très controversée bataille du Yarmouk de 636 à la frontière des actuelles Syrie et Jordanie.
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LE PROBLÈME DE L’ISMA.
Que le musulman pieux veuille bien pardonner à l’avance ce qui va suivre et qui tombe hélas ! sous le coup de l’interdiction par Dieu de toute contestation de toute discussion ou de tout dialogue. Car nous allons effectivement maintes fois dans les pages qui suivent encore discuter des versets du Coran : de leur sens, de leur pertinence, de leur adéquation, de leur valeur éthique philosophique ou scientifique. Comment faire autrement ?
« Dans le Livre, il vous a déjà révélé ceci : lorsque vous entendez qu’on renie les versets (le Coran) de Dieu et qu’on s’en moque, ne vous asseyez point avec ceux-là jusqu’à ce qu’ils entreprennent une autre conversation. Sinon vous serez comme eux. Dieu assurément rassemblera tous les mécréants et les hypocrites en enfer » (Verset 140, chapitre 4 : les femmes).
Et…
« Quand tu vois ceux qui pataugent dans des discussions à propos de Nos versets, éloigne-toi d’eux jusqu’à ce qu’ils entament une autre discussion. Et si le Diable te le fait oublier, alors, dès que tu t’en souviens, ne reste pas avec ces mécréants » (Verset 68, chapitre 6 : les troupeaux).
« Les démons inspirent à leurs suppôts de discuter avec vous. Si vous les écoutiez, vous deviendriez idolâtres » (verset 121, chapitre 6).
NDLR. Nous excepterons du cadre de cette étude les premières sourates par ordre chronologique qui, bien qu’incontestablement également conséquences de la personnalité de Mahomet, sont évidemment plus spontanées, et ne lui ont apporté aucun avantage immédiat.
Le point de vue de l’historienne française Anne-Marie Delcambre sur le sujet.
Le Mahomet de l’islam des origines, au VIIe siècle, avait de la difficulté à se faire obéir, à se faire respecter et n’avait jamais réussi à obtenir l’estime des gens importants de sa tribu. Les compatriotes de Mahomet le prenaient pour un sorcier (sahir : 51, 52), un devin (kahin : 52,29 ; 69,42), un possédé (madjnoun : 51,52 ; 52,29-30 ; 37,36), voire un poète au mauvais sens du terme (sha'ir : 21,5 ; 37,36 ; 69,41).
Dans le corpus osmanien, la personne de Mahomet n’est d’ailleurs en rien dépeinte comme un modèle à suivre. Mais au VIIIe siècle, on assiste, sous les califes abbassides, à la construction d’une figure mythique qui n’a plus rien d’arabe et qui se veut un prophète musulman parfait, exact portrait d’Abraham avec en outre quelques traits de Jésus. Le simple porte-parole arabe est devenu, sous la plume des convertis persans du VIIIe siècle, le Beau Modèle que tout musulman doit imiter, un intermédiaire béni, entre Dieu et son verbe.
Traduire le dogme musulman de l’isma par la notion d’infaillibilité (un peu comme celle du pape en matière de dogme, et encore) n’est pas judicieux, il convient plutôt de rendre ce concept par la notion d’impeccabilité. Par définition dans l’islam les prophètes ne sauraient pécher, ils ont exempts de péché, leur conduite ne saurait donc être critiquée, au contraire même elle doit être imitée (cf.la notion de beau modèle : sourate 33, verset 21. Il y a pour vous en l’envoyé de Dieu un beau modèle).
Cette idée d’isma est probablement entrée dans l’islam par la pensée chiite, sous l’influence de croyances venues de l’Orient archaïque, assignant aux hommes investis par une instance divine, afin de guider leur communauté, nombre d’attributs surnaturels.
Certains auteurs prêtent même à Mahomet le pouvoir de faire des miracles.
Sahih Boukhari Tome 2, Livre 13, numéro 55. Rapporté par Anas bin Malik : « Un jour que le prophète prononçait le sermon du vendredi, un Bédouin se leva et dit : « Ô, Apôtre de Dieu ! Nos biens sont détruits et les enfants ont faim, invoque Dieu (pour avoir de la pluie) ». Alors le Prophète leva les mains. À cette époque, il n’y avait pas la moindre trace de nuage dans le ciel………… dès qu’il a rabaissé les mains, des nuages gros comme des montagnes s’amoncelèrent et avant même qu’il ne descendît de la chaire, je vis la pluie tomber sur la barbe du Prophète. Il plut ce jour-là, le lendemain, le surlendemain… jusqu’au vendredi prochain. Le même Bédouin ou un autre se leva et dit : « O Apôtre de Dieu ! Les maisons se sont effondrées, nos biens et notre bétail ont été noyés, invoque
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Dieu (pour nous protéger) ». Alors le Prophète leva les deux mains et dit : « Ô Dieu ! Fais qu’il pleuve autour de nous et pas sur nous ». Alors, quelle que soit la direction dans laquelle il tendit les mains, les nuages ?? se dispersèrent et le ciel de Médine devint clair comme une éclaircie entre les nuages ».
Ibn Kathir, la vie du Prophète, Al-sira Al-Nabaouiyya, tome 2. Al-Bayhaqi a rapporté, dans le Dalail, « Abou Sad al-Malini nous a informé en citant [isnad] son grand-père Qatada b. Al-Nouman, que son œil avait été blessé à Badr et que sa pupille pendait sur la pommette. Il était sur le point de s’en séparer, mais en parla au Messager de Dieu qui leur demanda de ne pas faire ça. Il dit alors une prière pour lui, en recouvrant sa joue avec la paume de sa main. Et après plus personne ne pouvait dire lequel des yeux avait été blessé ! Un hadith nous dit même qu’il était devenu le meilleur des deux.
Concernant la séparation de la Lune en deux, etc., etc.
Tout cela est-il crédible (voir notre position sur les miracles) ?
Par la suite, la doctrine fut naturellement absorbée par le credo sunnite. On la voit apparaître dans les professions de foi sous forme d’affirmation et dans les questions traditionnelles (sam’iyyat) des traités de théologie (kalam) où elle est devenue incontournable. Notamment dans les traités de théologie (kalam) maturidite et acharite.
Les diverses écoles divergeaient néanmoins quant à la portée ou la nature de cette isma. Elle relevait selon les moutazilites et les chiites du même argument rationnel qui justifie l’envoi de prophètes, à savoir, une bienveillance obligatoire pour Dieu (ouagib) envers ses créatures.
Les acharites, eux, invoquaient le plus souvent la tradition orale et plus précisément, le consensus des savants (ijma), pour parler de cette notion.
Dans un premier temps, ces derniers semblent avoir restreint la nécessité de l’isma à la sauvegarde de l’intégrité de la Révélation, ne visant alors que l’infaillibilité du prophète dans la transmission du message divin. Mais en insistant sur la période qui suit la révélation, l’impeccabilité du prophète entendu comme une inerrance absolue allait aussi faire son chemin. Chez les acharites tardifs, la doctrine finit par englober les deux sens d’impeccabilité et d’infaillibilité totales de tous les prophètes.
Le dogme de « l’impeccabilité de Mahomet » est évidemment à rapprocher de celui de « l’inimitabilité du Coran » (idjaz).
Le mot arabe isma est une déclinaison de la racine s-m. Le Coran mentionne des dérivés de la même racine, notamment : « oua a’tasimou bihabli Allahi Jami’aan » (mettez-vous hors de péril en vous rattachant à la protection de Dieu) Saint Coran 3, 103, et « oua-Allah ya’simouka min al-nassi » (et Dieu te mettra hors d’atteinte des hommes) Saint Coran 5,67.
Dans la littérature religieuse de l’islam, le substantif isma renvoie donc à plusieurs sens qui convergent vers l’idée de « protection » ou de « préservation » de l’erreur ou du péché. Le mot isma englobe ainsi l’idée d’infaillibilité, entendue comme la capacité d’être à l’abri de l’erreur, qu’elle soit consciente ou non ; ce qui inclut l’erreur d’estimation ou bien l’erreur dans l’effort d’interprétation (al-ijtihad), le lapsus et l’inadvertance.
La notion inclut également le sens d’impeccabilité, c’est-à-dire la préservation de la faute intentionnelle qui comprend les péchés véniels (al-saghaïr) et les péchés mortels (al-kabaïr).
L’isma est donc « la force qui empêche l’homme de commettre le péché et de tomber dans l’erreur ».
Les juristes musulmans fondent cette isma du prophète sur différents versets coraniques.
Versets 2-4 du chapitre 53. « Votre compagnon ne s’est ni égaré ni fourvoyé. Il ne parle pas sous l’effet des désirs. Ce n’est qu’une révélation qui est révélée ».
Versets 84-87 du chapitre 6. « Nous lui avons donné Isaac et Jacob et nous les avons dirigés tous les deux. Nous avons dirigé auparavant Noé, et parmi sa descendance, David, Salomon, Job, Joseph, Moïse et Aaron […]. De même, Zacharie, Jean, Jésus et Élie […] Ismaël, Élisée, Jonas et Lot. Nous avons favorisé chacun d’eux par rapport au monde. De même une partie de leurs pères, de leurs descendants et de leurs frères. Nous les avons choisis et dirigés vers un chemin droit ».
Verset 32 du chapitre 3. « Obéissez à Dieu et au prophète. Mais si vous vous détournez, sachez que Dieu n’aime pas les incrédules ».
Versets 150-152 du chapitre 4. « Ceux qui ne croient pas en Dieu et en ses prophètes ; ceux qui veulent établir une distinction entre Dieu et ses prophètes en disant : nous croyons en certains d’entre eux, nous ne croyons pas en certains autres, ceux qui veulent suivre une voie intermédiaire, ceux-là sont vraiment incroyants, nous avons préparé un châtiment ignominieux pour les incroyants. Dieu donnera leur récompense à ceux qui croient en lui et en ses prophètes sans faire aucune distinction entre eux ».
NDLR. Ces versets visent ceux qui ne croient pas en la qualité prophétique de Mahomet fils d’Amina : ils sont voués à l’enfer.
Le verset 21 du chapitre 33 présente Mahomet comme un modèle de conduite à suivre (33,21).
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Versets 36 du chapitre 33. « Lorsque Dieu et son prophète ont pris une décision il ne convient ni à un croyant ni à une croyante de maintenir son choix sur cette affaire. Celui qui désobéit à Dieu et à son prophète s’égare totalement et manifestement ».
Le verset 4 du chapitre 68 comme un caractère très élevé (68 :4).
Si la tendance à blanchir Mahomet en l’exemptant de toute erreur est manifeste dès les premiers textes à valeur biographique, il est important de noter que le Coran et les hadiths ne mentionnent pas explicitement cette isma des prophètes conçue comme une préservation de l’erreur ou du péché.
Il existe même des versets du corpus osmanien dits d’admonestation où Dieu reproche clairement à Mahomet une faute ou un comportement inapproprié.
Passons sur l’affaire dite des versets sataniques (Mahomet pour en quelque sorte apaiser les relations avec les habitants de La Mecque aurait fait une concession doctrinale majeure, accepter de considérer comme des intermédiaires valables que l’on peut prier les déesses al-Lat, al-Ouzza et Manat, avant d’être désavoué par Dieu lui-même : chapitre 53 verset 19-23 et chapitre 22 verset 52 : nous n’avons envoyé avant toi ni prophète ni apôtre sans que le Démon intervienne dans ses désirs, mais Dieu abroge ce que suggère le Démon).
Il existe d’autres versets du Coran où Mahomet lui-même est toujours aussi visiblement désavoué par Dieu.
Chapitre 80 versets 1 à 10. « Il s’est renfrogné et il s’est détourné parce que l’aveugle est venu à lui… quant à celui qui est riche, tu l’abordes avec empressement ; peu importe s’il ne se purifie pas, etc. »
Chapitre 33, verset 37. « Quand tu disais à celui que Dieu avait comblé de bienfaits, tout comme toi-même l’avait comblé : « Garde pour toi ton épouse et crains Dieu », mais que tu cachais en ton âme ce que Dieu allait rendre public. Tu craignais les hommes, alors que c’est Dieu qui doit être craint. Puis quand Zaïd eût cessé toute relation avec elle, Nous te la fîmes épouser, afin qu’il n’y ait aucun empêchement pour les croyants d’épouser les femmes de leurs fils adoptifs, quand ceux-ci cessent toute relation avec elles. Le commandement de Dieu doit être exécuté ».
Explication des musulmans pieux. Dieu voulait abroger le tabou affectant ce type de mariage, mais, craignant les racontars des hypocrites, le prophète se rétracta, alors qu’il eût été plus judicieux de divulguer son intention et de supporter les on-dit.
Chapitre 8, verset 67. « Il n’appartient pas à un prophète de faire des prisonniers tant que sur terre il n’a pas complètement massacré les incroyants ».
N.B. Apparemment Mahomet voulait garder les vaincus de la bataille de Badr en vie pour les échanger contre une rançon, une pratique courante y compris en Occident durant le Moyen Âge. Mais le dieu d’amour clément et miséricordieux n’était pas d’accord apparemment.
On pourrait aussi bien entendu citer ici également le chapitre 111 indigne et d’un dieu d’amour clément et miséricordieux et d’un grand prophète. Il s’agit de l’expression d’une rancœur vraiment très personnelle envers son oncle et même sa tante.
Les musulmans pieux avancent pour justifier ces versets la nécessité de tenir compte du contexte. Ce qui est pertinent pour des historiens ne saurait l’être pour la parole divine, car son interprétation ne peut pas relever du contexte historique. Ou alors cela remet en cause, et son caractère univoque (39.28), et son égale pertinence pour tous les hommes de tous les temps… Ce que Dieu disait alors, il ne le dirait pas aux hommes d’aujourd’hui ? Qu’est-ce à dire ?
Le dogme musulman de l’isma impose néanmoins de reconnaître qu’en ces circonstances Mahomet s’est comporté comme le plus grand et le plus élégant ou le plus noble des héros que la terre ait jamais porté. Un véritable christ.
Vu l’obscurité ou le côté aussi paradoxal de certains chapitres du Coran, les érudits ont dû très tôt chercher à savoir dans quelles circonstances étaient survenues ces révélations (asbab al-nouzoul) afin de les comprendre, afin de comprendre à quelles attentes elles correspondaient.
Il est évident en effet qu’un certain nombre des textes du Coran sinon tous, s’expliquent essentiellement par la personnalité de Mahomet ou l’intervention de son entourage.
Rappelons à ce sujet qu’il y a deux grandes tendances bibliographiques.
Ce qui suit ne fait donc pas l’unanimité des auteurs.
Certains disent que Mahomet fils d’Amina eut ses premières visions chez lui, dans la demeure de Khadidja, d’autres que ce fut à l’occasion d’une retraite (tahannouth) effectuée dans une grotte des environs de La Mecque (sur le mont Hira ou Nour) ainsi que nous l’avons vu plus haut.
Ensuite sous l’influence de sa femme Khadidja qui était plus ou moins chrétienne, Mahomet commença de se dire prophète, mais en se contentant de n’insister que sur le dieu principal du panthéon local Mecquois, à savoir le dieu lune Dieu (Hobal ou Hubal ?) et en respectant les nombreuses œuvres d’art (plus de 300) qu’abritaient le temple de la Kaaba (hénothéisme pour commencer donc).
Ce qui est certain en tout cas c’est que les deux séries de récits s’accordent pour……
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— placer le tout dans le cadre habituel du paganisme arabe de l’époque (les kouhan, singulier kahin, des poètes parlant sous l’inspiration des djinns).
— souligner la méfiance des Mecquois envers un tel prosélytisme qui menaçait en outre leur économie, qui dépendait entièrement du pèlerinage à la Kaaba et ses 360 statues ou icônes.
Les divergences entre les références vétérotestamentaires ou néotestamentaires du Coran et la réalité des textes à ce sujet déjà fixés à l’époque s’expliquent…
— soit par des divergences dans les textes en question (il y avait des variantes)
— soit par des oublis ou des confusions, plus ou moins volontaires, de la part de Mahomet, dans sa reprise de ces thèmes.
Si l’on se réfère au paganisme arabe pour les rituels ; ainsi que pour la forme et pour le fond ou le contenu du message, aux divers courants religieux qui se diffusaient à l’époque dans cette partie du monde (judaïsme, judéo-christianisme, christianismes divers, manichéisme, gnosticisme, religion perse, sabéens mandéens…) l’apport doctrinal de ces révélations est assez mince.
Soulignons néanmoins que la reprise par Mahomet du thème eschatologique chrétien du jugement des morts à la fin des temps a dû susciter l’incompréhension de plus d’un Mecquois de vieille roche comme Amr ibn Hicham (dit Abou Jahl).
Reste aussi l’insistance sur le fait qu’il n’y a de Dieu qu’Allah et que Mahomet était son prophète. Donc qu’il faut lui obéir ou en subir les conséquences (prescription rappelée plus de 20 fois dans le Coran).
Mais le lecteur me pardonnera (ou pas) d’exprimer ici le point de vue d’un non-croyant uniquement préoccupé de vraisemblance.
Que ce soit dans le Coran ou dans les hadiths, c’est toujours Mahomet fils d’Amina qui parle en réalité et non Dieu (qui n’existe pas, pas à la façon du Dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob en tout cas !).
Ce qui est remarquable dans le Coran c’est qu’il existe de nombreux passages où Mahomet parle de lui à la troisième personne, afin de se justifier constamment. On a l’impression d’être dans un tribunal, le Tribunal de l’Histoire, en présence d’un accusé qui se défend constamment d’être un imposteur ou un fou, serment à l’appui.
Verset 185 du chapitre 26 : « Tu n’es qu’un homme ensorcelé, tu n’es qu’un mortel comme nous, nous pensons que tu es un menteur ».
Ce véritable dédoublement de personnalité est bien la preuve que c’est le contexte dans lequel le Mahomet jeune (40 ans) de La Mecque a dû évoluer avant de parvenir au pouvoir dans la cité État de Yathrib/Médine.
Ce dédoublement de personnalité dû à une situation si conflictuelle explique certaines des psychoses (notamment contre les kouffar et les polythéistes) et donc l’hénothéisme exclusif (monolâtrie) du Corpus osmanien.
La conception que Mahomet se fait du monothéisme est en effet surtout apophatique (négative), il insiste sur ce que n’est pas Dieu ou sur ce que ne doit pas être la véritable religion selon lui. Le monothéisme de Mahomet se définit donc essentiellement par rapport au polythéisme, contre lui plus précisément d’ailleurs, et cette tension parcourt les plus anciennes parties du Coran. L’impression qui se dégage de tous ces versets est celle d’un complot permanent ourdi contre Mahomet et contre sa prédication.
Maints passages du Coran sont en fait des réponses directes aux critiques parfois virulentes qui furent en son temps adressées au fils d’Amina. L’insistance du Coran et de la chahada sur le fait que Mahomet est bien le dernier (et le plus grand) des prophètes du Dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob, traduit à l’évidence cet état de choses, évident lors de la période mecquoise de sa vie ; à savoir lorsque Mahomet était dans l’opposition (dans sa ville natale).
À trois nuances près.
Il y a de toute évidence dans le Coran des passages entiers sciemment empruntés à des sources diverses.
C’est d’ailleurs ce que pensaient déjà certains des contemporains de Mahomet.
Verset 103 du chapitre 16. « Ils disent : c’est seulement un mortel qui l’instruit ! Mais celui auquel ils pensent parle une langue étrangère ».
Verset 4, chapitre 25. « Les sceptiques disent : ceci n’est qu’un mensonge qu’il a inventé, un peuple étranger l’a aidé pour cela ! ».
Quel que soit le cas de figure ce qui est à retenir c’est l’omniprésence de Mahomet dans la détermination des prescriptions (est-il besoin de préciser « divines ») régissant la vie des musulmans y compris dans les moindres détails de la vie quotidienne des hommes et des femmes. Voir les millions de hadiths à ce sujet (hygiène alimentation animaux de compagnie, etc.).
La religion musulmane applique en effet exactement l’inverse de l’antique maxime romaine : DE MINIMIS NON CURAT PRAETOR. On est donc loin de la sérénité de la philosophie indienne, zen
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avant la lettre, qui réussit même à positiver à ce sujet : « Même ceux qui rendent un culte à d’autres dieux que moi, et qui leur sacrifient avec ferveur, me rendent aussi par là même hommage, ô fils de Kounti, bien que ce soit en dehors des règles. Car je suis le seul véritable bénéficiaire et seul seigneur de tout sacrifice même s’ils l’ignorent en vérité. Qui m’offre avec dévotion ne serait-ce qu’une feuille, une fleur, un fruit, de l’eau, cette offrande faite d’une âme pure eh bien je l’accepte. Car je suis le même pour tous et personne n’est spécialement haï ou élu par moi. Mais ceux qui m’aiment avec dévotion demeurent en moi et moi je suis en eux » (Bhagavad Gita 9, 23-29, dialogue entre le dieu Krishna/Vishnou et le prince Arjouna).
La question maintenant est : cette logique ou cette atmosphère complotiste qui règne autour de la personne même de Mahomet dans le Coran a-t-elle correspondu à une véritable réalité, une réalité objective, ou n’est-elle que le fruit de l’imagination de Mahomet voire d’une certaine agressivité intellectuelle de sa part en tant que membre de la confrérie mecquoise des Houms ?
Difficile de le dire. Un peu des deux sans doute.
Ce qui est certain en tout cas c’est que, une fois parvenu au pouvoir dans la cité-État voisine de Yathrib/Médine, suite de très habiles manœuvres politiques (il s’est présenté en arbitre neutre pouvant trancher impartialement de toutes les querelles internes des Médinois de souche *) Mahomet ne s’est pas comporté en philosophe bouddhiste, mais en guerrier conquérant ne reculant pas devant des guerres préventives y compris contre des personnalités (il a sinon commandité du moins cautionné et nullement désapprouvé des assassinats politiques destinés à éliminer des intellectuels médinois se rangeant clairement de par leurs œuvres dans le camp des opposants, comme les poètes Abou Afak (un vieux juif centenaire) ou Kaab Ibn Achraf, également juif par sa mère. Et comme Asma Bint Marouane, une mère de famille poétesse à ses heures.
Voir enfin la destruction qu’il a ordonnée de toutes les œuvres d’art prémusulmanes entreposées dans la Kaaba lors de la prise de la ville par ses troupes (360 statues ou icônes) et qui dépasse et de loin l’épisode isolé de Jésus chassant les marchands du temple.
* Voir la charte consignée dans la Sira d’Ibn Ichaq sous l’appellation kitab ou sahifa et que l’ignorance l’orgueil ou l’ethnocentrisme de Muhammad Hamidoullah a fait qualifier de première constitution du Monde. D’après R.B. Serjeant il s’agit en fait de 8 pactes tribaux conclus par le chef de la nouvelle et petite tribu des « musulmans » (Umma) avec les autres. R.B. Serjeant précise que le meurtre de Kaab ibn al-Achraf eut lieu en Rabi I de l’an III et il ajoute : « Le lendemain matin du meurtre de Ka'b, Mahomet déclara : « Tuez tout homme juif dont vous vous emparez ».
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LES GRANDES LIGNES DE LA VIE DE MAHOMET DONC.
Le Coran est évidemment l’œuvre de Mahomet et de certains de ses proches, il est donc subjectif et non objectif et sert surtout à contrer de façon répétitive d’innombrables opposants ou accusations d’adversaires. Mahomet a beaucoup vilipendé l’âpreté au gain ou le mercantilisme hédoniste de ses compatriotes de La Mecque d’abord, de Yathrib/Médine ensuite. La religion la plus sincère ou la plus intéressée devait néanmoins jouer un grand rôle dans La Mecque du temps de Mahomet, et ceci explique sans doute cela ainsi que nous avons déjà eu l’occasion de le dire.
Nous avons à plusieurs reprises évoqué la présence dans l’Arabie de cette époque d’éléments judéo-chrétiens ou zoroastriens. Il n’empêche qu’il devait y en avoir peu et que la majorité des habitants de La Mecque partageait la vision du monde classique dans cette région d’Arabie, c’est-à-dire une vision du monde païenne et arabe. Les Mecquois visés ou touchés par la prédication de Mahomet ont donc dû être très choqués par certaines des idées judéo-chrétiennes reprises par ce dernier, et notamment par l’idée de Jugement dernier.
Au début une trentaine de fidèles assistaient aux premières réunions organisées par Mahomet dans la maison de l’un d’entre eux, Al-Argam, pour écouter ou commenter ses visions, ou pour prier. L’adoration fut, dès le début en effet, un trait distinctif de la communauté musulmane. Voir les divers ordres adressés dans les plus anciens passages du Coran à Mahomet, notamment le deuxième (« Glorifie le Seigneur ! Purifie tes vêtements ! » 74, 3-4) ou à l’Humanité (87,15). Les musulmans veillaient même une partie de la nuit à cet effet, au début (73, 1-4).
Ces réunions plus ou moins secrètes étaient fondées sur le bouche-à-oreille, à quelques exceptions près naturellement. Mais après tout changea. Une vision ordonna ensuite à Mahomet : « Avertis ton clan et tes proches » (Coran 26, 214). Mahomet aurait alors rassemblé tous les membres de son clan, et les aurait invités à le reconnaître en tant qu’envoyé de Dieu. Mais Abd Al Ouzza (Abou Lahab), un de ses oncles, lui aurait coupé la parole en lui criant : « Est-ce pour cela que tu nous as fait venir ? ». Et la réunion se serait achevée de la sorte aussitôt.
Note de la rédaction. On a très peu étudié en général le cas des opposants à Mahomet. Il faut dire que ceux qui ne se sont pas soumis à lui ont souvent mal fini.
Deux personnages se distingueront néanmoins dans cette foule dès le début.
— Abou Jahl, « le père de l’Ignorance » qui dirige le clan couraïchite des Makhzoum (il sera tué à la bataille de Badr en 624). N.B. On peut néanmoins douter de l’existence réelle en chair et en os d’Abou Jahl, dont le nom est un peu trop beau pour être vrai (Djahiliya = Barbarie, ténèbres). Au cas où il aurait réellement existé son véritable nom semble avoir été abou al-Hakam.
— Abd Al-Ouzza, dit Abou Lahab donc, « le père de la flamme », devenu le chef du clan des Hachem à la mort d’Abou Talib, qui a l’honneur d’être maudit par Mahomet jusque dans le texte coranique (chapitre 111).
NDLR SUR LES PERSÉCUTIONS AYANT AFFECTÉ LES PREMIERS MUSULMANS.
Ce qui ressort à l’évidence en effet dans maints versets du Coran c’est à quel point Dieu a materné ou soutenu son dernier prophète (il l’a par exemple autorisé, par exception, à avoir plus de quatre épouses ; exception que certains des premiers musulmans ont eu du mal à accepter d’ailleurs) alors qu’il semble (nous écrivons bien « semble ») avoir abandonné son prédécesseur Jésus. Qui pourtant lui aussi comme Mahomet fait aussi appel à lui. Ce qui est quelque peu gênant (pour Jésus).
« Alors Jésus arriva avec ses disciples à un endroit appelé Gethsémani et il leur dit : « Asseyez-vous ici, pendant que je vais là-bas pour prier. » Puis il emmena avec lui Pierre et les deux fils de Zébédée. Il commença à ressentir de la tristesse et de l’angoisse. Il leur dit alors : « Mon cœur est plein d’une tristesse mortelle ; restez ici et veillez avec moi. » Il alla un peu plus loin, se jeta le visage contre terre et pria en ces termes : « Mon Père, si c’est possible, éloigne de moi cette coupe de douleur. Toutefois,
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non pas comme je veux, mais comme tu veux. » Il revint ensuite vers les trois disciples et les trouva endormis. Il dit à Pierre : « Ainsi vous n’avez pas été capables de veiller avec moi-même une heure ? Restez éveillés et priez pour ne pas tomber dans la tentation. L’esprit est prompt, mais la chair est faible ». Il s’éloigna une deuxième fois et pria en ces termes : « Mon Père, si cette coupe ne peut pas être enlevée sans que je la boive, que ta volonté soit faite ! » Il revint encore auprès de ses disciples et les trouva endormis ; ils ne pouvaient pas garder les yeux ouverts. Jésus les quitta de nouveau, s’éloigna et pria pour la troisième fois en répétant les mêmes paroles. Puis il revint auprès des disciples et leur dit : « Vous dormez encore et vous vous reposez ? Maintenant, l’heure est arrivée et le Fils de l’homme va être livré entre les mains des pécheurs » (Matthieu 26, 36).
« Depuis la sixième heure jusqu’à la neuvième, il y eut des ténèbres sur toute la terre. Et vers la neuvième heure, Jésus s’écria d’une voix forte : Eli, Eli, lama sabachthani ? Quelques-uns de ceux qui étaient là, l’ayant entendu, dirent : il appelle Élie… » (Matthieu 27).
Sur la réalité des persécutions antichrétiennes, voir nos trois essais consacrés au christianisme (la partie persécution). Les deux seules vraies persécutions anti-chrétiennes ont été celle de Dèce (250) qui a fait exécuter tous les dignitaires chrétiens nommés par son prédécesseur et celle de Dioclétien (303-311) qui au départ n’était que l’ordre donné à tous les habitants de l’Empire sauf les juifs de participer à une supplication générale (intervenant après diverses mesures de destruction de radiation ou d’emprisonnement d’évêques) pour le salut de l’Empire, mais qui finit par ne concerner que les chrétiens. Nombre de victimes difficile à déterminer. Sans doute plusieurs milliers dans la partie orientale de l’empire.
Premier fait : le martyr chrétien ne fait presque rien pour se défendre, la fuite pour ce faire est tout juste autorisée. Et ne parlons pas de mourir les armes à la main.
Deuxième fait : il y a eu chez certains chrétiens – minoritaires, très minoritaires néanmoins – une sorte de folie du martyre (surtout chez les montanistes) confinant au suicide.
— Traduire par « martyre » la situation qu’ont vécue pendant quelques années les premiers musulmans est donc une erreur lourde de conséquences en ce qui nous concerne.
Il n’y a pas eu de martyrs au sens chrétien du terme lors de la période mecquoise, hormis le cas d’une bagarre à coups de pierre et d’os de chameau entre musulmans et non musulmans. Les musulmans devenus plus nombreux se retrouvaient en effet, parfois, dans des vallons à l’extérieur de La Mecque, pour se livrer aux activités de toute secte dans ce cas-là (car à 80 ou à 100, on n’est encore qu’une secte). Un groupe de Mecquois les aperçut et se moqua d’eux. Une bagarre s’ensuivit. Saad ibn Abi Ouaqqas frappa un des premiers musulmans avec une mâchoire de chameau, et le blessa.
Toutes les sources concordent donc sur un point, les persécutions ont été réelles, mais relatives. Quant à Mahomet lui-même, personne n’osa mettre sa vie en danger, vu son rang dans la société (et, donc, le prix du sang qu’il aurait fallu payer pour sa mort).
Le martyre le plus souvent représenté est donc celui de Bilal, l’Africain. Un esclave d’origine éthiopienne, sans doute chrétien, comme nous avons pu le voir. Oumayiah Ibn Khalaf son maître résolut d’en faire un exemple (pour ses autres esclaves) et le fit s’allonger sur le sable brûlant du désert, avec une grosse pierre sur la poitrine. Il est indéniable qu’il aurait très bien pu en mourir, mais vu sa valeur son propriétaire préféra ne pas abîmer plus longtemps la marchandise et arrêta le supplice avant qu’il soit trop tard pour le sauver. Qu’il y ait eu alors mort d’hommes, durant cette période, semble par conséquent à peine possible. Certains hadiths citent cependant un nommé Yassir ibn Amir et sa femme Soumaya (les parents d’Amar). Là aussi et comme Bilal des esclaves chrétiens, mais du Yémen, battus à mort par leur propriétaire. On est loin des onze millions de martyrs (prétendus, prétendus) des commentaires du Psaume 78 du théologien français du 16e siècle Gilbert Génébrard. *
Les notables de La Mecque semblent alors avoir tenté de trouver un modus vivendi avec Mahomet par l’intermédiaire de son oncle Abou Talib. Une délégation menée par Abou Soufiane alla le trouver pour en discuter si l’on en croit Ibn Ichaq.
En vain. Mahomet refusa tout compromis.
Ibn Kathir, La Vie du Prophète Mahomet, Al-Sira al-Nabawiyya, tome I, pp. 347-348. « Younous et Ziyad ont rapporté, d’après Ibn Ichaq, et un autre érudit, un cheikh égyptien nommé Mouhammad… « Les principaux des chefs Couraïchites se rencontrèrent – il donne leurs noms – après le coucher du soleil derrière la Kaaba… ils lui firent parvenir un message disant : les chefs de ton peuple se sont réunis pour conférer avec toi.
Le Messager de Dieu vint aussitôt, croyant qu’il y avait eu un revirement de leur part en ce qui le concernait… Il alla donc s’asseoir avec eux.
Ils lui dirent : Ô, Mahomet, nous t’avons envoyé une délégation POUR TROUVER UN MODUS VIVENDI AVEC TOI. Par Dieu, nous ne connaissons aucun Arabe qui ait jamais causé à son peuple autant de PROBLÈMES QUE TU NE L’AS FAIT. Tu as insulté nos ancêtres, critiqué la religion,
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ridiculisé nos valeurs, maudit les dieux et divisé notre communauté. TU AS FAIT TOUT CE QU’IL ÉTAIT POSSIBLE DE FAIRE DE DÉSAGRÉABLE POUR CREUSER UN FOSSÉ ENTRE NOUS ET TOI.
Si tu es venu dire tout ça pour devenir riche, nous recueillerons de l’argent pour toi chez nous afin que tu sois le plus riche d’entre nous. Si ce que tu veux ce sont les honneurs, nous ferons de toi le premier d’entre nous. Si ce que tu veux c’est le pouvoir, nous ferons de toi notre roi. Si le mal que tu nous causes est dû au fait que tu es possédé (ils utilisèrent pour cela le mot ra'i pour tabi qui signifie esprit) et c’est peut-être le ça, nous nous consacrerons toutes nos ressources à la recherche d’un remède pour t’en libérer.
Le Messager de Dieu répondit:" Ce que vous venez de dire ne me concerne pas. Je n’ai pas, etc.” (Fin de la citation d’Ibn Kathir).
La situation s’envenima évidemment à la mort d’Abou Talib. Mahomet alla même jusqu’à conclure des accords avec les éternels rivaux des Mecquois, les gens de Yathrib/Médine. Les Mecquois voulurent donc arrêter Mahomet afin de le juger pour haute trahison, d’où sa fuite à Yathrib en 622 (l’Hégire des musulmans).
Nous poursuivrons donc notre étude de l’intégrisme sunnite par ce bref rappel des principales étapes de sa vie (sous toutes réserves vu qu’aucune source contemporaine n’est parvenue jusqu’à nous et que tout vient de matériaux de seconde main postérieurs d’une génération au moins -30 ans – dont le caractère hagiographique est évident (Ibn Hicham reconnaît lui-même en 834 avoir procédé à une certaine censure de la Sira écrite vers 767 par son maître Ibn Ichaq, pour en rejeter les données douteuses selon lui).
570 environ. La Mecque Arabie Hedjaz, naissance dans un petit clan obscur et oublié de la grande tribu mecquoise des Couraïchites. Sa mère Amina était veuve.
576 environ. Devient totalement orphelin à la mort de sa mère Amina.
577 à 594. Travaille comme chamelier au service de son oncle Abd Mana dit Abou Talib. Un notable de second rang au sein de la Tribu.
595 environ. À 25 ans, épouse Khadidja, une riche veuve plus âgée que lui (15 ans de plus), sans doute plus ou moins chrétienne (il y avait déjà des millions d’Arabes chrétiens à l’époque en Jordanie et en Irak).
610 environ. Premières visions. Mahomet a alors autour de 40 ans.
619 – Décès de l’oncle qui le protégeait : Abd Manaf dit Abou Talib. Mort toujours païen d’ailleurs.
622 – Part s’installer dans la grande cité État rivale de La Mecque, alors appelée Yathrib, appelée aujourd’hui Médine.
623 – Approuve puis organise des attaques contre les caravanes mecquoises.
624 – Bataille de Badr (victoire).
624 – Évince de Médine la tribu juive ou simplement judaïsante des Qaïnouqa.
624 – Début des assassinats politiques destinés à lui assurer le contrôle définitif de la Cité État de Médine. Mahomet approuve l’assassinat d’Abou Afak, d’Asma bint Marouane, de Kaab al-Achraf.
625 – Bataille d’Ouhoud (défaite).
625 – Expulse la tribu juive ou simplement judaïsante des Nadir.
627 – Bataille de la Tranchée : les Mecquois renoncent à prendre Médine.
627 – Massacre de la tribu juive ou judaïsante des Qouraïza.
628 – Signature du Traité d’Houdaïbiya avec la Cité État de La Mecque.
628 – Attaque massacre et réduction en quasi-esclavage de la tribu juive de Khaïbar.
629 – Mène une première expédition militaire en territoire chrétien romano-byzantin à Mouta (échec).
630 – Rompt le traité de paix avec les Mecquois et prend la tête d’une coalition qui prend La Mecque devenue « ville ouverte ». Fin de la tolérance prônée par la sourate 109. Ce sera la conversion ou l’exil sinon la mort ! Mahomet fait détruire les œuvres d’art religieux exposées à la Kaaba. La Kaaba de La Mecque abritait en effet différentes œuvres d’art un peu comme les bouddhas de Bamyan ou les temples de Palmyre ainsi qu’une idole de pierre brute toujours présente d’ailleurs, la pierre noire (al-Hajdar al-Asouad) ; mais rattachée désormais à la figure d’Abraham. Cette idole de pierre noire sera la seule à échapper à la fureur destructrice de Mahomet quand il s’emparera de la ville.
631 – Mène une seconde expédition en territoire chrétien romano-byzantin à Tabouk (victoire ponctuelle et sans lendemain : en fait il semble qu’il n’y ait pas eu de véritable bataille).
632 – Fin de règne et mort de maladie dans son lit. Son corps est laissé sans sépulture pendant trois jours, le temps pour ses successeurs de mener à bien diverses tractations politiques.
* Édouard Gibbon, Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain. Chapitre 16. 8e partie. Nombre des martyrs.
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« Tout orateur adroit sait exagérer ou adoucir si facilement des descriptions vagues d’emprisonnement et d’exil, de souffrances et de tourments, que nous sommes naturellement portés à rechercher des traits plus marqués et qu’il soit plus difficile d’altérer. Il est donc à propos d’examiner le nombre des personnes qui périrent victimes des édits de Dioclétien, de ses associés et de ses successeurs. Le légendaire des temps moins reculés parle de villes détruites, d’armées entières moissonnées à la fois par la rage aveugle de la persécution. Des écrivains plus anciens se contentent de répandre, sans ordre et avec profusion, des invectives pathétiques, et ne daignent pas fixer le nombre de ceux qui eurent le bonheur de sceller de leur sang la croyance de l’Évangile. Cependant l’histoire d’Eusèbe nous apprend qu’il n’y eut que neuf évêques punis de mort ; et l’on voit par son énumération particulière des martyrs de la Palestine que quatre-vingt-douze chrétiens seulement eurent droit à cette dénomination honorifique. Comme nous ne connaissons pas le degré comparatif de zèle et de courage qui régnait alors parmi les évêques, il ne nous est pas possible de tirer aucune induction utile du premier de ces faits ; mais le dernier peut servir à justifier une conclusion très-importante et très-probable. Selon la distribution des provinces romaines, il paraît que la Palestine formait la seizième partie de l’empire d’Orient, et puisqu’il y eut des gouverneurs qui, par une clémence réelle ou affectée, s’abstinrent de tremper leurs mains dans le sang des fidèles, il est raisonnable de croire que le pays où le christianisme avait pris naissance, produisit au moins la seizième partie des martyrs qui souffrirent la mort dans les états de Galère et de Maximin. Le tout se montera donc environ à quinze cents ; et si l’on divise ce nombre par les dix années de la persécution, le résultat donnera cent cinquante martyrs par an. Si l’on applique la même proportion aux provinces de l’Italie, de l’Afrique et peut-être de l’Espagne, dans lesquelles, au bout de deux ou trois ans, la rigueur des lois pénales fut ou suspendue ou abolie, la multitude des chrétiens condamnés à mort par une sentence juridique, dans toute l’étendue de l’Empire romain, sera réduite à un peu moins de deux mille personnes ; et puisque du temps de Dioclétien les chrétiens étaient certainement plus nombreux, et leurs ennemis plus irrités qu’ils ne l’avaient jamais été dans toute autre persécution antérieure, ce calcul probable et modéré peut apprendre à se former une idée juste du nombre des saints et des martyrs, qui, dans les anciens temps, ont sacrifié leur vie pour répandre dans le monde la lumière de l’Évangile.
Nous terminerons ce chapitre par une vérité triste, que, malgré notre répugnance, nous sommes forcés de reconnaître ; c’est que, même en admettant, sans hésiter on sans aucun examen, tout ce que l’histoire a rapporté, ou bien tout ce que la dévotion a inventé au sujet des martyrs, on doit encore l’avouer, les chrétiens, dans le cours de leurs dissensions intestines, se sont causé les uns aux autres de bien plus grands maux que ne leur en avait fait éprouver le zèle des païens » (Édouard Gibbon).
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LA VIE SEXUELLE DE MAHOMET.
Chapitre 22, 52. « Avant toi, Nous n’avons jamais envoyé de messager ni de prophète, sans que le Démon n’intervienne de par ses désirs, quand ils récitaient le message. Mais Dieu abroge donc ce que le Démon suggère, puis il confirme ses versets. Dieu est omniscient et sage ». Une traduction plus littérale dirait : « Nous n’avons jamais envoyé avant toi ni apôtre ni prophète sans que, quand il désirait quelque chose – ida tamannâ –, le diable n’ait interféré au moyen de ce désir – umniyati-hi –».
Le héros du roman initiatique spirituel ou du plaidoyer d’avocat baptisé « Évangile » semble avoir fait le choix de consacrer toute son énergie à la prédication.
Ce n’est pas le cas de Mahomet qui s’est marié 12 ou 13 fois – ce qui au passage contredit sa propre prédication d’un maximum de quatre épouses légitimes. Dieu a fait une exception pour lui ce qui n’a pas été sans soulever maintes interrogations dans la communauté musulmane naissante.
Versets 36 à 38 du chapitre 33. « Lorsque Dieu et son prophète ont pris une décision il ne convient ni à un croyant ni à une croyante de maintenir son choix sur cette affaire. Celui qui désobéit à Dieu et à son prophète s’égare totalement et manifestement.
Quand tu disais à celui que Dieu avait comblé de bienfaits « garde ton épouse et crains Dieu » tu cachais en toi-même, par crainte des hommes ce que Dieu allait rendre public ; mais Dieu est plus redoutable qu’eux, puis quand Zaïd eut cessé tout commerce avec son épouse, nous te l’avons donnée pour femme afin qu’il n’y ait pas de faute à reprocher aux croyants au sujet des épouses de leurs fils adoptifs quand ceux-ci ont cessé tout commerce avec elles. L’ordre de Dieu doit être exécuté. Il n’y a pas de faute à reprocher au prophète au sujet de ce que Dieu lui a imposé… ».
NDLR. Si nous comprenons bien, Mahomet s’est dévoué afin de bien montrer que l’on pouvait sans pécher se marier avec la femme divorcée de son fils adoptif. N’y avait-il pas un moyen plus simple ??
Verset 50 de ce même chapitre 33. « O toi le prophète, nous avons déclaré licites pour toi les épouses auxquelles tu as donné leur douaire, les captives que Dieu t’a destinées, les filles de ton oncle paternel, les filles de ton oncle maternel, les filles de tes tantes maternelles, celles qui avaient émigré avec toi, ainsi que toute femme croyante qui se serait donnée au prophète pourvu que le prophète ait voulu l’épouser. CECI EST UN PRIVILÈGE QUI T’EST ACCORDÉ À L’EXCLUSION DES AUTRES CROYANTS ».
Verset 1 à 5 du chapitre 66. « Ô prophète, pourquoi interdis-tu ce que Dieu a rendu licite lorsque tu recherches la satisfaction de tes épouses ?… Dieu vous impose de vous libérer de vos serments… Lorsque prophète confia un secret à l’une de ses épouses et qu’elle le communiqua à sa compagne, Dieu en informa le prophète ; celui-ci en dévoila une partie et garda l’autre cachée… Si vous vous soutenez mutuellement contre lui (Mahomet), sachez que Dieu est son maître et qu’il a pour soutien Gabriel et tout homme juste parmi les croyants et même les anges. S’il vous répudie, son seigneur lui donnera peut-être en échange des épouses meilleures que vous… »
NDLR. En fait à ce moment-là Mahomet préférait passer ses nuits avec une esclave chrétienne copte du nom de Marie. D’où la nécessité pour lui de les menacer de divorcer si elles ne se calmaient pas.
Il leur fut également interdit par Dieu de se remarier en cas de décès de Mahomet.
« Vous ne devez pas offenser le prophète de Dieu ni jamais vous marier avec ses anciennes épouses, ce serait de votre part, une énormité devant Dieu » (verset 53 du chapitre 33).
Décidément Dieu pense à tout ! De minimis curat praetor.
Cette interdiction fut si bien respectée qu’elles semblent avoir été déshéritées par les nouvelles autorités en charge de la communauté musulmane à la mort de Mahomet (Abou Bakr).
Ne voulant nullement avoir l’air de nous moquer de Mahomet…
— Vu l’application actuelle des lois sur la liberté d’opinion ou d’expression.
— Vu l’application tout aussi actuelle des lois anti racistes.
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Nous laisserons à cet effet la parole à un site internet tout le contraire d’islamophobe, puisqu’il s’intitule « islamophile » ; avec juste quelques aménagements mineurs pour une meilleure compréhension du lecteur ne connaissant rien à l’islam et à sa grandeur, en bref pour une bonne traduction. « Paix et bénédictions de Dieu sur lui » à chaque énonciation du nom du prophète, remplacé par PSL (PSL : paix sur lui, c’est plus court), harmonisation de certains noms propres, rajout des numéros de chapitre, rappel de quelques précisions utiles entre crochets, style, sous-titres, etc. Nous avons, en revanche, laissé certaines choses en l’état, car sinon il faudrait retraduire entièrement un texte pourtant déjà traduit dans notre langue. Enfin, du moins, en principe…
Ainsi que nous avons eu déjà l’occasion de le dire, un des problèmes de l’islam est son extranéité ; le fait qu’il découle littéralement d’une autre façon de penser (ou de parler plus exactement), d’une autre planète, d’un autre monde, celui d’une certaine conception de Dieu.
Ses opinions sur le sujet sont donc mises à la portée de nos lecteurs, à fins d’information, de connaissance et de respect mutuel entre les différentes cultures et religions du monde.
À cette même époque donc, il fallut examiner de plus près deux autres problèmes. En apparence, ils touchaient surtout la vie domestique du saint prophète (PSL), mais il devint nécessaire d’y remédier afin de garantir la paix à celui qui s’employait à promouvoir l’islam. Dieu lui-même traita des deux questions.
Le premier problème était la situation économique précaire du saint prophète. Durant les quatre premières années, il ne disposa en effet d’aucune ressource propre. En l’an quatre de l’Hégire, après le bannissement des Banou Nadir, Dieu ordonna qu’une partie de leurs terres lui soit réservée, mais cela ne couvrait toujours pas les besoins de sa nombreuse famille. La mission du prophète était d’autre part si lourde qu’elle exigeait de lui toute son énergie. Donc, il ne pouvait pas travailler pour gagner sa vie, et ses épouses finirent par troubler la paix de son ménage à quatre, en se plaignant constamment de difficultés économiques.
Note de Pierre de La Crau. Il y avait bien sûr une autre solution. Que ce pauvre Mahomet reste célibataire comme Jésus ou n’ait qu’une seule femme, afin de consacrer toute son énergie, y compris sexuelle, qui était considérable, à son apostolat. Mais ça Dieu apparemment n’y a pas pensé !
Avant de se marier avec Zenob, le Prophète (PSL) avait déjà quatre épouses : Saouda, Aïcha, Hafsa et Oumm Salama. Les non-musulmans s’interrogèrent (et parvinrent à faire douter quelques musulmans) sur le fait que le saint prophète puisse avoir cinq épouses, alors que pour les autres musulmans, c’était limité à quatre. Telles étaient les dramatiques questions qui préoccupaient le saint Prophète (paix et bénédiction de Dieu sur lui) et les musulmans, quand le chapitre 33 (les factions/al-Ahzab) fut révélé.
Les thèmes et le contexte démontrent que ce chapitre n’a pas été révélé en une seule fois. Il consiste plutôt en une succession d’injonctions et de commandements, révélés au fur et à mesure des événements.
1. Les versets 1 à 8 semblent avoir été révélés avant la bataille [du fossé ou de la tranchée] livrée en mars 627. En les lisant et en ayant à l’esprit le contexte historique, on voit bien que Zaïd [le fils adoptif de Mahomet] avait déjà divorcé de Zenob. La mise au point sur les coutumes et les superstitions concernant l’adoption devenait donc indispensable (sic). Le prophète (PSL) savait par ailleurs que les sentiments profonds et délicats éprouvés à l’égard des enfants adoptifs ne pouvaient être éradiqués (re-sic) tant qu’il n’appliquerait pas lui-même le commandement à ce sujet. Mais il hésitait. Il anticipait déjà la riposte des hypocrites, des juifs, et des mouchriqoun, s’il épousait la femme de Zaïd. Leur méchanceté ainsi que leur espièglerie (???) se saisiraient de cette occasion pour discréditer l’islam.
2. Les versets 9 à 27 reviennent sur la bataille des Tranchées, ainsi que sur l’attaque contre les Banou Quraïza. C’est pourquoi ces versets n’ont pu être révélés qu’après ces événements.
3. On peut diviser les versets 28 à 35 en deux parties. Dans la première, Dieu s’adresse aux épouses du saint prophète (paix et bénédictions de Dieu sur lui) qui s’impatientaient de la situation : Ô Prophète ! Dis à tes épouses : « Si c’est la vie présente que vous désirez avec toute sa parure, alors venez ! Je vous donnerai [les moyens] d’en jouir et vous libérerai [par une répudiation] sans préjudice. Mais si c’est Dieu que vous recherchez vraiment et son messager ainsi que le paradis dans l’autre monde, sachez que Dieu a préparé une récompense sans limites pour celles d’entre vous qui agiront bien. Par contre, ô vous les femmes du prophète, celle d’entre vous qui se rendra coupable d’une turpitude manifeste, recevra deux fois le double du châtiment prévu. Ceci est facile à faire pour Dieu. Nous accorderons par contre une double récompense à celle d’entre vous qui sera dévouée envers Dieu et son prophète, à celle qui agira bien » (versets 28 à 31).
La seconde partie édicte certaines règles sociales adaptées au modèle islamique. Dans la mesure où ces versets s’adressent aux épouses du prophète, la réforme fut d’abord mise en œuvre dans son foyer. Par opposition aux jours de l’ignorance [du paganisme, la fameuse Djahiliya], les épouses furent invitées à rester chez elles et à user d’un langage retenu avec les autres hommes. Ce fut le début des
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commandements du Purda (NDLR. Terme ourdou venant du persan et signifiant grosso modo bienséance, mais aussi réclusion).
a) Les versets 36 à 48 traitent du mariage du saint prophète et de Zenob. Ils répondent aux objections des opposants à l’islam, chassant par la même occasion les doutes qui troublaient encore l’esprit des musulmans. Ces versets rappellent également au croyant la position et le statut du saint prophète (PSL).
b) Le verset 49 expose une clause concernant la législation du divorce [erreur de traduction ? Répudiation serait plus juste. Les femmes font en général ET ELLES ONT RAISON une grande différence entre divorce et répudiation]. Ce verset vient seul, car il fut certainement révélé par rapport à ces événements.
c) Dans les versets 50 à 52, Dieu explique que, en raison de son statut particulier, le prophète (paix et bénédiction de Dieu sur lui) peut déroger à certaines restrictions concernant la vie conjugale, imposées aux autres musulmans.
d) Les versets 53 à 55 s’engagent plus avant dans la réforme sociale : l’étiquette islamique à propos des visites et des invitations ; les visites aux saintes épouses sont limitées aux proches parents [sur la sainteté des femmes de Mahomet, voir nos notes à propos du catéchisme des Français musulmans de l’île de la Réunion] ; quant aux autres hommes, ils ne purent désormais leur parler qu’à travers un rideau ; l’interdiction pour les épouses du prophète (PSL) d’épouser d’autres musulmans [et non-musulmans. Nous préférons en effet supposer que l’auteur de ce site internet a oublié les quelques milliards de non-musulmans peuplant cette planète et nous ne pensons pas qu’il prône l’interdiction du mariage d’une musulmane avec un non-musulman, ce qui serait du racisme].
e) Les versets 56 et 57 mettent en garde ceux qui critiquaient le mariage du prophète et sa vie domestique. Ils invitent les musulmans à ne pas copier les ennemis de l’islam en s’adonnant à la critique, mais plutôt à invoquer les bénédictions de Dieu sur le Prophète. Le chapitre 33 recommande également d’éviter toute accusation mensongère entre eux et de ne pas médire de la personne du prophète. [Pauvre Mahomet !]
f) Le verset 59 passe à la troisième mesure de la réforme sociale. Les femmes musulmanes ne doivent sortir que complètement couvertes et dans un but précis. [Voilà, comme ça au moins c’est clair, et ce n’est pas un roumi comme moi qui le dit].
Les versets suivants réprimandent [oh, les vilains !] les hypocrites et autres méchantes langues pour les rumeurs qu’ils ont colportées contre l’islam et les musulmans.
Note de la rédaction. « Réprimandent » n’est peut-être pas le mot juste. Voici en effet ce que dit exactement le verset en question, le verset 61 du chapitre 33 : « Maudits en quelque lieu qu’ils se trouveront, ils seront pris et tués (sans pitié), etc. »
« Réprimer » aurait peut-être été un mot plus juste. Toujours cette fichue extranéité de l’islam qui nuit tant à sa juste compréhension par les non-musulmans, vu toutes ces erreurs de traduction à répétition.
La conclusion du contrat de mariage avec Zenob déclencha une tempête à l’encontre du saint prophète (PSL). Les polythéistes, les hypocrites, et les juifs, brûlaient tous de jalousie en raison de la succession de ses triomphes, l’humiliation subie par eux durant la bataille des tranchées, ainsi que l’affaire des juifs Qouraïza, continuaient à les toucher en plein cœur. Ils avaient longtemps espéré soumettre le prophète (PSL) sur les champs de bataille, mais vu leurs échecs, ils se rabattaient sur cette affaire de mariage. C’était pour eux l’occasion de remettre en cause la supériorité morale (isma) du saint prophète (PSL). Ils prétendaient que le prophète (PSL) était tombé amoureux de la femme de son fils [adoptif], que ce dernier l’avait appris, et avait décidé de divorcer de sa femme, afin que le prophète (PSL) puisse l’épouser. Zenob n’était pas non plus d’accord, mais c’était l’ordre du saint Prophète (PSL). Les noces furent célébrées. Si le saint prophète (PSL) avait réellement désiré Zenob, il ne l’aurait certainement pas d’abord mariée à Zaïd, et l’aurait lui-même épousée tout de suite. En dépit de cela, les détracteurs de l’islam inventèrent toutes sortes de romances à ce sujet ou diffusèrent tellement de rumeurs, que certains musulmans y crurent. [Note de la rédaction : de toute façon cette Zenob, bien qu’ayant le même nom qu’une célèbre reine de Palmyre, était très laide, et c’est uniquement pour cela que Mahomet l’a épousée, par esprit de sacrifice, et pour obéir à Dieu]. Il se soumit à cet ordre durant le siège des Banou Qouraïza.
Le délai qui semble avoir alors été observé s’explique certainement par le fait que la période d’attente prescrite n’était pas révolue, et que le prophète (PSL) était entièrement absorbé par ses préparatifs de guerre [pogrom contre les Banou Qouraïza aurait peut été un mot plus juste. Diable ! Toujours ces maudits problèmes de traduction !!] Le fait que des légendes inventées par leurs ennemis deviennent des sujets de conversation parmi les musulmans montre bien que ces problèmes de sensualité avaient dépassé toutes les limites. Si le mal n’avait pas été déjà présent dans les cœurs, les esprits
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n’auraient certainement pas accordé autant d’importance à ces histoires absurdes et dégoûtantes concernant la personne du prophète (PSL).
C’est donc à cette occasion que les audacieuses innovations réformatrices de la loi [on croirait entendre un homme politique de la droite républicaine en France] du hidjab ou du purda, furent mises en place dans la société islamique. Elles complétèrent celles de la directive divine N° 24, diffusée après les ragots sur l’attitude équivoque d’Aïcha, la jeune épouse favorite du prophète, dans le désert. Incident évoqué dans le Coran, la Sira et les annales, sous le vocable arabe d’al-ifk (c’est-à-dire le mensonge calomnieux). Voir extraits du Coran, chapitre 24, la lumière, versets 1 à 17.
Bref rappel des faits déjà exposés ci-dessus, afin de permettre au lecteur de comprendre à quel point les ennemis de l’islam peuvent être méchants.
Aïcha, la fille d’Abou Bakr, l’homme qui finança l’islam à ses débuts, avait épousé Mahomet à six ans. Elle en avait maintenant quinze et avait participé à l’expédition contre les Banou al Moustaliq. C’est au retour de l’expédition, sur la route de Yathrib/Médine, que se produisit la célèbre aventure qui aurait pu lui coûter sa situation d’épouse du prophète ; si Mahomet n’avait pas reçu alors une révélation (versets 4-5, 11-20, chapitre 24) la disculpant fort opportunément de tout soupçon.
Au cours d’une halte, elle descend de son palanquin et s’éloigne derrière une dune pour satisfaire un besoin naturel. Puis, elle revient vers les chameaux et s’aperçoit qu’elle a perdu son collier ; elle retourne le chercher. Mais les caravaniers l’ayant déjà vu revenir une première fois pensent qu’elle se trouve maintenant dans le palanquin, et remettent celui-ci sur le bât de son chameau. (Remarque : ce qui est curieux, c’est qu’ils ne se soient pas rendu compte de la différence de poids.) Bref, les chiens aboient et la caravane repart, en oubliant la malheureuse… Quand celle-ci revient sur les lieux de la halte, l’armée musulmane a disparu, et elle se met à pleurer sur son sort. Elle sait que dans le désert, seule, c’est une mort atroce qui l’attend… Mais arrive alors un jeune homme sur son chameau qui, lui aussi, est en retard. Il prend Aïcha sur son chameau et ils rentrent tous les deux à Yathrib/Médine.
Les juifs et les Arabes qui sont « mauvaises langues » font alors courir le bruit que le prophète est cocu. L’accusation est grave, les deux jeunes gens risquent la lapidation, comme le veut la coutume à l’époque. Plus important pour l’histoire de l’islam est que cette affaire donna naissance, dans les rangs des chefs des Mouhadjiroun et des Ansar, Aous ou Khazradj, à un grave conflit, qui se poursuivit bien après la mort de Mahomet. Ce dernier donc est la risée de tout Yathrib/Médine et fait intervenir l’archange Gabriel qui déclare Aïcha innocente, mais Ali ayant fait partie de ceux qui la jugeaient coupable, elle lui en voudra toute sa vie ; et cette rupture entre Aïcha et Ali ne fut pas sans conséquence politique ultérieure (naissance du chiisme ?)
Du haut de son minbar (chaire), le Prophète (PSL) déclara solennellement : « Ô frères, veuillez me trouver des excuses pour ce que je ferai de celui qui osera ainsi attenter à l’honorabilité de mon harem ; mais je jure par Dieu que mes épouses n’agissent qu’en tout bien tout honneur, et l’homme * que l’on accuse est hors de soupçon. De plus, il n’entrait chez moi qu’en ma compagnie ». Sad bin Mouad Al Ansari lui dit alors : « Ô Prophète, tu es en droit d’avoir des excuses. Sache que s’il s’agit d’un Aous, nous lui trancherons la gorge, mais s’il s’agit d’un Khazradj, tu décideras toi-même du jugement, et nous, nous l’exécuterons ». Ce à quoi Saad bin Oubada Al Ansari, le chef des Khazradj, qui était aussi un homme pieux, répondit à Ibn Mouad : « Tu es un hypocrite ! » Les esprits s’échauffèrent dans les clans aous et khazradj, au point qu’ils faillirent s’entretuer sous les yeux du prophète qui, du haut du minbar, n’avait cessé d’intervenir pour les calmer ; avant de réussir enfin à ramener l’ordre et la sérénité dans les esprits.
Cette joute oratoire digne de la Briatharchath Ban Ulad a été rapportée dans le corpus des hadiths, et dans la Sira (l’hagiographie de Mahomet). Ce fut effectivement une des premières conséquences néfastes de cet incident dit de l’ifq, et elle ne manqua pas d’envenimer, de façon épisodique, les relations entre les Aous et les Khazradj, puis entre Aïcha et Ali, menaçant ainsi l’unité des musulmans.
Dieu est amour (clémence et miséricorde), mais quand même ! Comment peut-on penser que l’être des êtres, quel que soit le nom qu’on lui donne (le Taouhid Dieu ou Dieu) peut s’abaisser au point de s’occuper directement des coucheries ou des problèmes domestiques de Mahomet ??
De minimis non curat praetor. Dieu ne s’occupe pas directement des choses secondaires ou subalternes. Le destin les causes secondes ou la divine providence cela sert à cela.
Comment peut-on se faire de l’être des êtres ou du Taouhid, de Dieu ou d’Allah, une idée aussi basse ???
N.B. Comment nous savons tout cela ? Parce que Dieu dans le Coran intervient constamment pour défendre Mahomet. Si le Nazaréen Jésus avait été aussi bien défendu jamais il n’aurait fini crucifié pour tentative de rébellion zélote contre les autorités romaines (il est vrai que pour le Coran qui se fait ici l’écho de diverses doctrines gnostiques ou judéo-chrétiennes, il n’a pas vraiment été crucifié).
Et nous en viendrons directement aux épisodes un peu moins scabreux de la vie de Mahomet ceux où le sang a coulé, afin de voir s’il s’agit bien de cas de légitime défense ou vraiment d’œuvres de justice
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conformes au principe qui nous est cher « Intud i ngeindtleacht gnim olc mad indechur » et qui a été rapporté à saint patrice dans le Senchus Mor : « il y a renforcement de la cohésion sociale (dans le cas des sociétés païennes en tout cas) quand une mauvaise action ne reste pas impunie ».
* Le jeune homme accusé à tort d’avoir eu cette brève aventure amoureuse avec Aïcha, s’appelait Safouane ibn al-Mouattal, et c’était un honnête serviteur du Prophète. Les versets de l’ifq qui affirment l’innocence d’Aïcha, lavent donc aussi, indirectement, Safouane, de l’accusation portée contre lui par la bande de mounafiqoun obéissants aux ordres d’Abd-Allah ibn Oubbaï. (NDLR)
CONSÉQUENCES SUR LA MORALE EN TERRE D’ISLAM (DAR AL ISLAM).
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir avec Anne Marie Delcambre, le Mahomet de l’islam des origines, au VIIe siècle, avait de la difficulté à se faire obéir, à se faire respecter et n’avait jamais réussi à obtenir l’estime des gens importants de sa tribu. Dans le Coran, la personne de Mahomet n’est d’ailleurs en rien dépeinte comme un modèle à suivre.
Les compatriotes de Mahomet le prenaient pour un sorcier (sahir 51,52), un devin (kahin 52, 29 ; 69,42), un possédé (madjnoun 51,52 ; 52,29-30 ; 37,36), voire un poète au sens d’illuminé (sha'ir 21, 5 ; 37,36 ; 69,41).
Par la suite ce culte voué à la personne du Prophète qui s’est développé parmi les musulmans s’est étendu à ses objets familiers. La Tradition énumère et décrit les vases dont il se servait pour ses ablutions. On parle souvent de son bâton, de son vêtement habituel, d’un tissu grossier et comme feutré. Le tombeau du prophète enfin, dans la mosquée de Médine, est le but d’un pèlerinage et l’objet d’un véritable culte.
Cette infaillibilité attribuée à Mahomet a même été aussi étendue à ses compagnons.
Ibn-Qayyim Al-Jaouziya (décédé en 1351) affirme que s’ils se trompaient il ne resterait plus personne qui dirait vrai. Il n’est donc pas permis de s’attaquer à eux ou de mettre en doute la véracité de leurs propos.
On distingue trois catégories de la Sounna (tradition) des compagnons de Mahomet en ce qui concerne son caractère obligatoire.
— Les positions des compagnons à propos desquelles leur accord était incontestable, même si cet accord était seulement tacite. C’est le cas du verset sur la lapidation qu’Omar (mort en 644) a invoqué comme faisant partie du Coran sans y avoir été intégré. Suivre les compagnons de Mahomet dans ce cas est donc un devoir impératif (ouajib) pour tout musulman.
— Les positions des compagnons à propos desquelles il est connu avec certitude qu’ils étaient en désaccord. De telles positions n’engagent que ceux qui les émettent.
— Les positions des compagnons à propos desquels on ignore si l’accord s’était établi ou non entre eux. Ici, les avis sont partagés.
Ainsi que nous avons eu également l’occasion de le voir, mais tout au début de ce modeste essai cette fois-ci et pour le commencer, le drame de l’islam c’est la fermeture des portes de l’interprétation (Ijtihad) qui eut lieu au 11e siècle avec la défaite ou la disparition du moutazilisme au profit des mouhaddithines ou collecteurs de traditions (hadiths).
Pour un mou’tazilite, en effet, il ne suffit pas de démontrer l’authenticité d’un hadith, il faut également étudier son contenu pour vérifier s’il est raisonnablement acceptable. Le bien et le mal sont donc fondés sur la raison. Les « mou'tazilites » furent les rationalistes de l’Islam des débuts. Nul doute que, si leurs doctrines avaient pu rester vivantes au sein des sociétés arabo-musulmanes, la face du monde en eut été changée (serait-on tenté de dire pour parodier Pascal).
Pour les mouhaddithines ou traditionnistes spécialistes des hadiths, « le bien est ce que Dieu ordonne et le mal ce que Dieu interdit ».
Il a existé des penseurs musulmans réfutant totalement cette notion d’isma et d’autres un peu comme les catholiques avec leur pape la cantonnant au domaine de la foi du message ou de la révélation.
Le théologien acharite Abou Bakr Mouhammad Ibn Al Tayyib Al Baqillani (950-1013) est fréquemment évoqué par les théologiens postérieurs comme étant l’archétype de cette négation de l’impeccabilité des prophètes.
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« Al-Baquillani soutenait que l’isma des prophètes signifiait surtout qu’ils sont protégés par Dieu contre les mensonges intentionnels dans la proclamation de leur message, ainsi que des « abominations et péchés repoussants ou mortels ». Pour apprécier la position de Baqillani, il faut se rappeler qu’il est bien connu pour avoir donné au Coran une position centrale dans sa pensée théologique. C’est la parole divine, le pivot de la vie musulmane, qui seul importe ; celui qui le proclame importe moins. Bien sûr, dit Baqillani, le Prophète a également donné certaines règles qui doivent être suivies, mais elles ne concernent que les paroles qu’il a prononcées, en quelque sorte, ex cathedra, sur les problèmes religieux, pas tous les détails de sa vie et de son comportement, dont témoignent les hadiths. Le point de vue de Baqillani est assez similaire à celui de certains théologiens modernistes (comme Syed Ahmad Khan et ses collaborateurs) qui voulaient restreindre le devoir des musulmans de suivre l’exemple du Prophète uniquement aux questions religieuses. Mais en général, la doctrine de l’impeccabilité du Prophète a prévalu » (Anne Marie Schimmel).
Comme on aura pu le voir plus haut dans le domaine de la sexualité ou du nombre de femmes légitimes, l’exemple donné, ou pas, par Mahomet lui-même, a donc joué et joue encore un rôle considérable dans l’échelle des valeurs musulmane. Y compris indirectement. La prohibition de l’adoption plénière et la survalorisation de la seule filiation biologique sont par exemple une conséquence évidente des désirs secrets inspirés à Mahomet par le Diable, en ce qui concerne l’épouse de son fils adoptif Zaïd, la belle Zenob.
Mais il existe d’autres domaines où la vie de Mahomet, donc sa personnalité, a joué un grand rôle. Le domaine politico-militaire par exemple. Mahomet a lui-même rompu le pacte qu’il avait conclu avec les chrétiens de Nadjran en 631 un an à peine après l’avoir signé (juste avant sa mort en fait) si l’on en croit les hadiths 45.5.17 du livre 45 de la Mouwatta de Malik et le hadith 4366 du livre 19 du Sahih Muslim traitant de l’expulsion des juifs et des chrétiens d’Arabie (de la coexistence de plus de deux « din » dans la péninsule arabe).
Voir aussi le fait qu’en terre d’islam (Dar al Islam) une trêve est automatiquement limitée à 10 ans maximum et même moins en pratique, vient du fait que Mahomet a pris l’initiative de rompre la célèbre trêve d’Houdaïbiya conclue pour différentes raisons politiques en 628, avec les Mecquois, un an à peine après l’avoir négociée et signée, le rapport de force ayant totalement changé en sa faveur, suite à une intense et habile activité diplomatico-militaire de sa part entre temps.
Le casus belli fut une vendetta exercée par le clan des Banou Bakr allié des Mecquois contre celui des Banou Khouzaa (plusieurs morts). Le chef des Banou Khouzaa fait appel à Mahomet qui mobilise immédiatement ses forces pour marcher sur La Mecque. Les Mecquois tentèrent une ultime conciliation en offrant de payer le prix du sang aux familles des victimes Banou Khouzaa, mais en vain et devant la disproportion des forces en présence la ville se rendit pratiquement sans combattre l’année suivante (en 630).
Là encore nous retrouvons dans cet épisode tout le poids de la personnalité de Mahomet en matière de morale, car la trêve d’Houdaïbiya fut signée contre l’avis général des siens. En terre d’islam (dar al islam) le bien et le mal n’ont rien à voir avec une quelconque règle d’or du genre « ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse ».
Est bien en terres d’islam ce que le Coran prescrit ou autorise, est bien ce que Mahomet a fait ou dit (isma).
Est mal en terres d’islam ce que le Coran interdit ou maudit, est mal ce que Mahomet a condamné ou désapprouvé.
Il est d’ailleurs significatif que les termes utilisés le plus souvent dans cette idéologie religieuse soient les mots halal ou haram et non les termes universels de bien ou de mal.
Le Coran créé (humain) étant une véritable catastrophe intellectuelle (pas de plan pas de contexte mélange des genres des époques poésie et non philosophie, etc.) en outre limitée en nombre de mots, il demeure encore possible de s’y ménager quelques espaces de liberté, le plus célèbre étant celui de la fameuse et primordiale distinction entre versets abrogés du temps où Mahomet était dans l’opposition à La Mecque sa ville natale et versets devenus abrogeant quand Mahomet a exercé le pouvoir dans la Cité État rivale de Yathrib/Médine.
Par contre vu la quantité phénoménale de hadiths ou anecdotes recueillies à propos de Mahomet, soit directement soit indirectement, par les mouhaddithoun ou traditionistes, là impossible d’y échapper !
Un élément déterminant de ce blocage de l’islam (bab-al Ijtihad) qu’on ne saurait qualifier de positif réside donc dans la constante référence à des hadiths qui sont autant de témoins d’une pensée primitive.
Si on lit la biographie de Mahomet rapportée par de célèbres érudits musulmans tels qu’Ibn Ichaq et Al Tabari vous trouverez de nombreux incidents où Mahomet fut loin d’être un homme parfait et sans péché. Sa dureté envers les juifs, les païens mecquois et ses rivaux comme Moussaïlima est bien documentée par les historiens musulmans. À Yathrib/Médine il a massacré trois tribus juives entières
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– les Banou Nadir, les Banou Qouraïza et les Banou Qaïnouqa, tué le seigneur de Khaibar et transformé sa jeune veuve en esclave sexuelle sur le champ. Il y a de nombreux exemples, il suffit de lire les biographes musulmans.
Certains optent pour la contextualisation de la violence, d’autres pour l’interprétation métaphorique ou, de façon plus radicale, pour la fausseté de certains hadiths… Pourtant, alléger son boulet ne supprime pas l’entrave. Tout, en fait, repose sur l’isma ou idolâtrie de Mahomet, adoration de sa personne physique comme du moindre de ses faits et gestes. Les hadiths forment, encore aujourd’hui, la base de la sagesse populaire musulmane où le Prophète demeure le « beau modèle ». Tant de soumission et d’idolâtrie (jusqu’à la nausée) verrouillent alors tout questionnement du texte.
Les idiots utiles de l’Islam justifient toutes ces violences par la notion de légitime défense préventive, ce qui est sûr c’est que Mahomet n’était pas un petit saint ! Le prophète de l’islam n’était surement pas du genre à tendre l’autre joue ou à réfréner son appétit pour les choses de ce monde. Saint Coran verset 67, chapitre 8. « Il n’appartient pas à un prophète de faire des captifs tant que, sur la terre, il n’a pas complètement massacré les incroyants ». Oublions donc toutes les réponses évasives de ceux qui font l’éloge de Mahomet, le comparant à un « Jésus numéro 2 », en se basant sur quelques anecdotes.
Et a contrario constatons qu’il n’y a dans le Coran ni dans les Hadiths aucun équivalent des subtiles paraboles de la femme adultère, du fils prodigue, du bon samaritain, du pharisien et du publicain, du centurion, des ouvriers de la onzième heure ni d’appel au pardon dès ce bas monde ayant la grandeur du cri que l’on attribue à ce personnage christique par excellence du haut de sa croix « Père pardonne leur car ils ne savent pas ce qu’ils font : crucifier Dieu lui-même ».
En terre d’islam (dar al islam), le bien et le mal n’ont rien à voir avec une quelconque règle d’or du genre « ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse ». Vis-à-vis des non-musulmans l’islam justifie beaucoup de choses qu’il n’accepte pas pour lui-même. D’où une certaine schizophrénie. Un deux poids deux mesures quand il s’agit des droits des musulmans et des droits des non-musulmans. Cette très égoïste, et non positive, discrimination permanente, entre musulmans/non-musulmans, génératrice d’un statut de seconde zone, explique bien entendu la lente disparition des minorités religieuses en Orient (dhimmis ou yézidis). Il y a eu soit conversion soit émigration. Car évidemment tout prosélytisme est interdit aux non-musulmans et il leur faut une autorisation pour construire de nouveaux lieux de culte.
Le problème des non-musulmans est que, pour le musulman convaincu, la charia est perçue comme une bonne chose aussi bien pour les non-musulmans que pour les musulmans. Le djihad expansionniste ou offensif est vu par les différents madras comme une entreprise altruiste. Le monde, qu’il vive en démocratie, en régime socialiste ou communiste ou sous tout autre système de gouvernement, vit inévitablement enchaîné dans le péché, puisque le bien de l’humanité réside dans le fait de vivre selon la loi de Dieu. Dans ce contexte, le mensonge est vu comme un moyen à peine moins noble que le djihad au service d’un même objectif glorieux.
Cette manière de voir les choses est ancienne : peu après la mort de Mahomet (634), lorsque les combattants du djihad sont sortis de la péninsule arabique, un chef perse qui allait être rapidement soumis demanda aux envahisseurs musulmans ce qu’ils voulaient. Leur réponse mémorable fut la suivante :
« Dieu nous a envoyés et conduits ici pour nous permettre de libérer ceux qui le désirent de la servitude aux puissants de la Terre et d’en faire des serviteurs de Dieu, pour changer leur pauvreté en richesse et les libérer de la tyrannie et du chaos des [fausses] religions et les amener à la justice de l’islam. Il nous a envoyés pour apporter sa religion à toutes ses créatures et les appeler à l’islam. Ceux qui accepteront cela de nous seront saufs, et nous les laisserons en paix ; mais ceux qui refuseront, nous les combattrons jusqu’à ce que nous ayons accompli la promesse de Dieu » (Hugh Kennedy. Les grandes conquêtes arabes. Page 112).
Mille quatre cents ans plus tard – en mars 2009 – l’expert juridique saoudien Basem Alem faisait publiquement écho à cette vision des choses : « En tant que membre de la vraie religion, j’ai davantage le droit d’envahir [les autres] pour imposer un certain mode de vie [conforme à la charia], dont l’histoire a montré que c’est la meilleure et la plus juste de toutes les civilisations. Telle est la vraie signification du djihad offensif. Lorsque nous lançons le djihad, ce n’est pas pour convertir les gens à l’islam, mais pour les libérer du sombre esclavage dans lequel ils vivent. Et il va sans dire que la taqiya au service de l’altruisme est autorisée. Par exemple, et tout récemment, après avoir raconté en public l’histoire d’un musulman qui avait piégé un juif et l’avait fait se convertir à l’islam – en le prévenant que s’il cherchait à abandonner l’islam, les musulmans le tueraient pour apostasie – le religieux musulman Mahmoud al-Masri a estimé que c’était « un joli tour ». Après tout, d’un point de vue islamique, c’est le juif qui, finalement, bénéficiait de la tromperie qui l’avait amené à l’islam.
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« Tant que l’islam persiste, la réconciliation de ses adeptes, même avec les juifs et les chrétiens, et plus encore avec le reste de l’humanité, restera un problème insoluble ». Voici donc le dilemme : la loi islamique sépare sans aucune ambiguïté le monde en deux moitiés en guerre perpétuelle – le monde islamique contre le non islamique – et considère que la volonté de Dieu est que le premier soumette le second. Mais si la guerre contre les infidèles est une affaire perpétuelle, si la guerre est le mensonge, et si les actes sont justifiés par l’intention – des musulmans en nombre impossible à déterminer en concluront tout naturellement que Dieu leur donne le droit de mentir, tant qu’ils croient que leur mensonge sert à aider l’islam « jusqu’à ce que tout chaos prenne fin et que toute religion appartienne à Dieu ». Qui plus est, ces mensonges seront considérés comme un moyen au service d’un but altruiste. Les ouvertures des musulmans à la paix, au dialogue ou même à des trêves temporaires doivent être vues sous cet éclairage, en pensant aux remarques pratiques formulées il y a plus d’un siècle par le philosophe James Lorimer » (Raymond Ibrahim).
La stupidité des gens de média est plus qu’abyssale, elle est très dangereuse, car elle fait bien entendu le lit de l’islam radical. On ne soulignera donc jamais assez l’abyssale et criminelle stupidité des gens de médias qui repassent en boucle les propos d’un imam forcément autoproclamé par définition (comme les autres) et répétant que Dieu ne commande pas de faire le mal, mais de faire le bien.
Outre que cela suppose que Dieu existe, et qu’il est créateur et maître conscient de toutes choses (anthropomorphismes), ce qui est loin d’être évident à qui réfléchit un tant soit peu ; tout dépend de ce que l’on appelle le bien ou le mal et la violence sur terre.
Changer de religion pour embrasser une autre foi que la foi de charbonnier de l’islam est-ce bien ?
Dire la vérité à propos de l’homme Mahomet, est-ce bien ??
Ne pas avoir envie de vivre comme les musulmans pieux, est-ce bien ??
Ne pas vouloir vivre comme un dhimmi copte est-ce bien ?
Exécuter un condamné à mort, lapider une femme adultère, couper la main d’un voleur, mourir en martyr en entraînant dans sa mort d’autres êtres humains considérés comme plus ou moins comme des ennemis de Dieu est-ce mal ?
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LE CADRE NORMATIF.
Les hadiths se comptent par centaines de milliers (par millions ?) et sont habituellement distingués selon leur degré de fiabilité pour laquelle l’identification de la chaîne de transmetteurs oraux est décisive.
Les Hadiths sont des propos attribués à Mahomet, ou parfois à des observateurs contemporains, qui renseignent sur sa doctrine, sa vie publique comme privée et concernent des sujets d’une très grande variété. La distinction entre versets du Coran et hadiths n’est pas toujours facile, la frontière entre les deux a été poreuse au début, et nous avons des hadiths qui semblent avoir failli devenir des versets officiels du Coran, notamment à propos du châtiment de l’adultère (coups de fouet ou lapidation à mort).
Les hadiths représentent peut-être plus ce que pensaient les compagnons de Mahomet que Mahomet lui-même. Mais comment faire le tri ?
Le lamentable spectacle qu’offrent les intellectuels français ou les différents journalistes intervenant dans les débats télévisés parlant de politique (médiocrité intellectuelle ou morale, conformisme, lâcheté, transformation de certains partis ou de certaines personnalités en bouc émissaire ou tête de Turc ou faire-valoir…) montre à quel point l’incohérence est la seconde nature de l’Homme (la première étant l’orgueil ou l’égoïsme ?), car il en va de même en ce qui concerne la religion.
Alors que ce n’était pas le cas initialement comme le montrent de nombreux versets du Coran ainsi que la Sira voire certaines biographies individuelles (le cas d’Abou Soufiane par exemple) ; la figure même de Mahomet dans les générations qui ont suivi, et notamment avec les nouveaux convertis persans du 8e siècle et les Abbassides, est peu à peu devenue comme l’incarnation du verbe de Dieu dans son aspect normatif et pratique. Cela éleva la Sounna au niveau du Coran. La croyance populaire fit de Mahomet une sorte de christ. Les musulmans – véritablement « mahométans » de par leur pratique – en le vénérant à ce point en font donc quasiment un rival de Dieu et contredisent par le fait même le strict monothéisme (taouhid) qu’ils prétendent suivre par ailleurs. Il est significatif à cet égard (l’islam conçu non comme une spiritualité soufie, mais comme une DIN) que les termes utilisés le plus souvent dans cette idéologie religieuse soient les mots halal ou haram et non les termes universels de bien ou de mal.
Que des propos stupides et barbares aient servi de fondement à une nouvelle religion n’est pas pour nous surprendre. Les religions de tous les peuples en ont souvent proféré de semblables à certaines périodes de leur histoire. Cependant, la spécificité de l’islam réside dans sa persistance, aujourd’hui, à ne pas considérer comme périmés ces textes anciens et à refuser leur confrontation avec les valeurs humanistes ou les droits de l’homme qui sont, eux, universels.
Obscurantisme, abrutissement, brutalité et hypocrisie gouvernent les dictatures musulmanes actuellement et dans de nombreuses démocraties amies comme l’Arabie Saoudite le Pakistan, etc. la barbarie décide du quotidien : on condamne, emprisonne, lapide, pend et décapite en vertu de principes édictés il y a 1400 ans entre Yathrib/Médine et La Mecque. Actuellement, dans de nombreux pays où pourtant l’islam ne règne pas encore en maître, l’obscurantisme musulman continue à insulter l’intelligence humaine : rejet de la notion d’évolution, recours à la biologie pour justifier l’infériorité de la femme.
Quelques exemples du poids écrasant de la vie personnelle de Mahomet dans la morale musulmane maintenant.
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— Mahomet et les orphelins.
Saint Coran 17, 34. « Et n’approchez les biens de l’orphelin que de la façon la meilleure, jusqu’à ce qu’il atteigne sa majorité. Et remplissez l’engagement, car on sera interrogé au sujet des engagements ».
Effectivement, le tuteur d’un orphelin ne devrait jamais s’approprier ses biens. Dommage que ce verset ne dise rien sur les orphelins de guerre dont les pères ont été massacrés par des guerriers musulmans qui ont ensuite accaparé leurs biens (pillage)…
Saint Coran 2, 220. Au sujet des orphelins. Dis : « Leur faire du bien est la meilleure action. Quand vous les acceptez parmi vous, ils deviennent vos frères [en religion]. Dieu distingue l’homme corrompu de celui qui fait le bien ».
Commentaire. Pour trouver ce verset complet, il vaut mieux ne pas avoir lu avant les récits des attaques qui se soldaient par le massacre des hommes, faisant par le fait même des orphelins de père de tous leurs enfants, qui étaient ensuite réduits à l’esclavage avec leur mère. Ces orphelins ne pouvaient plus alors prétendre à un quelconque héritage paternel, les possessions de leur père ayant sans doute été pillées avec le reste…
Saint Coran 2, 215. « Ils t’interrogent : « Que doit-on dépenser ? » – Dis : « Ce que vous dépensez de bien devrait être pour les père et mère, les proches, les orphelins, les pauvres et les voyageurs indigents ».
Commentaire. Rien à redire, ce verset est absolument parfait.
— Mahomet et son mariage avec Aïcha.
« Hadith du père d’Hicham. Khadidja mourut trois ans avant que le Prophète ne parte à Médine. Il y est resté environ deux ans et il se maria ensuite avec Aïcha qui était une fillette de six ans ; elle avait neuf ans quand il consomma le mariage » (Sahih Boukhari livre 58, 236).
« Hadith d’Aïcha. Je jouais avec mes poupées en présence du Prophète, et mes amies avaient aussi l’habitude de jouer avec moi. Lorsque l’apôtre de Dieu entrait (dans mon lieu de résidence), elles se cachaient, mais le Prophète les invitait à venir se joindre à moi pour continuer à jouer avec moi. Jouer avec des poupées et des images similaires est interdit, mais il a été autorisé pour Aïcha en ce temps-là, car elle n’était alors qu’une petite fille, n’ayant pas encore atteint l’âge de la puberté » (Sahin Boukhari, tome 8, livre 73, Bonnes manières – Al Adab – numéro 151).
« Hadith d’Aïcha : Le Prophète et moi avions l’habitude de prendre un bain ensemble quand nous étions devenus joujou (impurs). Lors de mes règles, il avait l’habitude de me demander de mettre un izar (une jupe) et de me caresser » (Sahih Boukhari, tome 1, livre 6, hadith 298).
L’âge légal du mariage des filles était donc fixé à 9 ans par la charia dans certains pays musulmans comme l’Iran ou l’Arabie saoudite. D’autres auteurs estiment qu’il y a eu erreur dans les dates et à propos de l’âge d’Aïcha qui aurait eu 16 ans et non 6 ans. L’immense majorité des savants de l’islam s’en tient néanmoins aux données traditionnelles qui donnent 6 ans à Aïcha et en voient la confirmation dans le fait que Mahomet ne consomma le mariage que 3 années plus tard, sans doute après qu’elle ait eu ses premières règles. Il était alors âgé de 53 ans.
— Mahomet et son mariage avec Zenob »
Saint Coran 33, 37. « Tu as dit un jour à cet homme envers lequel Dieu a été plein de bonté, et qu’il a comblé de ses faveurs : garde ta femme et crains Dieu ; et tu cachais dans ton cœur ce que Dieu devait bientôt mettre au grand jour. Il était cependant plus juste de craindre Dieu. Mais lorsque Zaïd prit un parti et résolut de répudier sa femme, nous te l’unîmes par mariage, afin que ce ne soit pas pour les croyants un crime d’épouser les femmes de leurs fils adoptifs après leur répudiation. Le précepte divin doit avoir son exécution. »
Dans le même chapitre, aux versets 4 et 5, Dieu interdit définitivement l’adoption qui était courante en Arabie à l’époque :
« Appelez vos fils adoptifs du nom de leur père ce sera plus équitable devant Dieu. Si vous ne connaissez pas leur père, qu’ils soient vos frères en religion et vos compagnons ».
À la suite de ces versets divins, Mahomet épousa la femme de son fils Zaïd, envers lequel il abjura son engagement solennel d’adoption et qu’il renia en tant que fils adoptif. Zaïd fut obligé d’abandonner son nom, qui était Zaïd ibn Mohammed, pour reprendre son nom d’origine : Zaïd Ibn Haritha.
Le prophète chargea Aïcha d’aller porter la nouvelle à Zénob. Or Aïcha, jalouse que Zénob soit désignée par Dieu (par un verset coranique) pour être l’épouse de Mahomet, en parla à Salma, la servante, etc., etc.
Le verset suivant fut alors révélé peu après à Muhammad pour confirmer le statut légal de son mariage avec Zénob : (chapitre 33, verset 40) :« Muhammad n’a jamais été le père de l’un de vos hommes, mais le messager de Dieu et le dernier des prophètes ».
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De ce fait aussi, l’Islam établit de façon claire une inégalité nette entre le fils « naturel » et le fils adoptif. Ces versets permirent au prophète d’interdire officiellement l’adoption d’enfant abandonné en terres d’Islam jusqu’aujourd’hui.
Ces versets bouleversèrent également une coutume bédouine vieille de plusieurs siècles, et confirmèrent d’un point de vue religieux, la différenciation entre le fils naturel et le fils adoptif au sein de la communauté des croyants, les deux ayant jusqu’alors le même statut juridique dans la société arabe. C’est à la suite de ce mariage en effet que la tradition d’accueil des enfants orphelins ou abandonnés en tant qu’enfant adoptif ayant les mêmes droits que leurs frères et sœurs biologiques, fut interdite par l’Islam.
Cette interdiction d’une tradition de générosité ancestrale chez les Arabes fut la conséquence directe de cet épisode de la vie de Mahomet.
La parole de Dieu (chapitre 33, versets 4,5 et 37) officialisa cette interdiction de toute forme d’adoption qui donnerait à l’enfant adopté les mêmes droits que les enfants biologiques : « Dieu n’a point fait de vos enfants adoptifs vos propres enfants ».
Comme les idiots utiles de l’islam justifient souvent certains faits contraires à la morale par le contexte historique de l’époque des faits, soulignons que dans ce cas précis, le contexte de l’époque, approuvait l’adoption, qui était considérée comme un acte de générosité envers les enfants orphelins, abandonnés ou pauvres.
Prescriptions diverses.
« Hadith de Bouraïda d’après son père. L’apôtre de Dieu (la paix soit sur lui) a dit : celui qui joue aux échecs est comme celui qui teint sa main avec de la viande et du sang de porc » (Sahih Muslim, livre 28, numéro 5612). NDLR. Dieu interdit donc de jouer aux échecs ???
« Hadith d’Abbas bin Tamim. Le Prophète est sorti avec les gens pour invoquer Dieu afin que la pluie vienne. Il se leva, invoqua Dieu pour la pluie, se tourna vers la qibla, mit son manteau à l’envers et il plut » (Sahih Boukhari, tome 2, livre 17, numéro 135).
NDLR. Magie sympathique ou confusion entre succession chronologique et relation de cause à effet (post hoc ergo propter hoc). Ou inversion de la cause et de l’effet. Non causa pro causa. L’erreur consiste à croire que parce qu’un phénomène A s’est déroulé avant le phénomène B (ou que B eut lieu après A) donc A est la cause de B (ou que B est la conséquence de A). Ce raisonnement reste erroné tant que la relation de causalité n’a pas été rigoureusement étudiée, documentée et comprise.
« Il y avait 10 choses que le prophète de Dieu n’aimait pas : le parfum jaune, se teindre les cheveux devenus gris, porter des vêtements trop longs ou traînants, avoir une chevalière en or pour servir de sceau, les femmes se parant de tous leurs atours devant des étrangers, les dés, les protections magiques sauf par les deux dernières sourates du Coran, le port d’amulettes, retirer son pénis avant l’éjaculation de la semence, et avoir des rapports sexuels avec une femme qui allaite un enfant (sans pour autant les déclarer défendus) » (Sounan d’Abou Daoud, livre 34, N° 4210).
« Hadith d’Abou Horaïra. Le Prophète a dit : bâiller vient de Satan et si quelqu’un bâille, il doit contrôler le plus possible son bâillement parce que s’il fait “ha” alors Satan se moquera de lui » (Sahih Boukhari, livre 4, tome 54, numéro 509).
« Hadith d’Abbas bin Tamim : mon oncle a présenté à l’apôtre de Dieu le cas d’une personne qui pensait avoir lâché un pet durant la prière. L’apôtre de Dieu a répondu : il ne doit pas abandonner la prière, à moins qu’il n’entende un bruit ou qu’il sente quelque chose » (Sahih Boukhari, livre 1, tome 4, numéro 139).
« Hadith de Salman al-Farsi (le Perse) : on a dit à Salman, votre Prophète vous enseigne tout, même en ce qui concerne les excréments. Il répondit : – Oui. Il a nous a interdit de faire face à la qibla au moment de déféquer ou d’uriner et de nous nettoyer avec la main droite, avec moins de trois pierres ou avec un os » (Sounan Abou Daoud Livre 1 Numéro 7).
Apparemment rien de tel effectivement dans les quatre évangiles à part une vague allusion à ce qui sort du corps de l’homme dans le chapitre 15 de Matthieu.
« Des pharisiens et des scribes venus de Jérusalem s’approchèrent de Jésus, en disant : pourquoi tes disciples transgressent-ils la tradition des anciens ? Car ils ne se lavent pas les mains lorsqu’ils mangent.
Il leur répondit : et vous, pourquoi transgressez-vous le commandement de Dieu par votre tradition ?
Car Dieu a dit : honore ton père et ta mère ; et : quiconque maudira son père ou sa mère, qu’il soit puni de mort.
Mais vous, vous dites : quiconque dit à son père ou à sa mère… ce dont j’aurais pu vous assister est offrande (corban) – n’a pas à honorer (autrement) son père ou sa mère. Et vous avez mis à néant la parole de Dieu par votre tradition.
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Hypocrites, Isaïe a bien prophétisé de vous quand il a dit : ce peuple m’honore des lèvres, mais leur cœur est loin de moi. Vain est le culte qu’ils me rendent, donnant des enseignements (qui sont) des préceptes d’hommes.
Et, ayant appelé la foule, il leur dit : écoutez et comprenez ! Ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme ; mais ce qui sort de la bouche, voilà ce qui souille l’homme.
Alors ses disciples vinrent à lui et lui dirent : savez-vous que les pharisiens, en entendant cette parole, se sont scandalisés ? Il répondit : toute plante qui n’a pas été plantée par mon Père céleste sera déracinée.
Laissez-les : ce sont des aveugles qui conduisent des aveugles. Si un aveugle conduit un aveugle, ils tomberont tous deux dans une fosse.
Pierre prit la parole et lui dit : explique-nous cette parabole.
Et Jésus lui dit : vous aussi êtes-vous sans intelligence ?
Ne saisissez-vous pas que tout ce qui entre dans la bouche va dans le ventre, puis est jeté à l’écart **, mais ce qui sort de la bouche provient du cœur, et c’est ce qui rend l’homme impur. Car c’est du cœur que viennent les mauvaises pensées, meurtres, adultères, prostitutions, vols, faux témoignages, blasphèmes. Voilà ce qui souille l’homme ; mais manger sans s’être lavé les mains, cela ne rend pas l’homme impur ».
NDLR. Accordons également à nos amis musulmans que nous nous ne pouvons pas non plus hisser au rang des conseils d’hygiène à prodiguer sans cesse ce qui suit et qui est un peu vague. Matthieu 23. « Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous nettoyez le dehors de la coupe et du plat, et qu’au-dedans ils sont pleins de rapine et d’intempérance. Pharisien aveugle ! Nettoie premièrement l’intérieur de la coupe et du plat, afin que l’extérieur aussi devienne net. Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous ressemblez à des sépulcres blanchis, qui paraissent beaux au-dehors, et qui, au-dedans, sont pleins d’ossements de morts et de toute espèce d’impuretés. Vous de même, au dehors, vous paraissez justes aux hommes, mais, au dedans, vous êtes pleins d’hypocrisie et d’iniquité, etc. ».
Pour ce qui est du contrôle de nos sphincters, Jésus n’arrive donc pas à la cheville de Mahomet, mais heureusement les moines ont suppléé cette carence du grand rabbi nazaréen.
Point N° 42 de la Règle des Culdées selon saint Maelruain de Tallaght : « Toilettes et urinoirs sont des lieux où rôdent les esprits maléfiques. Le signe de croix doit être fait sur ces lieux et l’on doit se signer en y entrant, il est interdit d’y réciter des prières, sauf le Deus in adiutorium (jusqu’à festina ».
Il faut néanmoins porter au crédit de Mahomet le fait qu’il semble avoir été très conscient de ses limites (humaines). Mais pour les musulmans, et c’est ce qu’on appelle le dogme de l’isma ou de l’impeccabilité des prophètes, Mahomet est l’homme le plus parfait et le plus grand ayant jamais vécu sur notre planète, et il est même le plus grand de tous les prophètes. Tout musulman lui voue donc un véritable culte, sciemment ou inconsciemment, et réagit avec une violence étonnante s’il est mis en cause par un dessinateur ou un romancier ou quiconque en cette matière.
Le malheur des musulmans est que Mahomet a vécu beaucoup plus longtemps que le grand rabbi nazaréen Jésus et qu’il a fini chef d’État (alors que la tentative de coup d’État des partisans de Jésus, elle, a été écrasée par les Romains).
Vu la mentalité de l’époque (assimilation de toute religion non à une spiritualité, mais à une loi, Din, comme dans le cas de la Loi de Moïse, conformisme social dans le cadre d’une société assez limitée en nombre et dans l’espace (les oasis) Mahomet a donc été questionné sur tout et n’importe quoi.
Il est vraisemblable que bon nombre de ces questions indignes d’un philosophe ou d’un mystique et relevant de la simple hygiène ou de la gastronomie, etc. ont été posées après coup, et après la mort personnelle de Mahomet. Il a été possible en effet ensuite de poser ce même genre de questions stupides aux membres de sa famille ou à ses proches.
Comme tout un chacun Mahomet avait des avis sur tout, et il ne semble pas avoir résisté à la tentation de donner son avis à qui le lui demandait.
Il aurait été préférable que Mahomet fasse comme le grand héros du roman initiatique appelé les quatre évangiles et, face aux nombreuses questions pièges des pharisiens, y échappe par des pirouettes ou s’exprime surtout en paraboles.
Il aurait été préférable que Mahomet fasse comme le grand héros du roman initiatique appelé les quatre évangiles et rompe avec sa famille.
Il aurait été préférable que Mahomet fasse comme le grand héros du roman initiatique appelé les quatre évangiles et n’essaie pas de fonder une famille.
Il aurait été préférable que Mahomet reste toujours dans l’opposition et ne se retrouve pas finalement à la tête d’un empire naissant.
Ce ne fut pas le cas, hélas pour deux milliards de nos congénères humains. Car les premières victimes de tout cela ce sont bien les musulmans eux-mêmes évidemment. Le malheur est donc que
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dans l’idéologie religieuse musulmane le bien ce n’est pas l’application de la règle d’or (ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse), mais l’application de la règle : « SI MAHOMET L’A FAIT ALORS C’EST BIEN ! SI C’EST LE CORAN QUI LE DIT (C’EST À DIRE EN FAIT TOUJOURS SI C’EST MAHOMET QUI LE DIT, C’EST BIEN !).
ENFERMEMENT RELIGIEUX ET ESSENTIALISATION.
Pour mémoire un exemple très clair de ce qu’est la laïcité (plus ouvert c’est ce qu’on appelle du « paganisme »).
Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État.
Titre Ier : Principes. Article 1 « … restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public ».
Article 2. La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. En conséquence… »
À en croire les musulmans pieux par contre, Dieu a envoyé avant Mahomet des prophètes pour transmettre sa loi (din) à l’humanité. Mahomet est le dernier de ces prophètes et son message constitue l’achèvement des messages antérieurs, leur sceau (idée empruntée au manichéisme). Par conséquent, toute l’humanité doit se rallier à son message et doit le suivre.
Mahomet s’est efforcé de son vivant de réaliser ce projet. Il a procédé à diverses ouvertures en direction des milieux judéo-chrétiens d’Arabie, notamment en reprenant de plus en plus d’éléments de leur documentation ou bibliothèques, mais en vain. Il est clair par exemple que les communautés juives de Yathrib/Médine ont refusé de le considérer comme le dernier des prophètes.
Mahomet les a alors accusés d’avoir falsifié leurs livres pour en faire disparaître les éléments qu’il soutenait ou développait pour élaborer son syncrétisme personnel et leur a reproché d’avoir été infidèles à leurs prophètes : comme les païens adorant les Jibt et les Taghouts (4,51), les juifs auraient adoré Moïse, leurs grands prêtres et Esdras (9,30), et les chrétiens Jésus et Marie.
Mahomet en tira néanmoins la conclusion qu’il s’agissait là d’une volonté de Dieu.
« Si Dieu avait voulu, certes il aurait fait de vous tous une seule communauté. Mais il veut vous éprouver en ce qu’il vous donne. Rivalisez donc dans les bonnes œuvres. C’est vers Dieu qu’est votre retour à tous ; alors il vous informera de ce en quoi vous divergiez » (5, 48 ; voir aussi 2,145 ; 11,118 ; 16, 93 et 42, 8).
Cette considération théologique détermine le statut légal des non-musulmans, statut principalement régi par quatre versets :
— Ceux qui ont cru, ceux qui se sont judaïsés, les chrétiens, et les sabéens, quiconque d’entre eux a cru en Dieu, au Jour dernier et accompli de bonnes œuvres, sera récompensé par son Seigneur ; il n’éprouvera aucune crainte et il ne sera jamais affligé (2,62).
— Ceux qui ont cru, ceux qui ont judaïsé, les sabéens, et les chrétiens, ceux parmi eux qui croient en Dieu, au Jour dernier et qui accomplissent les bonnes œuvres, aucune crainte à avoir pour eux, et ils ne seront point affligés (5, 69).
— Combattez ceux qui ne croient ni en Dieu ni au Jour dernier, qui n’interdisent pas ce que Dieu et Son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre, jusqu’à ce qu’ils versent la capitation par leurs propres mains, après avoir été humiliés (9, 29).
— Ceux qui ont cru, les juifs, les sabéens, les chrétiens, les mages et les polythéistes, Dieu tranchera entre eux le jour de Jugement, car Dieu voit tout (22,17).
Les légistes classiques ont déduit de ces versets que les Gens du Livre : les juifs, les chrétiens, les sabéens et les zoroastriens (mages), ont le droit de vivre au sein de l’État musulman malgré les divergences théologiques qui les séparent des musulmans.
La cohabitation entre musulmans et Gens du Livre se fait cependant, non pas d’égal à égal, mais de dominant à dominé, les Gens du Livre devant s’acquitter d’un tribut (djizia), en étant humiliés (9,29), et
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doivent se soumettre à certaines normes discriminatoires, en matière de droit de la famille notamment. Les musulmans pourront épouser les femmes des Gens du Livre, mais ceux-ci ne pourront pas prendre les femmes des musulmans (2, 221 ; 5,5 ; 60,10). Ils seront placés sous la protection des musulmans, mais ces derniers devront observer à leur égard une méfiance constante, même s’ils avaient avec eux des liens de parenté.
— Ô vous qui croyez ! Ne prenez pas pour amis les juifs et les chrétiens ; ils sont amis les uns des autres. Celui qui, parmi vous, les prend pour amis est des leurs. Dieu ne dirige pas le peuple injuste (5,51 ; voir aussi 3,28 et 9, 8).
— Ô vous qui croyez ! Ne prenez pas pour amis vos pères et vos frères, s’ils préfèrent l’incrédulité à la foi. Ceux d’entre vous qui les prendraient pour amis commettraient une injustice (9,23).
Pour résoudre les contradictions qui existent entre les versets tolérants et ceux moins tolérants, les légistes classiques recourent à la théorie de l’abrogation : un verset portant sur un sujet donné est abrogé par un verset ultérieur portant sur la même affaire. Or, les légistes classiques n’ont pu se mettre d’accord ni sur la portée ni sur la datation des versets, certains n’hésitant d’ailleurs point à considérer tous les versets tolérants du Coran à l’égard des non-musulmans, comme étant purement et simplement abrogés par les versets ultérieurs.
— Après que les mois sacrés se seront écoulés, tuez les polythéistes, partout où vous les trouverez ; capturez-les, assiégez-les, dressez-leur des embuscades. Mais s’ils se repentent, s’ils s’acquittent de la prière, s’ils font l’aumône, laissez-les libres. Dieu est celui qui pardonne, il est miséricordieux (9,5).
À propos du célèbre verset 9,29, voici ce que le frère musulman égyptien Sayyid Qoutb a pu en dire. Ce verset et les suivants concernent tous les gens du Livre, tant à l’intérieur de l’Arabie qu’à l’extérieur. Ils ordonnent de combattre les gens du Livre qui s’écartent de la religion de Dieu jusqu’à paiement du tribut en état d’humiliation. On ne les contraindra pas à devenir musulmans, car la norme en vigueur à ce sujet est : « pas de contrainte en religion », mais on ne les laissera à leur religion que s’ils paient le tribut à la suite d’un traité avec les musulmans.
Les relations entre les musulmans et les membres des autres communautés religieuses connurent des hauts et des bas, et nombreux furent ceux qui se convertirent à l’islam avec le temps. Ceux qui sont restés fidèles à leur foi d’origine pouvaient bénéficier d’une certaine autonomie législative et judiciaire, notamment en matière de droit familial. L’État musulman d’alors était plus un collecteur d’impôt qu’un gestionnaire de la société, d’autant plus que les juifs et les chrétiens étaient alors plus évolués que les nomades venus occuper leurs pays. C’est pourquoi ils furent pendant longtemps chargés de leur administration par les autorités musulmanes.
Ce système juridique multiconfessionnel de type Loi Gombette persiste encore aujourd’hui dans certains pays arabes, mais la tendance va vers l’unification. En Jordanie ou en Syrie, les communautés religieuses non musulmanes appliquent leurs lois religieuses en matière de droit de la famille à l’exception des successions, et ont leurs propres tribunaux religieux, alors que l’Égypte a supprimé ces tribunaux en 1955.
Conclusion. Ce qui est certain c’est que dans l’état sociopolitique laissé par Mahomet, la religion reste le principal critère de division. Dieu ou les différentes conceptions de Dieu sont le plus grand commun diviseur de l’humanité.
Il y a les musulmans qui forment l’oumma orgueilleusement qualifiée par le Coran de « meilleure communauté qu’on ait fait surgir pour les hommes » (3,110). À côté de ce groupe principal, il y a les groupes qui ont des livres révélés : ils peuvent rester dans le pays, garder leur croyance, avoir leurs lois et leurs juridictions, mais ils doivent accepter des droits restreints et payer tribut. Cette tolérance n’a pas été appliquée à ceux parmi eux qui habitaient en Arabie. Mahomet, sur son lit de mort, aurait dit : « Deux dins (religions) ne sauraient coexister dans la Péninsule arabe ».
« Malik a rapporté qu’Ibn Chihab lui a dit : Omar ibn al-Khattab a cherché des informations à ce sujet jusqu’à ce qu’il soit absolument convaincu que le Messager de Dieu, que Dieu le bénisse et lui accorde la paix, a déclaré : ‘Deux dins ne doivent pas coexister dans la péninsule arabique ‘ et il a donc expulsé les juifs de Khaïbar » (Mouwatta de Malik, livre 45, Hadith 18).
Il ne suffisait donc plus de payer le tribut comme leurs coreligionnaires dans les autres régions dominées par les musulmans. Rapportant la parole de Mahomet, Al Maouardi écrit : « Les non-musulmans ne furent pas admis à se fixer dans le Hedjaz ; ils ne pouvaient y rester plus de trois jours. Leurs corps mêmes ne devaient pas y être enterrés et, « si cela a eu lieu, ils seront exhumés et transportés ailleurs, car l’inhumation équivaut à un séjour à demeure ».
NDLR. Les légistes musulmans classiques ne se sont pas mis d’accord sur les limites géographiques dans lesquelles cette norme devait s’appliquer. Aujourd’hui seule l’Arabie saoudite l’invoque pour priver tous les non-musulmans du droit de pratiquer leurs cultes sur son territoire.
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LA SUCCESSION DE MAHOMET.
À sa mort en 632, Mahomet était le chef de l’Oumma et d’un territoire devenu un grand État en seulement quelques années. La question de sa succession fut à l’origine du premier grand schisme entre musulmans.
Faute d’indications précises données par Mahomet lui-même (le sermon-testament dit hadith de l’Adieu donné à Ghadir Khoumm en 632 étant controversé) sur la manière d’organiser sa succession, les musulmans médinois de souche (Ansars) en l’absence des immigrés venus de La Mecque, les Mouhadjiroun (ce qui leur semblait logique, car ils formaient l’essentiel de l’armée musulmane) se retrouvent chez les Bani Sa’da (réunion dite de la saqifa ou vestibule) afin de désigner un nouveau calife. Le candidat pressenti était Sa’d bin Obâda.
Certains immigrés venus de La Mecque, et notamment, Abou Bakr et Omar, ayant eu vent de cette réunion, trois d’entre eux se précipitèrent à l’endroit où s’étaient rassemblés les Ansars et Abou Bakr réussit à retourner la situation. Les musulmans étaient conscients de la convoitise que nourrissaient les deux hommes pour le pouvoir. Omar s’était préparé à prononcer un discours, mais Abou Bakr l’en empêcha et s’adressa lui-même aux participants… Les critères auxquels devait répondre le calife furent dès lors établis : appartenance à la famille de Mahomet, ancienneté de la conversion et respectabilité ou fidélité à la loi islamique.
— Abou Bakr ainsi élu calife grâce à l’intervention in extremis de la tribu Aslam mais en l’absence des autres Mouhadjiroun n’eut que le temps de parer au plus pressé (mettre définitivement fin aux velléités d’indépendance des Médinois de souche, réprimer le retour à l’indépendance des tribus de l’ouest de l’Arabie (guerres de la Ridda). À sa mort, Abou Bakr décida de désigner son successeur, Omar ibn al-Khattab (en vertu sans doute d’un accord entre les deux hommes). Ce deuxième calife – Omar ibn al-Khattab – désigna, à son tour, un conseil de six personnes (dont Ali faisait partie) pour choisir en son sein le calife suivant, qui fut Osman ben Affane.
LA GRANDE DISCORDE (AL FITNA AL KOUBRA) 655-661.
— La politique osmanienne fut très critiquée c’est le moins que l’on puisse dire. Ce membre du clan des Umayyades – rival de celui de Mahomet au sein de la tribu des Couraïchites – réécrit le Coran et favorise outrageusement sa famille (népotisme), en lui réservant par exemple la plupart des postes de gouverneur. Il est accusé d’établir un pouvoir aristocratique et de dévoyer le message de Mahomet. Une révolte finira par éclater en Égypte en 655, et Othman est assassiné en juin 656 – ce qui déclenche une véritable panique.
— C’est donc dans ce contexte troublé que le gendre et cousin de Mahomet, Ali ibn Abi Talib, sera nommé calife. Converti très tôt lui aussi, il appartient comme son cousin Mahomet au clan hachémite de la tribu des Couraïchites et avait épousé sa fille Fatima, morte en 632.
Ali dut immédiatement affronter une très forte opposition de la part de l’ex-épouse favorite de Mahomet, Aïcha, qui en voulait toujours à Ali d’avoir pris le parti de ses accusateurs dans la fameuse affaire (ifk) de son adultère supposé en 626 avec un jeune chamelier nommé Safouane (cf. chapitre 24 versets 11 à 26 du Coran), et de deux autres proches parents de Mahomet, Talha et al-Zoubaïr. Ces derniers, considérant qu’ils ont autant de droits que lui au califat, lui retirent leur allégeance et quittent Médine pour aller lever une armée à Bassora en Irak le plus grand camp militaire de l’époque.
La bataille eut lieu le 4 décembre 656 du côté d’al-Khouribga, près de Bassora et sera dite bataille du chameau.
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Tabari écrit que dans les premiers moments du combat, Aïcha, dans son palanquin protégé par des cottes de mailles et des panneaux de fer, exhorta les hommes d’Ali à abandonner les armes, en les appelant ses « enfants ». Ce procédé assez grossier n’ayant pas l’effet escompté, elle encouragea ensuite ses hommes au combat. Talha, blessé au genou, quitte le champ de bataille pour mieux mourir de ses blessures. Zoubaïr s’enfuit et il sera tué dans sa fuite.
Les combats se concentrèrent alors autour du palanquin blindé d’Aïcha et du chameau. Les fantassins des deux camps s’affrontent longuement autour de l’animal, mais il devint peu à peu évident pour tout le monde qu’Ali ne serait pas vaincu. Et, toujours selon cette tradition transmise par Tabari, un des belligérants finira par trancher les jarrets du chameau d’Aïcha qui s’écroule. Ali amnistiera ses opposants et ordonnera qu’on n’achève pas les blessés. Il retrouve ensuite Aïcha dans Bassora où elle a été escortée par son frère, et sombre alors dans l’oubli (semble être morte en 678 à Médine après avoir passé le reste de sa vie à s’occuper des enfants).
Mais une nouvelle opposition se lève alors contre le malheureux Ali : celle des Omeyyades, menés par Mou’aouia qui craint de perdre le gouvernorat de Syrie que lui avait confié Othman.
Mou‘aouiya prend comme prétexte le fait qu’Ali n’a pas encore vengé l’assassinat d’Othman, son cousin.
Les deux armées s’affrontent à Siffine à l’été 657, pendant plusieurs mois, sans victoire décisive de l’un ou l’autre côté. Mais le risque de l’enlisement du combat fait planer la menace d’une disparition mutuelle, qui priverait l’Oumma de ses chefs et mettrait ainsi en péril l’empire de l’Islam. Le général de Mou'aouiya utilise alors une ruse : il fait mettre au bout des lances de ses soldats une page du Coran. Les soldats de l’armée d’Ali s’arrêtent, ne voulant pas combattre contre le livre saint. Les protagonistes décident par conséquent de s’en remettre à un arbitrage, moyen de règlement des différends reconnu par le Coran.
Lorsque l’arbitre représentant Ali propose une solution de compromis consistant à trouver un autre calife, par exemple un descendant du calife Omar, celui qui représente Mou’aouiya refuse, mais prend cette proposition comme un accord d’Ali pour démissionner.
À cette nouvelle, une partie des combattants du camp Alide, refusant l’arbitrage, fait sécession. On les appellera les kharidjites (en arabe « ceux qui sont sortis » « les sortants » : al-khaouaridj, pluriel de kharidji). Ils seront écrasés l’année suivante à Nahraouane par Ali, mais après cette victoire l’armée d’Ali refusa de repartir au combat contre Mou’aouiya. Ali fut donc obligé de revenir à Koufa, ce qui achèvera de saper son autorité de quatrième calife. Mou’aouiya apparaît dès lors, aux yeux des élites médinoises, comme le seul à même de faire consensus, de ramener l’ordre et donc de sauver l’empire : il sera nommé calife en 660, et l’assassinat de son rival Ali en 661 par des séides du troisième camp, celui des kharidjites, finira de consacrer sa victoire.
NDLR. La bataille de Kerbala en 680 quelques années plus tard mettra définitivement fin au rôle politique de la famille d’Ali puisque le dernier héritier direct de Mahomet, son petit-fils Hussein fils d’Ali, y fut assassiné par les séides du calife omeyyade Yazid Ier fils de Mou’aouiya, qui lui ramenèrent sa tête à Damas. Son fils Ali Zaïn al-Abidine fut néanmoins épargné et Yazid ordonna de traiter cet enfant avec égards.
Le bruit du massacre des membres de la famille du Prophète par l’armée de Yazid se répandant dans la capitale, et ce dernier craignant une fronde, il désavoua publiquement ces événements et ordonna que les captifs soient escortés à Médine, qu’ils avaient quittée six mois plus tôt avec le petit-fils de Mahomet Hussein. À Médine, Ali Zaïn al-Abidine se tiendra l’écart des intrigues politiques en se consacrant aux choses de la religion, mais mourra empoisonné en 713 en laissant derrière lui deux garçons, qui seront l’occasion d’une première division dans le chiisme.
Pour en revenir à Mou’aouiya et la mise en place du pouvoir omeyyade.
Cette Grande Discorde (Fitna al koubra) aura des conséquences très importantes en matière purement politique, puisqu’elle amène au pouvoir Mou’aouiya et avec lui, le clan omeyyade. Jusque-là, la structure politique était celle de l’État médinois, centré sur la ville du Prophète et gouverné de manière plus ou moins collégiale par les chefs de l’Oumma sous l’autorité du calife.
C’est Mou’aouiya qui confèrera au calife sa fonction de chef politique suprême et une réelle autorité. Il commencera par déplacer le centre du pouvoir en Syrie, à Damas, où il restera pendant tout le règne des Omeyyades c’est-à-dire jusqu’en 750. L’image du calife souverain est diffusée, notamment par le moyen d’inscriptions à travers tout l’Empire ; de plus, en nommant son fils Yazid pour lui succéder, Mou’aouiya impose le principe de la succession héréditaire. Les auteurs musulmans traditionnels considèrent que son arrivée au pouvoir coïncide avec le retour du mulk, cette forme de pouvoir monarchique qui avait été bannie par Mahomet. On assiste de fait à une personnalisation du pouvoir autour de la figure califale, mais Mou’aouiya agit davantage en chef de confédération tribale qu’en souverain absolu : il ne cherche pas à centraliser l’administration ni l’impôt, ménage les tribus et ne remet pas en cause l’autonomie des provinces. Sa succession sera néanmoins remise en cause par
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un Médinois descendant d’al-Zoubaïr, qui aspirera lui aussi au califat, montrant ainsi que le pouvoir établi par Mou’aouiya, bien que stable durant son règne, n’était pas encore solidement installé dans la durée. C’est Marouane, un de ses cousins éloignés, qui installera pour de bon la dynastie omeyyade sur le trône califal à l’issue d’une nouvelle guerre civile qui durera jusqu’en 684.
LE KHARIDJISME.
Le kharidjisme (en arabe « ceux qui sont sortis » « les sortants » : al-khaouaridj, pluriel de kharidji) est donc une obédience de l’islam apparue à l’occasion du conflit entre le cousin et gendre de Mahomet Ali et le futur 5e calife Mou’aouiya. Les kharidjites furent ainsi appelés par Ali afin de souligner leur caractère contestataire, quelles que soient leurs revendications et leurs méthodes, pourtant radicalement opposées.
Le mouvement kharidjite prit de l’ampleur suite à son refus de l’arbitrage accepté par Ali entre lui et son adversaire Mou’aouiya après la bataille de Siffine qui les avait opposés en 657.
Cette bataille entre musulmans avait été meurtrière et Ali avait accepté l’idée d’un arbitrage pour arrêter ce bain de sang. Initialement partisans d’Ali, les kharidjites se désolidarisèrent néanmoins de son camp au motif que c’était à Dieu d’arbitrer et non à des hommes.
Cette formule vaut un autre nom au kharidjisme celui de mouhakkima, terme arabe qui désigne la communauté de ceux qui prononcent la formule « L’arbitrage n’appartient qu’à Dieu ». Selon eux, une fois choisi et admis par la communauté des croyants, le calife avait pour devoir de contenir les séditions, dans le but de préserver l’unité du groupe dont il était responsable.
Ils se fondaient pour cela sur ce verset du Coran : « Si deux partis de croyants se combattent, rétablissez la paix entre eux. Si l’un se rebelle encore contre l’autre, luttez contre celui qui se rebelle jusqu’à ce qu’il s’incline devant l’ordre de Dieu » (verset 9, chapitre 49).
Le clan rebelle était, du point de vue kharidjite, celui de Mou'aouiya qui aurait dû s’incliner devant Ali.
Alors que son intention était de se diriger vers la Syrie pour combattre de nouveau Mou'aouiya, Ali dut affronter les kharidjites à la bataille de Nahraouane près de la ville de Bagdad actuelle en 658. Les kharidjites furent mis en déroute et beaucoup furent tués. Bien décidés à venger leurs morts, les kharidjites firent alors assassiner Ali par un certain Abd-al-Rahman ibn Mouljam, alors qu’il se prosternait pour la prière de l’Al-Fajr.
Les kharidjites se divisèrent, par la suite, en une multitude de groupes (près d’une vingtaine). Six d’entre eux ont été principalement recensés : les mouhakkimites, les ibadites, les azraqites, les najadites, les ajradites, et les soufrites. Tous partagent des fondements communs comme l’excommunication (takfir) des musulmans commettant de grands péchés, l’obligation de se révolter contre le dirigeant injuste ou débauché, ou encore l’excommunication de certains compagnons de Mahomet.
Les ibadites, pacifistes, firent sécession durant le règne d’Ali en lui reprochant son comportement belliqueux, ils refusèrent de partir en guerre et restèrent à Bassora. Ils ne cautionnèrent donc pas l’escalade de violence qui suivit leur départ.
Dans certains ouvrages les ibadites sont appelés « kharidjites blancs » tandis que les Soufrites sont appelés « kharidjites jaunes » et les azraqites « kharidjites bleus ».
Histoire
En 685 une première révolte fut initiée par les azraqites qui, après s’être séparés des ibadites restés dans la région de Bassora, s’installèrent dans le Fars (autour de Chiraz en Iran). Ils y furent poursuivis par les armées du calife omeyyade Abd al-Malik placées sous les ordres de l’émir al-Hadjaj. Leur nouveau chef fut tué et les Azraqites disparurent (en 699).
En 686 une communauté ibadite s’installa dans le Sultanat d’Oman et au Yémen.
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En 695 éclatait une autre révolte kharidjite. La tradition sunnite se plaît à souligner, comme un nouvel exemple de la fureur sanguinaire des kharidjites, la sauvagerie avec laquelle les musulmans furent massacrés dans la mosquée de Koufa. Toutes ces agitations kharidjites eurent pour conséquence d’affaiblir le califat omeyyade et de préparer le succès de ses adversaires abbassides.
Le kharidjisme fut importé chez les Berbères par les premières tribus arabes ayant fui les persécutions omeyyades vers l’ouest au début du Moyen Âge et fut utilisé par certains Maghrébins comme une forme d’opposition aux Califats.
Doctrine.
Le kharidjisme est une pratique puritaine de l’islam, à la morale rigoriste, condamnant tout luxe. La foi n’a de valeur que si elle est justifiée par les œuvres. Les califes doivent mener une vie exemplaire et doivent être choisis par voie élective parmi les meilleurs musulmans, sans distinction de race et de tribu. Ils se divisent sur le problème de la foi et de l’attitude à adopter à l’égard des autres musulmans ; les azraqites sont des radicaux faisant usage de la violence politique et n’admettant pas la dissimulation de la foi ou taqiya ; les najadites, moins durs à l’égard des attentistes, sont partisans de la prise du pouvoir par les armes ; les soufrites condamnent le meurtre politique et admettent la dissimulation de la foi par prudence (taqiyya) ; les ibadites, pacifistes, mais intransigeants dans les domaines politique et moral, se montrent plus souples à l’égard des autres musulmans.
Pour le kharidjisme, tous les hommes sont égaux, et les privilèges de l’aristocratie couraïchite, accentués sous le règne de la dynastie omeyyade, sont condamnés. Certains kharidjites font du djihad un sixième pilier de l’islam.
La tendance la plus radicale, les azraqites, considérait tous les autres musulmans comme des incroyants « associateurs ; polythéistes » (mouchriqoun) et fut développée en Perse vers 685 par Nafi ben al-Azraq. Les azraqites avaient des pratiques particulières.
— L’examen probatoire (imtihan, « examen, épreuve ») consistait à exiger de tout néophyte kharidjite, comme gage de sa sincérité, d’égorger un adversaire prisonnier (puisque Mahomet avait un jour demandé à Ali de couper la tête de prisonniers mecquois). NDLR. Nous ignorons à quel événement précis ces kharidjites se réfèrent, mais il est vrai qu’il y a bien eu des cas où Mahomet a fait égorger des prisonniers de guerre, comme les dénommé Ouqba ibn Abi Mu’it après la bataille de Badr en 624 ; Abou Izzah al Joumahi après la bataille d’Ouhoud en 625 ; Abdoullah ibn Katal après la prise de La Mecque en 630…
— Le meurtre religieux (istirad’ « démonstration »), qui autorisait la mise à mort des hommes, mais aussi des femmes et des enfants, fussent-ils impubères, de ces derniers.
Ils considéraient le territoire occupé par les autres musulmans comme un territoire d’infidélité (Dar al-koufr, « territoire de l’incroyance ») où il était licite de s’attaquer aux personnes et aux biens, mais dont on devait s’exiler comme Mahomet s’était exilé de La Mecque à Médine pour échapper aux infidèles.
Une tendance moins brutale, les Soufrites, vivant en milieu hostile au kharidjisme, fut développée par Ziyad ben al-Asfar. Cette tendance condamne le meurtre politique, admet la dissimulation de la foi (taqiyya) par prudence et rejette le massacre des enfants des infidèles. Ils considèrent que la sourate XII (Joseph) ne fait pas réellement partie du Coran.
La branche fondée par Chabib ibn Yazid soutenait qu’il était légitime de confier l’imamat à une femme si cette dernière était capable de remplir les tâches reliées à ce rôle. Son épouse Ghazala commanda des troupes et lors d’un combat, elle aurait mis en fuite le fameux général omeyyade Al-Hajjaj ben Youssef (660-714).
Une autre tendance, l’ibadisme existe encore actuellement sous la forme de plusieurs variantes régionales. Fondée par Abd Allah ben Ibad elle a gardé un certain caractère d’intransigeance politique et de rigorisme moral. Les ibadites se montrent cependant beaucoup plus souples dans leurs relations avec les autres musulmans. Il leur est par exemple interdit de les attaquer par surprise sans les avoir invités préalablement à se rallier à leur foi (principe djihadique connu sous le nom de da’oua). Plus généralement, c’est l’usage de la violence qui est prohibé excepté pour se défendre.
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LES ORIGINES DU CHIISME.
L’intérêt pour nous aujourd’hui de ne pas se limiter aux quatre écoles juridiques sunnites dominantes, et d’évoquer les différentes théories politiques depuis l’arbitrage de Siffine en 657 qui devait mettre fin au conflit de succession, est qu’une grande partie de cet héritage « oublié » est, d’une part déterminante pour la situation actuelle, et d’autre part très riche en débats trop vite clos, souvent par la violence, sur les rapports de la religion musulmane avec le politique.
Après la mort de Jésus, les premiers chrétiens se dispersèrent et se cachèrent. Il faut en l’occurrence tenir compte du fait que contrairement aux chrétiens et aux juifs qui se trouvaient sous occupation romaine, les musulmans se trouvaient face à face, entre eux et contrairement à leurs « frères » du livre, n’étaient pas accaparés par la défense de leur foi contre un ennemi extérieur. Si des conflits doctrinaux les opposaient, l’impossibilité de les régler par une violence armée directe a pesé sur le destin du judaïsme et du christianisme d’alors.
D’où les fondamentales questions suivantes en ce qui concerne l’Islam.
— Les musulmans sont-ils obligés de faire allégeance à une quelconque autorité après le Prophète ?
— Quels sont les critères de l’autorité légitime ?
— Quelle attitude les musulmans doivent-ils avoir par rapport à l’autorité illégitime et/ou injuste ?
— Faut-il lui obéir et lui faire allégeance ?
— Ou faut-il lui désobéir et la combattre ?
— Quelle attitude doit-on avoir à l’égard de ceux qui font allégeance aux gouvernements injustes ?
— Faut-il les combattre ou les épargner ?
— Peut-on commercer et se marier avec eux ?
— La guerre est-elle licite, illicite, obligatoire ou prohibée dans le territoire soumis à l’autorité de tels gouvernants ?
— Peut-on y vivre comme dans une terre d’Islam ou faut-il en émigrer comment l’avaient fait le Prophète et ses compagnons en quittant La Mecque ?
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir plus haut avec les kharijdites, les mouhakkima étaient partisans de la thèse très simple que le califat n’était pas une obligation de religion, les musulmans pouvant vivre sans avoir à se soumettre à une autorité temporelle. Si un arbitre est nécessaire, il peut être choisi, mais uniquement pour sa sagesse coranique (donc être destitué s’il la perd), indépendamment de toutes autres considérations, sociales ou « raciales ».
Pour certains auteurs ils incarnent la tendance démocratique de l’Islam, en invoquant son refus de privilégier la famille du Prophète.
Pour d’autres il s’agirait plutôt d’une tendance anarchiste qu’on retrouve chez les nomades de toutes les civilisations et de toutes les époques. Ces mouhakkima ou kharidjites expriment le refus des tribus nomades de se soumettre à un pouvoir citadin. Ils rejettent le principe héréditaire et préfèrent le recours à l’antique mode électif des tribus arabes.
Dès la disparation de l’imamat du Khouzistan en 680, des divergences se firent jour chez eux quant à la nécessité de faire allégeance à un imam, de combattre les gouvernements injustes et illégitimes.
Ces divergences donnèrent naissance à différentes obédiences : azraqites (dont les théories ne sont connues que par leurs détracteurs), soufrites (qui tolèrent plus que d’autres les divergences
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doctrinales, disparus eux aussi), najadites, ajradites (dont on connaît peu de choses) et ibadites (seule obédience ayant survécu jusqu’à nos jours, ils sont majoritaires à Oman).
Ils préfèrent le kitmân ou la casuistique au recours à la lutte armée, le piétisme et l’action éducative pour maintenir et transmettre les enseignements de l’islam tels qu’ils le conçoivent. Leurs modes d’action politique s’apparentent à de la désobéissance civile plus ou moins ouverte et leur vision de la religion, de sa diffusion à sa consolidation, s’oppose à la hijra, cette manière de partager les territoires, en territoire d’infidélité ou de fidélité, dar al koufr, dar al islam ou dar al harb. La guerre ne peut être licite que sous certaines conditions.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir précédemment, à sa mort en 632, Mahomet n’avait pas officiellement désigné de successeur, le dernier sermon prononcé par Mahomet, le 15 mars 632, quelques jours avant sa mort, alors qu’il était à Ghadir Khoum un point d’eau situé sur le chemin du retour à Médine après un dernier pèlerinage à La Mecque, n’étant pas décisif (tout dépend du sens que l’on donne au mot arabe maoula).
Après la mort de Mahomet, deux conceptions de l’Islam incarnées par deux califes potentiels se firent donc face. La première, celle d’un retour aux traditions tribales, est incarnée par Abou Bakr, compagnon de toujours du prophète. La deuxième, plus attachée à la désignation d’un proche de Mahomet, voit en Ali, son gendre et fils spirituel, un candidat tout désigné. Après la brève tentative de prise du pouvoir par les Médinois de souche (réunion de la saqifa des Banou Saïda) ce sera pourtant Abou Bakr qui deviendra le premier calife (à cause de son âge) et aura ainsi pour tâche de succéder à Mahomet. Il gouvernera pendant deux années un territoire qui s’étend de l’Arabie à l’Égypte. Après sa mort en 634, deux autres califes lui succèderont : Omar et Othman. Ce dernier en profitera pour placer ses proches à des postes importants.
S’estimant le successeur le plus digne de Mahomet, et souhaitant depuis toujours réunir tous les musulmans dans un Islam rigoureux, Ali défend une application stricte du Coran. Entre règles de succession (Ali souhaite en effet réduire aux seuls descendants de Mahomet la possibilité de devenir califes) et autres différences doctrinales, la ligne de démarcation est désormais claire entre les futurs chiites (partisans d’Ali), et les autres, les futurs sunnites, majoritaires. S’ensuit une guerre qui dura près de deux générations dans laquelle la haine entre futurs sunnites et futurs chiites s’enlisera et deviendra durable (voir plus haut ce que nous avons dit du massacre de Kerbala en 680 qui verra des musulmans appartenant au futur camp sunnite égorger le fils d’Ali et petit-fils de Mahomet : Hussein)…
L’arbitrage de 657 à Siffine, très vite contesté, entre Ali et son rival omeyyade (famille qui s’était opposée à Mahomet avant de le rallier… tardivement), ayant de fait tourné à l’avantage du second, provoque très vite la formation de la première dissidence de l’islam, les mouhakkima ou kharidjites, dont sont issus les ibadites qui existent toujours. Ces mouhakkima ou kharidjites reprochent à Ali d’avoir accepté cet arbitrage, et il est donc nécessaire de lui désobéir et de choisir un imam légitime (en l’occurrence ce fut un certain Abdallah Ibn Ouahb Al-Rasibi, disparu dans une bataille contre les troupes d’Ali). Les mouhakkima ou kharidjites réussirent à faire assassiner Ali, inaugurant ainsi une longue suite d’assassinats politico-religieux.
Pour en revenir à l’arbitrage de Siffine en 657, Ali et ses partisans se retirèrent juste après en Irak et en Iran, et c’est son assassinat par un kharidjite qui donnera au conflit une tournure dramatique.
Le fils d’Abou Soufiane, Mou'awiya, en profite pour transformer le califat en monarchie héréditaire en empruntant ses formes et ses organes à l’organisation étatique des pays conquis. Cette transformation sera donc à l’origine de la constitution des partisans d’Ali en courants politico-religieux se réclamant d’un total légitimisme envers la famille (Ahl al-Baït) de Mahomet, autrement dit le chiisme.
Le zaïdisme naîtra d’une révolte contre le pouvoir omeyyade. À la reconnaissance de l’imam légitime (descendant de Fatima et d’Ali) s’ajoutera une offensive pour tenter de l’imposer. À cette nuance près sa doctrine est très proche de celles des moutazilites et des éléments sunnites s’y mêlèrent, avec le temps.
Le zaïdisme se veut l’école de pensée des Ahl al-Baït par excellence et se réclame des idées enseignées par l’imam Zaïd Ibn Ali ibn Al Hussein Ibn Ali Ibn Abi Talib et donc l’arrière-arrière-petit-fils de Mahomet. Il s’agit d’un des trois grands courants chiites avec le chiisme duodécimain et l’ismaélisme, et le plus proche du sunnisme.
La présence historiquement attestée d’imamats au Yémen et au Tabaristan indique que les zaïdites n’ont pas toujours respecté le principe de la nécessité de combattre les gouvernants injustes.
De plus, certains zaïdites considèrent que la condition de la « double filiation » (descendre à la fois de Fatima et d’Ali) n’est… plus de mise, allant même jusqu’à écrire qu’elle n’a jamais été une exigence absolue… Ce qui ne contribue pas à la clarté des débats. En se référant à l’école zaïdite des Salihiyya, qui a toujours prôné le principe électif de l’imam (sans précision aucune sur le candidat…),
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le cheikh Ibrahim Ibn Muhammad Al Ouazir du Yémen ajoute que le zaïdisme, qui n’a jamais fermé la porte de l’ijtihad, ne peut aujourd’hui envisager l’autorité qu’en termes d’élection démocratique sans aucune discrimination que ce soit (Qira’at fi al fikr az zayd Dâr al-Manhal, Beyrouth, 1993).
Les ismaéliens, contrairement aux adeptes du zaydisme, qui conserve (apparemment majoritairement) l’allégeance politique à la descendance de Fatima et d’Ali, ont une doctrine faisant procéder l’imamat directement d’un ordre divin articulé autour de trois fondements : Dieu, le prophète et l’imam.
Comme Dieu ne peut être que juste, il ne peut pas faire autrement que compléter le cycle de la prophétie par le cycle de l’imamat : Dieu a fait profiter de sa grâce bienfaisante la génération contemporaine du Prophète en la guidant, il ne peut priver de cette même grâce les générations suivantes. On est là très près de la notion de Saint-Esprit dans le christianisme. Le cycle de l’imamat procède de cette grâce divine justement répartie entre les générations. Les imams comme les prophètes sont par ailleurs la « preuve » par laquelle Dieu avertit les humains, leur indique ce qu’ils doivent et ne doivent pas faire, et leur demande des comptes par la suite sur leur conduite.
Dieu ne juge que parce qu’il a averti et indiqué, à travers les prophètes et les imams, la voie à suivre. Dans cette conception, l’imamat n’est donc pas une question humaine dépendant du choix des croyants ou de la volonté d’un homme qui la revendique ou peut la léguer à qui il veut. C’est Dieu qui désigne les imams comme il désigne les prophètes pour guider les humains et délivrer de l’errance. Chaque imam transmet à son successeur la mission qui lui a été confiée, afin qu’il continue à assurer sa présence dans le monde. On est là très près du rôle joué par le pape dans le catholicisme.
Pour ces chiites le premier imam fut donc le cousin et gendre de Mahomet, Ali, et les seuls imams légitimes furent 7, le sixième étant Ja'far Al-Sadiq (mort en 765) et le dernier Ismaïl. Ce dernier imam est le Mahdi dont ils attendent la manifestation (le retour) pour sauver le monde de l’injustice et de la corruption.
Les ismaéliens duodécimains considèrent que ces imams légitimes sont au nombre de 12, le dernier étant Muhammad Al-Mahdi Al-Mount Azhar, dont la disparition en 882 représente le début de la « petite occultation », la « grande occultation » commençant en 940, avec la disparition du quatrième représentant de l’ « Imam caché » sans désignation d’un autre imam pour lui succéder.
Cette conception de la succession légitime de Mahomet après sa mort a pour conséquence de délégitimer des trois premiers califes et de toutes les autorités qui ont régné depuis l’assassinat d’Ali, dont le règne (657-661) serait l’unique moment (après Mahomet), où la communauté musulmane a pu bénéficier de la « grâce » de Dieu.
La responsabilité de cette « malédiction » incombe à la société qui s’est détournée de ses imams sauveurs pour faire allégeance et se soumettre aux usurpateurs. L’attente de l’imam caché fait de ce chiisme un messianisme qu’il est possible de rapprocher de l’attente du Shaoshyante par les zoroastriens, du Messie par les Juifs et de la parousie chez les chrétiens.
En attendant la manifestation de cet imam caché qui assurera par sa direction le salut et la délivrance de l’humanité, les chiites ont longtemps prôné la taqiya (dissimulation), qui joue le même rôle que le kitman chez les ibadites, pour éviter de s’exposer à la persécution. Cette pratique ne les a pas empêchés de prendre part à des révoltes (comme celles qui ont précédé l’avènement de la dynastie fatimide en Afrique du Nord) dans l’espoir de hâter la « délivrance » et d’anticiper le royaume de Dieu ou tout simplement pour mettre fin à l’oppression et aux persécutions dont ils étaient victimes.
L’institutionnalisation du chiisme comme doctrine d’État (dynastie fatimide du Xe au XIIe siècle, religion officielle de la Perse depuis 1507) s’est évidemment faite au détriment de sa dimension messianique.
Ceci dit les différences entre les quatre madhhab du fiqh sunnite et celle des Ahl al-Baït ou chiites sont souvent minimes. Il faut donc croire que les chiites ont trouvé dans ces divergences apparentes une grande richesse. Ils y ont vu une raison majeure pour ne pas clôturer la porte de l’Ijtihad contrairement aux sunnites.
Mais soyons clairs !
Nous ne disons pas que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes avec l’islam chiite. Chiite ou pas, l’islam chiite reste un islam. Pour différentes raisons, et notamment le fait qu’il a été longtemps politiquement minoritaire, il s’est avéré être plus tolérant et plus moderne dans certains domaines. Voilà pourquoi nous lui consacrons un développement spécial dans ce bref essai sur, ou plus exactement contre, l’islam……………
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RAPPEL SUR LE CHIISME.
Si pour les sunnites l’Imamat ou califat, en tant que pure succession politique de Mahomet, n’est qu’une affaire de détail juridique, pour les chiites elle est la pierre angulaire de la religion. Sans imam, la religion serait comme un corps sans colonne vertébrale, ou pire, un corps sans âme. Une affaire de cette importance ne saurait être laissée à la délibération des musulmans. La désignation explicite de l’imam est beaucoup plus importante que la totalité du rituel. Les chiites considèrent que Mahomet, après la prise de la Mecque en 632, lors d’une halte à la source de Humm, a explicitement désigné Ali comme son successeur et son exécuteur testamentaire (Ouasi). Les grands compagnons, comme Abou Bakr, Omar ibn al-Khattab et Othman ben Affan (les trois premiers Califes dits bien guidés par les sunnites) ne pouvaient ignorer ce testament de Mahomet. Ils ont donc enfreint ses dernières volontés.
Pour les chiites, la lignée doit passer impérativement par les enfants de Fatima et Ali, seuls détenteurs de cette lumière (Nour) divine héritée de Mahomet. Un point majeur dans l’imamologie est l’infaillibilité (Isma) de l’imam, mais elle n’apparaîtra que beaucoup plus tard dans la littérature chiite. Pour les chiites la « guidance » spirituelle de l’imam ne saurait être assurée sans le lien direct avec Dieu. L’imam détient le savoir ésotérique (batine), la vérité absolue. Il ne saurait se tromper et il est infaillible tout comme Mahomet. Ainsi les maximes de l’imam sont des préceptes à suivre : elles complètent et commentent le Coran et la sunna de Mahomet, en confirmant ce qui est licite et illicite. Les imams n’enseignent rien qui serait contraire à l’esprit du Coran ou de la Sunna.
Le chiisme originel fut donc composé des compagnons qui estimaient que l’imam Ali, gendre et cousin de Mahomet, avait été choisi, par lui et par la volonté divine, pour lui succéder. Dès la deuxième moitié du premier siècle de l’Hégire (7e siècle), cette primauté de l’imam Ali est devenue un élément fondamental du chiisme et elle est au cœur de leur croyance. Pour les chiites, cette désignation est explicite (nass-jali) : l’imam Ali est l’héritier testamentaire ou légataire (Ouaasi) de Mahomet (sermon d’adieu de Ghadir Khoumm en 632).
Mahomet a transmis une pédagogie religieuse pour l’humanité entière selon le dessein divin, mais elle n’a pu se réaliser entièrement durant sa vie humaine. Ce message révélé (Rissala) a pris la forme d’un livre, le Coran, mais le lien (Imamat) qui lie les êtres humains à Dieu se poursuit et se poursuivra jusqu’à la fin des temps. Pour ce faire, l’humanité a besoin d’un Guide spirituel (imam) pour transmettre l’exégèse spirituelle du Coran et actualiser le message selon les conditions de l’époque. L’imam est le continuateur de la pédagogie prophétique. L’imam tire sa connaissance (ilm) d’une illumination divine personnelle.
Les chiites insistent sur le caractère bivalent du Coran : son contenu exotérique (zahir) et son contenu ésotérique (batine). La connaissance exotérique est donnée à toutes les personnes sans exception alors que l’ésotérique n’est accordée qu’aux initiés.
Succession des imams chiites.
Pour les chiites, tenants d’une tradition cléricale de l’islam hérité du paganisme ou du christianisme perse, l’imam est le guide spirituel et temporel de la communauté islamique. Chez les duodécimains, ils portent souvent le titre de mollah ou d’ayatollah et, de ce fait, celui d’imam est plus usité dans le
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sunnisme (pour désigner simplement le responsable des prières à effectuer dans la mosquée). Dans les autres communautés chiites, l’imam est le seul guide.
Disparition de l’imam.
Certains groupes chiites, devant la disparition de leur imam sans laisser de descendance, comme les duodécimains, ont eu recours à la notion d’occultation (ghaïba).
Seuls les nizariens ont un imam vivant (l’Aga Khan) qui s’occupe de sa communauté ismaélienne.
LE SUNNISME.
Les théories politiques sunnites se sont formées en réaction aux théories ibadites, chiites et mou'tazilites.
Al-Achari (873-935) a présenté les premiers éléments des théories sur le califat et les rapports entre religion et politique. Ceci juste après la fin de son adhésion au mou'tazilisme, abandonné au profit du hanbalisme depuis le règne du calife Al-Moutaouakil (847-861).
Il s’agissait de légitimer, contre les chiites, les califats d’Abou Bakr, Omar, Othman. Cette légitimité concerne aussi bien l’ordre dans lequel ils ont accédé à cette fonction que les moyens qu’ils ont utilisés pour y accéder et l’exercer. Ses disciples ne le suivent pas entièrement et se contentent de l’argument du « consensus des compagnons » aussi bien pour la nécessité du califat en général que pour la légitimité des quatre premiers califes, sans tenir compte d’ailleurs des faits qui démontrent – violemment, cf. les guerres de la Ridda par exemple – l’inexistence d’un tel consensus.
Outre l’autorité de ces califes, il sacralise les compagnons de Mahomet en considérant que tout ce qu’ils ont fait était juste, nécessaire et légitime du point de vue de la religion, même s’il y eut des divergences et des conflits entre eux.
Al-Achari en tire une règle qui fonctionne comme un dogme : « les adeptes de la communauté et de la tradition (sunna) reconnaissent le droit des ancêtres que Dieu a choisis pour être la compagnie de son Prophète, prennent exemple sur leurs vertus, s’abstiennent de parler de leurs divergences quel que soit leur rang, et reconnaissent la priorité (des quatre premiers califes), qu’ils considèrent comme les califes bien guidés (rachidoun) et les meilleurs des hommes après le Prophète ».
Ce qui confère au sunnisme quelque chose qui ressemble fort aux modernes théories du « deux poids deux mesures » ou lui confère un caractère larmoyant jusqu’à la nausée, mais comme le remarque fort justement Ruben Firestone (Djihad : les origines de la guerre sainte en Islam. New York. Presses universitaires d’Oxford p. 85) justifier des tueries par le fait que cela vaut mieux que la fitna est indubitablement un choix politique.
L’existence d’une autorité est jugée nécessaire pour empêcher la fitna et maintenir l’ordre. Al-Achari institue donc l’obligation de faire allégeance à tout imam ou calife, qu’il soit juste ou injuste, homme de bien ou pervers.
Ses disciples Al-Jouwaïni (1028-1085) et Al-Ghazali (1058-1111) reprendront ce point pour établir que l’obéissance est obligatoire, même si l’imam ou calife est injuste : toute opposition à l’autorité est une fitna à combattre tant qu’elle n’a pas réussi à défaire le pouvoir en place et à s’y substituer. Mais si elle triomphe, elle cesse d’être une fitna et devient dès lors djihad, toute résistance de la part de l’autorité déchue devient à son tour une fitna (realpolitik).
Les disciples d’Al-Achari tinrent à se démarquer des mouhakkima comme des chiites sur les conditions à remplir pour être calife légitime.
Contre les premiers, ils exclurent les non-couraïchites (donc tous les non-Arabes, racisme ?), contre les seconds, ils refusèrent de limiter la légitimité aux seuls descendants de Mahomet ou de son cousin Ali.
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Ce qui permit de légitimer a posteriori tous les califes que le monde musulman a connus jusqu’alors : les califes de Médine, les Omeyyades comme les Abbassides. Considérant que le califat idéal a définitivement disparu depuis la fin du règne des quatre premiers califes, les théologiens sunnites jugent que la principale condition à remplir pour se faire admettre comme une autorité légitime est d’être capable de se faire obéir, pour empêcher l’ordre et empêcher la fitna.
Bien avant Ibn Khaldoun et sa théorie de l’assabiya (cohésion, sociale) nécessaire pour se faire obéir et empêcher les gens de s’agresser les uns les autres, Al-Jouwaïni et Al-Ghazali ont montré que le critère le plus important est celui de la gabala (capacité de vaincre) et de la chaouka (la force) en tant que condition primordiale pour que les autorités soient respectées. Pour justifier cette priorité de la force sur les critères religieux de l’ilm et de la piété, les théologiens invoquèrent des hadiths trouvés chez les juristes.
La consultation peut-être un moyen de choisir le calife, mais pas obligatoirement, le calife en exercice pouvant désigner son successeur. Cette précaution serait même nécessaire pour éviter, une fois encore, la fitna. Ce qui compte le plus, c’est le poids social de l’opinion de ceux qui seraient, à défaut, candidats à ladite succession.
Le cas récent de l’État islamique proclamé en Irak et en Syrie en 2014 par Abou Bakr ? Al Bagdadi montre bien qu’en ce domaine il ne faut pas négliger l’empreinte laissée par la doctrine sur une sensibilité et une dévotion populaires qui peuvent y trouver matière à leur nostalgie d’un passé glorifié et mythifié, que l’on aspire, dans le tréfonds des âmes, à voir ressusciter. Le petit djihad, qui est une prescription coranique en même temps qu’un des fondements doctrinaux de l’islam, a toujours servi de moteur à des militantismes politiques et sociaux à travers l’histoire. Dès l’époque médiévale, plusieurs défenseurs de changements politiques ont eu recours à cette doctrine pour légitimer leur révolte contre des dirigeants coupables de trahir l’islam selon eux, tandis que d’autres, des rigoristes, l’ont invoquée pour combattre les hérétiques qui n’obéissaient pas à la loi ni à l’autorité islamique et qui compromettaient la pureté ou le triomphe de la religion.
Le hanbalite syrien Ibn Taïmiya, un contemporain du désastre de l’invasion mongole après la chute du califat abbasside en 1258, fait justement partie de cette dernière catégorie : à travers diverses fatouas (opinions juridiques établies sur son exégèse du Coran et des paroles de Mahomet), il prône en effet le retour le plus littéral à l’exemple des pieux ancêtres (al-salaf al-salih) et il exige du pouvoir islamique d’imposer son autorité par le petit djihad ainsi que par une stricte application de la charia (pages 43-44. Peters, Rudolph. 1996. Le djihad dans l’islam classique et moderne : A Reader. Princeton : Markus Wiener Publishers).
Ibn Taïmiya innove en jugeant la qualité de la foi des individus selon leur propension à combattre. Il appelle à retrancher de l’oumma les musulmans qui refusent de souscrire au petit djihad armé, et ce, par le moyen du takfir, ou anathème (pages 63-65 Cook, David. 2005. Comprendre le Djihad. Berkeley et Los Angeles : University of California Press). Son petit djihad prend pour cible toute incroyance et toute « déviance » par rapport au dogme sunnite. Il vise surtout les chiites, les soufis et les Mongols, qu’il considère comme des ennemis plus dangereux que les croisés.
Mais ces principes racistes (exclusion du califat pour les non-couraïchites donc tous les non-Arabes et refus de limiter la légitimité aux seuls descendants de Mahomet ou de son cousin Ali) souffrirent des exceptions qui les firent ressembler à des justifications a posteriori.
Ibn Taïmiya après que les Mongols eurent mis fin à la dynastie abbasside (al-Siyassa al-char'iya, la politique conforme à la charia) se résoudra par exemple à écrire pour appeler les musulmans à faire allégeance aux nouveaux maîtres.
Bel exemple de realpolitik ! Ibn Taïmiya aurait pu damer le pion à nos modernes politiciens. Ces accommodements permirent d’admettre, plus tard, la légitimité des califes ottomans bien qu’ils ne fussent ni couraïchites ni arabes. Avec la colonisation et le passage de la plupart des musulmans sous des autorités non musulmanes, le même principe de réalité, et la même peur de la fitna, furent à l’origine de nouvelles adaptations. Il ne fut plus exigé que l’autorité soit musulmane. Elle peut être légitime du moment qu’elle maintient l’ordre, empêche la fitna et n’oblige pas les musulmans à renoncer à leur religion.
Ferjani (Le politique et le religieux dans le champ islamique. Paris : Fayard. 2005, pages 209-2015) souligne que la conception sunnite de l’autorité est fondamentalement conservatrice en ce qu’elle cherche à défendre l’ordre établi et la légitimité de l’État au nom de l’obligation d’obéir à Dieu, au Prophète et à ses quatre premiers successeurs « bien inspirés » (al-rachidoun) en charge des affaires de la communauté, même lorsque ces derniers ne respectent pas la loi. Toute révolte contre le pouvoir en place est une sédition (fitna) qu’il faut combattre, même si ce pouvoir est injuste. Cependant, la sédition peut se prétendre comme étant un djihad lorsqu’elle réussit à présenter la politique pratiquée par l’autorité comme un « facteur de fitna » et à se poser en alternative.
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La conception sunnite de l’autorité est donc fondamentalement conservatrice : elle vise à défendre l’ordre établi. Cependant, il n’est pas difficile de la retourner contre le pouvoir en place : il suffit pour cela de maquiller la révolte en djihad, de considérer la politique du pouvoir en place comme un facteur de fitna, de donner aux objectifs de la révolte le caractère d’un impératif religieux, et de faire passer la répression qui s’en suit comme une volonté d’empêcher des musulmans de vivre et de pratiquer leur religion (taqiya). La même théorie est mise à contribution pour justifier l’obligation d’obéir à l’autorité en place, qu’elle soit juste ou non, légitime ou non, et le recours aux armes, voire le « tyrannicide » pour conquérir le pouvoir.
La doctrine définit trois sortes de petits djihads contre les ennemis intérieurs de l’islam, considérés comme étant les plus pervers parce qu’ils peuvent rompre l’unité et l’harmonie de la communauté : les apostats, les rebelles et les déserteurs ou brigands.
Les rebelles. Le djihad contre les rebelles vise à combattre tout soulèvement social, politique ou doctrinal susceptible de menacer le pouvoir et ses détenteurs. Les personnes ou groupes à l’origine des divergences sont accusés de bidah (innovation) ou de koufr (mécréance), donc d’hérésie ou d’impiété, puisque le pouvoir combine par essence le temporel et le spirituel.
La doctrine stipule que si les rebelles (boughat) ne renient par l’autorité de l’imam ou du calife, il leur est permis de vivre pacifiquement au sein de la communauté. Le calife doit cependant tenter de les persuader de se conformer à la loi et à l’autorité. Si les rebelles persistent dans leur refus, ils doivent faire l’objet d’un djihad afin que l’unité de l’oumma soit rétablie. Si les rebelles sont nombreux et puissants, il est recommandé de les combattre avec force. Ceux parmi eux qui sont pris comme prisonniers ne doivent pas être tués et leurs armes doivent leur être restituées une fois qu’ils se seront soumis à l’autorité de l’imam ou du calife.
Les déserteurs et les brigands. Les juristes s’entendent pour que ce soit l’imam ou le calife qui décide de la peine contre les déserteurs (mouhariboun) et les brigands (koutta' at-tarik), mais ne sont pas d’accord sur la nature du châtiment à prescrire. Suivant le sérieux du crime et le caractère du criminel, certains préconisent la mort et la crucifixion, d’autres recommandent l’amputation des mains et des pieds, tandis que d’autres conseillent l’expulsion de l’individu de sa ville ou du dar al-islam.
Par ailleurs, l’imam ou le calife peut décider de les considérer comme les dissidents et leur réserver le même traitement.
L’orientaliste égyptien Alfred Morabia ((Le Djihad dans l’Islam médiéval : Le combat sacré des origines au XIIe siècle. Paris : Albin Michel. 1993) explique que de nombreux juristes ont clamé préférer les pécheurs et les infidèles aux hérétiques, car ces derniers représentent un danger plus pernicieux, parce que plus subtil et diffus, que celui de la franche impiété ». Il cite le père de l’école chafiite, Chafi'i, pour qui « il faut combattre les apostats/rebelles avant de livrer djihad aux infidèles du Dar al-harb ». Le principe vient à l’origine d’une parole attribuée à Mahomet dans laquelle ce dernier enjoint Ali à mener contre les dissidents « un combat similaire à celui conduit [contre les mécréants] en considération de la Prédication ». L’auteur soutient que ce précepte convenait aux dirigeants musulmans, dont le réalisme politique les a souvent amenés à s’allier aux mécréants contre leurs adversaires musulmans. Par ailleurs, le fidèle qui meurt en combattant les rebelles est considéré comme martyr au même titre que celui qui trépasse en livrant le djihad aux infidèles (Morabia, pp. 305-308).
Alfred Morabia souligne enfin que la distinction entre les différents sens du djihad tendait aujourd’hui à s’effacer dans l’esprit musulman : le véritable mystique, soucieux de combattre les passions qui sont en lui, finit toujours, en raison du devoir de commander le bien et d’interdire le mal, par combattre le mal en dehors de lui, dans son entourage. Cette curatelle du prochain, cette hisba, en direction des musulmans, débouche naturellement sur la guerre, soit contre les rebelles, les brigands et les hérétiques, soit contre les infidèles. Le mourabit, ascète, prédicateur et guerrier incarne ainsi la totalité des sens du mot djihad (Morabia, chap. IX).
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LA QUINTUPLE HIÉRARCHISATION DES ÊTRES HUMAINS.
Que le musulman pieux veuille bien pardonner à l’avance ce qui va suivre et qui tombe hélas ! sous le coup de l’interdiction par Dieu de toute contestation. Car nous allons effectivement maintes fois dans les lignes qui suivent discuter des versets du Coran : de leur sens, de leur pertinence, de leur adéquation, de leur valeur éthique philosophique ou scientifique. Comment faire autrement ?
Notamment à propos de la quintuple hiérarchisation des êtres humains.
Kouffar et mécréants mouchriqoun et taouaghit.
Gens du Livre (en gros les judéo-chrétiens et quelques autres minorités comme les Sabéens mandéens aujourd’hui quasiment disparus ou les zoroastriens donc les Parsis, toujours représentés.
Hommes / femmes.
Hommes libres / esclaves.
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Enfin tout en haut de la pyramide, les musulmans, qui ne constituent pas une race au sens vulgaire du terme bien entendu, mais constituent incontestablement une élite. Une élite ayant elle-même son élite (voir chapitres 4, 95 ; 9 ,19-20 ; 57, 10).
LES SOUS-HOMMES.
Le terme kafir (pluriel kouffar) englobe l’ensemble des non-musulmans, il a une connotation péjorative et dépréciative considérable comparable à une injure du type « taghout ».
Dans la poésie arabe ancienne, le terme kafir signifie ingrat. Sous l’influence du syriaque ce terme prendra ensuite le sens d’« infidèle ». Étymologiquement parlant le mot kafir désigne plus précisément quelqu’un qui occulte ou cache quelque chose toute en sachant que cela existe. Pour qu’une personne soit kafir il faut donc qu’elle fasse acte de kaffara, c’est-à-dire qu’elle connaisse la vérité, mais la cache aux autres, soit en la combattant ou par tout autre moyen.
Verset 176, chapitre 7. « Il a suivi ses passions, il était semblable au chien : il grogne quand tu l’attaques, il grogne quand tu le laisses tranquille, tel est le peuple qui traite nos signes de mensonges ».
Verset 179, chapitre 7. « Voilà ceux qui sont semblables aux bestiaux ou plus égarés encore, voilà ceux qui sont insouciants ».
Verset 55, chapitre 8. « Les pires des êtres devant Dieu sont vraiment ceux qui sont ingrats, qui ne croient pas ».
Verset 65 chapitre 8 « Les incroyants sont des gens dénués d’intelligence ! »
Vu le sens très péjoratif en arabe théologique des termes kouffar (singulier kafir) ou Djahilya (littéralement les temps de la barbarie), il nous a donc semblé plus percutant de traduire ce mot (kafir/kouffar) par sous-homme, surtout par contraste avec la race SPIRITUELLE SUPÉRIEURE que sont les vrais musulmans.
Chapitre 3, verset 110. « Vous formez la meilleure communauté suscitée pour les hommes : vous ordonnez ce qui est convenable, vous interdisez ce qui est blâmable ».
Les versets que nous venons de citer sont en effet fort clairs : les non-croyants sont les pires des créatures (98, 6), des animaux haïs de Dieu, ET LES MUSULMANS ONT LE DROIT DE COMMANDER CE QU’IL CONVIENT DE FAIRE ET D’INTERDIRE CE QUI EST BLÂMABLE.
Pour la théologie musulmane en effet tout homme naît naturellement musulman.
« J’ai créé tous mes serviteurs hounafa (monothéistes), mais les démons les ont alors détournés de leur religion, leur interdisant ce que je leur avais permis, etc. » (hadith de Lyad Ibn Himar rapporté par Muslim.)
« Tout nouveau-né vient au monde en état de fitra (musulman). Ce sont ses parents qui font de lui un juif, un chrétien ou un polythéiste » (hadith d’Abou Horaïra rapporté par Boukhari et Muslim, livre 33, numéro 6426).
La théologie musulmane a néanmoins « hérité » ou plus exactement récupéré, peu à peu, une division du monde à la fois orgueilleuse (à tout le moins ethnocentriste) et ultra simple, du type « nous et les autres » (des autres souvent essentialisés sans nuance d’ailleurs vu l’étroitesse du cadre géographique concerné malgré l’exil à Babylone).
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La division du monde selon le judaïsme antique était en effet très simple.
Il y avait le peuple élu par le seul vrai Dieu maître de l’Univers… et les autres nations… souvent désignées sous l’appellation de nations tout court d’ailleurs : Gentiles en latin (de gens = clan ou tribu).
La situation se compliqua quelque peu avec le christianisme. Ce dernier se considéra tout naturellement comme étant le nouveau peuple élu (le Verus Israël en latin) et distingua donc outre lui-même, les juifs restés juifs, et les autres nations, progressivement rebaptisées « païennes » (ni juives ni chrétiennes).
L’avènement de l’Islam compliqua encore le tableau.
Les premiers musulmans distinguèrent leur groupe à eux, les juifs et les chrétiens, appelés Ahl Al-Kitab (« gens des écritures » ou « du Livre ») à cause de la Bible ; et les autres ni musulmans ni juifs ni chrétiens, tels les compatriotes arabes du jeune Mahomet à La Mecque par exemple.
La Mecque de la jeunesse de Mahomet semble en effet avoir été un vrai carrefour des religions (360 statues ou icônes dans la Kaaba). La présence de tribus juives, ou judaïsées, ou judaïsantes, n’est signalée que dans la Cité État voisine de Yathrib future Médine, mais il y avait sans doute des chrétiens à la mode de l’époque puisque Ouaraqa Ibn Naoufal le hanif, cousin de la première femme de Mahomet (Khadidja), semble avoir été un évêque nestorien. Le premier muezzin de l’islam, Bilal, un esclave chrétien d’Éthiopie, etc.… Quant au « roi » de La Mecque de l’époque, Abou Soufiane, Ibn Habib (Kitab Al-Mouhabbar) assure qu’il était manichéen et Ibn Kalbi dans son ouvrage intitulé Mathalib Al Arab confirme que plusieurs des Couraïchites étaient « Zindiq » (tombés dans la zandaqa). D’où le fait que Mahomet utilise souvent d’emblée la formule « O Mouminoun, O croyants ! » pour commencer l’énoncé des préceptes divins. Sceau des prophètes est d’ailleurs une formule typiquement manichéenne !
Mais enfin des hommes et des femmes sans livre sacré (oummiyoun, singulier oummi, littéralement « les gens sans Écritures saintes, sans livre saint) il devait bien y en avoir à cette époque à La Mecque et c’est donc par eux que nous commencerons cette brève étude du panorama religieux de la Cité État de La Mecque lors de la Djahiliya. Pour plus de détails sur cette période et les 360 dieux ou déesses de la Kaaba voir nos essais précédents et le Kitab al-Asnam ou Livre des idoles d’Hicham ibn al-Kalbi.
Cette distinction resta néanmoins très théorique, car la majorité des nasara (ou messihiyoun) donc des chrétiens reconnaissaient déjà en ce temps-là, outre Dieu le Père, Dieu le fils (Jésus) ainsi qu’une autre personne divine encore, le Saint-Esprit. Ce qui, aux yeux des musulmans, les rapprochait beaucoup des polythéistes (mouchrikoun).
D’où la gigantesque catégorie fourre-tout musulmane des infidèles mécréants incrédules, etc. dits… kouffar (singulier kafir).
Nous allons donc essayer dans ce qui suit de distinguer les Ahl Al-Kitab ou gens du Livre (juifs et chrétiens) des autres non-musulmans. MAIS CELA NE SERA PAS FACILE, LES THÉOLOGIENS MUSULMANS ÉTANT LES PREMIERS À LES CARTOGRAPHIER SOUS L’APPELLATION DE DAR AL KOUFR.
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LES KOUFFAR ET LE KOUFR.
Il existe donc deux types de mécréants (kouffar, pluriel de kafir) :
Le mécréant d’origine (kafir asli), c’est-à-dire qui n’a jamais embrassé l’Islam. Certains croient en Dieu, mais aucun ne respecte les préceptes de l’Islam ni ne reconnaît son prophète. Il y en a de trois types.
Les païens (appelés taouaghit), adeptes de religions non abrahamiques, tels que les païens d’Arabie du temps de la Djahilya (littéralement du temps de la barbarie) ou aujourd’hui les hindous, les bouddhistes, les malheureux yézidis d’Irak, etc.
Les Gens du Livre (Ahl Al-Kitab). Ce sont les juifs et les chrétiens, qui croient bien au Dieu unique, mais ne reconnaissent pas Mahomet comme prophète.
Les athées, ceux qui refusent de vouer un culte à un dieu particulier ou de suivre une religion particulière.
Le deuxième type de kafir est l’apostat (kafir mourtad), celui qui a commis un acte ou dit une parole entraînant sa sortie de l’Islam.
Ces actes de koufr sont de deux types.
L’Al-jouhoud : c’est le fait de nier une des obligations de l’islam telles que le jeûne, le pèlerinage, la prière, la charia, le petit djihad. La personne qui en nie ou ignore délibérément le caractère obligatoire et sacré devient « jaahid » (celui qui nie, qui se livre au « jouhoud »).
L’Al-istihlal : c’est le fait de permettre ce que Dieu a interdit ou bien d’interdire ce que Dieu a permis. Par exemple permettre des actes sexuels illicites ou toute autre chose prohibée. Celui qui commet l’istihlal est appelé al-Moustahlil.
L’An-naqid : C’est une autre action qui annule l’Islam de la personne en question. Ces reniements de l’Islam (Naouaaqid al-Islam) sont nombreux et si une personne commet l’une de ces fautes, elle devient aussi kafir, mais pas kafir asli, c’est-à-dire de naissance, mais kafir mourtad, c’est-à-dire par choix délibéré (autrement dit apostat).
À noter que l’al naqid n’est pas toujours comparable à une véritable excommunication. En l’absence d’un clergé unifié, le kafir mourtad dont l’acte ne touche pas à un principe fondamental (tel que les piliers de l’islam) peut toujours migrer vers une autre région musulmane où l’avis des docteurs rejoint sa pensée.
La théologie musulmane distingue la mécréance majeure (Koufr Akbar) de la mécréance mineure (Koufr Asghar).
La mécréance majeure est le contraire de la Foi et cela signifie concrètement ignorer Dieu ou Son messager, rejeter les paroles et les ordres de Dieu et de Son messager après en avoir pourtant pris connaissance.
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Un débat ancien, déjà présent chez Boukhari, existe chez les penseurs musulmans pour savoir si un musulman devient Kafir suite à un « péché mortel ». Différentes interprétations ont existé en islam. Pour les mourjites, un musulman, même en cas de péché grave, reste un musulman. À l’inverse, pour les kharidjites, tout péché non racheté rend le musulman kafir.
— La mécréance d’ignorance ou « Koufr Al Jahl ». C’est le fait d’ignorer le minimum à savoir pour être musulman parce qu’on en est incapable.
Cette mécréance empêche certes d’entrer dans la communauté des fidèles, mais Dieu ne punit pas pour autant celui qui en est coupable puisqu’il est incapable d’apprendre. On peut donc considérer, et c’est ce que font divers auteurs, que c’est le type de mécréance qui existait jadis dans les pays ou le message de l’islam n’était pas parvenu.
Mais peut-on en dire autant aujourd’hui que le monde est globalisé et à l’heure d’internet ?
Celui qui ignore l’Unicité de Dieu – parce qu’incapable de l’apprendre – et adore un autre dieu que Dieu, n’est pas musulman même s’il prie, jeûne, et qu’il prétend l’être. Ce qui le caractérise c’est la mécréance d’ignorance qui l’empêche d’avoir la Foi et d’être musulman. Mais Dieu ne le punira pas tant qu’il n’aura pas été capable de connaître l’enseignement que le prophète a transmis.
— La mécréance de rejet. Refuser de croire en l’existence du Paradis ou de l’Enfer * par exemple. Ou rejeter l’obligation de n’adorer nul autre dieu que Dieu ; le caractère obligatoire des 5 prières et l’interdiction de boire du vin, etc.
La mécréance de rejet ne peut exister, bien entendu, qu’après que le message de Dieu a été transmis. Certains auteurs comme Ibn Al Qayyim ont néanmoins une conception très large de la mécréance de rejet [Madarij as-Salikin 1 / 337-338].
— La mécréance par le doute est le fait de croire que les messagers se trompent, mais cette catégorie est rare chez les mécréants, car Dieu a soutenu Ses messagers et leur a donné des signes et des preuves de leur sincérité.
— La mécréance par le dédain est le fait de se désintéresser du prophète…
— Enfin la mécréance d’hypocrisie est le fait de faire semblant de croire…
Pour ce qui est de la mécréance par arrogance ; elle est comme la mécréance d’Iblis (Satan) qui certes n’a pas renié le commandement de Dieu et ne l’a pas réfuté ; mais l’a rejeté avec orgueil ; et c’est cette mécréance qui est majoritairement celle des ennemis des prophètes ainsi que Dieu nous l’a fait savoir dans l’histoire de Pharaon et de son peuple. Pour ce qui est des politiques ou législateurs en règle générale, est mécréant celui qui rend licite une chose illicite (haram), ainsi que celui qui rend illicite…… une chose licite (halal) figurant pourtant dans la législation islamique (charia) tirée du Coran et de la Sunna. Selon certains théologiens, tels qu’Ibn Al-Qayyim ou Ach-Chafi'i, faire des lois (tachri') découlant d’autre chose que le Coran et la Sounna est considéré comme de la mécréance majeure (koufr akbar).
Le koufr douna koufr (agir en mécréant sans être mécréant) quand on est législateur ou responsable politique relève de l’une ou l’autre catégorie suivant les auteurs.
La mécréance mineure inclut tous les péchés mortels. La mécréance mineure n’invalide ni l’Islam ni la Foi ; mais en diminue la valeur.
Conséquences de la mécréance : le takfir ou excommunication.
Le takfîr est une traduction du fait de ne plus reconnaître quelqu’un comme musulman. Il est à noter que commettre des actes relevant du koufr ou vivre dans le koufr en terres d’islam (dar al islam) ne revient pas exactement au fait de s’exclure de soi-même de la communauté musulmane faute de clergé unifié dans le monde sunnite et donc d’autorité suprême pour interpréter les textes, celui qui vit dans le kouffar peut donc toujours aller vivre dans un pays musulman (du Dar al Islam) où ne prévaut pas cette façon de voir les choses.
Toute mesure de déchéance du statut de musulman doit être prise avec discernement. Plusieurs hadiths insistent sur la gravité du takfîr : « Si une personne dit Ô kafir (mécréant) à son frère, alors l’un des deux mérite ce qualificatif ». De nombreux oulémas mettent donc en garde contre l’excès de takfir. Accuser l’autre d’être un kafir est pourtant courant dans les polémiques religieuses musulmanes.
Les dix grands motifs d’excommunication (takfîr).
— Agréer ou pratiquer l’associationnisme ou chirk c’est-à-dire le trithéisme ou le polythéisme (autrement dit le paganisme).
— Invoquer ou prier des intermédiaires entre Dieu et les hommes.
— Ne pas considérer les non-musulmans comme mécréants ou douter de leur incroyance.
— Penser qu’une voie ou qu’un jugement peut être meilleur que ceux de Dieu ou de Mahomet (cf. Coran 5,44).
— Haïr quelque chose venant du messager de Dieu même si on l’applique.
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— Se moquer de quelque chose faisant partie de la religion, d’un châtiment ou d’une récompense de Dieu (cf. 9,65- 66).
— Agréer ou pratiquer la sorcellerie. NDLR. Ce qui suppose donc de croire en l’existence du Diable.
— S’allier militairement avec les « Juifs et les chrétiens alliés les uns les autres » contre des musulmans (Coran 5 ,51- 55).
Le Coran annonce des punitions dans l’autre monde pour les apostats et ceux qui auront quitté l’islam. Pour autant, les traditions musulmanes rajoutent des conséquences du vivant du mécréant. Dans le cas d’un apostat, il devra être invité à revenir à l’islam puis, en cas de refus, être mis à mort. Une telle sentence a été décrétée pour Taslima Nasreen et Salman Rushdie.
* Ce qui fait donc de ceux qui, à l’instar des anciens druides, ne croient pas en l’existence de l’enfer, des kouffar.
Scolies bernoises commentant la Pharsale de Lucain.
Hermann Usener. Scholia in Lucani bellum civile/Commenta Bernensia. Liber I (1869).
451 « Les druides nient que les âmes puissent périr
[Driadae negant interire animas]
OU ALLER EN ENFER »
[aut contagione inferorum adfici] et
454 « Ils ne disent pas que les Mânes existent
[Manes esse, non dicunt].
[Manes esse, non dicunt.
Adnotationes ad versum I 454].
Le point N° 25 de la petite liste annexée au concile de Leptines en 743, sous le titre latin d’indiculus superstitionum et paganiarum (évidemment, il s’agit de condamner ou dénigrer tout cela) va d’ailleurs clairement en ce sens ; il évoque le fait d’imaginer que tout défunt est saint.
Et en 851, Jean Scot Érigène a aussi noté dans son « De la prédestination » : Dieu ne prévoit ni peines, ni péché, ce sont des fictions. Pour Érigène également, donc, l’enfer n’existe pas, ou alors il l’appelle le remords.
Selon le fondateur du spiritisme, le druide Allan Kardec, l’enfer n’est pas un lieu. L’enfer désigne l’état de souffrance dans lequel les âmes/esprits imparfaits se trouvent en raison des défauts personnels qu’ils n’ont pas encore corrigés. Cet état n’est pas éternel et dépend de la volonté de progrès des âmes/esprits en question. Les spirites utilisent plus volontiers le terme « bas astral » (plutôt qu’« enfer ») pour désigner cet état de souffrance par lequel passent les âmes/esprits peu évoluées.
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LES KOUFFAR DE TYPE MOUCHRIQOUN, OU TAOUAGHIT (NON-MUSULMANS NE FAISANT PAS PARTIE DES GENS DU LIVRE*).
C’est à dire qui ne sont ni juifs, ni chrétiens non trinitaristes, ni sabéens mandéens ni zoroastriens mazdéens (mages). Aujourd’hui par exemple les fidèles des religions non abrahamiques, tels que les hindous (sauf exception **) les bouddhistes, les animistes, les yézidis, etc. Les kouffar dits Oummiyoun sont une catégorie de sous-hommes pas toujours facile à distinguer des Gens du Livre ou ayant à tout le moins des Écritures saintes c’est-à-dire en gros les judéo-chrétiens et les mazdéens ou zoroastriens, car de nombreux versets du Coran les confondent dans une même réprobation ; surtout s’il s’agit des chrétiens croyant dans la Sainte Trinité (90 %), mais essayons encore !
En arabe chirk signifie « associer ». Associer à Dieu d’autres entités surhumaines. Donc le polythéisme.
NDLR. L’islam sunnite ou chiite n’est pas non plus exempt de tout reproche en ce domaine d’ailleurs puisqu’il associe à Dieu une entité surhumaine surnaturelle et supra cosmique dite « Coran incréé », d’où la réaction des Moutazilites qui refusèrent cette notion. Pour eux il n’y avait qu’un Coran humain, donc créé donc relatif et pouvant être dépassé ou corrigé. Mais après avoir eu son heure de gloire, le moutazilisme fut considéré non comme le véritable islam, mais comme une hérésie (zandaqa) et finit par disparaître.
Hormis ce cas il existe donc plusieurs types de chirk.
— S’attribuer à soi-même un pouvoir ou un droit qui n’appartient qu’à Dieu. Comme prétendre avoir le pouvoir de créer, de donner la vie et la mort, de prédire l’avenir, de légiférer, d’être invoqué, d’être adoré, de trancher des conflits, etc. Ceci est la pire catégorie, celui qui relève de ce genre de koufr est un Tâghoût (idolâtre ?).
— Attribuer à une créature un rôle qui ne revient qu’à Dieu seul comme le pouvoir de créer à partir du néant, de donner la vie et donner la mort, d’interdire et permettre, de faire des lois, de trancher des litiges, de connaître le futur et les secrets cachés dans les cœurs, d’exaucer les prières…, etc. (« Chirk Ar Rouboubiya ».)
— Attribuer à une créature un droit que Dieu seul mérite comme l’adoration, l’invocation, l’offrande…, etc. (« Chirk Al Ouloûhya ».)
Rouboubiya et Oulouhya signifient respectivement Seigneurie divine et divinité. Verset 48 du chapitre 4. « Dieu ne pardonne pas qu’on lui associe qui que ce soit, il pardonne à qui il veut des péchés moins graves que celui-ci. Celui qui associe qui que ce soit à Dieu commet un crime incommensurable ». On retrouve donc ici la dramatique notion biblique de « Dieu jaloux » qui est tout sauf zen.
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Rappel de la situation de départ : il y a à La Mecque du temps de Mahomet c’est-à-dire de la Djahiliya, outre des manichéens (zindiq) des judéo-chrétiens et des chrétiens, des mages ou zoroastriens, faisant donc partie des gens du Livre puisqu’ayant des Écritures sacrées…… des païens arabes tout simplement. Autrement dit des polythéistes ou païens dont le dieu principal est le dieu lunaire Houbal ou Hobal (ou Allah ?) et qui gèrent le temple de la Kaaba. Une structure cubique centre de divers pèlerinages durant certains mois de l’année (les mois sacrés). Mahomet va commencer par chercher une sorte de modus vivendi avec ses compatriotes. Le prouve la sourate 109 et l’affaire dite des versets sataniques.
Coran 53, 13-20.
« Par l’étoile quand elle disparaît ! Votre compatriote n’est pas égaré ! Il n’est pas dans l’erreur.
Il ne parle pas de son propre mouvement. C’est seulement une révélation qui lui a été transmise, le puissant, le fort, la lui a fait connaître ; celui qui possède la force s’est tenu majestueusement alors qu’il se trouvait à l’horizon supérieur, puis il s’approcha et demeura là comme suspendu dans les airs. Il était à une distance de deux portées d’arc ou moins, et il montra donc à son serviteur ce qu’il lui a révélé. Son cœur n’a rien inventé, il l’a vu ; allez-vous donc élever des doutes sur ce qu’il vu de ses propres yeux ?
Il avait déjà vu le même être près du jujubier qui borne le séjour des délices, auprès duquel se trouve le jardin de la demeure éternelle, au moment où le jujubier était enveloppé par ce qui le couvrait.
Sa vue a soutenu l’éclat de la magnificence divine.
Il a vu les plus grands signes de son Seigneur.
Avez-vous considéré al Lat et al-Ouzza, et l’autre, Manat, la troisième ? »
C’est alors que Mahomet aurait prononcé les fameux « versets sataniques » suivants :
20 bis : Ce sont des déesses sublimes.
20 ter : Leur intercession est à demander.
Tabari page 108 : « Quand le Messager de Dieu vit à quel point sa tribu lui tournait le dos il fut affligé de les voir ainsi se désintéresser du message qu’il leur avait apporté de la part de Dieu, il désira de toute son âme que quelque chose lui vienne de Dieu qui le réconcilierait avec sa tribu. Vu son amour pour sa tribu et son empressement à œuvrer pour leur bien, il aurait été ravi si certaines des difficultés qu’ils lui avaient causées avaient pu être aplanies, il en débattit en son for intérieur et désira vraiment avec ferveur un tel résultat. Alors Dieu lui révéla :
Par l’étoile quand elle disparaît ! Votre compatriote n’est pas égaré ! Il n’est pas dans l’erreur.
Il ne parle pas de son propre mouvement…
Et quand il en fut venu aux mots :
Avez-vous considéré al Lat et al-Ouzza, et l’autre, Manat, la troisième ?
Satan mit dans sa bouche, à cause de ses débats intérieurs et de ce qu’il souhaitait apporter à son peuple, les mots :
20 bis : Ce sont des déesses sublimes.
20 ter : Leur intercession est à demander.
Les polythéistes furent ravis de constater que Mahomet avait finalement accepté leurs dieux. Pour lui rendre la politesse, ils se sont prosternés en raison de cette allusion positive à leurs dieux qu’ils avaient entendue, de sorte qu’il n’y eut personne dans la mosquée, croyant ou incrédule, qui ne se soit pas prosterné (Tabari p. 109).
Note de Pierre de La Crau retrouvée par ses héritiers et insérée à cet endroit de son manuscrit.
Rappelons encore une fois que notre propos n’est pas ici de stigmatiser cette façon de voir les choses (hénothéisme) qui ne nous semble nullement inspirée par le Diable, mais par le simple réalisme (tabler sur le paganisme philosophique et réfléchi des plus mystiques de ses contribules. Notre propos ici est de faire remarquer que l’abandon de ce cette stratégie de la part de Mahomet a fini par rendre inconciliable les deux parties.
Car les choses vont rapidement changer, peut-être sous la pression de certains des premiers musulmans issus de la mouvance judéo-chrétienne (et notamment des esclaves chrétiens venus du Yémen ou d’Éthiopie). Dès lors Mahomet vouera une haine terrible à tous ces Taouaghits Oummiyoun. La virulence et la fréquence de ce flot ininterrompu de condamnations des païens et des polythéistes de La Mecque s’explique évidemment par le ressenti personnel de Mahomet. La haine inexpiable que le Coran voue aux païens de La Mecque doit être à la mesure du sentiment de rejet et d’humiliation qu’a dû éprouver le jeune Mahomet quand il a commencé à faire part autour de lui de ses visions (vers l’âge de 40 ans).
Nous n’étonnerons personne en rappelant que l’islam bien que contenant certains éléments païens pour ce qui est des rituels, au final n’est plus du tout une religion païenne polythéiste ou hénothéiste, et que, comme il est né dans un monde largement polythéiste et païen, il s’est essentiellement construit sur une virulente négation de l’existence des autres dieux qu’Allah, au-delà de tout
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hénothéisme justement. Parallèlement à une incorporation de plus en plus importante d’éléments judéo-chrétiens glanés ici ou là par Mahomet sur place ou à l’occasion de ses voyages chez les Arabes chrétiens de Jordanie et de Syrie voire d’Irak (ou du Yémen ?) ensuite à Yathrib/Médine avec les trois puissantes tribus juives de la ville (les Banou Nadir, Qaïnouqa, Quraïza).
Mais Allah n’était à l’origine qu’un des dieux du panthéon mecquois. Pour une raison ou pour une autre particulièrement adoré par Mahomet fils d’Amina. NDLR. Certains auteurs pensent que c’est Hobal/Hubal qui était le véritable dieu suprême du panthéon mecquois. Mais peu importe !
Le prouve à l’évidence l’insistance des premiers musulmans sur sa primauté d’abord. Sur son unicité ensuite. Proclamer urbi et orbi qu’Allah était le plus grand signifiait clairement à l’époque que ce dieu lune ou lunaire (d’où le célèbre croissant islamique) était le plus grand des dieux existant à La Mecque. L’affaire bien connue des versets satanistes laisse en effet à penser qu’à un moment donné au début Mahomet a cru bon s’en tenir à un compromis de type hénothéiste.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir, à maintes reprises vu leur importance, il existe dans le Coran et dans certaines traditions ultérieures, des versets ou des traces de versets impliquant que les célèbres déesses mecquoises Ouzza Allat et Manat, selon Mahomet à un moment donné donc, pouvaient être valablement priées d’intercéder auprès de Dieu et fléchir sa colère ou attirer ses bonnes grâces. Un peu comme les saints du Christianisme, la Sainte Vierge ou Jésus Christ d’ailleurs.
Tout ceci est corroboré par le célèbre verset si souvent repris par les modernes thuriféraires de l’islam, le verset 6 du chapitre 109 : « À vous votre religion, à moi ma religion ». Une sourate visiblement médinoise vu sa brièveté.
Mahomet à même alors admis explicitement la possibilité de conclure un pacte avec les païens mouchriqoun (9, 1-4). Mais cet accord sera vite dénoncé (9,5-et suivant) et les polythéistes mouchriqoun sommés, en vertu des versets du sabre (9, 5 et suivants) précités, soit de se convertir, soit de subir la guerre jusqu’à la mort.
Car prendre ensuite comme slogan ou cri de guerre « il n’y a de dieu qu’Allah » fut une deuxième étape qui alla plus loin. Il ne s’agissait plus d’une proclamation de foi hénothéiste cette fois-ci, mais carrément d’une négation de l’existence des autres divinités. Il n’y a de dieu qu’Allah signifie clairement : les autres dieux du panthéon mecquois ne sont pas de vrais dieux, ils n’existent pas.
Le verset 256 du chapitre 2 : « Nulle contrainte en religion ! » est souvent utilisé par les idiots utiles de l’islam ou les taqiyistes comme une preuve que l’islam serait respectueux des personnes appartenant à d’autres religions. Or, ce verset ne dit pas : « Nulle contrainte vis-à-vis des membres des autres religions », mais « dans la religion », au singulier, c’est-à-dire « en islam », car il n’y a point d’autre vraie religion que l’islam (3,85 ; 9,29 ; 24,2 ; 110, 2).
Pour en revenir au verset 256 du chapitre 2 du Corpus osmanien, les docteurs de la loi musulmans ont donc toujours compris qu’il signifie « le droit absolu des non-musulmans à embrasser l’islam sans qu’on les en empêche » parce que l’islam ouvre la voie à une vie où il n’y a « nulle contrainte » : « Dieu ne vous a imposé aucune gêne dans la religion » (22,78). Ce qui est bien commode, en effet, et explique pourquoi il faudrait préférer l’islam. Mais qu’une fois entré en islam, on y serait « sans contrainte », relève du conte de fées, la vie quotidienne en pays musulman témoigne du contraire, même pour les musulmans… De plus, que l’on vive « sans contrainte » parce que l’on est musulman ne signifie pas que l’on doive renoncer à exercer la contrainte à l’encontre des non-musulmans, ou de ceux qui ne le sont pas assez, ainsi que de nombreux versets, notamment dans la même sourate, en témoignent, appelant au meurtre des non-musulmans, parce que non-musulmans (2,190-193, 216)… La « tolérance » de ce célèbre verset n’a donc rien à voir avec celle que le recteur de la grande mosquée de Paris met en avant ou que les idiots utiles de l’islam imaginent ?
La courte sourate 109 fut sans doute « révélée » après que les Mecquois aient suggéré à Mahomet qu’eux et les musulmans adorent tous Allah et les trois gharaniq ou déesses de haut vol nommées Al Ouzza Al Allat et Al Manaf, par exemple Allah seul durant un an puis l’année suivante, les autres dieux des Mecquois, et ainsi de suite… Comme on le sait, Mahomet sous la pression de sa « base » (70 personnes ?) finit par refuser et c’est ce refus qu’expriment les versets en question, non une quelconque tolérance religieuse qui n’existe pas même entre musulmans (voir le cas des apostats et des chiites ou autres zindiq/hérétiques comme les soufis ou moutazilites). Lorsque, des années plus tard, Mahomet conquit la Mecque après profité de la trêve d’Houdaïbya pour amasser suffisamment de troupes (10 000 hommes), il détruisit les 360 statues religieuses qu’y avait à la Kaaba :
Sahih de Boukhari hadith 5583. Abdallah a dit. « Lorsque le Prophète est entré à La Mecque le jour de la Conquête, il y avait 360 idoles autour de la Ka'ba. Le Prophète a commencé à les frapper avec un bâton qu’il avait dans la main en disant : « La vérité est venue et le mensonge ne reprendra ni ne reparaîtra jamais ».
Sahih de Boukhari hadith 6244. Abdallah Ben Mess’aoud a dit : « L’Apôtre de Dieu entra dans la Mecque. Il y avait là trois cent soixante idoles, alignées tout autour de la Kaaba. Il commença de les
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frappa une à une à l’aide d’un bâton qu’il tenait à la main en disant : La vérité est venue, le mensonge s’est dissipé ».
Note de la rédaction. Ce que tenait Mahomet n’était pas une baguette magique, mais sans doute un bâton. Et derrière les statues, comme dans le cas des miracles de saint Martin de Tours, de solides gaillards achevant le travail ainsi commencé de la sorte en jetant à terre les statues désignées par le bâton de ce drôle de pèlerin.
Note de Pierre de La Crau.
Il importe par conséquent de distinguer les mouchrikoun oummiyoun ou taouaghits des kouffar appartenant à la catégorie islamique dite « les gens du Livre », car ils sont traités très différemment. Ils sont taghout et aucune place n’est prévue pour eux en terres d’islam (Dar al-Islam), même pas le statut de dhimmis, à quelques exceptions près **.
Là encore donc l’islam ne fera pas de détail et englobera dans la même réprobation les polythéistes païens ou idolâtres passés présents ou à venir, en tout temps et en tous lieux.
L’historien américain Will Durant estime « que la conquête musulmane en Inde fut probablement la plus sanglante que l’humanité ait jamais vue. C’est une histoire décourageante, car sa morale évidente c’est que la civilisation est une chose bien précieuse, dont l’ordre complexe et la liberté peuvent être à tout moment piétinés par des barbares qui envahissent du dehors et se multiplient au-dedans » (Notre héritage oriental. 1954, p.459).
En 1399, le célèbre Tamerlan tua 100.000 hindous en une seule journée. Ce que l’on peut en déduire, c’est qu’il y a en terre d’Islam (Dar al Islam) un véritable déni de son statut d’être humain à toute personne non musulmane ne faisant pas partie des Gens du Livre c’est-à-dire qui ne sont ni juifs, ni chrétiens non trinitaristes, ni sabéens mandéens, ni zoroastriens (mages).
Qui sont comme les yézidis par exemple, une minorité religieuse de 500 000 âmes vivant dans nord de l’Irak et plus précisément dans le Kurdistan irakien (ils parlent le courmandji). Les fidèles de cette religion croient en un dieu unique qui fut assisté par sept anges lorsqu’il créa le monde dont le plus important est Malek Taous, souvent représenté par un paon, symbole de diversité, de beauté et de pouvoir.
Il n’y a dans les textes fondateurs de l’islam (nous ne parlons pas des hadiths ou des commentaires postérieurs) aucun équivalent ontologiquement situé au même niveau que la parabole du bon Samaritain ou que les versets de saint Luc (6, 27) consacrés à l’amour des ennemis. Loin de là !
* Pour mémoire, les Fénianes irlandais n’étaient pas gens d’un seul livre, mais de douze.
** Les sultans et padishahs de Delhi reconnaissaient leurs sujets hindous comme dhimmis. Sans doute pour raison fiscale, mais c’était mieux que rien.
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L’OXYMORE CHRÉTIEN (An-Nasara ou Al-Messihiyoun ?).
Il n’existe aucun verset coranique appelant les chrétiens messihiyoun. Le terme généralement traduit par « chrétiens » est nasara, ce qui n’est pas tout à fait la même chose (nazaréen ?)
Toute prière musulmane doit commencer par la récitation de la première sourate, la fatiha (Sahih Boukhari livre 12, hadith 723), laquelle incite clairement dans sa partie finale à la haine des juifs et des chrétiens, car, comme dans le cas de la messe, qui ne peut pas croire ce qu’il répète à longueur de journée ?
Pour le théologien musulman du XIe siècle de l’ère commune, Abou Hâmid al-Ghazali (voir son célèbre traité intitulé Fayçal al tafriqa) les chrétiens se divisent en 3 catégories.
— Ceux qui n’ont jamais entendu parler de « Mahomet » comme c’est le cas de la plupart des chrétiens byzantins vivant loin des terres musulmanes.
— Ceux qui connaissent Mahomet et son personnage, mais rejettent par arrogance et/ou désintérêt son message.
— Ceux qui n’ont entendu que des mensonges à propos de Mahomet.
Seules les première et troisième catégories sont susceptibles de la clémence divine. Ceux du deuxième groupe (aïe !) sont coupables parce qu’ils ont été amenés à connaître du caractère, des miracles et du message de Mahomet, mais ont fermé leur esprit à ses exhortations. Ils refusent d’accepter la conversion en connaissance de cause, et sont donc considérés comme des « kouffar qui rejettent ».
Deux hadiths ou deux sourates du Coran des chrétiens maintenant pour se rafraîchir quelque peu les idées, mais qui ont l’inconvénient de tomber dans l’excès inverse (c’est le jour et la nuit).
NB. L’auteur de cette compilation, bien qu’ayant été baptisé et confirmé, voire premier au catéchisme, ne se considère plus comme chrétien. Il tient néanmoins à rappeler qu’une autre attitude que celle de l’islam est théoriquement envisageable envers ses ennemis même s’il pense que ce verset du Coran des chrétiens tombe dans un excès inverse (pour l’auteur de cette compilation en effet, neutralité ou respect suffisent).
Quoi qu’il en soit voici les passages en question.
Saint Luc 22, 47. Comme il parlait encore survient une bande. À sa tête marchait le nommé Judas, l’un des douze, qui s’approcha de Jésus pour lui donner un baiser. Jésus lui dit : « Judas, c’est par un baiser que tu livres le Fils de l’homme ! » Voyant ce qui allait arriver, les compagnons de Jésus lui demandèrent : « Seigneur, faut-il frapper du glaive ? » Et l’un d’eux frappa le serviteur du grand prêtre et lui trancha l’oreille droite. Mais Jésus prit la parole et dit « laissez ; cela suffit » et, lui touchant l’oreille, il le guérit.
Tafsir.
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1) L’évangile de Jean nous donne l’identité du compagnon de Jésus ayant tiré l’épée pour le défendre, il s’agissait de saint Pierre.
2) Le grand rabbi nazaréen Jésus a donc accepté l’usage de la violence en cas de légitime défense, mais à un niveau symbolique et comme dans certaines catégories de duel avec arrêt au premier sang (versé).
3) Quant à la fameuse phrase « Tous ceux qui prennent le glaive périront par le glaive » mentionnée par saint Matthieu ; ce n’est pas une malédiction ou une condamnation, mais un simple constat de bon sens. Du genre « qui roule trop vite et ivre mourra un jour dans un accident de voiture ».
Saint Luc, 6, 27 : « Mais, je vous le dis, à vous qui m’écoutez : aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous maltraitent. À qui te frappe sur une joue, présente encore l’autre ; à qui t’enlève ton manteau, ne refuse pas ta tunique. Donne à quiconque te demande, et à qui te prend ton bien, ne le réclame pas. Ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le semblablement pour eux. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quel gré vous en saura-t-on ? Car même les pécheurs en font autant. Et si vous prêtez à ceux dont vous espérez recevoir, quel gré vous en saura-t-on ? Même des pécheurs prêtent à des pécheurs pour en recevoir l’équivalent. Au contraire, aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien attendre en retour. Votre récompense alors sera grande et vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon, Lui, pour les ingrats et les méchants ».
Et pour faire bonne mesure une citation de la Bhagavad Gita. « Même ceux qui rendent un culte à d’autres dieux que moi, et qui leur sacrifient avec ferveur, me rendent aussi par là même hommage, ô fils de Kounti, bien que ce soit en dehors des règles. Car je suis le seul véritable bénéficiaire et seul seigneur de tout sacrifice même s’ils l’ignorent en vérité. Qui m’offre avec dévotion ne serait-ce qu’une feuille, une fleur, un fruit, de l’eau, cette offrande faite d’une âme pure eh bien je l’accepte. Car je suis le même pour tous et personne n’est spécialement haï ou élu par moi. Mais ceux qui m’aiment avec dévotion demeurent en moi et moi je suis en eux » (Bhagavad Gita, dialogue entre le dieu Krishna/Vishnou et le prince Arjouna).
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CI-DESSOUS AU CONTRAIRE QUELQUES-UNS DES VERSETS DE CETTE INTERMINABLE LITANIE INDIGNE D’UNE GRANDE RELIGION D’AMOUR.
Aussi étonnant que cela puisse paraître en effet la plus grande partie du Coran est consacrée aux non musulmans (500 à 600 versets), qui sont distingués de la façon la plus claire qui soit de vrais musulmans.
Les uns, les vrais musulmans, sont encensés et portés aux nues. Ils constituent la race spirituelle, sinon supérieure du moins préférée de Dieu, son véritable peuple élu. Les autres sont en bloc traités de tous les noms et voués aux gémonies, ce sont les pires des créatures.
Verset 65, chapitre 2. « Vous connaissez ceux des vôtres qui ont transgressé le Sabbat ? Nous leur avons dit : soyez des singes haïs et méprisés ! »
Verset 171, chapitre 2 : « Les incroyants sont semblables à un bétail contre lequel on vocifère et qui n’entend qu’un cri et un appel, sourds, muets, aveugles : ils ne comprennent rien ».
Verset 60, chapitre 5. « Dieu a transformé en singes et en porcs ceux qu’il a maudits, ceux qu’il a maudits, ceux contre lesquels il est courroucé et ceux qui ont adoré les idoles ».
Verset 176, chapitre 7. « Il a suivi ses passions, il était semblable au chien : il grogne quand tu l’attaques, il grogne quand tu le laisses tranquille, tel est le peuple qui traite nos signes de mensonges ».
Verset 166, chapitre7. « Nous leur avons dit, quand ils se rebellèrent contre nos interdictions, soyez d’ignoble et d’abjects singes ».
Verset 179, chapitre 7. « Voilà ceux qui sont semblables aux bestiaux ou plus égarés encore, voilà ceux qui sont insouciants ».
Verset 55, chapitre 8. « Les pires des êtres devant Dieu sont vraiment ceux qui sont incroyants, ceux qui ne croient pas ».
Verset 98, chapitre 2. « Dieu est l’ennemi des incroyants ».
Verset 38, chapitre 22. « Dieu n’aime pas le traître ingrat (kafir) ».
Verset 45, chapitre 30. « Dieu n’aime pas les incroyants ».
Verset 27, chapitre 16. « Le jour de la résurrection, Dieu les couvrira d’opprobre et leur dira : où sont mes associés au sujet desquels vous vous disputiez ? »
Verset 6, chapitre 98. « Les incroyants parmi les gens du livre et les polythéistes seront dans le feu de la géhenne. Ils y demeureront éternellement : ce sont les pires des créatures ».
Verset 85 du chapitre 3. « Le culte de celui qui a recherché une religion en dehors de la soumission (à Dieu) ne sera pas reconnu. Cet homme fera partie, dans la vie future, de ceux qui ont tout perdu ».
Verset 18, chapitre 14. « Les bonnes actions de ceux qui ne croient pas en leur Seigneur sont semblables à de la cendre sur laquelle le vent s’acharne un jour de tempête. Ils ne peuvent donc attendre aucune rétribution pour les œuvres qu’ils ont accomplies : c’est là une erreur totale ».
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Versets 103 à 106 du chapitre 18. « Vous ferai-je connaître ceux dont les actes sont les plus inutiles et ceux dont l’effort se perd dans la vie de ce monde alors qu’ils pensent avoir bien agi ? Tels sont ceux qui ne croient pas aux signes de leur Seigneur et à sa rencontre. Leurs bonnes actions sont vaines et nous n’attribuerons aucun poids à celles-ci le jour de la Résurrection. Leur rétribution sera la Géhenne parce qu’ils n’ont pas cru ».
Verset 34, chapitre 83. « Ce jour-là les croyants se moqueront des impies. Couchés sur des lits d’apparat, ils regarderont si les incroyants sont rétribués pour ce qu’ils ont fait ».
Verset 161, chapitre 2. « Quant aux incroyants qui meurent incroyants, voilà ceux sur lesquels tombe la malédiction de Dieu, des anges et de tous les hommes ».
Verset 20, chapitre 58. « Ceux qui s’opposent à Dieu et à son prophète, voilà ceux qui seront abaissés plus bas que terre ».
Verset 4, chapitre 60. « Abraham… que l’inimitié et la haine paraissent constamment entre nous et vous, jusqu’à ce que vous croyiez en Dieu, l’Unique ».
Verset 55, chapitre 25. « L’incroyant est l’auxiliaire des ennemis de son Seigneur ».
Verset 101, chapitre 4. « Les incrédules sont vos ennemis déclarés ».
Verset 29, chapitre 48. « Mahomet est le prophète de Dieu. Ses compagnons sont violents envers les impies et compatissants entre eux ».
Verset 72, chapitre 3. « Une partie des gens du Livre dit, au début du jour : croyez à ce qui a été révélé aux croyants, à son déclin : soyez incrédules… Ne croyez qu’à ceux qui suivent votre religion ».
Verset 118, chapitre 3. « Ô vous qui croyez, n’établissez des liens d’amitié qu’entre vous ».
Verset 51, chapitre 5. « O vous qui croyez, ne prenez pas pour amis les Juifs et les chrétiens (Nasara), ils sont amis les uns des autres. Celui qui parmi vous, les prend pour amis est des leurs. Dieu ne dirige pas le peuple injuste ».
Verset 89, chapitre 4. « Ils aimeraient vous voir incroyants comme ils le sont eux-mêmes et que vous soyez ainsi semblables à eux. Ne prenez donc aucun protecteur parmi eux jusqu’à ce qu’ils émigrent dans le chemin de Dieu ».
Verset 144, chapitre 4. « Vous qui croyez, ne prenez pas les incroyants pour amis, de préférence aux croyants. Voudriez-vous donner à Dieu une raison certaine de vous condamner ? ».
NDLR. L’islam prône donc bien l’amitié, mais entre musulmans d’abord et seulement ensuite et dans un deuxième temps envers les gens du livre.
Verset 22, chapitre 58. « Tu ne trouveras pas de gens croyant en Dieu et au jour dernier, et témoignant de l’affection à ceux qui s’opposent à Dieu et à son prophète ; seraient-ils leurs pères, leurs fils, leurs frères ».
Verset 56, chapitre 3. « Quant à ceux qui ne croient pas, je les châtierai d’un terrible châtiment en ce monde et dans la vie future ».
Etc., etc.
Pour être honnête, reconnaissons qu’il y a aussi quelques versets disant autre chose ou le contraire, mais ce sont des versets qui ont été pour la plupart abrogés par des versets médinois ultérieurs comme les célèbres versets de l’épée du combat ou du petit djihad.
Bilan.
1100 versets du Corpus osmanien sont de violentes diatribes assorties d’injures, de souhaits de malheurs, de haine et de malédictions contre la catégorie indéfinie et innombrable des mécréants (kouffar), autrement dit contre tous ceux qui refusent de se soumettre à Dieu et à son prophète.
1500 versets visent nommément avec une singulière violence les païens et autres idolâtres (les Bédouins y étant particulièrement malmenés et insultés, cf. Coran 9,97), traités de sourds, d’aveugles, ignares, stupides et comparés à des bestiaux ou à de méprisables singes…
Au total ce sont quelques 3150 versets, soit une bonne moitié du Coran, ressassant la haine de Dieu envers les non-musulmans et les tourments qu’il a préparés pour eux dans l’autre monde, vouant à l’exécration tous ceux qui sont autres que musulmans. Tous ces versets expriment la funeste intention de les anéantir ou de les soumettre.
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CONCLUSION.
Le koufr est plus général que le chirk ou polythéisme qui suit, car le kafir peut être quelqu’un qui nie l’existence de Dieu, ou qui nie ses attributs, ou qui ne croit qu’en la matière (matérialisme athée, ceux qui, comme Lavoisier, pensent que le monde ne fait que de se transformer qu’il n’y a pas eu de création ex nihilo, et qu’il n’y aura pas de fin des temps, etc.).
Le chirk est en l’occurrence le fait d’associer à Dieu d’autres entités surhumaines, qu’elles soient ses égales ou qu’elles lui soient subordonnées. Chirk est donc souvent traduit par « associationnisme » et mouchrikoun par « associateurs ».
Le cas de figure le plus simple étant de lui associer des divinités subordonnées comme les trois anges de sexe féminin Ouzza Allat et Manat dites « les filles de Dieu ». Ce que la théologie musulmane réprouve formellement bien entendu (voir le scandale des versets sataniques).
Mais il y a aussi le cas des chrétiens qui croient en la Sainte Trinité et qui aux yeux des théologiens musulmans purs et durs ont le tort d’associer à Dieu le Père (Dieu) Dieu le fils (Jésus Christ) et Dieu le Saint-Esprit.
Avant d’en venir à la quintuple hiérarchisation des êtres humains qui caractérise l’islam ; disons deux mots également sur la façon dont il divise géographiquement le monde, car ce ne sera pas sans conséquence sur le sujet qui nous préoccupe.
Du fait que Mahomet est très rapidement devenu chef d’État (à Yathrib/Médine) et donc que l’islam est très vite parvenu au pouvoir dans certaines régions du monde, la théologie musulmane a réparti la Terre en trois zones géographiques distinctes.
— Les terres d’Islam ou Dar al Islam. Ce sont les pays où est appliquée la Charia ou loi musulmane.
— Le Dar al Harb. Les pays où la loi islamique n’est pas appliquée. Donc qui restent à soumettre ou convertir en vertu des célèbres versets abrogeant (nasikh) dits de l’épée du combat ou du petit djihad. À savoir donc les versets 5 du chapitre 9, 29 du chapitre 9, 4 du chapitre 47. NDLR. Les musulmans qui se fondent sur l’exemple de la trêve conclue par Mahomet avec les habitants de sa ville natale (La Mecque) considèrent qu’aucune trêve ou paix ne saurait durer plus de dix ans.
— Soyons honnêtes et reconnaissons qu’il existe aux yeux des théologiens musulmans d’aujourd’hui un troisième type de territoire, les pays avec lesquels un traité de paix a été signé (Dar al Ahd) ou Terres de trêve : Dar al Soulh *. Le problème est qu’il n’existe pas de définition très précise de ces notions ni d’autorité centrale pour les faire respecter puisque la Oumma ou communauté des croyants ignore ce genre d’institutions, et le califat ayant été aboli en 1924.
Sont généralement considérés comme Terres de paix ou de trêve * (Dar al-Ahd ou Dar al Soulh) les pays qui accordent aux musulmans les droits qui sont refusés aux non-musulmans en terre d’Islam (Dar al Islam). C’est-à-dire le droit de pratiquer librement leur religion et de faire du prosélytisme. Par pratique libre de la religion, il faut entendre évidemment l’application au sein de la communauté musulmane de la charia et des tribunaux islamiques pour ce faire.
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* Les docteurs de l’Islam considèrent qu’il s’agit là de phases transitoires avant conversion complète de la population non musulmane du pays concerné.
CE QUE LE CORAN OU LES HADITHS
DISENT DES JUIFS ET DES CHRÉTIENS.
Pour ce qui est du Coran de nombreux versets confondent néanmoins judéo-chrétiens et païens dans une même réprobation et ces deux catégories de kouffar ne sont donc pas toujours faciles à distinguer. Les hadiths sont plus clairs.
Verset 75, chapitre 2. « Certains d’entre eux ont altéré sciemment la parole de Dieu après l’avoir entendue ».
Verset 82, chapitre 5. « Les hommes les plus hostiles aux croyants sont les juifs et les polythéistes (acharaqou)… les plus amis des croyants sont ceux qui disent : nous sommes chrétiens (nasara) ».
Verset 68, chapitre 29. « Y a-t-il plus grand mal que forger des mensonges contre Dieu, ou que traiter de mensonge la vérité lorsqu’elle vous parvient ? »
Versets 69-70, chapitre 10. « Quant à ceux qui forgent des mensonges contre Dieu cela ne leur réussira pas… nous leur ferons alors goûter un dur châtiment pour prix de leur incrédulité ».
Verset 42, chapitre 5. « Quant à ceux qui écoutent habituellement le mensonge et ceux qui dévorent des gains illicites… Ils ont la Tora où se trouve le jugement de Dieu à leur sujet. Ils se sont ensuite détournés, voilà ceux qui n’ont rien de commun avec les croyants ».
Versets 160-161, chapitre 4. « Nous avons interdit aux juifs d’excellentes nourritures… parce qu’ils ont pratiqué l’usure… parce qu’ils ont mangé injustement les biens des gens. Nous avons préparé un châtiment douloureux pour ceux d’entre eux qui sont incrédules » [qui restent juifs et ne sont pas convaincus par l’islam, bref qui ne se convertissent pas].
Versets 68-69, chapitre 10. « Ils ont dit : Dieu s’est donné un fils, mais… ceux qui forgent un mensonge contre Dieu n’auront pas l’occasion de s’en réjouir ».
Verset 37, chapitre 7. « Qui donc est plus injuste que celui qui forge un mensonge contre Dieu… Ils témoigneront alors contre eux-mêmes qu’ils étaient incroyants (kafiroun) ».
Verset 30, chapitre 9. Les juifs ont dit : Ozaïr (Esdras ???) est fils de Dieu. Les chrétiens ont dit : Le Messie est le fils de Dieu. Voilà ce qu’ils disent. Que Dieu les anéantisse ! Ils sont tellement dégénérés !
NDLR. Le cas des chrétiens est très clair, il s’agit du grand rabbi nazaréen Jésus. Pour ce qui est des juifs on se perd en conjecture sur l’identité de cet Ozair. Esdras ? On peut vraiment se demander d’où vient cette idée ridicule ! Sans doute de juifs médinois ayant tenu à propos d’Esdras des propos critiques du genre : « Esdras n’est quand même pas Dieu ! Esdras se prend pour le fils de Dieu ou quoi ? ». Propos devenus dans la bouche de Mahomet : les juifs disent qu’Ozaïr est fils de Dieu.
Verset 13, chapitre 5. « Ils ont rompu leur alliance, nous les avons maudits… tu ne cesseras de découvrir leur trahison…[suit une phrase incompréhensible ou contradictoire]. Parmi ceux qui disent : ‘nous sommes chrétiens, nous avons accepté l’alliance, certains ont oublié une partie de ce qui leur a
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été rappelé, nous avons suscité entre eux l’hostilité et la haine… [contradiction d’ailleurs avec le verset 51 du chapitre 5 : ils sont amis les uns des autres]. Dieu leur montrera ce qu’ils ont fait ».
Verset 17, chapitre 5. Ceux qui disent « Dieu est, en vérité, le Messie, fils de Marie » sont impies.
NDLR. Ces versets visent les chrétiens trinitaristes ou du moins croyant en Dieu le fils (c’est-à-dire les chrétiens chrétiens, les chrétiens ne croyant pas en la divinité de Jésus sont plus exactement désignés aujourd’hui sous l’appellation de judéo-chrétiens, et ils ont d’ailleurs fini soit par retourner à la synagogue soit par disparaître dans les méandres de l’histoire, en étant parmi les premiers à se convertir à l’islam par exemple). Pour l’islam les chrétiens doivent cesser d’être chrétiens et rejeter la trop païenne notion de Trinité pour ne pas aller brûler en effet pour l’éternité.
Verset 73, chapitre 5. « Il n’y a de Dieu qu’un Dieu unique. S’ils ne renoncent pas à ce qu’ils disent, un terrible châtiment atteindra ceux qu’entre eux qui sont incrédules (kafarou) ».
Verset 29, chapitre 48. « Mahomet * est le prophète de Dieu. Ses compagnons sont violents envers les impies (kouffar) et compatissants entre eux ».
Le verset 29 du chapitre 9 est appelé verset du combat. Or que dit ce verset 29 de la sourate 9 ?
« Combattez ceux qui ne croient ni en Dieu ni au Jour dernier, qui n’interdisent pas ce que Dieu et son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre,
jusqu’à ce qu’ils versent la capitation par leurs propres mains, après s’être personnellement humiliés (an yadin saghirouna) ».
NDLR. Ce verset abroge donc toutes les dispositions antérieures autorisant une attitude plus douce envers les polythéistes, les juifs, les chrétiens, les sabéens mandéens et les zoroastriens (mages). Ce verset n’établit plus de différence entre les idolâtres et les monothéistes.
*C’est une des rares fois où le nom de Mahomet apparaît dans le Coran. Il figure également dans 47,2 ; 33,40 ; 3,144.
STATUT LÉGAL DES MOUCHRIQOUN OUMMIYOUN OU TAOUAGHIT
C’EST À DIRE DES PAÏENS POLYTHÉISTES NE FAISANT PAS PARTIE
DES AL-OUL-KITAB OU GENS DU LIVRE EN TERRES D’ISLAM (DAR AL ISLAM).
… En attente de documentation…
COURRIER DES LECTEURS.
« Contrairement à ce que vous insinuez dans vos torchons islamophobes, des polythéistes peuvent très bien vivre dans la MAISON DE L’ISLAM tout bénéficiant d’un statut légal protecteur.
En 717 le calife Omar II fit par exemple transférer à Harran l’école de médecine d’Alexandrie.
Or à Harran il y avait des gens qui n’étaient ni juifs ni chrétiens ainsi que l’a signalé au 10e siècle, Al Massoudi dans son encyclopédie intitulée les Prairies d’or (en arabe Mouroudj adh-dhahab oua-ma'adin al-jaouar).
DES ÉDIFICES CONSACRÉS ET DES MONUMENTS RELIGIEUX CHEZ LES SABÉENS ET D’AUTRES SECTES.
« Il y avait, chez les Sabéens de Harran, des temples consacrés aux substances intellectuelles et aux astres, entre autres, le temple de la Cause première et le temple de la Raison. J’ignore s’ils désignaient ainsi l’intelligence première ou l’intelligence seconde. Aristote, dans le troisième discours de son Traité de l’âme, distingue l’intelligence première et agissante de l’intelligence seconde. Thémistius en a parlé aussi dans son commentaire sur le Traité de l’âme par Aristote. Enfin l’analyse de l’intelligence première et de l’intelligence seconde fait l’objet d’un traité spécial, composé par Alexandre Aphrodisius, et traduit par Ishak, fils de Honaïn.
Il y avait aussi chez les Sabéens le temple de la Chaîne, celui de la Matière, celui de l’Âme ; ces trois édifices étaient de forme circulaire. Le temple de Saturne décrivait un hexagone ; le temple de Jupiter, un triangle ; le temple de Mars, un carré long ; celui du Soleil, un carré ; celui de Mercure, un triangle ; celui de Vénus, un triangle inscrit dans un carré long ; le temple de la Lune était octogone. Ces formes diverses se rattachaient à des allégories et à des mystères que les Sabéens ne divulguaient jamais.
Un chrétien melkite de Harran, nommé el-Harit, fils de Sonbat, a donné des renseignements sur les Sabéens de Harran, sur les victimes qu’ils offraient en sacrifice, l’encens qu’ils brûlaient en l’honneur des astres, et d’autres détails que nous passerons sous silence pour éviter les longueurs.
De tous les édifices religieux élevés par eux, il ne reste aujourd’hui, en 332 de l’hégire, que le temple nommé Maglitya. Il est situé dans la ville de Harran, près de la porte de Rikkah ; les gens de cette secte le nomment temple d’Azer, père d’Abraham l’ami de Dieu, et ils rapportent sur Azer et Abraham, son fils, de longues légendes qui seraient déplacées ici. Le qadi Ibn Aïchoun de Harran, homme intelligent et instruit, qui mourut postérieurement à l’an 300, a composé une longue kacydeh (qasida = ode) sur les croyances des Harraniens dits sabéens. Ce poète, en parlant de ce temple et de ses quatre souterrains, où s’élevaient des idoles faites à l’image des corps célestes et des divinités supérieures, nous divulgue les mystères de ces idoles. Il raconte que les sabéens introduisaient leurs
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jeunes enfants dans ces souterrains et les conduisaient en face des idoles. Une pâleur subite, suivie de rougeur, se répandait sur les traits de ces enfants, lorsqu’ils entendaient les sons étranges et les paroles inconnues qui semblaient sortir de ces idoles, grâce aux mécanismes et conduits secrets pratiqués à cet effet. Des prêtres, cachés derrière le mur prononçaient différentes paroles ; le son de leur voix, transmis par des tubes et un appareil d’anches et de tuyaux aboutissant à l’intérieur de ces statues creuses et construites sur une forme humaine, semblait sortir des idoles mêmes. Par ce stratagème emprunté à l’antiquité, ils captaient la raison, s’assuraient l’obéissance des fidèles et dominaient à la fois le roi et le peuple. La secte dite des harraniens et sabéens compte des philosophes, mais ce sont des éclectiques, dont le plus grand nombre est fort éloigné de la doctrine des sages. En les appelant philosophes, nous avons égard non à la doctrine dont la Grèce fut le berceau, mais à la communauté d’origine ; car tous les Grecs ne sont pas philosophes, et ce nom ne convient réellement qu’à leurs sages.
J’ai vu à Harran, sur le chambranle de la porte du temple appartenant aux sabéens, une inscription en caractères syriaques : elle est tirée de Platon, et m’a été expliquée par Malik, fils d’Okboun, et d’autres personnes de la même secte. Elle portait : « Celui qui connaît Dieu, le redoute ». C’est Platon qui disait aussi : « L’homme est une plante céleste. En effet, l’homme ressemble à un arbre renversé, dont la racine est tournée vers le ciel, et dont les branches plongent dans le sol. »
La nature de l’âme raisonnable, la question de savoir si elle est renfermée dans le corps, ou si, au contraire, le corps est contenu dans l’âme, comme la lumière dans la maison, ou la maison dans la lumière, voilà ce que Platon et son École ont traité d’une manière approfondie. Ce sujet nous amène à parler d’un autre problème, celui……
Mais revenons au culte des sabéens de Harran et aux auteurs qui ont exposé leurs croyances et scruté leurs mystères. J’ai vu, parmi les ouvrages de ce genre, un livre d’Abou Bekr Mohammed, fils de Zakaria er-Razi, le philosophe, auteur du Kitab el-Mansouri sur la médecine et d’autres écrits. Dans le livre en question, Razi s’occupe des sabéens de Harran exclusivement, et ne dit rien des sectes dissidentes, comme celle des kimariens. Les détails dans lesquels il est entré nous mèneraient trop loin et choqueraient un grand nombre de lecteurs. En outre, en faire mention ce serait nous écarter du sujet principal de ce livre, pour nous livrer à l’étude des croyances et des religions. J’ai consulté Malik, fils d’Okboun, et plusieurs de ses coreligionnaires, sur les choses qui ont été mentionnées ici, ou dont il a été parlé ailleurs. Plusieurs d’entre eux ont admis certains détails sur les sacrifices, mais ont rejeté le reste, comme la cérémonie du taureau noir que l’on aspergeait de sel, après lui avoir bandé les yeux, et qu’on égorgeait, pour examiner ses membres et rechercher, dans leurs contractions et leurs frémissements, les événements futurs de l’année. Ils rejettent cette pratique et d’autres cérémonies mystérieuses relatives aux sacrifices ».
Omar II aurait-il procédé à un tel transfert s’il n’avait pas approuvé la survivance dans ses états d’une telle communauté ?
Nous sommes là en réalité aux yeux des vrais spécialistes de l’Islam tout à fait dans le même cas que celui des chrétiens : les chrétiens ne croyant pas en la Trinité sont considérés comme faisant partie des gens du Livre, mais les chrétiens trinitaristes sont considérés comme polythéistes.
Or il ressort bien du témoignage d’Al Massoudi qu’il y avait bien parmi les habitants de Harran du 8e au 11e siècle une élite intellectuelle, comme le Malik dont parle Massoudi et Thabit ibn Qurra, considérée comme faisant partie des gens du Livre donc bénéficiant de la protection de la dhimmah. Mais peut-être ne comprenez-vous pas le français de Barbier de Meynard ?
Il est vrai par contre je vous l’accorde que les habitants de la région de l’Indus et au-delà n’ont été assujettis au paiement de la djizya que pour des raisons bassement fiscales.
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LES GENS DU LIVRE * OU LES DHIMMIS ET LA DHIMMITUDE **.
Les Ahl-oul-Kitab ou les dhimmiyoun et l’al-dhimma.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir, il existe une hiérarchie au sein des non-musulmans (Kouffar), et c’est elle qui fixe leur statut.
— Les païens polythéistes (mouchriqoun) ont le choix entre la mort ou la conversion (d’où le caractère assez sanglant de la conquête musulmane de l’Inde).
— Les Juifs et les chrétiens, adeptes de la révélation biblique dont l’Islam reconnaît (globalement) l’authenticité, ont une troisième possibilité : la soumission*.
« Combattez ceux qui ne croient ni en Dieu ni au Jour dernier, qui n’interdisent pas ce que Dieu et son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre,
jusqu’à ce qu’ils versent la capitation par leurs propres mains, après s’être personnellement humiliés (an yadin saghirouna) ».
Cette soumission est réglementée par une sorte de convention en vertu de laquelle ces « peuples du Livre » obtiennent des chefs d’État musulmans la garantie de leurs droits publics et privés. Ils reçoivent ainsi la dhimma de Dieu et de son envoyé Mahomet. Ce mot signifie à la fois garantie, foi, protection, contrat ou pacte. Les bénéficiaires portent le nom de dhimmi.
Ce type de modus vivendi semble d’ailleurs avoir été directement repris de la Bible si l’on en croit le Cordouan (encore !) Maïmonide (Michné Torah : Hilkhot Melakhim. Lois des Rois et de leurs guerres. Chapitre VI).
« On ne fait pas la guerre à quiconque avant de lui avoir fait des propositions de paix, aussi bien pour une guerre facultative que pour une guerre sainte (de Mitsvah), ainsi qu’il est dit dans le Deutéronome (20,10) : « Lorsque tu t’avanceras vers une ville pour la combattre, tu feras une proposition de paix ».
S’ils ont accepté et ont adopté les sept lois ordonnées aux fils de Noé 1), on ne peut tuer aucun d’entre eux et ils sont soumis au tribut, comme il est dit également ibid. 11 : « Ils te seront redevables et te serviront ».
S’ils ont accepté de payer le tribut, mais pas l’assujettissement, ou qu’ils se sont soumis, mais refusent de payer le tribut, on ne pactise en aucune façon avec eux jusqu’à ce qu’ils acceptent ces deux choses-là.
La soumission qu’ils doivent accepter, c’est d’être au plus bas niveau, de ne pas s’élever au-dessus d’Israël, et de leur être dépendants. Ils ne pourront jamais être nommés à une fonction sur Israël.
Le tribut auquel ils se plient, c’est d’être à la disposition des travaux royaux, tant par leur personne que par leurs biens, comme la construction des murailles et la fortification des citadelles, la construction du palais du roi et les travaux semblables, ainsi qu’il est dit dans 1 Rois 9,15-22 : « Voici le compte-rendu de l’impôt levé par le roi Salomon pour construire la maison de Dieu, son palais, le quartier du Milo et la muraille de Jérusalem… et toutes les villes d’approvisionnement de Salomon… tout le peuple qui survivait d’entre les Amoréens… Salomon les avait asservis au tribut jusqu’à ce jour
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et d’entre les enfants d’Israël, aucun n’était asservi, car ils étaient les soldats, ses serviteurs, ses princes, et ses capitaines et les commandants de ses chars et de sa cavalerie ».
Le roi leur pose comme condition de confisquer la moitié de leurs biens : soit leurs terres et il leur laisse les biens mobiliers, soit leurs biens mobiliers et il leur laisse leurs terres selon les conditions qu’il dicte.
Il est interdit de manquer à ce pacte après qu’ils ont fait la paix puis accepté les sept mitsvot (lois)…
S’ils ont refusé ce pacte, ou qu’ils ont l’accepté sans prendre l’engagement de respecter les sept lois, on leur livre combat et on tue les hommes adultes, on capture leurs biens leurs femmes et leurs enfants…
Dans quelles circonstances agit-on ainsi ? Lors d’une guerre optionnelle de conquête au détriment des autres peuples. Des sept peuples ou Amalek qui refuseraient ces conditions de paix, on n’en laisse pas un seul ainsi qu’il est dit ibid. 20, 15-16…
D’où savons-nous que ces deux textes ne concernent que ceux qui auraient refusé d’accepter ces conditions ? Parce qu’il est écrit dans le livre de Josué 11,19-20 : « Et il n’y eut pas une ville pour faire la paix avec les enfants d’Israël à l’exception des Hivvites de Gabaon ; tout fut conquis par les armes. C’est de Dieu que leur provenait ce courage d’affronter les enfants d’Israël, afin qu’ils y soient exterminés ». Ce texte montre donc qu’on leur avait proposé une paix qu’ils avaient refusée.
……………
Lorsqu’on fait le siège d’une ville pour la prendre, on ne l’entoure pas des quatre côtés, mais de trois côtés, on laisse une sortie pour les fuyards et tous ceux qui veulent sauver leur vie, ainsi qu’il est écrit dans Nombres 31,17 : « Car ils menèrent le combat contre les Madianites selon les prescriptions données par Dieu à Moïse ».
Le texte même nous enseigne que Dieu avait édicté des règles à ce propos.
On ne coupe pas les arbres fruitiers autour de la ville, et on n’en détourne pas l’irrigation pour les assécher, ainsi qu’il est dit dans Deutéronome 20,19 : « Tu n’en détruiras pas les arbres », et celui qui les coupe subit la flagellation.
Ce n’est pas seulement lors d’un siège, mais en toutes circonstances, celui qui coupe un arbre fruitier dans un but destructeur, est flagellé.
Mais on peut le couper si cet arbre nuit à d’autres arbres, ou qu’il nuit au champ du voisin, ou si c’est un bois de valeur. La loi n’interdit que l’abattage qui serait un acte destructif…
…………………
Il est interdit de faire ses besoins naturels à l’intérieur du camp ou dans un endroit quelconque en plein champ et il est impératif de préparer un chemin réservé pour s’y libérer, ainsi qu’il est dit dans Deutéronome 23,13 : « Tu aménageras donc à l’extérieur du camp un lieu pour cela ».
De même, il est aussi prescrit que chacun ait une bêche parmi ses instruments de guerre et il ira donc avec vers ce lieu où il creusera un trou pour faire ses besoins, puis le recouvrira, ainsi qu’il est dit ibidem 14 : « Tu auras une bêche parmi tes armes ».
Notre commentaire. Tant d’intelligence pour justifier une telle aberration ! C’est désespérant.
Il est vrai que la question de la conversion forcée à l’islam de Maïmonide est un fait discuté par ses biographes : impensable selon les uns, « hautement probable » selon les autres. La controverse symbolise la situation de nombreuses communautés juives à cette période de l’Histoire. La réponse du philosophe emprunte deux voies différentes. Le théologien insiste sur le monothéisme de la religion musulmane, semblable à l’essence du judaïsme (il serait resté musulman jusqu’à l’âge de 29 ans), le sage préconise, afin de préserver sa vie, la fuite vers des régions plus tolérantes.
En tout cas c’est sans doute ce qui se produisit à plusieurs reprises avec les communautés juives d’Arabie et notamment lors de l’attaque pour des raisons ignorées (afin de donner du grain à moudre à ses troupes ?) en 628, des habitants de Khaïbar, agglomération située à 150 kilomètres au nord de Yathrib/Médine où s’étaient réfugiés les Juifs expulsés de cette ville précédemment, les Banou Nadir.
Mahomet rencontra Ibn Abi Al-Houqaïq, al-Katibah et al-Ouatih pour discuter les termes de la reddition générale. Selon les termes de l’accord, les juifs de Khaïbar devaient évacuer la région et abandonner leur richesse. Les musulmans cesseraient la guerre et ne feraient de mal à aucun juif. Après l’accord, quelques juifs négocièrent la possibilité de rester dans l’oasis et de continuer à cultiver leurs terres contre le versement de la moitié de leur récolte. Mahomet accepta cette proposition. Il ordonna aussi la restitution aux juifs de leurs livres saints.
Selon la version d’Ibn Hicham, le pacte avec les habitants de Khaïbar avait été conclu sous la condition que les musulmans pourraient les expulser quand ils le voudraient. Norman Stillman pense que ce n’est probablement qu’une interpolation ultérieure dans le but de justifier l’expulsion des juifs par Omar en 642. L’accord avec les juifs de Khaïbar servit de précédent. Contrairement aux pogroms précédents, la population juive peut cette fois-ci continuer à rester sur place et pratiquer sa religion, en payant toutefois un impôt assez lourd. Et cette pratique nouvelle va être institutionnalisée.
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Après en avoir pris connaissance le peuple de Fadak, une oasis voisine alliée des juifs de Khaïbar envoya en effet un certain Mouhaïsa b. Massoud rencontrer Mahomet afin que les habitants de Fadak soient traités avec indulgence en échange de leur reddition. Un accord similaire à celui de Khaïbar fut donc conclu avec Fadak.
Quelques années plus tard, après la mise hors la loi des mouchrikoun polythéistes et païens, en 631, Mahomet conclura un autre accord, cette fois-ci avec les chrétiens (monophysites ?) de Nadjran, ville du Sud de l’Arabie, à la frontière du Yémen.
Leur délégation arrivera à Médine au mois de mars de l’an 631. Son arrivée fit d’ailleurs sensation. Elle était composée de 70 cavaliers, à la tête desquels se trouvait le triumvirat formé du syndic des artisans (âqib), du chef des caravanes, et de l’évêque du lieu. Ils frayent avec les Médinois et échangent avec eux des propos amicaux. Mahomet les autorise même à célébrer une messe à l’intérieur de la mosquée, tournés vers Jérusalem.
À l’audience qu’il leur accorde le lendemain, la discussion s’élève au plan théologique. Mahomet reproche aux chrétiens de croire en la divinité du Christ. Les Nadjranites défendent leur croyance avec énergie. Pour mettre fin à la controverse, Mahomet propose une sorte d’ordalie appelée moubâhala, afin de savoir de quel côté se trouvait Dieu.
Le Coran fait d’ailleurs allusion à cette proposition d’ordalie en 3,61. Chaque partie devait se présenter le lendemain au moment et au lieu convenus, accompagné des êtres qui lui étaient particulièrement chers et invoquer la divinité comme arbitre, afin qu’elle frappe de sa foudre le menteur, dans sa personne et dans ses proches présents à cette cérémonie organisée publiquement.
Après moult réflexions, sur lesquelles il ne sert à rien de spéculer (ces chrétiens ont peut-être estimé que cela ne servirait à rien) la délégation préféra en venir directement à la négociation du traité d’alliance (alliance, mais inégalitaire). Celui-ci servira aussi de prototype aux pactes octroyés ultérieurement aux « peuples du Livre » s’ils se soumettent avant le combat. Il stipule que les chrétiens signataires ne seront pas humiliés, mais ce dernier point disparaîtra des pactes qui suivront (voir le document appelé Pacte d’Omar qui est très révélateur à cet égard).
En vertu de cet accord, les chrétiens de Nadjran s’engagent à livrer, tous les six mois, à l’État médinois, mille vêtements valant une once d’argent. En cas de guerre impliquant les musulmans, ils s’engageaient aussi à leur fournir trente cuirasses et autant de lances, de chameaux et de chevaux. Autrement dit, de quoi équiper trente hommes. Et si Mahomet envoyait chez eux des représentants, il incombait alors aux chrétiens signataires de les héberger (pendant un mois). En échange (le souvenir des 895 martyrs de l’an 523 étant encore très présent dans les esprits, puisque le verset 4 de la sourate 85 y fait allusion), Mahomet s’engageait à les faire bénéficier de sa protection (dhimmat ar-rassoûl). L’État musulman naissant garantissait aux signataires la sécurité des personnes, la sauvegarde des propriétés, la liberté de religion et de culte, le respect des évêques, des prêtres et des moines, l’immutabilité des fondations religieuses. Il les exemptait de la dîme religieuse musulmane (zakât), du service militaire et de l’entretien, des troupes.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le dire, et contrairement aux stipulations du Coran (Saint Coran. « Le repentir » chapitre 9 versets 29 : « Combattez ceux qui ne croient pas en Dieu et au Jour du Jugement dernier ; ceux qui ne déclarent pas illicite ce que Dieu et son Prophète ont déclaré illicite ; ceux, qui parmi les gens du Livre, ne pratiquent pas la vraie religion. Combattez-les jusque-là ce qu’ils payent directement et personnellement le tribut – djizya- après avoir été humiliés – an yadin saghirouna), aucune humiliation ne devait peser sur eux.
Le texte de cet accord n’est malheureusement pas assuré, car des variantes ont été trouvées dans un monastère du Sinaï (Sainte-Catherine). Les détails que nous en a conservés Al Baladhuri dans son Kitab Futhu Al-Budan (Les origines de l’État islamique tome 1, pp.100-101) sont en tout cas les suivants.
« Au nom de Dieu clément et miséricordieux. Voici ce que le Messager de Dieu, Mahomet, a écrit à Najran. Ils gardent à leur disposition, tous leurs fruits, leurs ustensiles d’or, d’argent et domestiques, et leurs esclaves, parce qu’il le veut bien, en échange de deux mille habits, chacun ayant la valeur d’une once d’argent, un millier à livrer au mois de Rajab de chaque année. Chaque habit vaudra une once d’argent… les cottes de mailles, les chevaux, les chameaux ou les biens qu’ils donneront à la place des habits devront être pris en considération.
Il incombera aux habitants de Nadjran de fournir le gîte et le couvert pour mes messagers pendant un mois ou moins et de ne jamais les garder pendant plus d’un mois. Il leur incombera également de mettre à disposition trente cottes de mailles, trente juments et trente chameaux, en cas de guerre au Yémen rendue nécessaire par une révolte. Toute perte de chevaux ou de chameaux, prêtés à mes messagers, sera garantie par mes Messagers et sera remboursée par eux. Najran et ses fidèles ont droit à la protection de Dieu et à la protection de Mahomet son Prophète, le Messager de Dieu, protection de leurs personnes, leur religion, leurs terres et leurs biens, y compris de ceux qui seront
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absents, de leurs chameaux, de leurs messagers et de leurs images. Leur état ne changera pas, ni leurs services religieux ni leurs icônes. Aucune tentative ne sera faite pour priver un évêque de sa fonction d’évêque, un moine de sa fonction de moine, ni le sacristain d’une église de son office, quel que soit leur rang. Ils ne seront pas tenus responsables d’une mauvaise action ou d’une effusion de sang remontant à l’époque d’avant l’Islam. Ils ne seront ni appelés pour effectuer un service militaire ni obligés de payer la dîme musulmane (zakat). Aucune armée ne devra fouler leur sol. Si quelqu’un porte plainte contre eux, l’affaire sera jugée équitablement sans avantager les gens de Najran ni avantager l’autre partie. Mais si l’un d’entre eux a pratiqué l’usure, je ne serai pas responsable de sa protection. Aucun d’eux, cependant, ne sera tenu pour responsable de la culpabilité d’un autre. Et comme garantie de ce qui est consigné dans ce document, ils auront droit à la protection de Dieu et de Mahomet son Prophète, jusqu’à ce que le jugement de Dieu soit rendu, tant qu’ils suivront les conseils qu’on leur donnera et s’acquitteront de leurs obligations, à moins qu’elles ne soient injustement alourdies. Témoins Abou Soufyane, etc.… »
Note de la rédaction. On ne peut pas dire néanmoins que ce texte a servi de modèle par la suite puisque Mahomet lui-même rompra ce pacte seulement 14 mois après (juste avant sa mort).
« Yahya m’a rapporté… l’une des dernières choses que le Messager de Dieu, la bénédiction et la paix de Dieu soient sur lui, a dit, c’est : que Dieu maudisse les juifs et les chrétiens. Ils ont pris les tombes de leurs prophètes comme lieux de culte. Deux dins (religions) ne peuvent pas coexister sur la terre des Arabes » (Mouwatta de Malik, livre 45, numéro 45.5.17).
« Yahya m’a dit, d’après Malik qui le tenait lui-même d’Ibn Chihab que le Messager de Dieu, la bénédiction et la paix de Dieu soient sur lui, a déclaré : Deux dins (religions) ne coexisteront pas dans la péninsule arabique » (Mouwatta de Malik livre 45, numéro 45.5.18).
« Il a été rapporté par Omar b. Al-Khattib, qu’il a entendu le Messager de Dieu dire : « Je veux expulser les juifs et les chrétiens de la péninsule arabique et n’y laisser que des musulmans » (Sahih Muslim. Livre 19, Hadith 4366).
Comme chacun sait Mahomet en effet a quitté ce monde en martyr torturé par ses ennemis (empoisonné dit-on), mais il resta néanmoins actif jusqu’au bout et trouva donc encore la force de s’occuper des juifs et des chrétiens, 5 jours avant sa mort. Après il ne dirigea plus aucune prière à la mosquée, la douleur étant trop forte. Ce fut Abou Bakr qui s’en chargea. Le jour de son décès, il confia à Aïcha qu’il se mourait à cause du mets (empoisonné) qu’il avait consommé à Khaïbar. Il demanda de nouveau à Dieu de maudire les Juifs et les chrétiens et recommanda aux siens de ne pas confiner sa religion à la seule Arabie. Après avoir ainsi demandé à Dieu de lui pardonner ses péchés et de se montrer clément à son égard, il s’éteignit dans sa soixante-quatrième année en laissant derrière lui sa femme Aïcha terrifiée (à 18 ans), mais lui interdisant de se remarier. Ses successeurs mirent en pratique ses dernières recommandations. Omar, deuxième calife, expulsa les derniers Juifs de Khaïbar en 635 et les chrétiens de Nadjran en 640.
Deux grandes communautés religieuses ont donc une place ailleurs en terre d’Islam (Dal al Islam), ont une place de prévue dans la société musulmane même si elle n’est que de seconde zone ; ce sont d’une part les juifs et les chrétiens d’obédience non trinitaristes c’est-à-dire ne croyant pas en la Sainte Trinité (concrètement ne faisant pas le signe de croix) ; d’autre part les mages ou zoroastriens (les guèbres ou parsis d’aujourd’hui). Ont disparu les sabéens mandéens, groupe plus mystérieux dont on se demande bien ce qui leur a valu une telle indulgence de la part du Coran. Peut-être ont-ils un temps attiré positivement l’attention de Mahomet sur leur cas (certains auteurs en font un groupe judéo-chrétien dont le rite central serait les baptêmes ou ablutions rituelles).
Ils sont appelés gens du Livre, car ce qui les caractérise d’après le Coran c’est le fait qu’ils se réfèrent à un livre sacré, la Bible. La chose a dû marquer le jeune Mahomet à l’occasion de ses pérégrinations hors de sa ville natale (La Mecque).
Quant aux chrétiens trinitaristes (qui croient en Dieu le Père Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit autrement dit les catholiques les orthodoxes les Réformés, etc.), leur cas est plus controversé.
Il y a lieu ici en effet de revenir sur une des notions clés de l’islam, la notion d’association ou d’associateur. L’associateur est toute personne qui certes adore le vrai Dieu, mais qui associe d’autres entités à son culte : exemple les déesses Allât Manat et Ouzza, voire Jésus et le Saint-Esprit.
Une minorité d’auteurs musulmans, bien que reconnaissant que les chrétiens trinitaristes sont de facto polythéistes aux yeux de l’islam, tiennent compte de leur bonne foi et de leur sincérité : ils ne sont pas monothéistes, mais croient sincèrement l’être.
La majorité estime que ces chrétiens qui se signent sont donc de fieffés polythéistes et doivent donc être assimilés à des kouffar.
Rappel. Classification des chrétiens selon Abou Hamid Al-Ghazali
Pour ce théologien musulman du XIe siècle, les chrétiens se divisent en 3 groupes.
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— Ceux qui sont excusables. Les chrétiens qui n’ont jamais entendu parler de Mahomet (catégorie quasi inexistante de nos jours du fait des technologies de l’information, sauf à y inclure les enfants).
— Les chrétiens qui ont entendu parler de Mahomet, mais sans qu’on leur ait expliqué son véritable caractère, ni la véritable nature de son message.
— Ceux qui sont condamnables. Les chrétiens qui vivent au contact des musulmans et ont eu l’occasion de réellement s’informer sur l’islam. Ils refusent d’accepter la conversion en toute connaissance de cause, et sont donc des « kouffar » qui rejettent.
* Par Livre il faut entendre la Torah (Tourât) et les évangiles (Injil).
** Cette possibilité fut également ouverte à des communautés qui invoquèrent, plus ou moins artificiellement, la protection du « Livre » : gnostiques ou païens platonisants en Mésopotamie (autour de Harran), zoroastriens qui suivent en fait la religion d’État du royaume perse préislamique des Sassanides.
LE PACTE D’OMAR.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le dire, il existe une catégorie de kouffar particulièrement distinguée des oummiyoun ou taoughits par l’islam, ce sont les gens du Livre. C’est à dire en gros les judéo-chrétiens plus quelques autres groupes (Sabéens, zoroastriens).
La doctrine de l’islam interdisant théoriquement la conversion forcée des chrétiens et des juifs, les gens du Livre, comme nous l’avons vu, peuvent donc conserver leur religion et pratiquer leur culte ; à condition qu’ils le fassent sur un mode mineur, et presque en se cachant.
Le Pacte d’Omar est supposé avoir été édicté en 717 par le calife omeyyade Omar ben Abd al-Aziz (682-720), communément appelé Omar II. Il s’agirait, en partie, d’un traité entre ce calife et des « gens du Livre », placés sous le régime de la dhimma. Les versions les plus anciennes de ce pacte qui nous sont parvenues datent du XIIe siècle, mais sûrement pas des premiers temps de l’islam. Il n’est donc pas possible d’attribuer la paternité de ce pacte au deuxième calife Omar ibn al-Khattab, certains spécialistes remettant même en cause son authenticité. Ce document semblerait être en fait une compilation de dispositions élaborées progressivement, dont certaines pourraient effectivement dater du règne du calife Omar II, c’est-à-dire Omar ben Abd al-Aziz. De là, il semble qu’une confusion volontaire a été faite pour l’attribuer à Omar ibn al-Khattab autrement dit Omar I. Il s’agissait à l’origine de restrictions visant la sécurité militaire des premiers conquérants et qui se transformèrent en interdits légaux et sociaux par la suite.
Le texte d’après Tourtouchi (Siraj al-Moulouk, pp. 229-230), le plus ancien auteur (m.1126) ayant rapporté cette convention.
« Au Nom de Dieu, le Clément le miséricordieux ! Ceci est une lettre adressée par les chrétiens de telle ville, au serviteur de Dieu, Omar, commandeur des Croyants.
Quand vous êtes venus dans ce pays, nous vous avons demandé protection (aman) pour nous, notre progéniture, nos biens et nos coreligionnaires et nous avons pris par devers vous les engagements suivants.
Nous ne construirons plus dans nos villes ni dans leurs environs, de nouveaux monastères, ni églises, ni cellules de moines, ni ermitages. Nous ne réparerons pas ceux de ces édifices qui tomberaient en ruine, ou qui seraient situés dans les quartiers musulmans.
Nous tiendrons nos portes grandes ouvertes aux passants et aux voyageurs. Nous donnerons l’hospitalité à tous les musulmans qui passeront chez nous et les hébergerons durant trois jours.
Nous ne donnerons asile à aucun espion, ni dans nos églises ni dans nos demeures.
Nous n’enseignerons pas le Coran à nos enfants.
Nous ne ferons pas de manifestations publiques de notre culte et nous ne chercherons pas à convertir qui que ce soit. Nous n’empêcherons aucun de nos parents d’embrasser l’Islam, si telle est sa volonté.
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Nous montrerons le plus grand respect envers les musulmans. Nous nous lèverons de nos sièges lorsqu’ils voudront s’asseoir.
Nous ne chercherons point à leur ressembler, pour ce qui est des vêtements, par la calotte, le turban ou les chaussures, ou par la manière de peigner nos cheveux.
Nous ne parlerons pas comme ils le font ; nous ne prendrons pas leurs noms.
Nous ne monterons point sur des selles ni ne ceindrons d’épée. Nous ne détiendrons aucune espèce d’arme et n’en porterons point sur nous.
Nous ne ferons pas graver nos cachets en caractères arabes.
Nous ne vendrons point de boissons fermentées.
Nous nous tondrons le devant de la tête.
Nous nous habillerons toujours de la même manière, en quelque endroit que nous soyons ; nous nous serrerons la taille avec un zounar (une ceinture spéciale).
Nous ne montrerons pas nos croix ni nos livres sur les chemins fréquentés par les musulmans ni sur leurs marchés. Nous ne sonnerons les cloches dans nos églises que très doucement. Nous n’élèverons pas la voix en accompagnant nos morts. Nous n’allumerons pas de cierges sur les chemins fréquentés par les musulmans ni sur leurs marchés. Nous n’enterrerons pas nos morts dans le voisinage des musulmans.
Nous n’emploierons pas les esclaves qui ont été attribués aux musulmans.
Nous n’aurons pas de maisons plus hautes que celles des musulmans.
(Quand j’eus porté cette lettre à Omar, que Dieu le bénisse, il ajouta : « nous ne frapperons pas un musulman »).
Telles sont les conditions auxquelles nous avons souscrit, nous et nos coreligionnaires, et en échange desquelles nous recevons protection.
S’il nous arrivait de contrevenir à quelques-uns de ces engagements dont nos personnes demeurent garantes, nous n’aurions plus droit à ce pacte de protection et nous serions passibles des peines réservées aux rebelles et aux séditieux.
Omar répondit : signez ce qu’ils proposent, mais ajoutez deux clauses à celles qu’ils suggèrent. Ils n’achèteront personne ayant été fait prisonnier par les musulmans, et quiconque frappera délibérément un musulman perdra le bénéfice de ce pacte ».
Il a existé de nombreuses variantes de ce pacte d’Omar puisque c’est un faux qui a été mis au point progressivement. Celle de Tourtoushi n’en est que la plus ancienne connue à ce jour. Des islamologues comme Albrecht Noth pensent qu’il s’agissait surtout au départ de protéger la minorité musulmane.
La légende dorée véhiculée par la taqiya veut que les minorités religieuses aient prospéré en terre d’Islam. Il faut reconnaître que cela fut vrai au début pendant quelques dizaines d’années de certaines minorités chrétiennes ne relevant pas du christianisme devenu officiel dans l’Empire romain d’Orient (Byzance). Le cas le plus flagrant est celui des chrétiens d’Irak au début. Il n’en reste pas moins que ces minorités ont rapidement fini par ne plus être que l’ombre d’elles-mêmes.
Dans les faits, la dhimmitude suppose un impôt, une taxe prélevée sur le juif, le chrétien ou le zoroastrien pour lui permettre de vivre sur une terre d’islam. Une rançon, donc, une extorsion de fonds.
Car si les non-musulmans sont dispensés du paiement de l’aumône musulmane obligatoire ou zakat, c’est pour être soumis à un impôt spécial, la djizya dont il est précisé dans le Coran (le verset 29 du chapitre 9), qu’il doit être payé personnellement et dans des conditions humiliantes.
An yadin signifie personnellement, directement. C. Cahen in Arabica tome 9, fasc. I, Jan. 1966, pp. 76-79, fait le rapprochement avec la notion latine de manus (mainmise, contraire main levée d’hypothèque). Quant au terme arabe saghirouna il signifie sans équivoque quelque chose comme déshonoré, humilié, abaissé. Les auteurs admettent le plus souvent l’humiliation des gens du Livre en interprétant comme une prescription la fin du verset 9, 29 « oua houm saghirouna ». C’est une phrase nominale (sans verbe) signifiant mot à mot « et eux humiliés ». Faut-il traduire « ils sont (ou seront) humiliés (simple constatation) ou comme un ordre du genre « ils devront se faire tout petits » ? Quoi qu’il en soit cette humiliation intervient d’abord au moment où les dhimmis payent la djizya.
Il y a deux sortes de djizya : celle qui est fixée d’un commun accord, parce que gens du Livre se sont rendus sans combattre ; l’autre qui est fixée par l’imam parce qu’ils ont combattu avant de se rendre. La djizya est proportionnelle à la fortune : 48 dirhams ou 24 ou 12 ou rien pour les très pauvres, les femmes, les enfants, les aveugles, les malades chroniques, les moines (car ils n’ont pas participé aux combats). Les terres prises après combat sont en outre grevées d’un impôt (kharadj) qui reste attaché à la terre, quel que soit par la suite le statut de son propriétaire. La conversion fait donc disparaître la djizya, mais pas le kharadj. La djizya est en effet généralement conçue comme une punition (qui ne peut être levée que par la conversion).
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Ce durcissement est en fait plus caractéristique de l’époque abbasside (750-1258) que du règne d’Omar II. C’est sous les Abbassides que les « protégés » sont ravalés à une véritable citoyenneté de seconde zone. Les restrictions imposées ont d’abord une portée sociale, plus symbolique que pratique. Elles proclament l’autorité de l’Islam et la supériorité des musulmans. L’un des principes de base de ce contrat est le respect dû à l’Islam et au Prophète. En cas de manquement, la sanction est la mort. La tentative de convertir un musulman n’est pas admise. Un « protégé » ne peut pas épouser une musulmane : en revanche, un musulman peut épouser une non-musulmane – et les enfants suivent la religion du père. Le témoignage du « protégé » est irrecevable dans un procès où un musulman est en cause. Son serment ne vaut pas comme preuve contre un musulman. Inutile de dire qu’il était alors facile pour un musulman d’affirmer qu’un dhimmi avait violé l’une ou l’autre de ces conditions.
En contrepartie des restrictions, il y a des facilités. Les communautés « protégées » jouissent d’une grande liberté dans tout ce qui touche leurs affaires intérieures. Les Juifs et les chrétiens ont leurs tribunaux à eux. Ce qui ne les empêche pas, s’ils le souhaitent, de faire appel au juge musulman – qui statue selon la loi musulmane. Ils sont ainsi soumis à l’autorité de leurs chefs et de leurs juges, et peuvent mener leur vie personnelle, familiale et religieuse en accord avec leurs propres lois et coutumes. Les « protégés » sont sans doute libres de choisir leurs chefs ; mais encore faut-il que ce choix soit ratifié par les dirigeants musulmans, ce qui n’est pas toujours le cas.
Les non-musulmans ont le droit de posséder des objets ou denrées interdits par l’Islam, mais autorisés par leur propre religion, tels le vin et la viande de porc pour le Chrétien, le vin pour le Juif. Mais, à certaines époques, des restrictions limitent même la liberté du culte. Les « protégés » sont autorisés à conserver leurs lieux de culte, mais non à en construire de nouveaux ni à restaurer librement les sanctuaires existants. La discrétion est requise dans l’exercice du culte, puisque seul le culte musulman a un caractère public – l’usage des cloches, par exemple, est interdit. Les tombes des non-musulmans doivent être différentes de celles des musulmans. La discrimination statutaire entre musulmans et non-musulmans se poursuit donc jusque dans la mort.
Les « protégés » ne peuvent pas exercer une charge leur donnant juridiction sur des musulmans, et ne peuvent posséder ni des esclaves musulmans ni le Coran – ce qui les rend inaptes à occuper des fonctions publiques. Pourtant, lorsqu’ils conquièrent de nouveaux territoires, les musulmans conservent, par pure nécessité, l’administration locale avec son personnel. Mais les « protégés » qui parviennent à se hisser jusqu’aux sphères dirigeantes sans se convertir à l’Islam sont très rares. Au Moyen Âge, leur nomination à des fonctions élevées provoque parfois des émeutes, comme à Grenade (Espagne) ou en Irak. Ils deviennent donc plus aisément médecins de cour, astrologues, collecteurs d’impôts, etc.
En revanche, les « protégés » ont, comme les musulmans, la liberté de commerce et d’industrie. Ils pratiquent notamment les métiers interdits aux musulmans : métiers de l’argent, de la banque, des finances, commerce des métaux précieux. Les métiers délaissés par la société musulmane sont ainsi dévolus aux non-musulmans, qui souvent y excellent. Au Kurdistan, Arméniens, Juifs et chrétiens nestoriens pratiquent souvent les métiers les plus humbles. À certaines périodes, les activités pénibles leur reviennent. Les Juifs yéménites étaient par exemple tenus d’enlever les charognes et de nettoyer les latrines publiques le jour de Chabat, en vertu d’un décret du XIXe siècle qui est resté en vigueur jusqu’à leur départ en Israël, lors de la fondation de l’État juif.
L’infériorité du « protégé » se définit donc en termes sociaux et religieux. Les religions non islamiques ne sont considérées que comme des formes inachevées de l’Islam : on tolère les non-musulmans, car on garde l’espoir de les convertir et parce que, dans l’État musulmane des premiers temps, ils assument la presque totalité des charges fiscales. Leur infériorité est rendue particulièrement visible dans la vie quotidienne. L’infidèle est d’abord impur. Chez les chiites, le musulman qui lui serre la main se doit de procéder aux ablutions rituelles pour retrouver sa pureté ; de même lorsqu’il a touché leur nourriture, leurs ustensiles, leurs vêtements.
Les « protégés » sont obligés de se distinguer des musulmans par leur costume, leurs coiffures, leurs montures, et même par le choix de leurs noms. Le turban et l’habit militaire leur sont interdits. Ils doivent tantôt s’habiller d’un manteau jaune, tantôt porter des ceintures et des emblèmes spécifiques. Les chrétiens appliquent sur leurs vêtements des pièces d’étoffe de couleur bleue ou grise : aux Juifs, c’est la couleur jaune qui est attribuée (elle est à l’origine de la « rouelle », marque en forme de roue cousue sur le vêtement, dont l’usage s’étend, à la fin du Moyen Âge, en Occident). Des réglementations vestimentaires subsistent jusqu’au XIXe siècle. Ainsi, les Juifs de Tunisie portaient un tricorne. Les couleurs sombres sont obligatoires pour les chrétiens et les Juifs à Jérusalem, sous domination musulmane. Au bain public, les hommes portent une clochette au genou et les femmes un collier de plomb. Les habitations et édifices des « protégés » doivent être moins élevés que ceux des musulmans. Les « protégés » sont privés du port d’armes et ne peuvent pas monter des animaux
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nobles comme les chevaux ou les chameaux. Il en était encore ainsi au Yémen au XXe siècle, même si ces prescriptions sont loin d’être appliquées systématiquement. Si les « protégés » ne sont pas assignés dans des quartiers séparés – sauf dans quelques pays, en Afrique du Nord, au Yémen et en Iran –, ils ont néanmoins tendance à se regrouper.
CONCLUSION.
La dhimmitude, c’est au départ l’obligation de payer un impôt spécifique (djizia). Cet impôt est une capitation, parce qu’il a pour assiette la personne même du dhimmi.
Les premiers siècles de l’Islam se caractérisent par une relative tolérance envers les non-musulmans, attestée par la collaboration culturelle entre les ressortissants des différentes religions. À partir des 10e-11e siècles, tant en Occident musulman qu’en Orient, on constate un durcissement considérable. C’est qu’un nouveau rapport de force s’instaure peu à peu. Les « protégés », de majoritaires qu’ils étaient dans les contrées sous domination musulmane, commencent à devenir minoritaires. Après les Croisades, le monde musulman accuse un affaiblissement aussi bien économique que politique par rapport à la Chrétienté, et le statut des non-musulmans se détériore. Les mesures restrictives et la ségrégation sociale sont alors renforcées.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de e voir plus haut, la véritable pénalité qui touche en réalité en permanence le « protégé » est le paiement de l’impôt de capitation DANS DES CONDITIONS HUMILIANTES (oua houm saghirouna. Coran chapitre 9, 29).
Certaines catégories de « protégés » en sont néanmoins dispensées : les femmes, les impubères, les hermaphrodites, les esclaves, les personnes atteintes d’une infirmité physique et les moines. Les autres sont tenus de s’en acquitter régulièrement. Ce n’est qu’en échange du paiement de cette taxe qu’ils obtiennent la garantie de leur vie et de leurs biens. En principe, la terre conquise appartient à la communauté musulmane (Coran, chapitre 7, 128 et autres). Les « protégés » possèdent le droit d’exploiter leurs terres à condition de payer un impôt foncier.
Ainsi que nous l’avons dit, vu l’interprétation généralement donnée à la formule arabe oua houm saghirouna, certaines mesures vexatoires sont liées au paiement lui-même. Ainsi, lors de la levée de l’impôt de capitation, le collecteur d’impôts devra faire semblant de donner un soufflet au « protégé ». Le taux de ces impôts n’est pas toujours réglementé. S’ajoutent parfois des rançons que les non-musulmans ont à payer sous certains régimes, pour leur sécurité. Des cas de ce genre se produisent tant en Afrique du Nord que dans l’Empire ottoman, même au XIXe siècle.
La dhimmitude est donc plus un protectorat chèrement payé d’ailleurs (un statut de seconde zone) qu’une véritable tolérance religieuse.
La doctrine de l’islam interdisant théoriquement la conversion forcée des chrétiens et des juifs, les gens du Livre, comme nous l’avons vu, peuvent donc conserver leur religion et pratiquer leur culte ; à condition qu’ils le fassent sur un mode mineur, et presque en se cachant. Cette « protection » est en effet assortie du devoir de respect absolu des musulmans et des choses de l’islam (notamment la personne de Mahomet bien sûr). Elle se manifeste par des signes extérieurs d’humiliation qui traduisent un statut d’infériorité quasi obsessionnel pour les musulmans.
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En échange de cette soumission, les « dhimmis » ont droit en principe à la protection des différents pouvoirs islamiques (sultan, etc.…), ce qui leur permet de survivre. Il s’agit d’un contrat qui ne peut être rompu que par une révolte des dhimmis contre leurs maîtres ; à plus forte raison si des dhimmis veulent conquérir – de quelque manière que ce soit – une terre qui appartient ou qui a jadis appartenu à l’islam ! Un non-musulman (juif ou chrétien) ne peut diriger des musulmans. Il ne peut épouser une musulmane, car la femme étant soumise à son mari (en terre d’islam) ce serait une abomination de voir une musulmane soumise à un dhimmi ! Un musulman peut par contre épouser une juive ou une chrétienne, et dans ce cas seuls les enfants seront musulmans. Un non-musulman (juif ou un chrétien) ne peut témoigner en justice contre un musulman. Dans beaucoup de pays musulmans, les non-musulmans (chrétiens ou juifs) ne peuvent posséder ni terre ni entreprise.
Cette protection (!) acquise, les dhimmis voient leurs droits civiques réduits à pas grand-chose. Dans une société tribale où le cheval permet d’exister, de se déplacer, de combattre, de montrer son rang social, le non-musulman en est privé : on lui autorise l’âne, le mulet, la monture humiliante, mais chevauchée en amazone (la manière féminine de monter) ; il peut marcher dans la rue, mais il ne lui est pas permis de dépasser un musulman ; et bien sûr, le port d’arme est formellement interdit. Il est donc à la merci du premier bandit venu.
Le meurtre d’un musulman par un autre musulman est puni de mort (Boukhari 83 :17), mais inversement aucun musulman ne peut être exécuté pour avoir tué un non-musulman d’après certains auteurs.
Coran chapitre 5, verset 32.
Nous avons prescrit aux fils d’Israël « celui qui a tué un homme qui lui-même n’a pas tué, ou qui n’a pas commis de violence sur la terre, est considéré comme s’il avait tué tous les hommes… »
Toute la question est de savoir, dans cette mitzvah donnée aux fils d’Israël (d’Israël et non d’Ismaël) quelles sont les limites de cette sacralité de la vie humaine. La vie humaine est-elle considérée comme sacrée dans tous les cas ou y a-t-il des exceptions ? Et que veut dire « ne pas commettre de violence sur terre ? » dans ce cas ?
La réponse a été donnée par la jurisprudence. D’après certains hadiths en effet n’est totalement sacrée que la vie d’un musulman.
Sahih Boukhari. Tome 1. Livre 8. Hadith numéro 387.
D’après Anas bin Malik.
L’apôtre de Dieu a dit : « J’ai reçu l’ordre de combattre ces gens jusqu’à ce qu’ils disent : nul n’a le droit d’être adoré, sauf Dieu. Et s’ils reconnaissent ça prient comme dans nos prières, face à notre Qibla et abattent le bétail comme nous, alors leur sang et leurs biens sont sacrés et nous n’interviendrons pas dans leurs affaires, sauf à bon droit et Dieu jugera »…
« O Abou Hamza ! Qu’est-ce qui rend la vie et la propriété de quelqu’un sacrée ? » Il a répondu : « Celui qui dit : Nul n’a le droit d’être adoré, sauf Dieu, fait face à notre Qibla pendant les prières, prie comme nous et mange du bétail que nous avons abattu, est musulman, et a les mêmes droits et obligations que les musulmans ».
Sahih Boukhari. Tome 9. Livre 83. Hadith numéro 50.
D’après Abou Jouhaïfa : J’ai demandé à Ali… Qu’y a-t-il sur cette feuille de papier ? Il a répondu : « La réglementation concernant le Diya (prix du sang) la rançon destinée à la libération des captifs et le jugement selon lequel aucun musulman ne doit être tué par Qisas (application de la loi du talion) pour avoir tué un kafir (mécréant) ».
NDLR. Certains musulmans ont en effet interprété cette tradition (hadith) comme si c’était une règle générale (Abou Hanifa et ses disciples, Ibn Abi Laïla).
Dit autrement l’homicide volontaire d’un musulman par un autre musulman est plus sévèrement sanctionné que l’homicide volontaire d’un non-musulman par un musulman. Concrètement l’assassinat d’un juif ou d’un chrétien n’est évidemment pas pour autant légalement autorisé, mais la compensation financière due pour le meurtre d’un juif ou d’un chrétien par un musulman est limitée par certains auteurs à un tiers de ce qui est dû pour l’homicide involontaire d’un musulman par un autre musulman.
Au IXe siècle – on parle habituellement d’âge d’or de l’islam pour caractériser cette période – le calife abbasside Al-Mouttaouakkil qui souhaitait distinguer les juifs et les chrétiens par des signes visibles, ordonna que les dhimmis portent des vêtements distinctifs. Bleus pour les chrétiens, jaunes pour les juifs. Parfois même, outre le tissu jaune de sinistre mémoire, on leur tatoue un lion sur la main, comme d’autres un numéro sur l’avant-bras.
Voir également le sort des dhimmis sous le règne du calife almohade Yousouf Mansour (1184-1198) en Espagne.
D’autres obligations incombent aux dhimmis, comme l’hébergement et le ravitaillement de la troupe, hommes et chevaux, le devoir de guider les musulmans correctement sur les routes tout en
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s’abstenant de la moindre collaboration avec leurs ennemis. Cette clause, du fait d’un millénaire de guerre entre Islam et Chrétienté, empoisonna les relations entre les chrétiens dhimmis et harbis (européens). Elle imposa aux premiers une surenchère d’hostilité envers les seconds, afin de prévenir les représailles sanglantes d’un pouvoir musulman toujours soupçonneux. L’obligation d’héberger les soldats dans les églises, les synagogues, et dans leur demeure, soumettait en outre les dhimmis à un régime d’extorsions ou d’humiliations permanentes, aggravées par de fréquentes rapines et parfois même le rapt des femmes.
Au sein de l’Empire ottoman, les chrétiens durent même s’acquitter d’un impôt en hommes destiné à doter le pays de fonctionnaires zélés appelés janissaires : le devchirme.
Quant à leurs biens mêmes, les non musulmans ne sont guère mieux lotis. La jouissance de ces biens terrestres ne leur est que concédée par Dieu qui peut à tout moment leur reprendre pour les donner à des musulmans.
Base scripturaire.
Chapitre 8 Le Butin. « Ils t’interrogent au sujet du butin. Dis : « Le butin est à Dieu et à son messager… »
Chapitre 2, 284.
« À Dieu appartient ce qui se trouve dans les cieux et sur la terre ».
Chapitre 7, 128.
« La terre appartient à Dieu et il en fait hériter qui il veut parmi ses serviteurs ».
Chapitre 48, 18-20.
« Dieu a très certainement agréé les croyants quand ils t’ont prêté le serment d’allégeance sous l’arbre. Il a su ce qu’il y avait dans leurs cœurs, et a fait descendre sur eux la Shakina, et Il les a récompensés par une prompte victoire, ainsi qu’un abondant butin qu’ils ramasseront. Dieu est Puissant et Sage. Dieu vous a promis un abondant butin que vous prendrez et vous l’a donné en avance, etc. »
Chapitre 33, 25-27.
« Dieu a renvoyé, avec leur rage, les infidèles sans qu’ils n’aient obtenu aucun bien, et Dieu a épargné aux croyants le combat. Dieu est Fort et Puissant. Il a fait descendre de leurs forteresses ceux des gens du Livre qui les avaient soutenus [les assiégeants], et Il a jeté l’effroi dans leurs cœurs ; un groupe d’entre eux vous tuiez, et un groupe vous faisiez prisonniers. Il vous a fait hériter leur terre, leurs demeures, leurs biens, et aussi une terre que vous n’aviez point foulée. Dieu est tout-puissant ».
Commentaire. Sans doute une allusion au massacre de la tribu juive des Banou Qouraïza à Yathrib/Médine par les musulmans vainqueurs de la bataille du fossé en 625 *.
Les hommes (600 à 800) furent décapités puis enterrés dans une fosse commune. Les propriétés de la tribu furent saisies comme en butin.
Ibn Ichaq écrit dans sa Sira. « L’Envoyé de Dieu fit le partage des biens des Banou Qouraïza, de leurs femmes et de leurs enfants entre les musulmans. En ce jour, il indiqua les parts pour les cavaliers et les parts pour ceux qui combattirent à pied. Il en déduit le cinquième. Donc, le cavalier avait trois parts : deux pour le cheval et une pour son cavalier ; le combattant à pied, c’est-à-dire celui qui n’avait pas un cheval, avait une seule part. Les chevaux dans la bataille contre les Banou Qouraïza étaient au nombre de 36. L’apôtre de Dieu dépêcha un émissaire à Najd avec les prisonniers, pour les donner comme esclaves en échange de chevaux et de chameaux ».
Ibn Ichaq toujours. « L’Apôtre choisit une des femmes pour lui-même, Rayana bint Amir ibn Khounafa, une des femmes des Banou Amir ibn Qouraïza, et elle resta chez lui comme esclave jusqu’à sa mort. L’Apôtre lui proposa le mariage et de mettre un voile sur elle, mais elle lui répondit : « Non, laisse-moi être ton esclave, parce que cela sera plus simple pour toi et pour moi. » Elle avait montré de la répugnance envers l’Islam quand elle avait été capturée et restait attachée au judaïsme, etc. »
Le hadith 4390 du livre N° 38 d’Abou Daoud explique de quelle façon les bourreaux différencièrent alors un enfant (à asservir) d’un homme (à tuer). Rapporté par Atiyyah al-Qourazi : « J’étais parmi les captifs de Banou Quraïza. Ils nous ont examinés, et ceux dont les poils (pubiens) avaient commencé à pousser furent tués, ceux qui n’en avaient pas ne furent pas tués. J’étais parmi ceux dont les poils n’avaient pas poussé ».
* Les Banou Qouraïza semblent avoir essayé de négocier une paix séparée avec les assiégeants mecquois, contrairement au traité qu’ils avaient signé avec les musulmans de Yathrib/Médine, ou du moins ne pas avoir fait de zèle. Ils furent donc accusés de trahison.
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LE COMPLEXE DU DHIMMI.
La dhimmitude est le type d’existence développé par les populations et les civilisations non musulmanes soumises à l’islam.
Ainsi que l’a très bien vu l’historienne égyptienne Bat Ye’or dans son étude intitulée « Dhimmitude et Marcionisme * » à propos de l’islam les contrevérités et les tabous forment tout un maquis de mensonges et de pièges psychologiques. Depuis trente ans intellectuels évêques journalistes et hommes politiques occidentaux en Europe ont refusé de voir le petit djihad mondial en action aux quatre coins du monde et de reconnaître les sources du terrorisme islamiste. Les déclarations de Ben Laden s’inscrivent dans un contexte exclusivement religieux et s’inspirent du récit des guerres contre les infidèles destinées à imposer la suprématie musulmane. Ce n’est pas Israël et l’Occident qui humilient le monde arabo-musulman ; ce qui est humiliant, c’est l’existence même de ces nations, leur liberté et leur souveraineté qui contredisent la vision islamiste de l’ordre naturel des choses dans lequel l’Islam doit dominer et ne pas être dominé. C’est la frustration de cette volonté de pouvoir qui nourrit l’humiliation et la violence, et non la pauvreté ou les disparités économiques qui existent partout dans le monde sans provoquer ce type de haine et de terrorisme. Ce petit djihad n’est que nostalgie de l’univers mental de la dhimmitude des infidèles, façonnée par l’insécurité, l’avilissement et la servilité comme moyens de survie. Le dhimmi est coupable d’exister ; il doit payer pour son existence par des hommages, des services et des flatteries. Les expressions de son identité doivent être secrètes et humbles ; il n’a aucune histoire, aucune culture, aucune civilisation et doit être pardonné pour ses accomplissements en les mettant au service de son oppresseur.
Les attentats terroristes antiaméricains du 11 septembre 2001 ont mis en évidence le hiatus entre des déclarations apaisantes d’admiration pour l’islam des dirigeants européens et des manifestations haineuses contre l’Occident par des masses musulmanes qui soutiennent les crimes de Ben Laden.
Les réactions des politiciens européens illustrent leur comportement dhimmi : ils ne manquent jamais une occasion de vanter la supériorité de la civilisation islamique sur les leurs, de se flageller pour les croisades et de se rabaisser pour ménager les susceptibilités arabes. Les contribuables occidentaux attaqués sur leur propre sol… [censuré]… menacés et terrifiés par le terrorisme des missiles humains, sont réduits à l’achat d’une tentative de sécurité qu’ils n’ont pu faire défendre par des moyens plus dignes.
L’incrimination d’Israël actualise le même vieux réflexe millénaire des chrétiens attaqués dans leurs propres terres par le petit djihad et répandant leur haine impuissante contre les minorités juives, faute de s’en prendre à un ennemi plus redoutable.
Tout comme les minorités slaves musulmanes en Bosnie, au Kosovo et en Macédoine, ont poussé les revendications sécessionnistes à empoisonner les relations entre chrétiens catholiques, protestants et
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orthodoxes ; les pays arabes ont transformé la guerre de l’Occident contre le terrorisme islamiste en un combat contre Israël, blâmé comme sa cause.
Depuis les années 1960, l’Occident s’est construit un islam imaginaire, une civilisation de l’amour, de la paix et de la tolérance. Cette image immaculée protégée par une censure stricte facilite les politiques de collusion cynique et les concessions honteuses.
Aujourd’hui le masque est tombé, révélant le visage de Ben Laden, les manifestations de haine sanguinaire contre les chrétiens et les juifs.
Peu après le 11 septembre, une controverse sur l’islam s’est développée aux États-Unis.
Selon le professeur David Forte, un catholique fervent qui aurait influencé le président Bush, l’islam est une religion d’amour, de paix et de tolérance. Islam aurait été pris en otage par Ben Laden, censé représenter une tendance minoritaire insignifiante de l’Islam.
Forte a appelé l’Occident à voler au secours du véritable Islam que l’on doit sauver des griffes de Ben Laden. Bien que l’on ne puisse pas présumer des sentiments individuels et de l’opinion de millions de musulmans ou les généraliser à l’ensemble de la civilisation musulmane, il faut bien admettre que les idées de Ben Laden sont clairement exposées par l’islam et l’islamisme.
Les Occidentaux savent peu ou rien du petit djihad, la guerre de conquête islamique. Dans certains cercles progressifs, le petit djihad est considéré comme un terme exotique, parfois doté d’une connotation positive. Trompés par des similitudes apparentes, ces intellectuels confondent petit djihad et croisades.
En fait, la première croisade démarra en 1096 (1071 bataille de Manzikert) ; alors que petit djihad a commencé en 624.
La première phase, le proto petit djihad du VIIe siècle, a été suivie par la conceptualisation théologique, théorique et juridique à partir du VIIIe siècle.
La première phase englobe les activités militaires de Mahomet après son émigration à Médine en 622 et l’inscription de ces exploits sous la forme de commentaires et de commandements dans le Coran.
La deuxième phase commence après la mort de Mahomet en 632, lorsque les armées arabes partent à la conquête de l’Asie et de l’Empire chrétien méditerranéen.
C’est au cours de cette deuxième phase (VIIIe-IXe siècles) que les jurisconsultes musulmans élaborèrent le concept théologique du petit djihad et ses institutions basées sur l’exemple de Mahomet, ses biographies (écrites entre les 8e et 9e siècles), et ses prétendues paroles ou actions (hadiths) enregistrées par des témoins supposés.
La distinction entre ces deux périodes montre que le petit djihad tel qu’il s’est développé ne peut être attribué à Mahomet parce que les institutions ont été établies après sa mort.
Contrairement à ce que dit et affirme l’ancien premier ministre français Alain Juppé, il existe de nombreuses différences entre la conception du petit djihad et de la croisade, car ils émanent de deux religions et civilisations profondément différentes.
Nous ne pouvons en mentionner que quelques-unes ici.
À partir du VIIIe siècle, les théologiens musulmans ont enseigné que le petit djihad était issu de la doctrine islamique et inséparable de celle-ci parce qu’il s’exprimait dans les campagnes militaires menées par Mahomet.
Le petit djihad, qui est une notion complexe, traduit la lutte des musulmans pour vivre selon les préceptes de Dieu révélés à Mahomet. Mahomet est le médiateur suprême entre l’humanité et la divinité dont les commandements normatifs et contraignants sont proclamés dans le Coran ainsi que par ses paroles et ses actions. Le prophète arabe illustre le modèle normatif du Bien qui doit être imposé nolens volens à toute l’humanité, et le petit djihad développe les tactiques militaires, politiques et économiques pour atteindre ce but.
Depuis ses origines et jusqu’à ce jour, le petit djihad occupe une place importante dans la pensée et les écrits des théologiens et des juristes musulmans. Les règlements définis au VIIIe siècle sont encore considérés comme immuables aujourd’hui par la majorité des musulmans. Mais alors que le petit djihad est inhérent à l’immanence sacrée de la révélation coranique, la croisade est un événement historique épisodique sujet à critique.
Il y a lieu d’abord de noter que la Croisade n’a aucun fondement dans les textes constitutifs du christianisme – le premier et le deuxième testament de la Bible.
Premier Testament. La conquête de Canaan par les Israélites concerne un territoire limité, pas toute la terre dans une guerre éternelle pour soumettre l’humanité toute entière à une même loi. Les pratiques guerrières s’inscrivent aussi dans le contexte d’un moment particulier.
De plus, la Bible et le Coran n’ont pas la même position sur le paganisme.
La Bible condamne les pratiques sanglantes et inhumaines des cultes païens ; elle n’a jamais ordonné la guerre éternelle contre les païens.
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Historiquement parlant, la croisade fut une réaction à des événements qui faisaient partie intégrante du concept de petit djihad. Les armées musulmanes encerclaient la chrétienté dans un mouvement en tenaille. Dans l’est, après la défaite byzantine à Manzikert (1071), les tribus turques Seldjoukides mirent l’Arménie au feu et à sang et ravagèrent le territoire byzantin. À l’ouest, les tribus berbères almoravides pénétrèrent en Espagne et s’avancèrent vers le nord, massacrant les chrétiens au passage.
En Terre sainte, les pèlerinages étaient interrompus à cause des conversions forcées, des enlèvements et des meurtres de pèlerins chrétiens, et d’une insécurité généralisée pour les non-musulmans.
Les croisades ne peuvent pas être séparées des guerres récurrentes du petit djihad antichrétien qui les ont provoquées.
L’ignorance de la doctrine du petit djihad est si profonde chez les journalistes évêques intellectuels ou hommes politiques occidentaux que le terme croisade est souvent abusivement utilisé dans un contexte de djihad, ce qui induit des contresens absurdes impliquant que les musulmans se battent pour la croix ? alors qu’en fait la croix fut interdite dans leur empire (dar al-islam) par le calife Abd al-Malik à la fin du 7e siècle.
Le plus grave est que l’effacement de l’histoire du petit djihad oblitère automatiquement l’histoire de la dhimmitude qui est son but et sa finalité.
La sphère historique appelée dhimmitude est une partie de l’histoire humaine s’étendant sur plus d’un millénaire et couvrant tous les pays conquis par les armées musulmanes sur trois continents : l’Afrique, l’Asie et l’Europe. Et en fait, le concept existe encore aujourd’hui dans les coutumes et les lois de tous les pays où la charia est pratiquée.
L’ignorance des journalistes empêche les gens de percevoir la dhimmitude tout comme l’analphabétisme empêche une personne de saisir le sens d’un texte, mais ni l’ignorance ni l’analphabétisme ne changent la réalité non perçue.
Parce que le petit djihad est éternel, puisque considéré comme une expression de la volonté divine, la dhimmitude, sa conséquence directe, est renforcée par les mêmes qualités éternelles et sacrées.
* Personnellement nous ne comprenons pourquoi notre amie Bat Yé’or se réfère ici à Marcion, mais enfin peu importe.
Titre original : « Juifs et chrétiens sous l’Islam. Dhimmitude et marcionisme, » publié dans Commentaire, revue trimestrielle fondée par Raymond Aron (Directeur de la rédaction : Jean-Claude Casanova) traduit par Nidra Poller.
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LA DHIMMITUDE SELON BAT YE’OR.
(Juifs et chrétiens en terre d’islam. Traduction David Maisel. Préface de Jacques Ellul).
Ainsi que le précise l’historienne de Gisèle Littman-Orebi (Bat Ye’or) des universités de Genève et de Londres ; la loi islamique interdisait en effet aux non-musulmans la propriété foncière qui était transférée au Trésor public musulman géré par le calife. Celui-ci délimitait des circonscriptions militaires qu’il cédait en fiefs, sous forme temporaire ou à perpétuité, à des membres de sa famille, à des tribus ou à des chefs militaires, en échange de l’équipement d’une troupe et de sa participation aux combats. Cette hiérarchie militaire administrative se perpétua jusqu’au XIX' siècle dans l’Empire ottoman. En Bosnie, seuls les musulmans pouvaient avoir des terres « libres » (mülk), l’État ottoman se réservant la totalité des terres conquises (terres miri). Les dhimmis cependant, pouvaient conserver la possession du sol, en retirer l’usufruit et en hériter. Toutefois la conquête islamique instaura dans la réalité une situation dramatique relatée par d’innombrables sources et dont les conséquences à long terme aboutirent à la disparition des paysanneries chrétiennes et juives indigènes. De fait, même si la législation islamique garantit (théoriquement) au dhimmi la possession, ce principe fut souvent transgressé, notamment par les transferts des populations obligées d’abandonner leurs biens, meubles et immeubles. Au XIXe siècle, lors de l’émancipation des dhimmis et de la réforme du droit ottoman, les oulémas interdisaient la vente de terres aux Serbes chrétiens. Quand ces derniers parvenaient à en acheter, elle leur était enlevée. Une situation semblable envers les Juifs et les chrétiens en Palestine et en Syrie fut mentionnée par les consuls anglais à la même époque.
Abus de particuliers ou de troupes, razzias de rebelles, il n’y eut guère de lieu ni d’époque où l’esclavage n’emporta sa moisson d’hommes, de femmes et d’enfants dhimmis. Cette dilution démographique s’aggrava sous les Ottomans avec l’institution du devchirme inauguré par le sultan Orkhan (1326-1359). Elle consistait à enlever régulièrement, sous forme de tribut, un cinquième des enfants chrétiens des pays conquis d’Europe Orientale et Centrale. Les intervalles entre les levées variaient selon les besoins. Certains lieux en étaient exemptés : Jannina, Galata, Rhodes. Convertis à l’islam, ces enfants âgés de 14 à 20 ans entraient dans le corps des janissaires, milices militaires constituées presque exclusivement de chrétiens. Les levées périodiques qui se faisaient par contingents de 1 000 devinrent ensuite annuelles. Les enfants chrétiens étaient réquisitionnés parmi l’aristocratie des Grecs, des Serbes, des Bulgares, des Albanais, des Arméniens, et parmi les enfants des prêtres. À date fixe tous les pères devaient se rassembler avec leurs fils, sur une place de la ville, etc. …
Dans le monde musulman, il existe, à côté du dhimmi, « protégé » dépendant entièrement des autorités locales, une autre catégorie de « protégés », dépendant des autorités diplomatiques d’une
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puissance européenne. Ce sont les infidèles, venus de l’étranger pour des raisons commerciales, qui bénéficient de ce dernier statut en vertu des privilèges accordés, dès le 16e siècle, par les chefs musulmans, notamment par les sultans ottomans, aux États chrétiens (Capitulations). Ils peuvent ainsi commercer librement tout en jouissant d’exemptions fiscales, ils sont jugés par les cours de leur pays, bref, ils ne relèvent pas de la dhimma.
Ces privilèges sont progressivement étendus, selon les époques, aux ressortissants locaux non musulmans, qui essaient d’obtenir des certificats de protection pour échapper au bon vouloir des maîtres du lieu. Ces certificats font même l’objet d’un commerce dans l’Empire ottoman finissant…
La pénétration européenne en terre d’Islam bouleverse les rapports entre musulmans et « protégés ». Au XIXe siècle, le colonialisme européen met fin à la dhimma en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. En 1856, la dhimma est officiellement abolie dans l’Empire ottoman. Désormais, musulmans et non-musulmans devront être traités sur un pied d’égalité. Mais ces réformes restent le plus souvent lettre morte. Dans l’Empire ottoman, la capitation est supprimée, mais on la remplace par une taxe qui permet au non-musulman d’être exempté du service militaire.
Parallèlement, les autochtones s’ouvrent à l’Occident – et à des idéologies nouvelles. Les « protégés » n’acceptent plus leur condition. Ils attendent le salut de l’Occident. Les différents nationalismes font leur chemin. Les puissances européennes manipulent ces aspirations et n’hésitent pas à monter les minorités les unes contre les autres.
Au Moyen-Orient comme en Afrique du Nord, des États-nations modernes, issus de la décolonisation, ne sont pas en mesure d’intégrer leurs anciens « protégés », de les considérer comme des citoyens égaux. Les récentes vicissitudes vident progressivement les terres d’Islam de leurs « protégés ». Ceux qui restent, chrétiens et Juifs, y font figure de « tolérés » des temps modernes, y compris dans les États laïques. Les séquelles de siècles d’inégalité ne pouvaient pas disparaître par la simple promulgation de constitutions égalitaires. La volonté d’intégration aurait-elle manqué tant aux États musulmans qu’aux minorités concernées ?
Aujourd’hui, une situation inverse s’est établie. Les musulmans qui ont élu domicile en terre chrétienne sont assujettis à la loi des États-nations dont ils dépendent, même provisoirement. Il en est de même pour les Arabes musulmans actuellement sous la juridiction de l’État juif d’Israël. Dans les deux cas, ces populations se retrouvent face aux anciens « protégés » du monde musulman, mais dans une position non dominante.
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COMMUNAUTARIOLOGIE COMPARÉE.
COMMUNAUTARISME CHRÉTIEN (théorique).
Rappelons tout d’abord que le grand rabbi Nazoréen Jésus n’a jamais prêché l’Église, mais la venue du Royaume de Dieu, dont ci-dessous une définition (au sens maximal).
Matthieu 5, 38.
Vous avez appris qu’il a été dit : œil pour œil, et dent pour dent. Mais moi, je vous dis de ne pas résister au méchant. Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l’autre. Si quelqu’un veut plaider contre toi, et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau. Si quelqu’un te force à faire un mille, fais-en deux avec lui. Donne à celui qui te demande, et ne te détourne pas de celui qui veut emprunter de toi. Vous avez appris qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi. Mais moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent, afin que vous soyez fils de votre Père qui est dans les cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes.
Commentaire Pierre de La Crau. Aimer ses ennemis. Hum… Respecter ses ennemis serait déjà pas mal. Quant au terme latin ekklesia (église) ou qahal en hébreu, il semble avoir eu dès le début un sens assez local. Dans le Livre de l’Apocalypse (qui en grec signifie « livre de la révélation »), chapitres 1, 2 et 3, son auteur entend une voix forte qui lui dicte : Ce que tu vois, écris-le dans un livre, et envoie-le aux sept Églises, à Éphèse, à Smyrne, à Pergame, à Thyatire, à Sardes, à Philadelphie, et à Laodicée.
COMMUNAUTARISME MUSULMAN.
Le contraire de la taqiya (l’honnêteté intellectuelle) commande de reconnaître clairement que la règle générale est bien la fraternité entre croyants (croyant la même chose). Le Coran est formel à ce sujet.
En théologie musulmane l’Oumma ou communauté des fidèles EST UNE. De cette notion d’Oumma (ou nation musulmane) découle l’exceptionnel devoir de solidarité des musulmans entre eux, en dehors de toutes les appartenances antérieures (essentiellement tribales ou familiales à l’époque).
Mahomet en jettera les bases dès son arrivée à Yathrib/Médine en 622 en associant à chaque immigré mecquois (Mouhadjir) un Médinois de souche (Ansar) afin qu’ils fraternisent. La tentative n’ira pas très loin, mais laissera des traces. Mahomet poursuivit dans cette voie en élaborant toute une série de modus vivendi entre tribus arabes ou juives de la cité oasis. Qui finiront sur un constat d’échec pour ce qui est des tribus juives. Ces pactes avaient pour but l’organisation d’une défense commune contre toute attaque venue de l’extérieure, mais aussi la mise en place d’un impôt commun pour la financer, ainsi que le règlement des litiges ou problèmes pouvant surgir entre les différents signataires de cette première oumma.
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La notion d’oumma est très chargée affectivement parlant chez les musulmans ainsi que le prouve a contrario la condamnation viscérale de toute fitna chez les oulémas (ouléma = docteur de la Loi, fitna = schisme, scission, guerres intra musulmanes).
BASES SCRIPTURAIRES.
Coran chapitre 48, verset 29.
Muhammad est le Messager de Dieu. Et ceux qui sont avec lui sont durs envers les mécréants, miséricordieux entre eux.
Chapitre 49 versets 9 à 12.
« Si deux factions de croyants se combattent, faites la paix entre eux. Si l’une des parties attaque l’autre, combattez le groupe qui s’en prend à l’autre, jusqu’à ce qu’il se conforme à l’ordre divin. Ensuite, s’il s’y conforme, réconciliez-les avec justice et soyez équitables, car Dieu aime les hommes équitables. Les croyants ne sont que des frères. Faites donc régner la concorde entre vos frères, et craignez Dieu, afin qu’on vous fasse miséricorde.
Ô vous qui avez la foi ! Ne laissez pas certains d’entre vous se moquer d’autres croyants : ils sont peut-être meilleurs que vous. Que des femmes ne se moquent pas d’autres femmes : elles sont peut-être meilleures qu’elles. Ne vous dénigrez pas mutuellement et n’échangez pas des sobriquets (injurieux). Quel horrible mot que celui d’abomination pour parler de quelqu’un qui est croyant ! Ceux qui sont impies sont ceux qui ne se repentent pas. Ne vous diffamez pas, ne vous insultez pas, ne vous espionnez pas, et ne médisez pas les uns des autres »
NDLR. Ces versets seraient plus émouvants s’ils prônaient la solidarité envers toute l’humanité. La non-croyance en Dieu fait-elle sortir de l’humanité?
HADITHS.
Jami at-Tirmizi, Tome. 3, Livre des punitions légales, Hadith 1426.
Ibn Umar : le Messager de Dieu a dit « Le musulman est le frère du musulman, il ne l’opprime pas et ne le ruine pas, et quiconque se soucie des besoins de son frère, Dieu se soucie de ses besoins, et quiconque soulage un musulman d’un fardeau, Dieu le soulagera d’un fardeau le jour du jugement et quiconque couvre les fautes d'un musulman, Dieu couvrira (ses fautes) le jour du jugement ».
Sahih al-Boukhari 1240.
Abou Horaïra. J’ai entendu le Messager de Dieu dire : « Les droits d’un musulman sur les musulmans sont au nombre de cinq : répondre à la salam, rendre visite aux malades, suivre les processions funéraires, accepter une invitation et répondre à ceux qui éternuent ».
Sahih Muslim 2162 b. Le livre des salutations.
Abou Horaïra a rapporté que le Messager de Dieu avait dit : les droits d’un musulman sur un autre musulman sont au nombre de six. On lui demanda : Messager de Dieu, quels sont-ils ? Il a répondu : quand tu le rencontres, salue-le ; quand il t’invite à une fête, accepte-le. Quand il demande ton conseil, donne-le-lui, et quand il éternue et dit : « Toute louange est due à Dieu », tu réponds Yarhamouk Allah (que Dieu te fasse miséricorde) ; et quand il tombe malade, rends-lui visite ; et quand il meurt, suis son cercueil.
5 ou 6 devoirs ou droits des musulmans entre eux donc. Auxquels certains auteurs en rajoutent deux autres.
Ce qui nous donne sous la plume des musulmans pieux qui développent ces brèves mentions après l’habituel discours sirupeux sur la fraternité l’amour et l’humanisme (un humanisme où Dieu est la mesure de toute chose, pas l’Homme). Et avec une fâcheuse tendance à confondre droit et devoir (mais il est vrai qu’à chaque droit correspond en principe un devoir).
La science légiférée. Les droits du musulman vis-à-vis du musulman. La Oumma musulmane reconnaît de nombreux droits à chaque musulman.
PREMIER DES DROITS OU DEVOIRS DU MUSULMAN (ENVERS LES AUTRES MUSULMANS).
— Le premier devoir est de dire Salam (bonjour) à ton frère quand tu le rencontres.
Le Salam est une Sunna (tradition) que le prophète a ordonnée aux musulmans.
Il suscite de l’affection dans le cœur des croyants.
Remarque. L’obligation de rendre le bonjour à des non-musulmans existe mais ne se situe pas sur le même plan.
Sounan Ibn Madjah, volume 5, livre 33, Hadith 3699.
« Il a été raconté par Abou Abdour-Rahman Al Jouhani que le Messager de Dieu a dit « Je chevauche contre les Juifs demain. Ne commencez pas la salutation avec eux, et s’ils vous saluent, répondez : Oua 'alaikoum (et sur toi aussi) » (taqyia ?)
N.B. Les hadiths ci-dessous ne concernent que le statut de dhimmis en Dar al Islam qui à notre connaissance n’existe plus depuis 1855, sauf dans les rêves des djihadistes.
Sahih Muslim. Le livre des salutations Livre 39 hadith 16.
Chapitre : L’interdiction de dire bonjour en premier aux gens du Livre, et comment leur répondre.
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Abou Horaira a rapporté que le Messager de Dieu a dit « Ne saluez pas les juifs ni les chrétiens avant qu’ils ne vous saluent et lorsque vous rencontrez l’un d’entre eux sur les routes, forcez-le à vous laisser la partie centrale ».
DEUXIÈME DES DROITS OU DEVOIRS DU MUSULMAN (ENVERS LES AUTRES MUSULMANS).
— Le deuxième droit est d’accepter les invitations des autres musulmans. Si un musulman t’invite chez lui alors tu dois accepter son invitation afin de renforcer les relations amicales et fraternelles entre musulmans.
Répondre aux invitations peut aussi vouloir dire répondre à un appel à l’aide. Le prophète a dit :
« Et s’il t’invite (ou t’appelle), accepte. » Si ton frère musulman t’appelle pour l’aider dans une quelconque affaire licite, alors tu es dans l’obligation de répondre à son appel.
TROISIÈME DES DROITS OU DEVOIRS DU MUSULMAN (ENVERS LES AUTRES MUSULMANS).
— Le devoir de conseil. Un des plus dangereux (nombreux dérapages) devoirs de l’Islam. Et découle directement de la notion de religion assimilée non à une spiritualité personnelle, mais à une Loi (DIN).
« Le troisième devoir est de conseiller ton frère s’il en a besoin. Si on ne te demande pas de conseil, alors tu es autorisé à ne pas en donner. Cependant, tu dois conseiller ton frère si ce qu’il va faire est mal ou nuisible. Interdire le mal est… »
À cet égard les musulmans constituent évidemment la meilleure des communautés humaines. Le Coran est clair à ce sujet, les musulmans ne constituent certes pas une race au sens phénotypique du terme, mais constituent une élite destinée à commander.
Et là encore notre auteur se fonde sur plusieurs versets coraniques.
Chapitre 3, verset 72. « Une partie des gens du Livre dit, au début du jour : croyez à ce qui a été révélé aux croyants, à son déclin : soyez non croyants… Ne croyez qu’à ceux qui suivent votre religion ».
Chapitre 3, verset 104.
« Que soit issue de vous une communauté qui appelle au bien, ordonne le convenable, et interdit le blâmable. Car ce seront eux qui réussiront. »
Chapitre 3, verset 110.
« Vous êtes la meilleure communauté, qu’on ait fait surgir pour les hommes. Vous ordonnez le convenable, interdisez le blâmable et croyez à Dieu. Si les gens du Livre croyaient, ce serait meilleur pour eux, il y en a qui ont la foi, mais la plupart d’entre eux sont des pervers. »
Chapitre 3, verset 118.
« Ô vous qui croyez, n’établissez des liens d’amitié qu’entre vous ».
Chapitre 7, verset 157.
« Ceux qui suivent le Messager, le Prophète qui ne fait pas partie des Gens du Livre qu’ils trouvent écrit (mentionné) chez eux dans la Thora et l’Évangile. Il leur ordonne le convenable, leur défend le blâmable, leur rend licites les bonnes choses, leur interdit les mauvaises, et leur ôte le fardeau et les jougs qui étaient sur eux. Ceux qui croiront en lui, le soutiendront, lui porteront secours et suivront la lumière descendue avec lui ; ceux-là seront les gagnants.”
Chapitre 7, Verset 181.
« Il existe dans ceux que nous avons créés une communauté (oumma) dont les membres se dirigent selon la Vérité et qui, grâce à elle, font régner la justice ».
Chapitre 9, verset 71. « Les croyants et les croyantes sont alliés les uns des autres. Ils commandent le convenable, interdisent le blâmable font leurs prières (salat), acquittent la Zakat * ».
Ce verset serait parfait…
— S’il ne contenait pas en germe une épouvantable dictature religieuse « ils commandent le convenable, interdisent le blâmable », autrement dit la Hisba ou Inquisition musulmane (Mihna).
— S’il n’était pas suivi par l’épouvantable verset 73 : « Ô Prophète, lutte contre les mécréants et les hypocrites, et sois rude avec eux ; l’Enfer sera leur refuge, quelle mauvaise demeure ! »
Le problème en effet ce sont tous ces appels à la haine, car le Coran ce n’est pas un recueil de 50 ou 100 poèmes inspirés comme la célèbre colline du même nom, à la beauté étrange, envoûtante, comme surgie d’un autre monde : le Coran ce sont aussi ces horribles versets abrogeant dits de l’épée (versets 5 du chapitre 9) du combat (versets 29 toujours du chapitre 9) du petit djihad (versets 4 du chapitre 47).
Ce sont aussi toutes ces malédictions destinées aux non croyants, dans l’autre monde ou dès celui-ci. Le problème ce sont tous ces appels à la haine qui parsèment ce livre. Ne vaut-il pas mieux considérer que tous les humains sont frères ? **
Proverbe africain. Quand je le vis pour la première fois, de loin, je crus que c’était un monstre. Je crus ensuite que c’était un animal. Quand il fut encore plus près, je reconnus que c’était un homme. Quand nous fûmes enfin face à face, je m’aperçus que c’était mon frère.
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L’Islam considère que tous les musulmans sont responsables de l’exécution des lois divines et que tous les musulmans doivent exercer un contrôle sur la communauté et l’application des lois. Tout musulman a le devoir de bien agir et d’obliger les autres à le faire aussi et le devoir de combattre le mal et de l’interdire aussi aux autres. Ces devoirs constituent un élément fondamental de l’Islam et un des buts du Coran. L’ordonnance du bien et l’interdiction du mal sont un devoir pour les musulmans et font partie de la profession de foi des chiites duodécimains. Dans le sunnisme, depuis 629 la hisba * désigne ce devoir, qui selon les interprétations peut être un devoir individuel (fard al-'aïn) ou un devoir collectif (fard al-kifaya), lequel est alors accompli par délégation à des autorités compétentes.
* À ne pas confondre avec la Mihna qui, de 833 à 847 (ou plus ?) fut une deuxième Inquisition, mais destinée à lutter contre les hérésies cette fois-ci.
Commentaire de Pierre de La Crau. Dans le meilleur des cas, cela revient à faire de certains membres de la communauté spécialisés des guides spirituels, un peu analogues aux prêtres confesseurs catholiques, lointains successeurs des druides anamchara irlandais. Mais cela peut aussi aboutir au plus effrayant des totalitarismes annihilant la notion même de vie privée. De minimis non curat praetor. Dieu n’a pas à s’occuper de la façon dont je me brosse les dents ou tiens ma fourchette.
QUATRIÈME DES DROITS OU DEVOIRS DU MUSULMAN (ENVERS LES AUTRES MUSULMANS).
--Le quatrième devoir est de… je le supprime de ma liste, car il est ridicule. Ce n’est qu’un reste de paganisme au même titre que la coutume consistant à boire à la santé de quelqu’un. Au mieux une amusante tradition de la vie en société.
CINQUIÈME DES DROITS OU DEVOIRS DU MUSULMAN (ENVERS LES AUTRES MUSULMANS).
— Le cinquième devoir du musulman est de visiter son frère s’il est malade. Tout en rappelant à ce dernier d’implorer le pardon de Dieu. Il est également conseillé d’encourager le malade avec de bonnes paroles, afin de fortifier son âme, d’invoquer Dieu en sa faveur, et de réciter le Coran.
SIXIÈME DES DROITS OU DEVOIRS DU MUSULMAN (ENVERS LES AUTRES MUSULMANS).
— Le sixième devoir est la suite logique du précédent en cas d’échec. Il s’agit de suivre le cortège funéraire. Celui qui accompagne le cortège funèbre d’un musulman, poussé par sa foi et son désir de la récompense de Dieu, et qui reste jusqu’à ce qu’on prie sur lui et jusqu’à la fin de son inhumation, repart avec deux masses de récompenses, chaque masse étant égale au mont Ouhoud. Celui qui participe à la prière et retourne avant son inhumation repart avec une seule masse de récompenses.
SEPTIÈME DES DROITS OU DEVOIRS DU MUSULMAN (ENVERS LES AUTRES MUSULMANS).
— Le septième devoir est de ne pas nuire aux musulmans que ce soit d’une façon ou d’une autre. Faire du mal aux musulmans est un grand péché.
BASE SCRIPTURAIRE.
Sahih Muslim 2580. Le livre de la vertu, les bonnes manières et le resserrement des liens de parenté
Chapitre : L’interdiction de l’oppression.
Salim a rapporté d’après de son père que le Messager de Dieu a dit un jour : tout musulman est frère de son compatriote. Il ne doit ni l’opprimer ni le ruiner, et celui qui répond au besoin d’un frère, Dieu répondra à des besoins encore plus grands en ce qui le concerne et celui qui soulage un musulman de sa misère Dieu le soulagera des épreuves auxquelles il sera soumis le jour de la résurrection, et celui qui n’expose pas (les folies d’un musulman) Dieu dissimulera ses folies le jour de la résurrection.
Sahih al-Boukhari 2442. Oppression. Chapitre : Un musulman ne doit pas opprimer un autre musulman.
Abdullah bin Umar : Le Messager de Dieu a dit : « Tout musulman est frère de tout autre musulman, il ne doit donc pas l’opprimer ni le livrer à un oppresseur. Quiconque a comblé les besoins de son frère, Dieu comblera ses besoins ; quiconque a sort son frère (musulman) d’une mauvaise passe, Dieu le fera sortir des affres du Jour de la Résurrection, et quiconque a fait passer un musulman au crible, Dieu le fera au Jour de la Résurrection. »
HUITIÈME DES DROITS OU DEVOIRS DU MUSULMAN (ENVERS LES AUTRES MUSULMANS).
D’où l’on peut déduire d’une façon plus générale et sauf exception pour tout musulman un 8e droit, le droit à la vie tout simplement.
Chapitre 4 versets 92-93 ; « Il n’appartient pas à un croyant de tuer un autre croyant, sauf par erreur. Quiconque tue par erreur un croyant, qu’il affranchisse alors un esclave croyant et remette à sa famille le prix du sang, à moins que celle-ci n’y renonce par charité. Mais si [le tué] appartenait à un peuple ennemi et qu’il était croyant, qu’on affranchisse alors un esclave croyant. S’il appartenait à un peuple auquel vous êtes liés par un pacte, qu’on verse alors à sa famille le prix du sang et qu’on affranchisse également un esclave croyant. Celui qui n’en trouve pas les moyens, qu’il jeûne deux mois d’affilée pour être pardonné par Dieu. Dieu est Omniscient et Sage. Quiconque tue intentionnellement un croyant, sa rétribution alors sera l’Enfer, pour y demeurer éternellement. Dieu l’a frappé de Sa colère, l’a maudit et lui a préparé un énorme châtiment ».
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NDLR. Ces versets n’interdisent pas le meurtre en général, mais seulement le meurtre d’un musulman. De plus, l’expression « prix du sang » est une allusion directe à la loi du Talion, qui permet à la famille de la victime d’un meurtre d’exiger qu’un membre de la famille du meurtrier soit tué en réparation. Enfin, nul remords n’est exigé du meurtrier puisqu’il lui suffit de se priver d’un esclave (considéré comme un vulgaire bien meuble) ou, s’il n’a pas les moyens de se passer de son esclave, de nourriture, pour obtenir son pardon.
Sur cette fraternité des musulmans entre eux, un hadith rapporté par Muslim donne un exemple afin de ne laisser subsister aucune équivoque.
Sahih Muslim, livre 1, numéro 0173 : rapporté d’après Miqdad b. Asouad… Si j’affronte un infidèle (sur le champ de bataille) et qu’il m’attaque puis me frappe en me coupant une main avec son épée. Puis qu’il s’abrite ensuite (pour se protéger de moi) derrière un arbre et déclare : je deviens musulman pour l’amour de Dieu… puis-je le tuer après qu’il ait dit ça ? Le Messager de Dieu (que la paix soit sur lui) répondit : Ne le tue pas ! J’ai ajouté : Messager de Dieu, il m’a coupé la main et a dit ça uniquement après l’avoir amputée ; puis-je le tuer ? Le Messager de Dieu (que la paix soit sur lui) répondit : Ne le tue pas, car si tu le tues, il serait dans la position où tu étais avant de le tuer [c’est-à-dire musulman] et toi tu serais dans la position où il était avant d’avoir dit ça (la kalima, c’est-à-dire mécréant).
Repetere = ars docendi. Ces versets seraient plus convaincants s’ils prônaient la même chose envers toute l’humanité. La non-croyance en Dieu fait-elle sortir de l’humanité ?
Cet entre-soi ou rejet des « infidèles » est donc le thème dominant, voire obsessionnel, du Coran. Ce dualisme « eux » et « nous » explique le sens d’appartenance ou la forte cohésion sociale qu’on observe dans les pays à majorité musulmane et les difficultés d’intégration qu’éprouvent parfois les musulmans dans des pays à majorité non musulmane.
Autre hadith sur le même sujet.
Sounan Abou Daoud 4352.
Abdullah (b. Massoud) a rapporté que le Messager de Dieu avait dit : « Il n’est pas permis d’ôter la vie à un musulman qui atteste qu’il n’y a pas d’autre dieu qu’Allah, et que je suis le Messager d’Allah, sauf dans un des trois cas suivants : l’adultère d’une personne mariée, une vie pour une vie, et celui qui abandonne sa religion pour se séparer de sa communauté ».
Mes correspondants parisiens me rappellent qu’il n’en va pas de même pour ce qui est des croyants des autres religions dont les droits et devoirs en terre d’Islam sont régis par les contrats de dhimmah (enfin quand il s’agit de gens du livre c’est-à-dire des juifs des chrétiens des sabéens et des zoroastriens) et non par ceux de l’Oummah ou Fraternité musulmane. Avec eux il n’est donc plus question d’amour ou d’amitié, mais de vie sauve et d’autonomie cultuelle en échange d’un impôt appelé djizya payé individuellement de façon « saghirouna »…
En voici quelques exemples.
Chapitre 3, verset 28. « Que les croyants ne prennent pas pour amis des incrédules de préférence aux croyants. Celui qui agirait ainsi n’aurait rien à attendre de Dieu à moins que ces gens-là ne constituent un danger pour vous ».
Chapitre 5, verset 51. « Ô les croyants ! Ne prenez pas pour alliés les Juifs et les chrétiens ; ils sont alliés les uns des autres. Et celui d’entre vous qui les prend pour alliés devient un des leurs. Dieu ne guide certes pas les gens injustes… »
Nous ne mentionnerons pas ici les nombreux versets très négatifs envers les juifs ou les chrétiens et leur promettant l’enfer sinon pour signaler qu’en théologie musulmane LES CHRÉTIENS TRINITARISTES (95 %) SONT AUSSI CONSIDÉRÉS COMME DES MOUCHRIQOUN OU ASSOCIATEURS DONC DES MÉCRÉANTS PAÏENS POLYTHÉISTES ENCOURANT LES MÊMES CHÂTIMENTS.
NEUVIÈME DES DROITS OU DEVOIRS DU MUSULMAN (ENVERS LES AUTRES MUSULMANS).
BASE SCRIPTURAIRE.
Coran chapitre 9, verset 71.
« Les croyants et les croyantes sont alliés les uns des autres. Ils commandent le convenable, interdisent le blâmable accomplissent la Salât, acquittent l’aumône (la Zakat) et obéissent à Dieu et à Son messager. Voilà ceux auxquels Dieu fera miséricorde, car Dieu est Puissant et Sage ».
Les exégètes du Coran sont unanimes pour dire que l’alliance dont il s’agit ici est une alliance d’aide, de compassion, d’amour, mais aussi de secours militaire.
N’oublions pas non plus qu’en terre d’Islam il n’y a pas que le Coran et les hadiths, il y a aussi tout ce que certains intellectuels ont pu en déduire et qu’on appelle fiqh (la sharia)
QUESTION. Le droit canon a-t-il un rapport avec le christianisme ?
RÉPONSE. Avec le christianisme peut-être, avec le catholicisme assurément.
Ci-dessous donc la position des quatre principales Écoles de droit musulman quand un pays musulman est attaqué.
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Ou quand des musulmans sont agressés ou quand ils ne peuvent pas pratiquer leur religion librement.
À Acceptation de la guerre défensive par les écoles juridiques musulmanes classiques
Sans totalement exclure la vocation offensive du petit djihad qui vise à répandre l’islam par la force, les écoles juridiques sunnites, à savoir l’école malékite (a), l’école hanafite (b), l’école chaféite (c) et l’école hanbalite (d) sont unanimes à légitimer le petit djihad en tant que guerre défensive (djihad al-dafaa).
Fondateur de l’école qui portera son nom, Ahmad Ibn Hanbal (vers 780-855) est considéré, par un grand nombre de savants et de jurisconsultes, comme étant « l’homme des hadiths » (rajoul al hadith), puisqu’il a collecté 40 000 « paroles de Mahomet » auxquelles il a consacré un recueil appelé al-mousnad. Cette école se caractérise par son attachement à la lettre des textes coraniques. Elle reconnaît aussi bien la vocation défensive qu’offensive du petit djihad sans pour autant lui reconnaître le même degré « d’obligation ».
Pour Ibn Taïmiyyah, figure de proue de cette école et père spirituel de l’école ouahhabite, fondée au 18e siècle par le Saoudien Mohammed Ibn Abdelouahab (1703-1791.)
PREMIÈRE FATOUA.
— Si l’ennemi entre dans une terre musulmane, il n’y a aucun doute, il est obligatoire pour le plus proche et puis celui qui le suit de le repousser, parce que les terres musulmanes forment une seule terre. Il est obligatoire de se rendre sur le territoire en question sans même la permission des parents ou du maître, et les récits rapportés par l’Imam Ahmad à ce sujet sont clairs.
DEUXIÈME FATOUA.
— Si l’ennemi entre dans une terre musulmane, il n’y a aucun doute qu’il est obligatoire pour ceux qui sont contigus de la défendre. S’ils sont paresseux ou incapables, alors la mobilisation se porte à ceux qui sont aux alentours de ceux-là, puis aux alentours de ceux-ci, jusqu’à ce qu’elle comprenne le monde entier, l’Est et l’Ouest, parce que les terres musulmanes forment une seule terre. Dans de telles conditions, il est obligatoire d’avancer vers le territoire sans même la permission des parents ou du maître.
Ibn Qayyim al-Jaouziyah (1292-1350), qui a déduit dans ses écrits l’existence de quatre formes de petit djihad, va dans le même sens.
C’est pourquoi cela devient une obligation individuelle de se lever et de se lancer au combat, même pour l’esclave, que ce soit avec ou sans la permission du maître, de l’enfant sans la permission des parents, de l’endetté sans la permission du créancier.
La littérature juridique de ces différentes écoles sunnites sur le petit djihad a beaucoup influencé les doctrines développées par les écoles chiites.
QUESTION. Le droit canon a-t-il un rapport avec le christianisme ?
RÉPONSE. Avec le christianisme peut-être, avec le catholicisme assurément.
Pour Youssouf al-Qaradaoui (né en 1926), président de l’Union internationale des savants musulmans, le petit djihad défensif est obligatoire dans les cas suivants.
1) pour libérer les territoires musulmans sous occupation, 2) pour repousser toute agression ou, 3) pour protéger les frontières des États musulmans.
Le discours véhiculé par cette tendance traditionaliste sunnite n’est pas différent de celui défendu par les juristes et théologiens chiites.
En droit musulman, cette légitime défense trouve son fondement dans plusieurs versets coraniques ainsi que dans plusieurs hadiths. Elle englobe aussi bien les ripostes contre les agressions armées effectives que les ripostes contre les menaces qui peuvent peser sur la communauté musulmane.
En termes coraniques, les musulmans sont tenus de repousser toute agression commise contre eux. « Combattez dans le sentier de Dieu ceux qui vous combattent, et ne transgressez pas. Certes, Dieu n’aime pas les transgresseurs » (Coran, chapitre 2, verset 190). Ils sont aussi tenus de se prémunir contre toute menace, puisque le Coran commande à Mahomet : « Et si tu crains vraiment une traîtrise de la part d’un peuple, alors résilie (le traité) de façon équitable. Dieu n’aime pas les traîtres » (Coran, sourate 8, verset 58) ; et aussi, « ne combattrez-vous pas un peuple qui a rompu son pacte ? » (Coran, chapitre 9, verset 13).
Les musulmans sont également autorisés à mener la guerre pour récupérer leurs biens et leurs propriétés et pour mettre fin à l’injustice puisque : « Autorisation est donnée à ceux qui sont attaqués [de se défendre] parce que vraiment ils sont lésés ; et Dieu est certes capable de les secourir. Ceux qui ont été expulsés de leurs demeures, contre toute justice, simplement parce qu’ils disaient « Dieu est notre Seigneur » (Coran, chapitre 22, versets 39, 40) ; et encore, « ceux [les musulmans] donc qui ont émigré, qui ont été expulsés de leurs demeures, qui ont été persécutés dans Mon chemin, qui ont combattu, qui ont été tués, Je tiendrai certes pour expiées leurs mauvaises actions, et les ferai entrer dans les jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, comme récompense de la part de Dieu » (chapitre 3, verset 195).
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B Écoles chiites.
Comme pour la majorité des questions juridiques (fiqhique), les écoles chiites n’ont pas développé de conception particulière du petit djihad en dépit du rôle primordial qu’elles accordent à l’imam (guide suprême) pour autoriser et pour qualifier les actes relevant du djihad.
Deux opinions vont néanmoins diviser les chiites : d’une part, celle qui n’autorise aucune forme de petit djihad tant que l’imam (al-Imam al-montazar) est en occultation et, d’autre part, celle qui confie la tâche de déclarer le petit djihad à son représentant (ouali al-Amr * ou ouali al-Faqih**). Lequel peut s’entourer de savants (oulémas) qui « suivent ses enseignements et ses comportements » pour s’acquitter de cette tâche. Selon l’opinion majoritaire, l’occultation ne met pas fin au petit djihad et l’imam désigné peut le déclarer dans les cas extrêmes pour repousser une agression contre les musulmans.
* Responsable de la communauté.
** Dignitaire religieux.
C Écoles sunnites minoritaires.
Pour Soufyane A’thaouri, connu pour être « l’émir du hadith », le petit djihad n’est pas une obligation religieuse qui incombe à tous les musulmans. Selon lui, le petit djihad ne peut être que défensif.
Pour leur part, les jurisconsultes Ibn Shoubroumah al-Koufi, ‘Ataa Ibn Rabah et ‘Amr Ibn Dinar vont également dans le même sens lorsqu’ils affirment que le petit djihad n’est pas une obligation religieuse au même titre que les cinq piliers de l’islam et que les musulmans ne sont pas tenus de combattre les mécréants si aucune menace ne pèse sur eux (Qaradaoui 2009 : 9, 79).
Les opinions de ces jurisconsultes ont été reprises, quelques siècles plus tard, par Ibn al-Salah al-Shahrazouri (1181-1245), qui interdit l’agression contre les non-musulmans du fait de leur religion. « Il importe de garder les non-croyants en l’état, car Dieu ne veut pas les anéantir et il ne les a pas créés pour être tués ».
Ibn al-Salah ajoute que la punition ne peut intervenir que pour réprimer un acte préjudiciable aux musulmans.
Le philosophe et théologien du 12e siècle, Fakhroddîn al-Razi, s’inscrit, quant à lui, dans cette tendance en déclarant que le Coran n’autorise le combat que contre ceux qui déclarent leur hostilité aux musulmans.
S’agissant du petit djihad, Sayyid Khan proposera de revoir la doctrine classique en le limitant aux cas d’oppressions où les autorités interdisent aux musulmans de pratiquer leur religion. Ce qui du coup devient plus sérieux et plus raisonnable comme politique que l’utopie chrétienne du pacifisme absolu mentionné plus haut.
Certes, ces écoles sont formées par des jurisconsultes peu connus, mais, chose remarquable, leurs opinions semblent attirer de plus en plus l’attention des chercheurs et universitaires musulmans et non musulmans.
Sur le problème plus général du petit djihad offensif, voir notre chapitre sur l’encadrement éthique de la force ET LES SUIVANTS.
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LES MUSULMANS DE FRAÎCHE DATE.
Hadith chrétien rapporté par Luc sourate 15. D’après Luc Jésus a dit.
« Si une femme a 10 pièces d’argent et qu’elle en perd une, ne va-t-elle pas allumer une lampe, balayer la maison et chercher avec soin jusqu’à ce qu’elle la retrouve ?
Lorsqu’elle l’a retrouvée, elle appelle ses amies et ses voisines et dit : 'Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé la pièce que j’avais perdue.' De même, je vous le dis, il y a de la joie parmi les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se repent. »
Il dit encore : « Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : 'Mon père, donne-moi la part de l’héritage qui doit me revenir.' Le père leur partagea alors ses biens.
Peu de jours après, le plus jeune fils ramassa tout et partit pour un pays éloigné, où il gaspilla sa fortune en vivant dans la débauche.
Alors qu’il avait tout dépensé, une importante famine survint dans ce pays et il commença à se trouver dans le besoin.
Il alla se mettre au service d’un des habitants du pays, qui l’envoya dans ses champs garder les porcs.
Il aurait bien voulu se nourrir des caroubes que mangeaient les porcs, mais personne ne lui en donnait.
Il se mit à réfléchir et se dit : 'Combien d’ouvriers chez mon père ont du pain en abondance et moi, ici, je meurs de faim !
Je vais retourner vers mon père et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes ouvriers.'
Il se leva et alla vers son père. Alors qu’il était encore loin, son père le vit et fut rempli de compassion, il courut se jeter à son cou et l’embrassa.
Le fils lui dit : 'Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.'
Mais le père dit à ses serviteurs : 'Apportez [vite] le plus beau vêtement et mettez-le-lui ; passez-lui un anneau au doigt et mettez-lui des sandales aux pieds.
Amenez le veau qu’on a engraissé et tuez-le ! Mangeons et réjouissons-nous, car mon fils que voici était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé.' Et ils commencèrent à faire la fête. » Or le fils aîné était dans les champs. Lorsqu’il revint et approcha de la maison, il entendit la musique et les danses.
Il appela un des serviteurs et lui demanda ce qui se passait.
Le serviteur lui dit : 'Ton frère est de retour et ton père a tué le veau engraissé parce qu’il l’a retrouvé en bonne santé.'
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Le fils aîné se mit en colère et il ne voulait pas entrer. Son père sortit le supplier d’entrer, mais il répondit à son père : 'Voilà tant d’années que je suis à ton service sans jamais désobéir à tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour que je fasse la fête avec mes amis.
Mais quand ton fils est arrivé, celui qui a mangé tes biens avec des prostituées, pour lui tu as tué le veau engraissé !'
Mon enfant, lui dit le père, tu es toujours avec moi et tout ce que j’ai est à toi, mais il fallait bien faire la fête et nous réjouir, parce que ton frère que voici était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé. »
En terres d’Islam, les musulmans de fraîche date ont toujours été considérés comme des musulmans de seconde zone ou des musulmans inférieurs, gardant quelques habitudes « chrétiennes ».
Reconnaissons néanmoins que le Coran ne semble pas avoir fait preuve d’une telle discrimination qui n’était donc qu’une question relevant de la politique.
En principe, convertis de fraîche date (juif persan, etc.) devaient jouir des mêmes droits et des mêmes avantages que les Arabes, puisqu’il faisait partie de la communauté des croyants, l’oumma ; mais dans la pratique leur statut resta très inférieur à celui des musulmans de naissance, les « vieux musulmans », d’où parfois des révoltes de leur part contre le pouvoir en place et les notables. En Orient, ces musulmans de seconde zone sont appelés mouwalladi, en Espagne mouladi (de l’arabe mouwalladoun) d’où plus tard l’inverse : les mudéjars puis morisques 1) une sorte de dhimmitude à l’envers.
Les musulmans de fraîche date furent assujettis à toutes sortes de restriction fiscale, sociale, politique, militaire, et autres. La conversion d’un village tout entier ou d’un quartier entraînant fiscalement parlant d’importantes pertes pour l’État musulman ; les maouali ou mouladi continueront souvent à être, eux aussi, soumis à l’impôt des dhimmis (la djizya en arabe), sous une forme ou sous une autre. La lutte pour l’égalité des droits entre musulmans fut donc l’un des principaux problèmes des premiers siècles de l’islam (voir Ibn Abd Rabbihi 860-940). Un racisme d’autant plus stupide que l’islam n’est devenu alors une grande puissance qu’en adoptant les principes administratifs perses, la médecine indienne, et la philosophie hellénistique, ne l’oublions pas !
En Espagne, les révoltes de mouwalladi (convertis de fraîches dates) furent quasi permanentes contre les Arabo-Berbères immigrés qui s’étaient taillé de larges domaines exploités par les chrétiens, serfs ou esclaves. Les extorsions fiscales et les expropriations allumaient des foyers insurrectionnels continuels de mouwalladi et de mozarabes (chrétiens dhimmis) sur toute la péninsule Hispanique. Les chefs rebelles étaient alors exécutés par crucifixion et les insurgés massacrés à coups d’épée.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir, il y a des musulmans assez hypocrites (au sens non de mounafiqoun, mais de pratiquant la taqiya) ou assez ignorants de la sunna pour prétendre qu’il n’y a pas de hiérarchie dans l’islam, mais les textes fondateurs (Coran hadith Sira) sont formels. Ou alors, ils ne les ont pas ouverts aux bonnes pages.
Force est de constater en effet que la plupart des textes fondateurs concourent à mettre en place une très stricte hiérarchisation de la société.
Dans cette Weltanschaung l’être suprême est évidemment le Dieu créateur tout puissant. Étant bien précisé ici que Satan son ennemi de toujours ne doit pas, lui, faire partie de cet ordre sacré devant qui se soumettre puisque tel est le sens initial du terme islam : soumission à la volonté divine. Étant bien précisé également ici que l’existence d’un Coran incréé à côté de Dieu ou consubstantiel à Dieu (un peu comme Jésus Christ et le Saint-Esprit chez les chrétiens trinitaristes) n’est pas non plus sans poser quelques problèmes théologiques dont furent très conscients les moutazilites.
Les lois de Dieu passent donc avant celles des hommes, même sur terre.
Les musulmans (mâles et libres) passent avant les juifs et les chrétiens (ne parlons même pas des athées ou des païens, rien n’est prévu pour eux).
Les hommes passent avant les femmes.
Les hommes libres avant les esclaves.
Rien ne permet de dire qu’il s’agit là de discriminations ou d’égoïsme, mais ce que nous pouvons dire moralement et intellectuellement parlant c’est que la plupart des textes fondateurs opèrent de telles distinctions.
1) Nom donné aux musulmans d’Espagne devenus sujets des royaumes chrétiens après le XIe siècle, pendant la période de tolérance. Les mudéjars parlaient le castillan ; s’ils avaient oublié leur langue maternelle, cependant ils continuèrent d’écrire en caractères arabes (Aljamiado). La politique de limpieza de sangre « pureté du sang » qui fut mise en œuvre à partir du XVe siècle vit se succéder les persécutions contre cette communauté. Le 14 février 1502 fut promulgué un édit qui imposait aux mudéjars de Castille de choisir entre la conversion et l’exil. Sous le nom de Morisques, d’importantes
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communautés de nouveaux convertis se maintiendront alors en Espagne avant de disparaître totalement à la suite de l’édit d’expulsion de 1609.
LES MUSULMANS DE BASE.
Saint Coran verset 142, chapitre 4. « Les hypocrites cherchent à tromper Dieu, mais c’est Lui qui les trompe. Et lorsqu’ils se lèvent pour la prière, ils se lèvent avec paresse et par ostentation envers les gens. À peine invoquent-ils Dieu ».
Les musulmans orthodoxes situés les plus bas dans l’échelle des valeurs sont donc les modérés qualifiés d’hypocrites. En arabe théologique mounafiqoun (singulier mounafiq). Une telle diabolisation d’un simple défaut courant dans l’espèce humaine est assez rare et doit recouvrir autre chose.
Contrairement à ce que voudraient faire croire certains thuriféraires ou pourfendeurs de l’islam, les premiers musulmans n’ont pas tous été en effet d’emblée des foudres de guerre. Dieu a donc dû intervenir à plusieurs reprises dans le Coran pour rappeler que le petit djihad était aussi nécessaire.
Coran 8, verset 65. « Ô Prophète, exhorte les croyants au combat ! S’il se trouve parmi vous vingt résistants, ils vaincront deux cents mécréants ; et s’il s’en trouve cent, ils vaincront mille mécréants, car ce sont des gens sans intelligence ».
Coran chapitre 2, verset 216. « Le combat vous a été prescrit alors qu’il vous est désagréable. Or, il se peut que vous ayez de l’aversion pour une chose alors qu’elle vous est un bien. Et il se peut que vous aimiez une chose alors qu’elle vous est mauvaise. Dieu seul sait, alors que vous ne savez pas ».
NDLR. Ce verset est très clair. Il souligne que le combat est la volonté de Dieu alors que les hommes et donc y compris le musulman de base préfèrent en général faire l’amour plutôt que faire la guerre. Ce type d’inversion des valeurs est donc typique d’une dérive sectaire.
Particulièrement visés en ce domaine furent les Bédouins.
Ces Bédouins apparemment islamisés n’éprouvaient aucun enthousiasme à s’attaquer à des hommes aguerris : « Dis à ceux des nomades qui sont restés en arrière : vous serez bientôt appelés à combattre contre un peuple doué d’une force redoutable. Vous les combattrez, ou bien ils se soumettront à Dieu. Si vous obéissez, Dieu vous donnera une belle récompense. Si vous tournez le dos – comme vous l’avez fait auparavant – il vous infligera un douloureux châtiment » (48, 16).
« Il n’appartient pas aux habitants de Médine ni à ceux des nomades qui sont autour d’eux de rester en arrière du Prophète de Dieu ni de préférer leur propre vie à la sienne » (9, 120).
« Ceux des nomades qui sont restés en arrière te diront : nos biens et nos familles nous ont accaparés ; demande donc pardon à Dieu pour nous ! Ils disent avec leur langue ce qui n’était pas dans leur cœur » (48,11).
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Ce dernier verset fait allusion à un cas précis. Des tribus bédouines des environs de Médine avaient signé un pacte d’entraide mutuelle avec Mahomet. Ils s’étaient engagés à accomplir le pèlerinage de la Mecque aux côtés des autres musulmans. Ils avaient ensuite jugé plus prudent de ne pas entreprendre ce déplacement, craignant qu’un conflit n’éclatât entre les croyants et les païens.
Le terme mounafiqoun désignait en fait à l’origine les habitants de Yathrib/Médine qui avaient accueilli et donné asile à Mahomet ainsi qu’aux quelques dizaines de musulmans l’ayant suivi dans son exil loin de leur ville natale de La Mecque : les mouhadjiroun. Puis qui avaient été peu à peu surpris déçus ou contrariés par le comportement de ces premiers musulmans qui se comportaient comme en pays conquis. Ensuite qui n’avaient accepté que du bout des lèvres, contraints et forcés, l’accession au pouvoir de Mahomet dans cette cité-État. Leur chef emblématique était un dénommé Abdullah bin Oubaï, un personnage important qui pensait même devenir roi des Médinois.
Il devait y avoir parmi eux des polythéistes païens, mais aussi peut-être des judéo-chrétiens. Participaient aux opérations militaires offensives, surtout à cause de l’appât du butin. En arabe théologique le terme mounafiqoun désigne surtout aujourd’hui ceux qui n’ont de musulman que le nom, qui ne sont pas de vrais musulmans, qui ne se plient pas à toutes les règles de la théocratie musulmane.
Outre les sourates que nous venons de rappeler, il existe également de nombreux hadiths à ce sujet.
Sahih Muslim. Livre38. Hadith 6684. « Zaïd ibn Thabit a dit : Lorsque l’apôtre de Dieu se mit en route pour Ohoud, quelques-uns de ceux qui étaient partis avec lui rebroussèrent chemin. Les compagnons de l’apôtre de Dieu furent alors partagés en deux camps, les uns d’entre eux disaient : il faut tous les tuer. Les autres disaient : Non il ne faut pas les tuer. C’est à cette occasion que fut révélé le verset, etc. ».
Sahih Muslim. Livre 38. Hadith 6686. « Du temps de l’apôtre de Dieu les mounafiqoun, quand l’apôtre de Dieu partit pour livrer bataille, restèrent à l’arrière, et furent ravis de rester chez eux… quand l’apôtre de Dieu revint, ils mirent en avant quantité d’excuses, prêtèrent des serments d’allégeance et pensèrent qu’ils allaient être respectés pour des exploits qu’ils n’avaient pas accomplis ».
Il n’est pas encore interdit de penser, dans ces conditions, que nombre des Médinois figurant dans la catégorie fourre-tout des mounafiqoun (hypocrites) ne furent pas en réalité des opposants réduits au silence ou à la plus extrême prudence (après le mystérieux assassinat du dénommé Kaab ibn al-Achraf), comme Abd-Allah ibn Oubaï (un des chefs de la tribu arabe des Banou Khazradj) ou Abou Amir al-Rahib * (voir chapitre 9, versets 107 et 108), mais des musulmans de base peu désireux de faire le petit djihad.
Il y a tant d’allusions dans le Coran pointant du doigt toute attitude déviante ou simplement suspecte dans la communauté que la tradition islamique a pu facilement dresser un portrait-robot de cette catégorie de musulmans de base. Dans l’Histoire musulmane, nombreux ont été ceux qui ont porté ce titre infamant : surtout des convertis récents, peu sûrs, et mauvais élèves en arabe et en charia. Pour le célèbre juriste ibn Taymiyya, les Hypocrites sont en premier lieu les Mongols du XIIe siècle.
Une telle diabolisation d’un simple défaut courant dans l’espèce humaine, sa seconde nature en quelque sorte, rarement observée dans l’histoire peut s’expliquer de plusieurs façons : les mounafiqoun sont perçus comme un danger, car ils constituent un pôle d’attraction pour les musulmans, un mauvais exemple. Enfin, et c’est un point essentiel, la lutte contre cette catégorie de musulmans n’a pas pu être menée par les armes, comme contre les Juifs : les « mounafiqoun » sont puissants, nombreux, habiles, et refusent le combat. S’opposant par l’inertie et les manœuvres ils savent exploiter les solidarités tribales. Dans le Coran ainsi que nous avons pu le voir un chapitre entier, la sourate 63, leur est donc consacré ; ils y sont évidemment voués à la mort et à l’enfer. C’est une sourate souvent récitée le vendredi, elle figure parmi les 5 plus populaires. Elle est aussi particulièrement violente, puisqu’un appel à leur assassinat s’y trouve, sans ambiguïté : « Ce sont des ennemis. Méfiez-vous d’eux ! Que Dieu les extermine ! »
« Quand les hypocrites viennent à toi, ils disent : « Nous attestons que tu es certes le Messager de Dieu ». Dieu sait que tu es vraiment Son messager… ce sont des ennemis. Méfiez-vous d’eux. Que Dieu les extermine !… Ils disent : « Si nous retournons à Médine, le plus puissant en fera assurément sortir le plus humble ». Or c’est à Dieu qu’appartient la puissance ainsi qu’à Son messager et aux croyants. Mais les hypocrites ne le savent pas ».
Tafsir al Jalalaïn sourate 63. Ils disent : « Si nous revenons de l’expédition contre les Banou Al-Moustaliq, à Médine les plus puissants (ils pensaient à eux-mêmes) expulseront bientôt les plus faibles (c’est-à-dire les croyants) ». Mais la puissance et la victoire n’appartiennent qu’à Dieu et à son messager ainsi qu’aux croyants. Mais les hypocrites l’ignorent.
L’affaire fut sans doute aussi éminemment politique. Ce verset énigmatique est peut-être une allusion à un certain ibn Oubaï, ex roi de Yathrib et à sa façon de conduire les affaires de la ville. De nombreux hadiths semblent l’indiquer.
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Ibn Ichaq, Sirat Rasoul Dieu, la vie de Mahomet. « Les Banou Qaïnouqa furent les premiers des Juifs à rompre l’accord avec l’apôtre de Dieu, et à partir au combat, entre Badr et Ouhoud. Et l’apôtre de Dieu les assiégea jusqu’à ce qu’ils se rendent sans condition. Abdallah ibn Oubayy alla le trouver (c’étaient des alliés des Khazradj)…………… l’apôtre répondit : tu pourras les avoir. Mon père Ishaq b. Yakar m’a dit d’après Oubada b. Al-Oualid b. Oubada b. Al-Samit qui a déclaré : quand les B. Qaïnouqa ont combattu l’apôtre, Abdoullah b. Oubaï a épousé leur cause et les a défendus… »
NDLR. Les mounafiqoun, même s’ils n’agissent pas ouvertement contre l’islam, constituent évidemment un danger permanent, par le simple fait de leur existence, pour le pouvoir de Dieu et de son prophète. Les complots sont effectivement possibles, mais rien ne permet de les confirmer. En revanche, ce que l’on sait, c’est qu’ils servent de prétexte au déclenchement de certaines purges, les musulmans craignent surtout les alliances avec les juifs, et la trahison en temps de guerre.
Sahih Boukhari 33, Sahih Muslim 59. D’après Abou Horaïra, le Messager de Dieu a dit : les signes auxquels on peut reconnaître un hypocrite sont au nombre de trois même s’il jeûne, prie, et prétend être musulman : s’il parle, il ment, si on a confiance en lui, il trahit ; s’il promet, il manque à sa parole.
Sahih Boukhari. Livre 30. Hadith 108. Quand le prophète partit pour la bataille d’Ouhoud, certains de ses compagnons (des hypocrites) rentrèrent (chez eux). Une partie des croyants fit remarquer qu’ils devraient tuer ceux (ces hypocrites) qui étaient rentrés chez eux, mais d’autres disaient qu’il ne fallait pas les tuer. Alors l’inspiration divine révéla : « Mais que vous arrive-t-il de vous diviser ainsi à cause des hypocrites » (chapitre 4, verset 88). Le prophète ajouta : « Médine expulsera les mauvais compagnons comme le feu purge le fer de ses impuretés ».
Sahih Muslim. Livre 38. Hadith 6677. Rapporté par Zaïd b. Arqam. « Nous avions entrepris avec le Messager de Dieu un déplacement au cours duquel nous dûmes faire face à de nombreuses difficultés. Abdoullah b. Oubaï dit à ses amis : Ne donnez rien de ce que vous avez à ceux qui sont avec le Messager de Dieu jusqu’à ce qu’ils s’en aillent…… Je suis allé trouver l’apôtre de Dieu et lui ai rapporté ces propos. Il envoya quelqu’un demander à Abdoullah b. Oubaï s’il avait dit ça ou non. Il jura qu’il n’avait rien dit de tel et assura que c’était Zaïd qui avait menti ».
La puissance d’ibn Oubaï dut en tout cas être grande dans Yathrib/Médine, car Mahomet fut quand même contraint de lui rendre hommage à l’occasion de sa mort.
Sahih Muslim. Livre 38. Hadith 6694. Jabir a rapporté alors que le Messager de Dieu n’était plus très loin de Médine, il y eut un si fort coup de vent que la montagne en fut comme ébranlée. L’apôtre de Dieu dit alors : « Ce vent a été suscité pour signaler la mort d’un hypocrite » et quand il fut à Médine, on sut qu’en effet un hypocrite notoire venait de mourir…
Ahmad ibn Hanbal, Musnad, tome 2, p.18. Après que son père fut mort, Abdallah vint trouver le messager de Dieu et lui demanda : « O Messager de Dieu ! Veux-tu me donner ton manteau ? Je voudrais qu’il serve de linceul à mon père ».
Ensuite il lui demanda : « O Messager de Dieu ! Veux-tu conduire sa prière funèbre et prier pour son pardon ? »
La sépulture d’ibn Oubaye.
Sahih Boukhari. Tome 2. Livre 23. Hadith 433. Jabir ben Abdoulah a dit. L’apôtre de Dieu s’est rendu sur la tombe d’Abdoullah ibn Oubaï, il le fit exhumer, le mit sur ses genoux ensuite il cracha un peu de sa salive dans la bouche, puis l’enroula dans son manteau, Dieu seul sait (pourquoi).
CONCLUSION.
Il y a tant d’allusions aux « hypocrites » ou « mounafiqoun » dans le Coran, que l’on peut dresser un véritable portrait-robot de cet adversaire omniprésent. Ces musulmans qualifiés d’hypocrites ou de « mounafiqoun » (singulier « mounafiq ») sont vilipendés à outrance dans le Coran et la tradition musulmane ; qui regroupent sous cette appellation des croyants jugés trop mous et pas assez agressifs (notamment au moment des combats), de simples opportunistes ou supposés tels, des suivistes sans énergie qui ne veulent pas rompre avec les infidèles ; ou des gens sincères qui déplaisent au chef, voire tout simplement supportent mal l’autocratie. Un chapitre porte d’ailleurs leur nom, le chapitre N° 63, le chapitre dit des « mounafiqoun ». C’est un chapitre souvent récité le vendredi et qui fait partie des cinq chapitres les plus populaires. Il est aussi particulièrement violent. Le Coran assimile donc clairement les éléments modérés de la population à des hypocrites dont il faut se méfier voire qu’il faut combattre résolument.
Le Coran promet en effet les châtiments les plus sévères à ceux qui n’adhéreraient qu’à une partie de ces lois divines et pas aux autres, ce qui exclut par définition tout islam dit « modéré ».
Chapitre 2, verset 85. « Croyez-vous donc à une certaine partie du Livre et restez-vous incrédule à l’égard d’une autre ? ».
Chapitre 4, verset 91. « Vous en trouverez d’autres qui désirent vivre tranquilles avec vous et tranquilles avec les leurs… S’ils ne se rendent pas à vous et ne déposent pas les armes, capturez-les et TUEZ-LES où que vous les acculiez ! Nous vous donnons tout pouvoir sur eux. »
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Chapitre 4, verset 141. « Les hypocrites et les incrédules. Ils sont là à vous épier ; si Dieu vous accorde une victoire, ils disent : « ne sommes-nous pas avec vous ? Et si les incroyants ont l’avantage, ils leur disent : « n’est-ce pas nous qui l’emportions sur vous et qui vous défendions contre les croyants ? ».
Chapitre 33 versets 60 à 61 « Si les hypocrites, ceux dont les cœurs sont malades, ceux qui fomentent des troubles dans la cité, ne se tiennent pas tranquilles, nous te lancerons en campagne contre eux et ils ne resteront plus longtemps dans ton voisinage. Ils sont maudits, où qu’on les trouve, ils seront pris et tués sans pitié ».
Chapitre 66, verset 9. « Ô prophète ! Combats les incrédules et les hypocrites, sois dur envers eux. Leur demeure sera l’enfer quelle triste fin ! »
* On ne sait pas exactement quelle était alors la religion d’Abou Amir al-Rahib au moment des faits. Ibn Ichaq rapporte qu’il était allé trouver Mahomet après son arrivée à Médine pour lui demander quelle était sa religion. Et Mahomet aurait répondu : « J’ai apporté la hanifiyya, la Din (religion) d’Abraham ». Abou Amir aurait déclaré : « C’est aussi la religion que j’observe ». Mahomet aurait alors répondu « c’est faux ! » Abou Amir aurait répliqué : « Si ! » et aurait ajouté que Mahomet avait introduit dans cette hanifiyya des choses qui n’en faisaient pas partie ».
La tradition musulmane l’a imaginé finissant ses jours comme moine à la cour de l’empereur chrétien byzantin Héraclius.
« Cette année-là [632], Abou Amir al-Rahib mourut à la cour d’Héraclius [l’empereur byzantin], et Kinana b. Abd Yalil ainsi qu’Alqama b. Oulatha se disputèrent son héritage (Tabari. Les dernières années du Prophète).
LES BONS MUSULMANS (OU LES MEILLEURS DES MUSULMANS).
Ainsi que nous avons l’occasion de le voir avec le cas des kouffar, pour l’islam, les êtres humains n’ont pas tous la même valeur. Mais ne sont pas égaux non plus les musulmans entre eux suivant leur place dans la hiérarchie sociale. Certains sont plus méritants que d’autres, le Coran le spécifie explicitement.
Versets 75-76, chapitre 16. « Dieu propose en parabole un serviteur – un esclave qui ne peut rien – et un homme à qui nous avons accordé d’amples ressources dont il fait des aumônes secrètes et publiques. Ces deux hommes sont-ils égaux ?
… Dieu propose en parabole deux hommes : l’un est muet, il ne peut rien faire, il est à la charge de son maître. Quelque lieu où celui-ci l’envoie, cet homme ne lui rapporte rien de bon. Est-il l’égal de celui qui ordonne l’équité et qui suit une voie droite ? » (donc du bon musulman ? Poser la question c’est déjà y répondre).
Verset 19, chapitre 9. « Placerez-vous celui qui donne à boire aux pèlerins et qui est chargé du service de la mosquée sacrée, au même rang que celui qui croit en Dieu et au Jour dernier et qui lutte dans le chemin de Dieu ? Ils ne sont pas égaux devant Dieu ».
Note de la rédaction. Notre idée première avait été de mettre ces versets en parallèle avec les béatitudes, mais il est clair dans les 4 évangiles que cet heureux destin ne se réalisera que dans la vie future et que pour ce qui est de la vie présente aucun changement de situation n’est prévu.
Par contre il y a lieu de noter qu’on est là aux antipodes de la religion chrétienne qui prétend être surtout faite pour les pécheurs.
Hadith ou sourate du Coran des chrétiens maintenant.
Saint Matthieu 20, 1 à 16. « Il en va du royaume des Cieux comme d’un propriétaire qui sortit au point du jour afin d’embaucher des ouvriers pour sa vigne. Il convint avec eux d’un denier pour la journée et les envoya à sa vigne. Sorti vers la troisième heure, il en vit d’autres qui se tenaient, désœuvrés, sur la place, et leur dit : ‘Allez, vous aussi, à ma vigne, et je vous donnerai un salaire équitable’. Et ils y allèrent. Sorti de nouveau vers la sixième heure, puis vers la neuvième heure, il agit de même. Vers la onzième, il sortit encore, en trouva d’autres qui se tenaient là et leur dit : ‘Pourquoi restez-vous ici tout le jour sans travailler ?’ C’est que, lui disent-ils, personne ne nous embauchés’. Il leur dit : ‘Allez, vous aussi, à ma vigne’.
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Le soir venu, le maître de la vigne dit à son intendant : ‘Appelle les ouvriers et remets à chacun son salaire, en remontant des derniers aux premiers’.
Ceux de la onzième heure vinrent donc et touchèrent un denier chacun. Les premiers, venant à leur tour, pensèrent qu’ils allaient toucher davantage ; mais c’est un denier chacun qu’ils touchèrent eux aussi. Tout en le recevant, ils murmuraient contre le propriétaire : ‘Ces derniers venus n’ont travaillé qu’une heure, et tu les as traités comme nous, qui avons porté le fardeau de la journée, avec sa chaleur’.
Alors il répliqua en disant à l’un d’eux : ‘Mon ami, je ne te lèse en rien : n’est-ce pas d’un denier que nous sommes convenus ? Prends ce qui te revient et va-t’en. Il me plaît de donner à ce dernier venu autant que toi : n’ai-je pas le droit de disposer de mes biens comme il me plaît ? ou faut-il que tu sois jaloux parce que je suis bon ? »
Ce que Celse avait déjà critiqué en son temps.
« Voyons maintenant à quel genre de personnes les chrétiens s’adressent. « Tous ceux, disent-ils, qui sont pécheurs, dépourvus de sens, les enfants, et, pour parler plus généralement, les malheureux, auront droit au royaume de Dieu ». Mais n’appelle-t-on pas pécheurs ceux qui sont injustes, voleurs, cambrioleurs, empoisonneurs, sacrilèges, et profanateurs de sépultures ? Qui d’autres en effet inviterait un homme s’il s’adressait à une assemblée de voleurs ?
Les chrétiens disent que c’est pour les pécheurs que leur Dieu est venu. Pourquoi n’est-il pas venu pour ceux qui sont sans péché ? Qu’y a-t-il de mal à ne pas avoir commis de péché ?
Le grand Dieu recevra l’homme injuste s’il se repent du mal qu’il a fait, mais ne recevra pas l’homme juste, bien qu’il se soit tourné vers lui, paré de vertu dès le début ?
Les personnes qui président comme il se doit un procès font taire les accusés qui sanglotent pitoyablement sur leurs mauvaises actions devant eux, de peur que leur conviction ne soit déterminée plus par l’émotion que par rapport à la vérité ; alors que le grand Dieu ne déciderait pas conformément à la vérité, mais en se montrant sensible aux flatteries ?
Tous les hommes, sans distinction, doivent alors être invités, puisque tous sont effectivement pécheurs.
Qu’est-ce que cette préférence pour les pécheurs par rapport aux autres ?
Les chrétiens se répandent en appels à la conversion des pécheurs, parce qu’ils ne sont pas en mesure de gagner ceux qui sont vraiment bons et justes, et ouvrent donc leurs portes aux plus impies et perdus des hommes.
Et pourtant, il est évident pour tout le monde que personne, que ce soit sous la menace d’un châtiment, et encore moins par la miséricorde, ne peut en réalité complètement amender ceux qui sont pécheurs par nature et par habitude, car changer de nature est une chose extrêmement difficile. Par contre ceux qui sont sans péché sont destinés à une vie meilleure.
Les chrétiens affirment que le grand Dieu sera capable de faire tout ceci, mais il ne saurait faire quoi que ce soit de mal, car même si l’on admet qu’il le peut, il n’aura pas la volonté le faire.
Leur grand Dieu, comme ceux qui sont submergés par la pitié, étant lui-même ainsi fait, soulage la peine des coupables par pitié pour leurs gémissements, mais se débarrasse de l’homme de bien qui ne fait rien de ce genre, ce qui est le comble de l’injustice ».
*Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir avec l’article de Bat Ye’or sur les dhimmiyoun, les non-musulmans sont certes dispensés du paiement de l’aumône obligatoire ou zakat, mais c’est pour être soumis à un impôt spécial, la djizia dont il est précisé dans le Coran (le verset 29 du chapitre 9), qu’il doit être payé personnellement et dans des conditions humiliantes (an yadin oua houm saghirouna).
Inversement la charia interdit aussi que les produits de la zakat (c’est-à-dire de l’aumône obligatoire) soient également utilisés au profit des non-musulmans. On ne peut pas faire l’aumône à un non-musulman.
**Sauf cas de légitime défense proportionnelle à l’attaque et peine de mort en cas de meurtre particulièrement odieux. QUAND IL N’Y A AUCUN DOUTE SUR LA CULPABILITÉ ET QU’IL NE S’AGIT PAS DE QUELQU’UN DE PÉNALEMENT IRRESPONSABLE.
Les musulmans les plus agréables aux yeux de Dieu sont évidemment et fort logiquement ceux qui pratiquent le petit djihad personnellement, ils sont supérieurs à ceux qui ne font rien et restent chez eux.
Plusieurs versets le précisent.
Verset 95, chapitre 4. « Ne sont pas égaux ceux des croyants qui restent chez eux – sauf ceux qui ont quelque infirmité – et ceux qui luttent corps et biens dans le sentier de Dieu. Dieu donne à ceux qui luttent corps et biens un grade au-dessus de ceux qui restent chez eux. À chacun Dieu a promis une
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bonne récompense, mais Dieu a mis les combattants au-dessus des non-combattants en leur accordant une rétribution immense ».
Verset 19, chapitre 9. « Placerez-vous celui qui donne à boire aux pèlerins et qui est chargé du service de la mosquée sacrée, au même rang que celui qui croit en Dieu et au Jour dernier et qui lutte dans le chemin de Dieu ? Ils ne sont pas égaux devant Dieu ».
Verset 20, chapitre 9. « Ceux qui auront combattu dans le chemin de Dieu avec leurs biens et leur personne seront placés sur un rang très élevé auprès de Dieu ».
Verset 10, chapitre 57 : « Vous n’êtes pas tous semblables : il y en a parmi vous qui ont dépensé leurs biens et qui ont combattu avant la victoire alors que d’autres ont attendu pour offrir leurs biens et s’engager dans le combat que la victoire ait été déjà remportée. Les premiers seront élevés de plusieurs degrés au-dessus des autres ».
Et bien entendu, alors que l’enfer attend les non-croyants, les délices du paradis, vin compris, attendent les vrais croyants. Verset 12 à 40 du chapitre 56. C’est une énième application du grossier procédé dit de la carotte et du bâton ! Pour ce qui est des fameuses Houris, outre le fait qu’en soi elles constituent un appât sans équivalent pour les musulmans (rien de tel n’est prévu apparemment pour les croyantes) une polémique a été lancée par Christophe Luxenberg sur la signification exacte de ce terme.
D’après l’analyse avancée par ce professeur de l’université de Nimègue aux Pays-Bas, qui s’appuie pour cela sur les hymnes d’Éphrem le Syrien ; il y aurait au paradis islamique « des raisins blancs », « clairs comme le jour », plutôt que des vierges aux yeux de biche toujours consentantes (les houris). Pour Luxenberg, le contexte est clair : ce sont de la nourriture et des boissons qui sont offertes, et non de jeunes filles.
En syriaque, le mot « hour » est un adjectif féminin pluriel qui signifie blanc, dans lequel le mot « raisin » est implicite. Les éphèbes immortels ou les jeunes filles semblables à des perles décrites par des chapitres, comme le 56, seraient nés d’une interprétation erronée d’une expression syriaque signifiant « des raisins frais » (ou « des boissons ») ; que ceux qui ont mérité le Paradis auront le plaisir de goûter, par opposition aux breuvages bouillants réservés aux infidèles et aux damnés.
Le verset qui promet 70 vierges aux martyrs arrivant au paradis ne parlerait par exemple, en fait que de « fruits blancs comme le cristal » au lieu de « vierges aux grands yeux » ! Ce qui change tout effectivement ! Mais une telle erreur est-elle possible ? Le sens traditionnel accordé à ce verset est bien plus vraisemblable (psychologie de soudards qui plus est issus de tribus bédouines au machisme exacerbé, prenant à la lettre la notion de « repos du guerrier »).
Bref, du point de vue poétique encore une fois c’est admirable (ça rappelle les légendes irlandaises sur l’autre monde des guerriers), au point de vue philosophique c’est lamentable. De toute façon, ce n’est pas à nous, barbares druides d’Extrême-Occident, de trancher de telles querelles entre spécialistes.
Les thuriféraires de l’Islam ont raison de dire que l’islam prêche l’amour et l’amitié, mais ils oublient de préciser que c’est d’abord et avant tout à l’égard de ceux qui partagent la même foi qu’eux. Il n’y a qu’à demander aux femmes ou filles yézidies ayant eu le malheur de vivre sous la férule de l’État islamique (en Irak en 2015).
L’islam en effet n’insiste pas autant que le christianisme sur l’empathie à éprouver ou concrétiser envers ceux qui ne partagent pas la même foi en Dieu. C’est juste une option en plus. La parabole du bon Samaritain n’a pas son équivalent en terre d’Islam (Dar al islam).
Pour mémoire la voici. Saint Luc, 10, 29 à 37. « Qui est mon prochain ? Jésus reprit : « un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et tomba au milieu de brigands qui après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à demi mort. Un prêtre, par hasard, descendait par ce chemin ; il le vit, prit de l’autre côté de la route et passa. Pareillement un lévite, survenant en ce lieu, le vit, prit l’autre côté de la route et passa. Mais un Samaritain [c’est à dire un homme appartenant à un peuple ennemi juré des juifs], qui était en voyage, arriva près de lui, le vit et fut touché de compassion. Il s’approcha, banda ses plaies, y versant de l’huile et du vin, puis le chargea sur sa propre monture, le conduisit à l’hôtellerie et prit soin de lui. Le lendemain, il tira deux deniers, les donna à l’hôtelier, en disant : « Aie soin de lui, et ce que tu auras dépensé en plus, c’est moi qui le paierai lors de mon retour ». Lequel de ces trois, à ton avis, s’est montré le prochain de l’homme tombé aux mains des brigands ?
Notre conclusion sera donc la suivante en ce domaine : toute personne, que ce soit un journaliste ou un homme politique (de toute façon ce sont les mêmes) qui affirme que l’islam n’est qu’amour, liberté, fraternité……… MENT… SI ELLE NE PRÉCISE PAS QUE C’EST D’ABORD ET AVANT TOUT ENTRE BONS MUSULMANS.
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LES MOSQUÉES DE LA DISCORDE (MASJID AL-DIRAR).
Avertissement au lecteur. Dans ce chapitre, chaque fois qu’il sera question de chiisme ou de chiites, il s’agira des chiites extrémistes et non des chiites modérés que nous connaissons. Et quand nous parlerons de soufis il ne s’agira pas des soufis guerriers des ribats (mi-monastères, mi-forteresses).
La répression des hérésies en islam (zindiq = hérétique) est un chapitre de l’histoire musulmane très peu connu en Occident.
La notion de zindiq a fini par englober toutes sortes de libres penseurs, athées ou matérialistes. Averroès lui-même fut exilé pour hérésie, et ses livres brûlés en public à Cordoue (déjà ! Quand ils entendent le mot culture, ils sortent leur revolver !). Ce n’était pourtant pas un mauvais musulman. Il prescrivait la déportation pour les chrétiens suspects de sympathie envers la Reconquista ; et de durs châtiments corporels pour les musulmans de fraîche date, considérés comme des sujets de seconde zone ou des musulmans inférieurs : les maouali ou mouladi (de l’arabe mouwalladoun), gardant quelques habitudes « chrétiennes ».
Le premier à avoir donné l’exemple de la lutte contre les hérésies a évidemment été Mahomet lui-même. C’est une sombre histoire évoquée à demi-mots par les versets107 à 110 du chapitre 9.
Il semblerait en effet qu’un Médinois appelé Abou Amir ar-Rahib ait voulu construire un lieu de culte à lui à l’extérieur de Médine, avec l’accord de Mahomet pour commencer, puis contre sa volonté.
On ignore quelle était précisément la religion de cet homme. Peut-être était-il plus ou moins christianisé puisque la tradition musulmane l’associe étroitement à l’empereur byzantin Héraclius.
Quoi qu’il en soit, après avoir approuvé la construction de cet autre lieu de culte, Mahomet changea d’avis en 630 au retour de l’expédition très controversée, ou ratée (un coup d’épée dans l’eau) de Tabouk et le fit brûler. Abou Amir et ses fidèles durent se réfugier à La Mecque afin de pouvoir continuer à pratiquer librement leur culte.
On n’en sait guère plus ! On ignore notamment sur quels points de doctrine il y avait précisément divergence. Ce ne fut peut-être qu’une querelle de personne.
En tout cas voici les versets du Coran évoquant cette Masjid al-Dirar ou Mosquée de la Discorde.
« Ceux qui ont édifié une mosquée pour en faire un motif de rivalité, d’impiété et de division entre les croyants, qui la préparent pour celui qui auparavant avait combattu Dieu et son Envoyé et jurent en disant : « Nous ne voulions que faire le bien ! » Dieu atteste qu’ils mentent. Ne fréquente jamais cette
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mosquée. Car une mosquée fondée dès le premier jour, sur la piété, est plus digne. On y trouve des gens qui aiment bien se purifier, et Dieu aime ceux qui se purifient. Lequel est plus méritant ? Celui qui a fondé son édifice sur la piété et l’agrément de Dieu, ou bien celui qui a placé les assises de sa construction sur le bord d’une falaise croulante et qui croule avec elle dans le feu de l’Enfer ? Dieu ne guide pas les hommes injustes. L’édifice qu’ils ont construit sera toujours une source de doute dans leurs cœurs, jusqu’à ce qu’ils se déchirent ».
LES PREMIÈRES INQUISITIONS.
Hérésie se dit Zandaqa en arabe, et hérétique Zindiq. C’est un terme d’origine pahlavie. Il fut en usage sous les Sassanides, chez les mazdéens et dans les pays où l’on parlait araméen.
Le terme zindiq fut d’abord appliqué à ceux qui adhéraient aux doctrines dualistes inspirées des religions iraniennes, comme le manichéisme, tout en professant l’islam. Le zindiq était par conséquent un hérétique, coupable de zandaqa (hérésie). Cette expression fut plus tard employée pour désigner tous ceux qui s’écartaient de l’orthodoxie, ou dont les croyances étaient susceptibles de menacer l’ordre public.
Ces hérétiques appartiennent en général aux vieilles familles persanes assimilées par l’islam qui, suivant le même chemin que les chou’oubites (une secte politico sociale à tendance nationaliste), trouvent un intérêt à la renaissance des traditions religieuses perses ; et qui, de ce point de vue, réagissent contre le caractère purement arabe de l’Islam. Ensuite, ce sont des libres penseurs, qui s’élèvent contre le despotisme du dogme islamique, et qui ne reconnaissent que la loi morale. Parmi ces derniers, il existe une sorte d’ascétisme monastique étranger à l’islam, qui s’explique par l’influence du bouddhisme. Le terme désignait à l’origine plus précisément les manichéens et les mazdakites 1) auxquels les chrétiens ajoutaient les marcionites 2) et les daïsanites 3), des adversaires religieux accusés de pratiques abominables. En arabe, il fut étendu d’une part à tout fidèle de la population indigène de l’Iraq dont la religion, obscure, était inconnue du Coran et de l’histoire musulmane des religions (hérésie au sens large ou abusif du terme), et d’autre part à tout individu d’origine musulmane dont la pensée la conduite morale ou l’attitude politique semblait impliquer une foi douteuse, le zindiq étant, juridiquement, l’individu qui se dit croyant alors qu’il est « au fond » un Infidèle (hérésie au sens strict du terme). Donc un hypocrite.
Après la mort d’Hicham b. Abd al-Malik le pouvoir omeyyade commença de s’effondrer. Sa chute entraîna l’affaiblissement de l’ordre politico-religieux qu’il représentait, et inaugura une période d’instabilité politique, de désordre social et d’anarchie religieuse qui ne prit fin qu’avec l’arrivée d’al-Mahdi et son retour à la ligne orthodoxe suivie par les Omeyyades.
Durant cette période en effet resurgirent les religions du monde conquis par les musulmans, principalement dans le Khorasan et la Babylonie.
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Dans la première région se trouvaient des chrétiens, des manichéens, des marcionites 2) très probablement, des bouddhistes, et des paysans chez qui subsistaient, semble-t-il, des croyances mazdakites1).
Quant à la géographie religieuse du pays où l’on parlait araméen, elle était d’une rare complexité. À côté des juifs, des chrétiens divisés en melkites, jacobites, nestoriens et messaliens, et des judéo-chrétiens, le pays abritait des îlots païens et une multitude de sectes gnostiques qui, alimentées à partir d’Édesse par la gnose hellénistique, pullulaient en marge du christianisme, du judaïsme et du mazdéisme, sur cette terre pétrie de mythes et de sciences occultes. Marcionites 2), daïsanites 3), manichéens, elkasaïtes 4) sabéens mandéens 5), et beaucoup d’autres s’y coudoyaient, et y déversaient leur propagande religieuse. Les Araméens, ne se considérant ni comme Persans ni comme Byzantins, exprimèrent à leur manière leur indépendance : ils se constituèrent en ethnies religieuses souvent mouvantes et missionnaires dont chacune avait son chef, son Église, ses Écritures, et presque son dialecte araméen doté d’un système d’écriture. La défaite des Byzantins, persécuteurs des chrétiens non-melkites et des païens, et l’effondrement de l’église mazdéenne causé par la chute du pouvoir sassanide, permirent à ces religions, qui, des régions limitrophes, assiégeaient l’Iran, et contre lesquelles le clergé mazdéen n’avait cessé de lutter, de se réactiver. Libérées par les Arabes, elles reprirent littéralement vie et connurent, pour certaines d’entre elles au moins, une véritable renaissance.
Le mazdéisme, dépossédé de la civilisation sassanide qui échut en héritage aux musulmans, entra par contre dans une agonie définitive ; le bouddhisme, ayant déjà emprunté la route de la soie en Asie centrale, route empruntée aussi par la suite par des missions manichéennes et nestoriennes, ne chercha pas à s’infiltrer dans l’Ouest ; certaines communautés araméennes étaient fermées et demeurèrent dans un anonymat relatif. En revanche, les fidèles d’autres communautés tels que les chrétiens, les manichéens regroupés en Irak, les marcionites 1), et dans une moindre mesure les daïsanites 2), étaient d’ardents missionnaires. Ils arabisèrent leurs Écritures et, se considérant très supérieurs aux Arabes du point de vue religieux et culturel, se lancèrent à la conquête du monde nouveau qui s’offrait à eux. Cette activité missionnaire était accompagnée d’un côté d’une profonde pénétration de la culture musulmane dans la culture araméenne et de l’autre, d’une charge critique envers l’Islam. Exercés à la polémique et à la critique de la Bible depuis Marcion jusqu’à Mani, les dualistes gnostiques s’attaquèrent au Coran, auquel s’attaquèrent également, mais d’un autre point de vue, les chrétiens.
Les contacts entre les fidèles de ces multiples religions et les théologiens musulmans qui, missionnaires eux aussi, les réfutaient favorisèrent d’un côté un brassage d’idées et de notions dans le domaine commun et multiconfessionnel du kalam, et de l’autre, la naissance d’esprits indépendants, critiques et contestataires, plutôt sceptiques.
Pendant cette même période, le kalam, avec ses différentes tendances, connut, au sein de la communauté musulmane, son premier essor notamment avec Jahm b. Sfouane dans le Khorasan, les « deux Ouasil » (= Ouasil b. Ata et Amr b. Oubaïd) à Bassora, et le jeune Hicham b. al-Hakam à Koufa. Il avait pour principe l’examen rationnel libre des vérités de la foi. Principe favorisant la prolifération des « innovations » (bida) auquel les traditionnistes, ceux pour qui l’autorité en matière de foi revenait non pas à la Raison, mais à l’enseignement du Prophète rapporté dans le Hadith, étaient violemment opposés.
En réponse à ce moutazilisme naissant, qui s’opposait à la vision de l’islam des orthodoxes de l’époque, Abou al-Hasan al-Achari, initialement lui-même moutazilite, développa la méthode dite « Ilm-al-Kalam », fondée sur la dialectique d’origine grecque et fonda ainsi l’école de pensée acharite.
Le kalam cherche à répondre à des interrogations concernant la théodicée, l’eschatologie, l’anthropologie, la théologie négative, le libre arbitre (qadar), et la religion comparée. Les premiers moutakallimin (partisans du kalam) furent recrutés par le chrétien Hounaïn ibn Ichaq pour la Maison de la sagesse sous les califes abbassides de Bagdad. Ils ont collecté, traduit et synthétisé tout ce que le génie des autres cultures (grecque, indienne, iranienne) a pu produire, avant d’entreprendre les commentaires de ces œuvres et jeter les bases de la philosophie musulmane au IXe siècle et Xe siècle. Elle influencera plusieurs madhahib.
Bien qu’inspirée par la méthode de raisonnement rationaliste de la philosophie antique (falsafa), le kalam s’en différencie sur plusieurs points, en particulier la nature de Dieu et celle de l’âme.
Ainsi, Aristote cherche à démontrer l’Unicité de Dieu, mais il considère qu’il ne peut être le créateur de l’univers. La connaissance de Dieu n’est alors qu’une extension de la connaissance de l’univers et par conséquent elle n’a nul besoin d’être le fruit d’une révélation ou prophétie. Elle peut être le fruit de la seule raison et de la seule connaissance. Or cela est contraire aux enseignements du Coran, qui insiste sur l’idée de révélation de dieu aux hommes.
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Les philosophes péripatéticiens de la Grèce antique pensaient que l’âme était seulement une aptitude et une capacité naturelle, qui pouvait atteindre d’une façon passive la perfection. Cette capacité pouvait, à force de vertu et par la connaissance, être qualifiée pour une union avec l’intellect et ensuite seulement être unie à Dieu. Pour admettre cette théorie, il est nécessaire de nier l’immortalité de l’âme. Ce point évidemment choquait les Moutakallimins.
Par opposition à la falsafa, les moutakallimins ont, avant toute chose, dû établir un système philosophique qui démontrait la création de la matière et ont adopté à cette fin, la théorie des atomes énoncée par Démocrite d’Abdère. Les atomes ont été créés par Dieu et sont créés à chaque fois qu’il le désire. Les corps naissent ou meurent par l’agrégation ou la dislocation de ces atomes. Cependant cette théorie ne règle pas les objections philosophiques à la création de l’Univers : si on suppose que Dieu commence « Son Œuvre » à une date définie par « Sa Volonté » et avec un « objectif précis », on doit alors admettre qu’il était imparfait avant son accomplissement ou avant d’atteindre « Son Objectif ». La critique vaut également pour le christianisme, à moins d’assimiler l’amour à une sorte de pesanteur universelle.
En éliminant cette difficulté, les moutakallimins ont étendu au temps leurs théories sur les atomes. Comme l’espace est constitué de vide et d’atome, le temps est constitué d’une série de petits moments indivisibles. La création du monde une fois définie, il a été simple de montrer la nécessité du Créateur, Dieu unique, omnipotent et omniscient.
Le kalam ne saurait pour autant être confondu avec la théologie islamique ou théologie musulmane, c’est-à-dire l’utilisation du discours rationnel à propos des choses divines. Inspirée par la philosophie grecque (falsafa), dont elle tient cependant à se distinguer, cette démarche est pratiquée par les moutakallimins et est reconnue par certaines écoles comme le moutazilisme et l’acharisme.
Les autres madhahib considèrent donc toujours aujourd’hui, avec beaucoup de circonspection, tout ce qui vient du kalam, sans pour autant le rejeter complètement. Dans son livre intitulé Tabyin kadhib al-mouftari (L’Élucidation du Mensonge du Calomniateur) et pour défendre son vieux maître Ibn Asakir a par exemple distingué au XIIIe siècle le bon kalam du mauvais kalam.
Différence entre kalam et soufisme
Pour les soufis, le savoir n’est pas une fin en soi. Le kalam, lui repose sur la raison. Le but du soufisme est de parvenir à la sainteté (Oualata) et la connaissance de Dieu passe par « l’expérience du spirituel » (dhaouk), ce qui rend inutiles les arguments de la raison et ceux venant du kalam. Les soufis sont particulièrement sévères avec les théologiens de la ilm al-kalam, qu’ils considèrent comme une perte de temps.
Mais cette période constitua sans conteste l’âge d’or du chiisme dans sa tendance extrémiste répandue à Koufa, dans certains quartiers de Bassora, à Mada’in (Ctésiphon), puis au Khorasan, parmi les esclaves et les classes inférieures.
Il est très difficile de faire l’inventaire des sectes extrémistes qui entrèrent alors en effervescence tant elles étaient nombreuses et enchevêtrées les unes dans les autres. Leurs fidèles menèrent des actions insurrectionnelles en vue de s’emparer du pouvoir pour le compte d’un imam-mahdi hachémite. Politiquement, ils étaient divisés en deux grands groupes.
Les uns et les autres considéraient en effet que le pouvoir, usurpé par Abou Bakr, Omar, Osman et les Omeyyades, des apostats et des impies, ne devait appartenir qu’à Ali et à ses fils nés de Fatima.
Ces nombreuses sectes extrémistes, organisées en ordres initiatiques, étaient animées par des prophètes, souvent babyloniens en Irak, qui élaborèrent une idéologie ésotérique où l’Islam fut structuré dans des systèmes gnostiques puisés justement du fond araméen. Cette idéologie était d’un côté hermétique et de l’autre messianique et révolutionnaire. Elle était centrée sur la personnalité de l’imam en qui descendait l’Esprit saint de Dieu ou l’Adam céleste des gnostiques. C’est un prophète-roi-savant qui connaît toutes les sciences et les mystères divins, et possède un pouvoir surnaturel. Son rôle est d’établir sur la terre le règne de la prospérité et de la justice. Elle comprenait en outre la doctrine « astrologiste » du temps cyclique, celle de la nature immatérielle et immortelle de l’âme qui, distincte du corps, passe d’un « moule » à l’autre selon ses mérites, et enfin, l’idée que la foi consiste dans l’initiation à l’Enseignement de l’imam et non pas dans l’observance du culte et des préceptes de la Loi qui ne sont en réalité que des allégories et, pour les ignorants qui les observent, des chaînes et des sanctions.
Cette idéologie impliquait, pour les théologiens et les légistes, notamment la négation de la résurrection corporelle et du jugement dernier, ainsi que l’abolition pure et simple de la Loi.
L’Irak fut envahi par une forte vague de libertinage né auparavant dans le Hedjaz d’Arabie au sein d’une aristocratie riche et désœuvrée. Là où il y avait un gouverneur, un marchand d’esclaves cantatrices, et une taverne, à Koufa dans le voisinage de Hira, et autour des monastères du sud de la Mésopotamie où les moines cultivaient les sciences et les vignes, s’étaient formées des sociétés de libertins : des poètes, des chanteurs et des musiciens des deux sexes, des efféminés excentriques,
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des gens chargés de divertir la haute société dont la conscience manquait cruellement de dimension religieuse. Les poètes libertins, qui jouaient auprès du Prince le rôle de bouffon ou de secrétaire ou de compagnon de plaisir ou toutes ces fonctions à la fois (comme plus tard les célèbres Aboul Ala Al-Ma’arri ou Omar Khayyam dont ils furent les lointains précurseurs) exprimaient dans leur vie et leur poésie la philosophie du milieu. Ils faisaient l’apologie des plaisirs prohibés, négligeaient le culte, violaient au grand jour les interdits religieux, blasphémaient, ignoraient le Coran et diffusaient une pensée athéiste : – Dieu ? – Il est invisible, comment peut-on être sûr de son existence ? – Le jugement dernier ? – Une légende, la vie de l’homme est identique à celle d’une plante, et une fois mort, l’homme ne sera pas ressuscité.
DÉVELOPPEMENT DES HÉRÉSIES.
Les Omeyyades jusqu’à la mort de Hicham avaient appliqué une politique religieuse strictement « sunnite ». À l’égard des non-musulmans connus et légalement reconnus : juifs, mazdéens et chrétiens avec qui on confondait les manichéens inconnus alors comme tels, ils étaient tolérants. Mais sur deux questions, ils étaient d’une intransigeance absolue : la critique de l’Islam ou l’insulte à l’égard du Prophète, et le prosélytisme. D’autre part, dès Mouaouiya jusqu’à Hicham (Yazid I et Yazid II exceptés) ils interdisaient le vin et la musique à Damas, et reprochaient aux Hedjaziens leur frivolité. Ils étaient très sévères à l’égard des révolutionnaires alides ainsi qu’envers leurs partisans, modérés et extrémistes, mais aussi hostiles au mouvement naissant du kalam……………
…………………………
Après Hicham ce fut le chaos. Le successeur d’Hicham, Oualid b. Yazid (calife de 743 à 744) était un libertin ; il passa même pour un zindiq. Son successeur et meurtrier, Yazid III, proqadarite contesté par Marouane II, ne put régner que six mois en 744. Son frère Ibrahim fut calife pendant 70 jours. Marouane II (calife de 744 à 749), anti-qadarite, mais ayant eu un précepteur « jahmite », était contesté de toutes parts et dépassé par les événements ; il passa aussi pour un zindiq.
Abd Allah b. Mouaouiya qui partagea le règne de Marouane II (anti-calife de 745 à 747), était l’imam divinisé d’une secte extrémiste, entouré en plus de compagnons de beuverie suspects…………
………………………………………
La prise de pouvoir par les Abbassides, en 750, changea l’assise de l’autorité califale. En apparence rien ne changeait fondamentalement dans « l’idéologie impériale » des califes, telle qu’elle avait été construite par les Omeyyades. La fonction législative et ordonnatrice revenait toujours, et tout aussi légitimement, au calife au nom de sa connaissance intime du vrai dessein divin. Mais une autre source de pouvoir commençait d’émerger : la tradition concrétisée par des centaines de milliers d’anecdotes (hadiths) rapportant les paroles ainsi que les faits et gestes de Mahomet, voire ses silences ou ses non-réactions. Et donc les spécialistes en hadiths ou traditionnistes (les mouhadithin).
C’est en effet des années 720 datent les premières occurrences de ces éléments de tradition en usage parmi les croyants. Dès lors, l’intrusion de cette « tradition nouvelle » devint massive et les récits commencèrent à se figer, jusqu’à prendre la forme que l’on connut ensuite, et jusqu’à aujourd’hui.
Quant à la propagation de ces récits, elle se fit bientôt sous le mode de la « généalogie spirituelle » (silsila). Tel hadith devait sa validité de la solidité de la chaîne de ses transmetteurs (isnad) jusqu’au moment de sa fixation comme unité du corpus de la tradition. Mais nous devons considérer comme acquis que les maillons communs aux chaînes de transmission de hadiths furent les véritables inventeurs de ces récits normatifs.
Cette quête des traditions était associée à une enquête de moralité des rapporteurs, les compagnons de Mahomet étant considérés comme des garants de tout premier ordre de cette mémoire vivante concernant le comportement du prophète de l’islam. Les collecteurs de traditions, souvent des convertis, composèrent des recueils de hadiths où ils notèrent soigneusement le chemin par lequel les paroles prophétiques leur étaient parvenues, la « chaîne des témoignages » ou isnad. Ces traditionnistes, malheureusement, cherchèrent souvent dans l’exemple du prophète la confirmation de leurs propres opinions. C’est ainsi que se formèrent ces recueils de hadiths plus ou moins favorables aux califes omeyyades, ou au contraire aux califes abbassides. Des hadiths furent même purement et simplement inventés. Très tôt la société musulmane se heurta à la prolifération de récits apocryphes et une discipline particulière, la critique des hadiths, vit le jour, portant sur les conditions de transmission et jamais sur le contenu. La critique occidentale a toujours manifesté un extrême scepticisme quant au rattachement effectif à Mahomet de la plupart des hadiths.
L’étude approfondie d’Ignace Goldziher et les critiques minutieuses et parfois portant sur des vétilles, de Léon Caetani et Henri Lammens ont montré que toute cette littérature, dont la biographie de Mahomet fait partie, doit être traitée avec prudence et réserve, et chaque hadith soigneusement pesé avant de pouvoir être accepté comme authentique. Les recherches de Joseph Schacht et Robert
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Brunschvig ont montré que de nombreuses traditions dont le fond est apparemment historique ont en fait des visées juridiques ou doctrinales et sont donc historiquement suspectes.
Face à la mise en place de ce qui constituerait bientôt un groupe au statut social déterminé, celui des oulémas, à la mise en forme d’un langage qui leur devenait commun, et après un siècle omeyyade marqué par l’affirmation de l’autorité califale, les Abbassides commencèrent par afficher la tranquillité de ceux à qui le sang – ils étaient du même sang que Mahomet – accordait une légitimité, en quelque sorte, naturelle. Légitimité du sang qui semblait prendre le pas sur la légitimité de fonction (d’initiateur de l’ordre divin parmi les croyants). Mais ce n’était peut-être là qu’une apparence.
De fait, les califes abbassides, les gouverneurs et les émirs, s’entourèrent volontiers de jurisconsultes et théologiens, mais la relation de complicité qu’ils entretenaient avec ceux-ci ne signifiait pas, loin s’en fallait, qu’il y avait de leur part renoncement à la prééminence du califat. C’est que la légitimité naturelle (du sang) pouvait fort bien s’accommoder de la légitimité des docteurs de la Loi, et réciproquement : leur rapport était oblique, la nature des uns ne faisait pas nécessairement face frontalement à la fonction des autres. Elle ne lui faisait face que si, ostensiblement, le discours sur la légitimité de leur nature alimentait la revendication des prérogatives de la fonction.
C’est donc pour remédier à cette situation qu’Ibn al-Mouqaffa, qui venait d’embrasser l’Islam, proposa, avant 757, dans sa lettre dite précisément fi al-Sahaba, un projet de réforme capable d’assurer la stabilité du pouvoir et le bonheur de la communauté (salah al-oumma). Après avoir dénoncé l’immoralité (foudjour) et l’ignorance en matière de religion de certains membres de l’entourage de Mahomet, souligné les graves conséquences tant pour la morale que pour la Loi auxquelles conduisait l’extrémisme (goulouww) répandu au sein de l’armée, et observé que le peuple était désorienté, Ibn al-Mouqaffa esquisse les grandes lignes de la politique qui s’impose. Ne croyant guère aux prétentions théocratiques de la dynastie, ce penseur conservateur estime que le souverain ne peut avoir le droit d’être obéi que s’il se conforme scrupuleusement à l’enseignement du Coran et de la sunna, ce qui lui confère en outre le droit de gérer la religion. Il faut donc que le pouvoir se mette en règle avec la religion selon la tendance des musulmans modérés (ahl al-qasd) : veille de toute urgence à l’instruction religieuse de la classe dirigeante, de l’armée et du peuple. Il faut, dit-il, engager l’armée à apprendre le Coran, à étudier la sunna et à s’éloigner des hérétiques ; il faudrait aussi instituer une sorte de clergé officiel chargé d’instruire le peuple qui ne saurait parvenir tout seul à la bonne voie, et de traquer les hérétiques et les séditieux.
L’auteur de ce projet fut mis à mort avec la complicité du calife. Ironie du sort, il allait passer pour un zindiq. Al-Mansour était pressé et menacé. Le pouvoir d’abord. Et il écrasa avec la cruauté nécessaire contestataires et adversaires, les chiites surtout. Il essaya quand même d’ajuster la position de la dynastie sur celle des musulmans modérés en massacrant les raouandites, ses « adorateurs », cyniquement exploités auparavant. Mais tout cela était insuffisant. Pendant la révolte de l’an 762, les puritains au sein de la communauté apportèrent leur soutien aux Sassanides. Mais Al-Mansour put laisser à son fils un État riche, un pouvoir consolidé et le titre d’al-mahdi.
Afin de couper court aux revendications des alides, Al-Mansour, qui s’appelait Abd Dieu, donna en effet ce titre à son fils Muhammad un an après la défaite du hassanide Mouhammad b. Abd Allah, qui avait prétendu être le mahdi. Le titre, à côté de sa signification chiite révolutionnaire, avait une portée conservatrice, et avait été donné à des califes omeyyades dans un sens où étaient associés l’obéissance au calife et l’attachement à la « corde de la jama’a », mais aussi dans le sens de restaurateur de la sunna des deux Omar.
Surnommé mahdi dans un sens chiite, le fils d’al-Mansour eut donc à jouer le rôle d’un mahdi traditionniste. Sa politique religieuse, adoptée par ses deux fils et successeurs al-Hadi et al-Rachid, consista, comme celle des Omeyyades, à s’aligner sur la position des traditionnistes, à veiller sur l’application de la Loi, à mettre de l’ordre religieux dans l’empire, à interdire le prosélytisme non musulman, à « rabaisser » un peu les non-musulmans, à distinguer au sein de ces derniers entre les dhimmis et les non-dhimmis. Cette politique se concrétisa dans la lutte contre la zandaqa.
Nous ne savons pas toujours comment on identifiait les zindiqs parmi les musulmans. Dans certains cas, l’arrestation intervenait à la suite de la publication d’un poème blasphématoire ou d’une infraction grave à la Loi, ou d’une dénonciation, ou de la manifestation des signes du doute. L’enquête s’ensuivait. On soumettait le suspect à un examen en sciences religieuses, on lui demandait de réciter le Coran notamment ; on réquisitionnait ses livres ; on lui présentait le « Livre des zindiqs » et on lui demandait de le lire ; le calife ou l’inquisiteur s’employaient parfois par la violence à lui arracher des aveux. On demandait aux personnes soupçonnées spécialement de manichéisme d’égorger un oiseau ou de cracher sur le portrait de Mani. Les suspects étaient détenus dans l’al-Matbaq, la prison centrale de Bagdad où un quartier particulier leur avait été réservé.
Le statut juridique du zindiq.
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L’individu d’origine musulmane reconnu coupable d’embrasser les croyances des zindiqs (manichéens et assimilés) ou de renier en secret l’Islam, qualifié dans ce cas comme dans l’autre de zindiq, était considéré comme un apostat, mais il avait la possibilité de se repentir. S’il persistait dans ses erreurs, il était mis à mort en vertu du hadith : « Quiconque change de religion, tuez-le » (Sahih Boukhari. Tome 9, Livre 84, hadith 57). Ses biens étaient confisqués, et il n’avait pas le droit à un enterrement musulman dans un cimetière musulman. Ce châtiment était prévu pour les hommes en général ; pour les femmes, on était enclin à prévoir l’incarcération.
Au VIIIe siècle, l’usage était de décapiter les zindiqs, et d’exposer leurs corps sur des gibets souvent sur le Pont de la capitale. Bien qu’il existât une tradition selon laquelle on avait brûlé des apostats, la tendance générale était contre l’usage du bûcher, appliqué par Khaled durant la guerre de l’Apostasie 6) en 633, réprouvé par Omar et Ibn Abbas. Deux apostats moururent néanmoins sur le bûcher au IXe siècle.
Le Grand Inquisiteur ou sahib al-zanadiqa.
Durant la période d’anarchie qui avait précédé, c’étaient des particuliers zélés qui, de leur propre initiative, comme toujours pendant les périodes de désordre et de guerre civile, « ordonnaient le bien et interdisaient le mal » (Coran 3, 110), c’est-à-dire veillaient, dans leurs propres quartiers, à l’application de la Loi (Hisba). Lorsque l’autorité de l’État fut rétablie, le pouvoir ne put tolérer plus longtemps ces individus qui appliquaient le principe coranique selon leurs convictions idéologiques et politiques, et qui pouvaient être dangereux. L’État s’en chargea. C’est le calife Al Mansour (754-775) qui fut à l’origine de la loi sur l’apostasie et, par ricochet, de la version inquisitoriale de la hisba.
Au début du règne du calife Al-Mahdi (775 – 785) apparut le premier mouhtasib, contrôleur des prix ; chargé de la hisba, dont la mission consistait à traquer les apostats et les hérétiques. Ce calife inventa une nouvelle dialectique en ce domaine, et ordonna de composer des livres de répliques aux athées ou aux hérétiques. À Bagdad et dans les grandes villes, un magistrat spécial, attaché au cadi ou directement au calife, appelé sahb (maître) al-zanadiqa, fut donc chargé de s’occuper des zindiqs.
Al-Mahdi mena une politique religieuse assez rigoureuse, il poursuivit les dualistes. Pouvaient être accusés de dualisme les convertis zoroastriens, surtout chez les Persans, mais aussi les soufis. Al-Mahdi déclara que le calife n’était pas seulement un souverain, mais qu’il était de son devoir de définir l’orthodoxie religieuse afin de maintenir la cohésion de la communauté des croyants (oumma).
En ce qui concerne les zindiqs du milieu religieux non-musulman, nous ne connaissons pas toujours l’identité particulière des personnes arrêtées. En principe, on poursuivait les manichéens, les marcionites 1) et les daïsanites 2) ; mais dans les faits, étaient touchés tous ceux qui n’étaient ni mazdéens, ni juifs, ni chrétiens ; même les chrétiens étaient confondus parfois avec les zindiqs.
La lutte contre les zindiqs était dirigée surtout contre des suspects d’origine musulmane. Les fils de cinq membres de l’entourage d’al-Mansour, et même un membre de la famille abbasside, soupçonnés à juste titre parfois de manichéisme, furent arrêtés. Certains libertins ou poètes dont le grand Bachar ibn Bourd, furent également poursuivis. Les uns furent sanctionnés, les autres emprisonnés, et d’autres encore mis à mort.
Une liste des « sectes » hérétiques interdites fut dressée et publiée dans plusieurs quartiers de Bagdad. Elle comprenait principalement des groupes chiites. Le théologien imamite Hicham b. al-Hakam faillit avoir « la tête tranchée ». Les partisans d’Abou Mansourr al-Ijli, dirigés par le fils de ce dernier, furent massacrés. La liste comprenait aussi, semble-t-il, des adeptes du kalam. Un groupe de qadarites médinois fut amené à Bagdad pour y être menacé ; ce fut également le cas du théologien moutazilite de Bassora Abou l-Houdaïl al-Allaf. Un autre théologien, probablement indépendant, Nouman b. al-Moundir, fut mis à mort, ainsi que le prédicateur de Bassora Salih b. Abd al-Qouddous.
Al-Hadi (calife de 785 à 786) n’eut le temps de mettre à mort qu’un seul personnage : le secrétaire Azdayadar, sacrilège soupçonné de manichéisme.
Al-Rachid (calife de 786 à 809) poursuivit, avec souplesse, la politique de son père. Il n’aimait guère ni les théologiens ni les fils d’Ali et leurs partisans. Il n’eut cependant pas à réprimer beaucoup de zindiqs. Le poète ascète Abou l-Atahiya fut soupçonné de zandaqa, mais la chose n’eut pas de conséquences graves. D’autre part, pour des raisons politiques, on fit courir le bruit que les Barmécides, frappés par le calife, étaient des zindiqs. Relativement à cette affaire un adversaire, le théologien Mouhammad b. al-Laït, furent accusés de zandaqa. Un secrétaire dans l’administration de Merv, soupçonné par le gouverneur militaire du Khorasan d’entretenir des relations douteuses avec des révoltés, fut accusé de zandaqa et mis à mort avec l’autorisation du calife.
Les sabéens païens de Harran, pris pour des zindiqs, furent persécutés.
Abou Nouwas, le dernier libertin, fut jeté dans la prison des zindiqs. Al-Amin, sitôt devenu calife, s’empressa de le libérer et d’en faire son compagnon de beuverie avant d’être obligé de l’y renvoyer en raison de ses blasphèmes. Mais le fils de Zoubaïda n’eut à persécuter personne ; car en cette fin du 8e siècle la page de la zandaqa était tournée.
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CONCLUSION SUR CETTE PREMIÈRE PHASE DE LUTTE CONTRE LES HÉRÉSIES.
Le règne d’al-Mahdi inaugura une période de stabilité et de prospérité au cours de laquelle l’Islam, retrouvant un état d’équilibre social, connut une prodigieuse renaissance religieuse et culturelle générale. Le respect des orthodoxies et le conformisme, ainsi que l’instruction religieuse, firent un grand progrès. La religion, comme pratique et comme savoir, pénétra dans les moindres détails de la vie du citadin dès la naissance jusqu’à la mort. Sous al-Rachid, la fièvre du kalam, symptôme de la constitution d’un nouvel ordre culturel, gagna Bagdad où le mouvement théologique fut protégé et encouragé par les Barmécides, et où l’on commençait à fabriquer du papier. Une classe de maîtres s’imposa et élabora le taouhid, savant, rationaliste, hardi, ouvert, sûr de lui-même et conquérant, et adopté pratiquement par toute l’élite. Cette renaissance de l’Islam mit fin à la zandaqa.
Les zindiqs furent amenés ou bien à se terrer ou bien à émigrer ; ils étaient en tous cas défaits. Mais leur défaite n’était pas due en premier lieu à la persécution officielle, elle était due, d’une part à une nouvelle situation sociale défavorable au message manichéen en particulier et à tout prosélytisme non musulman en général, et d’autre part, à l’action des théologiens. L’Islam savant élaboré par ces derniers dévalorisa plus qu’il ne vainquit la pensée mythologique, manichéenne, chiite extrémiste et même musulmane traditionnelle. La preuve en est qu’une communauté manichéenne subsista en Irak jusqu’au milieu du Xe siècle et que les systèmes philosophiques des zindiqs furent exposés par les théologiens avec une remarquable objectivité. Pourtant, à partir de la fin du VIIIe siècle, on n’entend plus parler de musulmans soupçonnés de manichéisme ni de la persécution des zindiqs non plus.
Le libertinage prit également fin. Touchant à la fin de leur vie, les grands maîtres disparurent sous al-Mahdi. Certains se repentirent et s’adonnèrent à l’étude du Coran. Sous al-Rachid, lequel ne permettait pas à son bouffon ce que son grand-père avait permis au sien, il y eut des libertins mineurs, qui cherchaient à « épater le bourgeois », et qui n’étaient pas pris au sérieux.
D’une manière générale, l’homme areligieux ou irréligieux, n’étant plus socialement acceptable, disparut.
Le chiisme extrémiste, écrasé politiquement par Al-Mansour et son fils, et dévalorisé culturellement par les théologiens, disparut, pour reparaître un siècle plus tard.
À la fin du VIIIe siècle, la zandaqa, en tant que religion manichéo-daïsano-marcionite, et/ou en tant que courant libertin fut donc définitivement effacée.
1) De Mazdak, prédicateur religieux du 5e siècle, mi-manichéen, mi-mazdéen.
2) Du nom de l’évêque Marcion de Sinope, le premier grand intellectuel chrétien à avoir théorisé la notion de Nouveau Testament.
3) De Bardesane, philosophe et poète chrétien syriaque d’Édesse.
4) De Elkasai, pseudonyme d’un prédicateur judéo-chrétien du 2e siècle.
5) Les sabéens mandéens sont une minorité religieuse baptiste et gnostique du sud de la Mésopotamie, remontant aux premiers siècles de notre ère (Jean le baptiste ?).
6) Apostasie est un bien grand mot. Les tribus arabes qui s’étaient inféodées à Mahomet en devenant ses vassaux n’avaient pas vraiment compris qu’il s’agissait de religion. Et ce qu’ils voulaient surtout c’est ne plus avoir à payer la dîme appelée zakat.
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LA PREMIÈRE VRAIE INQUISITION : LA MIHNA (833 à 847 ou plus).
Pour plus de détails voir al-Zandaqah fi Dar al-Islam fi al-qarn al-thani lil-Hijrah (Zandaqa et zindiqs en terre d’islam au second siècle de l’Hégire) par Melhem Chokr (Beyrouth).
Le règne d’Al-Mamoun (813-833) fut une grande réussite sur le plan culturel. Il s’est particulièrement intéressé au travail des savants, surtout de ceux qui connaissaient le grec. Il avait réuni à Bagdad des savants de toutes les croyances, qu’il traitait magnifiquement et avec la plus complète tolérance. Il fit venir de Byzance des manuscrits et posa comme condition de paix avec l’Empire byzantin la remise d’une copie de l’Almageste de Ptolémée.
Féru d’astronomie, il créa en 829, dans le quartier le plus élevé de Bagdad, près de la porte Chamassiya, le premier observatoire permanent au monde, l’Observatoire de Bagdad, permettant à ses astronomes, qui avaient traduit le Traité d’astronomie du grec Hipparque, ainsi que son catalogue d’étoiles, de surveiller méthodiquement le mouvement des planètes. Il mena deux expériences astronomiques destinées à déterminer la distance d’un degré de latitude terrestre. En reconnaissance pour ces travaux, un cratère lunaire porte son nom : Almanon.
De son séjour en Asie centrale, il avait ramené avec lui les trois fils de Moussa ibn Chakir, ancien brigand, devenu astronome et compagnon du futur calife. À la mort de leur père, il fit donner aux trois frères dont il était devenu le tuteur, Muhammad, Ahmad et Hasan, une solide formation dans les sciences appliquées et leur octroya une fortune considérable pour fonder en 832 et diriger à Bagdad la Maison de la sagesse.
Le grand mathématicien Abou Jafar Mouhammad ben Moussa al-Khaouarizmi a passé la plus grande partie de sa vie à Bagdad, sous le patronage du calife Al-Mamoun. Il traduisit en arabe, avec ses collègues, les manuscrits grecs de Byzance réunis dans la bibliothèque fondée par le calife au sein de cette Maison de la Sagesse, et étudia, à partir de ceux-ci la géométrie, l’astronomie et l’algèbre. Le traité d’Algèbre intitulé Hisab al-jabr ou'al-mouqabala est la plus importante des œuvres de Khaouarizm. C’est ce titre qui a donné le mot « algèbre ».
Sur le plan religieux en 827, le moutazilisme devient la croyance officielle à la cour du califat abbasside, après avoir été officiellement embrassé par le calife Al-Mamoun. Il restera la doctrine officielle sous ses 2 successeurs.
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Une persécution (la Mihna) sera même organisée entre 833 et 848 contre les collecteurs de hadiths (mouhaddithoun) qui n’adhèrent pas au moutazilisme. La Mihna force les non-adhérents à renoncer ouvertement à la doctrine affirmant que le Coran est éternel et à accepter que celui-ci ait été créé. Le zèle des moutazilistes ira jusqu’à refuser de faire libérer les prisonniers musulmans tombés aux mains des Byzantins, s’ils professaient le caractère incréé du Coran.
Une nette résistance de l’opinion à ces persécutions est rapportée par les chroniqueurs. De fait, la Mihna est sans doute en partie la cause de l’échec final du moutazilisme. Dommage !
On s’est souvent interrogé sur la raison de l’activisme religieux du calife al-Mamoun. Le plus simple est de penser qu’il était lui-même à titre personnel assez rationaliste. L’homme était savant, versé dans les questions de fondement du droit ; son confident était le mou'tazilite Ahmad ibn Abi Douad, et l’on sait que le mou'tazilisme, dans son effort de conceptualisation théologique, de construction doctrinale du monothéisme absolu, avait affirmé le caractère créé du Coran. Al-Mamoun était-il sous influence mou'tazilite ? Avait-il une vision plus personnelle de ce qu’était le vrai en matière de croyance ? La deuxième de ses motivations a peut-être été bien sûr d’accroître son emprise sur le clergé ainsi que sur les affaires religieuses (comme le fit de son côté l’empereur romain Constantin avec le christianisme quelques siècles plus tôt).
Ce qui est certain c’est qu’en 828 al-Mamoun ajouta aux attributions de la Hisba un tribunal inquisitorial chargé du contrôle de l’orthodoxie religieuse : la Mihna. Cette inquisition fut essentiellement dirigée contre les fouqaha (théologiens) et les mouhadditoun (chercheurs de Hadiths).
Début 833, al-Mamoun, alors à Raqqa en Syrie, décida d’écrire à Ichaq ibn Ibrahim, son représentant à Bagdad, et d’interroger les cadis de la cité sur la question de la nature créée ou pas du Coran.
Une autre lettre d’al-Mamoun arriva enjoignant de lui envoyer sept traditionnistes éminents. Ce qui fut fait. Les traditionnistes, ayant accepté de reconnaître que le Coran n’était pas incréé, mais créé, purent rentrer chez eux.
De semblables lettres furent expédiées en Égypte.
À Bagdad, où de nouveaux traditionnistes et jurisconsultes étaient interrogés – rudement parfois, d’où le nom que l’on donna à l’événement, mihna, « épreuve » –, il y eut quelque résistance : deux hommes, Ahmad ibn Hanbal et Mouhammad ibn Nouh, se déclarèrent en faveur du caractère incréé du Coran.
Enchaînés, ils furent envoyés à Tarse, où se trouvait désormais al-Mamoun, au retour d’une campagne contre Byzance. Mais la nouvelle de la mort du calife arriva : on les renvoya à Bagdad. Mouhammad ibn Nouh s’éteignit en chemin ; arrivé à Bagdad, Ahmad ibn Hanbal fut jeté en prison.
Ahmad ibn Hanbal, né en 780, représentait ce que pourrait appeler la fonction aboutie du traditionnisme. Un traditionnisme rigoureux, un littéralisme de tous les instants, sans faille, épuisant la totalité de ce qui faisait son objet, la connaissance des fondations de l’ordre divin pour ce monde. Il sera donc le fondateur de la plus rigoriste des écoles de jurisprudence musulmane, opposée à toute innovation (le plus grand pécheur des tenants de la Sunna Oual Jammah vaut mieux que le plus pieux des tenants de la Bida).
Le Calife al-Mamoun était l’opposé naturel d’Ibn Hanbal. Revenons un instant à la première lettre qu’il écrivit à Ichâq ibn Ibrâhîm. La manière d’avancer ses idées sur la nature du Coran est significative. Nous avons vu qu’il s’attaquait violemment aux traditionnistes, à ceux qui, se disant les transmetteurs de la sunna, proclamaient être les modèles des vrais croyants et revendiquaient le pouvoir de distinguer entre le vrai et le faux, entre le juste et l’injuste. Mais la manière dont il introduisait ses virulentes attaques est significative de l’autorité qu’il se donnait pour, précisément, savoir reconnaître le vrai du faux, le juste de l’injuste…… La suite de la lettre est introduite par une formule définitive : « le commandeur des croyants sait que… ». Avec superbe, al-Mamoun affirmait, de façon ultime, le rôle du califat dans le salut des vrais croyants.
Nulle contrainte en matière de religion [Saint Coran chapitre 2, verset 256].
Les sanctions imposées par la Michna devinrent néanmoins de plus en plus difficiles à supporter pour les oulémas qui s’unirent pour s’y opposer.
Le frère d’al-Mamoun, al Mou'tasim (794-842), lui succéda en 833.
Le nouveau calife, qui était pourtant prêt à mettre fin à cette inquisition fut convaincu par le cadi mou'tazilite, Ahmad ibn Abi Dou'ad, qui fit valoir combien il pourrait être dangereux, pour l’autorité de l’État, de sembler abandonner une position officielle.
Ibn Hanbal fut donc convoqué à comparaître, devant le calife. Il reçut une sévère flagellation, puis fut autorisé à regagner son domicile, après un deux ans et demi de prison.
Avait-il enfin cédé et déclaré que le Coran était créé, comme beaucoup d’historiographes l’ont cru ?
Fut-il, au contraire, relâché sous la pression de la foule de Bagdad ? La vraie raison importe peu ici.
Ce qui est certain c’est que durant tout le reste du règne d’Al Mou’tasim, Ibn Hanbal mena une vie retirée, tout en continuant à dispenser des cours conformes à la tradition (Sunna) et que l’école
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(madhab) hanbalite joua un grand rôle dans le désastre intellectuel sans précédent pour l’Humanité que fut la fermeture des portes de l’interprétation des textes (Bab-Al-Ijtihad) au 11e siècle.
La Mihna dura encore, mais de plus en plus molle. Al-Ouathiq (842-847), fils d’al-Mou’tasim, avait d’autres soucis, comme le mouvement de sécession d’Ahmad ibn al-Aghlab en Ifriqiyya (l’actuelle Tunisie). Et al-Moutaouakkil, frère d’al-Ouathiq, mit fin à l’épisode dès son arrivée au pouvoir en 848.
Cependant des oppositions se firent aussi entendre à la fin du IXe siècle par le truchement du madhab fondé par Abu-l-Hassan Al-Achari, ancien moutazilite lui-même, puis par l’école maturidite. Le calife al-Moutaouakkil abandonna le moutazilisme et revint à la doctrine traditionnelle, qui était en train de donner naissance au sunnisme.
Peu après, les derniers lettrés emprisonnés furent libérés, les « martyrs » réhabilités. La doctrine du Coran incréé s’imposa, définitivement, dans l’empire. Le pouvoir religieux des califes sortit diminué de cette crise, et ce au profit de celui des oulémas.
Les savants, théologiens et historiographes, qui majoritairement étaient dans l’opposition, nièrent même bientôt toute autorité religieuse aux califes, les privant même de la légitimité du titre d’imam. La tradition des hadiths devint l’idéologie dominante en terre d’Islam et on en inventa même beaucoup pour servir tel ou tel camp politique, une majorité d’entre eux même, d’après Ignace Goldziher (il considère les derniers maillons communs à plusieurs chaînes de transmission ou isnad comme étant ceux qui ont fabriqué de toutes pièces lesdits hadiths).
Note de la rédaction. C’est au travers de cette crise que les grandes écoles juridiques de l’islam (madhahib) se sont vraiment affirmées, et qu’Ibn Hanbal s’est notamment illustré durant cette période pour son opposition au moutazilisme. Le moutazilisme fut dès lors identifié non point au rationalisme qu’il enseignait, mais à la Terreur qu’il pratiqua une fois au pouvoir **. Et Ibn Hanbal qui personnifia la résistance à cette Terreur devint le symbole de l’orthodoxie.
Cette Mihna ou inquisition purement religieuse ne doit pas être confondue avec la simple police des mœurs ou Hisba.
Hisba est, le terme par lequel l’usage désigne, d’une part le devoir de tout musulman d’ordonner le bien et d’interdire le mal (Coran 3,110), d’autre part la fonction du personnage effectivement chargé en ville de l’application de cette règle à la police des mœurs et plus particulièrement à celle du marché.
Au départ, sous le calife Omar, cette Hisba était seulement une institution destinée à surveiller le bon déroulement des affaires économiques et commerciales, ainsi que la légalité des contrats. Sa fondation s’appuyait sur un verset dressant une liste d’obligations majeures (chapitre N° 6, verset 152). « Donnez le poids et la mesure exacts. Nous n’imposons à chaque homme que ce qu’il peut porter. Lorsque vous parlez, soyez équitables même s’il s’agit d’un parent proche ».
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QUELQUES EXEMPLES D’HÉRÉTIQUES (ZINDIQ).
Le premier hérétique à avoir été mis à mort fut un dénommé Djad Ibn Dirham. Il fut exécuté vers 742. Il y en eut, hélas, bien d’autres : Ibn Al Mouqaffa (exécuté en 760), Ibn Abi-l-Aouja (exécuté en 772), Salih Ben Abd Al-Qouddous (exécuté en 783), Hammad Ajrad…… Ce ne sont que quelques noms. Bien d’autres encore furent victimes de ce totalitarisme islamique, et payèrent souvent de leur vie leur liberté de penser.
Grand mystique musulman, Al Halladj est aussi un maître soufi qui contribua aux premiers succès de ce courant spirituel, et un poète. Abou Abdallah al-Hussein Mansour al-Halladj est né en 857, en Perse (aujourd’hui en Iran). Il naît dans une famille pauvre (son père travaille la laine, d’où le nom de al-Halladj, « le cardeur de laine »), mais cela ne l’empêche pas de suivre des études assez poussées dans les sciences religieuses. Ces études le laissent insatisfait : il est attiré par une vie ascétique et souhaite prendre ses distances par rapport à l’enseignement traditionnel du Coran.
Dès l’âge de 16 ans, Al Halladj s’engage donc dans une confrérie soufie et devient le disciple du maître Sahl al-Toustari. Mais il est attiré par le rayonnement intellectuel et religieux de Bagdad, et il va y rejoindre le maître soufi Jounaïd. Il effectue ensuite son pèlerinage à La Mecque et entame une carrière de prédicateur. Parcourant d’abord le Khorassan, il s’installe ensuite avec sa famille à Bagdad. Il effectuera deux autres pèlerinages à La Mecque, et un long voyage jusqu’à l’Indus, voire peut-être jusqu’aux frontières de la Chine, même s’il est difficile d’en être sûr. Vers 902, il commence à tenir des discours publics très hétérodoxes, qui le font suspecter d’hérésie – d’autant plus que sa famille a des accointances avec les milieux chiites extrémistes. Cela n’empêche pas d’ailleurs les chiites, alors très influents à Bagdad, de se méfier d’Al Halladj, dont on craint l’influence sur les foules. Une première fois dénoncé, par un poète qui avait fait partie de ses amis, il est ensuite accusé par le vizir ibn Al-Fourat. Plusieurs de ses disciples sont arrêtés, mais al-Halladj parvient à s’enfuir et se cache à Suse. Il est vite arrêté et ramené à Bagdad. On l’accuse notamment de comploter contre l’État, de s’être attribué des miracles, d’avoir organisé des réunions secrètes.
Commence alors un très long procès, on ne peut plus politique : en 913, Ibn Issa, un vizir sensible à ses vues, le soustrait à l’autorité du cadi, le fait venir au palais, et le présente même au calife ; mais en 919, le vizir Hamid fait rouvrir son procès. En 922, Al Halladj est donc condamné à mort, le tribunal l’accusant notamment d’avoir voulu supprimer le pèlerinage à La Mecque (le hadj), un des piliers de l’islam. Il s’agit donc d’un crime d’hérésie (le terme d’origine persane zandaqa désigne aussi le crime
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de celui qui conspire contre l’État), car Al Halladj va contre le texte coranique, expression de la parole de Dieu. Le 27 mars 922, il est supplicié en place publique : crucifié (un héritage que les Arabes ont repris aux Sassanides, qui l’avaient eux-mêmes emprunté aux Romains), ses membres sont tranchés puis il est décapité. Son corps sera brûlé et ses cendres jetées dans le fleuve, en même temps que ses œuvres. Même après sa mort, Al Halladj n’échappera pas aux vicissitudes politiques, puisque la mère du calife, favorable à ses théories, récupèrera sa tête et la fera conserver dans le palais califal.
Même si ses œuvres sont brûlées à sa mort, ses disciples récupèrent ses écrits et ses poèmes, comme des distiques (riouayat), des oraisons poétiques (les chatahat), ou encore un traité théologique sur Satan (Kitab al Taouasin). Sa pensée survécut ainsi à son supplice.
Al Halladj a développé toute une pensée mystique, qui va profondément influencer ensuite les mystiques en général, les soufis en particulier, et surtout Roumi. Mêlant la prose rimée (sadj) et les vers, ses textes sont aussi des poèmes, souvent très beaux.
Pour Al Halladj, le but ultime est d’atteindre Dieu, de se fondre en lui, de ne faire plus qu’un avec lui. Cette fusion ne doit pas passer par la contemplation (c’est ce que théorise Jounaïd), mais au contraire par l’extase. D’où l’importance de l’amour : il faut s’enivrer de l’amour de Dieu, de l’amour pour Dieu. « Je suis devenu celui que j’aime, et celui que j’aime est devenu moi. Nous sommes deux esprits fondus en un seul corps ! Si vous me voyez, vous le voyez lui aussi et si vous le voyez vous me voyez aussi », écrit-il dans un de ses poèmes. Au final, cela mène à un anéantissement du soi, tout entier absorbé dans l’Être divin : c’est la fana, la disparition de l’âme en Dieu. D’où le fameux « Ana el-Haqq », « Je suis la Réalité, je suis la Vérité », d’Al Halladj, qui choqua tellement ses contemporains, car « le Vrai » (al-Haqq) est l’un des noms secrets de Dieu dans l’islam. Al Halladj affirmait ainsi non seulement avoir atteint la Vérité, but ultime de toute démarche mystique, mais aussi être devenu semblable à Dieu, ce qui suffisait pour passer de l’hétérodoxie à l’hérésie. De même pour les miracles : si l’islam reconnaît que de saints hommes peuvent, par la grâce divine, accomplir des prodiges (karamas), les interventions divines (moudjizat) sont réservées aux Prophètes, tel Moïse invoquant la colonne de feu pour se guider dans le désert ; or Al Halladj revendiquait pour ses propres actions le second terme (moudjizat) et non le premier, se posant donc comme un prophète plus que comme un saint homme, ce qui faisait désordre évidemment dans la mesure où Mahomet dans la théologie musulmane est présenté comme le « sceau des Prophètes », donc comme le dernier *. Al Halladj fut d’ailleurs effectivement considéré par ses disciples comme un Prophète, voire comme une incarnation divine. Or le cœur de la foi musulmane est la croyance en un Dieu unique, qui n’a pas d’associé, car il transcende en tout point ses créatures (c’est ce qu’on appelle le taouhid, le dogme de l’unicité divine). Même si Al Halladj prit officiellement position contre toute forme d’associationnisme (chirk), il n’en reste pas moins que cette union mystique à Dieu, dans laquelle le croyant devenait lui-même Dieu, dans laquelle Dieu s’incarnait en sa créature au point que « le voir, c’est me voir, et me voir, c’est le voir », s’éloignait violemment de l’orthodoxie.
De plus, dans cette lecture avant tout mystique de la religion, Al Hallâj faisait passer au second plan les rites et les usages religieux – d’où sa volonté de supprimer le pèlerinage à La Mecque, ou plutôt de le remplacer par un pèlerinage « spirituel » ou « en esprit.
Car Al-Halladj ne fut pas condamné à mort pour avoir dit « ana'l-haqq ». Après son arrestation, il fut accusé de diverses choses, mais, d’après le professeur Ernst, spécialistes de l’Islam il fut mis sur la sellette après la découverte par les inquisiteurs dans ses papiers d’un document qui recommandait à ceux qui n’avaient pas les moyens de s’offrir le pèlerinage du Hadj de se fabriquer un modèle réduit de la Kaaba chez eux et de faire la circumambulation (taouaf) autour puis de faire l’aumône aux pauvres et de nourrir et des orphelins, ce qui équivaudrait pour eux à l’accomplissement du Hajj (pèlerinage à La Mecque). Un des juges s’est alors retourné vers Al-Halladj et lui dit en arabe « damouka halal », c’est-à-dire « ton sang peut maintenant être légalement versé ». Autrement dit « maintenant on te tient ! »
Ce refus du culte permet à Al Halladj de voir toutes les religions comme les facettes d’un même tout. Il est possible que, lors de son séjour en Extrême-Orient, Al Halladj ait été influencé par le bouddhisme, qui l’aurait poussé à considérer que les formes extérieures de religiosité comptent moins que le parcours intérieur du vrai croyant. Même s’il est difficile d’en faire un artisan du dialogue interreligieux sans forcer sa pensée, cette position globalement universaliste a poussé l’orientaliste français Louis Massignon à faire une lecture christique de son supplice : crucifié pour avoir affirmé qu’il entretenait une relation spéciale à Dieu, défendant une religion faite d’amour et non de culte, pardonnant à ses bourreaux au moment de sa mort, pour Massignon Al Halladj est un nouveau Christ, la preuve que l’islam est une religion d’amour et de paix.
Doctrine d’al-Halladj sur les attributs divins d’après al-Qu’haïr.
Rien ne lui est supérieur et il ne repose sur rien.
Il n’est confronté à rien (ouala youqabilouhou hadd) et rien ne l’entoure.
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Il n’est limité par aucun « derrière » ni limité par aucun « devant ».
Aucun « avant lui »ne l’a fait apparaître et aucun « après Lui » ne lui succèdera.
Rien ne l’englobe.
Aucun étant ne l’a conduit à être (lam youjidhou kan).
Aucune inexistence ne peut l’empêcher d’être (oualam youfqidhou lais).
On ne peut pas le représenter (wousfouhou la sifata lahou).
Il agit sans cause et gratuitement (illa).
Son être n’a pas de durée (amad).
Il est totalement transcendant et au-delà de ses créatures : il n’y a pas la moindre délibération (miza) dans ses créations, ni labeur (ilaj) dans son action.
Il se distingue totalement de ses créatures par sa préexistence (bayanahoum biqidami) tout comme elles s’en distinguent totalement de par leur nature contingente (kama bayanouh bihououthihim).………………………
Il est le Premier et le Dernier, le Manifeste et le Caché, le Proche (al-qarib) et le Lointain (al-ba'id), il n’existe rien de rien qui puisse lui être comparé, il entend tout et voit tout.
* Mani se disait déjà le dernier des prophètes ou le sceau de la prophétie.
CONCLUSION.
LA PREMIÈRE DES DIFFÉRENCES OU DISCRIMINATIONS FAITES PAR L’ISLAM EST LA DIFFÉRENCE DE TRAITEMENT ENTRE MUSULMANS ET NON-MUSULMANS.
Aucune autre religion sur terre n’a institué une telle différence de traitement entre ses membres et les fidèles d’autres religions. Les musulmans sont supérieurs aux non-musulmans.
Le verset 110, chapitre 3. « Vous formez la meilleure communauté suscitée pour les hommes : vous ordonnez ce qui est convenable, vous interdisez ce qui est blâmable ».
Et 181, chapitre 7. « Il existe dans ce que nous avons créé une communauté dont les membres se dirigent selon la Vérité et qui ; grâce à celle-ci, observent la justice ».
Sont très clairs à ce propos.
Cette supériorité du musulman par rapport au non-musulman (ne faisant pas partie des gens du Livre en l’occurrence) se retrouve d’ailleurs aussi en ce qui concerne les esclaves. Le verset 221 du chapitre 2 est sans équivoque à ce sujet. Un esclave croyant vaut mieux qu’un homme libre et polythéiste.
Situés hiérarchiquement en dessous en valeur humaine aux yeux de Dieu, viennent en effet les gens dits d’un livre c’est-à-dire les juifs, les chrétiens (qui ne tiennent pas l’homme Jésus comme étant plus qu’un simple prophète ou que le messie d’Israël annoncé par les Écritures juives), les sabéens ou à l’extrême rigueur les zoroastriens-mazdéens (mages) pour certains docteurs de la Loi musulmane.
Étant ici bien précisé ici qu’aucun « protectorat » de type dhimma ou dhimmitude, en bref de statut de seconde zone, n’est prévu pour les kouffar c’est-à-dire ceux qui n’appartiennent ni à la communauté qui est la meilleure aux yeux de Dieu ni à la communauté des gens d’un seul livre (les yézidis d’Irak les hindouistes les bouddhistes les shintoïstes en bref les païens sans oublier les athées ni les agnostiques : tous sont par définition hors la loi en terre d’islam c’est-à-dire dans les pays ou s’applique la loi musulmane dite charia).
Enfin tout en bas de l’échelle, il y a ceux qui ne sont pas des hommes ni des femmes libres, qui peuvent être achetés ou vendus par définition : les esclaves.
Ces derniers n’ont aucun droit et doivent bien entendu obéir à toutes les volontés de leur maître.
En résumé donc il y a en terre d’islam les 5 discriminations basiques.
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— Musulmans/non-musulmans.
— Hommes/femmes.
— Libres/ esclaves
— Gens du Livre : Juifs chrétiens non trinitaristes (ceux qui ne font pas le signe de croix) sabéens zoroastriens (mages ?)
— Polythéistes païens chrétiens trinitaristes (ceux qui font le signe de croix) athées.
Que conclure d’un tel constat sinon qu’une telle conception de Dieu et de l’ordre divin n’a rien à voir avec celle des philosophes. L’islam est par définition une soumission à une conception de Dieu qui n’est pas un simple déisme du type « grand architecte » de l’univers. Par rapport au dieu des philosophes, l’islam a été une gigantesque régression. Il est clair par exemple que le Coran diabolise ceux qui ne sont pas dans son camp.
Verset 76 du chapitre 4 : « Les croyants combattent dans le sentier de Dieu, et ceux qui ne croient pas combattent dans le sentier du Taghout *. Eh bien, combattez les alliés du Diable, car la ruse du Diable est assurément la plus faible ».
* Terme arabe difficile à traduire, c’est presque un hapax. Le terme est mentionné huit fois par le Coran, mais le mot taghout ne signifie rien de précis en arabe et il est peut-être d’origine étrangère. Le sens de ce mot est donc passablement incertain : le taghout, ce seraient les divinités prises globalement ou dans leur ensemble. Dans le vocabulaire de l’islam contemporain, le terme taghout désigne tout ce qui est mal, dangereux, novateur ou tentateur.
LE CAS DE CEUX QUI CHOISISSENT CARRÉMENT UNE AUTRE RELIGION.
Les musulmans pieux sont convaincus qu’un jour toute l’humanité deviendra musulmane, et qu’ils étendront la maison de l’islam (Dar al islam) au monde entier. La conversion à l’islam est encouragée par différents moyens. En même temps, la conversion à une religion autre que l’islam (apostasie) est interdite de facto.
« On ne connaît aucun cas dans lequel le prophète Mahomet a ordonné la peine de mort contre quelqu’un ayant renié l’Islam ». Ici, Linda Bogaert déplace la charge de la preuve vers le lecteur. Mais un tel cas a été relaté par Ibn Ichaq, dans le cadre de la conquête de La Mecque par Mahomet et figure aussi dans la Tabaqat al-Kabir d’Ibn Sa’d.
Sirat d’Ibn Ichaq page 550. « L’apôtre de Dieu avait ordonné à ses généraux, quand ils entrèrent dans la Mecque, de ne combattre que ceux qui leur résistaient à l’exception d’un petit nombre d’individus qui devaient être tués même derrière les voiles de la Kaaba. Parmi eux il y avait Abdoullah Sa’d…… la raison pour laquelle il ordonna qu’on le tue fut qu’il avait été musulman et avait couché par écrit les révélations, puis qu’il avait apostasié et était revenu chez les Couraïchites (à La Mecque) pour se réfugier chez son frère de lait Osman Affane. Ce dernier le cacha puis le conduisit chez l’apôtre de Dieu quand la situation à La Mecque fut stabilisée, et demanda qu’il soit gracié. On raconte que l’apôtre de Dieu resta longtemps silencieux avant de répondre oui.
Quand Osman fut parti Mahomet dit à ses compagnons assis autour de lui : « je n’ai pas répondu tout de suite, car j’attendais que l’un d’entre vous se lève et lui coupe la tête ». Un des Ansars lui répondit : « Mais alors pourquoi ne m’as-tu pas fait signe, O apôtre de Dieu ? ». Il répondit qu’un prophète ne faisait pas exécuter quelqu’un en le pointant du doigt. »
La Tabaqat al-Kabir corrobore Ibn Ichaq page 174 : « Un des Ansars avait juré de tuer Ibn Abi Sarh [l’Abdoullah déjà mentionné] s’il le voyait. Osman, qui était son frère adoptif alla trouver le prophète pour intercéder en sa faveur. L’Ansar attendait le signal de le tuer. Osman plaida sa cause et il le laissa partir. L’apôtre de Dieu demanda au Ansar : pourquoi n’as-tu pas tenu ta promesse ? Il répondit : O apôtre de Dieu, j’avais la main sur la poignée de mon épée et n’attendait qu’un signal de ta part pour le tuer. Le prophète répondit qu’un tel signe eut été une violation de la loi. Il ne convient pas qu’un prophète fasse de signe ».
Ali Dachti, étude de la carrière prophétique de Mahomet, page 98.
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« Le dernier mentionné [dans la liste des personnes à tuer] était un des scribes utilisés à Médine pour écrire les « révélations ». Dans un certain nombre de cas, mais avec le consentement de Mahomet, il avait changé la formule finale de certains versets. Lorsque Mahomet disait par exemple : « Et Dieu est puissant et sage », Abdoullah Sarh suggérait « sachant et sage », et le prophète répondait qu’il n’y voyait pas d’objection. Après avoir enregistré toute une série de changements de ce genre, Abdoullah avait renoncé à sa foi en l’islam au prétexte que les révélations, si elles étaient vraiment divines, ne pouvaient pas être remplacées par ce qu’un scribe comme lui pouvait souffler. Après avoir ainsi apostasié, il partit pour La Mecque rejoindre les Couraïchites.
Sirat, page 550 toujours. « Un autre [à être tué] fut Abdoullah Khatal… Il était devenu musulman et l’apôtre l’avait envoyé pour collecter l’impôt dû aux pauvres en compagnie d’un des Ansars. Il avait avec lui un affranchi qui le servait (il était musulman). Quand ils eurent fait halte, il ordonna à ce dernier de tuer une chèvre et de lui préparer à manger, puis il s’endormit. Lorsqu’il se réveilla, l’homme n’avait toujours rien fait, alors il le roua de coups et le tua puis apostasia. Il avait deux cantatrices, Fartana et une amie, qui avaient l’habitude de chanter des chansons satiriques à propos de l’apôtre, aussi ordonna-t-il qu’elles soient tuées avec lui ».
Tabaqat tome 2 p.172 : « L’apôtre de Dieu est entré dans La Mecque et sur sa tête il y avait un casque. Ensuite il l’ôta. Ma'n et Mousa Ibn Dawoud ont écrit dans leur version des événements : quelqu’un vint le trouver et lui dit « Ô apôtre de Dieu, Ibn Khatal s’accroche aux rideaux de la Kaaba (droit d’asile). Alors l’apôtre de Dieu lui répondit : « Tue-le ».
Khatal n’a pas eu autant de chance qu’Abdoullah Sa’d. Quand Osman fut devenu calife (et un drôle de calife soupçonné d’avoir manipulé le texte coranique) ledit Abdoullah Sa’d son ami (encore un drôle de musulman) devint gouverneur d’Égypte.
Sirat page 551. Un autre [dont l’exécution avait été ordonnée] fut Miqyas Houbaba parce qu’il avait assassiné un Ansar qui avait tué son frère accidentellement, et s’en était ensuite retourné chez les Couraïchites comme polythéiste. Page 492. Miqyas Soubaba était venu de la Mecque en tant que musulman, et avait alors déclaré : je m’adresse à vous en tant que musulman venu chercher le prix du sang de mon frère tué par erreur. L’apôtre avait alors ordonné qu’on lui verse le prix du sang pour son frère Hicham et il était resté quelque temps avec l’apôtre de Dieu. Ensuite il attaqua l’assassin de son frère, le tua, et rentra à La Mecque comme apostat.
Note de la rédaction. On ne sait pas s’il a été exécuté pour avoir vengé son frère ou pour être revenu à sa religion originelle après avoir obtenu ce qu’il était venu chercher.
Précisions historiques maintenant.
Les guerres dites de la Ridda, ayant éclaté en Arabie juste après la mort de Mahomet survenue en 632, contrairement à leur appellation officielle dans l’historiographie musulmane (Ridda) ne furent pas en fait de vraies manifestations d’apostasie, mais de la part des peuples vaincus et soumis par la force des tentatives de retrouver leur antique liberté, car pour eux, à l’époque, accepter les conditions dictées par leurs vainqueurs ne signifiait absolument pas abandonner leurs idées religieuses antérieures (du paganisme arabe vaguement teinté de monothéisme judéo-chrétien), mais seulement faire acte d’allégeance à une nouvelle puissance politique, notamment en lui payant un tribut, quel que soit le nom donné à ce nouvel impôt (zakat ou djizya). Il serait donc plus juste d’en faire une sorte de guerre civile et non la première des apostasies.
Beaucoup de tribus voulaient ne plus être musulmanes surtout pour des raisons fiscales (pour ne plus payer la dîme appelée zakat) et devaient être gardées dans l’empire par une violence horrible. Face à cette révolte générale de toutes les tribus ayant été soumises au nouvel État médinois, Abou Bakr se montra intransigeant : le refus de payer l’impôt (zakat) fut considéré comme impardonnable.
Tabari (Histoire des prophètes et des rois tome X la conquête de l’Arabie) raconte que le général musulman Khaled Ibn Oualid aurait reçu l’ordre suivant.
Lettre d’Abu Bakr aux apostats. Au nom de Dieu, le Clément et le Miséricordieux. De la part d’Abou Bakr, calife de l’apôtre de Dieu…
Je lui ai ordonné de combattre ceux qui le renient pour cette raison. Il n’épargnera donc aucun de ceux dont il pourra s’emparer, mais les brûlera vivants, les abattra par tous les moyens possibles, et emmènera les femmes et les enfants en captivité… J’ai ordonné à mon messager de lire cette lettre dans tous les lieux de rassemblement… Si, lorsque les musulmans font l’appel à la prière, ils font de même, laisse-les tranquilles ; Mais, s’ils ne font pas l’appel à la prière [avec les musulmans], ne leur accorde aucun répit.
Ordre appliqué à la lettre par Khaled (exécution de Malik ben Nouwaïra et enlèvement de sa femme).
Par contre, soyons clairs ! Il n’y a dans le Coran aucun verset impliquant indubitablement la peine de mort en ce bas monde pour les musulmans se convertissant à une autre religion que l’islam (ou à une absence de religion précise : athéisme, agnosticisme).
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Les trois seuls versets pouvant être interprétés dans ce sens ne sont en réalité pas très clairs. Les voici.
Chapitre 2, verset 217. « Ils t’interrogent sur le fait de faire la guerre pendant les mois sacrés. – Dis : combattre pendants ces mois-là est un péché grave, mais plus grave encore aux yeux de Dieu est de détourner les gens de la voie de Dieu, de se comporter de façon impie envers Lui et la Mosquée sacrée, et d’en expulser ses fidèles. La persécution est plus grave que le meurtre. Or, ils ne cesseront de vous combattre jusqu’à, s’ils le peuvent, vous détourner de votre religion. Ceux d’entre vous qui abjureront leur religion et mourront infidèles, vaines seront leurs actions dans la vie immédiate et la vie future. Voilà ceux qui iront en enfer où ils demeureront éternellement ».
Le passage « vaines seront pour eux leurs actions dans la vie immédiate » laisse penser à une peine terrestre pour les apostats, mais comme cela arrive fréquemment, le Coran n’est pas clair sur ce qu’il implique.
Chapitre 4, verset 89. « Ils aimeraient vous voir mécréants, comme eux le sont devenus : vous seriez alors tous pareils ! Ne prenez donc pas d’alliés parmi eux, jusqu’à ce qu’ils émigrent dans le sentier de Dieu. Mais s’ils tournent le dos, alors saisissez-les, puis tuez-les où que vous les trouviez ; et n’ayez parmi eux ni défenseur ni allié ».
L’expression « tourner le dos » voudrait dire « renier l’islam ».
Chapitre 9, verset 74. « Ils jurent qu’ils n’ont pas dit de telles paroles (impies), alors qu’en vérité ils ont rejeté la foi après avoir été musulmans. Ils ont projeté ce qu’ils n’ont pu accomplir. Mais ils n’ont pas de reproche à faire si ce n’est que Dieu – ainsi que Son messager – les a enrichis par Sa grâce. S’ils se repentent, cela vaudra mieux pour eux. Mais s’ils tournent le dos, Dieu les affligera d’un douloureux châtiment, ici-bas et dans l’au-delà ».
Par contre il existe de nombreux hadiths sans équivoque à ce sujet ce qui fait que certaines écoles de droit islamique ont même une définition très large de la notion d’apostasie. Tout démenti apporté à quelque principe que ce soit des croyances musulmanes est considéré comme une apostasie en puissance.
Nous qualifierons dans cet essai d’apostat l’homme qui, exerçant son droit à la liberté religieuse, décide de se convertir à une religion ne se revendiquant pas de l’Islam.
La partie de la charia consacrée au problème des apostats est dite « takfir » en arabe théologique.
Les mots irtidad et ridda désignent tous deux l’apostasie. Ridda semble surtout utilisé pour définir l’apostasie qui transforme la foi musulmane en incroyance (koufr en arabe) tandis qu’irtidad renvoie au passage de l’islam à une autre religion. Une personne née de parents musulmans, mais qui, plus tard, abandonne l’islam, est appelée murtadd fitri – le terme fitri voulant dire naturel, mais aussi instinctif, congénital, natal, inné. Celui qui se convertit à l’islam, mais qui l’abandonne par la suite est un murtadd milli, du mot milla qui désigne la communauté religieuse. Le murtadd fitri peut être également considéré comme quelqu’un d’anormal, de dénaturé, qui renverse le cours naturel des choses, et dont l’apostasie constitue un acte volontaire et obstiné de trahison envers Dieu et les vrais croyants ; ainsi qu’une désertion perfide de la communauté. Le murtadd milli quant à lui est un traître à la communauté musulmane, qui se rend coupable d’un acte de sécession aussi brutal que violent.
Coran chapitre 2, verset 256 : « Pas de contrainte en religion… ». Cette citation est devenue aujourd’hui la plus célèbre du Coran, puisque très médiatisée, dans la presse, à la radio, à la télévision [même le pape Benoît XVI a cité ce verset, dans son fameux discours de Ratisbonne, le 12 septembre 2006].
Comment comprendre cette fameuse formule sur la non-contrainte en religion, puisque tant de versets coraniques appellent au contraire ?
L’apostasie n’est pas le simple fait de ne pas être musulman, mais de quitter la foi musulmane après l’avoir embrassée, ce qu’aucun de ces versets ne précise.
Nous avons des normes contradictoires dans le Coran et la Sounna concernant cette question.
Le Coran dit : « Pas de contrainte en religion » (2, 256). On est libre de devenir musulman, voire encouragé à le faire, mais le musulman, qu’il soit né d’une famille musulmane ou converti à l’islam, n’a pas le droit de quitter sa religion. Il s’agit donc d’une liberté religieuse à sens unique. Le Coran ne prévoit pas de châtiment précis contre l’apostat bien qu’il en parle à plusieurs reprises en utilisant soit le terme koufr (mécréance), soit le terme ridda (abjuration). Seuls des châtiments dans l’autre vie y sont prévus si l’on excepte les trois versets que nous avons cités : 2,217 ; 4,89 ; 9,74.
Exemple : verset 137, chapitre 4. « Ceux qui avaient cru et qui sont ensuite devenus incroyants, puis, de nouveau, croyants, puis incroyants, et qui n’ont fait que s’entêter dans leur incrédulité : Dieu ne leur pardonnera pas ; il ne les guidera pas ».
Les propos que l’on attribue à Mahomet sont en revanche plus explicites. Le coran ne prévoit aucune peine précise en ce bas monde pour les apostats et se contente si l’on peut dire, de les menacer de l’enfer, mais il n’en va donc pas de même pour les hadiths qui en parlent beaucoup et de façon plus
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catégorique. La peine de mort pour apostasie est par conséquent surtout fondée sur ces hadiths, mais rappelons aux lecteurs que la loi islamique est autant fondée sur les hadiths que sur le Coran : les deux sources ont pareillement force de loi.
Boukhari. Tome 9. Livre 83. Hadith N° 37. « L’apôtre de Dieu n’a jamais fait tuer personne sauf lorsqu’il fut confronté à une des trois situations suivantes : 1) Une personne qui en avait tué une autre injustement (en vertu de la Qisas), 2) Une personne mariée qui avait commis un adultère 3) un homme qui avait combattu Dieu et son apôtre et renié l’islam pour devenir apostat ».
Sahih Mouslim 3175. D’après Abd Allah ibn Massoud (que Dieu soit satisfait de lui), l’Envoyé de Dieu a déclaré : « Il n’est pas permis de verser le sang d’un musulman qui témoigne qu’il n’y a d’autre divinité que Dieu et que je suis son Envoyé, sauf dans les trois cas suivants : l’époux adultère, le coupable d’un meurtre et l’apostat qui abandonne la communauté musulmane ».
Boukhari. Tome 9. Livre 84. Hadith N° 64. « L’apôtre de Dieu a dit : Dans les derniers temps, il y aura de jeunes gens stupides qui parleront bien, mais dont la Foi n’excèdera pas leurs paroles et qui abandonneront leur religion comme une flèche sortant du jeu. Aussi, là où vous les trouverez, tuez-les, car quiconque les tuera recevra une récompense le jour du jugement dernier ». Boukhari. Tome 4. Livre 52. Hadith N° 260. Rapporté par Ikrima : Ali faisait brûler un certain nombre de personnes et cette nouvelle arriva aux oreilles d’Ibn Abbas, qui s’exclama : « À sa place, je ne les aurais pas brûlées, puisque le Prophète a dit « Ne punissez personne de la peine de Dieu ». Mais je les aurais tuées assurément puisque le Prophète a dit : ‘Si quelqu’un (un musulman) rejette sa religion, tuez-le ».
Boukhari. Tome 9. Livre 84. Hadith N° 58. « Le Prophète envoya Mou'adh bin Jabal chez lui et quand Mou'adh fut arrivé il sortit un coussin pour lui et lui demanda de descendre (pour s’asseoir sur le coussin). Or un homme enchaîné se trouvait à côté d’Abou Moussa. Mou'adh lui demanda : « Qui est-ce ? » Abou Moussa lui répondit : « c’est un juif qui est devenu musulman et qui est ensuite revenu au judaïsme. » Abou Moussa demanda ensuite à Mou'adh de s’asseoir, mais Mou'adh lui répondit : « Je ne m’assoirai pas tant qu’il n’aura pas été tué. C’est le jugement de Dieu et de Son apôtre (pour de tels cas) et il le répéta trois fois. Alors Abou Moussa ordonna que l’homme soit tué… »
[Il convient de noter que cet incident eut lieu du vivant de Mahomet. À cette époque, Abou Moussa le représentait comme gouverneur et Mou’adh en tant que vice-gouverneur].
Al-Tabari, Histoire des prophètes et des rois (Tarikh Al-rousoul oua al-moulouk). Tome 17 pages 187-188. Propos tenus par le général rebelle kharidjite Al-Khirrit ben Rashid, de la tribu des Banou Nadjiah, afin de pousser les chrétiens de sa tribu à se méfier du calife Ali, non sans succès au début d’ailleurs, en 658. « Il dit à ceux qui avaient refusé de payer la sadaqa : gardez fermement votre sadaqa (aumône religieuse) réservez la aux membres de votre famille, ou si vous le souhaitez, donnez la aux plus démunis d’entre vous ».
Parmi eux, il y avait beaucoup de chrétiens qui avaient accepté l’islam, mais qui, lorsque la discorde était apparue, s’étaient dit « Par Dieu, la religion (din) que nous avons abandonnée est meilleure et plus juste que celle que suivent ces hommes. Leur religion ne les empêche pas de verser du sang, ni de terroriser les voyageurs et de saisir nos biens ». Ils revinrent donc à leur ancienne religion. Al-Khirft alla les trouver pour leur dire : « Malheur à vous ! Connaissez-vous l’avis d’Ali concernant les chrétiens qui acceptent l’islam et reviennent ensuite au christianisme ? Par Dieu, il ne voudra rien entendre, il n’acceptera aucune excuse, il n’acceptera aucune repentance. Son avis en ce qui les concerne est de leur couper immédiatement la tête dès qu’on s’en est saisi ».
Plusieurs hadiths prescrivent donc la peine de mort pour les apostats sans circonstances atténuantes. Or en terre d’Islam ainsi que nous avons eu maintes fois l’occasion de le voir, les hadiths contribuent tout autant que le Coran à faire la Loi.
L’opposé de l’iman (foi) est le koufr (« impiété », littéralement « ingratitude ») et le musulman qui ne croit pas en Dieu ou qui commet un grand péché est un kafir, un impie.
L’apostat « qui persiste dans son égarement est au dernier degré de la hiérarchie humaine, au-dessous même de l’infidèle ».
Dans l’absolu, ce terme désigne toute personne qui ne professe pas l’islam. Par ailleurs, celui qui renonce à l’islam ou qui se tourne vers une autre croyance est considéré comme un apostat (murtadd).
Al Maouardi définit comme suit les apostats. Sont apostats ceux qui étant légalement musulmans, soit de naissance, soit à la suite de conversion, cessent de l’être, et les deux catégories sont, au point de vue de l’apostasie, sur la même ligne.
Al-Ghazali considère qu’il y a apostasie quand un musulman renie les dogmes essentiels : monothéisme, mission prophétique de Mahomet, Jugement dernier.
Et dans les premiers temps de l’islam, après la mort de Mahomet, se dire prophète fut automatiquement considérée comme étant une preuve d’apostasie.
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Il existe donc des désaccords entre les docteurs de l’islam et les écoles de jurisprudence islamiques à ce sujet.
Certains dans le fiqh chaféite comme Naouaoui et al-Misri sont d’avis que la sanction de l’apostasie s’applique à tout musulman qui…
A) A bien compris et professé qu’il n’y a de Dieu qu’Allah et que Mahomet est le messager d’Allah » (Chahada).
B) A connaissance de la charia connue de tous les musulmans.
C) Est sain d’esprit sain au moment de l’apostasie.
D) A atteint ou dépassé l’âge de la puberté.
Les signes de l’apostasie d’après Oumdat as-Salik oua Ouddat an-Nasik (Dépendance du voyageur) un manuel du XIVe siècle de l’école de jurisprudence (Fiqh) chaféite, pages 595 à 598……
1) S’incliner devant le soleil, la lune, des éléments de la nature, des idoles, une croix ou des images représentant symboliquement Dieu que ce soit de façon sarcastique ou avec conviction.
2) Exprimer l’intention de devenir incroyant, même si on hésite à la faire.
3) Avoir des propos qui impliquent l’incroyance comme « Dieu est une des trois » [personnes divines] ou « Je suis Dieu ».
4) Injurier, mettre en cause, mettre en doute l’existence de Dieu ou le Prophète de l’Islam, ou que le Prophète a été envoyé par Dieu.
5) Injurier, nier, ou ridiculiser des versets du Coran ou l’Islam.
6) Nier le caractère obligatoire de quelque chose considéré comme tel par l’ijma (consensus des musulmans).
7) Croire que quelque chose puisse existe en soi ou par nature sans que Dieu le veuille.
CHARIA.
Il n’est pas permis d’attenter à la vie d’un musulman sauf dans les trois cas suivants : mécréance après avoir cru, l’adultère après le mariage et l’homicide sans motif.
La seule différence notable entre les Écoles réside dans le statut du crime en question. La plupart lui donnent le statut de hadd, c’est-à-dire de crime contre Dieu, ce qui rend sa peine absolument indiscutable (la mort), tandis que les écoles chiite et hanafite ne lui donnent pas ce statut, elles souhaitent moduler la peine. Ces deux Écoles préconisent ainsi notamment que les femmes ne doivent pas être exécutées, mais emprisonnées puis battues régulièrement (à l’heure de chaque prière chez les chiites, tous les trois jours chez les hanafites) jusqu’à qu’elles se repentent et redeviennent musulmanes ou en meurent. Tout est dans la nuance.
La doctrine définit trois sortes de petits djihads contre les ennemis intérieurs de l’islam, considérés comme étant les plus pervers parce qu’ils peuvent rompre l’unité et l’harmonie de la communauté : les apostats, les dissidents et les déserteurs ou brigands.
Si les théologiens ne s’entendent pas sur la punition à infliger aux impies, si elle doit être terrestre ou réservée à l’au-delà, il y a unanimité en ce qui concerne celle à prescrire aux apostats : la peine de mort.
L’apostasie collective donne lieu à des guerres. Le sort réservé aux apostats est alors pire que celui réservé à l’ennemi, aucune trêve n’étant permise avec les apostats.
Si la persuasion pour tenter de ramener l’apostat à la religion s’avère vaine – les malikites et les hanbalites accordent un délai de trois jours de réflexion –, le coupable doit être exécuté ses biens et propriétés confisqués par l’État.
En ce qui concerne l’épouse apostate, les malikites et les chafiites considèrent qu’elle doit subir le même sort que son mari, tandis que les hanafites et les hanbalites préconisent qu’elle soit persuadée de rejoindre l’islam par la force, en étant emprisonnée ou battue pendant plusieurs jours, à défaut de quoi elle devient une esclave et elle est considérée comme butin.
Quant aux enfants, il faut attendre qu’ils atteignent l’âge adulte avant de les juger, tout comme les aliénés, dont il faut attendre qu’ils recouvrent la raison.
Soyons intellectuellement honnêtes et reconnaissons sans taqiya (sans réserve casuistique) que, même si la charia – selon toutes les grandes écoles de l’Islam, tant sunnites que chiites – prescrit en vertu desdits hadiths la peine de mort pour les apostats ; il existe de nombreuses autres méthodes pour leur rendre la vie impossible.
La mort civile. Dissolution du mariage et retrait de la garde des enfants. Exhérédation (perte de ses droits à hériter).
Refus de changer la religion indiquée sur la carte d’identité.
Ce subterfuge est utilisé dans de nombreux pays islamiques. Étant donné que la législation dépend de la religion du citoyen, celle-ci est également mentionnée sur la carte d’identité. Ce fut le cas par exemple pour la musulmane malaisienne Lina Joy, qui s’était convertie au christianisme. Étant donné l’impossibilité de faire changer l’intitulé de sa religion sur sa carte d’identité, il lui était également
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impossible d’épouser son fiancé chrétien, puisqu’une musulmane ne peut se marier qu’avec un musulman.
Emprisonnement. En 2000, en Malaisie, quatre hommes ont été condamnés à 20 mois d’emprisonnement pour avoir quitté la religion musulmane.
Assassinat par des « musulmans dévots » jamais identifiés ou condamnés à des peines minimales.
Bien que le Coran ne préconise pas explicitement l’assassinat des apostats, il diffuse en effet un tel opprobre sur eux que certains fidèles se sentent un devoir de le faire.
Notes manuscrites de Pierre de La Crau retrouvées par ses enfants et insérées par eux à cet endroit.
Islam is peace and love (Coran 2, 256). Le mal est fait. Suite à toute une série de guerres défensives permanentes (comme le montre l’exemple de Tamerlan, l’empire musulman est dans l’Histoire le seul exemple d’empire à ne s’être construit que par des guerres défensives) l’islam s’est maintenant étendu tout autour du globe. Et lorsque l’islam était adopté par quelqu’un cet individu se retrouvait prisonnier de sa « din » (religion). Le moindre signe de relâchement – par exemple élever ses enfants hors de la foi musulmane – était puni de mort. Ainsi l’islam a-t-il progressivement supplanté les autres religions dans ces parties du monde.
Et puisque nous parlons de Tamerlan (1336-1405), nous ne résisterons pas au plaisir de citer cet extrait d’un chef-d’œuvre de la littérature de son pays à propos du vrai monothéisme.
« Même ceux qui rendent un culte à d’autres dieux que moi, et qui leur sacrifient avec ferveur, me rendent aussi par là même hommage, ô fils de Kounti, bien que ce soit en dehors des règles. Car je suis le seul véritable bénéficiaire et seul seigneur de tout sacrifice même s’ils l’ignorent en vérité. Qui m’offre avec dévotion ne serait-ce qu’une feuille, une fleur, un fruit, de l’eau, cette offrande faite d’une âme pure eh bien je l’accepte. Car je suis le même pour tous et personne n’est spécialement haï ou élu par moi. Mais ceux qui m’aiment avec dévotion demeurent en moi et moi je suis en eux » (Bhagavad Gita, 9, 23-29, dialogue entre le dieu Krishna/Vishnou et le prince Arjouna).
La notion d’apostasie a disparu du monde occidental, où l’on peut parfaitement évoquer au grand jour l’idée de renoncer aux croyances chrétiennes ou devenir un chrétien non pratiquant. Et bien évidemment, il n’existe pas de sanctions pénales à l’encontre des personnes désireuses de se convertir à l’Islam en vertu du principe « nulle contrainte en matière de religion » mentionné ci-dessus.
Dans les pays islamiques, par contre, la conséquence de cette revendication frôle la mort pure et simple. Le coran repousse à l’autre monde le châtiment des apostats, mais les hadiths sont beaucoup plus clairs. Les journalistes occidentaux qui ont consacré d’énergie à combattre le fascisme le nazisme le franquisme en résumé * l’extrême droite à la fin du 20e siècle, n’ont rien vu venir.
* Très en résumé, car le terme « droite » en politique ne désignait à l’origine en 1789 que les royalistes et le terme nazisme le socialisme (national) du parti des travailleurs (allemands).
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LE STATUT JURIDIQUE DES FEMMES.
La supériorité de l’homme sur la femme dans l’islam. La préférence de Dieu pour les hommes se manifeste ainsi par la marginalisation des femmes dans le texte sacré. À l’exception de Marie, les femmes dont il y est question sont anonymes.
C’est sur cette inégalité fondamentale que se fonde la différence entre les hommes et les femmes dans le droit islamique.
1) Devant l’héritage : « Dieu vous ordonne d’attribuer au garçon une part égale à celle de deux filles » (4, 11). De manière plus large, la femme est considérée par le droit musulman comme une mineure à vie, qui nécessite l’autorisation d’un tuteur, à savoir l’homme le plus proche de sa parentèle (son mari, son père, son frère…).
2) Sur le témoignage en justice : « Demandez le témoignage de deux témoins parmi vos hommes. Si vous ne trouvez pas deux hommes, choisissez un homme et deux femmes, parmi ceux que vous agréez comme témoins. Si l’une des deux femmes se trompe, l’autre lui rappellera ce qu’elle aura oublié » (2, 282). Il en résulte que les professions juridiques sont souvent impossibles aux femmes en pays musulmans.
3) Dans le cadre du mariage : La polygamie est autorisée. En revanche, la polyandrie ne l’est pas. « Épousez les femmes qui vous plaisent, deux, trois ou quatre, mais si vous craignez de n’être pas équitables envers celles-ci, alors n’en prenez qu’une, ou les esclaves que vous possédez » (4, 3). S’appuyant sur un autre verset du Coran qui affirme l’impossibilité d’être équitable : « Vous ne pourrez pas être équitables envers vos femmes, même si vous en êtes soucieux » (4, 129), certains états musulmans ont imposé la monogamie. Cependant, en raison du caractère divin du Coran, la polygame ne peut être totalement supprimée.
Le musulman possède le droit de répudiation, mais pas la femme. Même s’il est « pour Dieu l’acte licite le plus abominable », selon Mahomet, il reste un droit dont l’homme n’a pas à se justifier. Son devoir unique est de verser une pension convenable à sa femme (2, 241).
Il a enfin le droit de la battre : « Admonestez celles dont vous craignez l’infidélité ; reléguez-les dans des chambres à part et frappez-les » (4, 34).
4) Par rapport aux obligations religieuses : Si l’homme et la femme sont tenus aux cinq piliers (profession de foi, prière, aumône, jeûne de ramadan, pèlerinage à La Mecque), les femmes ne sont
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pas obligées ni encouragées à aller à la mosquée ; et si elles y vont, elles doivent rester dans un espace réservé. Et l’accès leur est interdit dans les moments d’impureté légale (après un accouchement, pendant les menstruations…).
Il n’y a pas de verset dans le Coran interdisant à une femme d’être imam et de diriger la prière et il semble qu’il n’y ait pas de consensus docteurs de la loi musulmane à ce sujet. Mais pour la grande majorité des musulmans, une femme ne peut pas diriger une prière mixte. Au Maroc, 50 femmes ont été nommées imams mourchidates (conseillères) en avril 2006, mais ces femmes n’ont pas le droit de diriger la prière. Il existe des femmes imams au Danemark, au Canada et en Afrique du Sud.
CONCLUSION.
Dans l’ensemble du Coran, on constate une méfiance vis-à-vis de la femme. Il en découle la volonté d’éviter la mixité – l’affaire des horaires séparés des piscines municipales l’illustre – ou encore de voiler les femmes.
Les inégalités ne sont cependant pas totales. Ainsi, même si les délices sexuels du paradis sont décrits pour les hommes uniquement, il est aussi promis aux femmes une bonne vie : « Certes, nous assurerons une vie agréable à tout croyant, homme ou femme, qui fait le bien » (16, 97). De plus, rien n’interdit dans le Coran à une femme d’être scolarisée ou de participer aux affaires politiques. Elles peuvent aussi travailler. « Une part de ce que les hommes auront acquis par leurs œuvres leur reviendra ; une part de ce que les femmes auront acquis par leurs œuvres leur reviendra » (4, 32). Toute la question est de savoir quels sont les métiers concernés.
Ce rapide tableau souligne l’inégalité de droit et de fait dans l’islam entre l’homme et la femme. Loin de la spiritualité qui pose, d’emblée, l’égale dignité entre l’homme et la femme, à laquelle s’ajoutent de nombreux et grands modèles féminins de sainteté, l’islam ne présente que très rarement la féminité pour ce qu’elle peut apporter à l’humanité en vertu de ses charismes et de son génie propres.
LE SORT DES FEMMES DU VAINCU.
Sahih Muslim. Livre 008, Hadith Numéro 3432.
Il est permis d’avoir des rapports sexuels avec une prisonnière après ses règles ou un accouchement ; si elle est mariée, son mariage est abrogé.
Abou Daoud : Livre 11, numéro 2150.
Abou Sa'id Al Khoudri a déclaré : « L’apôtre de Dieu a envoyé une expédition militaire à Aoutas à l’occasion de la bataille de Honeïn. Ils rencontrèrent leur ennemi et l’affrontèrent. Ils les battirent et les firent prisonniers. Certains des Compagnons de l’Apôtre de Dieu hésitaient à avoir des relations avec les femmes captives à cause de leurs maris païens. Dieu a donc fait descendre le verset coranique « les femmes mariées (vous sont interdites) à l’exception de (celles des prisonniers) tombées entre vos mains ». Note de la rédaction : il s’agit du verset 24 du chapitre 4).
Abou Saïd al-Khoudri a rapporté qu’à la bataille de Honeïn, le Messager de Dieu a envoyé une armée à Autas, qu’elle y a rencontré l’ennemi et l’a combattu. Après les avoir vaincus et faits prisonniers, les Compagnons du Messager de Dieu ont paru s’abstenir d’avoir des relations sexuelles avec des prisonnières parce que leurs maris étaient païens. Alors Dieu, a fait savoir à ce sujet : les femmes déjà mariées, à l’exception de celles tombées entre vos mains (4, 24). C’est-à-dire qu’elles leur étaient permises quand leur période d’idda avait pris fin.
Le viol des femmes des vaincus a toujours fait partie des drames et tragédies de toute guerre. L’espèce humaine est ainsi faite. Ce qui est « embêtant » avec l’islam c’est que ces pratiques ont été cautionnées par Dieu (des versets du Coran) et par des propos (hadiths) voire par l’exemple de Mahomet lui-même.
Le destin des femmes des peuples vaincus est d’être violées, de devenir des esclaves, sexuelles ou pas, avec leurs enfants. Ce fut sans doute, outre le butin et le pillage, la principale motivation des premiers mounafiqoun arabes ayant suivi Mahomet dans ses raids. En l’occurrence ce furent des Mecquois fraîchement convertis à l’islam.
La bataille de Honeïn en 630 a été l’occasion pour Dieu (ou Mahomet ?) de légitimer le viol des femmes des vaincus, en présence de leurs maris. D’après certains hadiths en effet c’est à cette occasion que le verset 24 du chapitre 4 aurait été révélé. Décidément les « asbab al-nouzoul » ou « circonstances de la révélation » n’ont pas fini de nous étonner.
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Pour nos lecteurs qui voudraient comprendre, quelques mots donc sur la cette bataille décisive. Ce fut en effet la dernière tentative des tribus arabes sédentaires (les Thaqif) ou nomades (les Haouazines) de la région d’échapper à l’emprise de l’islam. Les Haouazines y jouèrent même leur va-tout c’est-à-dire leurs familles (qui les accompagnaient).
La bataille de Honeïn opposa donc Mahomet et ses compagnons aux Bédouins de la tribu de Haouazine et de Thaqif en l’an 630 dans une vallée située sur l’une des routes allant de la Mecque à Ta'if, juste après la prise (ou la libération suivant les points de vue) de La Mecque. La bataille s’acheva par une victoire décisive pour les musulmans, qui firent de très nombreux captifs. La bataille de Houneïn est l’une des deux seules batailles mentionnées nommément dans Le Coran.
Chapitre 9, versets 25-26. « Dieu vous a déjà secourus en maint endroit. Le jour de Houneïn, quand vous étiez fiers de votre grand nombre et que cela ne vous a servi à rien. La terre, malgré son étendue vous devint vite étroite ; puis vous avez tourné le dos en fuyards. Mais Dieu fit descendre sa quiétude [« sakina »] sur son messager et sur les croyants. Il fit descendre des troupes (d’anges ?) que vous ne voyiez pas, et châtia ceux qui avaient été infidèles. Telle est la rétribution des mécréants ».
Les Haouazines et leurs alliés les Thaqif commencèrent à mobiliser leurs forces quand ils apprirent que Mahomet et son armée avaient quitté Médine pour prendre (ou libérer) La Mecque. Les malheureux pensaient prendre à revers l’armée musulmane lors du siège de la ville, mais hélas ! pour eux celui-ci ne fut pas nécessaire, car la Mecque, déclarée ville ouverte par ses dirigeants, tomba sans coup férir, et Mahomet marcha donc ensuite sur les Haouazines avec 12 000 hommes.
Le chef bédouin Malik ibn Aouf Al-Nasri tendit une embuscade aux musulmans dans des gorges sinueuses de la route menant à Al-Taïf. Les musulmans, surpris par l’assaut de la cavalerie bédouine, furent d’abord mis en déroute. Ils pensaient que cette cavalerie bédouine campait à Aoutas. Les historiens modernes n’ont pas réussi à reconstruire complètement le cours de la bataille à partir de ce point, car les différentes sources musulmanes donnent des informations contradictoires.
Ce qui en ressort en tout cas c’est que le camp musulman n’est pas aussi uni qu’il paraît et que beaucoup n’ont pas encore compris l’avantage que l’on peut tirer, à la guerre, du ralliement d’anciens ennemis comme les Mecquois. Du coup la masse des combattants a encore grossi, et cette arithmétique inquiète les « vieux » musulmans qui savent que les parts de butin iront en s’amenuisant. Les Médinois commencent donc à gronder face aux nouveaux convertis et l’opposition va croissant.
La bataille sera longue, acharnée, pénible, et les troupes musulmanes loin d’être exemplaires. La victoire sera pourtant au rendez-vous. Les Haouazines seront vaincus et seul comptera finalement le partage de leur immense butin, ainsi que de nombreuses captives qui réconfortent les vainqueurs.
Comme Malik ibn Aouf al-Nasri avait emmené les familles et tous les équipages des Haouazines, les musulmans pourront faire de nombreux prisonniers : 6000 femmes et enfants, 24000 chameaux.
Sirat d’Ibn Ichaq page 593. « PARTAGE DU BUTIN DES HAOUAZINES ET DES CADEAUX POUR GAGNER LE COEUR DES HOMMES… L’apôtre de Dieu leur demanda : « Qu’est-ce qui vous est le plus cher ? Vos fils et vos femmes ou votre bétail ? Ils répondirent : « Tu nous demandes de choisir entre notre bétail et notre honneur ?
Ouyaïna b. Hisn avait pris une vieille femme de chez les Haouazines… Quand l’apôtre rendit les captives en échange de 6 chameaux chacune, il refusa de la rendre. Zouhaïr Abou Souhad lui dit de la laisser partir, car sa bouche était froide et sa poitrine plate ; elle ne pouvait pas concevoir et son mari ne s’en soucierait pas. Alors il la laissa partir pour six chameaux… »
Ces questions de butin peuvent sembler à certains une scandaleuse affaire de comptabilité : il n’en est rien ! Il s’agit du moteur de l’expansion de tous les impérialismes. Ceux qui ont été pillés puis qui se sont convertis sont en effet poussés, à leur tour, à défendre une idéologie légitimant le pillage. Dans la société musulmane qui se construit, le montant des parts de butin détermine le rand des individus et des clans dans la hiérarchie des honneurs. En l’occurrence les tout nouveaux convertis de La Mecque seront favorisés au détriment des anciens combattants de la cause, d’où des grognements assez cocasses si l’on en croit les hadiths. Cet acte d’autorité, strictement arbitraire, et habile pour ce qui est de la politique, de la part de Dieu, est resté dans la tradition comme l’épisode de la « Conquête des cœurs ».
Une autre des décisions habiles de Dieu sera donc d’autoriser le viol des femmes des Haouazines en leur présence ainsi que le prouvent des hadiths honteux, mais très précis sur le sujet.
Honeïn fut donc une des plus grandes batailles de l’islam naissant et elle fut décisive pour son enracinement. La défaite de la confédération tribale des Haouazines lui assura le contrôle définitif de ses arrières.
Certains des Bédouins purent s’enfuir. Certains rebroussèrent chemin, ce qui donna lieu à la bataille d’Aoutas, mais la plus grande partie trouva refuge à Ta'if, où Mahomet les assiégera victorieusement
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avec l’aide de tous les mounafiqoun de la région venus participer à la curée pour s’approvisionner en chair fraîche.
Sirat d’Ibn Ichaq page 590. « Je ne suis pas venu combattre les Taqif avec vous, mais je voulais que Mahomet prenne possession de Ta'if afin d’avoir une des filles des Thaqif que je pourrais chevaucher afin qu’elle me donne un fils, car les Thaqif sont un peuple engendrant des enfants intelligents » (ibid, p. 590).
Ce fut donc une des plus grandes et meilleures prises de chair fraîche de l’époque. La plupart des belles et séduisantes captives furent partagées entre les djihadistes. Mahomet donna Raïta, une très belle fille, à son gendre (et cousin germain) Ali, et donna Zaïnab une autre belle prise à son gendre Osman. Omar eut également sa part chair fraîche. Mais il préféra la donner à son fils préféré, Abdoulllah, afin qu’il en profite (Sirat d’Ibn Ichaq p.592-593).
L’ESCLAVAGE SEXUEL.
Versets 1 à 6, chapitre 23. « Heureux les croyants…… qui font l’aumône et qui se contentent de leurs rapports avec leurs épouses et leurs esclaves, nul ne peut les en blâmer ».
Verset 24, chapitre 4. « Vous sont interdites les femmes mariées, à part les prisonnières tombées entre vos mains. C’est un décret de Dieu ».
Il existe aussi des hadiths à ce propos. Voici quelques-unes de ces perles !
Sahih Muslim Livre 008, hadith numéro 3371 : « Nous étions partis avec le Messager de Dieu (que la paix soit sur lui) en expédition chez les Banou Moustaliq et avions enlevé d’excellentes femmes arabes. Nous avions envie d’elles, car nous souffrions de l’absence de nos femmes, mais (en même temps) nous voulions en tirer une rançon. Nous décidâmes donc d’avoir des rapports sexuels avec elles, mais en pratiquant l’azl (retrait de l’organe sexuel masculin avant l’émission de sperme pour éviter une grossesse). Mais nous nous sommes dit : nous faisons quelque chose alors que le Messager de Dieu est avec nous ; pourquoi ne pas lui demander son avis ? Nous demandâmes donc au Messager de Dieu (que la paix soit sur lui) et il nous répondit : peu importe si vous ne le faites pas, car toute âme qui doit naître naîtra ».
Sahih Boukhari : tome 9, livre 93, hadith numéro 506, d’après Abou Saïd Al-Khoudri.
À l’occasion de la bataille contre les Banou Al-Moustaliq, ils (les musulmans) enlevèrent des femmes et eurent l’intention d’avoir des relations sexuelles avec sans les rendre enceintes. Ils interrogèrent donc le Prophète sur le coitus interruptus. Le Prophète répondit : « Il vaut mieux que vous ne le fassiez pas, car Dieu a écrit qui il va créer ». Qaza'a a déclaré : « J’ai entendu Abou Saïd rapporter que le Prophète a dit : « On n’ordonne pas à une âme de venir au monde, c’est Dieu qui la crée ».
Et Tabari nous montre Mahomet donnant lui-même l’exemple en choisissant parmi les femmes des vaincus celle qui devait devenir son esclave sexuelle.
Tabari VIII :117 – « Dihya demanda Safiya au Messager, mais le prophète la retint pour lui-même… en donnant à Dihya deux de ses cousines à sa place. Les femmes de Khaïbar furent partagées entre les musulmans ».
Tabari IX :137 – « Dieu accorda à Mahomet en tant que part du butin Rayana de la tribu des Quraïza ».
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Soyons justes et reconnaissons pour ce qui est de Mahomet que dans les deux cas il y eut ensuite mariage plus ou moins longtemps après le rapt et le viol.
S’agissant de Safiya on peut se demander ce qu’elle en pensa réellement étant donné que son mari avait été torturé puis décapité quelques heures plus tôt. Mettons-nous un peu à sa place.
Torture et assassinat du mari de Safiya.
Ibn Ichaq page 515.
On fit venir, auprès de l’Envoyé de Dieu Kinana b. al-Rabi, qui gardait le trésor des Banou al-Nadir. L’Envoyé de Dieu lui demanda où était ledit trésor. Kinana nia savoir où il était. Un juif vint trouver l’Envoyé de Dieu (Tabari dit « fut traîné devant lui ») et lui dit : j’ai vu Kinana se rendre dans une certaine ruine tous les matins. Alors l’Envoyé de Dieu dit à Kinana : si on le trouve chez toi, es-tu bien conscient je te ferais tuer ? Kinana répondit oui. L’Envoyé de Dieu ordonna de fouiller la ruine. On en sortit une partie du trésor des Juifs. Il demanda ensuite à Kinana où se trouvait le reste. Mais Kinana refusa de le dire. L’Envoyé de Dieu ordonna à al-Zoubaïr b. al-Aouam de le torturer jusqu’à ce qu’on sorte tout ce qu’il y avait chez lui. Al-Zoubaïr se mit à faire brûler sa poitrine, jusqu’à ce que Kinana soit sur le point de mourir. Puis l’Envoyé de Dieu le livra à Muhammad b. Maslama et celui-ci le décapita pour venger son frère Mahmoud b. Maslama.
« Mariage » de Safiya.
Boukhari 5.59.522.
Raconté par Anas bin Malik : Puis nous sommes arrivés à Khaïbar, et alors que Dieu l’aidait à conquérir le fort, la beauté de Safiya bint Hoyaï bin Aktab, dont le mari avait été tué alors qu’elle était devenue son épouse, fut signalée à l’Apôtre de Dieu. Le Prophète la choisit pour lui et l’emmena jusqu’à ce que nous atteignions un endroit appelé Sidd-as-Sahba. L’Envoyé de Dieu la prit pour femme une fois Safiya arrivée à la fin de ses règles. Un hais (plat arabe) fut servi sur une petite feuille de cuir. Ensuite, le Prophète me dit : j’invite les tiens. Voilà en quoi a consisté le repas de noces du Prophète et de Safiya.
Boukhari 5.59.524.
Raconté par Anas : Le Prophète s’arrêta 3 jours, entre Khaïbar et Médine, et épousa Safiya. J’allais inviter les musulmans au repas de noces et comme il n’y avait ni pain ni viande, le Prophète ordonna à Bilal d’étendre des nappes et d’y placer des dattes, du fromage et du beurre. Les musulmans se demandaient : sera-t-elle (Safiya) l’une des mères des fidèles (l’une des épouses du Prophète) ou juste (une prisonnière) en sa possession ? Certains d’entre eux disaient : si le Prophète lui fait porter le voile, alors elle sera l’une des mères des fidèles (l’une des épouses du Prophète), et s’il ne le fait pas, elle sera son esclave. Lorsqu’il partit, il lui fit une place derrière lui sur son chameau et lui fit porter le voile.
Nous avons mis le mot mariage entre guillemets, car ledit mariage était irrégulier au regard du verset 234 du chapitre 2 du Coran.
« Ceux des vôtres que la mort frappe et qui laissent des épouses : celles-ci doivent observer une période d’attente de quatre mois et dix jours. Passé ce délai, on ne vous reprochera pas la façon dont elles disposeront d’elles-mêmes d’une manière convenable ».
Ce verset signifie donc qu’une veuve doit attendre plusieurs cycles menstruels pour s’assurer qu’elle n’est pas enceinte. En l’espèce Mahomet n’attendit que la fin des règles en cours, fit porter un voile islamique à la jeune femme et consomma ce mariage (réduit à sa plus juste expression).
La chose est plus ambigüe dans le cas de Rayana. Les spécialistes de la taqiya osent écrire que ces malheureuses, dont les proches avaient été tués, furent très heureuses de se marier avec Mahomet et qu’elles se pâmaient d’amour pour lui après ces massacres. Il y a vraiment des gens sans pudeur !
Petite question maintenant. Qui peuvent être les captives ou les prisonnières de guerre aujourd’hui ?
L’État islamique ayant sévi en Irak et en Syrie à partir de 2014 à 2019 a répondu à la question : les yézidies. Mais certains théologiens musulmans considèrent que les femmes vivant en dar al harb c’est-à-dire dans des zones de guerre actives ou potentielles sont théoriquement susceptibles d’être considérées comme des captives ou prisonnières de guerre éventuelles. Un musulman ayant des relations sexuelles avec une non-musulmane de ces zones de guerre ne commet donc aucun péché. La Charia en tire d’ailleurs toutes les conséquences puisqu’elle ne prévoit aucune punition ni sanction en cas de zina c’est-à-dire d’adultère ou de fornication commise en pays étranger.
Ce qui somme toute est assez logique, le crime ou délit ayant été commis à l’étranger, c’est éventuellement aux magistrats du pays étranger de le réprimer, pas aux magistrats du pays d’origine du contrevenant. Or si les magistrats du pays étranger en question, eux-mêmes, ne sanctionnent pas ce délit, pourquoi les magistrats musulmans le feraient-ils ?
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LA POLYGAMIE SUBIE.
En matière de mariage l’islam n’a jamais été une religion « égalitaire ». Le Coran permet aux musulmans d’avoir jusqu’à quatre épouses légitimes (chapitre 4, 3 : épousez comme il vous plaira, deux, trois, ou quatre femmes, mais si vous craignez de ne pas être équitables, prenez une seule femme ou vos prisonnières) ; non pas à condition d’être capables de les traiter de façon parfaitement équitable (seuls les gens gentils et intelligents lisent cela dans le texte), mais à condition d’avoir bonne conscience en ce domaine. Au présomptueux qui ne doute de rien et surtout pas de lui, tout est permis. De toute façon, la réalité a, encore une fois de plus, rattrapé la fiction des gens gentils et intelligents, puisque la polygamie A ÉTÉ PRATIQUÉE DE FACTO ET DEMEURE ENCORE PRATIQUÉE, PAR DES HOMMES, DONT PERSONNE NE CONTESTE L’ISLAM.
Le mariage légal, tel qu’il se dégage du Coran, est un mélange subtil de règles juridiques et de coutumes préislamiques. C’est surtout, avec le concubinage, un moyen licite d’avoir des relations sexuelles sans commettre le péché de « zina ».
Au chapitre des « empêchements », le Coran diffère peu des autres législations de l’époque, mais introduit cependant une notion à lui. Celle qui réprime le mariage avec la sœur d’une femme déjà épousée officiellement et encore vivante. Mais l’islam autorise par contre un musulman à épouser une femme juive ou chrétienne, tout en interdisant évidemment à la femme musulmane de faire de même. Les juifs pieux adoptaient naguère, et adoptent toujours, la même attitude discriminatoire. En outre, chez les juifs comme chez les musulmans, la femme ne participe pas au culte proprement dit. Elle n’en est que la spectatrice ! Il n’y a pas de femme imam en terre d’Islam.
En droit islamique, le mariage peut avoir lieu si les deux conjoints sont pubères. Le Coran ne s’encombre pas de la notion de « majorité légale » qui, de toute façon, n’existait pas au VIIe siècle ! II permet, en outre, la pratique du mariage forcé ou « djebr ». C’est-à-dire le droit pour un père de marier sa fille mineure et même encore enfant sans son consentement, et sans même lui en parler. Et dans ce cas même la puberté n’est plus une condition sine qua non. L’exemple personnel de Mahomet et de son mariage avec Aïcha a gelé toute évolution positive en la matière et en terre d’islam la charia justifie toujours le mariage des petites filles.
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Le djebr n’est d’ailleurs pas une coutume spécifiquement islamique. Il existait bien avant l’islam et il était répandu dans la quasi-totalité de la Méditerranée orientale. Le Talmud accordait ce même droit au père. Notons encore que le consentement de la fille n’est requis – en droit islamique – que si elle est émancipée, déjà veuve ou divorcée. Elle peut néanmoins refuser d’être mariée à un fou, à un épileptique ou à un homme difforme. Il faut aussi rappeler que la loi coranique a décrété que la défloration était licite dès l’âge de neuf ans. Elle se fonde, une fois de plus, sur l’exemple de Mahomet qui, voulant épouser Aïcha, la déclara nubile à cet âge. Le mariage islamique implique la « cohabitation assidue » et l’entretien du ménage. Il impose à l’homme de nourrir ses femmes (elles peuvent manger tout ce qu’elles sont capables de consommer !). Le Coran permet à l’époux de « corriger un usant de violences légères » (sic) l’épouse dont il aurait à se plaindre. Car le machisme musulman ne se limite aucunement à établir une supériorité homme/femme seulement théorique, mais prône donc aussi la violence conjugale avec la plus grande clarté (4, 34) : « Vous [les hommes] réprimanderez celles dont vous craignez la désobéissance ; vous les reléguerez dans des lits à part, vous les battrez ; mais dès qu’elles vous obéissent, ne leur cherchez plus querelle. Dieu est grand » [on se demande bien encore une fois que vient faire Dieu dans tout ça. « Dieu », s’il existe, ne peut être à l’origine de tels préceptes].
Le mariage fécond est une obligation religieuse (Mahomet n’ayant pas d’héritier mâle se faisait traiter d’abthar ou « petite queue » par les Mecquois). La femme est le domestique de l’homme, mais elle doit aussi enfanter.
La limitation des naissances est vue avec horreur par le musulman croyant. La femme musulmane doit d’abord être une génitrice de musulmans. Dans la société musulmane, le célibat est une sorte d’anomalie puisque l’homme a le droit de « posséder » quatre épouses (à l’exception, bien sûr, de Mahomet, qui s’arrogea le droit d’en avoir plus) ; ainsi qu’un nombre « illimité » de concubines (Mahomet en eut au moins onze). En cela le Coran ne faisait que confirmer les vieilles coutumes tribales, celles des peuples pour qui le nombre de descendants était source de prestige (sauf pour Mahomet toujours, qui n’eut qu’un fils et une fille malgré ses onze femmes et ses nombreuses concubines ou esclaves sexuelles).
À l’exemple du Prophète, les califes, les sultans, et autres « chefs » musulmans, s’accordèrent donc aussi souvent de nombreuses dérogations « religieuses », en ce domaine. Certains d’entre eux enfermèrent des centaines de femmes dans des « harems » (de l’arabe « haram » : tabou, chose sacrée, ou chose réservée) gardés par des hommes émasculés (eunuques).
Parmi ces femmes, il n’était pas rare de trouver des non-musulmanes capturées lors de razzias. Les captives n’avaient la vie sauve que si elles acceptaient d’entrer dans le harem du vainqueur.
La « répudiation » – qui fait l’objet d’un certain nombre de versets du Coran – est un mode de dissolution du mariage commun à tous les peuples d’origine sémitique, très différent du divorce. Chez les israélites, le Deutéronome permet au mari de répudier sa femme sans (grandes) formalités. Cette coutume persista très longtemps chez les juifs, à tel point qu’en France le Grand Sanhédrin – réuni en 1807 sur ordre de Napoléon – fut sommé de mettre fin à cette pratique qui permettait les mariages à répétition ; mais dans bon nombre de pays musulmans, l’homme peut toujours répudier quatre femmes sans avoir à se justifier. Il lui suffit de prononcer trois fois la formule rituelle. L’épouse, elle, par contre, doit soumettre sa demande à un tribunal qui apprécie et statue. Ce n’est pas la même chose.
Chez les musulmans sunnites, le mari a en outre le droit de revenir sur sa décision, ce qui est bien pratique !
Insistons encore une fois auprès des journalistes, des intellectuels, et de tous les gens gentils et intelligents que compte notre pays, sur le fait que la répudiation n’est pas un divorce, et qu’il y a une différence fondamentale entre les deux. Ce que le mot répudiation implique c’est le renvoi de la femme par la seule volonté du mari (il suffit de prononcer trois fois la formule rituelle), et il s’agit donc d’une manifestation de sa puissance. Pour la femme, par contre, cela équivaut à être jetée à la rue et à ne plus avoir aucune protection légale même minimale.
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LES MARIAGES TEMPORAIRES.
Ce profond mépris pour les femmes s’est notamment manifesté dans la coutume du mariage « temporaire ».
NDLR. De même que dans notre essai sur ou plus exactement contre le christianisme, bien qu’issu d’une famille traditionnellement catholique (je fus premier au catéchisme dans les années 1950) nous n’avons en aucune façon privilégié cette confession par rapport à l’orthodoxie ou aux autres confessions chrétiennes issues de la Réforme ; dans cet essai consacré à l’islam, nous considérerons donc que ce n’est pas à nous de trancher entre chiisme ou sunnisme et par conséquent nous mentionnerons également le point de vue chiite sur les mariages temporaires.
Le mariage temporaire ou Zaouaj al-Mout’a, est un mariage contracté pour une durée déterminée convenue à l’avance entre les époux. Ce mariage ne peut se faire que sous certaines conditions. Il est aussi connu sous le nom de sigheh en Iran.
Ce type de mariage consiste donc à épouser une musulmane une juive ou une chrétienne pour une période déterminée (qui peut être de 3 minutes ou de plusieurs années) dont le début et la fin sont fixés. Le « mari » verse un « douaire » (mahr) symbolique et la femme redevient libre à la fin de la période.
Ce type de mariage est mentionné dans le Coran : « Hormis les interdictions mentionnées, il vous est permis de satisfaire vos désirs en utilisant vos biens d’une façon honnête et sans vous livrer à la débauche. Versez le douaire prescrit aux femmes dont vous aurez joui, il n’y aura pas de faute à vous reprocher pour ce que vous aurez décidé d’un commun accord… Dieu est Omniscient et Sage » (Coran 4, 24).
Selon al-Tabari, certains compagnons de Mahomet comme Oubaï b. Kalb considéraient bien que ces versets parlaient du mariage temporaire. Ce type de mariage aurait été largement pratiqué par leurs contemporains et par Mahomet lui-même.
Sahih Muslim. Livre 008, hadith numéro 3248 : Ibn Ouraïj a rapporté qu’Ati a rapporté que…… Jabir b. Abdoullah était venu pour faire une Omra (petit pèlerinage à La Mecque), nous nous rendîmes dans sa demeure, et les gens lui demandèrent différentes choses, puis ils mentionnèrent le mariage
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temporaire, ce à quoi il répondit : Oui, on a bénéficié de ces mariages temporaires du vivant du saint Prophète (que la paix soit sur lui) ainsi que du temps d’Abou Bakr et d’Omar.
Sahih Muslim. Livre 008, hadith numéro 3249 : Jabir b. Abdoullah a rapporté… On a contracté des mariages temporaires en donnant une poignée dattes ou de farine comme douaire du vivant du Messager de Dieu (que la paix soit sur lui) ainsi que du temps d’Abou Bakr jusqu’à ce qu’Omar l’interdise pour Amr b. Houraïth.
D’autres traditions évoquent une interdiction par Mahomet en se fondant sur le hadith d’al Boukhari, où Ali rapporte que Mahomet aurait interdit le mariage temporaire en quittant Khaïbar. Mais deux ans plus tard, à l’occasion de la conquête de La Mecque, Mahomet autorisera néanmoins ce type de mariage pendant trois jours. Puis l’interdira de nouveau jusqu’au jour de la Résurrection, d’après un hadith cité par Mouslim (1406). Les chiites contestent ce hadith et attribuent l’abrogation de ce type de mariage au calife Omar, ce qui n’est pas la même chose.
Un tel mariage n’a donc pas besoin d’être officialisé : il suffit d’un accord oral, qui peut être privé, et par lequel l’homme et la femme se donnent en mariage l’un à l’autre. Le mariage peut être tout de suite consommé. Comme dans le mariage permanent, une dot est généralement donnée par le mari à sa femme, mais elle peut être symbolique. Ainsi, il est possible de se marier de manière temporaire sans jamais présenter son conjoint à sa famille ou ses amis. Il est toutefois recommandable d’officialiser le mariage (que ce soit par un contrat de mariage écrit ou bien devant un tribunal islamique) afin que l’épouse puisse prouver l’existence d’un tel mariage en cas de grossesse. En effet, les enfants nés d’un mariage temporaire ont les mêmes droits que les enfants nés d’un mariage permanent : ils sont reconnus par la loi, doivent être entretenus par leur père et ils héritent des deux parents.
Le point de vue des juristes.
Saïyid Aboul Ala Maududi, un savant sunnite du 20e siècle : Que le mariage temporaire (Mout'a) soit haram ou halal est une querelle qui a profondément divisé chiites et sunnites, et a suscité de vifs débats… On rencontre de telles situations lorsqu’il devient quasiment impossible de distinguer la fornication (zina) du mariage temporaire. Dans de tels cas de figure, le mariage temporaire (mout'a) est préférable à la fornication (zina).
Ce type de mariage prend fin de lui-même, sans annulation, divorce, ou décès, au bout de la durée convenue entre l’homme et la femme. S’ils désirent rester ensemble à la fin de cette période, il leur suffit de renouveler le contrat, pour une autre durée limitée.
Différence avec la prostitution néanmoins : les prestations fournies par la femme ne sont pas uniquement sexuelles.
Différence avec le mariage au sens habituel du terme : le nombre maximal d’épouses (quatre pour un mariage permanent) est illimité pour un mariage temporaire. L’épouse temporaire n’hérite pas de son mari si ce dernier décède, et vice versa.
Bien qu’ayant été reconnu par Mahomet les sunnites considèrent le mariage temporaire comme aboli en se fondant sur un hadith où Ali rapporte que le Prophète a interdit le mariage temporaire le jour de Khaïbar, ainsi que la consommation de viande d’ânes domestique (rapporté par Boukhari dans son hadith No 4216 et Muslim dans son hadith No 1406).
Au Mout`a certains théologiens sunnites préfèrent le Nikah al Misyar,
Le Nikah al Misyar (« mariage du voyageur » en arabe) est un montage juridique qui permet à un couple musulman sunnite d’être uni par les liens du mariage (sur la base du contrat de mariage musulman traditionnel), sans que le mari ait à prendre d’engagements financiers vis-à-vis de sa femme. Cette dernière l’en dispense par une clause du contrat de mariage par laquelle elle renonce à certains de ses droits tels que la cohabitation des époux, le partage égal des nuits entre toutes les épouses en cas de polygamie, la pension alimentaire (nafaqa), etc.
L’épouse continue de mener une vie séparée de celle de son mari, et de subvenir à ses besoins par ses propres moyens. Mais son époux a le droit de se rendre chez elle (ou au domicile de ses parents, où elle est souvent supposée résider), à toute heure du jour ou de la nuit, quand il en a envie. Le couple peut alors assouvir de manière licite des « besoins sexuels » (auxquels l’épouse ne peut pas se soustraire d’ailleurs).
Le mariage misyar constitue, d’après certains, une adaptation spontanée du régime du mariage aux besoins concrets de personnes qui n’arrivent plus à se marier de la manière traditionnelle dans des pays tels que l’Arabie Saoudite, le Koweït ou les Émirats arabes unis, à cause de la cherté des loyers et de la vie en général ; des montants élevés des dots exigées ; ou d’autres raisons économiques et financières similaires.
D’où une certaine recrudescence de la prostitution dans ces pays musulmans où la misère sexuelle ne cesse de grandir d’année en année. Nous sommes, là encore, en présence d’un cas flagrant d’hypocrisie. Certains jouent sur les mots en se référant à des us et coutumes vieux de plus de
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quatorze siècles. Ceux qui fréquentent des prostituées se retranchent derrière cette prétendue autorisation coranique, comme ça ils sont « en règle avec Dieu ». Ben voyons !
RÉPUDIATION OU DIVORCE.
La répudiation. Talaq vient d’un mot arabe désignant le fait de lâcher une chose donc de s’en séparer.
Ses règles varient parmi les différentes madhahibb (écoles juridiques). Les chiites et sunnites n’appliquent en effet pas les mêmes règles. La démarche reste cependant globalement la même : c’est le mari qui a la charge de prononcer les formules consacrées.
L’islam connaît la répudiation des femmes par les hommes, mais aussi, si les conditions requises sont remplies, le divorce demandé par la femme.
Dissolution du mariage à l’initiative du mari (talaq).
Afin d’éviter les répudiations causées par un malentendu, Dieu a instauré la nécessité de réitérer, par trois fois de façon nettement séparée (et non quasiment simultanées), la formule de répudiation qui met fin à la vie commune et fait entrer la femme dans l’idda (période de continence, ou délai de viduité). *
Pour les chiites, cette répudiation doit se faire publiquement. Le troisième prononcé de la formule de répudiation rend celle-ci définitive. Il y a donc deux répudiations, dites révocables (radj'i), suivies d’une troisième, irrévocable (ba'in).
L’usage a progressivement été admis d’une répudiation unique, en utilisant la triple formule (quasiment simultanée). Cette jurisprudence a été entérinée dans tous les pays musulmans, bien que cette pratique soit contraire à la lettre du Coran.
À la troisième répudiation, l’homme ne peut plus vivre avec sa femme. Selon le Coran, il ne peut plus se remarier avec que si celle-ci a entre-temps épousé un autre homme, puis divorcé. La répudiation pour les mariages temporaires est définitive et unique.
En cas d’utilisation abusive, par le mari, du droit de répudiation, la femme peut toujours demander le versement d’une prestation compensatoire.
1re étape.
Lancement de la procédure (sourate 65,1 et sourate 2,228).
Sunnisme.
Le mari peut, pour répudier sa femme, doit prononcer de une à trois fois la formule de talaq ou bien un mot qui n’est employé que pour désigner son équivalent, en présence de sa femme.
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Chiisme.
Le mari annonce publiquement son désir de dissoudre le mariage.
2e étape.
Période de réconciliation (sourate 4,45 et sourate 65,1).
Sunnisme.
Le mari doit prononcer trois fois la formule de talaq.
Chiisme.
Les familles cherchent à trouver un arrangement pendant la durée de l’idda. Si le couple a encore une relation sexuelle, la procédure est annulée.
3e étape.
Dissolution du mariage (sourate 65, 2 et 2, 231).
Sunnisme.
Un cadi (juge) commence et le mari finit, de prononcer le troisième talaq.
Chiisme.
Deux témoins doivent, à l’issue de l’idda, attester de la fin de la procédure.
Divorce à l’initiative de la femme
La femme a le droit de demander le divorce, mais elle doit dans ce cas comparaître devant un tribunal islamique et répondre à des questions.
Le contrat de mariage peut toutefois stipuler que la femme a le droit de se répudier elle-même, et ainsi de dissoudre d’elle-même le mariage (soit par tafouid, soit par khoul soit par moubara'at).
Le tafouid s’établit lors du contrat de mariage : le mari se dépouille alors de son droit de répudiation, et concède à la femme celui de se répudier elle-même.
Le khoul permet à la femme de divorcer lorsque le tribunal refuse de prononcer celui-ci, moyennant compensation. Si les deux conjoints renoncent à leurs droits de créance mutuelle, on parle alors de moubara'at.
La femme peut aussi utiliser la formule de talaq quand le mari ne veut pas divorcer, mais lui confie le choix de maintenir ou mettre fin à leur vie conjugale.
Divorce judiciaire.
Le juge peut aussi prononcer la dissolution de mariage pour diverses raisons.
— À la suite d’un serment d’ordalie de type liân (Coran 24, 6-9. Que la colère divine s’abatte sur moi si je ne dis pas la vérité).
— En présence de vices rédhibitoires, par analogie avec une résiliation de contrat pour vice caché (par exemple une maladie rendant la vie commune périlleuse, comme la lèpre ou la démence, ou l’impuissance du mari, etc.)
— Pour manquement aux obligations de mariage : par exemple non-paiement de la dot, manquement à l’obligation d’entretien (nafaka) ou encore si le mari contrevient à une disposition précisée dans le contrat de mariage.
— Abus de l’autorité maritale, en cas de violences par exemple, dissentiment grave entre les époux, absence de l’époux.
NDLR. Les commissions de réconciliation.
En cas de mésentente grave et prolongée, le Coran recommande qu’on ait recours non pas directement à la formule du divorce, mais à une tentative de réconciliation des époux.
Pour ce faire le juge désigne une commission constituée d’une personne de la famille de la femme et d’une autre de la famille du mari (en général les deux pères). Cette commission aura pour objectif de tenter la réconciliation entre les deux époux : au cas où il leur apparaît que celle-ci est impossible ou vaine, ils peuvent prononcer le divorce.
En cas de désaccord entre les 2 arbitres-juges-médiateurs, le cas passe devant une autorité judiciaire qui tranchera définitivement sur le conflit.
L’annulation du mariage. L’annulation du mariage est reconnue par l’islam en cas de non-consommation. Ce qui permet de dissoudre le mariage sans que la femme perde sa dot.
* Une femme désirant divorcer ne devrait même pas avoir à attendre un seul jour pour quitter la maison. Le fait qu’elle puisse éventuellement être enceinte ne saurait justifier que son mari la retienne contre son gré.
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VOILE ISLAMIQUE ET CORAN.
Le Coran n’impose pas aux musulmanes le port de la bourqua ou du voile islamique. Le port d’une tenue dissimulant presque entièrement la femme a d’abord été imposé aux femmes de Mahomet puis évidemment, Mahomet étant le modèle à imiter en tout point en vertu du dogme de l’isma, cette pratique s’est évidemment généralisée.
Notons tout d’abord qu’un tel habillement était aussi à l’origine prévu pour les chrétiennes si l’on en croit cette citation de saint Paul qui a le mérite de reconnaître que c’était bien une marque de sujétion en ce qui concerne les femmes.
Première épître aux Corinthiens, sourate 11, verset 7.
L’homme ne doit pas se couvrir la tête, puisqu’il est l’image et la gloire de Dieu, tandis que la femme est la gloire de l’homme. En effet, l’homme n’a pas été tiré de la femme, mais la femme a été tirée de l’homme ; et l’homme n’a pas été créé à cause de la femme, mais la femme a été créée à cause de l’homme. C’est pourquoi la femme, à cause des anges, doit avoir sur la tête une marque de l’autorité dont elle dépend.
Ce que dit précisément le Coran sur le voile islamique ? Il faut rappeler ici que le problème du voile et les versets que l’on trouve à ce sujet, viennent des remarques, non de Dieu, mais d’Omar, et ne concernent au départ que les femmes de Mahomet. Comme Mahomet avait plusieurs femmes, Omar, qui était le père d’une d’entre elles, lui proposa que ses femmes se voilent. Avant cela Mahomet lui-même portait Aïcha sur ses épaules, ses beaux cheveux longs apparents. Plus tard, lorsque le problème des rapports d’Aïcha avec un autre homme se posa, la question du voile se posa évidemment plus sérieusement.
Le voile fut d’abord prescrit dans le cas où l’on se rendait chez Mahomet
Coran chapitre 33, 53 à 59.
« Ô prophète ! Dis à tes épouses, à tes filles, et aux femmes des croyants, de resserrer sur elles leur vêtement ! Cela sera le plus simple moyen pour elles d’être reconnues et de ne pas être offensées… Si vous avez quelque demande à faire à ses femmes, faites-le à travers un voile ; c’est ainsi que vos cœurs et les leurs garderont leur pureté ».
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Chapitre 24.
Verset 31.
Dis aux croyantes de baisser les yeux et de ne pas être provocantes ; de ne pas faire montre de leurs appas, sauf ce qui en émerge, de rabattre leur « voile » sur les échancrures de leurs vêtements. Elles ne laisseront voir leurs appas qu’à leur mari, à leurs enfants, à leurs pères, beaux-pères, fils, gendres, neveux de frères et de sœurs, aux femmes, à leurs captives, à leurs eunuques, ou garçons encore ignorants de la nudité des femmes. Qu’elles n’agitent point les pieds de manière à faire voir leurs appas cachés.
Verset 60.
Quant aux femmes qui n’enfantent plus, et qui n’espèrent plus pouvoir se marier, elles peuvent, sans inconvénient, ôter leurs vêtements, sans cependant montrer leurs appas ; mais si elles s’en abstiennent, cela vaudra mieux. Dieu entend et sait tout.
Le mot traduit par « voile » ici est le mot arabe « khimar » qui signifie « mantille ». Le port du voile distinguait la femme libre, des femmes de condition inférieure.
Quant au terme rendu par « appas », il s’agit du terme arabe « jouyoub », que d’autres traducteurs rendent par échancrure, gorge, seins.
Pour en revenir au chapitre 33.
Le verset 53 stipule exactement.
Quand vous leur demandez quelque chose (aux épouses du prophète), faites-le derrière un hidjab, cela est plus correct pour vos cœurs et le leur.
Note. Un hidjab c’est un voile au sens de rideau en général.
Et le verset 59.
Prophète ! Dis à tes épouses, à tes filles et aux femmes des croyants qu’elles « youdninent… leur… jalabihina » ! Cela sera le plus simple moyen pour elles d’être reconnues et de ne pas être offensées.
Le mot rendu par « voile » ici et dans beaucoup de traductions est le vocable arabe jalabibihina, de jalabib qui est le féminin pluriel de jilbab (la djellaba maghrébine ou la jalabiya égyptienne), qui signifie en réalité « robe », « habit » (ou « châle » ?).
Mais que diable ! Pourquoi Dieu n’a-t-il pas été plus clair ? Quoi qu’il en soit nous laissons aux monolâtres du judéo-islamo-christianisme à la saint Paul le soin de déterminer ce qu’impliquent exactement les expressions « rabattre leur khimar sur l’échancrure de leur vêtement » et « youdniner leur jalabihina ». Ce débat en ce qui nous concerne, nous autres barbares druides d’extrême occident, ne nous intéresse pas !
Ce que l’on peut constater c’est que le débat et les interprétations portent généralement sur les parties du corps à cacher, qui relèvent de l’interprétation du concept coranique d’aoura (les parties du corps à dissimuler à la vue des autres, après la puberté).
Pour les femmes nubiles, il s’agit, pour la plupart des commentateurs, du corps entier, à l’exception, suivant les auteurs, des mains et des pieds.
Abou Hanifa est d’avis que les pieds de la femme ne sont nullement aoura tandis que Malik ibn Anas ou Ahmad Ibn Hanbal considèrent, eux, que les pieds de la femme doivent être cachés (en se basant sur des avis postérieurs à Mahomet).
D’autres auteurs font rentrer le visage de la femme dans cette catégorie.
Le hadith : « Le corps entier de la femme est nudité à part ses mains et son visage », rapporté par le compilateur Abou Daoud, est invoqué par certains théologiens sunnites ou chiites afin de justifier le non-voilement du visage, mais invoqué par d’autres pour justifier l’obligation générale de voilement de la femme (sans autre précision, il est vrai).
N.B. Ce hadith est classé dans la catégorie des hadiths faibles (il ne figure pas dans les recueils canoniques comme ceux d’al-Boukhari et de Muslim, sa chaîne de transmetteurs – isnad – est absente, ou incomplète). Or dans la jurisprudence musulmane, un hadith faible ne saurait constituer le fondement d’une disposition obligatoire *. Certains libéraux avancent cet argument, ainsi que d’autres, pour remettre en question l’existence d’une quelconque prescription du voile.
Un peu de terminologie maintenant. Les différents types de voiles islamiques en fonction des pays et des traditions.
Le hidjab, est le voile qui couvre les cheveux et laisse le visage apparent. On le trouve entre autres dans les pays du Maghreb. Pourquoi pas ? Mais pourquoi mêler Dieu à ces questions de mode ?
En Iran le tchador ne cache ni le visage ni les vêtements de la femme.
Le niqab est un voile léger, posé sur le nez, qui ne dissimule que la partie inférieure du visage. Se porte avec une robe noire ou abaya en Arabie.
En Afghanistan, et dans certaines régions du Pakistan ou d’Inde, les tchadri cachent tout le corps, et ne laissent voir que le bas des jambes, couvertes d’un pantalon (la femme sous son voile est habillée
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d’un pantalon recouvert d’une robe tombant légèrement sous les genoux), à l’occasion ses bras et ses mains.
La bourqua couvre tout le corps, de la tête aux pieds. Elle cache également le visage, la vue ne se fait que par une sorte de grille devant les yeux. On l’appelle aussi voile intégral.
Un de mes lointains cousins du Canada me fait parvenir la mise au point suivante à propos du hidjab.
Après les écoles, les tribunaux et les milieux du travail, les militants du hidjab partent maintenant à l’assaut des clubs sportifs. Deux nouveaux incidents se sont en effet produits ce printemps concernant le port de ce foulard dans des compétitions sportives.
En quoi un simple bout de tissu sur la tête peut-il constituer un empêchement légitime à la participation ?
En fait, si ces musulmanes voilées (qui représentent entre 8 et 10 % des musulmanes) tiennent tant à ce voile, c’est justement parce que ce n’est pas qu’un simple bout de tissu. Pour tenter d’y voir clair, demandons-nous pourquoi le hidjab fait problème, alors que des tenues tout aussi spécifiques, comme les tenues indiennes ou africaines, ne semblent déranger personne. Même le voile de la belle Benazir Bhutto, l’ex-présidente du Pakistan, ne suscitait aucune réaction hostile. Ce n’est donc pas la différence qui dérange [contrairement à ce qu’affirment les antiracistes], mais ce qui est alors exprimé par ce type spécifique de voile.
Lorsqu’une musulmane choisit de porter le hidjab – et donc de cacher son cou, ses oreilles, ainsi que le moindre bout de cheveu – plutôt qu’un autre type de foulard, un simple bandeau ou une médaille symbolisant l’islam ; elle ne fait pas qu’exprimer son identité musulmane, mais le choix d’un certain type d’islam, c’est-à-dire l’islam intégriste. Elle franchit un pas qui la distingue des autres musulmanes, et indique qu’elle fait désormais passer sa religion avant toute autre considération.
Ce choix de vie ne regarde que l’individu concerné, mais, si le choix est fait en toute liberté, il faut accepter les contraintes qui vont avec. On n’a pas en l’occurrence à demander que l’ensemble de la société civile – allant des employeurs jusqu’aux clubs sportifs – ou les institutions publiques comme l’école et les hôpitaux, modifient leurs règles pour s’ajuster à ce choix.
Si j’entre dans une mosquée, je dois enlever mes chaussures ; de la même façon, les musulmans doivent accepter les règles du jeu en dehors de leur univers religieux.
Mais il y a pire encore. Le hidjab a son histoire, et cette histoire n’est pas toujours rose ; elle est même plutôt rouge. La vague actuelle de revendications associées au hidjab vient de la révolution khomeyniste de 1979 en Iran. Le mouvement intégriste a par la suite gagné les pays du Nord de l’Afrique. Dans les années quatre-vingt et au début des années quatre-vingt-dix, c’est par milliers que les femmes iraniennes, égyptiennes, algériennes, et afghanes, ont été violées, vitriolées ou égorgées, pour ne pas avoir porté le voile. L’intégrisme musulman a ensuite débordé en Europe puis de ce côté-ci de l’Atlantique.
Le premier cas de hidjab à l’école s’est présenté en 1994 au Québec alors qu’au début des années quatre-vingt-dix on ne voyait aucun hidjab à Montréal, malgré le fait que 45 000 musulmans y vivaient déjà. Évidemment, l’immigration n’est plus la même.
Mais il faut savoir aussi qu’un pays comme la Turquie, dont 99 % de la population est musulmane, a interdit le port du voile dans ses institutions publiques. L’Iran du chah avait fait de même et des Égyptiennes ont aussi réclamé son interdiction. L’Algérie d’avant le Front islamique du salut, et la Palestine des années 1970 ne connaissaient pas ce type de voile.
On ne peut pas nous demander d’ignorer ou d’oublier cette réalité. Vu sous cet angle, le hidjab apparaît comme un linceul ; sa banalisation et son expansion consacrent la victoire des intégristes. Que certaines musulmanes le revendiquent au nom d’un « cheminement spirituel », ne change rien à ce fait.
Que l’on nous explique pourquoi le cheminement spirituel passe tout à coup sur le plan formel par le port de ce vêtement imposé. Si, par ailleurs, il s’agissait vraiment d’exprimer un cheminement spirituel, pourquoi ne serait-ce le lot que des femmes, et pourquoi l’impose-t-on aux non-musulmanes dans les États islamiques ?
Le hidjab est en fait un instrument de régulation du rapport entre les sexes. C’est le bout du fil de l’intégrisme religieux : tirez sur ce fil et tout le reste vient avec. Une société démocratique doit savoir fixer ses règles et ses limites et ne pas céder à ceux qui veulent faire prévaloir leurs principes religieux sur l’ensemble des règles de la vie sociale, et ceci au détriment des lois civiles laïques.
Daniel Baril. Mouvement laïque québécois. C.P. 32132. Succ. Saint-André. Montréal H2L 4Y5.
La problématique du voile dans l’islam met en évidence le même type de comportement hypocrite, la même propension à jouer sur les mots ou à se référer à des usages locaux qui n’avaient rien de spécifiquement religieux à l’origine.
Le port du voile chez les femmes du Moyen-Orient découle en fait d’une très ancienne coutume. On en trouve la trace dans les lois instaurées par Teglath-Phalazar 1er, roi d’Assyrie au XIIe siècle avant
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notre ère (voir Essai sur le judaïsme). Elles stipulaient déjà que « Les femmes mariées les veuves et les Assyriennes qui sortent dans la rue n’auront pas la tête découverte… La concubine qui va dans la rue avec sa maîtresse (l’épouse) sera également voilée. L’hiérodule (prostituée sacrée) qu’un mari a prise sera voilée dans les rues. Et celle qu’un mari n’a pas prise ira la tête découverte. La prostituée (non sacrée) ne sera pas voilée, sa tête sera découverte ».
Saint Paul, dans la première de ses « Épîtres aux Corinthiens » (chapitre XI, versets 4 à 16), insiste d’ailleurs lui aussi sur la nécessité, pour la femme, d’avoir la tête couverte quand elle prie ou prophétise. Et il ajoute : « À cause des anges ». Comprenne qui pourra !
La psychose musulmane sur le pouvoir de séduction des femmes, a son origine dans le chapitre 24 verset 31du Coran (3 fois plus long que le verset consacré à la coquetterie masculine expédiée en 5 lignes) et a, depuis, donné lieu à une généralisation délirante.
Si l’on excepte les femmes âgées, les femmes franchement laides, et celles dont le comportement est teinté de masochisme (il y en a !) ; rares sont les musulmanes qui sont réellement attachées à ce type de vêtement, qui les transforme en autant de sacs anonymes. Elles ne portent ces vêtements humiliants que par obligation, et sous la contrainte de « traditions » imposées par les hommes. C’est particulièrement vrai dans les pays qui conservent encore un semblant de laïcité et où le port des tenues « islamiques » n’est pas rendu obligatoire par la loi. Le port d’un voile ou d’un foulard n’étant rien d’autre qu’une coutume, dans de très nombreux pays musulmans, la femme ne masque d’ailleurs pas son visage. Certains peuples musulmans n’ont jamais jugé utile d’imposer le port d’un voile ou d’une tenue quelconque. Chez les Touaregs, c’est l’homme qui porte le voile tandis que la femme n’en a jamais porté. Les musulmans qui obligent leurs femmes et leurs filles à porter le foulard ou le voile le font bien plus pour affirmer leur autorité (et leur jalousie maladive) que par respect d’une quelconque « loi divine ». Il n’y a rien de « révélé » dans tout cela. Chez les musulmans, le port d’un foulard, d’un voile, d’un tchador, d’un tchadri, d’un niqab ou d’une bourqua, est, en réalité, une soumission de la femme à l’homme, et même en supposant qu’il existe, Dieu n’a rien à voir dans tout cela !
Foulard qui se limite à couvrir la chevelure, tissu qui ne laisse que les yeux comme unique appel au secours, grilles infligées par les talibans, ou encore couverture complète du visage… Officiellement rempart contre les regards masculins, ce voile protège les sociétés musulmanes contre leur propre barbarie, en réduisant au silence la moitié de leur population.
* Problème général : seules quelques dizaines de hadiths, sur les centaines de milliers rapportés par la tradition, sont peut-être authentiques, c’est-à-dire des paroles, faits et gestes (ou absence de parole voire de réaction) de Mahomet.
Les autres ont été inventés au 8e siècle soit un siècle après la mort de Mahomet, afin de servir divers camps politiques.
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PRESCRIPTIONS DIVERSES, DIEU DANS L’ISLAM S’OCCUPANT DÉCIDÉMENT DE TOUT.
EXCISION ET AUTRES MUTILATIONS.
Question maintenant. Les Américains de Boston doivent-ils revenir au port de l’épée dans la rue comme au XVIIIe siècle, les Chinoises aux pieds bandés, les Allemandes à la ceinture de chasteté ? ? ? Non ! Alors de grâce (de grâce divine bien sûr) que l’on interdise enfin vraiment l’excision admise par certains hadiths.
Les musulmans pieux défenseurs de l’excision ont comme argument choc que c’est l’équivalent de la circoncision pour les garçons (ce qui est médicalement faux) et qu’il faut suivre la religion d’Abraham.
Il importe donc pour commencer de dire deux mots de ce personnage de roman dont nous ne soulignerons jamais assez le caractère néfaste.
L’existence d’archives extraordinairement abondantes (tablettes d’argile) a permis de conclure que le nom « Abraham » se retrouve à différentes époques et en différents lieux de Mésopotamie sans qu’aucune utilisation particulière à Our puisse être notée. De plus, les migrations en Mésopotamie sont désormais assez bien connues et aucune ne correspond au trajet du récit biblique, depuis Our jusqu’en Palestine. Les archéologues constatent également que la géographie de la Palestine à l’époque supposée d’Abraham ne correspond pas au récit biblique (la ville de Bersabée n’existait pas au 19e siècle avant notre ère, Abraham ne pouvait pas avoir de chameaux à cette époque, car ils n’étaient pas domestiqués, etc., etc.).
Le livre de la Bible dans lequel l’histoire d’Abraham est racontée a vraisemblablement été rédigé entre les VIIe et Ve siècles avant notre ère en combinant des récits de provenances diverses réunies par plusieurs rédacteurs. Cela semble traduire une origine tardive par rapport à d’autres figures patriarcales plus anciennes comme celle de Jacob et l’idée d’un personnage ayant vraiment vécu au deuxième millénaire est abandonnée par la plupart des chercheurs. La conclusion des études
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scientifiques est donc la non-historicité d’Abraham, c’est un personnage biblique et pas un personnage historique.
Conclusion.
1) Abraham n’a jamais existé. Disons plus précisément que c’est un patriarche plus légendaire ou mythique qu’historique. Première étape des broderies à son sujet.
2) Que la Bible a brodé sur les traditions concernant ce patriarche qui au départ n’était qu’un patriarche parmi d’autres comme Jacob par exemple. Il y a donc eu borderie au carré à son propos dans la bible. À ce stade on peut donc parler d’imposture.
3) Que Mahomet s’est artificiellement revendiqué de ce mythe juif en ajoutant ses propres broderies aux broderies déjà existantes, afin d’en imposer aux rabbins de Yathrib/Médine. L’Abraham de l’Islam est donc une imposture pire encore, de la broderie puissance trois.
Venons-en maintenant à l’argumentaire des musulmans qui défendent l’excision.
Hadiths.
Boukhari 5891, Muslim 527. Abou Horaïra a déclaré : j’ai entendu le Prophète (la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) dire : « Le fitrah comprend cinq choses – ou cinq choses font partie de la course – la circoncision, le rasage du pubis, la taille de la moustache, la coupe des ongles et l’épilation des aisselles.
Ahmad Ibn Hanbal 5,75, Abou Daoud, Adab 167. D’après Abou al-Malih ibn, le père d’Ousama a rapporté que le Prophète a déclaré :« La circoncision est une loi pour les hommes et une préservation de l’honneur pour les femmes ».
Il n’existe aucun hadith montrant que Mahomet a demandé que ses femmes ou ses filles soient « circoncis », mais il en existe un où il a conseillé d’opérer sans avoir la main lourde. Il a été rapporté par Abou Daoud (5271).
Sounna Abou Daoud 41 : 5251. Rapporté par Oumm Atiya al-Ansariya : Une femme pratiquait la circoncision à Médine. Le prophète lui a dit : ne coupe pas radicalement, car c’est mieux pour la femme et c’est meilleur pour le mari.
Mais les avis diffèrent en ce qui concerne ce hadith. Certains l’ont classé comme da'if (faible) et d’autres l’ont classé comme sahih. Il a été considéré comme sahih par Al-Albani et Abou Daoud.
Attestation historique de la pratique.
Dépendance du Voyageur section e4.3. La circoncision est obligatoire (pour chaque homme et chaque femme) en coupant le morceau de peau sur le gland du pénis du mâle, mais la circoncision de la femelle se fait en coupant le clitoris (on l’appelle houfad)
L’islam traditionnel est donc non seulement une machine infernale pour les non-musulmans, mais aussi, paradoxalement, un instrument d’oppression sévissant à l’encontre de ses propres adeptes.
NDLR. En ce qui concerne la critique de la circoncision pour des raisons médicales les musulmans pieux rétorquent qu’il suffit que quelque chose ait été attesté par le Prophète (la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui), pour être sûr que c’est bien et non mal. Si c’était mal, Dieu et son messager (la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) ne l’auraient jamais prescrit.
Mais radicale ou pas radicale, l’excision est une mutilation de la femme. Et ne parlons pas de l’infibulation, et des déflorations au poignard ! Au Mali, comme dans d’autres pays d’Afrique, les imams s’entendent pour perpétuer des pratiques honteuses, véritable mutilation allant à l’encontre des droits les plus élémentaires de la personne humaine. 80 % des femmes maliennes âgées de quinze à quarante-neuf ans sont encore excisées malgré les lois adoptées par le gouvernement. C’est la « Limala » (Ligue malienne des imams et des érudits pour la solidarité islamique) (sic) qui est le plus directement opposée à la loi interdisant l’excision bien que, selon son porte-parole, l’excision soit « facultative dans la religion musulmane ». En d’autres termes, il s’agit d’une coutume, couverte par l’islam, qui s’applique « à la tête du client » sans aucune nécessité véritable. Encore un crime contre l’Humanité parmi tant d’autres, sous couvert de religion.
Un Dieu [comme celui d’Abraham, d’Isaac, et de Jacob] qui exige de ses croyants de se mutiler pour les marquer, par leur sexe, comme on marque du bétail, est un Dieu d’une morale douteuse. On peut comprendre que la circoncision masculine ou féminine, comme toute autre intervention médicale, puisse être justifiée dans des cas spécifiques, et sur indications médicales individuelles. Mais mutiler les enfants, garçons ou filles, en prétendant leur faire du bien, relève du fanatisme. Et en ce domaine, il n’existe aucune raison qui puisse justifier la distinction entre circoncision féminine et circoncision masculine. Le Docteur Gérard Zwang va encore plus loin. Il affirme : « On ne pourra jamais mettre fin à la circoncision féminine tant que l’on continuera de pratiquer la circoncision masculine. Comment voulez-vous convaincre quelqu’un de ne pas exciser sa fille si en même temps vous lui permettez de circoncire son fils ? »
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La religion a été un instrument pour justifier la circoncision masculine et féminine. Il faudrait donc démasquer son caractère irrationnel, et dénoncer le rôle néfaste de certains milieux religieux qui la défendent, ou qui refusent de la combattre.
RETOUR SUR LE DROIT POUR LE MARI DE BATTRE SA FEMME. Coran chapitre 4, verset 34 : « Quant à celles de qui vous craignez une mauvaise conduite, faites-leur la morale, désertez leur couche, administrez-leur une correction physique… Dieu est grand, au plus haut des cieux »).
Les menteurs professionnels déjà à l’œuvre à propos du mot djihad (journalistes politiques ou intellectuels taqiyistes de leur état), prétendent évidemment que le verbe arabe en question ne signifie en aucune façon correction physique dans ce cas, mais UNE simple remise dans le droit chemin du fait même de la séparation. Toute la question est : « comment le musulman moyen, le musulman de la rue, a-t-il compris ce verset au cours des siècles ». Le Coran est certes une œuvre parfaite, mais force est de constater que sur ce point il aurait dû être plus clair.
Pour comparaison il y avait quatre obligations pour ceux qui étaient admis dans les rangs des Fénianes irlandais.
La première obligation était de ne pas accepter de dot lorsqu’ils se mariaient, mais de ne prendre une épouse que pour son éducation et ses qualités, le deuxième commandement était de ne jamais forcer une femme la troisième obligation de ne jamais refuser de donner à un homme demandant quelque objet de valeur ou de la nourriture, etc.…
DIVERS.
Coran verset 222, chapitre 2.
« Ils t’interrogent au sujet de la menstruation des femmes ; réponds : c’est une maladie ! Tenez-vous à l’écart d’elles et ne vous en approchez pas tant qu’elles ne sont pas purifiées ! » (Mettons plus justement : c’est un phénomène biologique et physiologique naturel lié au renouvellement du vivant).
Coran verset 223, chapitre 2. « Vos femmes sont pour vous un champ de labour allez à votre champ, comme vous le voudrez ».
Note de la rédaction. Il semblerait que cette prescription soit la réponse à des objections concernant la position à adopter lors des rapports sexuels. Les mouhadjiroun (immigrés) mecquois installés à Yathrib/Médine n’ayant apparemment pas les mêmes façons de faire que les juifs et les ansars de la ville.
Sounan Abou Daoud : Livre 11, numéro 2157. Abou Horaïra. Le Prophète (que la paix soit sur lui) a déclaré : celui qui a eu des relations sexuelles avec sa femme par l’anus sera maudit.
Mais, ainsi que mentionné plus haut, le problème est que seules quelques dizaines de hadiths, sur les centaines de milliers rapportés par la tradition, sont peut-être authentiques, c’est-à-dire des paroles, faits et gestes (ou absence de parole voire de réaction) de Mahomet. Les autres ont été inventés au 8e siècle soit un siècle après la mort de Mahomet, afin de servir divers camps politiques.
HÉRITAGE TESTAMENT ET TÉMOIGNAGE.
HÉRITAGE.
Cette même inégalité de traitement au détriment des femmes prévaut dans les successions. Coran 4, 11 : « à l’homme une part égale à celle de deux femmes ». Le mépris dans lequel sont tenues les femmes éclate dans cette équivalence. Comment peut-on traiter la femme « avec justice » et, dans le même temps, ramener son héritage à la moitié de celui d’un homme ? Et c’est pire quand l’épouse n’est pas musulmane. Dans un tel cas, elle n’a droit à rien. On parle alors d’exhérédation.
Le Coran innove par rapport au temps de la Djahiliya (préislamique) en uniformisant les coutumes qui jusque-là variaient du tout au tout suivant les régions.
Le Coran est très précis sur les différents bénéficiaires de l’héritage du défunt, il suffit à lui seul à établir le droit de succession, sans même recourir à la Sounna. Les versets traitant de cette question se trouvent dans le chapitre 4 intitulé « Les Femmes ».
Versets 11 et 12 du chapitre 4 intitulé « Les Femmes ».
« Voici ce que Dieu vous enjoint au sujet de vos enfants : au fils, une part équivalente à celle de deux filles [une musulmane n’a donc en général que la moitié des droits d’un musulman, mais a beaucoup plus de devoirs, y compris d’ordre sexuel ainsi que nous allons le voir]. S’il n’y a que des filles, même plus de deux, à elles alors deux tiers de ce que le défunt laisse. Et s’il n’y en a qu’une, à elle alors la moitié. Quant aux père et mère du défunt, à chacun d’eux le sixième de ce qu’il laisse, s’il a un enfant. S’il n’a pas d’enfant et que ses père et mère héritent de lui, à sa mère alors le tiers. Mais s’il a des frères, à la mère alors le sixième, après exécution du testament qu’il aurait fait ou paiement d’une dette. De vos ascendants ou descendants, vous ne savez pas qui est plus près de vous en utilité. Ceci est un ordre obligatoire de la part de Dieu, car Dieu est, certes, Omniscient et Sage.
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Et à vous la moitié de ce que laissent vos épouses, si elles n’ont pas d’enfants. Si elles ont un enfant, alors à vous le quart de ce qu’elles laissent, après exécution du testament qu’elles auraient fait ou paiement d’une dette. Et à elles un quart de ce que vous laissez, si vous n’avez pas d’enfant. Mais si vous avez un enfant, à elles alors le huitième de ce que vous laissez après exécution du testament que vous auriez fait ou paiement d’une dette. Et si un homme, ou une femme, meurt sans héritier direct, cependant qu’il laisse un frère ou une sœur, à chacun de ceux-ci alors, un sixième. S’ils sont plus de deux, tous alors participeront au tiers, après exécution du testament ou paiement d’une dette, sans porter préjudice à quiconque ».
Verset 176.
« Ils te demandent ce qui a été décrété. Dis : « Au sujet du défunt qui n’a pas de père ni de mère ni d’enfant, Dieu vous donne son décret : si quelqu’un meurt sans enfant, mais a une sœur, à celle-ci revient la moitié de ce qu’il laisse. Et lui, il héritera d’elle en totalité si elle n’a pas d’enfant. Mais s’il a deux sœurs (ou plus), à elles alors les deux tiers de ce qu’il laisse ; et s’il a des frères et des sœurs, à un frère alors revient une portion égale à celle de deux sœurs. Dieu vous donne des explications pour que vous ne vous égariez pas. Dieu est Omniscient ».
TESTAMENT.
Verset 180 du chapitre 2. « Il vous est prescrit, quand la mort est proche de l’un de vous et s’il laisse des biens, de faire un testament en règle en faveur de ses père et mère et de ses plus proches ».
Certains docteurs en droit musulman considèrent néanmoins que Dieu ayant prescrit le legs bien avant le partage de l’héritage, le verset sur le legs est donc abrogé.
Ces versets coraniques vont être la source principale en ce qui concerne le droit de succession. La Sounna, quant à elle, n’en parle presque pas si ce n’est un hadith où Mahomet confirme les éléments énoncés dans le Coran en disant : « Dieu a donné à chacun la part qui lui revenait de “mais en ajoutant “pas de testament pour les héritiers » (Sounna al-Tirmizi 2046).
Même hadith dans la Sounan d’Abou Daoud, livre 11, numéro 2864. Rapporté par Abou Horaïra : « J’ai entendu l’apôtre de Dieu (que la paix soir sur lui) dire : Dieu a arrêté pour chaque héritier ce qui lui revenait et aucun legs ne doit être fait à un héritier ».
C’est un hadith si célèbre chez les oulémas qu’il en est devenu maxime.
NDLR. Il ne sera nullement question, dans ce chapitre de remettre en cause l’authenticité de tous ces hadiths (dont l’immense majorité n’apparaissent qu’un siècle après la mort de Mahomet, et visiblement pour servir tel ou tel camp politique).
D’après le professeur François-Paul Blanc, Mahomet aurait fusionné les traditions patriarcales de l’Arabie avec les coutumes de La Mecque, où avait survécu un ancien régime de matriarcat (voir le statut de la première femme de Mahomet, Khadidja et le culte des déesses Manat Alat Al Ouzza). Toujours d’après le professeur François-Paul Blanc son compromis fut facilement accepté par ses Compagnons, venus de La Mecque, mais beaucoup moins par les Ansar, d’origine médinoise. Quoi qu’il en soit ce hadith est devenu un dogme relatif au partage des successions entre homme et femme.
Il existe des cas où la femme seule hérite (quand l’homme n’a pas de lien de parenté ou a perdu ses droits).
Il existe plus de 10 cas où la femme reçoit plus que l’homme (quand le lien de parenté de la femme est plus proche du défunt que celui de l’homme).
Il existe plus de 8 cas où la femme hérite de la même part que l’homme (en général aussi quand son lien de parenté avec le défunt est plus proche que celui d’un homme).
Il existe 4 cas où la femme hérite de la moitié de ce dont hérite l’homme.
Il existe un cas où il y a exhérédation : quand la femme n’est pas ou n’est plus de confession musulmane.
Dans tous les autres cas, l’homme hérite plus que la femme conformément à l’esprit du verset 11, du chapitre 4 intitulé « les femmes ».
NDLR. Les chiites qarmates avaient institué l’égalité entre homme et femme en matière de droit successoral ce qui simplifiait tout.
EN TERRE D’ISLAM, L’HÉRITAGE EST DONC UNE VIOLENCE « NON PHYSIQUE » FAITE AUX FEMMES.
Les exégètes et les jurisconsultes, les Anciens comme les nouveaux continuent de chercher des solutions leur permettant d’éviter de regarder la réalité en face.
— Certains soumettent le texte divin à la réflexion et réfléchissent sur la structure même du Verset 8 de la sourate des Femmes : « Au cas où de proches non-héritiers, des orphelins et des pauvres assisteraient au partage (de la succession), on leur en donnera quelque chose, et l’on usera de bons procédés à leur égard. » Mais ils y ajoutent un commentaire lourd de conséquences : « si la fortune est abondante ». Or si Dieu avait voulu poser cette condition, il l’aurait fait.
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— D’autres encore se sont rendu compte du caractère dangereux d’un tel dérapage : ils ont bien considéré le legs comme une prescription définitive et de reconnaître que l’homme/ la femme est libre de léguer sa fortune à qui il veut, homme ou femme, parent, pauvre ou même quelqu’un de passage.
— D’autres, enfin, s’efforcent de concilier les extrêmes et ils adoptent l’attitude communément partagée par les différentes tendances de jurisconsultes : ils reconnaissent la légitimité du legs, mais en le faisant dépendre d’une condition fondamentale puisée dans un propos attribué à Mahomet : « Point de legs aux héritiers » auquel ils ajoutent la précision suivante : « Il n’est de legs que dans les limites du tiers de la succession. »
Qu’y a-t-il de vraiment sacré dans tout ça ?
Les institutions religieuses excellent dans l’art d’adopter les positions des Anciens et de les légitimer. Elles se sont érigées en représentantes exclusives de la parole de Dieu auquel elles attribuent tout ce qui correspond à leur propre conception, et traitent d’impies tous ceux qui cherchent à connaître le sort dévolu à certaines dispositions qu’on ne voit plus dans le texte coranique. Nous nous contenterons de citer, comme exemple, l’héritage du grand-père quand l’enfant ayant lui-même des enfants est décédé avant. Le plus simple est en effet que les petits – enfants se partagent à égalité la part qui aurait dû revenir à leur père ou à leur mère. Or en droit musulman il n’en est rien. Dans ce cas (père ou mère décédé avant son propre père ou sa propre mère), les petits-enfants n’ont droit à rien. La raison en est qu’en droit musulman les parents les plus proches excluent totalement les parents plus éloignés dans l’ordre de la succession.
Le Coran remédie à cette situation grâce à une autre disposition : lorsque les oncles et tantes se sont partagé la succession de leur père ou mère, ils auraient dû en céder une part à leurs neveux, ainsi qu’il est stipulé au chapitre 4, dans le verset relatif à la succession : « Et lorsque les proches parents, les orphelins, les nécessiteux assistent au partage (de la succession), offrez-leur quelque chose de l’héritage, et parlez-leur convenablement. »
Le grand-père aurait pu également accorder un legs à ces petits-enfants. Ce legs est considéré comme obligatoire et imprescriptible par certains juristes.
Le plus simple néanmoins aurait été comme le pensaient les chiites qarmates que les petits-enfants se partagent la part qui aurait dû revenir à leur père ou à leur mère.
Mais tout chercheur ayant abordé ce sujet afin d’en comprendre les origines historiques a été considéré comme un fauteur de troubles. Et tous ceux qui se sont interrogés sur les conditions dans lesquelles les versets comportant des prescriptions ont été révélés ont été accusés de vouloir générer des dissensions entre les musulmans, bien que les Anciens eux-mêmes se soient interrogés là-dessus, donnant lieu ainsi à une polémique interminable et sans issue.
Par ailleurs, le Coran ne fait pas état de tous les cas de figure relatifs à l’héritage. C’est pourquoi les jurisconsultes ont eu besoin, à travers l’histoire, de concevoir toute la jurisprudence traitant des successions et dont les dispositions furent assez complexes à l’image de la complexité structurelle de la société.
Puis, ces dispositions se sont transmises de génération en génération, sans que l’on tienne compte des situations des sociétés et de leur dynamique interne.
Cette « science » est donc devenue obsolète et anachronique, car la structure de la société d’aujourd’hui ne peut plus supporter, dans le domaine des successions, des questions ou dispositions relevant de la polygamie du genre le mari qui meurt « en laissant trois veuves, deux grand-mères, huit demi-sœurs d’un même père et quatre demi-sœurs d’une même mère ».
Ou « Dix-sept femmes ont hérité dix-sept dinars qu’elles ont dû partager à raison d’un dinar par personne » (Al Qarafi, Al Dhakhira, tome 13, page 76).
Ce qu’il y a de positif dans ces cas juridiques sur lesquels les fouqaha (juristes) se sont penchés c’est que ces textes n’ont cessé de montrer que l’approche des Anciens n’était qu’un produit culturel, et que ces réponses juridiques cherchaient leur légitimité dans les coutumes plus que dans le Coran lui-même.
Quand on se penche sur les sources du fiqh on peut de facto constater un fait troublant. Durant les dix premiers siècles de l’hégire en effet, les sociétés musulmanes ne se sentirent guère obligées d’appliquer des lois résultant d’un minimum d’ijtihad. Le cas de l’héritage montre bien que des subterfuges juridiques ou sous-lois frayèrent des voies de sortie évitant la confrontation avec un ijtihad visant à dépasser les lois qui réglementent la vie quotidienne et empêchent d’atteindre un certain équilibre social.
TÉMOIGNAGE.
En terre d’Islam après la mort de leurs parents ou conjoint les femmes n’ont droit à rien (épouse non musulmane de naissance ou devenue telle, interdiction des testaments en faveur des héritiers, etc.) ou alors seulement à la moitié de la part de leurs frères, voire à seulement un tiers, en tout cas toujours moins, en vertu de bien étranges raisonnements du type « âge du capitaine ».
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Notons enfin que dans le Coran et donc en terres d’islam, en matière de témoignage, une femme ne vaut que la moitié d’un homme.
Chapitre 2, 282. « Demandez le témoignage de deux témoins. Si vous ne trouvez pas deux hommes, choisissez un homme et deux femmes ».
Le témoignage d’une femme ne compte donc que pour la moitié de celui d’un homme (sauf dans les cas d’avortement, jugés spécifiquement féminins). Une musulmane n’a d’ailleurs en général que la moitié des droits d’un musulman, mais a beaucoup plus de devoirs, y compris d’ordre sexuel.
Premier hadith. Le Messager de Dieu (que la paix soit sur lui) a dit un jour : « Si l’homme appelle sa femme afin de satisfaire ses besoins, qu’elle se libère immédiatement pour lui, même s’il est au four ».
Deuxième hadith : « Si le mari a appelé sa femme à venir dans son lit, et qu’elle a refusé, les anges la maudiront jusqu’au lendemain matin ».
Troisième hadith. Omar Khayyam (1048-1122) : « Referme ton Coran. Pense et regarde librement le ciel et la terre ».
TRAVAIL OU FEMME AU FOYER.
L’avis du grand penseur musulman qu’est le cheikh Ibn Baaz (rahimahoullaah). Grand mufti d’Arabie saoudite de 1993 à sa mort en 1999.
Question : Quelle est la position de l’islam sur les femmes qui travaillent et sortent de chez elles en portant les vêtements que nous les voyons porter dans la rue, l’école, la maison, etc. Même question à propos des femmes de la campagne qui travaillent avec leur mari dans les champs ?
Réponse : Il est indéniable que l’islam a ennobli la femme, l’a protégée, l’a préservée des loups. Il a sauvegardé ses droits et l’a élevé dans l’échelle sociale. Il l’a fait participer avec les hommes aux successions et a interdit l’infanticide des filles. Il a rendu obligatoire de demander son consentement au mariage et lui a accordé de son vivant un pouvoir illimité sur ses richesses. Il a soumis son mari à de nombreux droits de sa part sur lui. Il a rendu obligatoire que son père et ses parents subviennent à ses besoins. Il a rendu obligatoire qu’on la protège du regard des étrangers afin qu’elle ne devienne pas une marchandise bon marché dont chacun peut jouir à volonté.
S’agissant d’une femme qui travaillant avec son mari dans les champs, une fabrique ou la maison, il n’y a pas de problème. Idem (si elle travaille) avec ses mahrams et qu’il n’y a pas d’étrangers (non-Mahram) avec eux. Et de même (elle peut travailler) avec des femmes. Il lui est seulement interdit de travailler avec des hommes qui ne sont pas mahram pour elle. Car cela conduit à de grands malheurs et à de cruelles épreuves, comme de se retrouver seul avec elle-même et à dévoiler sa beauté. La charia lui en a donné tous les avantages, au plus haut point, tout en la préservant de ses méfaits ou en les minimisant. Elle a bloqué les voies qui mènent à ce que Dieu a interdit en de nombreux endroits (du Coran et dans la Sunnah). Il n’y a nul chemin vers le bonheur, l’honneur et le salut dans cette vie
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comme dans l’autre, si ce n’est se cramponner à la charia (au Coran et à la Sounna), en respectant à la lettre ses décisions, en se gardant de ce qui s’y oppose, en y faisant inlassablement appel.
Question : incombe-t-il à la femme de travailler puisque le Messager – que Dieu l’exalte et lui accorde la paix – nous a commandé de travailler, je veux dire en dehors de nos maisons ?
Réponse : Quand elle n’a pas d’argent, ni personne pouvant aussi en dépenser pour elle, il lui appartient de travailler, elle ne peut que travaille, pour vivre et subsister. Elle peut travailler comme couturière voire dans un autre métier où elle est à l’aise comme le tissage par exemple. Quelque chose qu’elle peut effectuer sans se mêler aux hommes ni sans être seule avec des hommes – à la maison ou dans un endroit protégé – où il n’y a pas de crainte à avoir. Elle peut travailler en faisant ce dont elle est capable, du tissage, de la couture, du travail d’art, ou toute autre chose lui permettant de subsister et de pourvoir aux besoins de ses enfants.
Quant à la femme qui a quelqu’un pour s’occuper d’elle – (comme) son père, ou son mari, ce n’est pas sur elle qu’il incombe de travailler. Elle a déjà largement de quoi faire en s’occupant du ménage et en faisant ce que lui dit son mari.
Le Messager de Dieu (la paix soit sur lui) a catégoriquement interdit toute promiscuité entre un homme et une femme non emparentés. Il a remarqué à ce propos, « Satan est toujours le troisième ». 1)
Il a également interdit aux femmes de voyager sauf en compagnie de mahram masculins afin de fermer les portes qui mènent au mal et aux péchés et protéger les deux parties des ruses de Satan. C’est pourquoi il a dit, « Soyez méfiants et prudents vis-à-vis de ce monde et soyez méfiants et prudents vis-à-vis des femmes. Le premier procès qui a accablé les tribus d’Israël concernait des femmes ».
Un autre hadith stipule « Je n’ai pas laissé derrière moi tentation plus néfaste pour les hommes que les femmes » 2).
Ces versets et ces hadiths limpides montrent bien qu’il est obligatoire d’éviter le mélange des sexes qui mène au mal à la pornographie et à la destruction des sociétés. Les sages de ces pays et d’Occident demandent le retour de la femme à son rôle naturel auquel Dieu l’a préparée et pour lequel son corps et son esprit sont faits. Il y a assez de travail pour les femmes dans leurs maisons, dans l’enseignement ou dans d’autres lieux liés aux femmes pour rendre inutile d’occuper des emplois sur les lieux de travail masculin. Nous demandons à Dieu de protéger nos pays et les pays des musulmans des complots et machinations de leurs ennemis. Que Dieu inspire nos responsables et le reste des médias pour guider les hommes vers ce qui leur convient le mieux dans cette vie et dans l’au-delà. Que Dieu les guide quand ils suivent les commandements de leur Seigneur et Créateur, qui connaît mieux qu’eux de ce qui est dans leur intérêt.
……………………
La mixité hommes-femmes totale sur le lieu de travail joue un rôle majeur dans la destruction et la corruption des nations. On sait que, parmi les raisons de la chute des civilisations romaine et grecque, l’engagement des femmes dans le domaine réservé des hommes a conduit à la corruption des éléments masculins et à l’abandon des entreprises qui devaient assurer la prospérité de leurs nations. Le travail des femmes entraînera le chômage des hommes, la destruction de la nation, les problèmes familiaux et le déclin de la morale. Cela contredit également ce que Dieu a dit de l’autorité des hommes sur les femmes dans le couple. L’Islam tient à protéger les femmes de tout ce qui va contre sa nature. L’Islam lui a interdit de gouverner un pays ou d’être juge. Le Prophète (que la paix soit sur lui) a dit : un peuple qui confie à une femme la direction de ses affaires ne saurait prospérer. (Rapporté par Al-Boukhari dans son Sahih). Permettre à la femme de travailler dans les domaines réservés aux hommes est contraire à son bonheur et sa stabilité. L’islam interdit aux femmes de travailler dans des domaines qui ne le conviennent pas. Il est prouvé, surtout dans les sociétés où les deux sexes se côtoient librement, que les hommes et les femmes ne sont pas naturellement égaux. Il ressort clairement du Quran et de la Sounna que les deux sexes ont des natures et de devoirs différents. Ceux qui appellent à l’égalité entre les deux sexes… ignorent ou veulent volontairement ignorer leurs différences fondamentales.
Certains penseurs musulmans, plus révolutionnaires admettent que les femmes ont le droit de travailler. Mais en examinant tout cela de plus près, ce que l’on constate c’est que les métiers auxquels ils pensent sont, par exemple, institutrices (pour filles) médecins et infirmières (pour femmes), etc. Aux dires de ces doctes penseurs, la femme peut exercer tous les métiers donc, exceptés :
1 Ceux qui sont incompatibles avec sa croyance, tels que curer les égouts, pêcher dans les lacs et les rivières (??)
2 Ceux qui sont incompatibles avec sa nature féminine : contrôleur, officier de police, danseuse (sic) ?
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3 Ceux qu’elle est physiquement incapable d’effectuer, comme le travail en usine.
4 Ceux qui requièrent l’utilisation d’un cheval ou d’une bicyclette.
5 Ceux qui requièrent l’usage de la raison : elle ne peut pas être magistrate ou imam. D’autres penseurs interdisent les emplois d’actrice, d’hôtesse de l’air ou de vendeuse.
Les arguments qui sont les plus fréquemment avancés pour justifier ces interdictions sont :
1 Ses facultés mentales limitées.
2 Ses faiblesses psychologiques en raison des menstruations, de la grossesse, et de l’enfantement.
3 Sa nature féminine : elle est faite pour rester à la maison, s’occuper des enfants et répondre aux besoins sexuels de son époux.
L’exemple même de Mahomet ainsi que les hadiths sont sans équivoque à ce sujet.
Bas du formulaire
La femme devrait toujours être prête à répondre aux besoins de son mari, sauf dans les cas où ce n’est pas permis par la charia (haïda ou nifaas). En dehors de ces périodes, elle n’a pas le droit de se refuser à lui. Le Messager de Dieu (que la paix soit sur lui) a dit un jour : « Si l’homme demande à sa femme de venir satisfaire ses besoins, qu’elle se libère immédiatement pour lui, même si elle est au fourneau ». Dans un autre hadith, il a déclaré : « Si le mari a demandé à sa femme de venir au lit, et qu’elle a refusé, les anges la maudiront jusqu’au lendemain matin » (Rapporté par Al-Boukhari, 306, et Muslim, 1436). Si une femme refuse de répondre à la demande de rapports sexuels de son mari, elle fait donc quelque chose de haram et commet un péché majeur, à moins qu’elle n’ait une excuse valable comme les règles, le jeûne obligatoire, une maladie, etc.… 3).
Si des femmes jouent un certain rôle dans beaucoup de sociétés islamiques – où la religion constitue la barrière la plus redoutable à la libération de l’esprit, à la justesse du discernement, et à la liberté d’expression — ; c’est bien malgré l’islam qu’elles l’ont obtenu. Dans la plupart des pays où domine la loi coranique, les hommes peuvent, en toute impunité ou presque, assassiner leurs filles ou leurs sœurs ne se soumettant pas aux injonctions du Coran ; et notamment celles qui fréquentent des hommes, non musulmans, ou sans être mariées avec eux (crime d’honneur).
Reconnaissons néanmoins qu’il y a quelques métiers qui ne sont guère faits pour les femmes : mineur de fond, commando de marine le couteau entre les dents ! Par contre pourquoi pas une femme amirale ?
Note de bas de page.
1. Rapporté par Ahmad et al-Tirmizi. cf. aussi Al-Albani, Sahih al-Jami, tome. 1, p. 234.
2. Rapporté par al-Boukhari et Muslim.
3. Pour tout renseignement complémentaire contacter…
Hommes : deenulqayyem @ gmail.com.
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SORT DANS L’AU-DELÀ.
Il a été rapporté que, d’après le Prophète (la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) les femmes forment la majorité de ceux qui demeurent en enfer. On tient en effet d’Imran ibn Husseïn que le Prophète (la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) a déclaré : « J’ai regardé le Paradis et j’ai vu que la majorité de ses habitants étaient des pauvres. J’ai regardé en enfer et j’ai vu que la majorité de ses habitants étaient des femmes » (al-Boukhari, 3241 ; Muslim, 2737).
Le Prophète (la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) a été interrogé à ce sujet et il en a donné la raison.
On dit qu’Abd-Allah ibn Abbas (que Dieu soit satisfait de lui) a rapporté que le Messager de Dieu (la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) a déclaré : « On m’a montré l’enfer et je n’ai jamais rien vu de plus terrifiant. J’ai vu que la majorité de ses habitants sont des femmes ». Ils ont demandé : « Pourquoi donc, Messager de Dieu ? » Il a répondu : « À cause de leur ingratitude (koufr) ». Ont-elles été ingrates envers Dieu ? " Il a répondu : « Elles ont été ingrates envers leurs compagnons (maris), et ce même si elles ont été bien traitées. Vous avez beau avoir été aimable avec elles toute leur vie, si elles trouvent qu’il y a quelque chose (d’indésirable) en vous, elles vous diront : « Je n’ai jamais eu rien de bon de ta part » (al-Boukhari, 1052).
D’après Abou Saïd al-Khoudri (que Dieu soit satisfait de lui) « alors que le Messager de Dieu (la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) se rendait à la mousalla (lieu de prière) le jour d’Aïd al-Adha ou d’Aïd al-Fitr il croisa des femmes et leur dit : « Ô femmes ! Faites la charité, car j’ai vu que vous formiez la majorité de ceux qui demeurent en enfer ». Elles lui ont alors demandé : « Et pourquoi donc, ô Messager de Dieu ? » Il a répondu : « Vous maugréez souvent et vous vous montrez ingrate
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envers vos maris. Je n’ai vu personne plus dénué d’intelligence et de piété que vous. Certaines d’entre vous peuvent même faire s’égarer un homme prudent et sensé ». Les femmes lui ont alors demandé: « Ô Messager de Dieu, que manque-t-il à notre intelligence et à notre piété ? » « Le témoignage d’une femme ne vaut-il pas que la moitié de celui d’un homme ? « Elles lui répondirent que si et il a ajouté :" Voilà en ce qui concerne les déficiences de votre intelligence. Maintenant n’est-il pas vrai qu’une femme ne peut ni prier ni jeûner quand elle a ses règles ? » « Si ! » Le Messager de Dieu a alors ajouté :« Voilà en ce qui concerne la déficience de votre piété » (al-Boukhari, 304).
Par contre le Coran reste très discret sur le Paradis des femmes : elles auront simplement le droit de retrouver dans l’au-delà leur mari terrestre… et d’assister à leurs ébats peut-être.
« Aux hommes pieux reviendra un lieu convoité, des vergers et des vignes, des Belles aux seins formés, d’une égale jeunesse et des coupes débordantes » (Coran 78, 31 à 33).
Les Élus seront allongés sur des couches au revers de brocard et les fruits des deux jardins seront à leur portée… Dans ces jardins seront des vierges aux regards modestes que ni Homme ni Démon n’aura touchées avant eux… et ces femmes seront belles comme le rubis et le corail » (Coran 55, 54-58).
« Les Prédécesseurs, ceux-là sont les proches du Seigneur dans les jardins de la félicité […] sur des lits tressés s’accoudant et se faisant vis-à-vis. Parmi eux circuleront des éphèbes immortels, avec des cratères, des aiguières et des coupes d’un limpide breuvage dont ils ne seront ni malades, ni enivrés, avec leurs fruits préférés […] Là seront des houris aux grands yeux, semblables à la perle cachée, pour les récompenser de ce qu’ils faisaient sur terre » (Coran 56,10-22).
« Que nous avons formées à la perfection et que nous avons gardées vierges, pour les Compagnons de la Droite » (Coran 56, 35-38).
« Dans ces jardins, ils auront de pures épouses et ils y demeureront éternellement » (Coran 2, 25).
N.B. Il n’est pas dit ce que les petits personnels d’exécution du Paradis (vierges, houris, éphèbes et serviteurs divers) deviendront après usage. Il n’est pas dit si les « épouses purifiées » que les hommes vertueux trouveront au Paradis seront celles qu’ils avaient déjà sur terre, reconditionnées en vierges, ou d’autres.
CONCLUSION.
C’est vis-à-vis des femmes que l’islam révèle son anachronisme et ses aspects les plus inégalitaires. L’islam a perpétué jusqu’à nos jours une vision archaïque, injuste et inégalitaire des droits (ou plutôt de l’absence de droits) de la femme. Pour un musulman de stricte observance, la femme n’est rien d’autre qu’une sorte d’esclave qui doit la plus totale obéissance à son « maître ».
Il n’y a guère que pendant la période dite « abbasside » que les femmes musulmanes redressèrent quelque peu la tête. On vit même de jeunes filles arabes combattre dans les rangs des armées, au même titre que les hommes.
Le Coran réduit la femme au rang de spectatrice et domestique de l’homme. Elle peut être échangée (« échanger une épouse contre une autre » est l’expression utilisée par le verset 20 du chapitre 4 du Coran) ou rejetée (répudiée) comme pour tout produit de consommation, courante ; elle est à la charge du mari au même titre que le bétail. Le maître peut disposer d’elle comme il l’entend et même user de la force à son encontre (Coran 4,34). Parler ici de misogynie est trop faible pour exprimer le mépris et la soumission dont les femmes sont l’objet. L’adultère semble être une exclusivité féminine.
Le monde musulman est resté fidèle à ces préceptes préhistoriques. En donnant au Coran un caractère immuable, les musulmans perpétuent des us et coutumes qui n’ont plus cours dans les autres communautés depuis des siècles. En cela, ils sont rejoints par les juifs « ultra-orthodoxes » (Haredim), ceux-là mêmes qui constituent le noyau dur de la droite israélienne. On ne connaît que trop bien les méthodes fascisantes de cette droite extrémiste, belliqueuse et raciste. Des méthodes qui s’apparentent très directement à celles des factions islamistes les plus radicales. Ce sont ces
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fascistes religieux qui ont revendiqué (et obtenu !) des bus « kasher » (avec compartiments séparés pour les hommes et pour les femmes).
L’islam est porteur d’une conception fondamentalement inégalitaire des sexes. Dans bon nombre de communautés musulmanes, les hommes se sont arrogé le droit de vie ou de mort sur les femmes et les jeunes filles (crimes d’honneur). Ce sont les hommes adultes (ou pré adultes) qui « règnent en maîtres », et imposent leurs volontés aux femmes, aux jeunes filles, et aux enfants. L’islam ne donne pas de liberté à la femme ; les lois coraniques ne lui laissent aucune possibilité d’émancipation au sein de la société. Les maris ont, en terre d’islam, le droit de corriger leurs épouses (Coran 4,34), de leur prendre les enfants, ils peuvent les répudier en quelques minutes, et même à leur insu, en les déshéritant totalement au profit d’une plus jeune.
Outre ce droit de correction, d’enfermement, et de répudiation, ou de garde des enfants, réservés à l’époux ; il y a aussi infériorité juridique de la femme en matière de témoignage et d’héritage, avec même carrément exhérédation en cas d’épouse non musulmane.
Notre conclusion sera donc la suivante en ce domaine : toute personne, que ce soit un journaliste ou un homme politique (de toute façon ce sont les mêmes) qui affirme que l’islam reconnaît aux femmes les mêmes droits civils ou civiques… MENT.
Les hommes ont la prédominance sur les femmes (2,228 ; 4,34). La femme est inférieure à l’homme en droit : elle hérite d’une demi-part (4,11-12 ; 176) et en justice son témoignage vaut un demi-témoignage d’homme (2,282). La femme doit rester à la maison (33, 33). Son mari doit la frapper non pas si elle désobéit, mais dès qu’il soupçonne qu’elle pourrait penser à désobéir (4,34).
Un homme peut avoir jusqu’à quatre femmes (4,3). La rupture du mariage peut se faire d’un commun accord (4,130) ou par répudiation à la seule initiative du mari. Si elle est répudiée, avant de la mettre à la porte, le mari peut la séquestrer pendant trois périodes menstruelles pour s’assurer qu’elle n’est pas enceinte (65,1). L’adultère est puni de mort (4,15). Les esclaves peuvent être épousées ou servir de concubines forcées en plus des épouses autorisées (4,3 ; 4,25 ; 33, 52 ; 70,30).
NB. Les théologiens musulmans n’incluent pas les relations sexuelles forcées dans la notion de mauvais traitements, car le devoir de la femme est bien évidemment de satisfaire sexuellement parlant son mari, quelles que soient les circonstances, même si elle est en train de travailler au fourneau. Il existe de nombreux hadiths ou avis de théologiens sur le sujet.
Bref, en résumé une musulmane n’a en général que la moitié des droits d’un musulman, mais a beaucoup plus de devoirs, y compris d’ordre sexuel, envers l’homme musulman.
« Les hommes ont autorité sur les femmes, en raison des faveurs que Dieu accorde à ceux-ci sur celles-là, et aussi à cause des dépenses qu’ils font de leurs biens (pour les entretenir). Les femmes vertueuses sont obéissantes (à leurs maris), et protègent ce qui doit être protégé, durant l’absence de leur époux, avec l’aide de Dieu. Et quant à celles dont vous craignez la désobéissance, exhortez-les, faites-leur faire chambre à part et frappez-les. Si ensuite elles vous obéissent, alors ne leur cherchez plus querelle, car Dieu est grand ! » (4,34).
LES RAQIQ OU ESCLAVES.
LES BASES SCRIPTURAIRES.
L’esclavage pour raison économique (dette) est admis dans la partie Ancien Testament de la Bible. 7 ans pour des juifs, ou pour la vie en cas de volontariat (?) pour une durée indéterminée s’il s’agit de non-juifs (Deutéronome 15, 12-15).
La partie de la Bible située ontologiquement parlant au même niveau que le Coran, les quatre évangiles est muette sur la question.
Dans la partie Nouveau Testament de la Bible, deux lettres de Saint Paul admettent l’existence de l’esclavage (Éphésiens 6,9 et Colossiens 4,1).
Le fait est donc qu’il y a eu durant les premiers siècles de notre ère des chrétiens ayant des esclaves et il est parfaitement exact que le grand rabbi nazaréen Jésus n’a jamais demandé l’abolition explicite de l’esclavage, qu’il n’a jamais exigé de ses fidèles qu’ils n’aient pas d’esclaves, mais à la différence de Mahomet lui au moins n’a jamais possédé personnellement des esclaves ; car le fait que Mahomet a personnellement eu des esclaves, sexuelles ou pas, change tout pour un musulman pieux. Mahomet en effet a capturé des esclaves, vendu des esclaves, acheté des esclaves, reçu des esclaves en cadeau (exemple la Copte prénommée Marie, offerte à Mahomet par le gouverneur d’Alexandrie Égypte. Nous connaissons en effet le nom d’au moins une des esclaves sexuelles de Mahomet.
Lorsque l’envoyé de Mahomet se rendit auprès du gouverneur chrétien d’Égypte (Mouqaqis) avec une invitation à se convertir en Islam, il refusa de le faire, mais comme il connaissait les goûts de
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Mahomet, il lui fit présenter deux belles et séduisantes esclaves qui étaient sœurs. Mahomet garda Marie, la plus belle pour lui-même et offrit sa sœur, Sirin, à son ami Hassan ibn Thabit. Marie donnera naissance à Ibrahim, le dernier des enfants de Mahomet, mort en bas âge.
La Sira ou vie de Mahomet par Ibn Ichaq traduite par Guillaume est très claire sur le sujet. L’esclavage est une évidence dans le Coran. Il porte en particulier sur les femmes capturées lors des petits djihads, transformées en esclaves sexuelles, ce qui est évidemment une puissante incitation pour recruter des combattants ainsi que nous avons eu l’occasion de la voir avec le siège de Taïf qui a suivi la bataille de Honeïn en 630 : 2000 mecquois venus rien que pour l’appât du gain et la chair fraîche.
Abu Daoud (2150) – « L’apôtre de Dieu (que la paix soit avec lui) envoya une expédition militaire à Aoutas lors de la bataille de Honeïn. Ils se battirent contre leurs ennemis. Ils les vainquirent et firent prisonniers les survivants. Certains des disciples de l’apôtre de Dieu (que la paix soit avec lui) hésitaient à violer les femmes capturées en présence de leurs maris qui étaient païens. Alors Dieu fit descendre sur eux le verset du Coran : il vous est aussi interdit d’épouser des femmes déjà mariées, à moins qu’elles ne soient vos captives de guerre » (4 : 24).
Petite précision sémantique. L’expression arabe Malak-oul-Yamin « que ta main droite possède » signifie en réalité esclaves ou femmes devenues propriétés d’un musulman par suite d’une guerre ou d’un achat.
Suite aux diverses interventions des Nations unies (pour une fois) sur le sujet, depuis le 19e siècle, l’esclavage n’est plus actuellement pratiqué massivement et ouvertement en terre d’Islam (dar al islam), mais le problème de l’islam c’est que son fondateur et modèle, Mahomet, a eu lui-même des esclaves, a fait lui-même des esclaves, et a entériné lui-même personnellement cette pratique. Y compris celle des esclaves sexuelles. Donc que certains passages du livre sacré des musulmans ou des hadiths justifient et légitiment l’existence de l’esclavage.
Un non-musulman peut donc très bien être l’esclave d’un musulman, mais un musulman ne peut pas appartenir en tant qu’esclave à un de ses coreligionnaires SAUF SI LA CONVERSION A EU LIEU APRÈS LA RÉDUCTION EN ESCLAVAGE. IL PUT DONC Y AVOIR… DES MUSULMANS ESCLAVES D’AUTRES MUSULMANS.
Les versets du Coran légitimant la pratique de l’esclavage maintenant.
Verset 3, chapitre 4. « Épousez comme il vous plaira deux, trois, ou quatre femmes. Mais si vous craignez de n’être pas équitables, prenez une seule femme ou vos captives de guerre ».
Verset 24 à 25, chapitre 4. « Vous sont encore interdites les femmes mariées de bonne condition à moins qu’elles ne soient vos captives de guerre… Celui qui, parmi vous, n’a pas les moyens d’épouser des femmes croyantes et de bonne condition prendra des captives de guerre croyantes… lorsque ces femmes ayant accédé à une bonne condition commettront une action infâme, elles subiront la moitié du châtiment que subiraient des femmes de bonne condition ».
Note de l’éditeur. Le bon côté d’être inférieur. La musulmane libre est supérieure à l’esclave musulmane, supérieure à l’esclave non musulmane que des musulmans possèdent (par ex. Maria la Copte, une des esclaves de Mahomet), supérieures aux femmes chrétiennes, supérieures aux femmes juives, ainsi de suite…
Verset 36, chapitre 4. « Adorez Dieu et ne lui donnez aucun associé. Agissez avec bonté envers (vos) père et mère, les proches, les orphelins, les pauvres, le proche voisin, le voisin lointain, le collègue et le voyageur, et les esclaves en votre possession, car Dieu n’aime pas, en vérité, le présomptueux, l’arrogant ».
Verset 52, chapitre 33. « Il ne t’est plus permis de changer d’épouses ni de prendre d’autres femmes en dehors de tes esclaves même si tu es charmé par la beauté de certaines d’entre elles ».
Verset 1 à 6, chapitre 23. « Heureux les croyants… qui se contentent de leurs rapports sexuels avec leurs épouses ou les esclaves qu’ils possèdent, car on ne peut les en blâmer ».
Verset 29, chapitre 70. « Les hommes chastes qui n’ont de rapport qu’avec leurs épouses et avec leurs captives de guerre – ils ne sont donc pas blâmables ».
Il y a des musulmans assez hypocrites (taqiya) ou ignorants de la sunna pour prétendre qu’il n’y a pas de hiérarchie dans l’islam, mais ou de légitimation du trafic d’esclaves, mais les textes fondateurs (Coran hadiths Sira) sont formels. Ou alors, ils ne les ont pas ouverts aux bonnes pages.
Sira d’Ibn Ichaq par Alfred Guillaume page 466 : « Alors l’apôtre envoya Sad b. Zaïd al-Ansari, frère de Abdoul-Ahsal, à Najd avec quelques-unes des femmes des Banou Quraïza prisonnières et il les vendit contre des chevaux et des armes. »
Hadiths.
Sahih Muslim. Livre 010. Hadith Numéro 3901. Jabir (que Dieu soit satisfait de lui) a rapporté ce qui suit : un jour un esclave est venu faire allégeance à l’Apôtre de Dieu (que la paix soit sur lui) lors de la migration ; il (le saint Prophète) ne savait pas que c’était un esclave. Ensuite son propriétaire vint le réclamer, sur quoi l’apôtre de Dieu (que la paix soit sur lui) a répondu : vendez-le-moi. Et il l’a acheté
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contre deux esclaves noirs, ensuite il ne prêta allégeance à personne jusqu’à ce qu’on lui demande s’il était esclave (ou un homme libre).
Mouatta de Malik. Livre 28, Numéro 28.14.33. Yahya m’a dit…… il a été demandé à Omar ibn al-Khattab si on pouvait avoir des relations sexuelles successives avec une femme et sa fille que sa main droite possède. Omar a répondu : « Je n’aime pas qu’on le fasse ». Il a alors interdit cette pratique.
Mouatta de Malik. Livre 28, Numéro 28.14.34. Yahya m’a dit… que quelqu’un a un jour demandé à Osman ibn Affane de faire si on pouvait avoir des relations sexuelles avec deux sœurs dont on était propriétaire. Osman a répondu : « Un verset les rend halal, et un verset les rend honteuses ».
Mouatta de Malik. Livre 2, Numéro 2.23.90. Yahya a raconté… que les esclaves d’Abdoullah ibn Omar lui lavaient les pieds et lui apportaient un tapis fait de feuilles de palmier quand elles avaient leurs règles.
On a alors demandé à Malik si un homme qui avait des femmes et des esclaves pouvait avoir des rapports sexuels avec toutes celles-ci avant ses ablutions (ghousl). Il a répondu : « Il n’y a pas de mal à ce qu’un homme ait des relations sexuelles avec deux de ses esclaves avant ses ablutions (ghousl). Il est inapproprié néanmoins d’aller voir une femme libre quand c’est le jour de l’autre. Il n’y a pas de mal à faire l’amour d’abord avec une esclave et ensuite à avec autre quand on est jounoub (impur) ».
Le contraire de la taqiya (l’honnêteté intellectuelle donc) commande de reconnaître clairement qu’il existe des versets du Coran demandant l’affranchissement des esclaves.
Chapitre 90 versets 12-16. « Et qui te dira ce qu’est la voie difficile ? C’est délier un joug [affranchir un esclave] ou nourrir, en un jour de famine, un orphelin proche parent ou un pauvre dans le dénuement ».
Observons néanmoins que ce très court verset fut « révélé » à Mahomet à une époque où la communauté musulmane était minuscule et beaucoup de ses nouvelles recrues potentielles étaient en fait des esclaves ou des esclaves fraichement affranchis. Beaucoup de ces musulmans de la première heure, et Mahomet lui-même, devinrent par la suite propriétaires d’esclaves hommes et femmes au fur et à mesure qu’ils devenaient assez puissants pour le faire. Le ton du Coran changea par la suite pour justifier l’esclavage, ce qui explique pourquoi ce verset n’a eu qu’un impact négligeable sur l’esclavage dans le monde musulman. Contrairement à l’idéologie dominante à ce propos, le fait de se convertir à l’islam ne rend pas forcément à un esclave sa liberté, bien que l’affranchissement d’un esclave soit présenté comme utile pour aller au paradis.
Chapitre 4 versets 92. « Il n’appartient pas à un croyant de tuer un autre croyant, sauf par erreur. Quiconque tue par erreur un croyant, qu’il affranchisse alors un esclave croyant et remette à sa famille le prix du sang, à moins que celle-ci n’y renonce par charité. Mais si [le tué] appartenait à un peuple ennemi et qu’il était croyant, qu’on affranchisse alors un esclave croyant. S’il appartenait à un peuple auquel vous êtes liés par un pacte, qu’on verse alors à sa famille le prix du sang et qu’on affranchisse également un esclave croyant ».
NDLR. L’expression « prix du sang » est une allusion directe à la loi du Talion, qui permet à la famille de la victime d’un meurtre d’exiger qu’un membre de la famille du meurtrier soit tué en réparation. Enfin, nul remords n’est exigé du meurtrier puisqu’il lui suffit de se priver d’un esclave (considéré comme un vulgaire bien meuble) ou, s’il n’a pas les moyens de se passer de son esclave, de nourriture, pour obtenir son pardon.
Dans l’islam, l’affranchissement d’un esclave et la générosité sont souvent présentés comme des moyens d’expier des péchés. Si l’aumône fait partie des piliers de l’islam, en revanche, il n’y a aucun verset qui remette en question le système de l’esclavage. Or une personne véritablement bonne refuse l’idée même de posséder un être humain.
Mais sur les cinq références au sujet d’affranchissements d’esclave dans le Coran, trois sont ordonnées comme punition face à des péchés divers commis par les possesseurs d’esclave, et dans tous ces trois cas un seul esclave est affranchi. Un autre cas d’affranchissement autorise un esclave à acheter sa liberté sous réserve d’une « bonne » conduite.
Coran 24,33. « Et avec ceux de vos esclaves qui cherchent à obtenir un acte d’affranchissement, signez ce document si vous reconnaissez du bien en eux ; puis donnez-leur un peu des biens que Dieu vous a accordés. Dans votre quête des biens de ce monde, ne contraignez pas vos esclaves à se prostituer si elles veulent rester chastes ».
L’esclavage est une chose immonde qui doit être dénoncée dans toutes les civilisations ! Il est inacceptable qu’un être humain, homme ou femme, soit considéré comme un bien qui peut être acheté, vendu ou échangé. Aucun esclave ne devrait avoir besoin de la signature d’un quelconque document pour être libre ni avoir à prouver qu’il mérite d’être libre. Quant aux femmes esclaves, le Coran leur accorde peut-être le droit de ne pas être forcées de se prostituer, mais il accorde à leur
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maître le droit d’avoir des relations sexuelles avec elles (4,3 ; 4,24 ; 23,6 ; 33,50 et 70,30), ce qui revient à permettre le viol puisque seule une femme libre peut donner valablement son consentement.
Les hadiths.
Boukhari 3. 47.765. Une femme se fait réprimander par Mahomet pour avoir affranchi une fille esclave. Le prophète lui dit qu’elle aurait été mieux inspirée d’offrir l’esclave à un membre de sa famille, car elle se serait vue accorder davantage de récompenses dans l’au-delà.
Rapporté par Kouria… Maïmouna bint Al-Harith lui a dit un jour qu’elle avait affranchi une esclave sans demander la permission du Prophète. Quand ce fut son tour d’être avec le Prophète * elle lui dit : « Sais-tu, O Apôtre de Dieu, que j’ai affranchi ma jeune esclave ? Il lui a demandé : « Tu l’as vraiment fait ? » Elle a répondu par l’affirmative. Il lui a alors rétorqué : « Tu aurais eu plus de récompenses [dans l’au-delà] si tu l’avais donnée à un de tes oncles maternels ».
Muslim 4112. Imran b. Hussein a rapporté que quelqu’un qui n’avait pas d’autres biens à sa mort a émancipé six de ses esclaves. Le Messager de Dieu les a appelés et les a répartis en trois groupes, puis il a tiré au sort entre eux, en a laissé deux libres et gardé les quatre autres comme esclaves ; puis il (le Saint Prophète) en a parlé en des termes très sévères.
Boukhari (41.598). Les esclaves sont des biens meubles. Ils ne peuvent pas être affranchis si leur propriétaire est endetté, mais plutôt utilisés pour payer ses créanciers.
Boukhari (80. 753). Le prophète a dit : « Les esclaves affranchis appartiennent aux gens qui les ont affranchis » (rapporté par Anas bin Malik).
Les versets ne parlant pas d’affranchissement maintenant.
Coran 2, 178. « Ô vous qui croyez ! La loi du talion vous est prescrite en matière de meurtre : homme libre pour homme libre, esclave pour esclave, femme pour femme ».
Coran 4, 24. « Il vous est aussi interdit d’épouser des femmes déjà mariées, à moins qu’elles ne soient des captives tombées en votre pouvoir ».
Coran 8,69. « Profitez de ce qui légitime et bon dans ce qui vous est revenu, et craignez Dieu. En vérité, Dieu est Clément et Miséricordieux ». Une référence au butin de guerre, dont les esclaves faisaient partie. Le musulman maître d’esclaves pouvait jouir de sa « prise » parce que (selon le verset 71) « Dieu a permis leur capture. »
Coran 16, 75. « Dieu propose en parabole un serviteur réduit à l’esclavage et dénué de tout pouvoir, et un homme libre à qui nous avons accordé d’amples ressources dont il use en secret et en public. Ces deux hommes sont-ils égaux ? Non, louange à Dieu ! »
Coran 23, 5-6 «… qui s’abstiennent de tout rapport charnel, sauf avec leurs épouses ou leurs esclaves, en quoi ils ne sont pas à blâmer… »
Coran 24,32. « Mariez les célibataires qui vivent parmi vous, ainsi que vos esclaves vertueux des deux sexes… » Ce verset recommande l’accouplement des esclaves en fonction de leur mérite.
Coran 33,50. « Ô Prophète ! Nous déclarons licites pour toi tes épouses que tu as dotées et les captives que Dieu t’a accordées au titre de butin de guerre ».
* Comme Mahomet avait plusieurs femmes, chacune devait attendre son tour.
DÉVELOPPEMENT DE L’ESCLAVAGE DANS LE MONDE MUSULMAN.
Les premières victimes de ce maintien ou de cette non-abrogation de l’esclavage par l’islam furent évidemment les Arabes eux-mêmes.
Les conquêtes des armées arabes et l’expansion de l’État islamique qui s’en est ensuivi ont toujours eu évidemment comme résultat la capture de prisonniers de guerre qui étaient ensuite libérés contre rançon, ou transformés en esclaves (rai) comme c’était la tradition.
À partir du moment où ils étaient gardés comme esclaves, ils devaient être traités conformément à la loi islamique, surtout durant les époques omeyyade et abbasside. Les esclaves avaient le droit de gagner eux-mêmes leur vie s’ils avaient opté pour cette solution, sinon il appartenait au propriétaire (au maître) d’y pourvoir. Ils ne pouvaient pas non plus être forcés de gagner de l’argent pour leur maître, à moins d’accord préalable. Cette notion juridique est appelée moukharadjah en arabe (l’esclave doit payer à son maître un impôt à la fin de chaque mois ; mais il travaille comme il veut pour cela, auquel cas l’esclave est dit abdoul makraj. Si l’esclave accepte ce statut et qu’il souhaite que l’argent qu’il gagne puisse également servir au rachat de sa liberté, il faut que cela soit mis noir sur blanc dans un contrat. C’est ce qu’on appelle moukataba dans la jurisprudence islamique. Ce n’est qu’une recommandation, et accepter une demande de moukataba n’est donc pas obligatoire pour le maître.
Le cadre matériel de la civilisation islamique reposait sur un réseau bien développé de villes et d’oasis caravanières avec marché (souk, bazar) au centre. Ces villes étaient reliées par un réseau de routes
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commerciales traversant des régions semi-arides ou désertiques. Elles étaient parcourues par des convois, et les esclaves faisaient donc partie de ces caravanes.
Contrairement à la traite négrière de l’Atlantique, où le ratio homme-femme était de 2 pour 1 ou 3 pour 1, la traite des esclaves arabes avait habituellement un ratio femme-homme plus élevé. Ce qui montre une préférence générale pour les esclaves de sexe féminin. Le concubinage et la reproduction étaient de puissants moteurs à l’importation d’esclaves de sexe féminin (souvent de race blanche), bien que beaucoup aient été aussi importées pour principalement effectuer des tâches ménagères.
Il y avait donc parfois des Arabes réduits à l’état d’esclaves dans le monde musulman. On a même pratiqué la castration sur des esclaves arabes. À La Mecque, des femmes arabes étaient vendues comme esclaves d’après Ibn Boutlan, et certains dirigeants d’Afrique de l’Ouest avaient des esclaves d’origine arabe. Une jeune Arabe de Damas était esclave d’un roi du Mali rencontré par Ibn Battouta. Selon al-Maqrizi, les esclaves ayant une peau plus claire étaient vendues aux Africains de l’Ouest lors du hadj (pèlerinage à La Mecque). La jeune esclave damascène d’origine arabe rencontrée par Ibn Battouta au Mali parlait arabe. Ibn Battouta la rencontra en 1353 près de Tombouctou. Ibn Battouta nous la décrit comme étant « une fille d’origine arabe venant de Damas qui m’a parlé en arabe ». Battouta précise en effet qu’elle maîtrisait l’arabe, qu’elle était de Damas et d’origine arabe. Le nom du maître indigène de cette jeune esclave arabe était Farba Souleïman. En plus de son esclave de Damas et d’un secrétaire parlant l’arabe couramment, l’arabe était aussi compris de Farba lui-même.
La charia interdisant la réduction en esclavage d’individus déjà musulmans ; les principales victimes de l’esclavage en terre d’Islam (Dar al islam) furent donc les populations vivant dans les régions limitrophes. Ces esclaves vinrent donc initialement de diverses régions frontalières, y compris l’Asie centrale (comme les Mamelouks) et l’Europe (comme les Saqaliba ou Slaves).
Les esclaves blancs.
Il existe des preuves historiques attestant l’existence d’expéditions musulmanes nord-africaines destinées à faire des esclaves le long des côtes méditerranéennes ou à travers l’Europe chrétienne, voire plus au nord jusque dans les îles britanniques et en Islande (voir le livre de Giles Milton intitulé l’or Blanc). La majorité des esclaves vendus ou achetés dans la région méditerranéenne furent principalement d’origine européenne du 7e au 15e siècle. Les pirates barbaresques ont continué à capturer des esclaves en Europe et, dans une certaine mesure, venant aussi d’Amérique du Nord, du XVIe au XIXe siècle.
Des esclaves furent également importés dans le monde arabe via l’Asie centrale, des esclaves principalement d’origine turque ou tartare. Beaucoup de ces esclaves servirent ensuite servis dans les armées où ils constituaient des unités d’élite.
En mer, les pirates barbaresques se joignirent à ce trafic lorsqu’ils furent en mesure de capturer des hommes ou des femmes en attaquant à l’abordage certains navires ou en faisant des incursions dans les zones côtières. Les marchés aux esclaves nord-africains regorgeaient donc aussi d’esclaves européens. Les esclaves européens étaient capturés par des pirates barbaresques à l’occasion d’attaques de navires ou de débarquement éclair dans des villes côtières d’Italie ou d’Espagne, au Portugal, en France, en Angleterre, aux Pays-Bas et même jusqu’en Islande. Des hommes, des femmes et des enfants furent capturés en si grand nombre qu’un grand nombre de villes portuaires furent abandonnées. Le professeur Robert Davis de la faculté d’Histoire de l’Ohio décrit cette traite des blancs sous-estimée par la plupart des historiens modernes ; dans son livre intitulé Esclaves chrétiens et maîtres musulmans : l’esclavage blanc en Méditerranée, sur les côtes barbaresques et en Italie, 1500-1800 (Palgrave Macmillan).
Davis estime qu’il y eut de 1 million à 1,25 million d’Européens chrétiens blancs vendus comme esclaves en Afrique du Nord, du début du 16e siècle au milieu du 18e, rien que par les trafiquants de Tunis, d’Alger et de Tripoli (ces chiffres en effet n’incluent pas les Européens vendus comme esclaves au Maroc ou par d’autres pirates et trafiquants de la côte méditerranéenne) et qu’environ 700 Américains furent détenus comme esclaves dans cette région du monde entre 1785 et 1815. Les statistiques douanières des 16e et 17e siècles suggèrent que l’importation additionnelle à Istamboul d’esclaves venant de la Mer Noire, pourrait avoir été d’environ 2,5 millions d’individus de 1450 à 1700.
Les esclaves noirs.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir, les esclaves vinrent donc initialement de diverses régions, y compris l’Asie centrale (comme les Mamelouks) et l’Europe (comme les Saqaliba ou Slaves), mais par la suite à l’époque moderne, les esclaves vinrent surtout d’Afrique.
Car en Afrique même la conversion préalable à l’islam ne fut pas une garantie efficace contre l’asservissement. Certaines réalités historiques l’attestent avec vigueur.
Ibn Battouta, qui a visité l’ancien royaume africain du Mali au milieu du XIVe siècle, raconte que ses habitants indigènes rivalisent en esclaves et serviteurs, et se vit offrir un jeune esclave en tant que « cadeau de bienvenue ». Beaucoup d’intermédiaires, souvent mulâtres, assuraient
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l’approvisionnement des commerçants en « marchandise » humaine, à destination des grands marchés aux esclaves orientaux (Bagdad, Damas, La Mecque, Médine, etc.).
Sonni Ali (1464-1492), brillant chef musulman de l’empire du Songhaï (Afrique de l’Ouest), n’hésite pas à mener régulièrement des raids ravageurs contre les tribus voisines islamisées.
Plus tard, Tippo Tip (1837-1905), à Zanzibar, incarnera la pire des figures : celle du négrier noir ayant fait fortune par le commerce de ses propres frères de couleur, sans scrupule ni remords.
Même phénomène lors des révoltes d’esclaves de la fin du 18e siècle où les milices coloniales les plus acharnées à lutter contre le marronnage (milices créées en 1748) furent celles de la bourgeoisie libre de couleur ou mulâtre (Rigaud, Pétion) ayant elle-même même des esclaves. À Saint-Domingue/Haïti en 1788 ces libres de couleur étaient presque aussi nombreux que les Blancs (27 000).
Opinions de certains Arabo-Musulmans sur les Africains.
— Le théologien moutazilite Al-Jahiz (776-869), descendant en partie d’ancêtres africains, remarque dans l’une de ses œuvres « Vous ignorez donc à ce point que durant la Djahiliya (avant l’Islam) vous nous considériez comme vos égaux quand il s’agissait de mariage avec des femmes arabes, mais qu’après l’avènement de la justice de l’Islam, vous avez décidé que cette pratique était condamnable. Le désert est pourtant rempli de Zandj mariés à des femmes arabes, c’étaient des princes et des rois qui avaient défendu vos droits et vous avaient protégés contre vos ennemis » (Réhabilitation des Noirs par rapport aux Blancs).
— Al-Massoudi (896-956), grand géographe qui a voyagé jusqu’en Chine et au Sri Lanka. « La joie est le caractère dominant de l’homme noir à cause de son cerveau déficient, d’où aussi la faiblesse de son intelligence ».
— Al-Mouqaddassi (945 / 946-1000) géographe arabe. « Des voisins du Boudja, Maqdisi avait entendu dire qu’il n’y a pas de mariage parmi eux ; l’enfant ne connaît pas son père, et ils mangent des êtres humains – mais Dieu sait mieux. Quant aux Zandj, ce sont des hommes de couleur noire, au nez aplati, aux cheveux crépus, dotés de peu de compréhension et d’intelligence ».
— Avicenne (980-1037), le Père de la Médecine moderne : « [Les Noirs sont] des personnes qui sont par leur nature même vouées à l’esclavage ».
— Nassir al-Din Tousi (1201-1274), célèbre auteur religieux et scientifique : « Les Zandj (africains) diffèrent des animaux seulement en ce que leurs deux mains se tiennent au-dessus du sol… Beaucoup d’observateurs ont remarqué que les singes apprenaient mieux et sont plus intelligents que les Zandj ».
— L’historien et sociologue Ibn Khaldoun (1332–1406) : « La nation noire est, en règle générale, soumise à l’esclavage, parce qu’ils n’ont presque rien d’humain et ont des attributs assez semblables à ceux des animaux muets ainsi que nous l’avons dit… Au-delà des [peuples connus de l’Afrique occidentale noire] au sud, il n’y a pas de civilisation au sens propre du terme. Il n’y a que des êtres humains plus proches des animaux que des êtres rationnels. Ils vivent dans des bosquets et des grottes, et mangent des herbes ou du grain non préparé. Ils se mangent les uns les autres fréquemment. Ils ne peuvent être considérés comme des êtres humains ».
Mais d’après le professeur, Abdelmajid Hannoum de l’Université Wesleyenne, l’idée selon laquelle les savants et les géographes arabes de cette période ont des attitudes racistes résulte de mauvaises traductions [de leurs œuvres] et il affirme que de telles attitudes furent peu courantes jusqu’au 18e et 19e siècle.
L’historien Elikia M’bokolo a écrit dans Le Monde diplomatique en avril 1998. « C’est par toutes les issues possibles – à travers le Sahara, par la mer Rouge, par l’océan Indien, à travers l’Atlantique – que le continent noir a été saigné de son capital humain. Dix siècles au moins (du IXe au XIXe) de mise en servitude au profit des pays musulmans… Quatre millions d’esclaves exportés par la mer Rouge, quatre millions encore par les ports souahilis de l’océan Indien, neuf millions peut-être par les caravanes transsahariennes, onze à vingt millions, selon les auteurs, à travers l’océan atlantique ».
Au 8e siècle, l’Afrique était dominée par les Arabo-Berbères au nord : l’Islam se répandait vers le sud en remontant le Nil et le long des pistes du désert. Le Sahara était peu peuplé. Néanmoins, depuis l’antiquité, il y avait eu villes vivant du commerce du sel, de l’or, des esclaves, des tissus et d’une agriculture rendue possible l’irrigation : Tiaret, Oualata, Sijilmasa, Zaouila et autres.
Au Moyen Âge, le terme arabe bilad as-soudan (« Terre des Noirs ») servait à désigner la vaste région du Soudan (couvrant l’Afrique de l’Ouest et du Centre, voire s’étendant de la côte de l’Afrique de l’Ouest au Soudan occidental). Ce bilad as-soudan constituait un réservoir de main-d’œuvre pour toute l’Afrique du Nord Sahara compris. Cette région était dominée par certains états et certains peuples : l’Empire du Ghana, l’Empire du Mali, l’Empire du Kanem-Bornou, les Peuls et les Haoussas.
Dans la Corne de l’Afrique, les côtes de la Mer Rouge et de l’Océan Indien étaient contrôlées par des indigènes somaliens et d’autres musulmans, les Yéménites et Omanais avaient des postes
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marchands le long des côtes. La côte éthiopienne, en particulier le port de Massaoua et l’archipel des Dahlak, a longtemps constitué un véritable carrefour pour l’exportation des esclaves venus de l’intérieur par le Royaume d’Aksoum et les premières chefferies. Le port et la plupart des zones côtières étaient en grande partie musulmans, et le port lui-même abritait un certain nombre de marchands arabes et indiens. La dynastie salomonide d’Éthiopie a souvent exporté des esclaves nilotiques de ses provinces de la frontière occidentale ou des provinces du Sud nouvellement conquises. Les sultanats musulmans somaliens et afar, tels que le Sultanat d’Adal, ont également exporté des esclaves nilotiques qu’ils capturaient à l’intérieur des terres ou parmi leurs ennemis vaincus.
Dans la région des Grands Lacs d’Afrique, les commerçants omanais et yéménites avaient mis en place des postes de traite tout le long de la côte sud-est de l’océan Indien et plus particulièrement dans l’archipel de Zanzibar, le long de la côte de l’actuelle Tanzanie. Le pays des Zandj ou la côte souahilie bordant l’océan Indien fut une zone importante pour la traite orientale des esclaves jusqu’au 19e siècle.
Livingstone et Stanley furent les premiers Européens à pénétrer à l’intérieur du bassin du Congo et à découvrir l’ampleur de l’esclavage dans cette région. L’Arabe Tipo Tip avait étendu son influence jusque-là et y capturait beaucoup d’esclaves. Après que les Européens se furent installés dans le golfe de Guinée, la traite négrière transsaharienne devint moins importante. À Zanzibar, l’esclavage fut aboli tardivement, en 1897, sous le sultan Hamoud bin Mohammed.
Géographie de la traite négrière et zones d’approvisionnement.
La Nubie et l’Éthiopie furent des régions « exportatrices » : au 15e siècle, les Éthiopiens vendaient des esclaves venant des régions de leur frontière occidentale (généralement située juste en dehors du royaume de l’empereur d’Éthiopie) ou de la région de Jimma, qui aboutissaient souvent en Inde où ils travaillaient à bord des navires ou comme soldats. Ils finirent par se révolter et prendre le pouvoir (dynastie des rois Habchi).
Soudan et l’Afrique subsaharienne constituaient une autre zone « d’exportation », mais il est impossible d’en estimer l’ampleur faute de sources chiffrées.
Le trafic d’esclaves a enfin également affecté l’Afrique de l’Est, mais la distance et l’hostilité des indigènes ont ralenti cette branche du commerce oriental.
Routes.
D’après le professeur Ibrahima Baba Kaké, il y avait quatre routes principales vers le monde arabe, de l’est à l’ouest de l’Afrique, du Maghreb au Soudan, de la Tripolitaine au Soudan central et de l’Égypte au Moyen-Orient. Des pistes de caravanes, installées au 9e siècle, allaient au-delà des oasis du Sahara. Le voyage était difficile et inconfortable en raison du climat et des distances. Dès l’époque romaine, de longs convois acheminaient des esclaves ainsi que toutes sortes d’autres produits à utiliser pour le troc. Pour protéger ces caravanes contre les attaques des nomades du désert, les esclaves étaient utilisés comme escorte. Tous ceux ralentissaient la marche de la caravane étaient tués.
Les historiens connaissent moins les routes maritimes. Si l’on en croit certains documents illustrés ainsi que des récits de voyageurs, il semble que les esclaves voyageaient à bord de boutres ou jalbas, des navires arabes qui servaient au transport de marchandises en mer Rouge. Traverser l’océan Indien nécessitait une meilleure organisation et plus de ressources que le transport terrestre. Les navires venant de Zanzibar faisaient escale à Socotra ou à Aden avant de se diriger vers le golfe Persique ou en Inde. Les esclaves étaient vendus jusqu’en Chine : il y avait une colonie de marchands arabes à Canton. Serge Bilé cite un texte du XIIe siècle qui nous dit que les familles les plus aisées de Canton avaient des esclaves noirs qu’elles considéraient comme des sauvages et des démons à cause de leur apparence physique. Bien que les commerçants d’esclaves chinois aient acheté des esclaves (Seng Chi, c’est-à-dire des Zandj) à des intermédiaires arabes et « en provenance » directe des zones côtières de l’actuelle Somalie, les indigènes Somaliens – appelés respectivement Baribah et Barbaroi (Berbers) par les géographes grecs antiques et les Arabes du Moyen Âge (voir le Périple de la mer Érythrée), et nullement étrangers eux-mêmes à la capture à la possession et au trafic d’esclaves – n’en faisaient pas partie, car la Somalie elle-même ne fournissait pas d’esclaves – en tant que membres du monde islamique, les Somaliens étaient protégés par le principe religieux qui veut que les musulmans libres ne puissent pas être asservis – par contre les boutres arabes chargés de marchandises humaines fréquentaient assidûment les ports somaliens.
Au cours du dix-neuvième siècle, la traite des esclaves en Afrique de l’Est augmenta considérablement à cause de la demande émanant des Arabes, des Portugais et des Français. Les commerçants d’esclaves et les trafiquants sillonnèrent toute l’Afrique orientale et centrale afin de répondre à la demande croissante en hommes, femmes et enfants réduits en esclavage.
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Ils étaient souvent échangés contre des objets de diverses sortes : au Soudan, ils étaient échangés contre des habits, des colifichets t, ainsi de suite. Au Maghreb, ils étaient échangés contre des chevaux. Dans les villes du désert, des métrages de tissu, de la poterie, des perles d’esclaves en verre vénitien, des colorants et des bijoux, servaient de paiement. Le commerce des esclaves noirs faisait partie d’un réseau commercial très diversifié. Parallèlement aux pièces d’or, des cauris de l’océan Indien ou de l’Atlantique (Canaries, Louanda) furent utilisés comme monnaie dans l''Afrique subsaharienne (les marchandises étaient payées avec des sacs de cauris).
Les marchés aux esclaves.
Al-Maqrizi rapporte qu’en 1416 les pèlerins venant de Tekrour (près du fleuve Sénégal) avaient amené avec eux 1700 esclaves à La Mecque. En Afrique du Nord, les principaux marchés d’esclaves étaient situés au Maroc, à Alger, à Tripoli et au Caire. Les ventes avaient lieu dans des lieux publics ou dans des souks.
Les acheteurs potentiels examinaient attentivement la « marchandise » : ils vérifiaient l’état de santé des esclaves qui étaient souvent nus et les poignets menottés. Au Caire, les transactions portant sur des eunuques ou des concubines avaient lieu dans des maisons particulières. Les prix variaient selon la qualité de l’esclave. Thomas Smee, le commandant du navire de recherche britannique Ternate, a visité un tel marché à Zanzibar en 1811 et en a donné une description détaillée.
« Le spectacle commence vers quatre heures de l’après-midi. Les esclaves sont présentés à leur avantage en ayant la peau soigneusement nettoyée et lustrée avec de l’huile de noix de coco, le visage peint de rayures rouges et blanches et les mains, le nez, les oreilles et les pieds, ornés d’une profusion de bracelets d’or et d’argent ou de bijoux. Ils sont rangés en ligne, en commençant par les plus jeunes, et ensuite par ordre croissant selon la taille et l’âge. En tête de cette longue file composée des deux sexes et de tous les âges de 6 à 60 ans marche leur propriétaire derrière et de chaque côté, deux ou trois de ses esclaves domestiques, armés d’épées et de lances, servent de gardiens. Ainsi ordonnée, la procession se met en marche et passe par le marché ainsi que par les rues principales… quand un de ces malheureux attire l’attention d’un spectateur, la file s’arrête immédiatement, et un examen s’ensuit, qui, pour ce qui est de la minutie dépasse tout ce que l’on peut voir dans les marchés aux bestiaux d’Europe. L’acheteur ayant vérifié qu’il n’y a pas de défaut de parole, d’ouïe, etc., qu’il n’y a pas de maladie, examine ensuite la personne. La bouche et les dents sont inspectées d’abord ensuite toutes les autres parties du corps successivement, sans même excepter les seins, etc., etc., des filles, dont beaucoup ont été manipulées de la façon la plus indécente sur le marché par leurs acheteurs ; il y a en effet toutes les raisons de croire que les trafiquants d’esclaves forcent presque tous les jeunes filles à se soumettre à leur instinct lubrique avant d’être exhibées ».
L’histoire de la traite négrière a donné lieu à de nombreux débats entre historiens. Les spécialistes sont divisés quant au nombre d’Africains arrachés à leurs foyers ; la question est difficile à résoudre à cause du manque de statistiques fiables : il n’y avait pas de système de recensement dans l’Afrique médiévale. Les documents d’archives du commerce transatlantique des XVIe et XVIIIe siècles peuvent sembler constituer une source utile, mais ces livres de comptes étaient souvent falsifiés. Les historiens doivent donc recourir à des comptes rendus assez imprécis pour faire des estimations qui doivent être traitées avec prudence : Luiz Felipe de Lancastre affirme qu’il y eut 8 millions d’esclaves arrachés d’Afrique entre les 8e et 19e siècles via les routes orientale et transsaharienne.
Olivier Pétré-Grenouilleau a quant à lui avancé le chiffre de 17 millions d’Africains réduits en esclavage (pour la même période et la même région) en se fondant sur le travail de Ralph Austen. Ronald Segal estime qu’il y eut de 11,5 à 14 millions d’Africains réduits en esclavage par le commerce négrier arabe.
……………………………………
Dans les années 1800, la traite des esclaves venus d’Afrique vers les pays musulmans augmenta considérablement. Alors que la traite négrière européenne se termina vers la fin des années 1850, la traite orientale des esclaves ne prit réellement fin qu’avec la colonisation par les Européens de l’Afrique vers 1900.
En 1814, l’explorateur suisse Johann Burckhardt écrivit dans ses récits de voyage en Égypte et en Nubie, où il découvrit de ses yeux concrètement la traite des esclaves : « J’ai souvent assisté à des scènes marquées de sceau de l’indécence la plus éhontée, dont les trafiquants, qui en étaient les principaux acteurs, étaient les seuls à se moquer. J’ose affirmer que très peu d’esclaves de sexe féminin âgées de plus de dix ans atteignaient l’Égypte ou l’Arabie en ayant gardé leur virginité ».
David Livingstone a écrit du commerce des esclaves dans la région des Grands Lacs africains, qu’il a visitée au milieu du XIXe siècle : « Décrire ses horreurs est tout simplement impossible… Nous sommes passés devant le cadavre d’une esclave abattue ou poignardée qui gisait au bord du chemin… c’était un Arabe passé tôt ce matin-là et rendu furieux à l’idée d’avoir perdu le prix qu’il avait
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payé pour l’acheter qui l’avait tuée, parce qu’elle ne pourrait plus marcher très longtemps. Nous sommes passés à côté du cadavre d’une femme attachée par le cou à un arbre… Nous sommes tombés sur un homme mort de faim… La maladie la plus étrange que j’ai vue dans ce pays semble être celle des cœurs brisés et elle affecte les hommes libres qui ont été capturés puis réduits en esclavage ». Livingstone estimait que 80 000 Africains mouraient chaque année avant d’atteindre les marchés aux esclaves de Zanzibar. Zanzibar fut jadis le principal port du commerce des esclaves en Afrique orientale et, sous le règne des Arabes venus du sultanat Oman, au 19e siècle, 50 000 esclaves passaient chaque année la ville.
Livingstone a même écrit dans une lettre adressée au rédacteur en chef du New York Herald : « et si mes révélations sur cet horrible esclavage d’Oujiji devraient conduire à la fin de la traite négrière sur la côte orientale, alors je considérerai cela comme quelque chose de plus important que la découverte des sources du Nil ».
Au cours de la Seconde Guerre civile soudanaise, il y eut des hommes et des femmes pris comme esclaves, les estimations du nombre des victimes de ces enlèvements vont de 14 000 à 200 000 personnes. En 1953, des esclaves accompagnaient encore des cheikhs du Qatar venus assister au couronnement de la Reine Elizabeth II et il en fut de même lors d’une autre visite cinq ans plus tard.
L’esclavage en Mauritanie a été aboli légalement parlant par des lois adoptées en 1905, 1961 et 1981, mais n’a été criminalisé qu’en août 2007. On estime que jusqu’à 600 000 Mauritaniens, soit 20 % de la population mauritanienne, vivent encore actuellement dans des conditions que certains considèrent comme de « l’esclavage » : les Harratines.
À CHACUN SA RELIGION OU UN SEUL ET MÊME DIEU POUR TOUS ?
Chapitre 2, verset 256 : « Point de contrainte en religion, la Vérité se distingue de l’erreur ».
Chapitre 10 versets 99-100 : « Est-ce à toi de contraindre les hommes à devenir croyants ? »
Mahomet savait très bien que, sauf à lui laver le cerveau pour cela dès l’enfance, on ne peut pas forcer quelqu’un à penser qu’il n’y a qu’un seul dieu. Il comprenait bien qu’on ne peut pas forcer quelqu’un à « avoir la foi ».
Mais on peut au moins obtenir de lui une certaine soumission extérieure pour commencer. Cette remarque permet peut-être de concilier différentes sourates apparemment opposées.
Les spécialistes de l’islam s’accordent néanmoins à penser que ces versets tolérants s’imposèrent à Mahomet à l’occasion de la première phase de sa prédication, lorsqu’il n’avait pas les moyens de contraindre qui que ce soit à suivre sa religion.
Ils sont abrogés par des versets ultérieurs, par exemple le verset 9, 29, qui ordonne sans équivoque aux musulmans de combattre les mécréants jusqu’à ce qu’ils abjurent leur foi (ou non-foi) en acceptant soit l’islam soit un état d’humiliation permanente notamment lors du paiement de leur impôt spécifique en tant que citoyens de seconde zone. Autrement dit la dhimmitude (Bat Yé’or).
Il est vrai que le petit djihad n’est pas consubstantiel à l’islam, qu’il n’est pas initial. Ce qui est originel et initial c’est LE GRAND DJIHAD ou DJIHAD AKHBAR.
À notre connaissance aucune doctrine se réclamant de l’Islam n’a néanmoins soutenu le point de vue de la non-violence absolue comme dans le cas du jaïnisme indien ou des martyrs chrétiens, mais les musulmans modernistes ont adopté le point de vue réformiste, celui du djihad défensif et ils insistent
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particulièrement sur le sens large du mot djihad. À vrai dire on l’emploie maintenant pour qualifier tout effort national. En donnant la coloration religieuse du djihad à certaines opérations, on vise à accroître leur efficacité. On a entendu aussi parler de djihad à propos de l’éducation, de la culture, etc. Le sens du mot se dissout.
Pour découvrir le vrai sens du petit djihad, nous devons donc nous pencher sur la vie de Mahomet, de ses compagnons et des dirigeants ou penseurs ultérieurs de l’Islam.
Les successeurs immédiats de Mahomet ont utilisé le terme djihad pour se référer à la reconquête de territoires perdus (guerres de la Rida en 632) ou à la conquête de nouveaux territoires, de sorte qu’aucune équivoque ne peut subsister à cet égard. Les petits djihadistes ne font donc pas une interprétation erronée de l’islam, ils interprètent l’islam très correctement. Car théologiquement parlant il est du devoir sacré d’un musulman de combattre jusqu’à ce que tout le monde se tourne vers Allah, car il ne saurait y avoir d’autre Dieu (chahada).
Ceci a été très bien souligné par le grand philosophe musulman Ibn Khaldoun dont nous redonnerons ici (repetere ars docendi) l’avis éclairé (mais pas du siècle des Lumières).
« La guerre sainte est un devoir religieux, en raison de l’universalisme de la mission musulmane et de l’obligation de convertir tout le monde à l’islam soit par la persuasion soit par la force ».
Notons au passage qu’Ibn Khaldoun méconnaît l’appel à la conversion mentionné plus haut. « Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit. Je serai avec vous tous les jours, jusqu’à la fin des temps » (saint Matthieu 28,18).
Mais enfin qu’un musulman ignore ce verset du Coran chrétien n’a rien que de très normal !
Toutes les religions de masses du monde hormis le judaïsme ont une stratégie d’expansion. Pour toutes, le prosélytisme est un devoir, car on ne saurait manquer de faire savoir aux autres la vérité à laquelle on croit. La première charité envers l’humanité est de lui communiquer la vérité qui conduit au salut, au paradis. Il est donc malvenu et stupide de reprocher à l’Islam d’avoir une stratégie de prosélytisme. Ce que l’on est en droit d’attendre par contre c’est la réciprocité afin d’aider au respect des minorités, de promouvoir le dialogue interreligieux et la paix entre les peuples.
Comme dans le cas du le christianisme de jadis, celui des origines (saint Matthieu 28, 18 à 20) un des buts de l’islam est de convertir le monde entier à sa conception de Dieu.
Cette volonté ne se manifeste plus guère dans la chrétienté à part peut-être dans l’évangélisme. Par contre cet esprit prosélyte ou missionnaire est encore très présent dans l’islam.
Avec cette colossale différence que dans le cas de l’islam ce fut y compris en recourant à l’usage de la force et des armes.
Verset 193, chapitre 2. « Combattez-les jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de fitna * et que le culte soit entièrement voué à Dieu ».
Versets 39, chapitre 8 idem. « Combattez-les jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de « fitna * » et que le culte soit entièrement voué à Dieu ».
Verset 33, chapitre 9. « C’est Dieu qui a envoyé son prophète avec la Direction et la vraie religion pour la faire prévaloir sur toute autre ».
Verset 9, chapitre 61 idem. « C’est Dieu qui a envoyé son prophète avec la Direction et la vraie religion, pour la placer au-dessus de toute autre ».
Les musulmans pieux sont donc lancés dans une bataille cosmique contre les forces des ténèbres. Ces forces des ténèbres ne doivent pas être tolérées, et même si Dieu est ultimement responsable de la destruction de ces forces négatives, les musulmans sont tenus de la combattre. Le prosélytisme de l’actuel islam est indéniable, un prosélytisme qu’il interdit et criminalise quand il vient des autres religions.
Dans son ouvrage Rome et le martyre, Glen W. Bowersock rappelle l’extension du concept de martyr auprès des populations musulmanes, avec la conquête de la Palestine au 7e siècle. C’est après la conquête musulmane de la Palestine au 7e siècle que cette notion de chahid en vint à signifier explicitement la mort sacrée, en référence à la notion grecque de marturos et à sa double signification de témoin et martyr.
Reste qu’il y a dans le cas du martyr musulman une différence fondamentale qu’il convient de rappeler d’emblée : la justification du martyre en islam se trouve dans le chapitre de l’Immunité selon lequel le principe consiste à « tuer ou se faire tuer dans la voie de Dieu » (Coran N° 9, 111). Autrement dit, la violence ne vient pas uniquement de l’adversaire, mais elle est aussi assumée par le croyant qui y recourt en toute légitimité. Sur ce point, la signification est toute autre dans le christianisme où la violence physique est à sens unique et ne vient que des adversaires. Le martyre musulman est fortement lié à cette autre notion séminale qu’est le djihad, ou guerre sainte. La différence majeure entre la notion de djihad dans l’islam et celle de croisade dans le christianisme réside dans leur fondement théologique : présent dans l’islam, il est absent du christianisme.
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Il est donc tout à fait logique de se référer au mot grec marturos qui signifie témoins quand on parle de martyr dans notre langue puisque telle est son étymologie (ce qui ne veut pas dire que son sens n’a pas évolué depuis son acclimatation dans le latin d’église).
Il est n’est pas logique ni approprié par contre de remonter à cette notion grecque de témoins quand on parle des chahid de l’islam. Le chahid musulman est un homme qui est mort en prononçant la chahada et généralement EN COMBATTANT LES ARMES À LA MAIN (SUR LA VOIE DU DJIHAD). Alors que le martyr chrétien, lui, par définition, ne se bat pas, même pour se défendre. Alors que le martyr chrétien, lui, ne recourt jamais aux armes : il se laisse faire, voire tend l’autre joue.
PAR CONTRE POUR L’ISLAM LE MONDE ENTIER DOIT OBÉIR À DIEU Y COMPRIS PAR L’ÉPÉE.
Un des théologiens modernes les plus vénérés de l’Islam, le cheikh Youssouf al-Qaradaoui, a consacré cette notion de djihad offensif en écrivant dans un de ses livres : « L’islam a le droit de prendre l’initiative… c’est la religion de Dieu et c’est pour le monde entier. Il a le droit de supprimer les institutions et traditions qui lui font obstacle… il s’en prend à ces institutions et traditions afin de libérer les êtres humains des influences néfastes qui pervertissent la nature humaine et réduisent sa liberté. Ceux qui disent que le djihad islamique n’a lieu d’être que pour défendre la « patrie de l’islam » nient la grandeur du mode de vie islamique ».
Ainsi que l’a très bien résumé le juriste saoudien Bassem Alem en mars 2009 : « En tant que membre de la vraie religion, j’ai davantage le droit d’envahir [les autres] pour imposer un certain mode de vie [conforme à la charia], dont l’histoire a montré que c’est la meilleure et la plus juste de toutes les civilisations. Telle est la vraie signification du djihad offensif. Lorsque nous lançons le djihad, ce n’est pas pour convertir les gens à l’islam, mais pour les libérer du sombre esclavage dans lequel ils vivent ».
L’historien américain Will Durant estime par contre « que la conquête musulmane… en Inde fut probablement la plus sanglante que l’humanité ait jamais vue ! C’est une histoire décourageante, car sa morale évidente c’est que la civilisation est une chose bien précieuse, dont l’ordre complexe et la liberté peuvent être à tout moment piétinés par des barbares qui envahissent du dehors et se multiplient au-dedans » (Histoire de la Civilisation. Notre héritage oriental. 1954, p.459).
Il n’est pas le seul historien à s’être effrayé des conséquences de ces invasions.
Le Professeur K.S. Lal dans son livre publié en 1973 et intitulé « La croissance de la population musulmane dans l’Inde médiévale » estime qu’entre les seules années 1000 à 1525, de 60 à 80 millions d’hindous moururent du seul fait de l’invasion du sous-continent indien par les musulmans. Sa conclusion est notamment qu’environ deux millions de personnes moururent lors de la seule invasion de l’inde par Mahmoud de Ghazni. Les Sultans Bahmani, qui gouvernaient l’Inde centrale, s’étaient fixé un quota de 100.000 hindous par an et semblent l’avoir respecté. En 1399, le célèbre Tamerlan fit mieux, il tua 100.000 hindous en une seule journée, un record.
Hosseïn Salahouddine, poète, et essayiste ex-musulman. Résumé de son entretien avec Jamie Glazov, directeur de Frontpage magazine, le 3 mars 2008.
Ce qui m’a toujours frappé, c’est que l’islam est une forme déguisée de colonialisme arabe. En Asie du Sud-Est, vous verrez des gens pleurer constamment sur le colonialisme britannique et la façon dont ils en sont encore victimes. Cependant, personne n’a jamais parlé du colonialisme arabe qui est très actif dans tous les pays musulmans non arabes. L’islam est à l’origine une religion arabe, et ce n’est pas une religion de conscience, de croyance ou de spiritualité privée ; c’est une religion très politique et impériale. Ses lieux saints sont dans des terres arabes, l’arabe est la langue sacrée, et ses personnages historiques sont tous des Arabes. Donc, ce qui arrive à l’esprit d’un converti non arabe est très intéressant.
Un converti commence à ressentir une aversion pour sa propre culture pré – islamique, il devient fasciné par l’influence arabe et il veut faire partie de l’histoire arabe ; ironiquement, il commence à louer le Grand Guerrier arabe qui a conquis son pays. Et pour y parvenir, la première chose qu’il fait est de se détourner de tout ce qui est propre à son origine et de se plonger dans un monde de fantastique fondamentaliste visant à purifier sa culture préislamique.
On peut voir cette névrose et ce reniement à l’œuvre dans la mentalité des convertis, c’est une maladie mentale incurable qui les a affectés et qui a perturbé leur société depuis des siècles. Le colonialisme arabe est à la fois politique et culturel, et je pense qu’il est la forme de colonialisme qui a duré le plus longtemps. La mode aujourd’hui est d’accuser l’impérialisme et le colonialisme européens, l’Occident et Israël, de tous les maux de notre monde ; les musulmans eux-mêmes n’ont jamais honte de se joindre à ce concert. Mais quand il s’agit de l’impérialisme arabe ou du colonialisme islamique, les mêmes en ressentent de l’orgueil et admirent les guerriers qui sont jadis venus du monde arabe pour conquérir les terres de leurs ancêtres.
Le colonialisme islamique et l’impérialisme arabe ont tous deux conquis et détruit de nombreuses civilisations plus avancées et plus anciennes et apporté des changements catastrophiques dans la
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culture des nations conquises. On peut même dire qu’en ce domaine les Arabes ont été les impérialistes les plus accomplis parce que leurs victimes ont adoré avoir été conquises par les légendaires « saints guerriers » venus de Terre sainte. C’est en quelque sorte la planche de salut des convertis (Hosseïn Salahoudine).
Toute la question maintenant est : d’ibn Khaldoun et Yousouf al-Qaradaoui ou Bassem Alem d’un côté, de Will Durant, Lal ou bien Hosseïn Salahouddine de l’autre, QUI CROIRE ? QUI A RAISON ??
* Fitna est un mot arabe qui signifie trouble discorde, hérésie.
UNE SPIRITUALITÉ… loin d’être pacifique.
L’origine des marabouts dans leur dimension mystique remonte à la fondation du soufisme, au VIIIe siècle. À cette époque, Hassan al-Basri, un Perse installé à Médine puis émigré en Irak, se consacra au rassemblement des hadiths (dires et faits de Mahomet) qu’il s’était fait un devoir de transmettre aux générations futures, à des fins d’élévation spirituelle et de rigueur religieuse. Il invitait ses disciples à pratiquer un islam dépassant ses règles orthodoxes et se fondant sur une relation personnelle à Dieu, dans une position de soumission volontaire et exclusive (en arabe, littéralement islam). Dans son sillage, cherchant à gagner leur paradis, les premiers soufis se sont voués à l’enseignement, à la diffusion de la religion et au développement de techniques extatiques visant à la communion avec le divin. Dès leur apparition, ils se sont efforcés d’imiter Mahomet et de se séparer du commun des fidèles par leur pratique intensive d’exercices spirituels et de mortifications physiques. Ils furent parmi les premiers organisateurs des ribats et les réformateurs almoravides du XIe siècle leur furent assimilés. Dès le VIIIe siècle, des soufis décidèrent de s’abstraire des mondanités de la religion, de la conquête et de l’administration du territoire conquis pour se consacrer à la diffusion de l’islam auprès des populations périurbaines ou isolées. Leurs théologies orthodoxes et savantes, élaborées dans les centres politiques du monde islamique, étaient pétries d’influences religieuses issues de pratiques populaires (par exemple des rites antiques liés à des lieux ou des personnes jouant le rôle d’intercesseurs entre le divin et le surnaturel).
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Mais au-delà de sa spiritualité, le courant soufi a pu aussi avoir un rôle politique. Ce fut le cas lorsqu’il s’est lié aux mouvements de révolte et de résistance intérieure contre les manifestations d’un pouvoir étatique considéré comme impie, ou lorsqu’il a appuyé les luttes anticoloniales, en particulier en Afrique. Depuis le XVIe siècle, en Méditerranée méridionale, les Ottomans en conflit avec les puissances occidentales s’étaient érigés en protecteurs de l’islam, mais dans certaines régions du Maghreb, des confréries maraboutiques ont pris la relève d’un pouvoir ottoman incapable de protéger la population en menant elles-mêmes la guerre contre les envahisseurs …………………………………
En Afrique de l’Ouest, les noms d’Ousman Dan Fodio, disciple de la confrérie soufie Qadiriya (1754-1817), de Sékou Amadou (1776-1844) et Oumar Tall (1795-1864), tous deux affiliés à la confrérie Tidjaniya, sont attachés au mouvement djihadiste anticolonialiste peul du XIXe siècle. Ce fut également le cas au Soudan qui connut deux mouvements mahdistes (mahdi en arabe signifie messie). Celui de Mohamed Ahmed Abdallah (1856-1921), né à Dongola dans la Vallée du Nil, qui était affilié à la confrérie soufie Sammaniya, et déclencha en 1881 un djihad anticolonial, d’abord contre les Ottomans qui gouvernaient l’Égypte et occupaient le Soudan depuis 1821, puis contre les Britanniques venus les appuyer. En 1885, la prise de Khartoum et la mort de Gordon permirent d’établir un gouvernement islamique qui dura jusqu’à la reconquête par Kitchener en 1898, date qui marque le début de la mainmise coloniale anglaise sur le Soudan. On peut également évoquer Mohamed Abdullah Hassan, un Somali lui aussi révéré comme « Mahdi » et moqué par les Anglais sous le sobriquet de « Mad Mullah », affilié à la confrérie soufie salhiya, et qui prend la tête d’une révolte à partir de 1899 contre l’Empire éthiopien de la dynastie salomonide (celle de Ménélik et de Hailé Sélassié) et les Anglais qui occupent le Somaliland.
Abdelkader (1808-1883), que l’on considère comme le chef de la résistance algérienne contre la colonisation française, était aussi un mystique révéré. Son exil politique à Damas après son incarcération à Toulon de 1847 à 1852 ne le priva pas d’entrer en contact avec des chrétiens mystiques et d’entretenir un dialogue interreligieux, augurant de sa forme actuelle et des développements qu’il connut, par exemple, avec l’installation de Pères Blancs en Algérie et au Sahara (Charles de Foucauld en est le représentant le plus connu, et les moines de Tibéhirine en furent parmi les derniers représentants avant de disparaître dans des circonstances non élucidées à l’heure actuelle aux yeux des historiens). Au début du XXe siècle, la confrérie Tidjaniya a repris avec succès le combat contre les Français dans leur tentative avortée d’invasion de la Libye, succédant à la conquête de l’Algérie et de la Tunisie. Malgré cette victoire, Omar Al-Mokhtar, religieux originaire de Cyrénaïque (1862-1931), dut mener un soulèvement nationaliste sous la bannière d’une autre confrérie, la Senoussiya, contre l’invasion italienne de la Libye à partir de 1912, qui finit par sa capture et pendaison en 1931 par le régime fasciste. Evans-Pritchard, ethnologue connu pour son travail sur les Nuer, consacra à cette confrérie son livre intitulé Les Sénoussi de Cyrénaïque en 1949. Au Sahara, en 1916-1917, Kaocen, lui aussi fidèle senoussi, déclara le djihad contre les Français depuis les montagnes de l’Aïr au nord du Niger, que les troupes françaises (Flatters – 1880, Foureau-Lamy, 1898-1900) avaient envahies quelque temps plus tôt………………………………………………
Au XIXe et au XXe siècle, les mouvements anticoloniaux en Afrique, avec leur dimension maraboutique, ont nourri une tradition militante de réforme islamique. Chaque confrérie ou groupe religieux a combattu dans une optique déterminée et pour des objectifs limités à sa zone de contrôle politique. Certains d’entre eux ont abouti à des radicalisations, au sein de formations que l’on regroupe sous le vocable de djihadistes, notamment dans le Sahel. Entre la période coloniale et nos jours, il existe des différences capitales et des phénomènes forts éloignés les uns des autres. En effet, les mouvements djihadistes sahéliens actuels trouvent la base de leur idéologie dans des pays éloignés (Arabie saoudite et pays du Golfe, Pakistan). De même, ils sont structurés selon des modes d’organisation élaborés ailleurs, dans le cadre des expériences fondatrices de la reprise du combat contre l’occidentalisation et la laïcisation menée par les djihads afghans (1979-1989 et 2001 à nos jours), la révolution islamique iranienne (1979 à nos jours) ou la guerre civile algérienne (1991-2001) connue localement sous le nom de « décennie rouge ». Cet événement précurseur du djihad sahélien a vu naître les premières katibas (cellules) du GIA (Groupe islamique armé) et du GSPC (Groupe salafiste pour la prédication et le combat), principaux mouvements associés dans la fondation d’Aqmi (Al-Qaeda au Maghreb islamique). D’autres structures, plus mineures et issues des pays limitrophes (Mauritanie, Mali, Niger, Libye, Tunisie et Maroc) s’y sont depuis ralliées. Aujourd’hui, dans la nouvelle situation politico-religieuse, les djihadistes, tant au Sahara qu’au Sahel, se battent et se solidarisent dans leur lutte, échangeant combattants, informations, moyens logistiques et militaires ou de propagande. Mais des différences persistent, notamment dans l’opposition des options rituelles des djihadistes des confréries soufies des derniers siècles et des salafistes actuels, au-delà de l’aspect religieux le plus simple et normatif… Face à l’hétérodoxie créative des mouvements soufis historiques,
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on assiste actuellement au développement d’une néo-orthodoxie réformiste (c.-à-d. le salafisme), contraire aux solutions pragmatiques et métaphoriques des confréries passées.
Cette polémique religieuse se focalise sur des questions rituelles régulièrement reposées depuis l’origine de l’islam, comme celles des pratiques funéraires et des rites rendus sur les tombes, ou sur le contenu doctrinal de la science religieuse dans les zones excentrées de la communauté musulmane. Les effets de ces querelles furent mis en avant dans l’intense campagne de propagande autour de la destruction de manuscrits et de mausolées de « saints » à Tombouctou en janvier 2013, qui a pesé pour beaucoup dans le soutien populaire à la dernière intervention française au Mali. C’est ainsi que les médias de l’idéologie dominante ont pu présenter les soufis d’hier comme de pacifiques mystiques, leur déniant leur rôle historique d’opposants armés à la colonisation, et les ont dépeints, au mépris de l’histoire, en alliés humanistes des puissances européennes dans le conflit qui les opposent à l’islam radical en Afrique sahélienne (Mauritanie, Algérie, Mali, Niger) pour le contrôle des ressources stratégiques (uranium et or du Mali ou du Niger) et des voies de migration économique transsahariennes………………………………………………………
Outre la médecine du prophète (al tibb al nabaoui) pratiquée par les marabouts, la singularité de l’art médical des confréries soufies réside dans le traitement de la souffrance mentale vue comme une véritable « djinnopathie » (le patient est dit madjnoun, littéralement « en-djin-né »). Le monde surnaturel est en effet de façon tout à fait non scientifique, voire antiscientifique, globalement reconnu par l’islam, qui confère au roi biblique Salomon un pouvoir de contrôle des djinns, légitimement reçu de dieu. Certains djinns passent pour avoir été en contact avec Mahomet. Dans le Coran, les djinns sont décrits comme des êtres créés de feu et d’air, invisibles, vivant une vie parallèle aux humains. Certains sont musulmans, ou païens, d’autres ont adhéré à diverses religions. Les djinns connaissent la hiérarchie, des rois aux esclaves. Ils sont réputés cohabiter avec les humains et demeurer dans des lieux marginaux : les lieux d’aisance, mais aussi le feu, les ateliers, le passage d’une porte, le coin d’une pièce, les cimetières. Ils occupent également des territoires qu’ils sont seuls à peupler : grottes, lieux reculés du désert, ruines, puits abandonnés. Dans le sud du Maroc (au mausolée du marabout connu sous le nom de Bouya Omar), ont lieu par exemple depuis le 16e siècle des jugements de djinns devenus gênants. On se croirait revenu au Moyen Âge et à ses procès d’animaux. Non seulement on a droit aux anges comme dans le judéo-christianisme, mais en plus avec l’islam on a droit aux djinns !
Où est la science dans tout ça ?
Dans ce théâtre thérapeutique, les descendants du saint doivent trancher un différend entre les parties, djinn et patient, pour établir les réparations nécessaires qui solderont le cas. Ce type de thérapie repose exclusivement sur l’aptitude du marabout primordial à entrer en contact avec ses héritiers reconnus et le monde des djinns. Situé entre le monde matériel et l’invisible, le marabout peut désamorcer les agissements externes qui troublent le patient et lui faire reprendre une vie sociale apaisée, en lui imposant des devoirs rituels. Si les marabouts soufis peuvent entrer volontairement en contact avec les djinns et passer un pacte avec eux, des confrontations involontaires sont toujours à craindre : il peut y avoir des djinns païens malveillants, et il peut arriver d’offusquer un djinn musulman par des pratiques ésotériques réprouvées. L’activité humaine quotidienne peut aussi représenter un danger pour les djinns : on peut en ébouillanter un en jetant de l’eau de cuisine trop chaude, on peut marcher sur un autre quand on passe le pas de la porte… Pour éviter de leur nuire et de risquer des représailles, on recourt à des techniques de protection ou à des modalités de vie en commun. Dans les maisons où l’on sait que les djinns sont présents, il est traditionnel de mettre du lait sur le pas de la porte, de franchir prudemment le seuil, de prononcer une invocation qui protégera momentanément du djinn ou l’avertira du danger qui pourrait le guetter. Il y a aussi les talismans qu’on peut disposer dans la maison aux endroits dangereux ou pour protéger ses habitants les plus vulnérables (femmes nubiles et enfants). Les relations avec les djinns se jouent à deux niveaux : celui des profanes qui cherchent à se prémunir des troubles sans jouir d’aucune autorité, et celui des marabouts qui seuls ont la formation et la compétence nécessaires pour réguler la cohabitation entre les hommes et les djinns. Dans cette situation, le marabout occupe une fonction orthodoxe au regard du texte coranique, utilisant sa sainteté et sa dévotion pour assurer la paix sociale entre entités de natures différentes, entre le terrestre et l’invisible. Autrement dit, aux histoires d’anges et de démons, l’Islam rajoute une couche supplémentaire d’aberrations tous azimuts. Cette histoire de djinns enfonce plus que jamais l’islam dans l’irrationnel. À moins de les considérer à l’instar de nos ancêtres fénianes ou les druides comme une personnification des forces de la Nature.
Les marabouts actuels pratiquent deux arts complémentaires : le contact avec les entités surnaturelles et la magie pure et simple, héritée de l’Arabie préislamique. Ceux-ci se divisent en deux grands corps de métier spécifiques : d’un côté les sorcières (les « souffleuses de nœuds » de la sourate 113), capables de jeter des sorts, et de l’autre les devineresses et devins. Le texte coranique a
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explicitement prohibé ces deux professions et a étendu l’interdiction à la bélomancie ou divination par lancer de flèches. D’où en terre d’islam la réprobation de son aspect ludique (tir à l’arc, archerie)……
Le rôle le plus significatif du marabout soufi reste celui de magicien-guérisseur ou de médecin mystique. Ses pratiques se fondent sur les trois doctrines qui prévalaient alors dans le monde musulman.
— La première est directement issue de la tradition philosophique et scientifique grecque matérialiste. Les travaux sur le corps sont élaborés dans un cadre areligieux que nous appellerions la « science médicale ». C’est la médecine d’Al-Razi (IXe-Xe siècle, Perse), d’Avicenne (XIe siècle, Perse) ou d’Averroès (XIIe siècle, Andalousie) qui s’élabore, entre autres, à partir des textes antiques d’Hippocrate, de Galien (IIe siècle, Pergame), avec son traité d’hygiène De Sanitate Tuenda, ou les œuvres pharmacologiques de Dioscoride (Ier siècle, Asie Mineure), dont le De Materia Medica est alors un classique répandu dans tout le monde musulman.
— La seconde est connue sous le nom de médecine du prophète (al-tibb al-nabaoui). Elle développe une thérapeutique visant à imiter des pratiques médicales attribuées à Mahomet : il s’agissait, par exemple, de lire des formules religieuses ou certains passages du Coran, ou encore d’en absorber des fragments en les mélangeant à des aliments ou des boissons. Ces techniques sont celles des médecins les plus imprégnés de religion, renonçant tant à l’usage des sciences étrangères qu’à la fréquentation des êtres surnaturels que sont les djinns.
— Enfin, la troisième doctrine relève de l’islam soufi proprement dit. Les traditions de soins se développent à l’intérieur du réseau des zaouiyas (lieux d’enseignement, de vie et de rassemblement des disciples d’un ou plusieurs maîtres spirituels) fondé pour soutenir l’effort de moralisation et de conversion de la société dès les premiers siècles de l’islam. Dans cette doctrine médicale, l’utilisation d’objets investis de propriétés magiques est possible. Alors que la médecine du prophète se limite à l’utilisation du texte et de ses permutations numérologiques, le maraboutisme exercé par les soufis fait usage de techniques multiples de divination ou de transformations de sortilèges verbaux en objets magiques. Les marabouts délivrent volontiers à leur patient les talismans que la médecine du prophète s’interdit de créer.
LES PREMIÈRES GUERRES CIVILES ET /OU DE RELIGION, MUSULMANES.
Mahomet est mort d’une forte fièvre en 632 à l’âge de 63 ans. Sa méthode consistant à obliger les autres à se convertir sous la contrainte a eu plusieurs conséquences négatives, à commencer par les guerres civiles qui ont immédiatement suivi son décès. Beaucoup de tribus voulaient sortir de l’islam et ne furent maintenues dans l’empire qu’au prix d’une terrible violence.
Il importe de souligner que, pour la plupart, les armées musulmanes ont mené des campagnes militaires extrêmement agressives et que les conquêtes militaires les plus dramatiques de la religion musulmane ont été faites par les compagnons eux-mêmes de Mahomet dans les décennies qui ont suivi sa mort. Le premier principe de la guerre en ce temps-là était que la population civile d’une ville devait être détruite (c.-à-d. Les hommes exécutés, les femmes et les enfants pris comme esclaves) s’ils se défendaient. Bien que la taqiya des apologistes modernes de l’islam prétende souvent le contraire (que les musulmans ne recourent à la violence qu’en cas de légitime défense), c’est en totale contradiction avec les récits des historiens islamiques ou autres de l’époque de Mahomet.
Bukhari. Tome 5. Livre 59. Hadith 716. Rapporté par Ibn Abbas : jeudi la maladie de l’apôtre de Dieu empira et il demanda quelque chose afin d’écrire… Les personnes présentes ne s’exécutèrent pas immédiatement… Certains demandèrent même : « Qu’est-ce qui lui prend ? Croyez-vous qu’il délire ?
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Demandez-lui ce qui ne va pas ». Ils s’approchèrent donc du prophète et lui demandèrent. Le Prophète répondit : « Laissez-moi, car je vais mieux que vous ne le voudriez ». Ensuite il… »
Les derniers jours de Mahomet furent donc dramatiques. Littéralement crucifié sur son lit de mort par les atroces douleurs vraisemblablement d’un empoisonnement, sans vrai médecin pour le soigner ; ses proches étant soit terrorisés en pensant à l’avenir qui les attendait (ses femmes) soit plus préoccupés de sa succession à la tête de la cité état de Yathrib/Médine. Où la révolte grondait chez les Médinois de souche qui n’attendaient que cette occasion pour prendre leur revanche sur les immigrés venus de La Mecque. Un début de couvre-feu dut même être imposé à Médine par des fidèles de la première heure.
Le problème était en effet que Mahomet mourait sans laisser d’héritier mâle malgré ses nombreuses femmes. Que des filles nées de son premier mariage !
Les premiers convertis de La Mecque rivalisèrent donc avec les derniers. Une certaine hostilité en effet s’était manifestée entre les immigrés qui étaient venus avec Mahomet et les Ansar qui les avaient aidés à s’installer, à Médine.
Ensuite il y eut les guerres dites de la Ridda ou « Apostasie ».
Enfin, il y eut un violent conflit au sein de la famille elle-même entre sa femme et sa fille préférées : un schisme sanglant qui a laissé les chiites et les sunnites à couteaux tirés jusqu’à aujourd’hui.
Mahomet considérait ouvertement sa fille préférée et sa femme préférée comme des musulmanes modèles, mais chacune fut invoquée par les deux parties dans la sanglante guerre civile violente qui suivit sa mort. Quelle était donc celle à propos de laquelle le Messager de Dieu s’était le plus trompé ? 20 % des musulmans répondent Aïcha, 80 % répondent Fatima.
Cette incapacité ou impuissance de Mahomet à laisser derrière lui un successeur clairement désigné a donc entraîné un schisme profond qui s’est transformé en conflit sunnite / chiite. Sa propre famille se déchira et chacune de ses branches fut en guerre l’une contre l’autre lors des premières années qui suivirent. Des milliers de musulmans périrent en s’affrontant dans la bataille livrée entre la femme préférée de Mahomet, Aïcha et son cousin et fils adoptif Ali, époux de Fatima. Bataille du chameau en 656 et surtout bataille de Siffine en 657.
La propre fille de Mahomet, Fatima et son gendre et cousin, Ali, qui avaient tous deux survécu aux « rigueurs » païennes durant la période mecquoise, ne survécurent guère à l’Islam d’après la mort de Mahomet. Fatima mourut dans les trois mois qui suivirent, et Ali fut ensuite assassiné par des rivaux musulmans. Leur fils (le petit-fils de Mahomet donc) mourut lors d’une bataille contre la faction devenue aujourd’hui celle des sunnites et ses fidèles sont devenus les chiites. Les parents et amis personnels de Mahomet se sont répartis entre les deux camps belligérants, qui se sont ensuite divisés en sous-groupes hostiles au fur et à mesure de l’expansion du monde musulman…
Si Taïmiya se montra original en bien des points dans sa doctrine théologique et juridique, il manifesta dès son jeune âge une hostilité évidente envers les minorités religieuses (cf. t. I, n° 157). Cet auteur hanbalite prône surtout une mise à l’écart systématique des minoritaires dans le but d’empêcher la naissance et le maintien d’amitiés solides. Il reprend toutes les dispositions du pacte d’Omar sans atténuation et en en proposant les interprétations les plus strictes : exclusion de la fonction publique, interdiction de construire de nouvelles églises, humiliations diverses… Même quand le Coran admet le mariage d’un musulman avec une chrétienne, il le déconseille. De même les contrats de commerce, pourtant autorisés par le droit sont aussi déconseillés. La séparation doit être générale et on empêchera même les enfants de jouer ensemble… Ibn Taïmiya conseille très clairement le bannissement des minoritaires dès que l’on n’a plus besoin d’eux.
Ibn Taïmiya a eu des propos très nets à ce sujet.
Majmou al-Fataoua, tome 28, résumé des pages 501 à 508.
Tout groupe qui délaisse, change, ou refuse de mettre en application une quelconque Loi convenue et incontestée de l’Islam, que ce soit ces gens ou d’autres, doit être combattu jusqu’à ce qu’il adhère à toutes les Lois de l’Islam. Ceci est une règle même s’il prononce les deux témoignages et adhère à certaines Lois islamiques… Donc, quel que soit le groupe qui délaisse, change, ou refuse de mettre en œuvre certaines des prières obligatoires, ou de participer au jeûne du ramadan, ou d’aller faire le Hadj, ou qui viole le sang et la richesse des musulmans, ou qui autorise la consommation de drogue, ou l’adultère, ou la fornication, ou le jeu, ou le mariage des « maharam », ou qui ne déclare pas la guerre aux mécréants, ou n’impose pas la djiziya aux juifs et aux chrétiens, ou une autre obligation ou interdiction de la Religion pour lesquelles il n’y a aucune excuse à ne pas les mettre en pratique, alors la guerre doit être déclarée à ce groupe même s’ils acceptent le fait que ces obligations ou interdictions font partie de la Religion. Et je ne connais aucun désaccord parmi les savants à cet égard… Je ne connais aucune divergence d’avis quant à l’obligation de déclarer la guerre à ceux qui délaissent, changent ou refusent de mettre en œuvre une quelconque Loi incontestée de l’Islam… De la même manière, ils (les Mongols) ne jugent pas selon les Lois de Dieu, mais jugent plutôt selon des
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règles qui sont en accord avec l’Islam sur certains points et en désaccord sur d’autres. Et le fait de combattre ce type d’hommes est donc obligatoire. Personne connaissant la Religion qu’est l’Islam et connaissant la vérité à propos de ces gens ne doutera de cela, parce que la voie qu’ils suivent et la Religion véridique qu’est l’Islam ne pourront jamais être réconciliées. Et s’il est obligatoire de se battre contre ces Kurdes, Bédouins et autres habitants du désert qui n’adhèrent pas à la Charia islamique, bien que leur maladie ne soit pas étendue aux villes, alors que dire des Mongols ?… Si ceux qui prennent les armes contre ce groupe le font de manière complètement conforme à la Charia, tant pour ce qui est du vocabulaire des actes et des intentions, alors c’est la meilleure façon de chercher la satisfaction de Dieu, d’établir Sa Religion et d’obéir à Son Messager (salla Allahou alayhi oua salam). Et si ceux qui se battent contre des gens tels que les Mongols montrent quelques perversions, ou commettent contre l’ennemi des péchés non sanctionnés par la Charia, ou sont mus par des intentions perverties par les luttes pour le pouvoir, mais que le mal de ne pas se battre contre ce groupe de négateurs a des conséquences plus mauvaises pour l’Islam que le combat aux côtés des corrompus, alors il est obligatoire de se battre contre eux pour empêcher le plus grand des deux maux et ceci est un des principes de l’Islam qui doit être gardé en mémoire… Le Prophète Mahomet (salla Allahou alayhi oua salam) a dit : « Il y aura des expéditions militaires du moment où j’ai été envoyé par Dieu jusqu’au jour où ma communauté affrontera le Dadjal [l’antéchrist] à la fin des temps.
Rappel sur les conséquences du concept de Dar al harb ou Dar al islam (en latin Si vis pacem para bellum).
Pour comparaison quelques mots sur l’ahimsa pour commencer.
Il y a dans l’imagerie populaire de l’Inde une célèbre façon de représenter l’ahimsa : une lionne et une vache se désaltèrent au même point d’eau en paix, avec parfois en plus la représentation d’un petit lionceau choisissant de boire aux pis de la vache et les veaux aux mamelles de la lionne ; cette imagerie est spécialement utilisée à la fois par le jaïnisme et par l’hindouisme. Scène paradisiaque à laquelle correspond Isaïe XI, 6 dans la Bible. C’est le Râm Râj, Royaume de Justice sur la terre !
L’ahimsa est une composante importante de l’hindouisme, du bouddhisme, et du jaïnisme qui l’appliquent strictement.
La non-violence absolue est la loi première du jaïnisme. Elle postule que l’humain peut se contrôler.
Cette renonciation à la violence peut être complète ou partielle. La renonciation complète s’accomplit de neuf façons : par soi-même, par un moyen ou par approbation, et, chaque fois, par la pensée, par la parole et par le corps. Pour un laïc, la renonciation complète est impossible. Aussi lui est-il demandé d’accomplir ses devoirs sur cette terre en causant un minimum de préjudice aux autres.
Violence défensive. Jaïnisme et hindouisme, considèrent que la violence défensive peut se justifier, mais aussi qu’un soldat, qui tue des ennemis dans un combat, accomplit un devoir légitime : les communautés jaïnes acceptent d’utiliser la puissance militaire pour leur défense et celle des autres, et il y a des laïcs jaïns, dans le passé ou aujourd’hui, monarques, généraux ou soldats. Rappelons à ce sujet le célèbre propos du Mahatma Gandhi : « Ma non-violence n’autorise pas qu’on s’enfuie du danger en laissant les siens sans aucune protection. Je ne peux que préférer la violence à l’attitude de celui qui s’enfuit par lâcheté. Il est tout aussi impossible de prêcher la non-violence à un lâche que de faire admirer un beau spectacle à un aveugle. La non-violence est le summum du courage ».
Le jaïnisme considère que quelqu’un qui a franchi l’étape de la vie active devrait absolument éviter les quatre formes de violence traditionnellement définie, mais il n’est exigé du laïc de ne s’abstenir totalement que de la violence intentionnelle, car, pour ce qui est des autres, ce n’est pas totalement possible à ce stade. Concrètement l’ahimsa signifie, pour un laïc, qu’il doit s’abstenir de toute violence intentionnelle.
La pratique alimentaire jaïne exclut la plupart des racines, car l’on pourrait causer du mal à un animal en les déterrant, et l’on détruit de facto une vie végétale (prendre un fruit, ou un légume, n’amène pas la mort de la créature végétale qui le produit). Les ascètes jaïns ne mangent pas, ne boivent pas ou ne voyagent pas après le coucher du soleil et ne se lèvent pas avant son apparition, toujours pour éviter de blesser un être vivant par manque de lumière ou à cause des lampes, des bougies, etc. qui pourraient brûler les insectes attirés par leurs flammes dans la nuit.
Des ascètes de certaines branches jaïnes portent un tissu sur leur bouche et leur nez afin d’éviter de tuer, en les respirant, de petits insectes, tissu qui est aussi un symbole de respect dans les paroles. Le jaïnisme étant particulièrement présent au Goujarat, le Mahatma Gandhi, originaire de cet État indien, a été profondément influencé par la façon de vivre jaïne, paisible et respectueuse de la vie, et il en a fait une partie intégrante de sa propre philosophie : un ascète jaïn fut d’ailleurs l’un de ses meilleurs amis et enseignant, Shira Raj Chandra.
Cette règle est le premier article des grands vœux (mahavrata) du raja-yoga ou du hatha-yoga (les cinq points du code moral du yoga royal de Patanjali sont les mêmes que celui des jaïns) : cela implique pour le yogi, non seulement l’abstention de violences en actes ou paroles (insulte, mots
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blessants), mais plus subtilement au niveau des pensées, puisque le mental doit être dirigé en amont, pour que tout ce qui en découle (parole, acte) relève de la maîtrise de soi, de l’abolition de l’ego (ahamkara) et du sens du « je » (asmita) nourrissant le karma. L’ahimsa, court-circuite la violence envers les vies que l’on peut produire directement ou par consentement, éradique les égoïsmes, encourage la bienveillance et la bienfaisance à l’égard de tous les êtres : ce n’est pas une mesure spécifiquement yogique, mais une mesure désirée par tout homme « noble », arya en sanscrit (Lois de Manou, livre 10, verset 63).
L’hindouisme étant une civilisation, et non une religion au sens strict et occidental du terme, le végétarisme n’a rien d’obligatoire pour être « hindou » et s’affirmer en tant que tel (quoique le terme hindou n’est sanctionné par aucun texte sacré « hindou » : il est issu des invasions islamiques pour nommer la population non musulmane de l’Inde).
Contrairement à ce qui se passe dans l’hindouisme et dans le jaïnisme, le terme ahimsa (ou le terme pali apparenté avihimsa) n’apparaît pas dans les textes bouddhistes anciens.
Les écritures bouddhistes qui évoquent la vie et le caractère de Bouddha parlent de son enseignement, qui trouve toujours la métaphore appropriée, et qui adapte à la perfection son message à son auditoire, quel qu’il soit. De son courage et sa sérénité en toutes circonstances, aussi bien lors d’une discussion religieuse que face à un prince parricide (Ajatasattou) ou à un meurtrier. Il fait cependant preuve d’exaspération lorsque des moines déforment ses enseignements.
Siddhartha Gautama était un homme sportif, compétent en arts martiaux tels que la lutte et le tir à l’arc, qui pouvait parcourir des kilomètres et camper dans la nature sauvage.
Nulle part néanmoins il ne nous est montré participant ou encourageant des combats, même défensifs. Ce qui n’est pas le cas du premier empereur bouddhiste Açoka il est vrai.
À la mort de son père en 273 avant notre ère Açoka fait éliminer tous ses frères et sœurs, s’empare du pouvoir et se fait couronner quatre ans plus tard.
Comme ses prédécesseurs, Açoka dispose d’une armée considérable, professionnelle, prête en permanence. C’est avec elle, au cours de la treizième année de son règne (261 avant notre ère), qu’il se lance à la conquête du Kalinga, région située sur la côte est et correspondant à l’actuel Orissa. Açoka remporte la victoire après une guerre terriblement meurtrière qui aurait fait selon ses dires 150 000 prisonniers, 100 000 tués et autant de morts de famine et de maladie, chiffres probablement symboliques qui traduisent l’ampleur des massacres perpétrés.
Ce triomphe sanglant provoque néanmoins chez le souverain une crise morale et politique qui le conduit à adopter les principes non violents du bouddhisme. Il fait une retraite d’un an dans un monastère, devient végétarien, fait des pèlerinages et de nombreux dons aux bouddhistes, mais aussi aux jaïns et aux brahmanes. Il prend les vœux d’upasaka et réalise au travers des enseignements du Bouddha que ses conquêtes territoriales sont source de souffrance, et s’oriente vers une conquête intérieure pour cultiver le bien de la société et la non-violence. Il protège les autres religions et érige des piliers où sont gravés en plusieurs langues des textes promouvant la justice et la tolérance.
Débarrassé du souci de la guerre, Açoka se consacre à l’organisation de son empire sur lequel il exerce un pouvoir absolu au moyen d’une administration décentralisée, soutenue par les nombreux édits gravés dans la pierre et disséminés sur tout le territoire.
De plus, bien qu’il ne l’utilise guère après la conquête du Kalinga, Açoka peut compter sur une armée imposante entièrement dévouée à son service, car il en est le financeur.
Les ordres de l’empereur s’appliquent uniformément à tout le territoire, ils émanent de sa volonté et de son autorité personnelle comme en témoigne une de ces inscriptions. Afin de diffuser son idéal de tolérance, Açoka promulgue des édits qu’il fait graver dans la pierre et ériger dans tout l’Empire. Nous en connaissons quatorze, gravés soit sur des rochers, situés à la périphérie du royaume, soit sur des colonnes, dans la vallée du Gange ou plus rarement sur les parois de grottes dans des régions reculées. Ces textes édifiants permettent au souverain non seulement d’éduquer ses sujets en leur inculquant le sens du devoir (dharma), mais également de conforter son gouvernement par la pression qu’ils exercent sur la population, l’incitant à se plier à la justice, à renoncer à la violence donc à la guerre, à s’imposer une forme d’autodiscipline.
Pour assurer pleinement l’application de ces principes, Açoka qui se considère comme le « père » de tous ses sujets quelles que soient leur religion ou leur caste, crée un corps de superviseurs de la moralité, le dhamma-mahamatra, qui, à l’aide de nombreux informateurs, contrôle l’intégrité de ses fonctionnaires et l’observation par tous de ses édits. Ceux-ci constituent un code moral aussi bien acceptable par les pratiquants du bouddhisme, qui en est l’inspiration directe, que par ceux du jaïnisme ou de l’hindouisme.
NDLR. La façon dont le bouddhisme comprend la non-violence n’est pas aussi minutieuse et exigeante que chez les jaïns. Dans la tradition theravada, le végétarisme n’est pas obligatoire (voir végétarisme bouddhique). Par ailleurs, la tentative de schisme de Devadatta, rapportée par le canon
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pali, expose clairement le refus du Bouddha de rendre obligatoire le végétarisme (une des cinq règles que voulait précisément imposer Devadatta). Les moines et les laïcs du rite theravada peuvent manger de la viande et du poisson, à condition (dans le cas des moines) que l’animal n’ait pas été tué spécialement pour eux.
Mais revenons à notre islam et à Mahomet. Qui n’est pas Açoka, ni a fortiori Bouddha, ni même le messie fils de Marie dont le royaume n’était pas de ce monde.
Évangile selon Saint-Jean chapitre 18. « Ayant ainsi parlé, Jésus sortit avec ses disciples et traversa le torrent du Cédron ; il y avait là un jardin, dans lequel il entra avec ses disciples. Judas, qui le livrait, connaissait l’endroit, lui aussi, car Jésus et ses disciples s’y étaient souvent réunis. Judas, avec un détachement de soldats ainsi que des gardes envoyés par les grands prêtres et les pharisiens, arrive à cet endroit. Ils avaient des lanternes, des torches et des armes. Alors Jésus, sachant tout ce qui allait lui arriver, s’avança et leur dit : « Qui cherchez-vous ? » Ils lui répondirent : « Jésus le Nazaréen. » Il leur dit : « C’est moi, je le suis. » Judas, qui le livrait, se tenait avec eux. Quand Jésus leur répondit : « C’est moi, je le suis », ils reculèrent, et ils tombèrent à terre. Il leur demanda de nouveau : « Qui cherchez-vous ? » Ils dirent : « Jésus le Nazaréen. » Jésus répondit : « Je vous l’ai dit : c’est moi, je le suis. Si c’est bien moi que vous cherchez, ceux-là, laissez-les partir. » Ainsi s’accomplissait la parole qu’il avait dite : « Je n’ai perdu aucun de ceux que tu m’as donnés ». Or Simon-Pierre avait une épée ; il la tira, frappa le serviteur du grand prêtre et lui coupa l’oreille droite. Le nom de ce serviteur était Malcus.
Jésus dit à Pierre : « Remets ton épée au fourreau. La coupe que m’a donnée le Père, vais-je refuser de la boire ? Alors la troupe, le commandant et les gardes juifs se saisirent de Jésus et le ligotèrent… À ces mots, un des gardes, qui était à côté de Jésus, lui donna une gifle en disant : « C’est ainsi que tu réponds au grand prêtre ! »
Jésus lui répliqua : « Si j’ai mal parlé, montre ce que j’ai dit de mal ? Mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? »…
Alors Pilate rentra dans le Prétoire ; il appela Jésus et lui dit : « Es-tu le roi des Juifs ? »
Jésus lui demanda : « Dis-tu cela de toi-même, ou bien d’autres te l’ont dit à mon sujet ? »
Pilate répondit : « Est-ce que je suis juif, moi ? Ta nation et les grands prêtres t’ont livré à moi : qu’as-tu donc fait ? »
Jésus déclara : « Ma royauté n’est pas de ce monde ; si ma royauté était de ce monde, j’aurais des gardes qui se seraient battus pour que je ne sois pas livré aux Juifs. En fait, ma royauté n’est pas d’ici. »
Mahomet n’est donc ni Bouddha ni Jésus, Mahomet n’est que Mahomet c’est-à-dire un grand marabout arabe de type Senoussi du 7e siècle.
DIN ET DAOULA.
Arrivés à ce point de notre exposé rappelons que selon le droit des nations (siyar), musulman, le monde est divisé en deux catégories : dar al-islam et dar al-harb (harb = guerre). L’État islamique doit donc être dans un état permanent de guerre avec le Dar al harb pour le transformer en Dar al-islam, c’est-à-dire qu’il doit toujours être prêt militairement à répondre à une attaque ou à en lancer une lorsque le calife ou l’imam le juge nécessaire. En principe d’après les juristes, le pouvoir islamique doit mener la guerre contre le Dar al-harb au moins une fois par an.
En 622, à Aqaba, un vallon isolé non loin de Mina (à quelques kilomètres de La Mecque) fut scellée une alliance entre Mahomet et un certain nombre d’habitants de Yathrib/Médine. Ces derniers se seraient engagés, cette fois-ci donc y compris à se battre pour la cause de Dieu et de son prophète qui apparemment commençait à être connu jusque-là.
La mère de Mahomet était en effet de Yathrib/Médine et son grand-père maternel y avait vécu. Mahomet semblait en mesure d’arbitrer leurs conflits tribaux (Aous contre Khazradj) sans qu’on puisse l’accuser d’être à la solde des éternels rivaux couraïchites vu l’état de ses relations avec eux (exécrables).
Ce deuxième serment est connu sous le nom de Bay’at al harb (serment d’allégeance en cas de guerre). La tradition biographique affirme qu’entre le premier serment d’Aqaba et le second, Dieu aurait autorisé son envoyé à combattre ses adversaires et à répondre par la violence à la violence. D’après Alfred Morabia la tendance était alors jusque-là davantage à endurer, avec piété, les vexations couraïchites qu’à y résister activement.
Plus que dans la constitution de Médine (en fait une série de 8 pactes), qui marque l’apparition de l’Oumma, c’est dans ce deuxième serment d’Aqaba qu’il faut voir le véritable acte de naissance de l’État islamique.
Un pacte de défense, certes, mais avec lequel « L’Envoyé d’e Dieu reçoit l’ordre de faire la guerre », selon le titre même donné à l’épisode par Ibn Ichaq.
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L’État musulman va donc s’organiser dans cette « optique » avec la religion pour justification, mais ne passera vraiment à l’offensive contre La Mecque qu’avec la bataille de Badr en 624. Ensuite le nombre de combattants passera de quelques centaines à dix mille pour la prise de La Mecque en 630 et enfin à trente mille pour la bataille de Tabouk en 630. Étrange expédition guerrière d’ailleurs qui ne se soldera que par la conquête sans lendemain de quelques avant-postes de l’Empire byzantin (actuellement le nord-ouest de l’Arabie saoudite). Les sources byzantines sont muettes sur la question ce qui est quand même assez curieux.
L’échec du siège de Yathrib/Médine ou bataille du fossé en 627 constituera également un tournant décisif dans la marche vers la constitution d’un État militarisé. La dimension économique de la lutte se voit dans la proposition – le tiers de son produit – que fait Mahomet aux Ghatafanes pour tenter de les rallier à sa cause. Elle est plus présente encore dans la prise de possession des biens des juifs Banou Qouraïza, avec partage du fay' * durable et non durable. Les normes de ce partage, qui occupent un paragraphe dans Ibn Ichaq, vont être appelées à régenter toutes les conquêtes futures de l’Arabie et le quint ou cinquième, part du butin revenant au Prophète, instauré à cette occasion, va considérablement enrichir le trésor de guerre de Mahomet.
Avec une détermination et une régularité inusitées dans les guerres tribales, c’est donc un « État-butin » qui va s’instaurer. Ce n’est pas un hasard si, plus tard, le calife Omar attribuera les pensions en prenant en compte la participation à la bataille de Badr. Ce sont des éléments pro-Mahomet parmi les chefs de clan de Yathrib/Médine, comme Sa'd b. Mou'adh notamment, qui ont aidé ce glissement vers l’État guerrier et de butin, offensif. Les juifs en feront systématiquement les frais non seulement parce qu’ils témoignent ou sont la preuve vivante du fait que Mahomet n’est pas le dernier prophète du dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob, mais aussi pour alimenter en butin ceux qui suivent ce grand marabout arabe de type sénoussi.
L’épisode du génocide des Banou Qourayza théoriquement décidé par cet obscur chef de clan arabe Aous qu’était le dénommé Sa’d b. Mou’adh, dont les musulmans ne feront théoriquement qu’exécuter la sentence va inaugurer une violence d’État absolument inédite en Arabie et qui s’inspire des pratiques de l’Orient ancien : massacre de la totalité des hommes, réduction en esclavage des femmes et des enfants. Ce qui surprend l’historien est que les musulmans n’aient pas voulu assumer directement la responsabilité de ce massacre. Mahomet, encore mal assuré de son pouvoir dans la cité, a sans doute jugé préférable de montrer qu’il ne faisait que jouer le jeu ancestral des subtiles alliances entre clans et tribus arabes ou juives et faire cautionner sa décision d’éliminer les juifs (taqiya ?) par cet obscur personnage théoriquement suzerain de la malheureuse tribu juive des Banou Qouraïza.
La violence bédouine d’avant l’islam n’avait pas cette allure systématique, cette détermination, cette organisation et n’était jamais perpétrée pas à si grande échelle. L’émergence de ce type de violence d’État inconnue jusque-là dans le Hedjaz va saisir de stupeur les Arabes en général, et les Couraïchites de La Mecque en particulier.
Les juifs de la tribu des Banou Qouraïza subirent en effet un sort autrement tragique que celui des deux autres tribus : ils furent massacrés jusqu’au dernier (là aussi bien entendu les avis divergent sur l’étendue de cette première shoah, les chiffres avancés vont de 900 à 100 hommes selon Tabari ou l’historien révisionniste Hichem Djait, tous décapités puis jetés dans une fosse commune). Ce qui est certain c’est que le butin en esclaves, terres, bêtes et meubles, fut immense et son acquisition approuvée par le Coran (33, 25-67).
Hichem Djaït ajoute : naquit alors l’impression d’une irrésistible ascension, impression qui alla croissant du traité d’Houdaïbiya en 628 à la prise de contrôle de La Mecque déclarée ville ouverte en 630. À Yathrib/Médine même, la loyauté clanique se disloque en faveur du pouvoir charismatique et personnel de Mahomet. L’État islamique se dote de l’attribut de coercition financière sur les tribus converties par l’institution de la sadaqa ou « aumône » obligatoire.
Avec le traité d’Houdaïbiya en effet Mahomet s’accordera donc habilement deux années de répit supplémentaires, le temps pour lui d’engranger de nombreux ralliements, dont celui de Khalid ibn al-Oualid – le vainqueur de la bataille d’Ohoud (où en 625 les musulmans et Mahomet avaient été vaincus).
En 628 toujours, alors que la lutte contre les partisans de la laïcité ouverte ou du paganisme philosophique et réfléchi réfugiés à La Mecque paraissait encore longue et requérait donc un renforcement du territoire autour de Yathrib/Médine ainsi que l’accroissement de ses moyens, Mahomet lança ses troupes à l’assaut de l’oasis de Khaïbar, située à cinquante kilomètres au nord-ouest de Yathrib/Médine et habitée par de paisibles cultivateurs juifs. Après un long siège, les réduits fortifiés tombèrent et l’oasis capitula. Là aussi, le butin fut important. Les femmes, parmi lesquelles la belle et malheureuse Safia, ainsi que les enfants furent emmenés en captivité. Safia refusa de se convertir, devint l’esclave sexuelle personnelle du prophète, et les hommes restèrent sur place où ils
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travaillèrent désormais leurs anciennes terres comme métayers pour le compte de la communauté musulmane.
Sur le plan politique l’affaire de Khaïbar sera perçue comme un signe indubitable de la puissance de Mahomet, et le prophète comme un nouveau roi du Hedjaz, qui partage son butin avec ses compagnons de Yathrib/Médine, ainsi qu’avec les Arabes des tribus qui participent au siège, mais accorde aussi des contrats de métayages (révocables) aux juifs. Ce nouveau pouvoir s’engage alors définitivement dans une dialectique qui oppose le dar al islam au dar al harb, s’invente des ennemis, les dépossède, et s’assure la fidélité de ses soutiens à partir de cette dépossession. Être musulman rapporte et procure des avantages matériels par rapport aux non musulmans.
Grâce à une telle taqiya Mahomet rallie alors massivement des éléments bédouins : les Aslam minés par la famine, les Mouzaïna, les Jouhaïna, les Soulaïm, les Ghifar, les Khouzâ'a, qui forment alors un deuxième cercle de fidèles. D’autres éléments bédouins des tribus Tamin, Qays et Asad, viennent également renforcer l’armée de Mahomet, qui comptera dix mille hommes au moment de la marche finale de 630 sur La Mecque, parfaitement organisée avec des ailes et un centre.
Devant un tel déploiement de force, La Mecque tombera donc « sans coup férir » et lors du pèlerinage de revanche triomphale personnelle à la Ka'ba le sacrifice de soixante-dix chameaux (chameaux et non moutons) rituellement préparés impressionnera favorablement la population (par sa reconnaissance implicite de la prééminence de la Ka'ba, et du système religieux de La Mecque).
Mahomet deviendra ensuite le maître définitif de la Ka'ba, son véritable objectif de toujours, et son pèlerinage païen sera rattaché de façon plus ou moins habile à la légende abrahamique. Mahomet se vengera enfin des humiliations réelles ou ressenties comme telles, de sa jeunesse, en prenant le contrôle du commerce mecquois et en devenant le maître de la puissance couraïchite.
Les Couraïchites se rallieront parallèlement et en masse à l’Islam, dont le chef charismatique se trouve être de leur propre tribu.
Du fait de la défaite des Haouazines à Honeïn la même année, quelques semaines plus tard, et ensuite des habitants de Taïf, dernier sursaut de résistance païenne des Arabes du Hedjaz, un immense butin sera également partagé comme dans le cas des malheureux juifs de Khaïbar (le métayage en moins) entre les vainqueurs, et une quotité importante dudit butin reviendra aux derniers venus, les Couraïchites, liés par les liens du sang, ce qui diminuera d’autant la part des Médinois, pourtant venus avant eux à l’islam (d’où un certain nombre des récriminations).
Il a toujours été de bonne politique d’encourager les ralliements à une cause en avantageant ou favorisant les derniers venus, mais ce qui choqua les premiers cercles à l’époque c’est qu’il s’agissait comme par hasard de la propre tribu du prophète. Beaucoup eurent du mal à comprendre. Ainsi que nous l’avons déjà mentionné, mais la répétition est la plus forte des figures de rhétorique.
Ces questions de butin peuvent sembler à certains une scandaleuse affaire de gros sous : il n’en est rien ! Il s’agit du moteur de l’expansion de tous les impérialismes. Ceux qui ont été pillés puis qui se sont convertis sont en effet poussés, à leur tour, à défendre une idéologie légitimant le pillage. Dans la société musulmane qui se construit, le montant des parts de butin détermine le rang des individus et des clans dans la hiérarchie des honneurs. En l’occurrence les tout nouveaux convertis de La Mecque seront favorisés au détriment des anciens combattants de la cause, d’où des grognements assez cocasses si l’on en croit les hadiths. Cet acte d’autorité, strictement arbitraire, et habile pour ce qui est de la politique, de la part de Dieu, est resté dans la tradition comme l’épisode de la « Conquête des cœurs ».
Quoi qu’il en soit c’est ainsi que le Dar al islam devint définitivement un État-Butin dont l’expansion continuelle au détriment du Dar al harb devint vitale. Si vis pacem para bellum……
Le délire paranoïaque est une maladie psychiatrique grave qui fait partie des psychoses, dans lesquelles la personne atteinte ne se rend pas compte de sa maladie.
Comme dans toutes les psychoses, le signe principal est l’apparition d’un délire, donc de la perte de contact avec la réalité. Ce délire est en général organisé autour d’un thème principal lié à la conviction d’être persécuté. Le malade interprète alors tous les éléments de la vie quotidienne à partir de cette conviction, et réorganise la réalité de façon délirante, souvent avec une grande exaltation et en croyant fermement à ses interprétations.
Ce délire interprétatif touche petit à petit tous les éléments de la vie quotidienne. Le malade est alors convaincu qu’il est la victime de persécutions organisées, d’un complot, et passe son temps à accumuler les preuves de ce complot imaginaire. Tous les événements quotidiens sont alors interprétés en fonction de cette conviction, et constituent pour le malade autant de preuves qui renforcent sa conviction. Le malade à l’impression d’être le centre d’attention de tout son entourage, et il est convaincu que tout le monde le juge ou parle de lui en permanence de façon négative.
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Toute la question est donc de savoir si Mahomet a vraiment été persécuté injustement avant son bannissement de la Mecque et lors des premiers mois qui ont suivi son arrivée à Yathrib/Médine ou s’il a voulu endosser le discours judéo-chrétien à ce sujet.
En ce qui nous concerne nous prendrons acte du fait qu’avec l’islam TOUT SE PASSE COMME S’IL Y AVAIT EU D’INOMBRABLES MARTYRS TOMBES SOUS LES COUPS DES PERSÉCUTIONS ORGANISÉES PAR LES PAÏENS DE LA MECQUE.
Sur la réalité, ou pas, de ces persécutions ayant fait des millions de morts voir nos ouvrages précédents sur le christianisme ou sur l’islam. En l’occurrence ce qui est cru est plus important que ce qui est vrai.
En principe, la jurisprudence islamique ne considère donc pas la notion d’ethnie ni de citoyenneté. Pour elle, les êtres humains appartiennent à une de ces deux catégories : les croyants ou les mécréants.
Verset 72, chapitre 3. “Une partie des gens du Livre dit, au début du jour : croyez à ce qui a été révélé aux croyants, à son déclin : soyez non croyants… Ne croyez qu’à ceux qui suivent votre religion ».
Verset 118 chapitre 3 « Ô vous qui croyez, n’établissez des liens d’amitié qu’entre vous ».
Cet entre-soi ou rejet des « infidèles » est donc le thème dominant et obsidional du Coran. Ce dualisme « eux » et « nous » explique d’ailleurs le sens d’appartenance à une communauté ou la forte cohésion sociale qu’on observe dans les pays à majorité musulmane et les difficultés d’intégration qu’éprouvent les musulmans en pays n’appartenant pas au dar Al islam.
L’islam est en effet une religion qui prône la cohésion sociale et la continuité d’un pouvoir théocratique, et la société musulmane est une société militarisée tout entière tendue vers la conquête et la conversion du Dar al Harb, y compris dans sa spiritualité comme le prouve le cas des moines guerriers soufis des ribats (nous ne parlons pas ici des autres soufis).
* Fay’. Biens acquis sans qu’il y ait eu combat donc ne constituant pas un butin de guerre au sens strict du terme.
LE PETIT DJIHAD OU DJIHAD DE CONVERSION DANS LE CORAN.
Ainsi que l’ont bien expliqué Ibn Khaldoun et le cheikh Yousouf al-Qaradaoui ; le djihad d’expansion tourné vers l’extérieur (le petit djihad) est un devoir religieux en raison du caractère universel de la mission salvatrice des musulmans.
Le monde non musulman, quel que soit son système de gouvernement, vit dans le péché par définition, puisque le bien de l’Humanité ne réside que dans le fait de vivre selon la loi de Dieu. Est donc bien ce qui est conforme aux normes de l’islam, est mal ce qui lui est contraire ou en diffère.
À fins de comparaison encore puisque Mahomet a cru bon de se définir par rapport à ses prédécesseurs (Jésus est mentionné 27 fois dans le Coran) commençons encore par un hadith ou sourate des chrétiens. Saint Luc 15, 11 à 32.
« Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : « Père, donne-moi la part de fortune qui me revient’. Et le père leur partagea son bien. Peu de jours après, le plus jeune fils, rassemblant tout son avoir, partit pour un pays lointain et y dissipa son bien dans une vie de prodigue.
Quand il eut tout dépensé, une grande famine survint en ce pays et il commença à sentir la privation. Il alla se mettre au service d’un des habitants de la contrée, qui l’envoya dans ses champs garder les
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cochons. Il aurait bien voulu se remplir le ventre des caroubles que mangeaient les cochons, mais personne ne lui en donnait. Rentrant alors en lui-même, il se dit : ‘Combien de journaliers de mon père ont du pain en abondance, et moi je suis ici à mourir de faim ! Je veux partir, retourner vers mon père et lui dire : Père, j’ai péché contre le Ciel et contre toi ; je ne mérite plus d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes journaliers’. Il partit et s’en retourna vers son père.
Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut touché de compassion ; il courut se jeter à son cou et l’embrassa longuement. Le fils alors lui dit :’Père, j’ai péché contre le Ciel et contre toi, je ne mérite plus d’être appelé ton fils’.
Mais le père dit à ses serviteurs :’vite, apportez la plus belle robe et l’en revêtez, mettez-lui un anneau au doigt et des chaussures au pied. Amenez le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé ».
L’ISLAM EST MOINS COMPLIQUÉ, car, ainsi que l’ont bien vu certains spécialistes, et la réaction de l’autre fils est d’ailleurs là pour le montrer, un tel laxisme une telle coupable clémence, est injuste * envers l’autre fils, celui qui est resté tout ce temps-là auprès de son père en exécutant fidèlement ses ordres sans en être particulièrement récompensé.
Nous n’insisterons pas sur les châtiments qui attendent les incroyants dans l’autre monde (en Enfer) toutes les religions du monde à l’exception du druidisme en font autant, et nous insisterons surtout sur le sort qui leur est réservé DÈS CE MONDE-CI : Verset 30, chapitre 9. « Que Dieu les anéantisse, ils sont tellement stupides ».
Autre élément lourd de conséquences entrant dans la psychologie collective** de l’islam en tant que foule structurée en effet le recours au petit djihad pour convertir les peuples à la vraie religion, ce qui est quand même plus logique et plus à la portée des gens normaux.
Tout comme la Tradition juive enseigne que le monde non juif est fondamentalement impur et Un (ou essentialisé : les non-juifs formant un tout confus et indistinct ne méritant pas qu’on y distingue quoi que ce soit) ; l’islam orthodoxe enseigne que le monde non musulman est fondamentalement mauvais et Un, face à l’islam. « Al koufrou millatoun ouahida » : « l’Incroyance est une seule et même nation », enseigne la Tradition musulmane. Même essentialisation donc qu’avec la notion de goïm pour le judaïsme Haredim.
L’islam compte quatre types de petits djihads de conversion : par le cœur, par la langue, par la main et par l’épée. Le djihad par le cœur, aussi nommé « Grand Djihad », invite les musulmans à combattre afin de s’améliorer ou d’améliorer la société. De nombreux savants musulmans interprètent en effet le djihad comme une lutte au sens spirituel du terme. Une minorité de savants sunnites le considère même comme le sixième pilier de l’islam quoique le djihad n’en ait pas le statut officiel. Dans le chiisme duodécimain, il est considéré comme une des dix pratiques religieuses du culte.
Qualifier la lutte armée offensive pour la plus grande gloire de Dieu (djihad fi Sabilillah) de petit djihad mineur ne signifie pas pour autant sa condamnation ou sa disqualification morale, et l’histoire islamique a connu nombre de soufis s’adonnant au service militaire dans les ermitages forteresses appelés ribats. Le devoir de djihad (de petit djihad ou djihad mineur) demeure tant que la domination universelle de l’islam n’a pas été obtenue. La paix avec les nations non musulmanes ne peut dans ce cas qu’être qu’une situation provisoire : une trêve ! En résumé, la condition nécessaire pour qu’il y ait paix ou réconciliation définitive est donc que les musulmans aient l’avantage. C’est formulé de manière très claire dans un texte sunnite de droit islamique que nous avons déjà mentionné, l’Oumdat as-Salik ou Dépendance du voyageur, écrit au quatorzième siècle par un juriste égyptien nommé Ahmad Ibn an Naqib al-Misri : « Il faut qu’il y ait quelque avantage [maslaha] accordé en cas de trêve, en plus du statu quo ».
Les versets 19 et 20 du chapitre 9 du Coran font clairement du petit djihad le devoir suprême du vrai bon musulman.
« Placerez-vous celui qui donne à boire aux pèlerins et qui est chargé du service de la mosquée sacrée au même rang que celui qui croit en Dieu et au Jour dernier et qui lutte dans le chemin de Dieu ? Ils ne sont pas égaux devant Dieu… Ceux qui auront cru, ceux qui auront fait l’hégire, ceux qui auront combattu dans le chemin de Dieu avec leurs biens et leur personne, seront placés sur un rang très élevé auprès de Dieu ».
Coran verset 95, chapitre 4 Coran verset 91, chapitre 9 Coran verset 17, chapitre 48 et Coran verset 60, chapitre 8 excluent de considérer que ce petit djihad puisse être uniquement spirituel.
— Verset 95, chapitre 4 : « Les croyants qui s’abstiennent de combattre, à l’exception des infirmes, et ceux qui combattent dans le chemin de Dieu avec leurs biens et leurs personnes, ne sont pas égaux. Dieu préfère ceux qui combattent avec leurs biens et leurs personnes à ceux qui s’abstiennent de combattre ».
Versets 41 et suivants chapitre 9. « Légers ou lourds, élancez-vous au combat. Luttez avec vos biens et vos personnes dans le chemin de Dieu. C’est un bien pour vous si vous saviez. S’il s’était agi d’une
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affaire à leur portée ou d’un court voyage, ils t’auraient suivi. Mais la distance leur a paru longue… Ceux qui croient en Dieu et au jour dernier ne te demandent pas de dispense quand il s’agit de combattre avec leurs biens et leurs personnes ».
— Verset 91, chapitre 9 : « Il n’y a rien à reprocher aux faibles, aux malades, à ceux qui n’ont pas les moyens, s’ils sont sincères envers Dieu et son prophète. Il n’y a pas non plus de raison de s’en prendre à ceux qui…… venus à toi pour que tu leur fournisses une monture, et auxquels tu as dit « je ne trouve aucune monture à vous donner » sont repartis, les yeux débordants de larmes, tristes de ne pouvoir en faire la dépense ».
— Verset 17, chapitre 48 : « Il n’y a aucune faute à reprocher à l’aveugle, il n’y a aucune faute à reprocher au boiteux, il n’y a aucune faute à reprocher au malade, s’ils s’abstiennent de combattre ».
— Verset 60, chapitre 8 : « Préparez, pour lutter contre eux, tout ce que vous trouverez, de forces et de cavalerie… »
Sans oublier…
Verset 35, chapitre 47. « Ne faiblissez pas ! Ne faites pas appel à la paix quand vous êtes les plus forts. Dieu est avec vous : il ne vous privera pas de la récompense due à vos œuvres ».
Autrement dit c’est le phénomène psychologique bien connu appelé tafia : lorsque les musulmans sont faibles et en position de minorité, ils doivent se comporter conformément à l’esprit des versets de La Mecque (paix, tolérance et amour) ; mais quand ils sont forts, en revanche, ils doivent passer à l’offensive et se fonder sur les ordres formulés dans les versets de Médine (guerre et conquête).
Et les musulmans qui combattent sur le sentier de Dieu ainsi que les musulmans inactifs ne sont pas égaux. Conclusion : en terres d’islam (Dar al islam), les musulmans petits djihadistes passent avant les musulmans inactifs ou passifs.
En revanche, on peut effectivement considérer que dans les versets de la période mecquoise, l’emploi du terme djihad et ses dérivés, semble bien plutôt désigner une guerre spirituelle, c’est-à-dire résister à l’impiété environnante.
Si tant est que voir Dieu partout (panthéisme druidique ou paganisme philosophique et réfléchi) soit de l’impiété.
Le plus connu des sens du djihad est donc le djihad par l’épée ou « Petit djihad pour la plus grande gloire de Dieu » (djihad fi Sabilillah). Lorsque les musulmans font la guerre aux infidèles, après qu’ils les ont appelés à embrasser l’islam et à payer l’impôt des dhimmis après avoir été humiliés (ce qu’exige en résumé la formule saghirouna qui conclut le verset 29 du chapitre 9), mais qu’ils ont refusé.
Le caractère obligatoire du djihad s’exprime dans la conception manichéenne du monde vu par la théologie musulmane, qui oppose le royaume de l’islam au royaume de la guerre. Le premier, Dar al-Islam, est le « royaume de la soumission à Dieu », le monde où la charia régit la vie sociale ; le second, Dar al-Harb (le royaume de la guerre), est le monde non musulman.
Al-Chafi'i a exposé le premier la doctrine selon laquelle le djihad doit être une guerre permanente contre les non-croyants et pas seulement lorsque ces derniers entrent en conflit avec l’islam ; en se fondant sur le verset : « Tuez les polythéistes (mouchrikoun) partout là où vous les trouverez » (Coran chapitre 9, verset 5).
Pour l’islam, le monde est donc divisé en deux, les musulmans et les non-musulmans. Les premiers composent la communauté islamique, l’Oumma islamiya, « la meilleure communauté *** suscitée pour les Hommes » (chapitre 3, verset 110), détenant les territoires du « Dar al-Islam » (demeure de l’islam) et régis par la loi islamique. Mais n’étant limitée ni dans le temps ni dans l’espace : l’Oumma englobe également toute communauté musulmane établie en terre infidèle et conservant son identité islamique.
Les non-musulmans, quant à eux, sont des « harbiyoun », habitants du « Dar al-Harb », pays de la guerre, ainsi dénommés parce qu’ils doivent passer un jour ou l’autre sous juridiction islamique, soit par la guerre (harb), soit par la conversion. Dans le Dar al-Islam, le non-musulman est « toléré » s’il est monolâtre ou adepte d’une religion abrahamique (AhI al Kitab « Gens du Livre », juifs, chrétiens, sabéens-mandéens ou autres monothéistes (zoroastriens, mages iraniens). Mais ces « Gens du Livre » ne peuvent être que subordonnés à la Loi islamique, la Charia. Ils sont contraints de payer de façon humiliante (saghirouna) un impôt spécifique (djizya) leur valant d’être « protégés », c’est-à-dire placés sous protectorat en tant que citoyens de seconde zone. L’islam interdit formellement à des non-musulmans d’occuper des fonctions politico-administratives leur donnant un droit d’injonction sur les croyants. Le musulman qui accepte une telle situation commet un péché, même si l’infidèle est un indigène (maronites du Liban ; coptes d’Égypte ; hindous du Cachemire, chrétiens des Philippines, etc.).
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*Voici tant d’années que je te sers, sans avoir jamais transgressé un seul de tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau, à moi, pour festoyer avec mes amis ; et puis ton fils que voilà revient-il, après avoir dévoré ton bien avec les femmes, tu fais tuer pour lui le veau gras ! ».
** Dans certaines circonstances données, mais seulement dans ses circonstances, toute agglomération d’hommes possède des caractères nouveaux fort différents de ceux de chacun des individus qui la composent. La personnalité consciente s’évanouit, les sentiments et les idées de toutes les unités sont orientés dans une même direction. Il se forme alors une âme collective, transitoire sans doute, mais présentant des caractères très nets. Elle forme un seul être » (Gustave Le Bon, Psychologie des foules). Il existe donc des psychologies collectives, celle des foules organisées, structurées, mais il importe de distinguer. La psychologie collective du nazisme en tant que foule organisée ou structurée n’était pas celle du nazisme, la psychologie collective du judaïsme n’est pas celle du christianisme et les deux diffèrent de la psychologie collective du paganisme d’il y a deux mille ans dans cette partie du monde.
*** Pour le christianisme, c’est tout le contraire, les hommes même membres de l’Église, sont d’abord et avant tout des pécheurs. On passe d’un extrême à l’autre.
LE PETIT DJIHAD DE CONVERSION, OFFENSIF, EST DONC UN DEVOIR.
La quasi-totalité des sourates refusant le début de dialogue qui s’était péniblement ébauché à La Mecque du temps où Mahomet était dans l’opposition date de la période médinoise de la vie de Mahomet.
Les premiers musulmans ayant suivi Mahomet à Yathrib/Médine (les mouhadjiroun) hésitaient à faire la guerre à leurs familles restées dans le camp mecquois, ce qui irritait profondément Mahomet. Il reçut fort opportunément les révélations suivantes à ce sujet : « Le combat vous est prescrit, et vous l’avez en aversion, mais il est possible d’avoir de l’aversion pour une chose et qu’elle soit pourtant un bien » (chapitre 2, 216).
Verset 81, chapitre 9. « Ils éprouvaient de la répulsion à combattre dans le chemin de Dieu avec leurs biens et leur personne. Ils disaient : ne partez pas en campagne par ces chaleurs ! Dis : « le feu de l’enfer est plus ardent ».
De nombreux autres versets montrent que Mahomet dut constamment insister en ce sens et que nombre des premiers musulmans n’étaient nullement enthousiasmés à l’idée de mourir au
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combat (exemple verset 65, chapitre 8. « Ô prophète ! Encourage les croyants au combat ! ») d’où de nouveau le poids écrasant de la personnalité de Mahomet quant à cet aspect de l’islam : le devoir de participer au petit djihad, d’une façon ou d’une autre, et pas seulement en esprit.
Heureusement pour l’islam naissant, l’appât du butin en hommes (ou plus exactement en femmes) et en biens matériels pouvait aussi mettre en branle certains hypocrites ou ralliés de la dernière heure. Voir le cas des Mecquois après la bataille de Honeïn en 630 (à l’occasion du siège de Taïf).
Là aussi cher lecteur nous ne parlerons pas de votre islam qui n’est qu’amour calme et volupté ou spiritualité soufie, mais du faux islam qui s’appuie sur les versets abrogeant du Coran sur les hadiths et sur les réflexions de certains ignares en la matière comme le théologien hanbalite Ibn Taymiya.
LE MONDE ENTIER DOIT OBÉIR À DIEU.
En arabe « djihad » signifie lutte. En théologie musulmane cela signifie guerre sainte menée pour Dieu : djihad fi Sabilillah. Tel est donc le sens de la guerre sainte ou « petit djihad ». De nombreux versets y sont consacrés. Une centaine environ. 19 % du Coran traite en effet de la conquête ou à la soumission des non-musulmans. Ces versets du Coran ont servi de base à l’établissement de la théorie de l’obligation de faire la « guerre » (sainte) = djihad fi Sabilillah ou petit djihad pour la plus grande gloire de Dieu.
Que le musulman pieux veuille bien pardonner à l’avance ce qui va suivre et qui tombe hélas ! sous le coup de l’interdiction par Dieu de toute contestation de toute discussion ou de tout dialogue. Car nous allons effectivement encore une fois dans les pages qui suivent discuter des versets du Coran : de leur sens, de leur pertinence, de leur adéquation, de leur valeur éthique philosophique ou scientifique. Comment faire autrement ?
129 versets enjoignent aux musulmans le petit djihad, genre inédit de guerre perpétuelle et universelle contre le monde entier. Liste non exhaustive de ces versets appelant sans ambiguïté à l’affrontement physique contre les non-musulmans.
Chapitre 2, versets 54,190,191,192,193, 216,217,244.
Chapitre 3, versets 13,122,123,125, 27,139,140,141,142,152,153,154,157,158,168,169,170,171,200.
Chapitre 4, versets 71, 74,75,76,77,84,94,95,96, 100,104.
Chapitre 5, versets 33,35.
Chapitre 8, verset 1, 7, 8,9,10,12,13,15,16,17,18,19,39,43,45,46,47,48,57,59,60, 62,65,66,67,69.
Chapitre 9, versets 5,9,10,12,13,14,15,16,18,19,20,22,25,26,29,36,38,39,41,42,43,44,46,47,49,73,
81,86,91,92,93,95,96,111,121,123.
Chapitre 22, versets 58,78.
Chapitre 33, versets 9,10,11,14,15,16,20,22,26,27,60,61.
Chapitre 47, versets 4,7,31,35.
Chapitre 48, versets 11,16,17,20,21,24,25.
Chapitre 61, versets 4,11, 12,13.
Chapitre 66, verset 9…
Etc.…
RAPPEL DES TEXTES DE CE DIALOGUE INTERRELIGIEUX MUSCLÉ (la répétition est l’art d’enseigner)
Verset 193, chapitre 2. « Et combattez-les jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de fitna et que la religion soit entièrement vouée à Dieu seul. S’ils cessent, plus d’hostilités, sauf contre ceux qui sont injustes ».
Verset 216, chapitre 2. « Le combat vous a été prescrit alors qu’il vous est désagréable. Or, il se peut que vous ayez de l’aversion pour une chose alors qu’elle est un bien. Et il se peut que vous aimiez une chose alors qu’elle est mauvaise ».
Verset 28, chapitre 3. « Que les croyants ne prennent pas pour amis des incroyants de préférence aux croyants. Celui qui agirait ainsi n’aurait rien à attendre de Dieu ». NDLR. Le mot arabe traduit par « amis » est aouliyaa qui signifie à la fois protecteur, tuteur, aide.
Verset 56, chapitre 3. « Quant à ceux qui ne croient pas, je les châtierai d’un terrible châtiment en ce monde et dans la vie future ».
Versets 74 à 77, chapitre 4. « Que ceux qui troquent la vie présente contre la vie future combattent donc dans le chemin de Dieu. Nous accorderons une récompense sans limites à celui qui combat dans le chemin de Dieu, qu’il soit tué ou qu’il soit victorieux. Pourquoi ne combattez-vous pas dans le chemin de Dieu… les croyants combattent dans le chemin de Dieu, les incrédules combattent dans le chemin des taghout. Combattez donc les suppôts de Satan… Quand le combat leur est prescrit, voici que certains d’entre eux craignent les hommes de la crainte due à Dieu ou d’une crainte plus forte. Ils disent : ‘Notre seigneur ! Pourquoi nous as-tu prescrit le combat ? Pourquoi ne pas l’avoir reporté ?’ Dis : la jouissance de la vie de ce monde est précaire ; la vie future est meilleure pour celui qui se garde de tout mal. Vous ne serez pas lésés d’une pellicule de date ».
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Verset 89, chapitre 4. « Ils aimeraient vous voir mécréants, comme ils ont mécru : alors vous seriez tous égaux ! Ne prenez donc pas d’alliés parmi eux, jusqu’à ce qu’ils émigrent dans le sentier de Dieu. S’ils retournent à l’infidélité, saisissez-les et mettez-les à mort partout où vous les trouverez. Ne cherchez parmi eux ni protecteur ni ami ».
Verset 91, chapitre 4. « Vous trouverez d’autres gens qui désirent la paix avec vous et la paix avec leur propre peuple… s’ils ne se retirent pas loin de vous ; s’ils ne vous offrent pas la paix ; s’ils ne déposent pas leurs armes, saisissez-les, tuez-les où que vous les trouviez. Nous vous donnons tout pouvoir sur eux ».
Verset 95, chapitre 4 : « Les croyants qui s’abstiennent de combattre, à l’exception des infirmes, et ceux qui combattent dans le chemin de Dieu avec leurs biens et leurs personnes, ne sont pas égaux. Dieu préfère ceux qui combattent avec leurs biens et leurs personnes à ceux qui s’abstiennent de combattre ».
Verset 101, chapitre 4. « Les incroyants sont vos ennemis déclarés ».
Versets 33 et 34 du chapitre 5. « Telle sera la rétribution de ceux qui font la guerre à Dieu et à son prophète, et de ceux qui sèment la corruption dans le pays : ils seront tués ou crucifiés, ou bien leur main droite et leur pied gauche seront coupés, ou bien ils seront expulsés du pays ».
Ce passage du Coran soulève plusieurs questions.
Que signifie faire la guerre à Dieu ? Écrire un livre mettant en doute l’existence de Dieu, ou du moins l’existence du Dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob ne peut-il pas déjà être considéré comme faire la guerre à Dieu ?
Idem pour la proposition suivante : « ceux qui se livrent à la corruption dans le pays… » Qu’est-ce à dire exactement ? Refuser de se convertir, écrire des livres du genre de ceux mentionnés plus haut, se défendre, y compris les armes à la main… N’est-ce pas déjà exercer de la violence sur terre ?
Même question pour la notion de Trinité. Défendre la conception chrétienne de la Trinité n’est-ce pas déjà faire la guerre à Dieu ?
Verset 51, chapitre 5. « Ô vous qui croyez ! Ne prenez pas pour amis les juifs et les chrétiens, ils sont amis les uns des autres ».
Verset 12, chapitre 8. Quand ton Seigneur révéla aux Anges : je suis avec vous ; affermissez donc les croyants. Je vais jeter l’effroi dans les cœurs des mécréants. Frappez-les donc au cou et frappez-les sur les bouts des doigts. »
Verset 17, chapitre 8. « Ce n’est pas vous qui les avez tués, mais Dieu qui les a tués ».
Verset 39, chapitre 8. « Combattez-les jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de fitna * et que le culte soit uniquement voué à Allah (Dieu) ».
Verset 60, chapitre 8. « Préparez, pour lutter contre eux, tout ce que vous trouverez, de forces et de cavalerie… »
Verset 65, chapitre 8. « Ô Prophète, appelle les croyants à combattre. S’il y a vingt hommes fermes parmi vous, ils en vaincront deux cents ; et s’ils sont une centaine, ils vaincront un millier d’incroyants, parce que ce sont des gens stupides ».
Verset 67, chapitre 8. « Il n’appartient pas à un prophète de faire des captifs tant que, sur la terre, il n’a pas complètement vaincu les incroyants ». Note de la rédaction : ce verset est à nuancer. La pratique de la rançon était aussi monnaie courante.
Verset 74, chapitre 8. « Et ceux qui ont cru, émigré et lutté dans le sentier de Dieu, ainsi que ceux qui leur ont donné refuge et porté secours, ceux-là sont les vrais croyants : à eux, le pardon et une récompense généreuse ».
Verset 14, chapitre 9. « Combattez-les ! Dieu les châtiera par vos mains ».
Verset 20, chapitre 9. « Ceux qui auront combattu dans le chemin de Dieu avec leurs biens et leur personne seront placés sur un rang très élevé auprès de Dieu ».
Verset 30, chapitre 9. « Les juifs disent : Ozaïr est le fils de Dieu. Les chrétiens disent : le Messie est le fils de Dieu. Telles sont les paroles de leurs bouches ; elles ressemblent à celles des infidèles d’autrefois. Que Dieu leur fasse la guerre ! » (Note : On peut vraiment se demander d’où vient cette idée ridicule : les juifs affirmant qu’Ozaïr / Esdras est le fils de Dieu !)
Verset 38, chapitre 9. « Ô vous qui croyez ! Qu’avez-vous ? Lorsque l’on vous a dit : élancez-vous dans le chemin de Dieu », vous vous êtes appesantis sur la terre. Préférez-vous la vie de ce monde à la vie future ? Si vous ne vous lancez pas dans le combat, Dieu vous châtiera d’un châtiment douloureux ».
Versets 41 et suivants chapitre 9. « Légers ou lourds, élancez-vous au combat. Luttez avec vos biens et vos personnes dans le chemin de Dieu. C’est un bien pour vous si vous saviez. S’il s’était agi d’une affaire à leur portée ou d’un court voyage, ils t’auraient suivi. Mais la distance leur a paru longue… Ceux qui croient en Dieu et au jour dernier ne te demandent pas de dispense quand il s’agit de combattre avec leurs biens et leurs personnes ».
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Verset 73, chapitre 9. « Ô prophète ! Combats les incroyants et les hypocrites ; sois dur envers eux ! Ils iront en enfer ».
Verset 86, chapitre 9. Et lorsqu’une Sourate est révélée : « Croyez en Dieu et luttez en compagnie de son messager », les gens qui ont les moyens (de combattre) parmi eux te demandent de les dispenser (du combat), et disent : Laisse-nous avec ceux qui restent ».
Verset 88, chapitre 9. « Mais le prophète et les croyants combattent avec leurs biens et leur personne. Voilà ceux qui jouiront du meilleur, voilà ceux qui seront heureux ».
Verset 90, chapitre 9. « Ceux des Bédouins qui allèguent des excuses ont demandé à être dispensés du combat. Ceux qui ont accusé de mensonge Dieu et son prophète sont restés chez eux. Un châtiment douloureux atteindra bientôt ceux d’entre eux qui sont incroyants ».
Verset 91, chapitre 9. « Il n’y a rien à reprocher aux faibles, aux malades, à ceux qui n’ont pas de moyens, s’ils sont sincères envers Dieu et son prophète. Il n’y a pas non plus de raison de s’en prendre à ceux qui…… venus à toi pour que tu leur fournisses une monture, et auxquels tu as dit « je ne trouve aucune monture à vous donner » sont repartis, les yeux débordants de larmes, tristes de ne pouvoir en faire la dépense ».
Verset 111, chapitre 9. « Dieu a acheté aux croyants leur personne et leurs biens pour leur donner le Paradis en échange. Ils combattent dans le chemin de Dieu : ils tuent et ils sont tués ».,
Verset 123, chapitre 9. « Ô vous qui croyez ! Combattez ceux des incroyants qui autour de vous. Qu’ils vous trouvent durs. Sachez que Dieu est avec ceux qui le craignent ».
Verset 61, chapitre 33. « Ce sont des maudits, où qu’on les trouve, ils seront pris et tués sans pitié ».
Verset 35, chapitre 47. « Ne faites pas appel à la paix quand vous êtes les plus forts. Dieu est avec vous, il ne vous privera pas de la récompense due à vos œuvres ».
Verset 16, chapitre 48. « Dis à ceux des Bédouins qui restèrent en arrière : ‘Vous serez bientôt appelés contre des gens d’une force redoutable. Vous les combattrez à moins qu’ils n’embrassent l’Islam. Si vous obéissez, Dieu vous donnera une belle récompense, et si vous vous détournez comme vous vous êtes détournés auparavant, il vous châtiera d’un châtiment douloureux’ ».
Verset 10, chapitre 57 : « Vous n’êtes pas tous semblables : il y en a parmi vous qui ont dépensé leurs biens et qui ont combattu avant la victoire alors que d’autres ont attendu, pour offrir leurs biens et s’engager dans le combat que la victoire ait été remportée. Les premiers seront élevés de plusieurs degrés au-dessus des autres ».
Verset 4, chapitre 61. « Dieu aime, en vérité, ceux qui combattent dans son chemin en rangs serrés ».
Versets 10-12, chapitre 61. « Ô vous les croyants ! Vous indiquerai-je un marché qui vous sauvera d’un châtiment douloureux ? Vous croyez en Dieu et en son prophète ; vous combattez dans le chemin de Dieu avec vos biens et vos personnes … et Dieu vous pardonnera vos péchés, il vous fera entrer au Paradis… ».
Verset 9, chapitre 66. « Combats les incroyants et les hypocrites, sois dur envers eux ! »
* Fitna. Terme arabe pouvant se traduire par discorde dissension hérésie trouble.
HADITHS APPELANT AU PETIT DJIHAD.
Peu de versets du Coran expliquent clairement que le petit djihad c’est la guerre. Il existe néanmoins de nombreux hadiths comblant cette lacune et qui montrent bien comment les contemporains de Mahomet eux, ont compris le sens de ce terme (djihad).
Les quelques hadiths qui suivent explicitent en effet sans équivoque comment la notion de petit djihad doit être comprise.
La plus sérieuse de toutes les collections Hadith est celle de Boukhari. Le petit djihad est mentionné plus de 200 fois en ce qui concerne les paroles de Mahomet et chaque fois avec une claire connotation de guerre sainte, avec seulement quelques exceptions possibles (traitant du soutien d’une femme pendant une guerre sainte).
Boukhari. Tome 1. Livre 2. Hadith N° 25. L’Envoyé de Dieu a dit : « J’ai reçu l’ordre de lutter contre ces gens jusqu’à ce qu’ils attestent que nul ne doit être adoré sauf Dieu et que Mahomet est l’Envoyé de Dieu ; qu’ils disent la prière comme il faut et paient l’aumône obligatoire. S’ils s’exécutent alors j’épargnerai leurs vies et leurs biens sauf si c’est contraire à la loi et pour le reste ils n’auront de comptes à rendre qu’à Dieu.
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Boukhari. Tome 1. Livre 2. Hadith N° 35. Le prophète a dit : « Celui qui prend part aux guerres saintes pour la cause de Dieu, sans que rien ne l’y oblige sinon sa croyance en Dieu et en son apôtre, recevra de Dieu sa récompense : le butin (s’il survit) ou le paradis (s’il meurt en martyr) ».
Boukhari. Tome 1. Livre 8. Hadith N° 387. Mahomet. « J’ai reçu l’ordre de combattre ces gens jusqu’à ce qu’ils disent : nul n’a le droit d’être adoré, sauf Dieu. Et s’ils le disent, prient comme nous, se tournent vers la Qibla comme nous et sacrifient comme nous sacrifions, alors leur sang et leur propriété seront sacrés pour nous… » (Rapporté par Anas bin Malik.)
Boukhari. Tome 4. Livre 52, hadith 73. Rapporté par Abdoullah bin Abi Aoufa « L’apôtre de Dieu a dit : sache que le paradis est à l’ombre des épées ».
Boukhari. Tome 4. Livre 52. Hadith N° 177. « L’apôtre de Dieu a dit, ta dernière heure ne viendra pas avant que tu n’aies à combattre les juifs, mais la pierre derrière laquelle un juif se cachera te dira : « Musulmans ! Il y a un juif qui se cache derrière moi, tue-le ! »
Bukhari. Tome 4. Livre 52. Hadith N° 220. L’apôtre de Dieu a dit… et j’ai vaincu par la terreur ».
Boukhari. Tome 4. Livre 52. Hadith N° 256. On a demandé au Prophète si on pouvait attaquer les guerriers païens la nuit en mettant ainsi en danger leurs femmes et leurs enfants. Le Prophète a répondu : « Ils (c’est-à-dire les femmes et les enfants) en sont également (des païens) ».
Boukhari. Tome 4. Livre 53. Hadith 392. « Alors que nous étions à la mosquée, le Prophète sortit et dit : allons chez les juifs. Nous allâmes jusqu’ à leur Baït-ul-Midras (école juive). Il leur a dit : « Si vous embrassez l’Islam, vous serez saufs. Vous devez savoir que la terre appartient à Dieu et à son apôtre, et je vais vous expulser de ce pays. Donc, si quelqu’un parmi vous a des biens, il est autorisé à les vendre, sinon vous devez savoir que la Terre appartient à Dieu et à son apôtre ».
Bukhari. Tome 5. Livre 59. Hadith 716. Rapporté par Ibn Abbas : jeudi la maladie de l’apôtre de Dieu empira et il demanda quelque chose afin d’écrire… Les personnes présentes ne le firent pas immédiatement… Certains demandèrent même : « Qu’est-ce qui lui prend ? Croyez-vous qu’il délire ? Demandez-lui ce qui ne va pas ». Ils s’approchèrent donc du prophète et lui demandèrent. Le Prophète répondit : « Laissez-moi, car je vais mieux que vous ne le voudriez ». Ensuite, il leur ordonna de faire trois choses : « Éliminez les païens de la péninsule arabique ; respectez les délégations étrangères et offrez-leur des cadeaux comme vous m’avez vu le faire avec eux « (Saïd Bin Doubaï, le rapporteur de seconde main, a précisé qu’Ibn Abbas n’avait pas parlé du troisième ordre, ou qu’il a dit : « Je l’ai oublié »).
Muslim 1,30. « Le Messager de Dieu a dit : j’ai reçu l’ordre de lutter contre eux tant qu’ils ne reconnaissent pas qu’il n’y a de Dieu qu’Allah. »
Muslim 1,149. Abou Dharr a dit : j’ai demandé au messager de Dieu, quelle est la meilleure des actions ? Il (le Saint Prophète) a répondu : croire en Dieu et faire le petit djihad… "
Muslim 20, 4645. « Il a été rapporté d’après Abou Saïd Khoudri que le Messager de Dieu lui a dit : celui qui accepte avec joie que Dieu soit son Seigneur, l’Islam sa religion et Mahomet son Apôtre a droit au paradis. (Mais) il y a une chose qui au paradis fait qu’un homme occupe un rang cent fois plus élevé. Abou Saïd demanda : quelle est cette chose ? Il répondit : le petit djihad sur le sentier de Dieu ! »
Muslim 20, 4696. « Celui qui est mort sans avoir combattu dans la voie de Dieu ni exprimé le désir (ou la volonté) de le faire meurt de la mort des hypocrites. »
Abou Daoud 14 : 2527. Le Prophète a déclaré : lutter sur le sentier de Dieu (petit djihad) vous incombe à vous et à chaque souverain, qu’il soit pieux ou impie.
CONCLUSION SUR LE PETIT DJIHAD DANS LA SIRA ET LES HADITHS.
Que disent la sira et les hadiths à propos du petit djihad ? L’information la plus importante qu’ils recèlent est que Mahomet, lors de ses dix années passées à Yathrib/Médine et jusqu’à sa mort, a fait 82 petits djihads dont 26 menés personnellement. Ces 26 petits djihads sont appelés gazouas. Les hadiths nous montrent également que la plupart de ces gazouas étaient des expéditions dans lesquelles on tombait sur l’ennemi sans crier gare. La sira Les hadiths nous fournissent également maints détails concernant la richesse et le nombre d’hommes, de femmes ou d’enfants, capturés à l’occasion de ces gazouas. Mais avant de se faire une idée de l’ampleur de ce ganima (pillage), il importe d’abord de voir à quel point les Révélations coraniques concernant le petit djihad sont confirmées ou infirmées par les hadiths.
Il ressort premièrement de tous ces hadiths que le petit djihad est sans conteste le plus grand devoir d’un musulman. Selon l’imam Muslim par exemple, « Il a été rapporté d’après Abou Horaïra que le Messager de Dieu a déclaré : celui qui est mort sans avoir combattu dans la voie de Dieu ni exprimé le désir (ou la volonté) de le faire, meurt de la mort d’un hypocrite » (Sahih Muslim, n° 4696).
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NDLR. Pour bien comprendre ce hadith, il faut tout d’abord connaître le sens du mot hypocrite dans ces textes. Le terme arabe mounafiq qui est généralement utilisé a en fait un sens très précis dans le Coran. Il désigne des habitants de Yathrib/Médine qui, après avoir hébergé Mahomet ainsi que ses partisans, avaient peu à peu désenchanté mais n’avaient pas osé entrer en rébellion ouverte contre eux. Le chef de ce parti de Médinois mécontents était un certain Abdoullah bin Oubaï, un nom qui sera maudit ou exécré à jamais dans l’Islam. Le Coran lui-même a maudit ces prétendus hypocrites en ayant recours pour cela aux mots ou aux adjectifs les plus durs. Les hadiths précisent que leur récompense dans l’au-delà est située au plus bas niveau de l’enfer – un niveau inférieur même à celui réservé aux païens. Cf le 9e cercle de l’enfer selon Dante.
Vu le contexte il ressort donc clairement du hadith ci-dessus que le petit djihad était le devoir suprême des musulmans, et que ne pas vouloir ni désirer le faire lui faisait courir le risque de subir dans l’au-delà le terrible sort des mounafiquoun. En un mot ce hadith encore plus dur que le Coran lui-même stipule qu’un musulman pacifiste n’est pas un musulman du tout.
Il ressort ensuite de tous ces hadiths que la récompense du moudjahid (djihadiste) dans l’au-delà doit être supérieure à celle d’un musulman non combattant. Nous avons vu que le Coran disait la même chose en attribuant au moudjahid (djihadiste) une plus grande récompense dans l’au-delà que celle destinée aux croyants pacifistes (4, 95 ; 9,19 ; 9,20 ; 57,10). L’étendue de sa grandeur est décrite dans le hadith suivant : « Il a été rapporté d’après Abou Saïd Khoudri que le Messager de Dieu lui a dit : celui qui accepte avec joie que Dieu soit son Seigneur, l’Islam sa religion et Mahomet son Apôtre a droit au paradis. (Mais) il y a une chose qui au paradis fait qu’un homme occupe un rang cent fois plus élevé. Abou Saïd demanda : quelle est cette chose ? Il répondit : le petit djihad sur le sentier de Dieu ! » (Sahih Muslim, n° 4645.)
Ce hadith spécifie clairement que la différence entre un musulman pacifiste et un moujdahid ou djihadiste musulman est aussi grande que la distance séparant le ciel de la terre et que la récompense des pacifistes ne s’élève pas plus haut que les montagnes terrestres.
Troisièmement. Les hadiths qui se réfèrent à la nature sanglante du djihad ne sont pas rares. Le hadith numéro 4549 du Michkat al-Massabih stipule ce qui suit : « D’après le vénérable Abou Moussa, le Messager de Dieu a déclaré : les portes du ciel se trouvent à l’ombre des épées. En entendant ces paroles, un homme se leva et demanda : Ô, Abou Moussa, avez-vous entendu personnellement ce hadith ? Oui, répondit Abou Moussa, alors l’homme s’en alla trouver ses compagnons et leur dit : la paix soit avec vous. Et en disant cela il brisa le fourreau de son épée et courut sus à l’ennemi. Il en tua beaucoup avec cette épée avant de finir martyr lui-même ».
Le meilleur passeport du musulman pour aller paradis est donc clairement son épée. La conviction personnelle de Mahomet transparait particulièrement dans les hadiths suivants. « Il a été rapporté d’après Abou Horaïra : j’ai entendu le Messager de Dieu dire, par l’être dans les mains duquel se trouve ma vie, je préfère mourir sur le sentier de Dieu, puis être ressuscité afin d’être de nouveau tué sur son chemin » (Sahih Muslim, No. 4631).
Quatrièmement. La position de Mahomet vis-à-vis du pacifisme apparaît clairement dans le hadith suivant, d’après le vénérable Oumama : « nous partîmes un jour en campagne avec le Prophète. L’un d’entre nous passa devant un puits creusé à côté d’un champ parsemé de verdure. L’endroit fit naître en lui un étrange désir (celui de mener une vie de reclus) et il pensa : combien serait-il glorieux pour moi si je pouvais renoncer aux vanités de ce monde et résider en ce lieu (pour le reste de mes jours) ? Il en demanda la permission au Messager de Dieu. Sa Sainteté lui répondit (écoutez-moi bien, hommes de peu de foi) : je n’ai pas été envoyé (par Dieu) pour prêcher la religion des Juifs ni des chrétiens. Œuvrer sur le sentier de Dieu rien qu’une seule matinée ou un seul après-midi vaut mieux que la terre entière, quelle que soit sa richesse. Et ne pas quitter le champ de bataille vaut mieux que de s’engager dans d’interminables litanies pendant plus de 60 ans » (Michkat, n° 4489).
Ce hadith montre que pour le prophète de l’islam le pacifisme du christianisme initial (ou du jaïnisme) n’était pas une option.
Cinquièmement. Il existe des hadiths qui montrent bien que le but premier du petit djihad est l’expansion de l’islam par la guerre. Nous avons déjà vu que cela était dit par le Coran lui-même. Le hadith suivant ne se contente pas de réaffirmer cet objectif, mais explique également la manière dont un moudjahid (djihadiste) doit procéder : « Combattez au nom de Dieu et sur le sentier de Dieu. Luttez contre ceux qui ne croient pas en Dieu… Lorsque vous rencontrez des ennemis qui sont polythéistes, invitez-les à faire trois choses… Invitez-les à (accepter) l’Islam… S’ils refusent d’accepter l’islam, acceptez d’eux la djizya. S’ils refusent de payer cet impôt, demandez l’aide de Dieu et combattez-les » (Sahih Muslim, n° 4294).
Il convient d’ajouter que, dans ce hadith au moins, la séquence ne semble pas inclure le ghanima (pillage). Le triptyque des actions discutées ici semble exclure le pillage des biens des infidèles et
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l’asservissement de leur population. Cette lacune est néanmoins abondamment complétée par d’autres hadiths qui seront abordés dans le chapitre suivant.
Sixièmement. Arrivés à ce stade de notre raisonnement en six points, il importe de comprendre le sens de deux expressions techniques liées au petit djihad. Le terme ghazi (guerrier vainqueur d’infidèles) et le mot chahid (témoin), c’est-à-dire personne qui est morte pour attester (chahadah) de la vérité de l’islam en luttant contre les infidèles.
Il y a des hadiths qui décrivent la meilleure chahada offerte par un moudjahid devenu « martyr ».
(Question posée) « quel est le genre de martyre qui vaut le plus dans le petit djihad ? Le Messager de Dieu a dit : quand un « martyr » (sic) fait couler le sang (d’un infidèle), il doit (avant de tomber mort) couper les pieds du cheval dudit infidèle » (Michkat, n ° 4530).
Le traducteur qui a commenté ce hadith précise : « faire gicler le sang de l’infidèle et blesser sa monture ».
Ce qui ressort clairement de tous ces hadiths donc c’est que le petit djihad a 4 objectifs.
1) Convertir.
2) Réduire ou faire disparaître les incroyants. Verset 67, chapitre 8. « Il n’appartient pas à un prophète de faire des captifs tant que, sur la terre, il n’a pas complètement massacré les incroyants ». NDLR. Ce verset est à nuancer. La pratique de la rançon était aussi monnaie courante.
3) Lever l’impôt spécifique caractéristique de la dhimmitude (en règle générale des judéo-chrétiens). Il y a lieu de souligner que cet impôt spécial doit être personnellement payé et dans des conditions humiliantes (saghirouna).
4) Faire du butin matériel ou humain. Il existe d’ailleurs tout un chapitre du Coran (le numéro 8) portant ce titre : Al Anfal. Collecte du nouvel impôt levé sur les judéo-chrétiens ou demandes de rançon ne sont pas en effet les seules raisons du petit djihad. Un autre objectif est aussi le butin ou ghanima ainsi que le reconnaît le verset 69 du chapitre 8. « Prenez du butin ce qui est permis et bon ».
Cette littérature pléthorique a d’ailleurs beaucoup d’autres choses à dire sur le petit djihad. Pour résumer celles déjà mentionnées, on peut donc dire que les hadiths gardent toutes les injonctions du Coran, mais ajoutent…
1) Que le petit djihad est le devoir suprême d’un musulman (c’est souligné par les dires exaltés de Mahomet à propos du « but de sa vie »).
2) Les buts concrets de l’expansion musulmane, argent de la djizya et tuerie d’infidèles, sont énumérés dans la séquence du hadith N° 4294 du Sahih Muslim. Le Coran ne mentionne pas cette séquence.
3) Les derniers moments de la vie terrestre du martyr sont plus détaillés dans les hadiths. Le Coran n’a pas une telle clarté, bien que la mise à mort des infidèles et leur anéantissement soient toujours implicites, et même parfois explicites, dans nombre de ses sourates.
4) Le pacifisme théorique des ermites chrétiens est clairement rejeté dans les hadiths. Le Coran est silencieux sur le sujet.
LA DOCTRINE DU PETIT DJIHAD (sources secondaires sur le petit djihad).
— Cook, David. 2005. Comprendre le Djihad. Berkeley et Los Angeles : University of California Press.
— Khaddouri, Majid. 1969. Guerre et paix dans le Droit musulman. Baltimore : Johns Hopkins Press.
— Peters, Rudolph. 1996. Le djihad dans l’islam classique et moderne : A Reader. Princeton : Markus Wiener Publishers.
— Morabia, Alfred. 1993. Le djihad dans l’Islam médiéval : Le combat sacré des origines au XIIe siècle. Paris : Albin Michel. Sous réserve. Le français, surtout le français juridique, de cet auteur, n’est pas facile à comprendre.
La doctrine classique du petit djihad est en soi une construction post-mahométane qui puise dans plusieurs sources, la pratique ayant plus souvent influencé la théorie que le contraire. Le sens du djihad comme guerre sainte offensive (al talab oua’l ibtida) a dominé la tradition juridique et la
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qualification de djihad a même fini par s’étendre aux diverses répressions contre les hérétiques, les rebelles et les brigands, cela à une époque tardive toutefois chez les sunnites.
Ainsi que le souligne AI-Ahmadou, le sens du concept petit djihad a donc connu une évolution au cours de la révélation coranique, répartie en deux périodes.
Durant la période mecquoise de la révélation (610-622), le djihad avait une signification spirituelle et morale. Il s’agissait alors de l’effort personnel que le musulman devait faire pour vivre pieusement tout en résistant au milieu ambiant généralement hostile pour diverses raisons malgré le caractère a priori tolérant du paganisme philosophique et réfléchi des élites mecquoises d’alors, imprégnées de culture grecque, romaine, perse, juive, chrétienne, syriaque, manichéenne, zoroastrienne.
C’est au cours de l’époque médinoise (622-632) que le terme dépasse ce simple sens spirituel pour inclure, en outre, la lutte individuelle et collective contre l’ennemi.
Le petit djihad n’est en effet apparu dans l’islam qu’en 624, après le raid victorieux de Dakhla en janvier 624. Un coup de main tenté et réussi (une dizaine de musulmans à bout de ressources contre quatre caravaniers couraïchites donc ennemis), mais ayant eu lieu lors d’une période de trêve annuelle pour les Arabes de cette époque, les mois sacrés.
D’où un désaveu de Mahomet pour commencer. Mais là encore Dieu veillait au grain et intervint pour préciser que ce n’était pas là le pire des sacrilèges, que combattre pendant les mois sacrés est certes un péché grave, mais que plus grave encore était de s’opposer aux volontés de Dieu, d’être impie envers celui-ci et la Mosquée sacrée (la Kaaba), et d’en expulser ses fidèles. L’associationnisme ou polythéisme étant plus grave que le meurtre (chapitre 2, 217).
Et surtout après la bataille de Badr de mars 624 (dramatique échec d’une tentative mecquoise destinée à sauver une de leurs caravanes menacées d’interception). Mahomet y participe personnellement à la tête de plusieurs centaines d’hommes et d’anges. 72 morts du côté mecquois dont le célèbre Amr ibn Hicham dit Abou Jahl. Le terme djihad prend alors le sens que nous lui connaissons aujourd’hui.
Les versets coraniques permettront dorénavant la guerre et Mahomet, devenu à la fois chef spirituel et chef politico-militaire de la Cité-État de Yathrib/Médine, pourra y bâtir une machine de guerre destinée à établir l’autorité de sa conception de Dieu. Cook (2005, p. 6) parle d’une moyenne de neuf campagnes menées annuellement par Mahomet au cours des neuf dernières années de sa vie.
Pour les kharidjites, le petit djihad est donc même un des piliers de l’Islam et il constitue une obligation individuelle. Pour les chiites, du fait que le petit djihad ne sera victorieux qu’au retour de l’imam caché, il doit être remis à cette date (Khaddouri, Guerre et paix, chap. V). Cette machine, qui sera perfectionnée par les califes Abou Bakr et Omar, permettra de conquérir, en moins d’un siècle, et uniquement à ‘aide de guerres défensives ou de guerres menées en état de légitime défense, un territoire qui s’étendra du Maghreb jusqu’aux rives de l’Indus.
Toute la question est de savoir si cette dimension religieuse de « guerre sainte » du petit djihad, est intemporelle, immanente et inhérente à la religion musulmane ou une simple autodéfense comme le soutiennent certains auteurs, des apologistes et liés à la mouvance islamiste, tels Taliqani (1986) et Shaltut (1977) ou d’autres, comme Esposito (2002), Zawati (2001), AI-Ashmawy (1989), Bonney (2004) et Ferjani (2005), à la limite de l’académique et de l’apologétique ou taqiya. Mais dans les deux cas, tous atténuent la dimension offensive et guerrière du djihad dans la doctrine classique à ce sujet même lorsqu’ils reconnaissent son importance dans les conquêtes islamiques, et cherchent à décharger le Coran de toute contribution à la formation de sa doctrine en soulignant les versets pacifistes comme le fait le recteur de la grande mosquée de Paris.
L’analyse que les chercheurs développent sur le petit djihad, ainsi que c’est le cas pour d’autres discussions relatives à l’islam, dépend donc du choix de textes qu’ils font pour déterminer l’attitude officielle ou représentative de l’islam sur cette question.
Les quatre principales écoles de droit islamiques sunnites eurent bien entendu au départ chacune des conceptions différentes du petit djihad, mais les points de vue finirent par se rapprocher assez rapidement.
Ces différentes écoles juridiques, bien que conservant chacune sa coloration distinctive due aux conditions de leur propre élaboration, diffusion, et surtout du degré d’évolution sociologique de leurs bases premières, se rejoignent pour l’essentiel dans la présentation des principes généraux. Il y eut, certes, au cours de cette longue période d’élaboration de la doctrine officielle, des divergences quelques fois importantes, mais le temps, et surtout l’esprit de consensus, se chargèrent de les estomper.
Positions sur le petit djihad des 4 principales madahib sunnites.
— École malékite (Ibn Abi Zaïd al-Qayraouani).
Le petit djihad est une institution divine. Sa mise en œuvre par certains peut en dispenser d’autres. Nous (malékites) affirmons qu’il est préférable de ne pas entamer les hostilités contre l’ennemi avant
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de l’avoir invité à adopter la religion islamique (daoua), excepté lorsque l’ennemi attaque le premier. Il a le choix entre se convertir à l’Islam et payer le tribut (djizya) ; sinon, la guerre sera déclarée contre lui.
— École hanbalite (Ibn Taïmiyah).
Étant donné que la guerre licite est essentiellement le petit djihad, que son objectif est de faire en sorte que la religion devienne celle de Dieu uniquement, de l’avis de tous les musulmans, ceux qui y font obstacle doivent être combattus. Quant à ceux qui ne peuvent opposer de résistance, tels que les femmes, les enfants, les moines, les vieillards, les aveugles, les handicapés et autres, ils ne seront pas tués à moins qu’ils ne participent à la lutte par leurs paroles et leurs actes.
— École hanafite (Bourhanouddine Ali).
Il n’est pas licite de faire la guerre contre quiconque n’a jamais été appelé à adopter la foi sans préalablement les enjoindre à le faire (daoua), car c’est là l’instruction donnée par le prophète à ses généraux, il leur a ordonné d’appeler les infidèles à adopter la foi et aussi pour que les gens sachent bien qu’ils sont attaqués au nom de la religion et non pour s’emparer de leurs biens, ou pour de leurs enfants des esclaves, car en voyant ça ils peuvent être enclins à s’épargner les tourments de la guerre (…). Si les infidèles, en recevant l’appel à la foi, ne consentent ni à l’adopter ni à payer la djizya (impôt pour avoir la vie sauve), alors, il appartient aux musulmans de demander l’aide de Dieu et de leur faire la guerre, car Dieu assiste ceux qui le servent et détruit leurs ennemis, les infidèles, il est indispensable d’implorer son aide à chaque occasion ; et ce d’autant plus que le prophète nous a ordonné de faire ainsi.
— École chaféite (Al-Maouardi).
Les infidèles du domaine de la guerre (dar al-harb) sont de deux sortes : d’abord, il y a ceux que l’appel de l’Islam a atteints, mais qui l’ont rejeté et ont pris les armes. Le chef de l’armée a toute latitude de les combattre (…) de la manière qu’il juge la plus fructueuse pour les musulmans et la plus préjudiciable aux infidèles. (…) Deuxièmement, il y a ceux que l’invitation à adopter l’Islam n’a pas encore atteints, quoique ceux-ci soient rares de nos jours puisque Dieu a clairement manifesté l’appel de son messager. (…) Il est interdit (…) d’entamer une attaque avant d’expliciter l’invitation à l’Islam, d’informer sur les miracles du prophète et de rendre évidentes les preuves qui encourageront l’acceptation de la conversion. S’ils refusent toujours d’accepter, la guerre est déclarée contre eux et ils sont traités comme ceux que l’appel a atteints et qui l’ont refusé.
Peters souligne que les doctrines sunnite et chiite en matière de petit djihad offensif sont très similaires. La différence principale du chiisme consiste dans le fait que le petit djihad offensif ne peut en théorie être proclamé que sous l’autorité de l’imam de la Communauté ou d’un mandataire désigné par lui. Or, le douzième et dernier imam, le Mahdi ou imam caché, s’est occulté en l’an 873, et son retour n’est attendu qu’à la fin des temps.
Les « normes » juridiques régissant ce petit djihad ont été formulées durant les cinq premiers siècles de l’islam. Les textes théologico-juridiques de cette époque constituent ce qu’on appelle aujourd’hui la tradition ou la doctrine classique.
À partir du Xe siècle, le discours sur le petit djihad va progressivement s’affaiblir et connaître une certaine mise en sourdine jusqu’à sa résurgence à la fin du XIXe siècle avec Sayyid lamal Al-Din Al-Afghani, Muhammad Abdou et Rachid Rida.
Ce discours s’est radicalisé au cours du XXe siècle, avec notamment Abou Ala Maudoudi, Sayid Qotb, Abdel Salam Faraj et, plus tard, avec Abdallah Azzam, Aïman AI-Zaouahiri et Oussama ben Laden, les trois « piliers » d’AI-Qaïda. Ces promoteurs d’un islamisme radical légitiment la violence, non seulement contre les non-musulmans, mais également contre les gouvernants musulmans qu’ils considèrent comme impies. Reprenant des concepts salafistes (de salafiya, qui signifie, retour sur le chemin des pieux ancêtres, autrement dit les compagnons de Mahomet ainsi que leurs successeurs immédiats), surtout ceux d’Ibn Taïmiya, ils élèvent le petit djihad au rang d’obligation religieuse au même titre que le sont les 5 piliers de l’Islam.
Le très célèbre historien et philosophe musulman, Ibn Khaldoun (mort en 1406) en donne clairement la raison : « Dans la communauté musulmane, le petit djihad est un devoir religieux en raison de l’universalisme de la mission musulmane et de l’obligation de convertir tout le monde à l’islam par la persuasion ou par la force… Les autres groupes religieux n’avaient pas une mission universelle * et le petit djihad n’était pas un devoir religieux pour eux, excepté pour des raisons défensives ».
Cette conception n’a en fait rien de neuf. Peu après la mort de Mahomet, en 634, avec la déferlante de guerriers du petit djihad, venue de la péninsule arabique, un commandant perse, qui ne devait pas tarder à succomber à l’invasion, demanda aux musulmans ce qu’ils désiraient. La réponse fut la suivante : « Dieu nous a envoyés ici afin que nous puissions libérer ceux qui le désirent de la servitude de leurs maîtres terrestres et en faire les serviteurs de Dieu, afin de transformer leur misère en richesse et les libérer de la tyrannie et du chaos des [fausses] religions et leur apporter la justice de
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l’islam. Il nous a envoyés pour apporter sa religion à toutes ses créatures et leur lancer un appel pour qu’ils rejoignent l’islam. Tous ceux qui accepteront cet appel seront saufs et nous les laisserons en paix. Mais quiconque refuse cet appel sera combattu jusqu’à ce que nous accomplissions la promesse de Dieu » (Hugh Kennedy, Les Grandes conquêtes arabes, Philadelphie : Da Capo, 2007, p. 112).
C’est sur ce « petit djihad », ou combat « sur le sentier de Dieu » (djihad fi sabil Allah), que nous allons nous pencher dans le chapitre qui suit.
* Affirmation erronée d’Ibn Khaldoun. Le christianisme s’est également donné pour tâche d’évangéliser la terre entière.
DJIHAD OFFENSIF OU DJIHAD DÉFENSIF ?
Il existe deux conceptions du petit djihad, une offensive, et l’autre défensive.
La première, la plus répandue dans le sunnisme classique, considère que l’islam ayant vocation à régenter et sauver l’humanité, doit s’étendre par la force sur les nations et les sociétés non soumises et qui, « appelées à se convertir », ont opposé un refus, tandis que la seconde, celle des réformistes modernes notamment, se borne à affirmer la légitime défense de l’islam, de sa terre et de ses fidèles.
Ainsi que nous l’avons précisé, c’est le petit djihad offensif, dans le sens d’action armée contre les ennemis de la foi et les infidèles en vue de l’expansion de l’islam, qui fait le plus polémique.
Mais les deux interprétations peuvent néanmoins se confondre. La volonté de protéger la liberté de l’islam et de préserver l’ordre social de la communauté, qui relève donc de l’autodéfense, peut aussi être invoquée comme argument pour justifier un petit djihad offensif. Cette ambiguïté est d’ailleurs
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présente dans le Coran lui-même, avec l’alternance de versets prônant tantôt une attitude défensive, tantôt une attitude offensive.
Toute monolâtrie recèle un fort potentiel d’intolérance et de violence, mais le Coran est plus qu’ambivalent à ce sujet. Ci-dessous par exemple quelques versets allant dans le sens du petit djihad.
« Ce n’est pas vous qui les tuez, c’est Dieu. Quand tu lançais (un trait), ce n’est pas toi qui le lançais, c’était Dieu, pour éprouver les fidèles par une telle épreuve ; car Dieu entend et sait tout. Dieu l’a fait parce qu’il réduit à néant les ruses des infidèles » (Coran 8, 17-18).
« Faites la guerre à ceux qui ne croient pas en Dieu ni à la fin des temps, qui ne regardent point comme défendu ce que Dieu et son apôtre ont défendu, et à ceux d’entre les gens du Livre qui ne professent pas la vraie religion. Faites-leur la guerre jusqu’à ce qu’ils payent le tribut de leurs propres mains après avoir été humiliés » (saghirouna, Coran 9, 29).
« O croyants ! Combattez les infidèles autour de vous ; qu’ils vous trouvent toujours sévères à leur égard. Sachez que Dieu est avec ceux qui le craignent » (Coran 9, 123).
« Chaque fois que vous rencontrerez les infidèles, tuez-les jusqu’à en faire un grand carnage. Et serrez bien les entraves des captifs que vous aurez faits » (Coran 47, 4).
Il importe de souligner un autre élément qui a conforté la motivation des combattants et qui a trait au caractère divin de leur mission : la conviction qu’ils pouvaient être assistés par Dieu. Le Coran affirme en effet que Dieu a envoyé « mille anges se succédant sans intervalle » (Coran 8, 9) combattre auprès des musulmans leur permettant ainsi de vaincre les Mecquois, beaucoup plus nombreux, lors de la bataille de Badr. De la même manière, il a envoyé « un grand vent et des armées invisibles » (Coran 33, 9) lors d’un raid musulman contre la tribu juive des Banou Qouraïza (Cook, 2005, p. 7-9).
Cette conception du petit djihad repose donc entre autres sur la conviction que « Dieu a fait des croyants la meilleure Communauté jamais créée, et ses témoins sur terre » (Alfred Morabia page 258).
On peut en effet considérer que le verset « Dieu a fait des croyants la meilleure Communauté qu’il ait jamais créée, vous commandez le bien et interdisez ce qui est blâmable » (Coran 3,110) « comme un puissant adjuvant des divers petits djihads qui ensanglantent notre planète, car c’est par le « petit djihad » qu’est mise en œuvre concrètement cette supériorité.
Cette « supériorité » s’exprime contre deux types d’infidèles, ceux appelés les gens du Livre et les polythéistes ou associationnistes.
La réponse à notre question introductive est donc difficile à établir avec justesse, mais toutefois, nous pouvons affirmer que les textes d'Al-Qaïda et ceux de la doctrine classique du petit djihad traduisent bien une certaine vision interprétative de l’islam, en ce qu’ils posent, dans l’absolu, l’idée d’une lutte globale définie par la foi en la révélation. Dans les deux cas, la conception du petit djihad est fondée sur une lecture du Coran et de la vie de Mahomet en tant que sources de la pratique politique, et la légitimation que cette conception confère à la violence font du petit djihad un enjeu de pouvoir majeur : dans les deux cas, la pratique prônée s’appuie sur des versets élevés au rang de principes normatifs universels sans qu’ils fassent l’objet de relativisation par rapport aux versets pacifistes, qui sont aussi fondateurs de l’islam. Cette question renvoie donc à un élément que nous avons évoqué au début de cet essai sur la fermeture des portes de l’interprétation (bab al ijtihad) : l’imposition par les oulémas de l’époque classique d’une pensée dogmatique essentiellement juridique, et d’une orthodoxie sans prise avec le réel, assumant de la sorte une lourde responsabilité dans l’absence d’évolution de l’islam vers la laïcité.
En ce qui nous concerne, nous examinerons la conception du petit djihad offensif uniquement à travers le discours, sans analyse du contexte et des facteurs économiques et sociopolitiques sur lesquels se fonde en général la taqiya ou apologétique musulmane. L’objet de ce chapitre étant les discussions théologiques et idéologiques capables de donner sens à ce discours. Car cette étude n’a aucune prétention universaliste et ne vise pas à construire un quelconque paradigme général, mais uniquement à fournir une synthèse de l' « idéologie » du petit djihad sur le plan conceptuel et discursif et à lancer une réflexion sur les plans théorique et politique.
La mise en avant de prismes comme celui de l’al-ouala oual-bara par des mouvements islamistes radicaux nous paraît particulièrement périlleuse dans un monde globalisé où les destins des communautés sont de plus en plus interconnectés et interdépendants. La coercition et la violence, réelles ou imaginaires, provoquées par l’association entre la vision autosacrificielle de l’islam et une conception manichéenne du vrai et du faux contribuent à enfermer le monde musulman dans des représentations chargées de préjugés mal fondés. Sur le plan intérieur, la mise en œuvre de tels prismes permet un contrôle sur la pensée et sur l’expression publique, et provoque une certaine passivité intellectuelle au sein des sociétés musulmanes.
Ibn Taïmiya admet le petit djihad et même des opérations destinées à jeter l’épouvante dans les rangs de l’ennemi (irhab). Mais la formule qui est traditionnelle et vise toute stratégie d’intimidations d’une
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armée avant la bataille. Au XVIIIe siècle, Ibn Abdel Ouahran prendra néanmoins le relais du dogmatisme hanbalite d’Ibn Taïmiya et il érigera le petit djihad en système à travers son alliance, en 1745, avec l’émir Ibn Saoud, dont les descendants parviendront à mettre la main sur la péninsule arabique. Ibn Abdel Ouahhab prêche un intégrisme rigoureux qui considère les autres conceptions de l’Islam allant du soufisme au chiisme, comme hérétiques, sans lésiner pour cela dans son recours au takfir ou à l’excommunication.
Cette traduction indispose les réformistes et modernistes qui y voient une réduction injuste des sens du mot djihad. Mais il y a toujours eu un décalage entre le sens des mots dans le droit et leur sens par ailleurs. Du point de vue de la sociologie religieuse cette traduction est aussi légitime, car on distingue généralement trois positions fondamentales dans les rapports religion/violence : la guerre sainte (où sont rangés le petit djihad classique et la croisade), la guerre juste (guerre défensive) et la non-violence (pour la discussion de ces sujets, voir Johnson et Kelsay).
À la traduction de djihad par guerre sainte on pourrait objecter que toutes les prescriptions de la loi islamique sont sacrées (ou légales ou canoniques) par définition et donc qu’il faudrait dire aussi « le mariage saint, le contrat saint, la vente sainte », etc., c’est-à-dire mettre l’adjectif « saint » partout ou le supprimer partout. Pourtant la nécessité de l’adjectif apparaît dans la prolifération des traductions de substitution, y compris chez les auteurs réformistes, comme « guerre légale », ou « guerre canonique », ou « saint combat », etc. Pourquoi ? Parce que le petit djihad est la seule activité de nature profane qui est classée dans les devoirs religieux, surtout dans les hadiths. Le malékisme a toujours placé le petit djihad tout de suite après le culte. Les morts musulmans sont des « martyrs » morts sur la voie de Dieu. Ils sont assurés d’aller au paradis (Coran 9, 111, 169b-170), et d’y avoir des privilèges sur les autres bienheureux. Toute une littérature existe exaltant le mérite du petit djihad. Le but religieux du petit djihad est aussi spécialement mis en valeur dans les ouvrages juridiques même modernes. Az-Zouhayli par exemple éprouve le besoin de renforcer le mot djihad par l’adjectif mouqaddas, saint, comme si le mot djihad n’était pas assez fort en lui-même (Al fiqh, t. 6. p. 10 ; voir aussi p. 314-316).
Rien de tout cela n’existe à un tel degré à propos des autres activités conformes à la loi.
La doctrine du petit djihad a été formée tardivement, en se fondant sur l’exemple de Mahomet, des premiers califes et des Omeyyades, mais dès le 8e siècle, cette doctrine offensive fut en décalage vis-à-vis de la pratique abbasside qui était surtout devenue défensive, après les premières défaites en France, en Inde et devant Constantinople. Il vaudrait d’ailleurs mieux parler d’une pratique de la guerre de position sous les Abbassides, car l’initiative n’a pas cessé de passer d’un camp à un autre. Ce ne sera néanmoins qu’à l’époque coloniale que l’on pourra dire, en général, que le monde musulman se borne à une pratique défensive du petit djihad.
La colonisation constitua en effet un grand tournant dans la vie de l’Islam. Les musulmans se retrouvèrent à leur tour dans la position de dhimmis, qui plus est par rapport à leurs anciens « protégés ».
Toutes les puissances musulmanes subirent donc à l’époque une considérable pression et furent contraintes au djihad défensif. On trouvera dans Peters des analyses et des références sur les différents appels au djihad al-asghar dans ces situations : contre les Anglais en Inde, au Soudan, en Égypte, en Palestine ; contre les Français en Algérie ; contre les Italiens en Libye ; contre ces trois puissances coloniales en 1914, du fait de l’entrée en guerre de l’Empire ottoman aux côtés de l’Allemagne et de l’Autriche. Ce dernier épisode montre bien que ces situations sont toujours restées ce qu’elles étaient au Moyen Âge : paradoxales, eu égard à la théorie du djihad parce que chaque camp s’est presque toujours assuré des alliés de l’une ou l’autre religion.
Le réformiste indien Sayid Ahmad Khan (1817-1898) était d’avis que le petit djihad est obligatoire seulement lorsque les musulmans sont empêchés de pratiquer leur religion.
Tout en affirmant que la coexistence pacifique est l’état normal, des relations entre musulmans et infidèles, l’Égyptien Muhammad Abdouh (1849-1905) et le Syrien Rachid Rida (1865-1935) développèrent un nouveau paradigme en affirmant que le petit djihad est permis seulement lorsqu’il est défensif, légitimant ainsi la guerre contre les colonisateurs (Peters, 1996, p. 6).
Si la doctrine moderne du djihad al-asghar défensif est donc répandue au point de constituer la doctrine officielle de la plupart des musulmans, pour Morabia, elle n’occulte absolument pas l’autre, toujours vivante dans la conscience islamique, et qui peut être reprise à tout moment favorable (pages 342-343). On en a un exemple avec la taqiya ou apologétique développée à ce propos par les Frères musulmans et les islamistes. Les Frères musulmans sont en général partisans du djihad conçu de manière classique, avec diverses nuances selon les auteurs. Le fondateur, Hassan al-Banna, avait des positions très légalistes. Mais il critiquait le point de vue réformiste : pour lui l’idée défensive sapait la combativité de l’islam. Il considérait le hadith sur le grand et le petit djihad comme inauthentique (al-Banna, Majmou’a rasa’il, p. 58, cité par Peters, Islam, p. 120). Il s’est longtemps opposé à la formation
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de groupes paramilitaires, mais a finalement cédé à ses lieutenants quand il s’est agi d’aller combattre en Palestine.
MOYENS ET CONDITIONS DU PETIT DJIHAD.
Dans un article intitulé « Comment l’islam classe les pays » al-Muhajiroun, The Voice, the Eyes, the Ears of the Muslims, Londres, 27 janvier 2001…
http://www. onlyam.om/islamicstopics/foreign_policy/land_classification.html. a osé écrire ce qui suit.
“Once the Islamic State is established, anyone in Dar Al-Harb will have no sanctity, neither for his life or wealth, hence a Muslim in such circumstances can then go into Dar Al-Harb and take the wealth from the people unless there is a treaty with that state. If there is no treaty individual Muslims can even go into Dar Al-Harb and take women to keep as slaves.”
« Une fois l’État islamique instauré, personne dans le Dar Al-Harb ne bénéficiera d’inviolabilité, ni pour sa personne ni pour ses biens, et par conséquent n’importe quel musulman dans de telles circonstances peut aller dans le Dar Al-Harb et s’approprier les biens des gens, à moins qu’il n’y ait un
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traité avec cet État. S’il n’y a pas de traité, les musulmans individuellement peuvent aller dans le Dar Al-Harb et même s’emparer de femmes pour en faire des esclaves. »
Notre amie Bat Yé’or a elle-même reconnu * que « l’outrance de ces propos fait penser à une manipulation provocatrice, et ferait bondir d’indignation nombre de musulmans [mais] nous les citons ici, car ils décrivent bien la théorie du djihad et sa réalité historique ».
* COMMENTAIRE, N°97, PRINTEMPS 2002, Juifs et chrétiens sous l’islam. Dhimmitude et marcionisme.
Pour ce qui est de la théorie par contre il en va différemment (taqiya?)
Peters (1996, p. 5) identifie trois raisons principales dans la doctrine du petit djihad.
1) En premier lieu, il s’agit tout comme dans le cas des croisades pour libérer Jérusalem dans le monde chrétien, d’un moyen de mobiliser et de motiver les musulmans, ce qui leur permet d’accomplir un devoir religieux. Morabia (1993, p. 164 et 251) rappelle que de nombreux hadiths placent le petit djihad « au tout premier plan des obligations religieuses », et qu’une doctrine sur le martyre a été développée en annexe à celle du petit djihad. Cette motivation est renforcée par l’idée que ceux qui meurent en combattant « sur le sentier de Dieu » sont des « martyrs ». Ils témoignent de leur dévotion par leur sang (Peters, 1996, p. 5). Le Coran et les hadiths ne tarissent pas d’éloges pour le « martyr », en plus de lui promettre l’accès direct à un paradis riche en compensations, sans passer par la case du jugement dernier (Coran 3,163). L’accession à la vie éternelle est par ailleurs davantage assurée pour le martyr que pour celui qui satisfait aux cinq piliers de la foi (Coran 4,95 ; 9,19 ; 9, 20 ; 57,10. Khaddouri, 1969, p. 61-62).
2) Deuxièmement, le petit djihad sert à consolider la légitimité du dirigeant de la communauté et assurer ainsi l’unité politique de l’oumma (Peters, 1996, p. 5). Khaddouri (1969, p. 62) évoque également le fait que le petit djihad a permis à l’autorité musulmane de canaliser l’énergie guerrière des tribus et clans arabes, qui étaient constamment en lutte les uns contre les autres, vers le monde extérieur en les unifiant autour de la nouvelle religion.
3) Enfin, le petit djihad permet d’élaborer les règles devant régir les relations et la conduite des hostilités avec les ennemis (Peters, 1996, p. 5). La doctrine officielle va abolir la guerre et ne permettre aucune autre forme que celle du petit djihad (Khaddouri, 1969, p. 54). En même temps, elle va établir des conditions et des règles de combat qui doivent impérativement être respectées.
But du petit djihad en droit malékite. Dans la Moudawouana de Sahnoun (776- 854) le thème de la nécessité de la da’oua (appel à la conversion / reddition) apparaît (t. 3, p. 2). Selon Abd ar-Rahman Bin al-Qassim, Malik aurait dit : « À ma connaissance on n’a jamais combattu les associateurs ou polythéistes sans les avoir préalablement invités à se convertir à l’islam ». À la question posée par Sahnoun de savoir s’il en était de même soit que les musulmans attaquent soit qu’ils soient attaqués, Al-Qâsim répond « Je n’ai pas posé la question à Malik, mais pour moi les deux situations sont identiques ».
La raison de cet appel ou da’oua est de faire savoir aux ennemis « ce à quoi on les invite (l’islam), leur état d’inimitié avec l’islam et ses adeptes, leur longue tradition d’opposition aux armées (musulmanes) et de combat (contre elles)… »
C’en est presque une justification par la défensive.
L’appel ou da’oua ôte le doute et justifie le petit djihad précise plus loin le texte. Une déclaration très nette se trouve p. 31 : « On ne combat ces gens que pour qu’ils abandonnent la mécréance et adhèrent à l’islam ». Selon Sahnoun, le but du petit djihad est donc bien a priori la conversion des mécréants.
Averroès a consacré un paragraphe spécial à la question (Bidaya, chapitre sur le djihad, 1re section, § 7) Il constate l’unanimité des docteurs sur le but poursuivi relativement aux gens du Livre : la conversion ou le paiement de la djizya (cf. plus loin dans cette section). Le Coran (9, 29) ne permet pas de divergences à ce sujet. Les divergences existent quant aux polythéistes, mais elles ne portent pas sur la nature du but du petit djihad, elles portent sur la question de savoir s’ils peuvent bénéficier du protectorat ou statut de citoyen de seconde zone qu’est la dhimmitude. Averroès signale que Malik était d’avis que oui : pour lui la mécréance, fût-elle polythéiste, n’était pas une raison suffisante pour les mettre à mort. Dans la Bidaya, le but du petit djihad est aussi évoqué relativement aux promesses de récompense (nafal). Malik est présenté comme rejetant cette pratique au nom du but même du petit djihad : on ne vise par cette attaque que la face de Dieu Très Haut et l’exaltation de sa Parole. Si l’imam promet une gratification avant la guerre, il est à craindre que le sang ne soit versé pour une autre cause que celle de Dieu. Ce texte confirme la réticence des juristes malékites envers les
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opérations ne visant que le profit et donne une définition du petit djihad très proche de celle qui deviendra celle de l’école.
Il existe donc des guerres menées contre l’infidèle et non légales en droit malékite.
La doctrine du petit djihad occupe une position particulière en raison de sa conceptualisation théologique et juridique et de l’unité que forment la religion et la loi : «« La loi a prescrit la manière d’atteindre les objectifs religieux (ou divins), et la religion a consacré la loi » (Khaddouri, 1969, p. 59).
Or, cette capacité du petit djihad à combiner à la fois le théologique – plusieurs injonctions coraniques préconisent de combattre les infidèles et les ennemis de la religion – et le juridique forcément séculier en raison de ses fonctions utilitaire et stratégique pour l’oumma – en fait une « guerre juste ». Le petit djihad devient une cause nationale, une « raison d’État » : un instrument réservé à l’autorité en charge d’assurer la souveraineté islamique et d’établir la religion et l’État universels (din, daoula et dounya.). C’est d’ailleurs pour cette raison que le petit djihad ne fait pas partie des cinq piliers de l’islam, qui relèvent de la volonté individuelle du croyant et dont la satisfaction ne regarde pas le pouvoir politique.
Avant d’examiner ses fonctions, rappelons néanmoins que, comme le Droit musulman des nations, la doctrine du petit djihad doit être provisoire, le temps que l’islam finisse par régner sur le monde dans son ensemble.
Le petit djihad doit être décidé et dirigé par l’imam ou le calife, seul responsable devant Dieu de la légitimité de l’entreprise. Le petit djihad doit se faire au moins une fois par an (règle déduite du Coran 9, 126), sauf en cas de faiblesse des musulmans. Il n’est pas nécessaire que l’ennemi attaque le premier pour qu’il soit légitime.
Il doit être précédé par une invitation (da’oua) à rallier l’islam. Sur cette question on trouve des divergences. Pour les hanbalites, cette invitation ne doit pas se faire. Ils s’appuient pour cela sur la vie de Mahomet, lequel aurait attaqué par surprise les Bani Moustaliq et les Bani Kahbali de Palestine. Pour les malékites et les zaïdites, se fiant à tous les autres exemples donnés par Mahomet, cette da’oua ou invitation à se convertir est obligatoire. La majorité pense qu’elle n’est que recommandée. De toute façon cette pratique a peu à peu disparu devant la crainte que cette doua (invitation à embrasser l’islam) ne donne le temps à l’ennemi de se préparer à résister et en raison de l’idée que les non-croyants sont en principe dépourvus de tout droit.
Le défi ou combat singulier sur le devant des troupes est soumis à l’autorisation de l’imam. Ce ne peut être pour étaler sa valeur guerrière : le but doit rester celui de glorifier Dieu selon les malékites.
La doctrine contient des détails abondants sur les méthodes de combat et autorise globalement le recours à tout moyen susceptible d’assurer la victoire, en se fondant sur le principe que l’adversaire est l’ennemi de Dieu. La défaite est considérée comme une anomalie et elle n’est tolérée qu’en cas de force majeure.
La bataille commence aux cris de « Allahou akbar » (Dieu est le plus grand). Les combattants doivent obéir à leurs chefs (Coran, 4, 59), même corrompus, ne pas déserter, ne pas fuir. La fermeté au combat est de règle. Les musulmans doivent combattre tant que l’ennemi n’est pas deux fois plus nombreux (Coran 8, 65-66), et dans ce cas, ils peuvent éviter le combat. La tactique de la fausse fuite est aussi permise.
Les destructions nécessitées par la stratégie militaire sont permises, mais il existe des divergences à ce sujet.
On peut, pour la majorité, bombarder une citadelle ennemie (avec des balistes et des mangonneaux), ou y mettre le feu, même au risque de tuer des musulmans prisonniers.
Les malékites, chaféites et chiites ajoutent que cela ne peut se faire qu’en cas de nécessité absolue et que si les musulmans menacés ne sont pas trop nombreux. On ne doit en ce cas aucun dédommagement aux victimes musulmanes, sauf pour les chaféites et hanbalites. Une minorité n’accepte pas ce point de vue sur les bombardements en arguant du verset 48, 25, où Dieu épargne la Mecque en raison de la présence de croyants.
Le meurtre des non-combattants, vieillards, femmes, enfants, malades, moines, est interdit au cours des opérations pour la majorité. Pour certains auteurs (Ibn Taïmiya) la notion de non-combattant est large, incluant les paysans dans leurs champs, les artisans et travailleurs divers. Mais s’ils participent à la guerre par leur conseil ou tout autre moyen, ils peuvent être tués. Toutefois l’humanisme de certains fouqaha n’est pas exempt de rouerie. Pour le malékite ad-Dasouqi, les femmes ne pouvant donner que de mauvais conseils, on ne doit jamais les tuer. Mais si on les tue, le repentir seul est dû, pas la compensation pour meurtre. À la suite de Malik, le rite précise que l’on doit laisser de quoi vivre aux non-combattants, au besoin en prenant sur les biens des musulmans. Pour la majorité des chaféites et les chiites imamites ou zaïdites, on peut tuer les moines et les vieillards : leur incroyance est un motif suffisant de mise à mort, point de vue que n’acceptent pas les autres rites, pour qui le seul motif autorisant la mort est d’avoir combattu l’islam.
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Le suicide n’est pas permis, sauf s’il s’agit de changer son genre de mort ou d’augmenter ses chances de survie : le combattant peut par exemple sauter d’un navire en flammes et se jeter à la mer (unanimité). Mais les islamistes ont admis les « opérations-suicides » vues par eux comme des « martyres ».
Les mutilations sont interdites pendant le combat, mais certains hanéfites disent qu’elles sont permises avant le combat (pour effrayer l’ennemi).
Les actes de traîtrise contre l’ennemi sont interdits, mais permis chez les hanbalites. L’emploi de flèches empoisonnées est interdit selon les malékites, car elles peuvent être renvoyées sur les musulmans.
En principe l’alliance avec les mécréants (kouffar) est interdite, car la différence de religion incline à la trahison. Ceci à l’exemple de Mahomet qui, le jour de la bataille de Badr, avait écarté un volontaire non musulman. Mais bon nombre de docteurs de la Loi l’autorisent, car Mahomet y aurait eu recours par la suite. Une telle alliance ne peut se faire qu’en cas de besoin.
Le musulman est en droit de se rendre en terre d’infidélité, de se faire passer pour un non-musulman, voire de prétendre vouloir combattre les musulmans au sein des troupes ennemies, afin de tromper l’attention de celles-ci, en tuer un grand nombre, et s’emparer de leurs biens.
Il est permis aux moudjahidines de surprendre les mécréants de nuit. Ils sont aussi autorisés à faire usage de la terreur et à assiéger, brûler ou inonder le territoire, abattre les arbres, les troupeaux ou les maisons de l’ennemi et à empoisonner ou combler ses puits pour l’obliger à capituler. Cette règle est valable même si le lieu ciblé est habité par des musulmans ou si des musulmans y sont utilisés par l’ennemi comme boucliers humains. La mort de fidèles musulmans lors de telles attaques n’est pas considérée dans ce cas comme un péché, car l’intérêt de la collectivité musulmane l’emporte sur celle des individus.
Les musulmans capturés par l’ennemi doivent rester fidèles au Dar al-islam, essayer de fuir et de détruire la propriété de l’ennemi et ne pas abandonner leur religion à moins d’y être forcés. Pour sa part, l’imam ou calife doit tout faire pour les libérer, en échange de propriété ou de prisonniers harbis.
Un harbi condamné pour espionnage doit être tué. S’il s’agit d’un musulman, les opinions divergent, même au sein des écoles juridiques. Certains juristes préconisent la peine capitale, d’autres prescrivent punitions physiques et emprisonnement jusqu’au repentir du traître, et d’autres recommandent de laisser à l’imam ou au calife le soin de décider du châtiment.
Les fidèles sont en droit de « ravager les territoires occupés, si tel peut être l’intérêt de la Communauté, et à la condition que cela se fasse avant la victoire. […] Le principe est que toute déprédation effectuée par les musulmans n’agissant pas de sang-froid, et pensant y trouver leur avantage, est autorisé » (Morabia, 1993, p. 230). Une fois la victoire acquise et les biens de l’ennemi saisis, il faut éviter de saccager les lieux occupés et d’y provoquer des dommages inutiles, ce qui comprend la destruction d’édifices habités, d’arbres et de troupeaux. S’ils doivent quitter un territoire conquis, les musulmans doivent assécher les cours d’eau et saccager tout ce qui peut servir à l’ennemi. Sur ce point, quelques divergences subsistent entre les écoles juridiques. Les hanafites préconisent que les combattants démolissent les biens mobiliers des infidèles et abattent leurs bêtes sans toutefois couper leurs jarrets, les malikites permettent cette dernière pratique ainsi que celle consistant à brûler la nourriture de l’ennemi, tandis que les chaféites recommandent de détruire tout ce qui est inerte (Morabia, 1993, p. 230-231).
PARTAGE DU BUTIN (Chapitre 8 du Coran).
Une fois la bataille terminée, les moudjahidines sont autorisés à tuer tout infidèle, qu’il soit combattant ou non, s’il refuse de se convertir ou de payer le tribut de la dhimmitude. Les harbis mâles faits prisonniers peuvent être exécutés, libérés sans condition, devenir des esclaves voire faire l’objet d’une demande de rançon ou d’échange contre des prisonniers musulmans. Les femmes et les enfants harbis deviennent en principe esclaves.
Il y a plusieurs catégories de butin. Le butin pris par force (ghanîma) comprend aussi les dépouilles (salab) d’un soldat ennemi mort (ses armes, son cheval, sa selle).
Le butin pris par force (ghanîma) se partage entre tous les guerriers (y compris les guetteurs, les renforts, etc.) sauf le cinquième qui revient à l’imam (Coran 8, 41, même coutume en Arabie préislamique). Les cavaliers reçoivent double part (hanéfites) ou triple part (autres rites).
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Les règles de répartition du cinquième réservé à Mahomet ou à ses proches (aujourd’hui l’État islamique) selon les catégories indiquées par le verset coranique 8, 41 (Dieu, le Prophète et ses proches, les orphelins, les pauvres, les voyageurs) ont donné lieu à maintes divergences. Les malékites disent qu’aucune règle n’oblige l’imam ni le calife, sauf l’intérêt général qu’il apprécie lui-même (souvenir sans doute de la bataille de Honeïn qui eut lieu en 630 et du siège de Taïf qui s’ensuivit avec l’aide de 2000 renforts mecquois).
Pour les chaféites, les dépouilles d’un ennemi appartiennent de droit à celui qui le tue.
Pour les hanéfites la propriété d’une part de butin n’est acquise par un combattant qu’après le partage qui doit se faire en terre d’Islam. L’imam/calife n’a pas le droit de vendre une partie du butin ni d’effectuer le partage en territoire ennemi. Si quelqu’un meurt dans le dar al-Harb, ses héritiers perdent tout droit sur sa part. Si des troupes de secours arrivent après la bataille, elles ont droit au butin qui n’a pas encore été partagé. Pour les autres rites, la propriété du combattant est assurée dès la prise, et les solutions sont inverses : le partage peut se faire en territoire ennemi, les héritiers ont des droits, les troupes de secours n’en ont pas.
Les biens acquis sans combat (fay’) appartiennent à l’État, depuis une décision d’Omar prise d’après le verset 59, 7. C’est le cas de tous les biens immobiliers. L’imam ou le calife peut les remettre aux populations conquises moyennant un impôt spécial (le kharadj différent de la djizya des dhimmis) ou le partager entre les soldats, ce que ne permettent pas les malékites et chaféites.
Constitue une faute grave pour un soldat le fait de voler une part du butin avant le partage, sauf en cas de nécessité, s’il s’agit d’armes ou de vivres par exemple. Il ne peut ni anticiper le partage ni vendre quoi que ce soit.
L’imam ou calife peut, en territoire ennemi, accorder aux combattants qui feront telle ou telle prouesse, une récompense (nafal) prise sur le butin, ou permettre que les dépouilles d’un ennemi aillent à celui qui le tuera. Au retour en terre d’islam, l’imam ou calife ne peut accorder de gratification que sur la part revenant au baït al-mal * (hanéfites).
L’esclave, la femme, l’enfant, le dhimmi, n’ont pas droit au butin, même s’ils ont combattu avec les musulmans. En revanche l’imam ou le calife pourra leur donner des gratifications sur le butin, avant partage, mais la part de chacun doit rester inférieure à la part d’un musulman adulte et libre.
Maraudeurs et corsaires.
Le maraudeur (moutalassis) est celui qui agit sans la permission de l’imam ni du calife et qui se live au pillage en pays ennemi en temps de guerre. Il ne paye pas le cinquième en question selon les hanéfites : il est considéré comme un voleur qui vole certes des biens non protégés par la loi islamique, mais son acquisition est réprouvée (tenue pour makrout) et il vaut mieux qu’il en fasse des aumônes. Il existe donc pour les hanéfites aussi des opérations de guerre contre l’infidèle qui ne relèvent pas du petit djihad.
Mais si le maraudeur conduit une forte troupe, il devra payer le cinquième en question : la bande est alors considérée comme ayant reçu l’aval de l’imam ou du calife pour ses opérations.
La course (qarsana) est ainsi permise moyennant paiement de ce cinquième. Les mots piraterie/pirates deviennent alors impropres.
Pour les malékites et chaféites, le cinquième en question est dû dans tous les cas par le musulman par analogie avec les opérations normales. Mais les malékites ne considèrent pas ces opérations comme du petit djihad en raison de leur but profane. Enfin une opinion minoritaire est que le butin doit être considéré comme fay’, prise de guerre, revenant au baït al-mal * dans sa totalité, et ce dans tous les cas.
Le sort des prisonniers dépend de leur attitude pendant la guerre et du choix de l’imam ou calife après. Les populations qui se sont soumises avant la guerre, si elles font partie des gens du Livre (chrétiens, juifs, zoroastriens, sabéens-mandéens) entrent tout de suite dans le statut de dhimmis qui sera donc allégé du fait de cet accord préalable.
Après la guerre, selon le Coran, l’imam ou calife peut faire exécuter les prisonniers, les réduire en esclavage, ou les échanger, contre rançon ou contre des prisonniers musulmans.
Pour les hanéfites, l’ennemi prisonnier ne peut être tué que s’il est licite de le tuer pendant le combat et pour des raisons graves, ce qui exclut donc en principe les femmes, les vieillards, les moines, etc. Mais cette exécution est conçue comme une sanction pénale, en sorte que le fou qui aurait combattu ne sera pas puni, faute de responsabilité pénale. Pour les hanéfites toujours, il n’est pas permis de libérer des prisonniers gratuitement, ni même contre rançon, car cet acte est assimilé à une vente d’armes à l’ennemi (unanimement interdite), toutefois selon ach-Chaïbani (749-805), en cas de besoin, on peut le faire. Les avis hanéfites divergent également sur l’échange des prisonniers : interdit selon Abou Hanifa, il est permis selon d’autres hanéfites, mais l’opinion d’Abou Hanifa l’a emporté.
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Les chaféites, malékites et hanbalites permettent tout ce que permet le Coran, et ajoutent la possibilité de libération gratuite. Dans ce dernier cas, l’imam qui a choisi d’être libéral doit compenser la perte de butin : les prisonniers auraient pu être vendus comme esclaves ou rapporter des rançons.
Le prisonnier, s’il se convertit à l’islam, échappe toujours à la mort, mais pas forcément à l’esclavage et il ne récupère pas ses biens. S’il s’est converti avant d’être pris, il conserve sa liberté et ses biens. Les traités sont très détaillés et abondent diverses questions touchant les conversions et leurs conséquences sur le mariage, sur les biens, sur le statut des enfants…
Selon les hanéfites, chaféites et hanbalites, les Arabes d’Arabie, gens du Livre ou polythéistes, ne peuvent être qu’exécutés à moins qu’ils ne se convertissent à l’Islam. Les polythéistes non arabes de même ont le choix entre la mort ou la conversion à l’Islam, mais les hanéfites leur accordent le même statut que les gens du Livre. En fait de telles exécutions de masse n’ont jamais eu lieu dans les zones chaféites et on y a toujours fini par considérer que de telles populations faisaient partie des gens du Livre (ou alors on a oublié de se poser ce genre de questions comme ce fut le cas en Indonésie). Le malékisme admettant que les polythéistes, arabes ou non, peuvent bénéficier du protectorat qu’est la dhimma, la coexistence fut donc conforme à la théorie, en Afrique noire notamment.
Trêves et pactes temporaires. Du fait de la conception fondamentale des rapports entre l’État islamique et les autres, le petit djihad ne peut cesser qu’avec la victoire finale de l’Islam et la soumission du monde non musulman. On a pu dire que la guerre est l’état normal des relations entre l’État islamique et les autres (Raymond Ibrahim, taqiya) et que c’est la paix qui est problématique. Mais les auteurs modernes, comme on pouvait s’y attendre, récusent cette conception. Des traités peuvent être signés, comme le permettent le Coran (9, 7) et l’exemple du Prophète, mais ce ne sont, à proprement parler, que des trêves (houdna) selon la conception classique. En principe l’imam ou le calife seul en décide.
* Baït al mal = Trésor public.
LE DROIT INTERNATIONAL SELON L’ISLAM.
« Pour résumer les implications de l’anthropologie islamique en ce qui concerne la guerre, la paix et l’État………… L’islam se veut très consciemment une religion missionnaire universelle cherchant à ramener l’humanité à sa condition première édénique… dans laquelle toute l’humanité témoignait de sa soumission à Dieu. Pour atteindre cet objectif, c’est-à-dire vivre dans le droit chemin et au service de Dieu, une entité politique allant dans le bon sens doit être établie et mise en œuvre… Les musulmans doivent donc faire des efforts et lutter (petit djihad) sur le sentier Dieu, contre les forces du mensonge et de l’incroyance. Dans cette optique « l’autre » constitue alors une source potentiellement
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violente de conflit dans le monde. Le but ou retour final à Dieu (akhira), étant néanmoins la paix, la paix pour toute l’humanité » (Richard C. Martin).
Cette division du monde en terres d’islam et terres de guerre (Dar al harb) se retrouve dans la doctrine du petit djihad, en ce sens que l’État islamique est dans l’obligation juridique de répandre l’islam dans le monde entier.
L’État islamique doit donc être dans un état permanent de guerre avec le dar al harb pour le transformer en dar al-islam, c’est-à-dire qu’il doit toujours être prêt militairement à répondre à une attaque ou à en lancer une lorsque le calife ou l’imam le juge nécessaire. En principe d’après les juristes, le pouvoir islamique doit mener la guerre contre le Dar al-harb au moins une fois par an.
En outre, l’État islamique ne doit reconnaître aucune autre autorité que la sienne. Le droit des nations (siyar)) impose néanmoins aux musulmans qui vivent ou voyagent dans les territoires du Dar al-harb de respecter la loi et le pouvoir qui y règnent, à moins d’avoir reçu un ordre contraire de la part de l’imam ou du calife. Tant qu’il est sous aman (bénéficiaire d’un sauf-conduit), le musulman qui se trouve en terre infidèle ne doit pas porter un quelconque préjudice aux mécréants et respecter ses engagements envers eux, même après son retour en terre d’islam. Il va de soi évidemment par contre que le musulman ne doit pas « collaborer » avec les mécréants dans leur lutte éventuelle contre le dar al-islam. Si sa présence dans le dar al-harb n’est pas sous aman, le musulman peut alors agir en moudjahid, réquisitionner des biens et faire des prisonniers parmi les infidèles.
Plus tard, les exigences pratiques et la réalité des interactions avec les non-musulmans ont amené les juristes à ajouter une troisième catégorie de territoire avec lequel l’État musulman peut entretenir temporairement des rapports pacifiques.
De tels traités sont valides aussi longtemps que l’État islamique est en position d’infériorité militaire, mais leur durée ne peut en principe excéder 10 ans vu le précédent du traité d’Houdaïbia signé par Mahomet lui-même en 628. Si l’imam ou le calife en vient à conclure un pacte désavantageux pour la oumma, ce pacte doit être révisé ou invalidé.
Si le traité est violé par l’adversaire, le déclenchement du combat doit se faire automatiquement et sans avertissement.
Introduite par les juristes chafiites, cette troisième catégorie n’a jamais été acceptée par les hanafites.
Il existe une autre catégorie de territoire, qui n’a été acceptée que par très peu de juristes : Le dar al-hiyad ou demeure de la neutralité. Il s’agit des régions que les musulmans ont sciemment évité d’attaquer en raison de leur attitude bienveillante à l’égard de Mahomet ou à cause de leur inaccessibilité.
Le droit des nations (siyar) fait partie intégrante de la charia et, comme elle, repose sur le Coran, la sunna, les coutumes, les interprétations et les instructions données par les premiers califes ou jurisconsultes sur les traités entre musulmans et non-musulmans. Il s’agit d’un corpus de règles et de pratiques développées afin d’encadrer la conduite de l’État islamique vis-à-vis des autres communautés dans différents domaines, notamment les échanges commerciaux, la diplomatie et les conflits armés.
Deux principes semblent dominer en la matière. Le premier explique le détail des prescriptions : est légal ce qui coïncide avec l’intérêt de l’État islamique, ce qui augmente sa force et diminue celle des États non musulmans ; est illégal ce qui va en sens contraire, c’est-à-dire ce qui augmente la force de l’ennemi ou diminue celle de l’État musulman.
Toutefois, ce principe n’est pas d’application automatique, surtout chez les malékites.
COMMENT LA TAQIYA CHANGE LES RÈGLES DE LA GUERRE ISLAMIQUE
Par RAYMOND IBRAHIM
(Raymond Ibrahim est directeur adjoint du forum Moyen-Oriental).
Les apologistes de l’islam soulignent que cette foi se fonde sur une grande exigence éthique. Les autres constatent qu’il s’agit d’une religion légaliste. La dualité des critères de vérité et de fausseté dans l’islam révèle une nature paradoxale : car si le Coran est contre les croyants, qui trompent d’autres croyants (en vertu du fait que « Dieu ne guide pas celui qui est outrancier et menteur », la tromperie aux dépens des non-musulmans, généralement appelée, en arabe, taqyia, reçoit l’approbation coranique et fait partie des actes légalement permis aux musulmans.
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La tromperie musulmane peut être considérée comme un moyen, qui manque, certes, de noblesse, au service de la fin glorieuse que constitue l’hégémonie islamique de la charia, considérée comme favorable aux musulmans et aux non-musulmans. En ce sens, il s’agit d’un mensonge altruiste, ce qui est autorisé. L’imam Mahmoud al-Masri a récemment donné en exemple une histoire où un musulman raconte un mensonge à un Juif pour le forcer à la conversion, et dont il parle comme d’une « magnifique tromperie ».
La taqiya a deux utilisations principales. La plus connue consiste à masquer ses convictions religieuses par crainte de persécutions. Il s’agit là de pratiques historiques de la taqiya au sein de la communauté chiite, dans tous les cas où leurs rivaux sunnites étaient plus nombreux et constituaient une menace. Inversement, les sunnites, loin d’être persécutés, ont toujours pratiqué quand c’était possible une forme de taqiya au service du djihad contre les incroyants, faisant de la taqiya une pratique non plus seulement de dissimulation, mais de tromperie active. En fait, le mensonge, qui a, dans l’islam, un fondement doctrinal, est souvent présenté comme égal, et parfois supérieur, aux autres vertus guerrières que sont le courage, la détermination, ou le sacrifice.
Qu’est-ce au juste que la taqiya ? Comment les théologiens, ainsi que ceux qui en font usage, la justifient-ils ? Comment s’inscrit-elle dans l’éthique islamique, notamment dans son rapport avec les non-musulmans ? Et, plus précisément, quelles sont les implications de la taqiya pour toutes les relations entre musulmans et non-musulmans ?
La doctrine de la Taqiya.
Selon la charia, c’est-à-dire l’ensemble des règles qui définissent le comportement d’un musulman dans toutes les circonstances de la vie, la tromperie est non seulement permise dans certaines circonstances, mais peut être considérée comme obligatoire. Contrairement à la tradition chrétienne primitive, les musulmans contraints de choisir entre reniement de l’islam et persécution avaient la permission de mentir et de feindre l’apostasie.
Cependant, l’un des rares ouvrages consacrés à ce sujet, At-Taqiya fi'l-Islam (« De la dissimulation dans l’islam ») dit clairement que la taqiya ne se limite pas à la dissimulation par crainte de persécutions. Son auteur, Sami Moukaram, ancien professeur d’études islamiques à l’Université américaine de Beyrouth, qui a écrit environ vingt-cinq ouvrages sur l’islam, démontre clairement la variété des applications de la taqiya.
La taqiya n’est donc pas, comme on le suppose souvent, un phénomène exclusivement chiite. Bien sûr, en tant que minorité dispersée au sein de communautés sunnites ennemies, les chiites ont historiquement plus de raisons de pratiquer la dissimulation. Inversement, l’islam sunnite ayant rapidement dominé de vastes empires, de l’Espagne à la Chine, ses membres ne devaient rien à personne et n’eurent pas à faire allégeance à d’autres ni à se cacher face à des incroyants infidèles (l’Espagne et le Portugal de la Reconquista sont les rares exceptions où les sunnites ont dissimulé leur identité religieuse. Ironiquement, les sunnites qui vivent en Occident se trouvent désormais dans la situation qui était celle des chiites, puisqu’ils vivent comme une minorité encerclée par ses ennemis traditionnels, les chrétiens infidèles. Ces derniers, à la différence des chrétiens de la Reconquista, se comportent rarement en adéquation avec cette inimitié historique, et la reconnaissent encore moins. En fait, les sunnites se retrouvent dans les circonstances générales qui ont fait de la taqiya un élément important du chiisme, mais sans risquer la menace physique qui en avait été initialement la source.
Les formulations de la taqiya
Le verset 3,28 du Coran est souvent considéré comme le premier qui admet la tromperie envers les non-musulmans :
« Que les croyants ne prennent pas pour alliés des infidèles au lieu de croyants. Quiconque le fait contredit la religion de Dieu, à moins que vous ne cherchiez à vous protéger d’eux ».
Muhammad ibn Jarir at-Tabari (mort en 923), auteur d’un commentaire du Coran, qui fait autorité, explique de la sorte ce verset 3, 28.
« Si vous [les musulmans] êtes sous l’autorité de non-musulmans et craignez pour vous-mêmes, conduisez-vous avec une apparence de loyauté envers eux, par la parole, tout en conservant votre hostilité à leur égard par-devers vous (…) [sachez que] Dieu a interdit aux croyants de se montrer amicaux ou intimes avec les infidèles, sauf si les infidèles les dominent. Dans ce cas précis, qu’ils se comportent amicalement avec eux tout en préservant leur religion ».
Toujours à propos de ce verset du Coran, Ibn Kathir (mort en 1373), qui est une autre grande autorité coranique, écrit :
« Quel que soit le lieu ou le moment, quiconque craint des tourments [venant de non-musulmans] peut se protéger en donnant le change ».
Il en veut pour preuve une citation d’Abu Darda, proche compagnon de Mahomet, enjoignant d’« arborer un large sourire face à certaines personnes tandis que notre cœur les maudit ». Un autre
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compagnon, connu sous le nom d’Al-Hasan, a dit que « la pratique de la taqiya est acceptable jusqu’au jour du jugement dernier » (c’est-à-dire jusqu’à la fin des temps).
D’autres savants éminents, comme Abou Abdoullah al-Qourtoubi (1214-73) et Mouhiyi ‘d-Din ibn al-Arabi (1165-1240), ont étendu la taqiya jusqu’à l’appliquer à de nombreuses actions. En d’autres termes, les musulmans peuvent se conduire comme des infidèles ou même pire, par exemple en se prosternant et en adorant des idoles et des croix, en portant de faux témoignages, ou même en montrant les faiblesses d’autres musulmans à l’ennemi infidèle – tout est permis sauf tuer un autre musulman. « La taqiya, même si elle est pratiquée sans contrainte, ne mène pas à un statut d’infidèle, même si elle peut mener à des péchés méritant le feu de l’enfer ».
La tromperie dans les exploits guerriers de Mahomet
Mahomet – qui constitue [pour le musulman] l’exemple de l’être humain parfait, dont la conduite doit être imitée dans les moindres détails – avait une conception pragmatique du mensonge. Il est notamment bien connu qu’il permettait de mentir dans trois situations : pour réconcilier entre deux parties, ou plus, qui sont en conflit, pour calmer sa femme, et à la guerre. Selon un manuel de droit arabe consacré au djihad tel qu’il est défini par les quatre écoles du droit islamique, « les oulémas [savants] considèrent que la tromperie en temps de guerre est légitime (…) la tromperie est une forme de l’art de la guerre ».
De plus, selon Moukaram, cette tromperie est classée comme taqiya. « La taqiya servant à duper l’ennemi est permise ».
Plusieurs oulémas estiment que la tromperie fait partie intégrante de l’art de la guerre. Ibn al-Arabi déclare, par exemple : « dans les hadiths [citations et actions de Mahomet], le mensonge en temps de guerre est bien attesté. En fait, le mensonge est davantage souligné que l’obligation de courage ».
Ibn al-Mounir (mort en 1333) écrit : « La guerre est tromperie, la guerre la plus parfaite qu’un saint guerrier puisse faire est une guerre de tromperie et non de confrontation, car la confrontation comporte des risques, tandis que l’on peut obtenir la victoire par traîtrise et sans risque pour soi ».
Quant à Ibn Hadjar (mort en 1448), il conseille aux musulmans d’adopter « une attitude très prudente dans la guerre, tout en se lamentant [publiquement] et en portant le deuil de manière à tromper les infidèles ».
Cette conception musulmane de la guerre comme tromperie renvoie à la bataille du Fossé (627), qui opposa Mahomet et ses disciples à plusieurs tribus non musulmanes, connues sous le nom de Al-Ahzab (essentiellement des Mecquois). Parmi ces derniers, Na'im ibn Massoud se rendit dans le camp musulman et se convertit à l’islam. Quand Mahomet s’aperçut que les Ahzab n’étaient pas au courant de la conversion de Massoud, il lui conseilla de retourner auprès d’eux et de les décider à lever le siège. C’est à cette occasion que Mahomet est censé avoir émis l’adage célèbre, « car la guerre est tromperie ». Massoud retourna auprès des Ahzab sans qu’ils sachent qu’il avait changé de camp et, de son côté, il donna des informations fausses à ses anciens amis et alliés. Il s’efforça également de générer des querelles entre les différentes tribus jusqu’à ce que, remplies de méfiance les unes envers les autres, elles finissent par se séparer et lever le siège, sauvant ainsi les musulmans de l’anéantissement.
Plus récemment, des complices de l’attentat du 11septembre, tel Khalid Cheikh Mouhammad, ont invoqué, dans leur défense, comme raison de leur rôle dans la conspiration, l’argument du prophète selon lequel « la guerre est tromperie ».
On trouve une autre expression encore plus puissante de la légitimité qu’il y a à tromper des infidèles, dans l’anecdote suivante. Un poète, Ka'b ibn Achraf, avait offensé Mahomet, lequel s’était exclamé « Qui tuera cet homme qui a blessé Dieu et son prophète ? ». Un jeune musulman nommé Mouhammad ibn Maslama s’était porté volontaire, à condition que pour s’approcher de Ka'b afin de l’assassiner, il ait la permission de lui mentir. Mahomet lui donna son accord. Ibn Maslama alla voir Ka'b et commença à dire du mal de l’islam et de Mahomet. Il continua ainsi jusqu’à ce que ses paroles soient assez convaincantes pour que Ka'b se fie à lui. Ibn Maslama ne tarda pas alors à se présenter avec un autre musulman et à tuer Ka'b qui ne se méfiait plus.
Bref, les premières sources historiques de l’islam attestent clairement de l’importance suprême de la taqiya comme d’une forme islamique de guerre. De plus, les premiers musulmans sont souvent décrits comme capables de se sortir de situations difficiles grâce au mensonge, notamment en reniant ou en insultant l’islam et Mahomet avec l’approbation de ce dernier – son seul critère étant que leurs intentions (niya) soient pures. Au cours des guerres contre les chrétiens, à chaque fois que les chrétiens avaient le pouvoir, la pratique de la taqiya devint même plus totale. Ainsi que l’affirme Moukaram : « la taqiya était utilisée comme un moyen, pour les musulmans, de repousser le danger, en particulier aux moments critiques où leurs frontières étaient l’objet de guerre avec les Byzantins, et, plus tard, l’objet des raids [croisades] des Francs et des autres ».
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Quelles que soient les interprétations de l’abrogation dans le Coran, l’opinion commune sur la question des versets concernant la guerre et la paix est que, quand les musulmans sont en position de faiblesse, ou minoritaires, ils doivent prêcher et être fidèles à l’éthique des versets mecquois (paix et tolérance) ; alors que, lorsqu’ils sont en position de force, ils doivent passer à l’offensive sur la base des commandements figurant dans les versets de Médine (guerre et conquête). Les avatars de l’histoire islamique témoignent de cette dichotomie et se reflètent dans le proverbe communément admis parmi les musulmans et qui se fonde sur un hadith, selon lequel le djihad doit être réalisé par la main (par la force), ou sinon, par la langue (par le prêche), et si cela n’est pas possible, par le cœur ou par les intentions secrètes de chacun.
L’hostilité sous les traits de la revendication.
Dans les discours à destination des opinions publiques européennes ou américaines, les islamistes soutiennent que le terrorisme qu’ils exercent contre l’Occident n’est que la réciprocité de décennies d’oppression occidentale ou israélienne. Mais dans les écrits qui s’adressent aux autres musulmans, cet esprit vindicatif n’est pas présenté comme la réaction à une provocation militaire ou politique, mais comme le produit d’une obligation religieuse.
Par exemple, quand il s’adresse au public occidental, Ousama ben Laden dresse la liste des revendications qui justifient sa guerre contre l’Occident, depuis l’oppression des Palestiniens jusqu’à l’exploitation de la femme par l’Occident, ou même le fait que les États-Unis n’ont pas signé le protocole de Kyoto, ce qui constitue des arguments audibles pour l’opinion occidentale. Jamais il ne justifie les attaques d’Al-Qaïda contre les cibles occidentales par le simple fait que les nations non musulmanes sont par définition des entités infidèles qui doivent être soumises. En fait, il va jusqu’à faire précéder ses messages à destination de l’Occident de phrases comme « la réciprocité fait partie de la justice », ou « paix à tous ceux qui suivent une voie droite », même si ce que le public occidental comprend par-là est sans rapport avec ce qu’il met derrière les mots « paix », « justice » ou « droiture ».
C’est quand Ben Laden s’adresse aux autres musulmans que la vérité ressort. Quand un groupe de musulmans de premier plan avait écrit au peuple américain, peu de temps après les attentats du 11-septembre, pour affirmer que l’islam cherche à coexister pacifiquement, Ben Laden avait pris la plume pour les remettre à leur place : « En ce qui concerne les relations entre musulmans et infidèles, elles sont résumées par ce mot du Très-Haut : 'Nous vous renions, et désormais l’inimitié et la haine nous séparent jusqu’à ce que vous croyiez en Dieu » [Coran 60,4]. Il y a donc une inimitié dont la preuve est l’hostilité farouche ancrée dans nos cœurs. Et cette hostilité farouche, c’est-à-dire cette guerre, ne cessera que si l’infidèle se soumet à l’autorité de l’islam ou qu’il est interdit de faire couler son sang [c’est-à-dire s’il est dhimmi, ou minorité protégée], ou si les musulmans sont, à un moment donné, dans une situation de faiblesse qui les empêche d’agir. Mais si la haine s’éteint de nos cœurs, il s’agit alors d’une très grande apostasie ! (…) Telle est la base et le fondement des relations entre l’infidèle et le musulman. Guerre, animosité, haine, infligées par le musulman à l’infidèle, tel est le fondement de notre religion. Et nous considérons que nous faisons ainsi un acte de justice et de bonté à leur égard ».
Les quatre écoles classiques de jurisprudence islamique soutiennent cette conception du monde, faite d’hostilité, en parlant des infidèles en termes similaires. Quand Ben Laden s’adresse à l’Occident en parlant de paix et de justice, ce sont des exemples typiques de taqiya. Non seulement il s’est engagé dans un djihad physique, mais aussi dans une guerre de propagande, ou, en d’autres termes, une guerre de tromperie. S’il parvient à convaincre l’Occident que le conflit actuel est entièrement dû à l’Occident, il pourra gagner à sa cause une plus grande sympathie. Parallèlement, il sait que si les Américains se rendaient compte que rien hormis leur totale soumission ne peut ramener la paix, sa campagne de propagande serait rapidement compromise. D’où ce besoin constant de masquer ses objectifs et de mettre en avant des récriminations, car, comme le dit le prophète de Ben Laden, « la guerre est tromperie ».
Implications
La taqiya pose un ensemble de problèmes éthiques. Quiconque croit véritablement que Dieu justifie, et même, par l’exemple de son prophète, encourage la tromperie, n’aura aucun scrupule éthique à mentir. Prenons le cas d’Ali Muhammad, le premier « formateur » de Ben Laden et longtemps agent d’Al-Qaïda. Égyptien, il a d’abord fait partie du Djihad islamique et a servi dans le renseignement militaire de l’armée égyptienne. Après 1984…
Pourtant, la plupart des Occidentaux continuent de croire que les mœurs, les lois et les contraintes éthiques musulmanes sont à peu près identiques à celles de la tradition judéo-chrétienne. Avec naïveté ou arrogance, les grands avocats du multiculturalisme projettent leur propre conception du monde sur les islamistes et pensent qu’une poignée de main et un sourire autour d’une tasse de café, assortis de nombreuses concessions suffiront pour démanteler la puissance de la parole de Dieu et
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des siècles de tradition immuable. Les faits sont têtus : le bien et le mal dans l’islam ont peu à voir avec les critères universels et restent fonction des enseignements propres à l’islam, dont la majeure partie est en opposition totale avec les normes occidentales.
Il faut donc admettre, en contradiction avec des croyances savantes depuis longtemps établies, que, chez les musulmans, la doctrine de la taqiya va bien plus loin que la seule dissimulation religieuse afin de préserver son existence et concerne le fait de tromper l’ennemi infidèle de manière plus large.
Le problème est donc le suivant. La loi islamique divise sans aucune ambiguïté le monde en deux parties perpétuellement en guerre – le monde islamique et le monde non islamique – et il considère que la volonté divine est de voir le premier vaincre le second. Si la guerre contre l’infidèle est un état perpétuel, si la guerre est dissimulation et que la fin justifie les moyens, un certain nombre de musulmans concluront naturellement qu’ils ont le droit – d’origine divine – de mentir, tant que c’est utile, selon eux, pour aider l’islam « jusqu’à ce que le chaos cesse et que toutes les religions appartiennent à Dieu ».
De plus, une telle dissimulation sera considérée comme le moyen d’une fin altruiste. Les ouvertures au dialogue et à la paix ou même à des trêves temporaires doivent être envisagées en fonction de cette doctrine, ce qui n’est pas sans rappeler les observations pratiques faites par le philosophe James Lorimer, il y a plus d’un siècle : « Tant que l’islam continue d’exister, la réconciliation de ses partisans, même avec les Juifs et les chrétiens, et plus encore avec le reste de l’humanité, restera un problème insoluble ».
On peut conclure que face à l’opposition naturelle entre guerre et paix, qui existe dans le cadre occidental, il est plus approprié de parler d’une opposition entre guerre et dissimulation dans le cadre islamique. Car, selon le point de vue islamique, les périodes de paix, qui n’ont lieu que quand l’islam est plus faible que ses rivaux infidèles, sont des périodes de paix simulée et de dissimulation, bref de taqiya.
TRÊVES ET TRAITÉS.
De manière générale, les traités avec l’ennemi sont possibles à condition qu’ils ne nuisent pas à l’État islamique. Il en est de même pour la diplomatie et les relations commerciales. Il n’est pas permis de signer une trêve tant que l’État islamique est le plus fort (Coran 47, 35). Elle devient nécessaire s’il est le plus faible. Mais chaque fois que l’État islamique est en position de force, il doit reprendre la guerre à la fin du délai fixé.
Les traités doivent être respectés, c’est une obligation, et le Coran y insiste (5,1 ; 8,72 ; 9, 4 et 7 ; 16,91 ; 17,34), même si les musulmans sont devenus les plus forts. Mais il y a de célèbres exceptions ou des casus belli.
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Les traités ne peuvent être permanents, excepté le pacte de dhimmitude *. Il y a des divergences sur la durée permise de la trêve. Selon les chaféites, si les musulmans sont forts, elle ne peut dépasser un an, elle est assimilée au pacte d’aman. Pour une durée plus longue, l’ennemi doit alors se soumettre et payer la djizya. Quand les musulmans sont faibles, les juristes chaféites disent qu’elle ne doit pas dépasser dix ans, à l’instar du traité de Houdeïbiya conclu par Mahomet en 628, le traité étant renouvelable. Les chiites imamites et les hanbalites pensent de même. Les hanéfites, malékites et zaydites estiment qu’il n’y a pas de date limite dans les cas de faiblesse des musulmans. Mais il y a unanimité pour dire qu’un traité de paix permanente est invalide, car il signifierait la fin de l’obligation du petit djihad, ce qui équivaudrait à abolir une partie de la loi islamique.
Ces traités peuvent être inégaux, l’essentiel est que les deux parties les acceptent. Ils peuvent comporter des tributs à payer par les uns ou les autres. Aucune forme particulière (signature, témoins…) n’est requise par la loi islamique. Toutefois, s’il craint une attaque-surprise, l’imam ou calife a le droit de dénoncer un traité, mais il doit en avertir l’ennemi (Coran 8,58).
LES SAUF-CONDUITS.
Un type de pacte limité dans le temps, très courant, est celui de la protection temporaire (aman, sauvegarde). En principe le sang et les biens de l’habitant d’un pays non islamique (hardi) ne sont pas protégés par la loi, on peut le tuer et le dépouiller (de même pour l’apostat), encore que, comme on l’a vu chez les malékites et hanéfites, la question ne soit pas aussi évidente. En cas de traité, la vie et les biens des ennemis sont protégés et ils peuvent circuler en pays d’Islam, pour y faire du commerce par exemple. En cas de guerre, le pacte spécial dit aman doit intervenir.
Pour les besoins du commerce et de la diplomatie, le harbi peut donc obtenir un sauf-conduit, une protection (aman) qui garantit sa vie, ses biens, ses droits durant ses déplacements à l’intérieur du dar al-islam pendant un an au maximum (Coran 9, 6). S’il veut rester plus longtemps, ce harbi doit adopter le statut de dhimmi, payer l’impôt correspondant, et renoncer à retourner dans son pays d’origine. Pour les hanbalites un aman peut durer dix ans.
Tout musulman peut accorder un aman, mais il y a des divergences en ce qui concerne la femme et l’enfant. Un dhimmi ne peut accorder un aman, ni un converti récent, ni un musulman prisonnier. L’aman se donne sans formalité, une simple déclaration suffit. Un aman général, concernant toute une population, ne peut être donné qu’avec l’accord de l’imam ou du calife. Mais l’imam ou le calife peut dénoncer tout aman qui nuirait à l’intérêt général : l’espion est mis à mort en dépit de l’aman.
Le protégé temporaire (mousta’min) doit respecter l’islam et sa loi pénale (divergences), ne pas espionner sous peine de mort(unanimité). Il peut se déplacer partout, sauf au Hedjaz (divergences), pratiquer sa religion (non polythéiste), commercer (mais il ne peut acheter des armes ou des matières stratégiques à exporter), se marier (avec une dhimmie). Il ne peut épouser une musulmane ni avoir de rapports sexuels avec elle. Il peut agir en justice si on a commis un tort à son égard, et réclamer à son profit l’application du droit musulman. S’il meurt en pays d’islam, ses biens doivent être rendus à ses héritiers. S’il meurt en pays de guerre (Dar al harb), ses biens laissés en pays d’islam reviennent à l’État musulman (en tant que fay = butin acquis sans combat).
Dans le dar al-harb, le musulman doit suivre la loi islamique (prière, nourriture, etc.) dans la mesure du possible. Il ne peut commettre un acte qui renforce l’ennemi : s’engager dans son armée, donner des enfants à une harbiya, etc. Il ne peut donner un aman qui permettrait à un harbi de se rendre dans le dar al-islam selon les malékites, il le peut selon les hanbalites et chaféites.
Les malékites, chaféites hanbalites et zahirites sont hostiles à l’installation des musulmans dans le dar al-harb, car ils sont exposés aux tentations de l’incroyance. Ils considèrent que l’émigration (hijra), c’est-à-dire le retour dans le dar al-islam, est obligatoire si on ne peut pratiquer sa religion (au moins les cinq piliers). Ils se réclament du Coran (4, 97-100) et d’un hadith où Mahomet aurait dit : « Je n’ai rien à faire avec un musulman qui réside au milieu des polythéistes ». Mahomet exigeait à l’époque en effet que les musulmans quittent la Mecque pour Yathrib/Médine comme lui. Les hanéfites se réfèrent à un autre hadith où le Prophète aurait dit : « Pas d’hégire après la prise de la Mecque » et autorisent donc le musulman à rester dans le dar al-harb, même s’il ne peut y pratiquer sa religion. Mais les premiers leur répondent que c’est mal comprendre ce hadith qui signifie que l’obligation de l’hégire cesse quand un dar al-harb est devenu dar al-islâm, comme ce fut le cas après la prise de la Mecque par le Prophète.
Le protectorat accordé aux non-musulmans. Il s’agit du statut de dhimmi (pl. dhimmiyoun), ceux qui sont compris dans le pacte de protection, les adh-dhimma. Le mot dhimma signifie à la fois protection, responsabilité et conscience.
Deux pactes anciens sont souvent invoqués comme fondement traditionnel du droit des dhimmiyoun : le pacte de Nadjran, conclu par Mahomet en 631, et celui qui l’a de fait remplacé, le pacte d’Omar, plus dur. Il en existe d’autres, mais tous soulèvent de difficiles problèmes d’authenticité.
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Pour la doctrine juridique musulmane développée par la suite, les gens du Livre sont ceux qui ont reçu de Dieu un Livre reconnu globalement authentique, quoique dépassé par le Coran.
Comme nous l’avons vu précédemment, les gens du Livre sont les juifs et les chrétiens, donc des monolâtries qui croient en Dieu, mais pas en Mahomet. Cette catégorie comprend également les zoroastriens, et les sabéens (une secte baptiste judéo-chrétienne), dont les textes sacrés entretiennent l’idée d’une déité suprême. L’islam considère que ces scripturaires sont rejetés par Dieu parce qu’ils ont trahi les Écritures et parce qu’ils ne reconnaissent ni le Coran ni Mahomet comme étant le sceau des prophètes.
Les Arabes polythéistes ** n’ont pas droit au protectorat de la dhimmitude, mais pas pour la majorité des malékites qui acceptent la djizya dans tous les cas (az-Zouhaïli, tome 6, p. 443). Les non-Arabes polythéistes y ont droit chez les hanéfites. Par contre tous les juristes en excluent les apostats (de l’islam).
Les protégés (dhimmi pl. dhimmiyoun) doivent donc payer un impôt personnel spécial, la djizya. Le mot signifiait à l’origine tribut. Seuls les combattants le payent selon les hanéfites et malékites, c’est la rançon due pour avoir la vie sauve, car la mort est méritée pour avoir combattu l’Islam.
Il y a deux sortes de djizya : celle qui est fixée d’un commun accord, parce que gens du Livre se sont rendus sans combattre ; l’autre qui est fixée par l’imam ou le calife parce qu’ils ont combattu. La djizya est proportionnelle à la fortune : 48 dirhams ou 24 ou 12 ou rien pour les très pauvres, les femmes, les enfants, les aveugles, les malades chroniques, les moines (car ils n’ont pas combattu). Les terres prises après combat payent en outre un impôt (kharadj) qui reste attaché à la terre, quel que soit par la suite son propriétaire (voir tome III).
La conversion fait tomber la djizya, mais pas le kharadj. La djizya est conçue généralement comme une punition (al-Maïdani, Al Loubab, 4, p. 146) qui doit être levée à la conversion.
Celui qui refuse de payer la djizya, ou tue un musulman ou insulte Mahomet, ou a des relations sexuelles avec une musulmane, ne verra pas son statut de dhimmi annulé : mais on lui appliquera le châtiment, qisas ou hadd, prévu à cet effet (sauf s’il s’enfuit avant dans le dar al-harb, auquel cas il sera considéré comme faisant désormais partie des ennemis à combattre). Et on lui prendra l’impôt de force. C’est du moins la position hanéfite, car il y a des divergences en ce domaine.
* Mais il y a eu là aussi de notables exceptions (les malheureux chrétiens de Nadjran, par exemple, les juifs d’Arabie hormis le Yémen).
** Ainsi que les chrétiens trinitaristes croyant en la Sainte Trinité pour certains auteurs qui ne voient là qu’une forme de trithéisme.
DIEU EST LE PLUS GRAND DES FOURBES.
La notion de petit djihad offensif a aujourd’hui disparu au profit d’une apologétique fondée sur l’histoire des idées, car pour les Clausewitz de l’Islam au petit pied, la taqyia est la continuation du petit djihad par d’autres moyens.
Il y a même des versets dans le Coran qui nous montrent que Dieu ne trompe pas seulement ses ennemis, mais aussi les musulmans.
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Coran 8, 43-44. « Dieu te fit voir en songe tes ennemis peu nombreux, s’il te les avait fait voir en grand nombre, vous auriez été découragés, vous auriez discuté de l’affaire… il vous les montrait peu nombreux à vos yeux, de même qu’il vous faisait paraître à leurs yeux peu nombreux ».
Même problème avec la passion du grand rabbin nazaréen Jésus. C’est Dieu lui-même qui a créé le christianisme en faisant croire à certaines personnes que cet homme avait été crucifié puis ressuscité (4, 157-158). 6 siècles après néanmoins il s’est ravisé et a envoyé Mahomet pour faire savoir la vérité.
D’autres versets du Coran vont dans le même sens qui stipulent expressément que Dieu est le plus grand des fourbes trompeurs ou tricheurs (en arabe makar). Et Haroun Yahya inclut d’ailleurs l’adjectif Al-Makir dans sa liste des 99 plus beaux noms de Dieu.
Il conviendra de noter néanmoins que la majorité des traductions du Coran donne en général une idée biaisée du sens réel de ce terme. Le mot est en effet utilisé à la fois pour décrire Dieu et les mécréants. Or dans la plupart des cas les traducteurs ont recours à un euphémisme quand il s’agit du terme utilisé par Dieu pour se qualifier lui-même.
Coran 3, 54.
Ils (les incroyants) complotèrent et Dieu complota contre eux aussi. Dieu est le meilleur de ceux qui rusent.
Littéralement : Ils ont voulu tromper/tricher contre Dieu, et assurément Dieu est le meilleur des trompeurs/tricheurs.
Le mot arabe utilisé ici pour « ruse » ou « stratagème » est makara, ce qui veut dire littéralement tromperie.
Si Dieu lui-même use de ruse ou complote contre les mécréants, cela confirme bien que les musulmans sont autorisés à faire de même.
Coran 7, 99.
Littéralement : Sont-ils à l’abri du complot/ (de la) tromperie de Dieu ? Alors que personne ne devrait se sentir à l’abri du complot/ (de la) tromperie de Dieu excepté les malheureux.
Coran 8,30.
Littéralement : Et rappelle-toi le moment où les mécréants complotaient/rusaient contre toi/ essayer de te duper pour t’emprisonner, ou te tuer, ou t’expulser de leur terre, certes ils ont comploté/rusé/essayer de te tromper, mais Dieu est le meilleur des comploteurs/ruseurs/dupeurs.
Coran 10, 21.
Littéralement : Et si Nous faisons goûter aux gens/éprouvons les gens de Notre miséricorde après qu’une calamité/un malheur les ait touchés, voilà qu’ils manigancent/rusent/complotent contre nos versets. Dis : Dieu est plus habile dans la ruse/l’intrigue, et Nos messagers écrivent ce que vous avez accompli comme tricherie/tromperie/intrigue.
Coran 13 ,42.
Littéralement : Rappelle-toi les anciens peuples qui avaient triché/essayaient de tromper/conspiré (contre Nos messagers), alors que c’est à Dieu qu’appartient toute la tricherie/la tromperie/le complot. Il sait que ce chaque âme gagne/acquiert, et les mécréants sauront à qui est réservé la demeure finale/la bonne fin.
Les données de ce problème de traduction (encore) sont les suivantes. Il existe dans la langue coranique un mot, makar/makir, traduit de deux façons très différentes suivant qu’il s’applique à Dieu ou à des êtres humains.
Un peu comme si un même terme X était traduit par « bon » appliqué à Dieu (Dieu est bon par exemple), mais par « juste » quand il s’applique à un être humain (cet homme est juste).
Les traductions de Yousouf Ali, Sarour Hilali/Khan et Malik vont dans le sens de la malhonnêteté quand il s’agit de mécréants. Le rendu utilisé est alors double, du type « comploté et planifié », mais si ce même mot est en rapport direct avec Dieu, alors une seule de ces deux notions demeure dans les traductions dues à ces auteurs, la notion de « planifié ».
Extrait d’une conférence tenue le 16 avril 2007, sur le site readingislam.com.
Question : Le coran fait souvent référence à la MAKAR de Dieu. Comment est-il possible de désigner Dieu comme MAKIR ? Oua yamkourouna oua yamkourou Allah.
Réponse : Le terme que nous utilisons dans notre langage humain n’a pas la même signification que celui qu’on utilise pour parler de Dieu. Des termes comme « entendre » et « voir » ont par exemple une signification totalement différente lorsqu’on l’on parle de Dieu puisqu’il n’a ni yeux ni oreilles comme nous (Coran 42/11).
Le docteur Badaoui admet que le mot « makir » a une connotation négative s’agissant des êtres humains, il cherche néanmoins à justifier son usage dans le Coran quand il se réfère à Dieu en soutenant qu’il a tout autre sens quand de simples mortels en désignent d’autres en utilisant ce terme de « makir ».
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Simple anthropomorphisme répond donc Badaoui. Oui, mais dans ce cas pourquoi ne pas faire de même pour les mots « clément et miséricordieux » ? Qui ne sont bien entendu que de simples anthropomorphismes eux aussi.
Ce choix de traduction implique que les intentions et les planifications de Dieu sont toujours justes et bonnes, mais que celles des incroyants cachent toujours quelque chose de maléfique ou négatif. Cette malhonnêteté intellectuelle casse l’unité de sens du mot « makir » et pose tout simplement la question de la langue du Coran incréé. « Nous savons qu’ils disent : c’est seulement un mortel qui lui apprend… cette langue est de l’arabe très clair » (16,103).
Toutes les Écritures saintes contiennent des contradictions, mais le Coran est le seul texte dont les commentateurs ont développé toute une doctrine destinée à justifier ces changements visibles d’une injonction à une autre. La conception de Dieu que véhicule le Coran conforte donc la légitimité de la taqiya puis cette conception de Dieu appelée Dieu est explicitement caractérisée comme étant le plus grand des démons ou des fourbes (makar). Voir par exemple 3, 54, 8,30, 10, 21.
La Taqiya est donc un principe tiré du Coran qui autorise tout musulman à mentir en cas de persécution ou s’il craint pour sa vie.
« Celui qui renie Dieu après avoir eu foi en Lui – excepté celui qui a subi la contrainte et dont le cœur reste paisible en sa foi… » (16, 106). NDLR. Un des rares points sur lequel l’islam est quand même plus humain et plus normal que le christianisme et ses pénibles querelles à propos des lapsi en temps de persécution.
Le verset 28 du chapitre 3 est néanmoins généralement considéré comme le premier verset du Coran théorisant la taqiya systématique comme mode de relation normale avec des non-musulmans : « Que les croyants ne prennent pas pour amis des non-croyants de préférence aux croyants, celui qui agirait ainsi n’aurait rien à attendre de Dieu. Sauf pour se protéger d’eux ».
« Sauf pour se protéger d’eux… »
Quel sens cette formule peut-elle avoir ? Car c’est une expression étrange, qui peut être ambigüe.
Allons donc voir les commentateurs et ce que les musulmans eux-mêmes en disent.
Cheikh Muhammad Sarwar (traduction du Coran en 1982).
« Les croyants ne doivent pas établir de liens d’amitié avec les incroyants de préférence aux fidèles. Quiconque le fait n’a rien à espérer de Dieu, à moins que ce ne soit par peur ou taqiyah (dissimulation pieuse) ».
Muhammad ibn Jarir at-Tabari (mort en 923), auteur d’un commentaire du Coran, qui fait autorité.
« Si vous [les musulmans] vous dépendez de l’autorité de non-musulmans et craignez pour vous-mêmes, conduisez-vous avec apparence de loyauté envers eux, en paroles, tout en conservant votre hostilité à leur égard par devers vous…[sachez que] Dieu a interdit aux croyants de se montrer amicaux ou proches des infidèles, sauf si les infidèles sont plus forts qu’eux. Dans ce cas, qu’ils se comportent amicalement avec eux tout en préservant leur religion ».
D’autres savants notables, comme Mouhyi 'd-Din ibn al-Arabi (1165-1240) et Abou Abdoullah al-Qourtoubi (1214-73) ont étendu la taqiya jusqu’à l’appliquer à de nombreuses actions. En d’autres termes, les musulmans peuvent se conduire comme des infidèles ou même pire, par exemple en se prosternant et en adorant des idoles et des croix, en portant de faux témoignages, ou même en dévoilant les points faibles des autres musulmans à l’ennemi infidèle – tout est permis sauf tuer un autre musulman.
Ibn Kathir (mort en 1373, ses écrits sont toujours lus aujourd’hui, et publiés par des Saoudiens.
« La tromperie est autorisée quand les musulmans sont vulnérables ou en position de faiblesse. Ils peuvent tromper les infidèles, faire semblant d’être amis avec eux ». Et il cite la tradition : « la guerre est une tromperie » (Sahih Al-Bukhari t. 4, livre 52, Hadith 269).
« Quel que soit le lieu ou le moment, quiconque craint des tourments [venant de non-musulmans] peut se protéger en donnant le change ».
Ibn Khatir en veut pour preuve une citation d’Abou Darda, proche compagnon de Mahomet, enjoignant d'« arborer un large sourire face à certaines personnes tandis que notre cœur les maudit ».
Autres versets allant dans le même sens.
Coran (2,225) – « Dieu ne vous punira pas pour un serment fait à la légère ».
Coran (9,3) – « … Proclamation de Dieu et de son prophète adressée aux hommes le jour du grand pèlerinage : Dieu et son prophète désavouent les idolâtres ».
Coran (66,2) – « Dieu vous autorise à vous libérer de vos serments ??????? »
Pris dans leur ensemble ces différents versets expriment donc l’idée qu’il y a des circonstances dans lesquelles un musulman est « contraint » de mentir si cela est fait dans un but honorable.
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TAQIYA ET KITMAN.
Le mot arabe taqiya signifie « dissimulation préventive ». Un musulman est donc autorisé à mentir pour se sauvegarder d’un mal qui pourrait lui arriver, à lui ou à l’islam. Quant au terme kitman il désigne la restriction mentale bien connue chez les chrétiens sous le nom de casuistique, autrement dit le mensonge par omission.
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Vis-à-vis des mécréants ces deux formes de mensonges sont donc permises sous certaines conditions. Ces conditions sont typiquement de servir la cause de l’islam.
Oumdat al-Salik oua Ouddat al-Nasik (Dépendance du Voyageur, p. 746 – 8.2) – « Parler est un moyen pour atteindre ses objectifs. Si un but honorable peut être atteint à la fois par la vérité et par le mensonge, il est contraire à la volonté de Dieu que d’atteindre ce but grâce au mensonge et non grâce à la vérité. Lorsqu’il est possible d’atteindre un tel but en mentant, mais non en disant la vérité, il est alors permis de mentir si le but à atteindre est permis (c.-à-d. lorsque le but de mentir est de mettre en échec quelqu’un qui vous empêche d’atteindre ce but), et il devient obligatoire de mentir si le but est obligatoire… Il est prudent, d’un point de vue religieux, en toutes circonstances d’utiliser des mots qui donnent une impression trompeuse… »
Rappelons ici à fins de comparaison dont chacun fera ce qu’il voudra, que le christianisme initial n’a jamais autorisé ses fidèles à mentir ou abjurer pour échapper aux persécutions ; seule la folie du martyre était admise ; et dans le cas contraire, les différentes églises ne divergeaient qu’à propos de la pénitence, plusieurs années pour l’Église de Rome, à vie pour les donatistes (sur la réalité des persécutions comme celles de Perpétue à Carthage Poycarpe à Smyrne sainte Blandine à Lyon, voir nos essais consacrés au christianisme).
Mentir n’est en règle générale pas permis en islam et les docteurs de la foi musulmane enseignent que les musulmans se doivent de dire de façon générale la vérité (à moins que le but du mensonge soit d’apaiser des différends).
Boukhari (49 :857) : « Celui qui fait la paix entre les gens en inventant et en disant de fausses informations, celui-là n’est pas un menteur ».
Il existe donc des hadiths justifiant le recours au mensonge.
D’après Oum Kalthoum Bint Ouqbah, Mahomet aurait en effet déclaré…
« N’est pas menteur celui qui pour réconcilier des gens dit des choses agréables à entendre aux uns et aux autres » (Boukhari 2546, Muslim 2605).
Variante.
Il a été rapporté qu’Asma Bint Yazid aurait dit : « Le Messager de Dieu a déclaré : « il n’est pas permis de dire des mensonges sauf dans trois cas : quand un homme parle à sa femme afin de lui faire plaisir ; en temps de guerre ; et pour réconcilier des gens » (al-Tirmizi, 1939).
Le fait qu’on a évidemment voulu faire de Mahomet un nouveau Christ encore plus fort et qu’on lui a constamment dès l’enfance inculqué que l’islam était la meilleure des religions, a eu pour résultat qu’un musulman ne peut pas imaginer qu’il y a dans sa religion des prescriptions moins élevées au point de vue moral que les paraboles du bon Samaritain, de la femme adultère des ouvriers de la onzième heure du retour du fils prodigue de l’intendant avisé et du fameux « père pardonnez leur car ils ne savent pas ce qu’ils font », ou que les paroles de saint Luc « aimez vos ennemis » (même si c’est un peu tomber dans l’excès inverse : respecter ses ennemis devrait pouvoir suffire).
Raymond Ibrahim. « Mille quatre cents ans plus tard, en mars 2009, le juriste saoudien, Bassem Alem, s’est fait l’écho de cette conception : en tant que membre de la vraie religion, j’ai davantage de droits à envahir les autres afin d’imposer un certain mode de vie [la charia], dont l’histoire a démontré qu’il était le meilleur et le plus juste parmi toutes les civilisations. Tel est le véritable sens du djihad offensif. Quand nous nous engageons dans le djihad, ce n’est pas pour convertir les gens à l’islam, mais pour les libérer du sombre esclavage dans lequel ils vivent ».
Il va donc sans dire que la taqiya au service d’un tel altruisme est permise. Par exemple, très récemment, après avoir raconté une histoire où un musulman force un juif à se convertir à l’islam en lui disant que s’il renonçait à l’islam, les musulmans le tueraient pour apostasie, l’imam Mahmoud al-Masri a parlé d’une « magnifique tromperie. Après tout, d’un point de vue islamique, c’est le juif qui a été le bénéficiaire de cette tromperie puisqu’elle l’a fait entrer dans l’islam.
Un quatrième type de dissimulation légitimant le djihad personnel a néanmoins été aussi cautionné par Mahomet lui-même dans le cas de l’assassinat politique du poète juif médinois Ka’b Ibn Al-Achraf, à moins que cela ne relève du cas des ruses de guerre évidemment.
Tous les détails de cet assassinat politique figurent dans la Sira ou vie de Mahomet d’Ibn Ichaq page 367) L’Envoyé de Dieu demanda… « Qui me débarrassera de Ka’ba Ibn Al-Achraf ? » Muhammad ibn Maslama répondit « je peux m’en occuper pour toi ; veux-tu que je le tue ?… « Ô Envoyé de Dieu nous aurons à raconter des mensonges ». Il répondit « Dites ce que vous voulez, vous êtes libres en ce domaine ».
Sahih Boukhari tome 4, Livre 52, Numéro 271. Narré par Jabir. Le Prophète a un jour demandé : « Qui est prêt à tuer Ka'b bin Achraf (c’est-à-dire un juif) ». Muhammad bin Maslama lui a demandé : « Aimerais-tu que je le fasse ? » Le Prophète a répondu par l’affirmative. Muhammad bin Maslama a demandé : « M’autorises-tu à dire ce que je veux pour ça ? Le Prophète a répondu : « Oui ».
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Ce triste épisode nous relate donc l’assassinat politique d’un poète arabe de Yathrib/Médine, Ka'b bin al-Achraf, à la demande de Mahomet. Les hommes qui se portèrent volontaire pour son assassinat utilisèrent la fourberie pour gagner la confiance de Ka'b, en feignant de s’être retournés contre Mahomet. Ainsi trompée, la victime sortit de sa forteresse, et fut massacrée sans merci bien qu’au bout d’une longue lutte.
La poésie a toujours été en effet une des plus redoutables armes de l’esprit humain. Achraf était un homme de la tribu des Taïy, sa mère une Banou Nadir. Il était donc à demi juif. C’était sans doute le plus frondeur de tous les poètes de Yathrib/Médine. Lorsqu’il entendit parler de la victoire des musulmans à Badr, il commença par en douter ; mais quand la nouvelle fut confirmée, il partit à La Mecque pour y réciter une ode à la mémoire des malheureux tués par les musulmans. Il désapprouvait en outre l’exécution d’une partie des prisonniers après la bataille, et adressait des poèmes érotiques ou galants aux femmes de certains des disciples de Mahomet. Car le vrai crime de Kaab fut peut-être d’avoir accompagné quelques-unes de ses satires par des vers taquinant les femmes en question (dont celles de Mahomet ? ??). Les non-musulmans de Yathrib/Médine se délectaient de ses poèmes répandus dans toute la ville. Un travers propre aux hommes pas toujours très fins et que l’on peut qualifier de quasiment naturel chez eux dans la mesure où l’habitude est une seconde nature ; mais à propos duquel il n’y a jamais eu de quoi fouetter un chat, en tout cas ne méritant nullement la mort).
Mahomet ordonna néanmoins son assassinat, mais là aussi de manière détournée, en s’exclamant : « Qui donc me délivrera de Kaab Ibn Achraf ? » Le désir exprimé par Mahomet fut reçu comme un ordre par plusieurs musulmans, dont le propre frère de lait du poète.
Relève sans doute également de ce quatrième type de mensonge djihadiste dont Mahomet a lui-même donné le premier l’exemple le sort réservé à Ousaïr ibn Zarim, un des chefs survivants de la tribu des Banou Nadir, qui avaient été chassés de leurs maisons de Yathrib/Médine par les musulmans et qui s’étaient réfugiés à Khaïbar.
Ousaïr ibn Zarim essayait de constituer une armée avec des hommes venant d’une tribu alliée des Couraïchites (La Mecque). Les « émissaires » de Mahomet allèrent trouver ibn Zarim et le persuadèrent de quitter sa forteresse sous le prétexte d’aller rencontrer le prophète de l’Islam à Yathrib/Médine pour y parler de paix. Lorsqu’il fut vulnérable, Ibn Zarim et ses trente compagnons furent massacrés (alors qu’ils n’étaient pour la plupart pas armés, un sauf-conduit leur ayant été donné, Ibn Ichaq page 981, Ibn Kathir tome 4 p.300).
D’après l’exemple de Mahomet qui a lui-même rompu le traité d’Hodeïbia de 628 au bout de deux ans (en prétextant une violation de la trêve par des alliés subalternes des Couraïchites, à leur grand désespoir d’ailleurs), l’unique fonction de la trêve est donc de donner aux musulmans affaiblis le temps nécessaire pour se regrouper avant de reprendre l’offensive.
Mais heureusement pour la morale, comme toujours les musulmans auraient pu agir en état de légitime défense au dernier moment, les juifs ayant bêtement cru qu’ils allaient pouvoir profiter de la situation pour prendre Médine… Les musulmans pieux essaient toujours de justifier ces assassinats politiques perpétrés par Mahomet, des poètes et d’autres opposants à Yathrib/Médine en arguant du fait qu’ils avaient trahis des accords antérieurs. Or la Constitution de Médine n’est sans doute qu’un mythe auquel il convient de substituer l’idée d’une série de modus vivendi (8 ?) consciemment élaborés et acceptés (les noms des participants figurent), mais implicitement seulement, par les différentes tribus et sous-tribus de Yathrib/Médine (arabes, juives, et musulmanes, etc.) sans plus.
La philosophie du tout pouvant se résumer aux trois points suivants.
— Les musulmans constituent une nouvelle communauté autonome par rapport aux autres, dont Mahomet est le chef.
— En cas d’attaque front commun de tous contre l’assaillant.
— Les conflits n’impliquant que des musulmans seront de la seule compétence de Mahomet.
— En cas de conflit n’impliquant pas les musulmans, l’arbitrage de Mahomet pourra être également sollicité pour trancher le conflit.
Ce fut-là d’ailleurs là la grande habileté de Mahomet.
Et à la différence d’autres religions comme le christianisme des origines ou le jaïnisme (ahimsa), il y a donc certaines circonstances dans lesquelles un musulman peut mentir et où c’est considéré comme acceptable, voire même encouragé. Ce concept est appelé « Taqqiya » ou « kitman ». *
Bien que ne l’appelant pas Taqiya Mahomet eut en effet clairement recours à cette tactique lorsqu’il signa avec les habitants de sa ville natale de La Mecque en 628 à Houdeïbiya un accord de 10 ans qui lui accordait le libre accès à la ville alors que dans un même temps il préparait mobilisait et rassemblait ses propres forces pour y prendre le pouvoir. Les habitants sans méfiance furent facilement vaincus et La Mecque déclarée ville ouverte après que le prophète eut rompu le traité deux ans plus tard en saisissant le premier prétexte venu (de sombres histoires de vendettas entre alliés
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subalternes), et certains de ceux qui avaient cru en ce traité furent exécutés ou durent s’enfuir (une dizaine de personnes en tout).
Que l’islam légitime le mensonge pendant la guerre n’a évidemment rien de bien étonnant. D’autres philosophes et stratèges non musulmans – comme Sun Tzu, Machiavel et Thomas Hobbes – ont justifié le mensonge dans de telles circonstances, il relève du simple bon sens. La différence essentielle, dans l’islam, c’est que la guerre contre les infidèles est une guerre perpétuelle, qui doit durer, selon les termes mêmes du Coran, jusqu’à ce que « toute fitna prenne fin et que toute religion appartienne à Dieu » (Verset 39, chapitre 8).
Le problème est que la vision du monde de l’islam est celle d’un monde divisé en dar al islam et dar al hart, donc qu’en dehors des terres d’islam s’étend un univers contre qui le dar al islam est potentiellement en guerre.
Si les musulmans pensent – même sans preuves sérieuses – que leurs adversaires sont sur le point de rompre le traité, ils peuvent prendre les devants en le dénonçant les premiers. Qui plus est, certaines écoles juridiques islamiques, comme celle des hanafites, affirment que les chefs musulmans ont le droit d’abroger des traités pour la simple raison que cela paraît avantageux pour l’islam. Cet avis se fonde sur le hadith canonique suivant : Sahih Boukhari tome 9, livre 89 numéro 260 : rapporté par Abdou-Rahman bin Samoura. « Si vous prêtez un jour serment de faire quelque chose et découvrez ensuite qu’il y avait mieux à faire, alors dénoncez votre serment et faites ce qui est le mieux ».
La plupart des juristes sont en effet tombés d’accord pour estimer que dix ans représentent la durée maximale pendant laquelle les musulmans peuvent vivre en paix avec des infidèles. Le caractère perpétuel du petit djihad est d’ailleurs souligné par le fait que le traité de Hodeïbya signé entre Mahomet et ses adversaires mecquois en 628 ne le fut que pour 10 ans. Une fois un traité expiré, il convient donc de réexaminer la situation. Par nature même, les traités doivent être de durée temporaire, parce que d’après la théorie juridique musulmane, les relations normales entre territoires musulmans et non musulmans ne sont pas pacifiques, mais conflictuelles (dar al islam contre dar al harb). De ce fait, les fouqaha [juristes] sont d’accord pour estimer en conséquence que les trêves illimitées sont illégitimes si les musulmans ont les forces nécessaires pour reprendre la guerre [contre les non-musulmans].
* Entre la folie du martyre montaniste chrétien et la facilité du mensonge systématique, il doit bien y avoir une troisième voie, non ?
MISE AU POINT SUR LA STRATÉGIE DE L’IKHTILAF.
Les opinions des juristes musulmans (Ikhtilaf al-fouqaha) divergent en ce qui concerne le petit djihad. Or dans ce cas personne ne peut condamner moralement celui qui suit une autre opinion que la sienne. Ce qui permet aux ultras de continuer à prêcher la haine des kouffar des chrétiens trinitaristes de ceux qui passent à une autre religion, des athées, etc.…
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Le Coran interdit à un croyant de tromper d’autres croyants – puisque « Dieu ne guide pas celui qui est outrancier et menteur » (40, 28).
La tromperie à l’égard des non-musulmans, ce qu’on appelle aussi en arabe la taqiya, est par contre préconisée par le Coran et relève de la catégorie juridique des choses permises aux musulmans.
La taqiya s’utilise essentiellement dans deux cas. Le plus connu est la situation où il s’agit de masquer son identité religieuse quand on craint une persécution. C’est l’usage historique de la taqiyya dans les communautés chiites, partout, et chaque fois que leurs rivaux sunnites étaient plus nombreux et par conséquent les menaçaient.
Rappelons à cet égard que lors des rares et brèves persécutions ayant frappé les premiers chrétiens, et malgré les nombreux moyens d’y échapper laissés à leur disposition (le pouvoir romain ne leur demandait somme toute que de prêter un serment de fidélité à l’empereur à la mode de l’époque) la consigne donnée, et suivie par quelques-uns (sainte Perpétue, saint Polycarpe…) fut de n’en rien faire et de préférer le martyre. Comme l’immense majorité (les lapsi) préféra obtempérer ou biaiser (autrement dit, pratiquer une sorte de tafia avant la lettre) cela posa un très grave problème à l’Église naissante une fois ces vagues de persécutions passées, un peu analogue au cas des divorcés remariés aujourd’hui dans le catholicisme : que faire des Lapsi, pouvait-ont les admettre de nouveau à la communion ? La solution retenue (le pardon après une longue pénitence) fut même à l’origine du schisme donatiste).
Pour en revenir à l’islam, à l’inverse, les musulmans sunnites, loin de souffrir de persécutions, et chaque fois qu’ils en ont eu la possibilité, ont théorisé le petit djihad contre le royaume de la mécréance (Dar al hart) ; et c’est là qu’ils ont déployé la taqiya – non pas en tant que manœuvre de dissimulation, mais en tant que tromperie active. Cette tromperie, qui trouve son fondement dans les hadiths, est souvent décrite comme égale – voire supérieure – à d’autres vertus militaires universellement reconnues comme le courage, la bravoure ou le sens du sacrifice.
Qu’est-ce exactement que la taqiya ? Comment est-elle justifiée par les juristes et ceux qui y recourent ? Comment s’inscrit-elle dans une vision plus large du code éthique de l’islam, en particulier en ce qui concerne les relations avec les non-musulmans ? Plus concrètement, en quoi la doctrine de la taqiyya pénètre-t-elle les interactions entre musulmans et non-musulmans ?
Selon la charia – l’ensemble des règles de droit qui définissent la manière dont le musulman doit se comporter dans toutes les circonstances – le mensonge est non seulement permis dans certaines situations, mais il peut être considéré comme obligatoire dans certaines autres. Contrairement à la tradition chrétienne du martyre, par exemple, les musulmans qui étaient forcés de choisir entre renier l’islam ou être persécutés avaient le droit de mentir et de feindre l’apostasie. Ce qu’une majorité de chrétiens de l’Antiquité, les lapsi, ont également fait d’ailleurs ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir. D’autres juristes musulmans ont également rappelé que les musulmans avaient le devoir de mentir pour se protéger. Telle est la définition classique de la doctrine de la taqiya.
Là où le bât blesse, c’est l’usage extensif et préventif qu’en font certains musulmans à l’intention des idiots utiles de l’islam, et Dieu sait qu’il n’en manque pas dans notre pays.
MAIS CE FAISANT IL EST VRAI ILS NE FONT QUE SE COMPORTER COMME LE LEUR RECOMMANDE LEUR JURISPRUDENCE EN DAR AL HARB OU TERRE DE GUERRE ; car Mahomet lui-même a déclaré que l’art de la guerre était une tromperie (Boukhari tome 4, livre 52, hadith numéro 269 : « La guerre n’est que tromperie ».
Il a d’ailleurs pris d’autres positions qui ont fait de la tromperie une action positive, comme lorsqu’il a déclaré : « Dieu m’a commandé de parler de façon équivoque, tout comme il m’a commandé d’édicter des obligations [religieuses] » ; ou encore : « J’ai été envoyé dans des conditions impénétrables », et « celui qui vit dans la dissimulation meurt en martyr » (Shihab ad-Din Muhammad al-Alousi al-Baghdadi, Rouh al-Ma'ani fi Tafsir al-Qur'an al-'Azim oua' l-Saba' al-Mithani – Beirut : Dar al-Koutoub al-'Ilmiya, 2001-, t. 2, p. 118, traduction Raymond Ibrahim).
LES BASES CORANIQUES DE LA TAQIYA MAINTENANT.
Verset 35, chapitre 47. « Ne faites pas appel à la paix quand vous êtes les plus forts. Dieu est avec vous, il ne vous privera pas de la récompense due à vos œuvres ».
Bref, la condition nécessaire pour qu’il y ait paix ou réconciliation est que les musulmans aient l’avantage. C’est formulé de manière très claire dans un texte sunnite de droit islamique que nous avons déjà maintes fois cité, l’Oumdat as-Salik ou Dépendance du voyageur écrit au quatorzième siècle par un savant égyptien, Ahmad Ibn Naqib al-Misri : « Il faut qu’il y ait quelque avantage [maslaha] accordé en cas de trêve, autre que le statu quo ».
Le verset 3, 28 du Coran est néanmoins souvent considéré comme le principal de ceux qui préconisent la dissimulation envers les non-musulmans : « Que les croyants ne prennent point pour alliés des infidèles plutôt que des croyants. Ceux qui le feraient ne doivent rien espérer de la part de Dieu, à moins que vous n’ayez à craindre quelque chose de leur côté ».
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Sans oublier le verset 35 chapitre 47 déjà mentionné. « Ne faites pas appel à la paix quand vous êtes les plus forts. Dieu est avec vous, il ne vous privera pas de la récompense due à vos œuvres ».
En bref, les plus anciennes données historiques sur l’islam montrent clairement le recours à la taqiyya comme arme de guerre islamique. De plus, on décrit souvent la manière dont les premiers musulmans mentaient pour se dégager de leurs obligations en général en reniant ou insultant l’islam ou Mahomet – souvent avec l’approbation de celui-ci, son seul critère étant que leurs intentions (niya) soient pures. Pendant les guerres contre les chrétiens, chaque fois que ceux-ci étaient en position de pouvoir, la pratique de la taqiyya devenait encore davantage partie intégrante de leur vie. Selon Moukaram, « la taqiyya a été utilisée comme moyen d’écarter le danger des musulmans, surtout aux temps critiques et lorsque leurs frontières ont été exposées aux guerres contre l’Empire byzantin puis aux incursions [croisades] des Francs et autres »
La taqiya soulève donc toute une série de dilemmes éthiques. Quelqu’un qui croit vraiment que Dieu justifie et, à travers l’exemple de son prophète, va même jusqu’à encourager le mensonge, n’éprouvera aucun scrupule d’ordre moral à mentir lui aussi.
Quand un groupe de musulmans de premier plan écrit une lettre ouverte au peuple américain peu après les frappes du 11 septembre, expliquant que l’islam cherche à coexister pacifiquement, Ben Laden a écrit pour les fustiger :
« Quant à la relation entre musulmans et infidèles, elle est résumée par la parole du Très-Haut : « Nous [les musulmans] vous [les non-musulmans] renions. Entre vous et nous, l’inimitié et la haine sont à jamais déclarées, jusqu’à ce que vous croyiez en Dieu, seul » [Coran 60, 4]. Il y a donc une inimitié, dont témoigne une hostilité viscérale farouche, et telle hostilité, c’est-à-dire cette guerre, ne cessera que si l’infidèle se soumet à l’autorité de l’islam, ou s’il est interdit de verser son sang [c’est-à-dire s’il est un dhimmi, ou minorité protégée], ou si les musulmans sont à ce moment-là faibles et incapables. Mais si la haine viscérale s’éteint à un moment quelconque, c’est une grande apostasie ! Tels sont donc la base et le fondement de la relation entre l’infidèle et le musulman. Combat, animosité et haine, du musulman envers l’infidèle, sont les fondements de notre religion. Et nous considérons que c’est faire preuve de justice et de bonté envers eux ».
L’histoire témoigne de cette schizophrénie, qui est bien traduite par une idée très répandue chez les musulmans et fondée sur un hadith : si c’est possible, le petit djihad doit être mené par la main (la force), et sinon, par la langue (le prêche) ; et si cela non plus n’est pas possible, par le cœur ou par les intentions.
Aucun lecteur attentif ne peut manquer de remarquer les nombreux versets contradictoires du Coran, et plus précisément la manière dont des versets pacifiques et tolérants figurent pratiquement à côté de versets violents et intolérants.
Les oulémas ont d’abord été déroutés quand il s’est agi de déterminer les versets à codifier dans la vision mondiale de la charia : celui qui affirme qu’il n’y a pas de contrainte en religion (2, 256), ou ceux qui ordonnent aux croyants de combattre tous les non-musulmans jusqu’à obtenir leur conversion à l’islam ou, au moins, leur soumission à l’islam (8,9 ; 9,5 ; 9, 29) ?
Pour se tirer de cet embarras, les commentateurs ont mis au point la doctrine de l’abrogation, qui affirme pour l’essentiel qu’en cas de désaccord, les versets révélés plus tard dans la carrière de Mahomet prennent le pas sur les versets antérieurs. Pour savoir quels versets abrogeaient quels autres, il est donc apparu une « science » religieuse vouée à la chronologie des versets coraniques (on l’appelle an-Nasikh oua'l Mansoukh, l’abrogeant et l’abrogé).
Mais pourquoi y a-t-il des contradictions ?
Certains théologiens musulmans récusent d’ailleurs le caractère formel de ces contradictions et soulignent que chacun de ces versets garde toute sa force, n’attendant qu’une occasion pour être activé. Tout dépendant des circonstances. Le passage progressif des versets passifs et spirituels à des prescriptions et injonctions de droit pour répandre la foi par le petit djihad et la conquête était destiné par Dieu à ne pas décourager les premiers musulmans en leur imposant des contraintes trop lourdes. Dieu a voulu procéder par étape avec les premiers fidèles. Dit autrement lorsque les musulmans sont faibles et en position de minorité, ils doivent prêcher et se comporter conformément à l’esprit des versets de La Mecque (amour et paix) qui gardent toute leur valeur dans de semblables circonstances. Quand ils sont forts, en revanche, les musulmans doivent passer à l’offensive en se fondant sur les ordres formulés dans les versets de Médine (guerre et conquête).
Nous ne pouvons cautionner un tel raisonnement faisant de Dieu le plus grand des makar, autrement dit le meilleur menteur ou conspirateur (Coran 3,54, 8,30, 10,21) pour diverses raisons, la première étant que si Dieu existe il ne saurait procéder ainsi avec les hommes. C’est un anthropomorphisme écœurant. La seconde étant qu’un tel pragmatisme équivaut à un opportunisme dénué de toute morale. Du type : « la fin justifie les moyens ».
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D’autres théologiens considèrent plus simplement que, dans les premières années de l’islam, Mahomet et sa petite communauté étant bien moins nombreux que leurs adversaires infidèles alors qu’ils vivaient à côté d’eux à La Mecque, un message de paix et de coexistence était nécessaire. Mais, lorsque les musulmans ont émigré à Yathrib/Médine en 622 et ont acquis de la force militaire, les versets les incitant à passer à l’offensive ont lentement été « révélés » – en principe envoyés par Dieu – toujours en accord avec les capacités croissantes de l’islam.
Quelle que soit l’explication retenue, le résultat est le même : lorsque les musulmans sont faibles et en position de minorité, ils doivent prêcher et se comporter conformément à l’esprit des versets de La Mecque (tolérance paix amour) ; quand ils sont forts, en revanche, ils doivent passer à l’offensive en se fondant sur les ordres formulés dans les versets de Médine (guerre et conquête).
CI-DESSOUS QUELQUES EXEMPLES DE KITMAN OU TAQIYYA ACTUELLES.
Il est vrai que notre ami le cheikh Muhammad Sarwar est de confession chiite, mais le plus subtil exemple de taqiya est peut-être celui qui consiste à faire croire que ce phénomène ne concerne que le monde chiite. Or, ainsi que l’a bien démontré Raymond Ibrahim, cela est faux. Ce qui est vrai c’est
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que la taqiya a longtemps été analysée par les universitaires occidentaux, comme une attitude à adopter dans les périodes de persécution religieuse, et c’est donc pour l’essentiel en ce sens qu’elle a été utilisée par les groupes chiites minoritaires vivant au sein de majorités sunnites hostiles. La taqiya permettait aux chiites de masquer constamment aux sunnites leur appartenance religieuse, non seulement par la dissimulation, en cachant leur propre croyance, mais également de manière active en priant et se comportant comme des sunnites.
L’un des quelques livres consacrés au sujet, At-Taqiyya fi'l-Islam (La dissimulation dans l’islam), montre cependant très clairement que la taqiya n’est pas limitée à la dissimulation des chiites menacés de persécution. Écrit par Sami Moukaram, ancien professeur d’études islamiques à l’université américaine de Beyrouth et auteur de quelque vingt-cinq livres sur l’islam, cet ouvrage met clairement en évidence l’ubiquité et le large domaine d’application de la taqiya.
La taqiya revêt dans l’islam une importance fondamentale. Pratiquement toutes les sectes islamiques en admettent le principe et la pratiquent… On peut aller jusqu’à dire que la pratique de la taqiya est très majoritaire dans l’islam, et que les quelques branches qui ne la pratiquent pas s’écartent de ce courant majoritaire… La taqiya est très présente dans la politique islamique, et particulièrement à l’époque moderne.
La taqiyya n’est donc pas, comme on le croit souvent, un phénomène limité au chiisme. Bien entendu, en tant que groupe minoritaire dispersé parmi leurs ennemis sunnites, les chiites ont historiquement eu davantage de raisons de se dissimuler. À l’inverse, l’islam sunnite a rapidement dominé de vastes empires qui s’étendaient de l’Espagne à la Chine. De ce fait, ses adeptes n’avaient de compte à rendre à personne, ils n’avaient à s’excuser de rien, et ils n’avaient pas à se cacher des infidèles mécréants (parmi les rares exceptions figurent l’Espagne et le Portugal pendant la Reconquista, époque où les sunnites ont effectivement dissimulé leur identité religieuse. Pourtant, l’ironie des choses fait que les sunnites vivant en Occident se trouvent aujourd’hui dans la situation du chiisme. Ils sont la minorité entourée de ses ennemis traditionnels – les infidèles chrétiens – même s’il est rare que ceux-ci, contrairement à leurs prédécesseurs de la Reconquista, passent aux actes ou même reconnaissent cette inimitié historique. En bref, les sunnites vivent aujourd’hui la situation générale qui a amené la taqiya à faire partie intégrante du chiisme, mais sans la menace physique qui avait imposé cette attitude.
LE PROBLÈME DES FAUX AMIS.
La taqiya est la continuation du djihad par d’autres moyens.
Relève également de la taqiyya le procédé consistant à utiliser des euphémismes pour traduire certains mots.
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Il est vrai que la notion de djihad (djihad Fi Sabilillah) n’apparaît que 26 fois dans les 6300 versets du Coran, avec en plus souvent le sens de combat spirituel ou intérieur, MAIS la notion de Qital (impératif « qatilu ») elle, apparaît 79 fois (exemple fa-qatilou a’immat al-koufr) et signifie bien « faire la guerre, voire tuer ».
N’utiliser que la notion de « combat » pour traduire ce terme coranique peut déjà être de la taqiya si ce n’est pas un dangereux angélisme, car il ne s’agit pas de lutte celtique ou gréco-romaine, mais de lutte « à mort ». Comme le disait Pascal, l’homme est ni ange ni bête et le malheur est que qui veut faire l’ange fait la bête.
Nous avons vu précédemment les difficultés voire l’impossibilité de tout dialogue entre l’islam et les autres religions du monde. Une des pierres d’achoppement de ces tentatives est constituée par les problèmes de traduction. Mahomet et les siens ayant peu à peu rapproché leur mystique païenne initiale du judéo-christianisme, ils lui ont donc emprunté beaucoup de notions et de concepts. Mais en en élargissant considérablement le sens.
Traduttore traditore. Tout traducteur est un traître et la traduction automatique en fournit quotidiennement les preuves par moment ubuesques !
Dieu La Chance Allah Jéhovah Élohim Christ Seigneur le Grand Manitou le Destin…… sont-ils bien d’exactes traductions les uns des autres ? Certainement pas ! Ce sont des conceptions de Dieu. Et des conceptions de Dieu différentes. Il n’existe que ça d’ailleurs, des conceptions de Dieu ! Car Dieu en lui-même n’existe pas ! Ou alors il faudrait tout d’abord se mettre d’accord sur ce que l’on entend par Dieu.
L’être suprême ? Le principe originel ? Le créateur de l’univers ? L’Esprit ? Le Grand Esprit ? La fusion métamorphique de l’esprit et de la matière ?
Par Dieu nous entendons donc « telle ou telle conception de Dieu ». Et c’est de telles conceptions de Dieu que nous pouvons dire qu’elles existent ou n’existent pas. Dieu n’est pas un être (suprême ?) objectif, dont l’existence est mesurable, observable, quantifiable (à moins de l’assimiler à l’Univers, à ce qui existe, à tout ce qui existe, vraiment, même de façon invisible et inconnue pour l’instant).
Le maintien du nom propre Dieu (Dieu lunaire du panthéon mecquois) pour dire Dieu pose problème, à moins qu’il ne soit révélateur du milieu non abrahamique, non judéo-chrétien, dans lequel il est apparu et s’est donné un premier contenu.
Soumission ou Islam ? Le mot islam vient de la quatrième forme verbale de la racine slm aslama « se soumettre » et signifie donc « soumission » (sous-entendu à Dieu). Mouslim, musulman, en est le participe actif « celui qui se soumet » (sous-entendu à Dieu). N.B. Bien entendu cette soumission à la volonté divine s’est d’emblée confondue avec la soumission à la loi de Moïse (ou de Mahomet, en l’occurrence). Bref, islam est un mot arabe signifiant soumission, on ne sait donc jamais dans le Coran si l’on parle de soumission à Dieu en général ou d’islam en particulier.
Le terme arabe Fitna résume à lui seul toute l’ambigüité de certains versets du Coran.
Il est notamment utilisé dans le verset 193 du chapitre 2 « combattez-les jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de fitna et que le culte soit rendu à Dieu dans sa totalité ».
Et dans le verset 39 du chapitre 8 qui en constitue une répétition (lavage de cerveau).
« Combattez-les jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de fitna que le culte soit rendu à Dieu dans sa totalité ».
Le terme est souvent traduit par persécution, sédition, soulèvement, trouble discorde…
Il désigne en fait toute opposition ou résistance à l’islam et le sens véritable de ces versets se ramène donc en définitive à celui-ci : « combattez jusqu’il n’y ait plus d’opposition ni de résistance à l’islam ».
Un des problèmes de l’islam est qu’il a considérablement élargi le sens de certains mots ou de certaines notions empruntés aux religions juive et chrétienne de son temps.
Exemple la notion de martyr.
Dans son ouvrage Rome et le martyre, Glen W. Bowersock rappelle l’extension du concept de martyr auprès des populations musulmanes, avec la conquête de la Palestine au 7e siècle. C’est après la conquête musulmane de la Palestine au 7e siècle que la notion de témoin (chahid) en vient à signifier explicitement la mort sacrée, en référence à la notion grecque de marturos et à sa double signification comme témoin et martyr. Reste qu’il y a dans le cas du martyr musulman une différence fondamentale qu’il conviendrait de souligner d’emblée : la justification du martyre en islam se fonde sur le chapitre du Repentir, selon laquelle le principe consiste à « tuer ou se faire tuer » (9,111) comme il est dit dans les évangiles, etc.…
Autrement dit, la violence ne provient pas exclusivement du côté de l’adversaire, mais elle est assumée par le croyant musulman qui y recourt en toute légitimité selon les préceptes de sa foi. Sur ce point, la signification est tout autre dans le christianisme où la violence physique est à sens unique. Le martyre musulman est fortement lié à cette autre notion séminale qu’est le petit djihad, ou guerre sainte. Mais la différence majeure entre la notion de petit djihad dans l’islam et celle de croisade dans
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le christianisme réside dans leur fondement théologique : présent dans l’islam, il est absent du christianisme.
Il est tout à fait logique de se référer au mot grec marturos qui signifie témoins quand on parle de martyr dans notre langue puisque telle est son étymologie (ce qui ne veut pas dire que son sens n’ait pas évolué) depuis son acclimatation dans le latin d’église (les druides mettaient tout le monde d’accord en se référant au concept italo-celtique de « ver sacrum »).
Il est n’est pas logique ni approprié par contre de remonter à cette notion grecque de témoins quand on parle des chahid de l’islam. Le chahid musulman est un homme qui est mort en prononçant la chahada et généralement EN COMBATTANT LES ARMES A LA MAIN (SUR LA VOIE DU PETIT DJIHAD). Alors que le martyr chrétien lui par définition ne se bat pas, même pour se défendre. Alors que le martyr chrétien, lui, ne recourt jamais aux armes, il se laisse faire, voire tend l’autre joue.
Il s’agit donc en fait d’une mauvaise traduction de ce mot arabe (chahid).
Il faut par conséquent cesser de parler de martyr quand il s’agit de petit djihadiste mort au combat les armes à la main et, pourquoi pas, enrichir notre langue en utilisant le terme chahid quand il convient.
Puisque la notion chrétienne de martyr est en effet fondamentalement différente. Pour les chrétiens et dans les pays de tradition chrétienne en effet, le martyre désigne un témoignage qui va jusqu’à la mort, non pas donnée, mais reçue. Heureusement pour le christianisme il y a surtout eu des lapsi ou des gens assez habiles pour passer au travers de ces brèves et sporadiques persécutions, en saisissant les différents moyens que leur laissaient les autorités romaines pour cela. Bref en pratiquant une sorte de taqiya avant la lettre.
Le dialogue en une langue autre que l’arabe, avec un musulman pieux, est donc difficile, car de part et d’autre on ne donne pas le même sens aux mots.
Le fait que les mots n’ont dès lors plus le même sens dans la bouche d’un musulman convaincu et dans la bouche d’un non-musulman peut évidemment avoir d’autres causes, mais toutes concourent au même résultat : la taqiya.
NOTE À PROPOS DE L’ARGUMENT DE LA MAUVAISE TRADUCTION.
Les thuriféraires ou les idiots utiles de l’islam objectent souvent dans les cas les moins défendables qu’il s’agit une erreur de traduction, que l’important est de se référer au texte arabe. Oui, mais lorsque les mêmes souhaitent en donner une bonne image, ils citent des passages en anglais (ou en Allemand ou en Espagnol ou en italien ou en Français) et là, étrangement, il n’y a plus de problème de traduction.
LES FAUX PARALLÈLES. Il est nécessaire de comparer ce qui est comparable.
Le Coran c’est la Bible des musulmans…
Surtout pas ! Pour les chrétiens le Nouveau Testament a réformé l’ancien pour le remplacer par une nouvelle alliance. Le message du grand rabbin nazaréen appelé Jésus consigné dans la partie Nouveau Testament de la Bible est donc la seule à prendre en compte pour les chrétiens malgré toutes les ambigüités longtemps entretenues à ce sujet. Par ailleurs, en tant que somme de témoignages, l’évangile peut être remis en question. Il y a d’ailleurs des contradictions même entre les trois synoptiques et ne parlons pas ici de l’évangile qui fait un peu bande à part, celui de Jean. Le Coran lui prétend venir tout droit de Dieu (Un plus exactement d’un Coran incréé coexistant de toute éternité avec Dieu) et ne peut donc être remis en question malgré un contenu plus que douteux.
Quant aux croisades il est nécessaire de rappeler 2 points.
Premier point elles n’avaient pas pour objet officiel de convertir les populations locales, mais de permettre l’accès la ville de Jérusalem.
Second point, autre fondamentale différence avec l’islam, la violence exercée lors de ces conquêtes l’a été EN CONTRADICTION AVEC LE TEXTE FONDATEUR PRÉCITÉ (les 4 évangiles) ET NON EN ACCORD AVEC LUI.
Autre forme de taqiyya : le petit djihad masqué sous forme de plaintes ou revendications. Une des formes masquées ou atténuées du petit djihad en dehors du Dar Al Islam est évidemment la multiplication des revendications communautaristes habilement présentées (taqiya).
En terre d’islam, le bien et le mal n’ont pas grand-chose à voir avec les normes universelles et se réfèrent uniquement à l’enseignement de l’islam lui-même. Pourtant, la plupart des Occidentaux continuent à penser que les mœurs, les lois et les contraintes éthiques des musulmans sont pratiquement identiques à celles des droits de l’Homme. Avec naïveté ou arrogance, les multiculturalistes d’aujourd’hui projettent leur propre vision du monde sur les islamistes, et pensent qu’une poignée de main et un sourire autour d’une tasse de thé, avec de nombreuses concessions, suffiront à démanteler le pouvoir de la parole de Dieu et de siècles de tradition immuable.
Répétons-le encore une fois, il n’existe pas dans l’islam de paraboles du bon Samaritain ni du Fils prodigue.
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Hadith ou sourate du Coran des chrétiens selon saint Luc, 10, 29 à 37. « Qui est mon prochain ? Jésus reprit : « un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et tomba au milieu de brigands qui après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à demi mort. Un prêtre, par hasard, descendait par ce chemin ; il le vit, prit de l’autre côté de la route et passa. Pareillement un lévite, survenant en ce lieu, le vit, prit l’autre côté de la route et passa. Mais un Samaritain [c’est à dire un homme appartenant à un peuple ennemi juré des juifs], qui était en voyage, arriva près de lui, le vit et fut touché de compassion. Il s’approcha, banda ses plaies, y versant de l’huile et du vin, puis le chargea sur sa propre monture, le conduisit à l’hôtellerie et prit soin de lui. Le lendemain, il tira deux deniers, les donna à l’hôtelier, en disant : ‘Aie soin de lui, et ce que tu auras dépensé en plus, c’est moi qui le payerai lors de mon retour ». Lequel de ces trois, à ton avis, s’est montré le prochain de l’homme tombé aux mains des brigands ? »
Hadith ou sourate du Coran des chrétiens selon saint Luc 15, 11 à 32.
« Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : « Père, donne-moi la part de fortune qui me revient’. Et le père leur partagea son bien. Peu de jours après, le plus jeune fils, rassemblant tout son avoir, partit pour un pays lointain et y dissipa son bien dans une vie de prodigue.
Quand il eut tout dépensé, une grande famine survint en ce pays et il commença à sentir la privation. Il alla se mettre au service d’un des habitants de la contrée, qui l’envoya dans ses champs garder les cochons. Il aurait bien voulu se remplir le ventre des caroubles que mangeaient les cochons, mais personne ne lui en donnait. Rentrant alors en lui-même, il se dit : ‘Combien de journaliers de mon père ont du pain en abondance, et moi je suis ici à mourir de faim ! Je veux partir, retourner vers mon père et lui dire : Père, j’ai péché contre le Ciel et contre toi ; je ne mérite plus d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes journaliers’. Il partit et s’en retourna vers son père.
Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut touché de compassion ; il courut se jeter à son cou et l’embrassa longuement. Le fils alors lui dit :’Père, j’ai péché contre le Ciel et contre toi, je ne mérite plus d’être appelé ton fils’.
Mais le père dit à ses serviteurs :’vite, apportez la plus belle robe et l’en revêtez, mettez-lui un anneau au doigt et des chaussures au pied. Amenez le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé ».
Mais revenons à nos moutons c’est-à-dire aux thuriféraires de l’islam et à leur casuistique (taqiya).
La chaîne de télévision allemande ARTE, a diffusé en 2015 une série de 8 vidéos rebaptisées « reportages » intitulée « Islam is love » (en anglais dans le texte).
D’où il ressort entre autres niaiseries faisant le lit de l’islam radical, que le véritable islam serait celui de Cordoue en Espagne au Xe siècle.
Dit autrement, ce que prônent ces intellectuels européens c’est, comme dans l’Andalousie médiévale, une société où l’islam est une religion d’État, où il y a une place de citoyens de seconde zone réservée aux juifs et aux chrétiens (la conversion ou un impôt spécial à payer en étant humiliés à chaque fois : saghirouna) et rien pour les autres (les agnostiques athées païens et autres yézidis ou hindouistes…)
Nous reviendrons donc sur cette dangereuse et criminogène idéalisation de l’islam hispanique par les idiots utiles de service et nous reconnaîtrons d’emblée pour ne pas faire perdre un temps précieux que le véritable islam est celui de ces journalistes franco-allemands.
En ce qui nous concerne nous nous ne parlerons donc ici que du faux islam c’est-à-dire celui qui est fondé sur les quatre piliers que sont le Cora, les hadiths, la Sira et la charia, car nous ne voulons pas perdre plus de temps avec l’arbre qui cache la forêt.
Autre mythe de même nature celui de l’âge d’or de l’Islam (7e 13e siècle). Il en va de même pour les avancées scientifiques attribuées à l’islam des premiers siècles. La notion de zéro a par exemple été en réalité empruntée aux Indiens, le papier aux Chinois. En fait ce sont les populations vaincues qui ont beaucoup contribué aux progrès de la science durant l’âge d’or de l’islam. Le cas le plus emblématique est celui du grand mathématicien Thabit Ibn Qurra Ibn Marouane al-Sabi al-Harrani (836 – 901)
Qui comme son nom l’indique était un sabéen* de Harran (actuelle Turquie) et non un musulman. Il a traduit un grand nombre d’auteurs grecs traitant de mathématique, d’astronomie, ou de médecine, en syriaque ou en arabe.
Mais cet apport des non-musulmans à la Science a peu à peu diminué au fur et à mesure des conversions dues aux pressions du statut de dhimmi.
N’oublions pas non plus que certains scientifiques ou philosophes musulmans furent souvent considérés comme hérétiques à leur époque. Le persan Al Ramzi par exemple. Il fut dénoncé en son temps comme blasphémateur, car ses idées religieuses personnelles s’éloignaient beaucoup de l’islam traditionnel.
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Bref, ce que les thuriféraires de l’islam oublient généralement de rappeler c’est que cet âge d’or de l’islam au point de vue scientifique et technologique n’a rien à voir avec la religion, mais au fait qu’en quelques décennies ces découvertes et ces technologies ont pu circuler d’est en ouest dans un même Empire, des confins du monde indien ou chinois (le zéro, le papier) au sud de l’Europe (sud de la France jusqu’à Poitiers). Et que la conquête musulmane a par contre coupé l’Europe de l’accès direct aux manuscrits grecs et donc aux restes de la science grecque encore présents en Orient.
Autre mythe. Djihad signifie seulement lutte intérieure. Certaines sourates dispensant du djihad les malades ou les infirmes (par exemple les aveugles ou les boiteux) montrent qu’elles parlent bien en l’occurrence d’un petit djihad physique et non d’un grand djihad spirituel.
En voici une parmi d’autres.
Versets 17, chapitre 48. « Il n’y a aucune faute à reprocher à l’aveugle, il n’y a aucune faute à reprocher au boiteux, il n’y a aucune faute à reprocher au malade s’ils s’abstiennent de combattre ».
Le petit djihad physique personnel est donc un devoir. Le petit djihad matériel et physique est un devoir religieux en raison du caractère universel de la mission des musulmans et de l’obligation de convertir tout le monde à l’islam, par la persuasion ou par la force. L’islam est dans l’obligation de prendre le pouvoir sur les autres nations.
Le grand Ibn Khaldoun qui visiblement oublie un peu vite l’appel à l’évangélisation universelle figurant dans saint Matthieu 28, 19 (normal pour un musulman évidemment, moins pour des évêques) l’a explicitement déclaré dans ses prolégomènes.
« Il y a toujours eu des guerres et différents types de combats dans ce monde depuis que Dieu l’a créée. L’origine de ces guerres tient au désir de certains êtres humains de se venger d’autrui… La raison de telles vengeances est en règle générale la jalousie et l’envie, ou l’inimitié, ou le zèle pour Dieu et sa religion, voire le zèle pour l’autorité royale et la volonté de se tailler un royaume.
La première [sorte de guerre] généralement a lieu entre tribus voisines et familles rivales.
La seconde [sorte de guerre] – les guerres dues à l’inimitié – se retrouve généralement au sein des nations sauvages vivant dans le désert, comme les Arabes, les Turcs, les Turkmènes, les Kurdes et les peuples semblables. Ils gagnent leur subsistance à la pointe de leurs lances en privant les autres personnes de leurs biens.
La troisième [sorte de guerre] est celle que la loi religieuse appelle « guerre sainte ».
La vérité est donc bien que le Coran et les hadiths, et notamment ses fameuses sourates médinoises abrogeantes dites de l’épée du combat ou du petit djihad, sans oublier la sira, appellent soit à la conversion forcée soit à la soumission à l’islam par le biais de la réduction à l’état de dhimmi (autrement dit un statut de seconde zone).
Autre idée reçue ; reçue ou colportée par les journalistes politiques ou les intellectuels thuriféraires de cette religion : l’islam c’est la paix ! L’ISLAM N’A ÉTENDU SON EMPIRE QUE GRÂCE À DES GUERRES DE LÉGITIME DÉFENSE, C’EST LE SEUL CAS DANS L’HISTOIRE, D’UN EMPIRE QUI NE S’EST BÂTI QUE SUR LA LÉGITIME DÉFENSE. LES PERSÉCUTIONS ONT FAIT DES DIZAINES DE MILLIERS DE VICTIMES MUSULMANES À LA MECQUE ET ONT CONTRAINT MAHOMET À FUIR À YATHRIB/MÉDINE POUR Y SAUVER SA VIE, CE QUI NE L’A PAS EMPÊCHÉ D’Y MOURIR QUELQUES ANNÉES PLUS TARD DANS D’ATROCES SOUFFRANCES, EMPOISONNÉ PAR DES ENNEMIS INCONNUS. Certains ajoutent par des juifs (comme Jésus). Ou par des proches ? Très proches ?
Soyons sérieux. La vérité est que Mahomet a organisé pas moins de 65 campagnes militaires et en a personnellement mené 27. Tout ceci figure dans sa biographie officielle, la Sira d’Ibn Ichaq (reprise par Ibn Hicham). Et les campagnes militaires ayant le plus étendu le domaine de l’islam furent le fait de compagnons de Mahomet. Leur habitude, en cas de résistance, était, pour les populations vaincues, que les hommes refusant de se convertir ou d’accepter le statut de dhimmis soient exécutés et les femmes ou les enfants vendus comme esclaves suivant le « modèle » des malheureux juifs de Khaïbar en 628.
Le sort des Banou Jadhima en 630 montre qu’en ce domaine il valait mieux se convertir deux fois plutôt qu’une.
Lorsque les « missionnaires » musulmans de Khaled Ibn Oualid approchèrent de leur tribu, un de ses membres les prévint qu’ils seraient massacrés bien qu’ils se fussent déjà « convertis » à l’islam afin d’éviter la mort. Les autres membres de la tribu furent néanmoins convaincus qu’ils pouvaient faire confiance à la promesse du chef musulman qu’il ne leur serait fait aucun mal, à la condition qu’ils n’offrent aucune résistance.
Muhammad Husayn Haykal dans son livre intitulé « La vie de Mahomet ».
Sa mission ayant été accomplie, ibn al Oualid se mit en route pour affronter les Banou Jadhima. La population prit les armes à son approche. Khalid leur demanda de déposer leurs armes puisque tout le monde chez eux avait déjà accepté l’islam. Un des membres de la tribu des Jadhima dit alors à son
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peuple : « Malheur à vous, Banou Jadhima ! Ne savez-vous pas que c’est Khalid ? Par Dieu, il n’y aura plus rien à espérer pour vous une fois que vous aurez baissé les bras, sauf la captivité, et une fois que vous aurez été faits prisonniers, la mort ». Certains de ses contribules lui rétorquèrent : « Tu veux donc nous faire tous tuer ? Ne sais-tu pas que la plupart des hommes se sont déjà convertis à l’islam, que la guerre est finie et que l’ordre est revenu ? » Ceux qui étaient de cet avis continuèrent à discuter de la sorte avec les membres de leur tribu jusqu’à ce qu’ils déposent les armes.
Ibn Al Oualid donna ensuite l’ordre qu’on les attache et il fit exécuter certains d’entre eux (Haykal, Vie de Mahomet, p. 443).
Ibn Oualid semble en effet avoir eu un contentieux personnel avec cette tribu.
* Une sorte de yézidi.
LES CITATIONS TRONQUÉES.
Il est bien connu qu’avec des citations tronquées on pourrait faire condamner un saint ou absoudre le Diable.
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Un des procédés actuels de la taqiyya consiste donc à mettre en avant des extraits de certaines sourates, sans préciser ce qui suit ou sans dire qu’elle a été abolie par des versets médinois.
Les journalistes pourtant par ailleurs inlassables critiques de certains partis, ou les thuriféraires de l’Islam, citent souvent par exemple le célèbre verset 256 du chapitre 2 qui stipule : « Nulle contrainte en religion ».
Certes c’est un verset bien tentant, mais il a été abrogé par plusieurs autres versets médinois ultérieurs, les non moins célèbres versets de l’épée du combat et du petit djihad. À savoir les versets 5 du chapitre 9, 29 du chapitre 9, 4 du chapitre 47.
Un autre verset souvent cité par les adeptes de la taqiya à l’intention des chrétiens ou des journalistes assez ignorants pour ne pas connaître la suite de la citation, est le verset 82 du chapitre 5. « Les hommes les plus proches des croyants par l’amitié sont ceux qui disent : « oui nous sommes chrétiens ».
Ce qui suit montre clairement qu’il ne s’agit pas de chrétiens chrétiens mais de judéo-chrétiens sur le point de se convertir « Tu vois leurs yeux déborder de larmes lorsqu’ils entendent ce qui est révélé au prophète à cause de la vérité qu’ils reconnaissent en lui ».
Bref, pour l’islam les chrétiens doivent cesser d’être chrétiens et rejeter la trop païenne notion de Trinité pour ne pas aller brûler en effet pour l’éternité en enfer. Verset 73, chapitre 5. « Sont assurément des incroyants ceux qui disent Dieu n’est que le troisième élément d’un groupe de trois. S’ils ne renoncent pas à ce qu’ils disent, un terrible châtiment atteindra ceux d’entre eux qui sont incroyants ».
Les thuriféraires de l’islam comme Tarik Ramadan ont donc raison de dire que l’islam enseigne l’amour et la bonté, mais ils oublient de préciser (taqiya) que c’est entre musulmans et pas envers les kouffar. L’empathie envers ceux qui ne sont pas musulmans n’est qu’un plus.
Chapitre 5, verset 32 : « Si quelqu’un tue un homme non coupable de meurtre ou qui n’a pas semé la corruption sur terre, ce sera comme s’il avait tué tous les hommes ».
Ce verset fait partie de ceux qui sont souvent cités par ceux qui veulent rassurer les journalistes occidentaux, en présentant l’islam comme moins violent qu’il ne l’est réellement. Après les attentats du 11 septembre 2001, un imam a même fait inscrire ce verset en grosses lettres sur le devant de sa mosquée. Cependant, ces imams qui veulent rassurer nos intellectuels omettent toujours soigneusement de préciser deux choses.
Tout d’abord, ils citent volontiers le verset 32 ci-dessus, mais jamais le verset qui vient juste après, le verset 33 de ce même chapitre Nº 5. « Voici la récompense de ceux qui font la guerre à Dieu et à son messager, qui s’efforcent de semer la corruption sur la terre ; ils seront tués ou crucifiés ou bien leur main droite et leur pied gauche seront coupés, ou bien ils seront expulsés du pays ».
Ensuite ils oublient de préciser qu’il s’agit là d’un commandement donné AUX FILS D’ISRAËL. Cette sourate du Coran se fait donc l’écho d’une antique idée reçue à propos de l’interdiction universelle du meurtre qui aurait été formulée par le dieu des anciens Hébreux. Et qui ne correspond à rien au point de vue historique. Ou plutôt, là encore, qui n’a été formulée qu’en ce qui concerne les membres du groupe et pas envers les étrangers qui sont des ennemis par définition dans toutes les traditions antiques. Loin de reconnaître l’universalité de la nature humaine et de promouvoir le respect de tout homme, ce verset les restreint aux dimensions du groupe en excluant quiconque se sera rendu coupable de « corruption », c’est-à-dire sera suspect… d’insoumission ?????
Ajouter la précision « innocent » ne sert à rien si on ne définit pas ce que ça veut dire ; ni ce que veut dire semer la corruption sur terre. Une grande partie du Coran est en effet consacrée à décrire ce qui attend les non musulmans dans l’autre monde (l’enfer). Et d’ailleurs comment ne pas considérer comme un corrupteur celui qui rejette une telle conception de Dieu (le plus grand des fourbes ou makr, etc.) ou qui ne reconnaît pas Mahomet fils d’Amina comme le dernier des prophètes, thème manichéen par excellence ? Là encore on est dans le domaine de la taqiya.
UN CAS D’ÉCOLE EN CE DOMAINE.
CONCLUSION DE SAMI ALDEEB JURISTE SUISSE (DANS SON LIVRE INTITULÉ : « Nulle contrainte dans la religion : interprétation du verset coranique 2, 256 à travers les siècles »).
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Un autre cas d’école à connaître absolument (il est utilisé par les propagandistes musulmans pour nous faire croire que l’islam est tolérant) est le célèbre verset 256 du chapitre 2 qui stipule : « Nulle contrainte en religion ».
Le principe de non-contrainte représente certes un progrès par rapport au christianisme du VIIe siècle, mais une régression si l’on considère la société arabe polythéiste qui acceptait toutes les religions.
Ce verset est censé nous laisser croire que l’on peut entrer ou sortir de l’islam librement. Certes c’est un verset médinois mais il est abrogé par plusieurs autres versets médinois ultérieurs, et notamment le non moins célèbre verset de la dhimmitude, le verset 29 du chapitre 9.
Des érudits musulmans comme Ibn Salama (mort en 1020) s’accordent aussi pour dire que le verset 9, 5 du Coran, connu sous le nom d’ayat as-saïf, ou verset de l’épée, abroge environ 124 des versets mecquois plus pacifistes, car cela inclut « tous les versets coraniques qui prêchent autre chose qu’une offensive totale contre les non-croyants. Les quatre écoles de la jurisprudence sunnite sont en effet d’accord pour dire que le petit djihad consiste à faire la guerre aux infidèles qui, après qu’on leur ait enjoint d’embrasser l’islam, ou au moins de payer la djizya et de vivre soumis, ont refusé de le faire.
L’islam, peut-il exister sans ennemi ? La principale des discriminations opérée par la religion musulmane étant la division de l’Humanité entre musulmans et non musulmans, ce qui est sûr c’est qu’il s’ensuit une coupure géographique du monde entre terre d’islam (Dar al islam) et terre à conquérir : Dar al Harb. Il s’agit de deux univers irréductibles, incompatibles.
Ce verset 2, 256, ne dit d’ailleurs nullement : « Nulle contrainte vis-à-vis des membres des autres religions », mais « dans la religion », au singulier, c’est-à-dire « en islam », car il n’est point d’autre religion que l’islam (3,85 ; 9,29 ; 24,2 ; 110,2). Les légistes musulmans ont toujours compris que ce verset signifiait « le droit des non-musulmans à embrasser l’islam sans qu’on les en empêche » parce que l’islam ouvre à une vie de liberté absolue où il n’y a « nulle contrainte » : « Dieu ne vous a imposé aucune gêne dans la religion » (22,78). Ce qui est bien commode, en effet, et explique pourquoi il faudrait préférer l’islam.
Mais qu’une fois entré en islam, on y serait « sans contrainte », relève du mythe, et la vie quotidienne en pays musulman témoigne du contraire, même pour les musulmans… De plus, que l’on vive « sans contrainte » parce que l’on est musulman ne signifie pas que l’on doive renoncer à exercer la contrainte à l’encontre des non-musulmans, ou de ceux qui ne le sont pas assez, ainsi que de nombreux versets, notamment dans la même sourate, en témoignent, en appelant au meurtre des non-musulmans, parce que non musulmans (2,190-193, 216)… La « tolérance » de ce célèbre verset a-t-elle donc quelque chose à voir avec celle que les idiots utiles se plaisent à imaginer ?
Ce texte, nous apprend Aldeeb, est l’un des innombrables exemples de versets incompréhensibles et controversés.
Comme une des caractéristiques du Coran est sa non-contextualisation, on ne sait jamais si les commandements qui précèdent ont une valeur universelle et intemporelle, c’est-à-dire s’ils sont encore valables aujourd’hui, ou s’ils doivent être considérés comme ayant visé uniquement les païens les juifs les chrétiens et les hypocrites de l’époque en Arabie, plus précisément de La Mecque ou de Yathrib/Médine.
Il entre par ailleurs en contradiction avec le Hadith (actes et paroles de Mahomet) : « Le musulman qui change de religion, tuez-le ! » (Sahih Boukhari 84, 57.)
Pour en revenir à notre verset, de nombreux exégètes ont fait chauffer leurs neurones afin que jaillisse la lumière. Sami Aldeeb en cite quelque 80, en arabe avec résumé et commentaire dans notre langue.
Il s’agit d’examiner dans quelles circonstances le verset de tolérance a été révélé (par une longue chaîne de transmission : Isnard), puis d’en tirer les conclusions. Six Hadiths sont pris en compte. Dans l’un figurent des enfants allaités par des femmes juives, dans un autre deux fils convertis au christianisme par deux marchands syriens, dans un troisième l’esclave d’Omar Ouassak, etc.
Les principales conclusions de nos jurisconsultes peuvent se résumer comme suit.
— « Nulle contrainte en religion » ne signifie pour aucun exégète le droit de quitter l’islam ou de ne pas pratiquer ses obligations (jeûne, prière, zakat, etc.) Les personnes nées musulmanes ont l’interdiction de quitter cette religion. L’apostasie est interdite.
— L’écrasante majorité des exégètes estiment que le sens général du verset (c’est-à-dire : liberté absolue) a été abrogé par les versets qui prescrivent le combat contre les autres religions. Rappelons que la règle de l’abrogation a été imaginée pour éliminer les contradictions du Coran.
— Le verset 2,256 ne reste valable que dans le sens de la non-imposition de la conversion aux « gens du livre » (chrétiens et juifs principalement). Ils doivent choisir entre se convertir à l’islam ou conserver leur religion en payant l’impôt spécial – ce qui est bien une contrainte. S’ils refusent ces deux options, ils sont mis à mort.
— Les polythéistes n’ont le choix qu’entre la conversion ou la mort. Ils doivent être éliminés de la surface de la Terre, comme l’écrit un des exégètes modernes, commente Aldeeb.
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Les grands juristes de l’islam n’oublient aucun cas de figure dans leur recherche de la Vérité. Ils précisent par exemple qu’un polythéiste qui se convertit à une religion du livre (le judaïsme ou le christianisme) sera tout de même traité comme un polythéiste. Ce qui signifie qu’il doit soit se convertir à l’islam, soit se faire occire. Quant aux enfants des prisonniers juifs et chrétiens, ils sont convertis de force à l’islam.
L’apprentissage des exégèses fait partie de la formation standard des imams pour passer à la télévision. Les exégèses les plus fameuses sont traduites en de nombreuses langues, notamment en français, et se vendent bien, note l’auteur.
Les interprétations mentionnées n’empêchent néanmoins nullement les exégètes modernes d’assimiler le principe « pas de contrainte en religion » à celui de la liberté religieuse garantie par les droits de l’homme. Or il lui est totalement contraire !
Nous rappellerons que pas un seul pays musulman ne dispense de contraintes les adeptes des autres religions ou les athées, soit sur le plan civil, soit sur le plan pénal. Aucun de ces pays n’admet le principe de la liberté religieuse tel qu’il est formulé par exemple dans l’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Aucun de ces pays n’admet qu’un musulman puisse quitter sa religion en toute liberté. Celui qui le ferait est interdit de mariage, séparé de sa femme et de ses enfants, privé d’héritage, et peut se faire tuer impunément par un membre de sa famille au cas où l’État ne le punirait pas de mort.
Au final, l’utilisation de ce verset par les imams et autres dévots musulmans n’est qu’un des multiples attrape-nigauds destinés à nous induire en erreur… Sachant qu’aucun journaliste n’ira vérifier.
Plus globalement à quoi sert de présenter les versets prétendument tolérants du Coran, comme l’a fait le recteur de la grande mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, en faisant publier par les prestigieuses éditions Dalloz, éditions de référence en matière juridique, Le Coran tolérant (novembre 2007), puisque les versets dits « tolérants » sont censés avoir tous été « abrogés » par les versets disons moins évidemment tolérants ? « À l’expiration des mois sacrés, tuez les polythéistes partout où vous les trouverez ! Capturez-les ! Assiégez-les ! Dressez-leur des embuscades ! » (9.5) ; « Dieu a acheté aux Croyants leur personne et leurs biens contre le Paradis qui leur est réservé. Ils combattent au service de Dieu : ils tuent et sont tués » (9,111).
Les journalistes et les musulmans pieux avancent pour justifier ces versets la nécessité de tenir compte du contexte. Mais ce qui est pertinent pour des historiens ne peut pas l’être pour le message moral, car son intemporalité ne saurait relever du contexte historique. Ou alors cela remet en cause, et son caractère univoque (39,28), et son égale pertinence pour tous les hommes de tous les temps… Ce que Dieu disait alors, il ne le dirait pas aux hommes d’aujourd’hui ? Qu’est-ce à dire ?
Notons enfin que la plus subtile des taqiyas consiste à faire croire qu’il ne s’agit que d’une casuistique chiite. Au sein de communautés sunnites ennemies, les chiites ont eu évidemment historiquement parlant plus de raisons de pratiquer la dissimulation. Inversement, l’islam sunnite ayant rapidement dominé de vastes empires, de l’Espagne à la Chine, ses membres ne devaient rien à personne et n’eurent pas à faire allégeance à d’autres ni à se cacher face à des incroyants infidèles (l’Espagne et le Portugal de la Reconquista sont les rares exceptions où les sunnites ont dissimulé leur identité religieuse).
LA FIN JUSTIFIE-T-ELLE TOUJOURS LES MOYENS ?
La taqiya est la continuation du djihad par d’autres moyens.
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Pour l’exégète Abou Hamid Ghazali (1058-1111) : « Il est permis de mentir si le but à atteindre est louable », ou selon l’inspirateur du Salafisme, Ibn Kathir (cadi et historien ; 1301-1373) : « de sourire à certaines personnes alors que notre cœur les maudit ». On est là aux antipodes du silence de la mer de Vercors…
Si dans le contexte occidental l’alternance naturelle est entre la guerre et la paix, d’après Raymond IBRAHIM dans le cadre de l’islam petit djihadiste elle se fait plutôt entre la guerre et le mensonge. Parce que, du point de vue de l’islam djihadiste, les temps de paix – ceux où l’islam est significativement plus faible que ses adversaires infidèles – sont des temps de paix simulée et de mensonge, en un mot, de taqiya.
Depuis 2012 un nouveau cheval de Troie religieux étend son influence en Europe à partir de Vienne, sur un front anti-laïque, en masquant sa véritable nature.
L’Arabie saoudite, qui a pris l’initiative de la création, du financement et du fonctionnement du Centre international pour le dialogue interreligieux, lui a donné le nom de son roi défunt Abdoullah bin Abdoulaziz. Elle adhère donc aux statuts qui précisent que le KAICIID (centre international pour le dialogue interreligieux et interculturel) soutient la Déclaration universelle des droits de l’Homme, en particulier le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Le Centre combat également toutes les formes de discrimination fondée sur la culture la religion ou la croyance.
Les engagements pris par l’Arabie Saoudite au sein du KAICIID sont d’autant plus paradoxaux qu’au royaume ouahhabite, le culte chrétien a d’énormes difficultés à se pratiquer, que le culte israélite est jugé indésirable, que l’apostasie est passible de mort, et qu’on ne peut y construire ni églises ni synagogues. Ainsi, Riyad demande aux pays européens des ouvertures religieuses qu’elle refuse sur son propre territoire.
L’islam qui n’a pas de tradition de religion minoritaire hors de son Oumma, cherche donc à conserver en Europe le même statut qu’il a dans les pays islamiques (Charia), avec le soutien d’autres religions minoritaires comme le judaïsme. Cette alliance est d’autant plus hasardeuse que les Juifs avaient et ont toujours un statut spécifique en pays majoritairement musulman, celui de Dhimmi.
Quant au Conseil européen de la fatoua et de la recherche, présidé par l’imam extrémiste Al-Qaradaoui, il cherche à se positionner en tant qu’instance de guidance pour les musulmans européens, fondée sur la tradition, une tradition étrangère au débat et au pluralisme, marquée de condescendance. L’Islam y est pensé comme alternative idéologique et mode de vie total seul capable de sauver l’Occident de sa situation de décadence (d’après Patrick Haenni, chercheur à l’Institut Religioscope de Suisse).
Al-Qaradaoui soutient que lorsque l’épouse montre « des signes d’insubordination », son mari peut la punir en la frappant, mais… « avec modération en évitant le visage ». Dans ses prêches à destination des musulmans d’Europe, il répète que la polygamie est un droit que tous les hommes musulmans devraient pouvoir exercer « à la condition de respecter certaines règles ».
Autres dispositions qui tombent sous le coup du droit pénal européen, les mariages pratiqués selon le rite musulman (nikah) qui se substituent au mariage civil. Dès lors, en cas de conflit matrimonial, c’est le Conseil européen de la fatoua qui est seul compétent, comme c’est déjà le cas en Grande-Bretagne. Autrement dit la loi Gombette à l’envers !
En dépit de son engagement à se concentrer sur les questions qui concernent la vie quotidienne des musulmans d’Europe, certaines fatouas du Conseil sont extrêmement politiques. Elles trahissent la présence de membres radicaux en son sein. Ainsi, au cours d’une réunion du Conseil qui se tenait à Stockholm, en juillet 2003, Al-Qaradaoui distingua cinq catégories de « terrorisme » parmi lesquelles « le terrorisme permis par la loi islamique », et les « opérations martyrs ». Faisant allusion aux attaques contre Israël Al-Qaradaoui déclarait que « ceux qui s’opposent aux opérations martyrs en prétendant qu’il s’agit de suicides commettent une grave erreur ».
C’est également l’opinion de Maoulaoui, vice-président du Conseil de la fatoua, qui dans une fatoua interdisant aux pays arabes de coopérer avec les États-Unis dans leur « guerre contre le terrorisme », avançait que ce que Washington appelle du terrorisme est, la plupart du temps, un « djihad légitime », telles ces « opérations de résistance menées en Palestine, en Irak et en Afghanistan. » Ces déclarations politiques, sous couvert de l’islam, transmises sur le web, font des ravages dans les esprits de certains jeunes Européens (par ordre alphabétique catholiques, réformés, sunnites, etc.).
Alors que les salafistes et autres extrémistes religieux demandent l’introduction de la Charia d’une façon très agressive et contreproductive, les Frères musulmans, plus rusés politiquement utilisent une autre stratégie pour atteindre le même but, en particulier en insistant sur la mise en place progressive de centres islamiques, en estimant que le dialogue, les signes d’ouverture et la modération, constituent de meilleurs atouts.
En Allemagne une analyse du gouvernement allemand consacrée aux tactiques des groupes islamiques œuvrant sur son territoire estime que le dialogue prôné par les Frères musulmans est loin
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d’être sincère… Ce rapport estime que la contribution des organisations associées aux Frères musulmans d’Europe à l’éducation et à la radicalisation des extrémistes violents est indéniable. La renonciation par les Frères musulmans à la violence en Europe semble plus opportuniste que sincère, puisque leurs membres européens n’hésitent pas à recourir aux propos les plus incendiaires quand il s’agit d’endosser des opérations terroristes au Proche – Orient, relève Lorenzo Vidin.
En conclusion, prolongeant la confrontation proche-orientale entre sunnites et chiites auprès des populations musulmanes d’Europe, la théocratie ouahhabite s’efforce de s’implanter dans le paysage religieux européen, en s’appuyant en particulier sur les cultes chrétien et juif, au détriment des principes fondateurs de la laïcité.
Comment une telle régression est-elle possible ? Pour nombre d’islamologues, il s’agit d’une initiative de mise en œuvre de la stratégie de l’Ikhtilaf, c’est-à-dire de « la dissimulation dans un conflit » qui permet, selon la tradition, d’avancer masqué, afin de tromper l’ennemi (pour parvenir à ses fins). Cette dissimulation prend plusieurs autres noms comme Taouriya, Kitman ou Mourouna.
Les porte-parole de l’islam dans le monde occidental du genre Tarik Ramadan savent comment jouer la partie. Ils savent comment présenter leur cause d’une façon qui soit non seulement considérée comme acceptable par la majeure partie de la société, mais qui soit aussi considérée comme sensée et même pourrait-on dire juste. Ils feront appel aux institutions démocratiques, et aux Droits de l’Homme, tout en sachant très bien que s’ils en avaient le pouvoir ils aboliraient ces institutions et refuseraient ces droits aux autres.
Et c’est ainsi que les terroristes de par le monde justifient leurs actes, et cette justification est basée sur des éléments centraux de la tradition islamique.
En conséquence il est très difficile pour des musulmans modérés paisibles de se lever au sein de la communauté islamique et de dire : ça ne fait pas partie de l’islam. Ce n’est que par duperie délibérée qu’ils font cela, dans l’intention d’induire en erreur les Occidentaux, en accord avec la doctrine islamique de la Taqqiya, le « mensonge pieux ». Ou alors, ils font cela tout simplement parce qu’ils ne sont pas conscients de ce que l’islam enseigne réellement.
Toute la question aujourd’hui est de savoir si les autres religions ont accepté sciemment de « jouer le jeu » du contournement de la laïcité, ou si elles ont été bernées (Gérard FELLOUS.1 5 octobre 2015).
Rappelons encore une fois ici que cette partie de notre essai de vise pas le musulman de base, ne vise pas le commun des musulmans, qui doit grosso modo être ni plus ni moins menteur qu’un chrétien, mais concerne les idéologues ou les théoriciens de l’islam adeptes convaincus du célèbre « la fin justifie les moyens », voire les journalistes les hommes politiques ou les intellectuels non musulmans jouant leur jeu pour diverses raisons (électoralisme, complexe du chevalier blanc, complexe du résistant, orgueil, manque d’esprit critique, esprit de classe, effet bocal, ou tout simplement le fait de ne jamais avoir lu le Coran…………).
DIN DAOULA ET DOUNYA.
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Le Dépérissement de l’État est un concept marxiste conçu par Friedrich Engels, se référant à l’idée que, avec l’application des normes socialistes, les institutions sociales appliquées par l’État finiront par devenir obsolètes et s’éteindront, comme la société sera en mesure de se gouverner sans son application coercitive des lois.
Et bien on retrouve un peu la même chose avec l’islam. L’islam a comme projet l’instauration, par l’État, d’une cité idéale qui soit, sous une forme ou une autre, institutionnellement soumise à Dieu.
Hassan Al-Banna fondateur des Frères musulmans, que certains présentent comme un continuateur du réformisme prôné au XIXe siècle par Aghani et Abduh, a élaboré un projet politique contre le pluralisme politique, les droits et les libertés individuelles ou publiques, alors qu’elles se manifestent de plus en plus. Si les Frères musulmans évoluent quelque peu par rapport à ce programme, leur capacité à justifier l’ordre social, transmise par des générations de religieux et de docteurs de la Loi, brouille le message antiraciste.
Et finalement, comme l’a bien dit Bernard Lewis l’héritage de l’islam reste quasi intouchable, « même dans les sociétés musulmanes qui se présentent comme laïques et démocratiques. D’ailleurs, ce privilège s’est étendu, de facto, aux pays occidentaux qui abritent aujourd’hui des communautés musulmanes : les croyances et les rites musulmans y jouissent d’une immunité que les croyances et les rites chrétiens ont perdue. (…) L’islam n’est pas seulement une affaire de croyance et d’observance ; c’est aussi une identité et une allégeance, qui, souvent, transcendent toutes les autres ».
Le multiculturalisme idéologique (relativisme moral, culturel et religieux) à la mode aujourd’hui est totalement étranger à la doctrine musulmane. Le multiculturalisme tous azimuts (QUI INCITE PAR DÉFINITION LES NATIONS A DÉVALORISER LEUR PROPRE CULTURE) contribue donc de fait à l’implantation et l’expansion de l’islam.
Car une fois implanté dans une société, l’islam cherche à faire disparaître toute coutume ou valeur qui s’oppose à sa loi… Car c’est une idéologie à mille lieues de l’esprit de la laïcité, de la modernité et du vivre-ensemble.
L’esprit totalitaire de l’islam, à la fois religieux et sociétal (charia), communautarise, isole et sépare. Il invite à la sédition et à la subversion.
Quelques exemples.
Les États du Nord du Nigéria, fortement musulmans, d’un islam pourtant apparemment non arabe, ont décrété l’application de la loi islamique (charia) et réclament l’islamisation de la constitution nigériane, alors que l’on dit l’islam noir plus souple que l’islam arabe.
Les musulmans chinois (Ouïghours) demandent à faire sécession ; ceux de l’Inde ont réclamé la « Partition » après le départ des Britanniques.
La plupart des musulmans font des demandes à répétition pour mettre en œuvre la charia, au Canada, au Royaume-Uni, en Australie… comme s’il appartenait à ces pays d’accueil de changer, car dans l’esprit d’un musulman, l’islam est une religion universelle et il espère bien qu’un jour toute l’humanité embrassera sa foi (qui n’a rien à voir avec la Raison).
Au Canada, on a envisagé la création de tribunaux islamiques, ce qui est chose faite en Angleterre.
On voit également ces tendances lourdes à l’œuvre dans les cantines scolaires en France où l’on commence à séparer les musulmans, des autres, à cause des différences de régime alimentaire.
Le sexisme dans les piscines ou avec le personnel dans les hôpitaux relève de la même tendance à la séparation.
ET MAINTENANT L’AUBERGE ANDALOUSE OU ESPAGNOLE.
À chaque fois que les musulmans se sont retrouvés en minorité, les responsables religieux ont fait valoir que la charia ne visait qu’à garantir les cinq fondamentaux à savoir : la préservation de la religion ; la préservation de la vie ; la préservation de la descendance ou de l’honneur, la préservation des biens et la préservation de la raison.
Les beaux esprits mystiques ayant la foi (qui n’a rien à voir avec la raison) incapable de comprendre comme Protagoras que la seule mesure de toute chose est l’Homme, et que la seule trinité qui vaille est celle de l’athéisme de l’agnosticisme ou du panthéisme (non à la transmission familiale des religions oui aux quêtes du Graal personnelles), sont donc, face à ce décalage grandissant entre la foi et la raison, plongés dans le plus grand désarroi.
Des théologiens comme Muhammad Abdh (1848-1905) entendent démontrer qu’il n’existe pas en Islam de place pour une autorité religieuse et que les institutions qui existent dans les sociétés musulmanes, comme le califat, le qadha (les juges) sont des institutions civiles et non religieuses.
Kaouakibi (1854-1902) préconise même l’institution d’un califat dans le Hedjaz dont l’autorité serait limitée, comme pour le Vatican, aux seules questions religieuses, sans se mêler des affaires politiques relevant de l’autorité des États en place dans les différents pays musulmans.
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Ali Abd Al-Raziq (1888-1966) a soutenu en 1925 que l’Islam n’avait pas besoin du califat ni d’un quelconque autre pouvoir politique pour exister en tant que religion. Même encore minoritaires, ces voix se font de plus en plus entendre depuis les années 1970, à une vitesse que les observateurs occidentaux évaluent encore mal (c’est le moins que l’on puisse dire).
Où est le véritable Islam dans tout ça si l’on ne veut pas se contenter de l’athéisme de l’agnosticisme du panthéisme et d’une quête du Graal personnelle ? À nos lecteurs de se faire leur idée en toute indépendance d’esprit.
Pour mémoire un exemple très clair de ce qu’est la laïcité (plus ouvert c’est ce qu’on appelle du « paganisme »).
Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État.
Titre Ier : Principes. Article 1 « … restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public ».
Article 2. La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. En conséquence… »
LE PROBLÈME DES DROITS DE DIEU DANS LA LOI.
Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État.
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Titre Ier : Principes. Article 1 « … restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public ».
Article 2. La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. En conséquence… »
Avant de laisser à nos lecteurs le soin de répondre, un état islamique (où la charia est en vigueur) est-il une théocratie ou une dictature collective de nature totalitaire précisons tout d’abord (à l’intention de ceux qui préfèrent une réflexion critique, mais nuancée, aux vulgates et aux imprécations) que ce n’est pas une simple dictature personnelle… Notons également que tous les régimes autoritaires ou monarchiques ne sont pas nécessairement totalitaires.
La notion de théocratie à l’Occidentale n’est guère pertinente en terre d’Islam non plus, car l’islam ne permet pas d’envisager une séparation du politique et du religieux semblable à celle fondée sur la distinction entre temporel et spirituel dans le christianisme. Pour l’islam, la séparation du politique et du religieux n’a pas le droit d’exister. Elle est même choquante, car elle passe pour un abandon de l’humain au pouvoir du mal, ou une relégation de Dieu hors de ce qui lui appartient. Dès le début, l’islam s’affirme comme « religion et régime » (DIN oua-daoula) et cette unité du politique et du religieux est toujours défendue aujourd’hui dans certains courants salafistes.
Le problème de la théocratie musulmane c’est que Dieu (la conception qu’on se fait de Dieu) s’occupe beaucoup, mais alors vraiment beaucoup, de la vie privée, des individus. Avec Mahomet en tout cas Dieu est intervenu dans une foule de domaines (interdits alimentaires, sanction pénale des adultères, etc.) Beaucoup plus en tout cas que dans les pays où s’est peu à peu mise en place une séparation des églises et de l’État, voire que dans le cas des pays chrétiens tout court, le Dieu (la conception qu’on se fait de Dieu) des chrétiens, s’étant toujours en effet, historiquement parlant beaucoup moins occupé qu’Allah du contrôle de la vie privée des individus. Il est vrai que le dieu trine des chrétiens admet plus facilement la bida ou innovation vu le rôle attribué chez lui au Saint-Esprit : dernier des prophètes.
Le concept de totalitarisme est une de ces notions en débat dont les intellectuels et les médias font une utilisation péremptoire, mais changeante, au risque d’amener l’homme politique à asséner des vérités contradictoires au cours de sa carrière. L’usage de cette notion pose donc problème.
Un régime totalitaire se distingue de la simple dictature-ou régime autoritaire – parce qu’il a pour but d’institutionnaliser globalement sa domination, en transformant radicalement l’ordre politique, culturel et économique existant en fonction d’une idéologie homogène et unifiée autour de quelques principes. La prétention d’un tel régime est souvent de construire un « homme nouveau », radicalement différent du passé.
D’une manière plus générale, un régime politique est dit totalitaire lorsqu’il exerce son emprise sur l’ensemble des activités des citoyens et qu’il abolit, ou tente d’abolir toute notion de vie privée. Son contraire est un régime pluraliste ou un État de droit qui garantit un espace privé aux individus. Quand l’État peut tout faire et partout, il s’agit d’un État totalitaire.
Par le monopole des médias, de la culture, de la classe intellectuelle, un régime totalitaire tente de dominer complètement – totalement – les différents aspects de la vie sociale et privée. À tous les échelons de l’existence – la famille, le quartier, le lieu de travail ou de loisirs – un régime totalitaire établit des mécanismes d’encadrement qui s’appuient sur la suspicion, la dénonciation et la délation. L’accès à des postes, l’obtention de biens ou de privilèges devient fonction du respect de l’idéologie et de l' « enthousiasme » manifesté à l’endroit des principes du régime.
La charia est un ensemble de lois qui n’ont pas toutes le même statut. On peut y distinguer les droits de Dieu (houqouq Allah) et les droits des êtres humains (huquq aladamiyyin). La mise en œuvre des droits de Dieu (QUI SONT BEAUCOUP PLUS QUE LE DROIT D’ÊTRE ADORE) est à la charge des gouvernements, tandis que l’application du droit des êtres humains est à la discrétion de chacun. L’existence de ces « droits de Dieu » et le fait que leur application revienne au gouvernement font que l’on peut parler de théocratie si la charia est en vigueur dans un pays.
La notion de « droit de Dieu » a deux sens : un sens large (tout ce que Dieu a demandé de faire ou de ne pas faire), un sens plus restreint. C’est ce houqouq Allah au sens large qui pose problème).
Le droit de Dieu sur les hommes est que ceux-ci l’adorent (ibada) et ne lui associent rien (rapporté par al-Boukhari, 2701 Muslim, 30, etc.).
Or l’ibada complète de Dieu, et le fait de ne rien Lui associer, se traduisent concrètement primo par le fait d’adorer Dieu, et de ne diviniser que lui, et secundo par le fait d’obéir à ses ordres, c’est-à-dire de faire ce qu’il agrée chez l’homme, que cette action relève du domaine spirituel, du domaine cultuel, physique ou familial, ou encore du domaine des relations de l’homme avec ses semblables voire avec les autres créatures de Dieu.
C’est d’ailleurs pourquoi des oulémas précisent que si on a lésé le droit établi d’un homme (sur le plan physique – par le fait de l’avoir blessé –, ou moral – par le fait de l’avoir calomnié, par exemple –, ou matériel – par le fait d’avoir détruit un bien lui appartenant –), on doit d’abord se faire pardonner par
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cet homme (ce qui peut exiger de le dédommager avant de recevoir son pardon), mais on doit aussi, ensuite, demander pardon à Dieu pour avoir enfreint l’interdiction qu’il a édictée de faire ce genre de torts à autrui.
An-Naouaouî a formulé la chose ainsi.
La repentance est due pour tout péché.
Si le péché entre l’esclave et Dieu ne concerne pas le droit d’Adam, il est soumis à trois conditions : premièrement arrêter de pécher. Deuxièmement : regretter d’avoir péché. Et troisièmement : avoir l’intention de ne pas recommencer (la ferme intention diraient les catholiques). L’absence de l’une de ces trois conditions invalide la repentance (« Riyad us-sâlihîn », chapitre 2).
Tout cela relève du « droit de Dieu » en son sens large. Le concept « droit de la personne » est alors particulier, de sorte que le premier englobe le second et le dépasse (baynahoumâ oumoûm oua khoussoûs moutlaqan).
D’après le second sens, plus restreint, de la formule « droit de Dieu », nous avons donc…
— A) d’un côté ce qui relève purement du droit de Dieu.
— B) de l’autre ce qui relève purement du droit de la personne.
Implications de cette distinction…
— A) Ce qui relève purement du droit de Dieu…
— Ne devient pas moubâh oul-isti'mâl (autorisé en ce qui concerne l’utilisation) pour quelqu’un du seul fait que son propriétaire / détenteur (sâhib oul-yad) humain lui donne l’autorisation de l’utiliser. Il faut, en sus de cette autorisation du propriétaire / détenteur, que cette personne précise ne se trouve pas dans l’un des cas où Dieu en a interdit l’utilisation.
— En cas de violation de ce droit de Dieu, la sanction terrestre prévue devient caduque d’après certaines écoles (il s’agit de l’avis retenu au sein de l’école hanbalite et d’un avis présent au sein de l’école chafi'ite) si l’auteur du méfait se repent vis-à-vis de Dieu avant d’avoir été interpelé.
— B) Ce qui relève purement du droit de la personne.
— Devient autorisé en ce qui concerne l’utilisation, moubâh oul-isti'mâl (à condition bien sûr que cette chose ne soit pas interdite en soi, harâm oul-'aïn, comme l’est par exemple le porc) du seul fait que son propriétaire / détenteur humain en donne l’autorisation (et il faut bien entendu que son utilisation se fasse dans le respect des autres règles de l’éthique islamique).
— En cas d’utilisation sans accord, la sanction terrestre prévue ne devient pas caduque du seul fait repentir fait vis-à-vis de Dieu ; par contre elle devient caduque s’il y a pardon accordé par le détenteur du droit.
— Un exemple très facile à comprendre de la catégorie A (ce qui est pur droit de Dieu) est le statut de l’utilisation (au sens de « se servir ») de ses parties intimes. Que ce statut d’interdiction relève du droit de Dieu ne signifie pas que Dieu ait quelque chose à y gagner – puisque Dieu ne tire aucun profit de ce que les hommes font ou ne font pas –, mais que, hormis dans le cadre où Dieu l’a autorisé (cas du mariage), il est interdit à une tierce personne d’en tirer profit, même si le détenteur lui en donne l’autorisation. Si le détenteur ne lui en a même pas donné l’autorisation et qu’une personne en tire profit, alors il y a viol, ce qui est plus grave encore, car il y a alors eu violation à la fois du droit de Dieu et du droit du détenteur ; mais ici nous ne parlons que des relations intimes consenties. Quant au fait de toucher les parties intimes de quelqu’un, cela est également interdit à une autre personne, sauf dans le cadre autorisé par Dieu (mariage), ou encore dans une situation de nécessité (comme une consultation médicale relevant de la nécessité – dharoura –).
— La catégorie B, « droit de la personne », est différente, et on peut ici en donner comme exemple le statut des biens matériels qui sont la propriété d’une personne. Que cela relève des droits de la personne signifie que si le détenteur du droit – autrement dit le propriétaire humain – autorise un tiers à utiliser un de ses biens, il devient autorisé pour ce tiers de le faire (il doit bien sûr le faire en respectant les autres règles islamiques) ; de même, si ce propriétaire humain le lui offre, alors il en devient propriétaire. Mais si ce tiers prend de force ce bien (ghasb) et l’utilise sans l’autorisation du propriétaire, alors il lèse le droit de ce dernier, et, de plus, manque à ses devoirs d’ibada envers Dieu, qui a interdit pareille chose.
Il existe maintenant deux autres cas.
— C) La catégorie juridique où droit de Dieu et droit de la personne sont présents, mais où c’est le droit de Dieu qui domine.
— D) La catégorie juridique où droit de Dieu et droit de la personne sont présents, mais où c’est le droit de la personne qui domine.
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UNE RELIGION ENVAHISSANTE (HOUQOUQ ALLAH).
« L’islam, comme le judaïsme et le christianisme, croit en l’origine divine du gouvernement. Il s’ensuit donc que la science politique pour l’Islam n’est pas une discipline indépendante aspirant aux plus hauts sommets de la spéculation intellectuelle, mais un département ou une branche de la théologie. La distinction entre laïcité et spiritualité n’a aucun sens pour le musulman. La seule distinction est celle entre croyant et incroyant ». (Ann K.S. Lambton. État et gouvernement dans l’Islam médiéval).
Commentaire de Pierre de La Crau. Nous ne sommes pas tout à fait d’accord avec Anne Lambton pour ce qui est de Christianisme à cause du fameux « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » (Matthieu 22,21).
LE DROIT MUSULMAN.
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La loi islamique ou charia ne concerne pas que la liturgie la prière l’adoration ou le culte (al Ibadat), mais régit également le droit civil et le droit pénal (al Mou’amalat).
Bien que surtout connu pour son statut personnel et son aspect pénal, ce droit englobe d’ailleurs l’ensemble des activités humaines, ce qui inclut également des règles commerciales ou de gouvernement.
Le droit musulman, parfois appelé droit coranique, ou charia, est un système de nature essentiellement religieuse dans lequel la science du droit (fiqh) fait corps avec la théologie. Ce droit, d’origine révélée qui trouve sa source dans les prescriptions du Coran les hadiths ou la biographie de Mahomet (Sira), ne doit pas être assimilé à l’ensemble du droit positif (droit d’origine humaine et non divine) qui peut être aussi en vigueur dans les États de tradition musulmane, dans la mesure où ce dernier, qui diffère selon les pays, s’écarte souvent de celui-ci.
Le droit musulman est un système de devoirs comprenant des obligations rituelles, morales et légales, mises sur le même plan, toutes soumises à l’autorité du même impératif religieux. En principe, le droit musulman ne s’applique qu’aux musulmans. En droit musulman, les non-musulmans sont soumis au régime juridique de la dhimma ou protectorat.
Sources du droit.
Le droit musulman a plusieurs sources, dont les sources fondamentales que sont le Coran et la sunna d’une part, et d’autre part les sources secondaires, fondées sur la raison humaine, qui comprennent le consensus des juristes (ijma), le raisonnement analogique (qiyas) et l’interprétation * (ijtihad). La coutume (ourf) et les lois humaines ne sont pas officiellement source de droit, mais ont permis d’adapter le droit d’origine religieuse à la diversité des pays et des cas.
Une jurisprudence diverse s’est développée selon les régions, en fonction de quatre écoles juridiques (madhahib) principales pour le sunnisme, et deux autres pour le chiisme. L’élaboration du fiqh (science du droit) par chacune de ces écoles a, en théorie et pour l’essentiel, pris fin au Xe siècle, avec la fermeture de la « porte de l’interprétation * (ijtihâd) », ce qui explique le caractère archaïque et désuet de nombre de ses institutions. Toutefois, cette idée de la « fermeture de la porte de l’interprétation * » est très controversée, et nombre de juristes ont continué par la suite à réfléchir sur le droit musulman, en poursuivant les efforts de leurs prédécesseurs.
La colonisation a réduit l’étendue du droit musulman principalement au statut personnel (droit du mariage, etc.). Des efforts de modernisation ont été faits, dans certains pays (Turquie, Égypte, Tunisie, etc.) au XXe siècle. Le droit pénal musulman a été délaissé par les juridictions d’États de tradition musulmane, bien que le poids de l’islamisme contemporain ait conduit certains États à le réhabiliter partiellement (Libye en 1972-1974, Pakistan en avril 1979, Iran en 1979, Soudan au début des années 1980, Koweït dans les années 1980, et Égypte après le référendum de mai 1980). Dans les autres domaines juridiques (droit constitutionnel, droit public, etc.), les réformes au XIXe siècle et au XXe siècle ont conduit à une harmonisation croissante du droit avec les principes internationaux tels que ratifiés au plan national. Celle-ci n’empêche pas un certain nombre de systèmes juridiques nationaux de faire allusion aux principes du droit musulman dans leurs Constitutions (Maroc, Algérie, Mauritanie, Yémen, Iran, Pakistan, Soudan et Égypte). Enfin, l’Organisation de la conférence islamique a signé en 1990 la Déclaration des droits de l’homme en islam, mais avec nombre de réserve en dénaturant sensiblement la portée sur bien des plans.
Le droit musulman a donc quatre sources principales (Ousoul al-Fiqh), qui ensemble constituent la charia (ou loi divine).
— Le Coran. Le Coran comporte 114 chapitres ; l’ensemble des versets contenus dans ces chapitres représente 6236 versets qui parlent de croyance (de la foi), qui parlent des générations antérieures à la révélation du Coran, ainsi que des codes qu’on peut comparer au « Code d’Hammourabi », et davantage à la « Halakha » judaïque rabbinique. Les livres des exégètes et des « fouqaha » utilisent le concept de « Ahkam », qui n’est qu’un ensemble de règles de conduite que doit suivre le croyant. Ces règles régissent les relations personnelles, notamment les lois sur les mariages, les répudiations, le veuvage, les successions…, un ensemble d’obligations auxquelles les musulmans doivent se soumettre dans leur vie quotidienne et dans leurs relations avec les non-musulmans.
De ces 6236 versets, 442 concernent la vie des musulmans. Parler de 442 versets organisant la vie des musulmans ne signifie nullement qu’il y a 442 recommandations, car n’oublions pas les répétitions multiples que contient le Coran. Localiser ce noyau dur des commandements dans le Coran nécessite donc un travail très fouillé.
133 versets concernent les non-musulmans, 116 versets concernent les musulmans, 94 versets concernent les rituels et la liturgie, 53 versets concernent le mariage, 23 versets concernent l’alimentation, 9 versets concernent l’héritage, 6 versets concernent les peines et châtiments, 4 versets concernent l’économie, 4 versets concernent le butin.
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Le jurisconsulte se trouve souvent très embarrassé, car ce genre de versets renferme d’irréductibles contradictions, surtout lorsqu’il faut procéder à l’élaboration du droit et dégager les dogmes essentiels de l’islam.
Les contenus à caractères légaux du Coran ne suffisent donc pas à régler l’ensemble des questions de droit. Un tafsir (exégèse musulmane) du Coran est rendu nécessaire par plusieurs passages peu clairs. Le type et la méthode de tafsir vont ainsi créer plusieurs écoles de droit, ou rites : les madahib.
— La sunna est consignée dans les hadiths du prophète de l’islam et de ses compagnons relatés par des chaînes d’intermédiaires appelés aussi garants (isnad). Mahomet est considéré comme un exemple pour l’ensemble des musulmans. Ces hadiths vont donc servir de matière première lors de l’élaboration des lois : ce qu’a fait Mahomet en telle circonstance aura force de loi, en première approximation.
— L’Ijma (consensus des savants). Cette troisième source du droit musulman a une importance pratique exceptionnelle. C’est à leur consécration par elle que toutes les règles du fiqh, quelle que soit leur origine première, doivent leur applicabilité.
— Le raisonnement analogique (qiyas).
Concrètement le juge (cadi) s’appuie principalement sur les livres où sont exposées les solutions consacrées par l’Ijma, et non directement sur le Coran ni sur les recueils de traditions (hadiths).
Le cadi (ou juge) qui s’aventurerait à interpréter de sa propre autorité les passages du Coran ou à apprécier lui-même l’authenticité probable de hadith commettrait un acte tout aussi contraire à l’orthodoxie que le croyant catholique qui prétendrait comprendre avec les seules lumières de son intelligence individuelle le sens des textes invoqués par l’Église à l’appui de ses dogmes.
Aux quatre sources principales s’ajoutent plusieurs sources secondaires.
— L’opinion personnelle ou istihsan (approbation), chez les hanafites.
— L’istislâh ou prise en considération de l’intérêt général chez les malikites.
— L’Istis'hab chez les chaféites.
— La coutume (ourf ou ada). Certaines coutumes pré ou postislamiques ont en effet été intégrées dans le droit musulman, ces dernières étant jugées compatibles avec l’islam. Toutefois, la jurisprudence édifiée à partir de la coutume a pu parfois aller à l’encontre de la lettre de la charia, par exemple en ce qui concerne la répudiation. Alors que celle-ci prévoit, selon les sunnites, qu’elle doit s’effectuer en trois fois, la jurisprudence a entériné la répudiation en une seule fois dans l’immense majorité des pays musulmans.
La coutume n’est toutefois pas, en général, considérée comme source de droit (de même pour la jurisprudence, ou amal) : ce n’est pas une source légale, mais une source spontanée et de caractère secondaire, qui permet d’adapter la loi plutôt que de la modifier.
— L’imitation des décisions des anciens (taqlid), par opposition à l’ijtihad.
— La loi humaine, ou kanoun (kanoun siyasi : règlement administratif ; on dit aussi firman, hatti, etc., en Turquie ; karar ou code en Égypte ; amr bey ou décret beylical en Turquie, dahir ou décret royal au Maroc).
* L’ijtihad, effort de réflexion personnelle basée sur les principes généraux de l’islam. Était pratiqué par les juristes (muftis) ou les savants (moujtahids). Les moujtahids étaient supérieurs aux faqih, ceux qui avaient l’intelligence de la loi (le fikh) et peuvent l’interpréter : en effet, non seulement ils interprétaient le droit, mais pouvaient encore le créer, lorsque les contextes nouveaux suscités par l’expansion de l’islam obligeaient à cette invention.
UNE (CONTRE) SOCIÉTÉ HOLISTIQUE ET THÉOCRATIQUE.
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À Médine le premier cercle des musulmans fut constitué par le noyau dur des immigrés (mouhadjiroun) ayant suivi volontairement Mahomet dans son exil, et des ansars (Médinois sympathisants ou convertis). Et notamment les anciens combattants de Badr (624).
Le second cercle fut constitué par les Bédouins des alentours de Médine alliés aux tribus arabes Aous ou Khazradj de la ville, auxquels le génie politique de Mahomet ajoutera peu à peu les Bédouins des environs de La Mecque alliés des Couraïchites (dont par conséquent ils se détacheront).
Le troisième cercle sera celui des ralliés de la dernière heure, la multitude des adeptes de la laïcité ouverte (pour raison commerciale ?) ou du paganisme philosophique et réfléchi, ou du manichéisme, etc. regroupés derrière la personne d’Abou Soufiane (cousin de Mahomet et principal opposant).
Au VIIe siècle, nous sommes encore dans un monde où les statuts sociaux sont inégaux et rigides, dans un monde où la figure du chef focalise les attentions lorsqu’il s’agit d’agir et même de penser. Un monde enfin où les connaissances de la réalité sont très parcellaires et où les forces de la nature paraissent encore en très grande partie hostiles, où l’individu n’existe pas sans le groupe auquel il appartient. Souvent les auteurs s’émerveillent dans la progression d’un nouveau syncrétisme, comme celui de Mahomet dans un monde très largement polythéiste et sensible au surnaturel, sans prendre en compte l’aspect (peu traité il faut dire) de la conversion forcée. Cujus regio, ejus religio. Il suffit pourtant que le chef soit converti pour que sa tribu, son clan et toute la société derrière lui, esclaves compris parfois, suive la nouvelle voie religieuse… La prédominance d’une doctrine sur une autre doit souvent peu aux convictions réelles de l’individu (surtout si l’emploi de la violence est endémique… voir le cas des guerres de la ridda), du moins à la première génération (aux suivantes, c’est déjà une affaire de conditionnement culturel…).
Les débuts de l’islam verront donc en réalité et concrètement la concurrence de deux systèmes de valeurs autour desquels toute l’histoire de l’État islamique naissant s’articulera.
Le premier système est celui de la Djahiliya ou période préislamique, avec son organisation tribale, nomade d’une part (guerriers et poètes), sédentaire des grandes villes telles La Mecque d’autre part (agriculteurs et commerçants). Elle ne connaît pas le principe d’État, c’est un organisme politique fondé sur les liens du sang.
Le second système, nouveau, est celui de l’Islam, avec une majuscule, trait fondamental de l’État médinois.
Le système « islam » l’emportera dans un premier temps, immédiatement après la mort de Mahomet et d’Abou Baker, homme simple et convaincu, fanatique diront certains (voir la façon dont il a mené les guerres de la Ridda) puis ce sera ensuite le système de valeurs fondé sur les liens du sang. Nul n’est prophète dans son pays *. Les premiers califes omeyyades qui étaient de la famille de Mahomet et dont certains l’avaient même connu (Mouawiya calife c’est un peu comme si Judas était devenu un des premiers papes) furent surtout des pragmatiques, des guerriers ou des politiques, pas des mystiques comme Bouddha ou Jésus, pas des théologiens. Le premier des soucis des califes soufianides ne fut donc pas la religion de Mahomet, mais l’administration de leur nouvel empire. Ce ne fut que progressivement que les califes se réfugièrent derrière la personnalité de ce grand marabout arabe de style Sénoussi (du 7e siècle) et la propulsèrent au premier plan. La mise en place du système de valeurs proprement islamique ne fut achevée qu’avec le compromis que réalisa la dynastie des Abbassides, à la fois de la famille de Mahomet, mais plus soucieux de son enseignement (par le truchement des hadiths).
* À propos du cas des Omeyyades et plus précisément des Soufianides, ci-dessous pour comparaison qui n’est pas raison, car Mahomet n’a jamais été le Messie né de Marie par opération d’un Saint-Esprit envoyé par Dieu (chapitre 19, versets 16-35) et verbe de Dieu (chapitre 3, versets 42 à 51).
Évangile selon saint Jean 7,5 : « Car ses frères non plus ne croyaient pas en lui ».
Évangile selon saint Marc 3, 21 : « Les parents de Jésus, ayant appris ce qui se passait, vinrent pour se saisir de lui ; car ils disaient : il a perdu l’esprit ».
Évangile selon saint Marc 6, 1-5 « Jésus partit de là, et se rendit dans sa patrie… N’est-ce pas là le charpentier, le fils de Marie, le frère de Jacques, de Joset, de Jude et de Simon ? Et ses sœurs, ne sont-elles pas ici parmi nous ? Et il était pour eux une occasion de scandale. Mais Jésus leur dit : « Un prophète n’est méprisé que dans sa patrie, parmi ses parents, et dans sa maison … et il s’étonna de leur incrédulité ».
Pour en revenir notre islam d’aujourd’hui nous commencerons par examiner dans ce modeste essai, dans ce livret, les dangers potentiels de la tradition musulmane pour les droits de l’homme, car il apparaît que la succession de Mahomet fait toujours problème dans le monde musulman ou ailleurs dans le monde. De manière si lourde, qu’à la manière des Croisades intérieures au monde chrétien (contre les cathares et autres…), de nombreuses doctrines ont tout simplement disparu. La peur de la fitna semble une obsession qui paralyse toutes tentatives de mettre en application les dispositions coraniques pourtant favorables à plus de respect des droits de l’Homme.
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Tout en soulignant, comme nous n’essentialisons pas les musulmans, que, comme chez les ibadites et les chi'ites, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent aujourd’hui parmi les sunnites pour dénoncer cette perversion qui consiste à instrumentaliser la religion au service d’une cause et de son contraire.
LA LUTTE CONTRE LA FITNA OU LES DISSIDENCES.
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Coran verset 59, chapitre 4. « Ô vous qui croyez ! Obéissez à Dieu ! Obéissez au Prophète et à ceux d’entre vous qui détiennent l’autorité ! »
Versets 47 à 49, chapitre 5. « Que les gens de l’Évangile jugent les hommes d’après ce que Dieu y a révélé… juge entre ces gens d’après ce que Dieu a révélé, ne te conforme pas à leurs désirs en te détournant de ce que tu as reçu de la vérité… prends garde qu’ils n’essaient de t’écarter d’une partie de ce que Dieu t’a révélé. S’ils se détournent, sache que Dieu veut les frapper ».
Verset 8, chapitre 63. « La puissance appartient à Dieu à son prophète et aux croyants ».
Ces versets semblent n’avoir qu’un rapport assez ténu avec la démocratie, l’égalité des droits entre hommes et femmes, la laïcité, les élections, etc. …
Un État véritablement musulman est un État régi par la charia c’est-à-dire la loi islamique tirée du Coran et de la Sounna des hadiths. Une corporation d’érudits spécialisés (les oulémas) interprète leurs données et les applique à toutes les circonstances de la vie sociale culturelle et politique. Les volontés individuelles ne peuvent pas prévaloir sur le Coran et la sounna des hadiths pas plus qu’ils ne sauraient s’opposer à Dieu. Le célèbre « L’homme est la mesure de toute chose » de Protagoras n’a aucun sens en terre d’Islam. Ou alors un sens clairement blasphématoire.
Dans la pensée islamique, l’État est conçu sur la base d’une oumma (communauté des croyants) à la fois religieuse et politique, une collectivité concrète et distincte régie par des obligations communes envers une autorité divine supérieure. Sa fonction est d’asseoir et de maintenir la loi divine, qui est immuable et éternelle (Lambton, 1981, XV-1).
Cet État est gouverné par l’imam, appelé aussi commandeur des croyants (amîr al-mou 'minin), ou calife, à qui les membres de la communauté doivent faire allégeance. En tant que représentant de Dieu sur terre, sa présence est essentielle. La fonction de l’imamat ou du califat est de diriger les affaires temporelles et spirituelles à la place du Prophète afin de faire respecter la religion et d’assurer l’intégrité de l’oumma.
L’islam en tant que religion est constitué d’un ensemble de normes qui gèrent tous les champs de la vie des croyants. Ce système idéal procède d’une source divine qui est la loi de Dieu, appelée charia. Bénéficiant d’une validité permanente dans le temps et dans l’espace, cette loi religieuse comprend aussi bien des dogmes que des principes sociaux ou individuels relatifs au bien et au mal. Il s’ensuit toute une série de prescriptions relevant de l’obligatoire (fard ou ouadjib), du recommandé (moustahab), du permis (moubah), du détestable, mais permis (makrouh) et de l’interdit (haram) (Lambton, 1981, p. 1-2).
« Vous formez la meilleure des communautés suscitées pour les hommes, vous ordonnez le bien et vous réprouvez le mal… » (chapitre 3, verset 110 du saint Coran.) Réprouver ce qui est mal, c’est déjà beaucoup et même peut-être suffisant, mais ordonner le bien… alors là c’est la porte ouverte à tous les totalitarismes. Ordonner !!! Brrr !!! La porte ouverte à toutes les dictatures par définition surtout quand on croit savoir que, contrairement à la Bible, le Coran ne constitue pas un témoignage humain (tel qu’attesté par les savants et sages de la Synagogue ou de l’Église), mais le « texte original » de la révélation divine (théorie du Coran incréé rejetée par nos amis moutazilites).
Si, pour s’en tenir aux religions monothéistes, le christianisme, lors de ses siècles de formation est demeuré distinct de l’État, voire s’est dressé contre lui et le judaïsme, associé originairement à l’État, s’en est dégagé par la suite, l’Islam-spiritualité lui s’est politisé au bout de treize ans seulement (à Médine).
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir, des « hérésies » sont très vite apparues en terre d’islam, la première étant celle dite de la mosquée de la discorde qui fut brûlée en 630 sur ordre de Mahomet et ses fidèles obligés de se réfugier à La Mecque ou dispersés.
L’épisode est mentionné dans le Coran Chapitre 9 versets 107-108.
« Ceux qui ont édifié une mosquée pour en faire [un mobile] de rivalité, d’impiété et de division entre les croyants, qui la préparent pour celui qui auparavant avait combattu Dieu et son Envoyé et jurent en disant : « Nous ne voulions que le bien ! » [Ceux-là], Dieu atteste qu’ils mentent. »
« Ne fréquente jamais (cette mosquée). Car une Mosquée fondée dès le premier jour, sur la piété, est plus digne que tu t’y tiennes debout [pour y prier]. On y trouve des gens qui aiment bien se purifier, et Dieu aime ceux qui se purifient. » (Coran 9/107-108)
La tradition musulmane attribue la construction de ce bâtiment à un ermite chrétien de la tribu kharadj de Yathrib/Médine appelé Abou Amir Ar-Rahib.
MAIS RIEN NE LE PROUVE, car la présence de chrétiens à Médine reste à démontrer. Il y avait des juifs, mais des chrétiens ? Par contre si ce fut bien le cas cette mosquée aurait été alors une église…
POUR QUE LA DÉRADICALISATION DES FOUS DE DIEU RÉUSSISSE,
LA LUTTE DOIT D’ABORD ÊTRE IDÉOLOGIQUE. VOIRE THÉOLOGIQUE.
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DIEU S’IL EXISTE NE PEUT PAS ÊTRE COMME ÇA (moutazilisme).
Notre seule religion étant celle de la vérité commençons par le commencement : la fatihah et la chahada.
La fatiha. Garde-nous sur le bon chemin. Le chemin de ceux que tua élus. Non sur le chemin de ceux qui ont mérité ta colère ni de ceux qui s’égarent (1, 6-7).
On a demandé un jour à Mahomet si cela concernait les juifs et les chrétiens. Sa réponse fut : « Qui d’autre ? » (Boukhari 56, 662).
Ainsi que l’ont bien vu S. Solomon et E. Alamqadisi (deux ex-musulmans devenus spécialistes de la charia) dans « la mosquée dévoilée Advancing Native Missions, 2007 », l’islam ne peut être défini uniquement comme une spiritualité, au sens occidental du terme, ni même seulement comme une foi. L’islam « est un système englobant : c’est avant tout un système sociopolitique et socioreligieux tout comme socio-économique, socio-éducatif, législatif, judiciaire et militaire, travesti dans une terminologie religieuse, réglementant tous les aspects de la vie de ses membres, leurs relations entre eux et même les relations qu’ils peuvent entretenir avec ceux qui ne partagent pas leur foi musulmane ».
Selon Robert Spencer également, l’islam est une religion profondément politique, et ce, dès ses origines. L’empire est venu en premier, la théologie en second. Elle a été élaborée afin de consolider et de justifier un pouvoir politique.
D’ailleurs, à en croire le récit musulman lui-même, Mahomet ne fut pas seulement un prophète, mais aussi un homme d’État. L’hagiographie musulmane le présente à la fois comme étant le fondateur d’une « communauté-état-société », un chef militaire et un législateur. Et les victoires spectaculaires des premiers musulmans sont interprétées comme la preuve du soutien de Dieu.
Or Bernard Lewis a bien montré ce qui fait problème : l’idée même qu’il puisse exister quelque chose qui échapperait à l’autorité de la religion, ce que les langues de la chrétienté désignent sous le nom de profane, temporel ou séculier, est totalement étrangère à la pensée musulmane ».
Spirituel ou temporel, religieux ou laïc…
« Ces paires de mots n’existent tout simplement pas dans la terminologie islamique classique, car la dichotomie que ces termes expriment est inconnue. Ils ne sont utilisés que dans les langues modernes. En arabe, on emprunte la terminologie utilisée par les Arabes chrétiens ».
De fait, il n’existe donc aucun mot en arabe classique traduisant une quelconque distinction entre ces deux réalités.
La séparation entre « Église » et « État » est inexistante en terres d’islam.
Le grand intellectuel et ex-musulman Ibn Ouarraq, a consacré un chapitre entier sur la nature totalitaire de l’islam dans son livre intitulé « Pourquoi je ne suis pas musulman ».
Citant Bertrand Russel « En matière de religions [de masse ?], le bolchévisme est plus à ranger avec le mahométanisme qu’avec le christianisme et le bouddhisme qui sont essentiellement des religions personnelles ».
Si l’on tient compte des sourates racistes du type, chapitre 3, verset 110. « Vous formez la meilleure communauté suscitée pour les hommes : vous ordonnez ce qui est convenable, vous interdisez ce qui est blâmable » la comparaison avec le nazisme est également possible (et d’ailleurs a déjà été faite, y compris par un ex Premier ministre français).
Pour en revenir à Ibn Ouarraq en tout cas cet auteur souligne que le mahométanisme et le bolchévisme ont en commun d’avoir une finalité pratique, sociale et matérielle dont le seul but est d’étendre leur domination sur le monde.
De toute évidence, affirme Ouarraq, la charia entend « contrôler la vie religieuse, sociale et politique de l’humanité sous tous ses aspects ; la vie de ses adeptes ; ainsi que la vie de ceux qui suivent les religions prétendument tolérées, suffisamment pour empêcher leurs activités de gêner (l’Islam) en quoi que ce soit. Et je dis bien l’islam, car je n’accepte pas la fallacieuse distinction entre islam et « intégrisme islamique » (sic).
Pour Ibn Ouarraq, cette nature englobante de la loi islamique est prouvée par le fait qu’elle ne fait pas de distinction entre le rituel, la loi (au sens occidental du terme), l’éthique et les bonnes manières.
L’islam est donc essentiellement un système normatif qui produit une entité politique au sens large du terme (oumma). Les analyses statistiques que Bill Warner (fondateur du CEIP) a menées à propos de la nature des fondements de l’islam (coran, sira et hadiths) démontrent en effet que l’islam doctrinal passe plus de temps à parler du kafir (non-musulman), lui vouant sa haine et son mépris, que d’enseigner au musulman comment vivre sa spiritualité. Cette hostilité doctrinale de l’islam envers le non-musulman étonne et doit venir de la personnalité de Mahomet qui fut considéré (ce n’est pas à nous de dire s’ils avaient tort ou raison) comme un fou furieux ou un possédé par les siens, un homme envieux ou complexé vis-à-vis des juifs et des chrétiens. On est donc là très très loin de l’esprit du
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« vivre-ensemble » à la mode en Occident aujourd’hui où il y aurait place à une totale diversité de croyances religieuses ou d’options philosophiques.
La loi islamique conçue par des théologiens-juristes (oulémas) se prononce sur une grande variété de comportements présentés comme des devoirs envers Dieu, car ils reposeraient sur son impénétrable volonté.
Mentionnons, à titre d’exemple, que cette théologie se distingue nettement du vivre ensemble, un des fondements de la civilisation occidentale d’aujourd’hui. Alors que le christianisme a débuté essentiellement à titre de voie spirituelle (se référer aux écrits du Nouveau Testament ainsi qu’aux trois premiers siècles de la chrétienté jusqu’à la conversion de l’empereur Constantin), l’islam, pour sa part, fut une religion politique dès ses origines.
La loi islamique conçue par des théologiens-juristes (oulémas) se prononce sur une grande variété de comportements présentés comme des devoirs envers Dieu, car ils reposeraient sur son impénétrable volonté.
Selon Ouarraq, c’est Charles Watson qui, en 1937, a souligné le premier la nature totalitaire de l’islam : « Par un million de ramifications, pénétrant chaque aspect de la vie, toutes avec une signification religieuse, l’islam maintient son emprise sur les musulmans ».
Bousquet, l’une des plus grandes autorités en droit islamique, distingue deux aspects dans l’islam qu’il juge totalitaires : la charia et la notion islamique de petit djihad qui a pour objectif la conquête du monde entier. Car dans la perspective musulmane, ce ne sont pas seulement les musulmans qui doivent se soumettre à la charia, mais bien l’humanité tout entière, d’une manière ou d’une autre.
S. Solomon et E. Alamqadisi emploient le terme « système » plutôt que celui de « religion » afin d’insister sur le fait que l’islam n’est pas seulement une spiritualité (au sens occidental du terme). Et de fait ainsi que nous avons l’occasion de le dire, la charia (loi islamique) régit tous les aspects de la vie : politique, économique, ainsi que tous les autres aspects de la vie humaine.
L’islam est certes une spiritualité, mais ce n’est donc pas seulement que cela. Tel qu’il se pense à grande échelle, et ce, depuis plus de 1000 ans, l’islam est aussi en effet…
— Une manière de vivre englobante.
— Une culture et une civilisation à part entière.
Un système politico-religieux (charia) suprématiste.
La charia (loi islamique) touche autant les pratiques cultuelles que la vie privée, familiale, sociale, économique ou politique. Il n’y a pas d’aspects de la vie personnelle ou publique qui ne soit inclus dans la charia.
La charia contrôle la vie entière du musulman. Elle s’immisce partout. À titre d’exemples :
— Taxe de pèlerinage.
— Contrats en matière d’agriculture.
— Manière de traiter les esclaves.
— Invitation à un mariage.
— Usage de cure-dents.
— Façon de faire sa toilette.
— Interdiction aux hommes de porter de l’or ou des anneaux d’argent.
— Manière de traiter les animaux.
— Etc.
L’islam implique donc la soumission à un corps doctrinal dont l’expression achevée est la charia : une loi qui entend contrôler tous les aspects de la vie humaine. Cette loi islamique (charia) s’est constituée à partir de quatre fondements :
— Coran.
— Sunna (tradition rapportant les prétendues paroles et actions, hadiths, de Mahomet).
— Ijma (consensus des érudits, gardiens de la juste interprétation des textes).
— Qiyâs (raisonnement par analogie).
LE CORAN.
Pour la grande majorité des musulmans, le coran est la parole même de Dieu. Le livre aurait été dicté à Mahomet sur une période de 23 ans, et ce, par l’entremise de l’ange Gabriel.
Bien qu’il contienne des règles destinées à la première communauté sur des questions comme le mariage, le divorce ou l’héritage, le coran ne formule aucun principe général. De nombreuses questions sont traitées de manière superficielle, et un grand nombre de questions vitales ne sont même pas abordées.
LA PERSONNALITÉ DE MAHOMET. Considéré (ce n’est pas à nous de dire s’ils avaient tort ou raison) comme un fou furieux ou un possédé par les siens et envieux ou complexés vis-à-vis des juifs et des chrétiens.
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Aux origines de la nature totalitaire de l’islam, il y a aussi ce dernier point de la chahada ou credo de la foi musulmane, qui stipule « qu’il n’y a de Dieu que Dieu et Mahomet est son prophète (messager, envoyé) ».
Le mot « islam » se référant à la notion de « soumission », le musulman est donc appelé à se soumettre au Coran incréé (parole de Dieu) et à Mahomet, en toutes choses : religieuse, politique, culturelle, etc.
Et de fait, à plusieurs reprises le coran stipule que le musulman doit imiter Mahomet.
« Quiconque obéit au Messager obéit à Dieu » (4,80)
« En effet, vous avez dans le Messager de Dieu un beau modèle [à suivre], pour quiconque espère en Dieu et au Jour dernier et invoque Dieu fréquemment » (33,21)
Cette exemplarité de Mahomet (isma) n’est pas sans conséquence grave vu sa personnalité : la tradition musulmane le présentant à la fois comme chef religieux, politique et militaire.
De fait, la sunna (tradition rapportant les supposées paroles et actions de Mahomet ou hadiths) nous montre un Mahomet particulièrement autoritaire et réclamant obéissance et soumission.
Cette attitude de Mahomet ressort tout autant de la sira (biographie-hagiographie de Mahomet) que des hadiths (paroles et gestes attribués à Mahomet) : toute personne (musulman, païen, juif, chrétien…) doit se soumettre à sa volonté et ses diktats.
On souhaiterait que l’islam-religion diffuse son message seulement par la parole et l’argumentation, mais les fondements de la loi islamique (coran et sunna) autorisent le recours au petit djihad à l’égard des kouffar (non-musulmans) afin que l’islam domine. Ce petit djihad contre les incroyants n’ayant pas reconnu la prééminence de l’islam en payant la djizya des dhimmis ou en se convertissant, est consubstantiel à l’islam, du moins tant que la terre entière ne se sera pas soumise à sa conception de Dieu (Dieu).
« Et combattez-les jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de fitna (?) et que la religion soit entièrement vouée à Dieu seul. S’ils cessent, plus d’hostilités, sauf contre ceux qui agissent mal » (Coran 2,193).
« On m’a ordonné de combattre les kouffar jusqu’à ce que tous admettent qu’il n’y a de Dieu que Dieu » (hadith Boukhari 4, 52, 196).
« On m’a ordonné de faire la guerre contre l’humanité tout entière jusqu’à ce qu’elle accepte qu’il n’y a de Dieu que Dieu, qu’elle admette que je suis son prophète et accepte toutes les révélations faites par mon entremise » (hadith Muslim 1,31)
Et de fait les études de l’historienne Bat Ye’or sur l’état de dhimmi (citoyen non musulman de seconde zone en terre d’islam) démontrent qu’avec le temps, la pression et la discrimination religieuse aidant, une société conquise par les musulmans s’islamise toujours de plus en plus : l’idéal visé étant d’avoir une société 100 % musulmane. Et pour ce faire, la charia justifie tous les moyens, y compris le petit djihad et donc la violence ou la ruse.
LA SUNNA.
En terres d’Islam, le coran comme la sunna sont présentés comme étant l’expression de la volonté de Dieu qui ne doit en aucun cas être contestée. L’obéissance aveugle est par conséquent demandée, sans aucune hésitation, question, ou réserve.
La sunna (littéralement, le chemin, la voie ou manière de vivre) fonde les coutumes et la manière de vivre des musulmans qui trouvent leurs assises dans l’exemplarité (paroles et gestes) de Mahomet le « parfait » musulman !
La sunna considère en effet que Mahomet (paroles et actions), est le parfait modèle du musulman (isma). D’un point de vue pratique, elle est aussi importante que le coran, sinon plus si l’on considère sa contribution à l’élaboration de la charia (loi islamique).
Les musulmans croient que la sunna complète le coran et qu’elle est essentielle pour sa bonne compréhension, en clarifiant ses imprécisions, comblant ses silences.
Sans la sunna, les musulmans seraient de fait en manque de repères pour la conduite de leur vie. L’islamologue Bill Warner (du CEIP) a constaté en effet qu’il n’y a même pas assez d’informations dans le coran pour que le musulman sache comment vivre les cinq piliers de l’islam.
En raison du caractère imprécis et obscur de la sunna et du coran, ce sera donc au fiqh (ou « science » de la charia) qu’il reviendra d’apporter plus de précisions. Ce fut le travail des « juristes musulmans » (faqih – pluriel fouqaha).
LE QIYAS. Le raisonnement par analogie ou « qiyâs » est considéré par les docteurs de la loi musulmane comme étant subordonné aux trois fondements de la loi islamique, et donc, de moindre importance. Il s’agit d’un compromis très mitigé entre une véritable liberté de pensée et l’interdiction formelle de critiquer la charia.
L’IJMA OU CONSENSUS DES SAVANTS qui n’a évidemment rien à voir avec la démocratie !
Dire que l’islam est une religion sans clergé est un lieu commun de nos élites intellectuelles (journalistes, etc.) aussi trompeur que l’affirmation comme quoi le bouddhisme est une religion sans
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Dieu (et le dharma alors ?). Outre que ce n’est pas vrai chez les chiites (20 %) c’est oublier le rôle des oulémas dans le développement de l’Islam. Car l’élaboration du droit islamique est l’œuvre d’une classe de professionnels (docteurs de la loi connus sous le nom d’oulémas) jugés suffisamment compétents pour interpréter les textes.
Comme leur autorité grandissait au sein de la communauté musulmane, ces oulémas ont acquis de plus en plus de pouvoir et ont exercé finalement un contrôle considérable sur les croyances et comportements de tous les croyants.
La doctrine de l’ijma a consolidé le pouvoir absolu de ces docteurs de la Loi. C’est ainsi que toute interrogation, remettant en question la validité de leurs décisions, devint une bida (une innovation pouvant détourner les musulmans de la prétendue vraie foi) et donc une hérésie (erreur) passible d’une sanction (punition).
Cette mainmise des oulémas sur l’Islam explique pourquoi il y a eu si peu de progrès, sur le plan intellectuel, dans les sociétés musulmanes depuis la fermeture des portes de l’Ijtihad au 12e siècle. La fermeture des portes de l’ijtihad a littéralement tué la possibilité d’une pensée critique. La quête de la vérité caractéristique d’un esprit moderne est tout à fait contraire à l’esprit de la charia. Le Coran étant en lui-même ne catastrophe (contradictions répétions obscurités…) du fait de cette fermeture des portes de l’ijtihad (achevée au 13e siècle) l’islam sunnite est devenu un désastre intellectuel pour l’humanité.
Tout au long de l’histoire musulmane (mais plus particulièrement au cours des dernières années en réaction à l’esprit de la modernité), les oulémas ont activement fait obstacle à l’introduction de la notion des droits de l’homme et de la femme, de la liberté, de la libre conscience et de la démocratie.
À titre d’exemple, les oulémas ont violemment réagi contre l’idée de liberté introduite dans la constitution iranienne de 1906-1907 qu’ils considéraient comme étant non islamique. Ils ont en outre travaillé activement à l’islamisation de l’Iran, du Soudan et du Pakistan, pour ne nommer que ces pays. Dans tous ces pays, l’islamisation s’est effectivement traduite par la restriction ou la suppression des droits de l’Homme (Houqouq al Ibad).
On doit par contre à ces oulémas la notion de Droits de Dieu (Houqouq Allah). Chose inquiétante en effet, un véritable archonte dirait le spécialiste américain du gnosticisme John Lamb Lash, comme si le Dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob n’était pas assez puissant pour se venger lui-même en foudroyant qui bon lui semble, les musulmans sont appelés à être ici-bas les bras armés exécuteurs de la justice de Dieu !
Ces juristes fondèrent plusieurs « écoles » d’interprétation dont quatre (hanafite, malékite, chafi‘ite, hanbalite) survivent encore aujourd’hui. Elles se partagent notamment la population des musulmans de l’islam sunnite.
Lorsque les diverses écoles furent critiquées pour avoir introduit des innovations sans justification, adaptant la loi religieuse pour des intérêts mondains, les docteurs de la loi développèrent alors la doctrine de l’infaillibilité du consensus (ijma) qui est le troisième fondement de la charia.
La parole attribuée à Mahomet « Ma communauté ne sera jamais d’accord à propos d’une erreur » – hadith rapporté par Al-Tirmizi (4 : 2167) Ibn Madja (2 :1303) Abou Daoud et d’autres avec de légères différences de formulation – a été interprétée comme étant la garantie de l’infaillibilité des docteurs musulmans reconnus.
Mais la doctrine du consensus (ijma) n’a rien de démocratique : l’avis du peuple étant expressément exclu des discussions.
L’ijma favorisa au contraire un progressif durcissement de la doctrine en interdisant tout raisonnement indépendant qui remettrait en question les interprétations établies par les docteurs musulmans reconnus du passé.
C’est ainsi que la loi islamique se figea définitivement (au début du Xe siècle).
Les érudits toutes écoles confondues en vinrent même à considérer que toutes les questions essentielles avaient été suffisamment débattues si bien qu’un consensus avait vu le jour. Désormais, donc nul ne put avoir les qualifications nécessaires pour mener à bien une réflexion indépendante en matière de loi. Toute activité future devant se limiter à l’explication, l’interprétation et l’application de la doctrine fixée une fois pour toutes.
La charia devint pour ainsi dire gravée dans le marbre. La rigidité caractéristique de la loi islamique assurant sa pérennité, et ce, jusqu’à ce jour. Avec l’avènement de la modernité et des droits de l’Homme, il est clair que ce système juridique est totalement inadapté pour faire face aux changements et défis d’une société moderne et démocratique.
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Pour les orthodoxes, ébranler ce système reviendrait d’ailleurs à remettre en cause les fondements mêmes de l’islam.
SCIENCE ET PHILOSOPHIE.
Aux VIIe et VIIIe siècles, premiers siècles de l’hégire pour le monde musulman, les conquérants arabes se trouveront en présence de communautés appartenant surtout au christianisme oriental en
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Égypte, Palestine, Syrie et Mésopotamie. Ces communautés avaient déjà produit de nombreuses traductions des œuvres philosophiques et scientifiques gréco-romaines, du grec au syriaque.
De 750 à 850, période des califes abbassides, apparaîtra donc la science arabo-musulmane. Les traducteurs des califes utilisent d’abord les versions syriaques, puis les textes grecs, pour les traduire en arabe. Les souverains payaient parfois leur poids en or tout livre récemment traduit.
Ce mécénat sera initié par le calife al-Mansour (754-775) et il est poursuivi par ses successeurs, dont le fameux Haroun al-Rachid (785-809), le calife des Mille et une Nuits. Sous le règne d’al-Mansour, des ouvrages de médecine et de logique grecs sont traduits en arabe. Mais le calife le plus emblématique de ce modèle de souverain éclairé est al-Mamoun qui règne de 813 à 833. Il ouvre aux savants la bibliothèque de son père Haroun al-Rachid : c’est la première Baït al-Hikma, la « maison de la sagesse », où des ouvrages scientifiques grecs et persans sont étudiés. L’un des plus célèbres traducteurs issus de cet établissement est le chrétien Hounaïn ibn Ichaq (808-873) : il finit même par diriger la maison de la sagesse de Bagdad. D’autres « maisons de la sagesse » ouvrent dans le monde islamique, comme par exemple au Caire ou à Cordoue et c’est ainsi que, dès le IXe siècle, une majeure partie des écrits de la Grèce était disponible en langue arabe. Le philosophe al-Farabi (mort en 950), « le second maître » (en référence au premier maître, Aristote), tiendra une place prépondérante dans cette dynamique.
Parmi les ouvrages traduits se trouvent des textes fondateurs de la science grecque : par exemple l’Almageste de Ptolémée, l’une des sommes de mathématiques et d’astronomie les plus importantes de l’Antiquité, les Éléments d’Euclide, un traité de mathématiques et de géométrie, et bien d’autres savants encore, comme le célèbre Archimède. En médecine, le De Materia Medica de Dioscoride ou les traités de Galien font autorité et influencent durablement la pratique de la médecine dans le monde arabe. En philosophie, les ouvrages d’Aristote et de Plotin marquent la pensée arabo-musulmane. Plus généralement, le néoplatonisme, courant philosophique de l’Antiquité tardive issu de la pensée de Platon, inspire les grands penseurs arabes médiévaux.
— Avicenne (980-1037). Durant sa petite enfance, Avicenne étudie l’arithmétique chez un marchand herboriste, expert en calcul indien. Ayant une bonne mémoire, le jeune garçon finit par surpasser son maître en calcul et en mathématiques. Sous la conduite du maître Abu Abdallah Ennatili, il s’initie au Coran, aux auteurs arabes et à la philosophie, en commençant par l’Isagogè de Porphyre (un petit traité pédagogique de vulgarisation de la philosophie d’Aristote). À l’âge de dix ans, il maîtrise ainsi le Coran, l’arithmétique, la géométrie d’Euclide, et des bases de la philosophie comme la logique. Il se lance tout seul dans des études difficiles comme l’Almageste de Ptolémée.
À l’âge de 14 ans, son précepteur Ennatili le quitte pour aller dans une autre ville. Un ami médecin lui apporte les traductions des œuvres d’Hippocrate, qu’il aurait lues d’un traite, nuit et jour. Il raconte dans son autobiographie : « quand le sommeil me gagnait, que je sentais mes forces faiblir, je prenais un breuvage épicé pour me soutenir, et je recommençais mes lectures ».
Sa mémoire étant phénoménale, il lit aussi toutes les traductions de Galien. À l’âge de 16 ans, il est brillamment reçu médecin à l’école de Goundichapour où professent des médecins de toutes confessions : juifs, chrétiens, mazdéens et musulmans. À 17 ans, il donne des cours à l’hôpital de Boukhara qui sont suivis par des médecins étrangers.
Avicenne est appelé auprès du prince Nouh ibn Mansour qui souffre de violentes coliques. Il diagnostique une intoxication par le plomb des peintures décorant la vaisselle du prince, et réussit à le guérir. Il est alors autorisé à consulter la riche bibliothèque royale des Samanides.
En un an et demi, il acquiert la connaissance de tous les auteurs anciens disponibles. Il bute cependant sur la Métaphysique d’Aristote qu’il ne comprend pas, mais il surmonte cette difficulté en découvrant les commentaires d’Al Farabi. Dans son autobiographie, il déclare avoir intégré tous les savoirs de son temps à l’âge de 18 ans, grâce à sa mémoire, mais que son esprit n’était pas assez mûr.
— Rhazès (857-926). Mohammed Ibn Zakaria al-Razi, Abu-Bakr, connu chez les Latins sous le nom de Rhazès, est né vers 865, à Rayy au sud de l’actuel Téhéran en Perse.
On ne sait rien de précis sur le déroulement de ses études. Il a pratiqué la musique, qui fut son principal centre d’intérêt au cours des premières années de sa vie (il était joueur de luth). Il a étudié la philosophie et l’alchimie, les mathématiques, l’astrologie, il s’est également intéressé à l’orfèvrerie, la monnaie, les sciences occultes.
Selon Abou Rayhan Birouni il souffrait d’une maladie des yeux provoquée par les vapeurs provenant de ses expériences d’alchimie, mais plus tard Rhazès aurait dit lui-même que sa vue avait été affectée par les lectures prolongées.
Il avait la trentaine lorsqu’il commença l’étude de la médecine à Rayy, auprès d’Is'haq Ibn Hunaïn, passé maître dans la médecine grecque, perse et indienne. Il aurait été indirectement (par leurs écrits) l’élève de Ali ibn Rabban Tabari (mort vers 870), ainsi que de Abdous ibn Zaïd (mort en 900),
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complétant son éducation dans les lectures et l’expérimentation. Puis il a surtout continué à s’instruire en médecine à Bagdad, sous le Calife Al Moktafi (901-907), et voyagea en Syrie, en Égypte, en Espagne.
— Al Kindi (801-873). Abou Youssouf Ya’qub ibn Ichaq al-Kindi (Koufa, 801 – Bagdad, 873), plus connu sous son nom latinisé d’Alkindus ou Al-Kindi, est considéré comme l’un des plus grands philosophes hellénisants de langue arabe (faylasuf), en étant surnommé « le philosophe des arabes ».
Esprit encyclopédique, il a cherché à synthétiser, organiser et évaluer l’ensemble des savoirs de son temps, en s’intéressant à des domaines très variés : philosophie, mathématiques, astronomie, physique, chimie, technologie, musique…
Il est issu de la tribu sud arabique de Kindah et nait à Koufa, première capitale abbasside. Il fait ses études à Bassorah, dont son père était gouverneur, puis à Bagdad, nouvelle capitale abbasside depuis 762. Ces trois villes (Koufa, Bassorah et Bagdad) étaient les plus prestigieuses du monde musulman de l’époque pour leur rayonnement intellectuel.
Il bénéficie du mécénat des trois califes mutazilites abbassides, dont Al-Ma’moun qui fonde la Maison de la sagesse (Baït al-hikma), où un grand nombre d’érudits traduisent en arabe tous les livres disponibles persans, indiens, syriaques et surtout grecs. Avec ses collègues Al-Khouârizmî et les frères Banou Moussa, il était chargé de la traduction de manuscrits de savants grecs. Il semblerait qu’en raison de ses faibles connaissances en grec, il ait seulement amélioré les traductions faites par d’autres, et ajouté ses propres commentaires aux œuvres grecques.
Dans ce contexte, Al-Kindi devient le précurseur de l’aristotélisme arabe.
En 847, le nouveau calife Jafar al-Moutaouakkil renonce au mutazilisme. Al-Kindi tombe alors en disgrâce en 848. Sa bibliothèque est confisquée.
— Al Khouarizmi (780-850). Muhammad Ibn Moussa al-Khouarizmi, généralement appelé Al-Khouârismîn (latinisé en Algoritmi ou Algorizmi), né dans les années 780, probablement à Khiva dans la région du Khouarezm (d’où il tire son nom), dans l’actuel Ouzbékistan, mort vers 850 à Bagdad
Dans certaines biographies, on trouve la version de l’historien perse Mouhammad ibn Jarir al-Tabari (838-923), qui lui ajoute un « Al-Qoutrouboulli », ce qui signifie que ses ancêtres étaient originaires du Khouarezm, mais que lui-même était né à Qoutrouboull, une petite localité près de Bagdad. L’épithète d’al Majousi que lui attribue aussi Tabari laisse à penser que ses parents ou grands-parents étaient zoroastriens et on peut le considérer comme un mathématicien arabisé, plutôt que comme un mathématicien arabe. Les événements de la vie d’Al-Khouârizmî sont peu connus par contre il existe de nombreuses traces de ses travaux scientifiques. Ses écrits, rédigés en langue arabe, puis traduits en latin à partir du XIIe siècle, ont permis l’introduction de l’algèbre en Europe.
Son nom latinisé est à l’origine du mot algorithme et le titre de l’un de ses ouvrages (Al-kitab al-moukhtasar fi hisab al-Gabr oua’l-mouqabala, Abrégé du calcul par la restauration et la comparaison) est à l’origine du mot algèbre. L’utilisation des chiffres arabes et leur diffusion dans le Moyen-Orient et en Europe sont dues à un autre de ses livres intitulé Traité du système de numération des Indiens qui fut diffusé via la langue arabe dans tout l’empire abbasside. Al-Khouarizmi a classifié les algorithmes existants, en particulier selon leurs critères de terminaison, mais ne revendique pas leur invention. Les premiers algorithmes connus le furent, sans surprise, dans un pays devant gérer des calculs élaborés de l’impôt : à Babylone.
Sa vie s’est déroulée en totalité à l’époque de la dynastie abbasside. Il meurt vers 850.
Vers le milieu du XIe siècle, ce mouvement de traduction prend fin ce qui coïncide avec ce que les historiens appellent la fin des moutazilites (libre penseurs musulmans) et la fermeture des portes de l’ijtihad d’après Mohamed Charfi (Islam et liberté).
De grands savants continueront néanmoins le mouvement ainsi enclenché.
CONCLUSION.
« Foi et science sont des modes de connaissance différents. De même qu’il serait ridicule, dans une discussion scientifique, de vouloir prouver sa thèse par un serment prenant Dieu à témoin, de même est-il ridicule dans le domaine de la foi de vouloir prouver un dogme à l’aide d’une vérité scientifique ».
Depuis la fermeture des portes de l’Ijtihad c’est-à-dire en gros la fin du moutazilisme (12e siècle) l’islam est devenu structurellement archaïque. Les sociétés musulmanes perdirent progressivement leur intérêt pour la science, se vidèrent peu à peu de leur esprit d’initiative, de leur imagination, et se calcifièrent. Des personnages comme le hanbalite Ibn Taïmiya finirent de clouer le cercueil en plaçant l’obéissance au sommet de la hiérarchie des valeurs, et en évacuant la raison. Exeunt philosophie, théologie, ouverture à la nouveauté et esprit critique.
La foi aveugle de certains de ses interprètes tels Ibn Taïmiya contredit tout ce que la philosophie des Lumières a obtenu depuis le XVIIIe siècle et qui suppose le rejet de la superstition, de la pensée magique, l’universalité du règne de la raison, la fin de toute religion d’État, l’élargissement de la liberté de pensée et d’expression… il n’y a donc plus de progrès intellectuel dans les sociétés musulmanes.
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Comment pourrait-il y avoir des progrès quand on considère le Coran comme la vérité éternelle et la réponse à toutes les questions ou la solution à tous les problèmes ? Le progrès exige le changement ; or la révélation divine est figée depuis la mort de Mahomet. La notion de Saint-Esprit n’existe pas dans l’islam.
Ainsi que nous avons déjà eu l’occasion de le dire, la coupure principale entre le monde musulman et le monde occidental réside sans doute dans le fait que dans ce dernier la distinction entre la sphère religieuse et la sphère civile est accomplie. À de rares exceptions près, les chercheurs, dans quelque domaine que ce soit, ne se demandent pas si les résultats de leurs recherches concordent avec les prescriptions divines.
Cela ne signifie aucunement que la question est définitivement réglée en Occident : le danger d’une régression reste important, car les forces qui, dans le monde occidental, tentent d’imposer un retour du religieux restent puissantes. Il est significatif que dans ce combat, elles aient le soutien des religieux musulmans, et pas forcément les plus radicaux.
Le fait de savoir des passages du Coran par cœur et de les répéter sans cesse, ainsi que la place qui lui est réservée dans la vie courante, publique et privée, ne favorise guère l’esprit critique en terre d’islam (dar al islam) puisque cela relève du lavage de cerveau et confère au Coran une autorité et une évidence qui ne se discutent plus. Le Coran, qui est pour les musulmans, grammaticalement et matériellement, la parole de Dieu, dont chaque mot contient une présence divine, à l’instar de ce que sont les sacrements chez les chrétiens, sert de grille de lecture pour toute réalité ou de réservoir de formules magiques pour les niaiseries de la superstition populaire. Celui qui s’en sert acquiert autorité et prestige. Une part du succès de l’islam est due à ces répétitions de formules basiques destinées à susciter chez l’individu de véritables réflexes conditionnés aptes à provoquer mirages et obsessions.
Un des tours de force de la rhétorique islamique (taqiya) est d’avoir aussi réussi à élaborer à destination des pays dhimmis ou harbis une novlangue dont Orwell aurait rêvé.
— La din étant beaucoup plus une loi qu’une spiritualité, traduire ce mot par religion est trompeur.
— Nulle contrainte en ce qui concerne la religion veut dire nulle contrainte en ce qui concerne la pratique de l’islam et non et non et non quoi d’ailleurs.
— Le divorce n’est pas une séparation à l’amiable ni pour faute puisqu’il est décidé unilatéralement et à la demande de l’homme uniquement (talaq) ; traduire par répudiation serait donc intellectuellement plus honnête.
— La zakat n’est pas une aumône puisqu’elle est obligatoire, et traduire par dîme ou impôt religieux serait certainement plus honnête.
— Le chahid mourant les armes à la main y compris dans des attaques suicides il n’est donc pas pertinent de le traduire par martyr.
Etc. …
LE CORAN ROI DES CONTRADICTIONS ASSUMÉES.
Que le musulman pieux veuille bien pardonner à l’avance ce qui va suivre et qui tombe hélas ! sous le coup de l’interdiction par Dieu de toute contestation de toute discussion ou de tout dialogue. Car nous allons effectivement maintes fois dans les pages qui suivent discuter des versets du Coran : de leur sens, de leur pertinence, de leur adéquation, de leur valeur éthique philosophique ou scientifique. Comment faire autrement ?
Le Coran est censé contenir les bonnes réponses à toutes les questions possibles et imaginables que l’on peut se poser.
Verset 2, chapitre 2. « Voici le Livre, il ne renferme aucun doute ».
Verset 99, chapitre 2. « Nous t’avons révélé des versets parfaitement clairs. Seuls les pervers n’y croient pas ».
Verset 82, chapitre 4. « Ne méditent-ils pas sur le Coran ? Si celui-ci venait d’un autre que Dieu, ils y trouveraient de nombreuses contradictions ».
Verset 101, chapitre 5. « Ô vous qui croyez ! Ne posez pas de question sur des choses qui vous nuiraient si elles vous étaient montrées ».
Verset 38, chapitre 6. « Nous n’avons rien négligé dans le livre ».
Verset 111, chapitre 12. « Un enseignement destiné aux hommes doués d’intelligence… un exposé détaillé de tout chose ».
Verset 89, chapitre 16. « Éclaircissement de toute chose ».
Verset 82. Chapitre 4. « Ne méditent-ils pas sur le Coran ? Si celui-ci venait d’un autre que Dieu, ils y trouveraient de nombreuses contradictions ». Le Coran reconnaît donc lui-même être plein de contradiction aux yeux d’un homme ordinaire, mais comme il est d’origine divine ce ne sont que des apparences de contradiction.
Dit autrement c’est le principe du chef dans toute son horreur.
Article de foi N° 1 le chef (Dieu Gabriel Mahomet) a toujours raison.
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Au cas où le chef n’aurait pas raison, l’article N° 1 s’applique immédiatement.
Même caricature de raisonnement qu’en matière d’abrogation.
Chapitre 2 (« La vache »), verset 106 : « Quand nous abrogeons un verset ou que nous le faisons oublier, nous en fournissons un meilleur ou un semblable. Rien n’est impossible à Dieu ! »
Chapitre 13 (« Le tonnerre »), verset 39 : « Dieu efface ce qu’il veut ou confirme ce qu’il veut ; c’est auprès de lui qu’est La Mère (l’origine) du Livre ».
LES CONTRADICTIONS DU CORAN AVEC LA SCIENCE.
Ce qui en soi n’aurait aucune importance si les thuriféraires de l’Islam ne prétendaient pas que rien dans le Coran ne contredit la science moderne.
Qu’un texte sacré n’ait que peu de choses à voir avec la science, y compris la cosmogonie, n’a rien que de très normal. Son propos n’est pas là. Il doit parler de spiritualité, de métaphysique ; voire de morale.
Ce qui est dangereux pour l’essor des sciences et de techniques, voire la civilisation, c’est que l’islam prétend que rien dans le Coran ne contredit la science, et que tout est dans Coran.
Le docteur Bucaille nous a fourni il y a quelques années le triste exemple d’un intellectuel français ayant osé soutenir le contraire. L’affaire serait risible si une telle attitude ne constituait pas un véritable danger pour la science et la civilisation.
Verset 17, chapitre 27. « Les armées de Salomon, composées de djinns, d’hommes et d’oiseaux, furent rassemblées et placées en rangs. Quand elles arrivèrent à la vallée des fourmis, une fourmi dit : ô vous les fourmis ! Rentrez dans vos demeures de peur que Salomon et son armée ne vous écrasent sans s’en apercevoir ». Salomon sourit à cette parole et il dit… »
Car pour Mahomet les djinns existent bien : ils émanent de Dieu, mais ne lui sont pas agréables. La littérature arabe et le Coran font abondamment allusion aux djinns : le chapitre 72 est intitulé « Les Djinns » ; le chapitre 6, verset 100, reproche aux Mecquois d’en faire des compagnons de Dieu ; le verset 128 du même chapitre précise qu’ils ont pu tromper les êtres humains, le verset 158 du chapitre 37 que les hommes les ont rattachés d’une façon ou d’une autre à Dieu. Le chapitre 55, verset 15, ajoute que Dieu les aurait créés d’un feu sans fumée. Cette superstition est donc inscrite dans le Coran, les djinns sont officiellement reconnus par l’islam et toutes les conséquences de leur existence ont été étudiées par les musulmans pieux. Leur statut légal [selon la Loi islamique] a été discuté sous chaque angle ; et leurs relations possibles avec l’Humanité, surtout en ce qui concerne le mariage et la propriété, ont été examinées.
Ces superstitions tinrent bon dans l’Arabie [musulmane], elles se répandirent même dans le reste du monde [musulman] et souvent se combinèrent avec d’autres superstitions, parfois bien plus élaborées. La foi des premiers musulmans n’avait décidément rien à voir avec la raison.
Avicenne (Ibn Sina) a probablement été le premier philosophe musulman à rejeter formellement la possibilité même de leur existence.
LES CONTRADICTIONS DU CORAN AVEC LES MYTHES BIBLIQUES.
La Bible et la Torah contiennent de nombreuses non-vérités, parfois de taille comme la captivité en Égypte ou la conquête de la Terre Promise, a fortiori tout ce qui est antérieur.
Ces erreurs ou non-vérités ont néanmoins été longtemps acceptées et font partie de ce qu’on pourrait qualifier de mythes antérieurs. Or il existe de sérieuses divergences entre le Coran et ce fond mythique antérieur.
NB. Il va de soi que nous ne pouvons accepter les explications du type : ce sont les juifs et les chrétiens qui ont falsifié la vérité initiale.
Ces contradictions avec les mythes bibliques ne peuvent avoir que deux origines possibles.
Soit il y avait à l’époque dans cette région du monde des variantes de ces légendes bibliques et Mahomet Dieu ou l’ange Gabriel n’a fait qu’en retenir une parmi d’autres.
Soit Dieu Mahomet ou l’ange Gabriel ont volontairement ou involontairement modifié certains points.
LA RÉÉCRITURE DE L’HISTOIRE (qui contrôle le passé contrôle le présent).
Tout le monde connaît les photos retouchées ou falsifiées dans l’URSS de Staline. Certains personnages en étaient éliminés. Il s’agissait de minimiser le rôle effectif de telle ou telle personnalité, mais également de montrer que les dirigeants n’avaient jamais été en contact avec certains politiques devenus infréquentables (qui contrôle le passé contrôle le présent).
On a ici le phénomène rigoureusement inverse, mais dans le même but avec ce que l’on appelle pudiquement la tradition musulmane et l’invention des hanifs ou précurseurs de l’Islam en Arabie voire le passage d’Abraham à La Mecque à partir d’un terme vraisemblablement issu du syriaque (hanpa).
Le processus de construction de la figure de l’Abraham islamique peut être découpé en deux phases.
Dans un premier temps, elle s’établit du temps de Mahomet. Celui – ci enrichit la figure d’Abraham au fur et à mesure de ses polémiques avec les autres monolâtres (cf. les nombreuses sourates où ces polémiques se devinent en filigrane dans le Coran) ;
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Dans un deuxième temps, l’histoire finale d’Abraham telle que la reconnaît l’islam va se fixer définitivement à partir de l’apport des penseurs musulmans postcoraniques.
À ce titre, l’étude de l’élaboration de l’Abraham islamique met précisément en relief à la fois les forces et les faiblesses de cette construction intellectuelle. Si elle nous renseigne sur le travail considérable effectué par les penseurs musulmans postcoraniques dans la construction d’une théologie islamique, elle met en exergue les contradictions qui existent entre le coran de Mahomet et la construction des auteurs postcoraniques.
Le premier Abraham du Coran
Abraham, en arabe Ibrahim, apparaît comme figure prophétique en même temps que Moïse dans une révélation coranique manifestement ancienne, la sourate 87, verset 19. Sa figure est déjà devenue autonome par rapport aux récits bibliques, elle n’est cependant pas encore liée au site mecquois.
Cette évolution se fera plus tard et en plusieurs étapes.
Le deuxième Abraham du coran : le lien d’Abraham avec la Mecque.
Le thème qui lie Abraham à la cité mecquoise semble être celui de la mise à l’abri de sa descendance, qui n’est pas autrement identifiée (qui ?) à la Mecque (coran 14 versets 35-37).
La représentation coranique d’Abraham comme sacralisateur du site mecquois et fondateur de rite paraît plus tard encore dans le Coran, chapitre 2 versets 125 à 130 (le coran de Mahomet y considère la Mecque comme une terre d’asile).
Dans quel contexte se construit cette évolution ?
Certains passages correspondent clairement à une polémique avec les juifs médinois, auxquels répond la thématique du Hanifisme abrahamique.
La théorie du Hanifisme permet à l’islam de Mahomet d’échapper à l’hérédité de déviance qu’il dénonce chez les juifs médinois (NDLR. Abraham était loin de pratiquer un monothéisme strict. Les spécialistes parlent plutôt d’hénothéisme).
Mahomet peut ainsi se raccrocher directement aux figures emblématiques largement évoquées dans la Bible : Noé, Abraham et Moïse.
De l’Abraham de Mahomet à l’Abraham des penseurs musulmans post-coraniques.
Nous avons vu comment le coran de Mahomet présentait la Mecque comme un lieu de refuge pour la famille d’Abraham.
Or, cette représentation coranique entre en contradiction totale avec le récit de la tradition musulmane qui suit à partir de l’épisode de Hadjar (Agar), laissée seule au désert, après sa fuite loin de la demeure d’Abraham. Cet épisode présente le site mecquois non comme un lieu de refuge, mais comme un lieu dangereux, avant que n’y accomplisse le miracle de l’eau jaillissant du puits de Zamzam (thème traditionnel de l’eau providentielle dans un milieu désertique).
Dans ces légendes postcoraniques, la mère d’Ismaël, abandonnée de tous, est représentée comme courant et suppliant entre deux monticules sacrés du val mecquois, situés à l’est de la Ka’aba (al Safa au sud-est et al-Maroua au nord-est, qui sont toujours objets de culte). Nous reviendrons plus tard sur ces deux légendes destinées bien évidemment à justifier d’antiques rituels païens et n’ayant rien à voir avec l’Histoire au sens scientifique du terme).
L’eau de Zamzam jaillit, sur intervention de l’ange Gabriel, alors qu’Agar est sur le point de mourir de soif avec son jeune fils Ismaël. Une des premières références médiévales classiques à ce récit post coranique figure dans l’as-Sira an-nabaouiya, compilée par Ibn Icham.
La figure d’Abraham en islam a donc subi plusieurs transformations. L’Abraham de Mahomet est différent voire en contradiction avec l’Abraham des récits des auteurs postcoraniques.
Essayons de rationaliser les causes de ces contradictions.
Pour être crédible, tout prophète se doit de montrer qu’il est véritablement celui qu’il prétend être c’est-à-dire un prophète du Dieu concerné ; mais pour Mahomet cela ne se fait pas sans mal.
Les imprécations de Mahomet à l’adresse de certains de ses auditeurs montrent bien ses difficultés à convertir les populations païennes de La Mecque ou juives de Yathrib/Médine, à ses idées (jugement dernier fin des temps, etc.), car les accusations (imposteur menteur fou possédé plagiaire, etc.) pleuvent à juste titre sur sa personne.
Mahomet va donc mobiliser à son profit les connaissances qu’il a recueillies sur les différentes religions de masse de son temps (mais pas seulement, car l’on retrouve aussi des bribes d’histoire arabe dans le coran) pour convaincre son auditoire. Sa politique de séduction des croyants bibliques peut aller jusqu’à l’adoption par lui de certaines pratiques (notamment pour séduire les tribus juives médinoises. cf. l’adoption du shabbat au début, les interdits alimentaires, la direction des prières ou qibla, etc.)
Mahomet acquiert ses connaissances soit directement (à l’occasion de ses voyages notamment en Syrie ; voir les accusations de plagiats ou de mensonges que lancent les Couraïchites à son encontre par exemple dans la sourate 16, verset 105) soit indirectement (par Zaïd qui aurait apparemment
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fréquenté une école juive de Médine ou son cousin voire antérieurement Khadidja et son entourage sensibilisés à une certaine forme de christianisme, d’où le recours à la figure de l’archange Gabriel pour expliquer /justifier les premières visions de Mahomet), mais aussi par les polémiques qu’il aura avec ses différents interlocuteurs.
La conquête de pays abritant de fortes populations connaissant mieux la tradition biblique multipliera de telles polémiques et mettra en exergue les faiblesses doctrinales du Coran de Mahomet. Il deviendra donc vital pour les penseurs islamiques post coraniques d’enrichir le corpus doctrinal de références bibliques plus précises afin de faire face à l’argumentaire fixé depuis des siècles, des contradicteurs juifs et chrétiens.
Il s’ensuivra une course à la référence biblique (on peut dire que quasiment l’ensemble de la première partie de l’œuvre d’ibn Hicham sur Mahomet est composé de récits bibliques ou païens reformulés dans une perspective apologétique) afin de démontrer le bien-fondé des idées de Mahomet, qui débouche parfois sur des contradictions voire sur des aberrations chronologiques (cf. ibn Hicham I, 222-232 où l’on voit Mahomet être un contemporain de Jésus.
Avec le terme de « hanif », on semble avoir affaire à une innovation coranique, dont le sens est mal maîtrisé, voire inversé. Ne pourrait-on pas y voir une malice d’informateur qui aurait été prise au sérieux ? Hanpa signifie païen en syriaque.
Il est vrai qu’une appellation dévalorisante, dans la langue de départ, comme les « oummoth » de l’hébreu, qui désignait les peuples « sans écritures » et donc exclus de la faveur divine, peut prendre en passant en arabe un sens relativement neutre, « groupes », « tribus », dans un premier temps ; avant de devenir en contexte médinois la « oumma », ou « groupe sur la bonne voie ».
NDLR. Il n’y a évidemment pas lieu d’ajouter le moindre crédit à une croyance largement répandue en milieu musulman, depuis la période classique des califats, et malheureusement reprise aujourd’hui encore par certains auteurs, selon laquelle des « purs » (hanif ; plur. hunafa) auraient préservé, en Arabie, une religion authentique et ayant échappé à toute déviation, qui dériverait directement de la Révélation initiale faite à Abraham.
Ces hommes auraient ainsi servi de maillon intermédiaire entre la période « prophétique », selon le Coran celle d’Abraham et de Moïse, et l’époque de Mahomet ? Encore faudrait-il qu’Abraham et Moïse eussent été de véritables personnages historiques, et non pas les héros emblématiques qui illustrent les récits d’une fiction sacrée. Le fait qu’ils soient revendiqués par trois religions de masse, apparues successivement dans le temps, que des fidèles innombrables croient en eux et les prennent comme références ne change rien à leur irréalité historique. Du moins pour les deux plus anciens.
On pourrait croire que la plus récente des religions monolâtres de masse, apparue au début du VIIe siècle, plus d’un demi-millénaire après la religion du Nazaréen Jésus, bénéficierait d’une historicité solide. Or la situation apparaît tout autre.
L’histoire de l’islam premier est paradoxalement trop belle pour être honnête, car c’est l’histoire d’un mythe qui se raconte, et non une histoire scientifiquement avérée. Le futur triomphant des premiers empires musulmans s’est superposé au passé de l’islam et l’a quasiment effacé, notamment dans sa dimension sociale et humaine. On se trouve donc en présence d’une histoire sacrée, celle qu’ont commencé à se raconter des sociétés islamisées, qui n’avaient plus rien à voir avec le monde de l’islam premier. À cette histoire reconstruite, chaque génération apportera sa pierre, sans vraiment en avoir conscience, y compris comme aujourd’hui à travers la fiction représentée d’une communauté musulmane idéale, à laquelle certains croient pouvoir se conformer, par exemple dans leur apparence (les salafistes).
Or, l’islam des origines souffre d’un terrible déficit d’historicité, mais la lecture dite de critique historique qui s’est appliquée au fil du temps aussi bien au judaïsme qu’au christianisme n’a guère touché l’islam jusqu’à présent.
Cette situation paradoxale a évidemment ses raisons, qui sont historiques et politiques.
L’une des toutes premières traces se trouve dans le texte apologétique grec intitulé Doctrina Jacobi (« l’enseignement de Jacob ») censé avoir été écrit en Afrique en juillet 634. Sa mise en scène romanesque et son scénario stéréotypé ne plaident guère en sa faveur, mais la lecture révèle une date (13 juillet 634) qui, même si elle est un peu arrangée, n’est nullement fictive. Ce document contient maints événements saisis à chaud, sur la portée desquels l’historien s’interroge.
« Lorsque le Candidat [Sergius, commandant de l’armée byzantine en Palestine] fut tué par les Sarrasins, j’étais à Césarée et je me rendais en bateau à Sykamina ; on y disait : Le Candidat a été tué ! Et nous les juifs, nous étions dans une grande joie. On disait qu’un prophète était apparu, avec les Sarrasins, et qu’il proclamait l’arrivée du Messie, l’oint du Seigneur, qui allait venir. Arrivé à Sykamina, je m’arrêtai chez un ancien très versé dans l’Écriture, et je lui demandai : 'Que me dis-tu du prophète qui est apparu avec les Sarrasins ?' Et il me répondit en gémissant : 'C’est un faux prophète : les prophètes viennent-ils armés de pied en cap ? Vraiment, les événements de ces
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derniers temps sont des œuvres de désordre, et je crains que le premier Christ qui est venu, celui qu’adorent les chrétiens, ne soit bien l’envoyé de Dieu… ayant poussé l’enquête, j’appris de ceux qui l’avaient rencontré qu’on ne trouve rien d’authentique dans ce prétendu prophète : il n’est question que de massacres. Il dit aussi qu’il détient les clés du paradis, ce qui est incroyable ».
Sinon nous avons le témoignage du patriarche Sophrone de Jérusalem.
— Un sceptre fort et vigoureux pour briser l’orgueil de tous ces barbares et surtout des Sarrasins qui, à cause de nos péchés, se sont dressés contre nous à l’improviste et ravagent tout avec une impiété impie et impie. Plus que jamais nous demandons donc à Votre Sainteté d’adresser d’urgentes requêtes au Christ afin que celui-ci, en les recevant favorablement, puisse calmer rapidement leur folle insolence et faire de ces viles créatures comme avant le marchepied des empereurs que Dieu nous a donnés (Ep. Synodica, PG 87, 3197D-3200A [page 69]).
— Nous, cependant, à cause de nos innombrables péchés et de nos graves fautes, sommes incapables de voir ça, et sommes empêchés d’aller à Bethléem par la route. En dépit de nos vœux, nous sommes obligés de rester chez nous, non pas retenus par des liens physiques, mais retenus par la crainte des Sarrasins (Sermon de Noël, 506 [p.70]).
Le temps et le lieu d’émergence de l’islam sont donc connus, le début du VIIe siècle, en Arabie occidentale, aux alentours de deux cités, l’une oasienne, Yathrib/Médine, l’autre pas, La Mecque. Mais il se trouve que, du monde premier des tribus arabiques, on est passé en quelques décennies à la construction d’un empire sorti de la péninsule arabique, d’abord à Damas au Proche-Orient puis, au bout d’un siècle, au contexte cosmopolite d’un nouvel empire – désormais largement ouvert à la conversion, ce qui n’avait pas été le cas durant le siècle précédent –, qui se cherchait une identité à la fois culturelle et religieuse. Cette recherche passait notamment à travers la représentation qu’il s’était donnée d’une temporalité première entièrement musulmane. Ce phénomène se situe au IXe siècle, sous les Abbassides de Bagdad. Or, de cette période postérieure date la majorité des sources écrites qui nous donnent une vision factuelle des débuts de l’islam, qu’il s’agisse de l’historiographie dite de la sira – la vie de Mahomet – ou de la première exégèse du texte coranique. Seule la Vulgate coranique peut être considérée, en tant qu’écrit, comme largement antérieure. Bien que ne subsiste aujourd’hui aucun manuscrit complet et authentifié du Coran avant le Xe siècle, des fragments retrouvés à Sanaa, notamment sous forme de palimpseste, remontent à la seconde moitié du VIIe siècle.
Une tendance de l’exégèse musulmane, encore très répandue de nos jours, se fonde sur le principe de la « descente céleste » du Coran pour refuser en bloc l’idée qu’il puisse présenter le moindre rapport avec les Écritures détenues par les juifs et les chrétiens, considérées comme falsifiées. Il semble que les tenants de cette opinion n’aient pas saisi la différence entre « l’influence » d’un texte sur un autre et « l’appropriation » d’un texte par un autre, qui se présente comme sa continuité.
Les commentateurs qui en ont tenu compte ont pu constater que la totalité des renvois coraniques à des passages de corpus antérieurs visent à fonder une argumentation et des leçons théologiques et morales nouvelles et originales, qui en rectifient parfois la formulation, mais sans jamais invalider de manière globale les textes dont ils sont tirés.
« Gens du Livre, ne vous portez pas à l’extrême en votre religion. Ne dites sur Dieu que le Vrai : à savoir que le Messie Jésus, fils de Marie, était l’envoyé de Dieu, et Sa Parole, projetée en Marie, et un Esprit venu de Lui. Croyez en Dieu et aux envoyés, ne dites pas « Trois » ; cessez de le dire : cela vaudra mieux pour vous ! Dieu est un dieu unique. Il est placé trop haut pour avoir un fils ! À lui tout ce qui est aux cieux et sur la terre……
Mahomet est un serviteur et un messager aussi ! Dieu et Ses anges prient sur le Prophète. Vous qui croyez, priez aussi sur lui, formulez sur lui un salut plénier. Dieu a prié pour le Prophète Mahomet, la paix et la bénédiction de Dieu soient sur lui, etc., etc. ».
Les inscriptions de type coranique qui figurent sur les panneaux extérieurs et intérieurs de la coupole du Rocher, à Jérusalem, témoignent clairement du fait que les califes d’origine mecquoise, qui résidaient à Damas (660-750), avaient la volonté politique du moins si l’on en croit le professeur Jacqueline Chabbi, d’afficher aux yeux de tous, et notamment à leurs adversaires byzantins, le fait qu’ils disposaient eux aussi d’une écriture sacrée de référence. Elle est donnée comme se rattachant à un Muhammad, « le Louangé » (par Dieu), « serviteur » (abd), et « messager » (rassoul), de Dieu (Allah). Cette mention figure à cinq reprises sur les panneaux extérieurs du monument (une fois également sur un panneau intérieur), tandis que le nom de Jésus (Issa), fils de Marie (Ibn Maryam), accompagné des mêmes qualificatifs est inscrit à son tour, mais seulement sur trois des panneaux intérieurs. La mention d’un masîh, « l’Oint » (le Messie) est accolée une fois à ces qualificatifs. Elle apparaît une autre fois isolément.
Il y a lieu sans doute de considérer que cet affichage, qui contient plusieurs courts passages figurant également dans la Vulgate coranique (par exemple, 19, 34 et 4, 171-172), constitue pour ce pouvoir politique la revendication d’une lignée allant de Jésus à Mahomet. Elle s’affirme dans cette cité, qui
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était alors très majoritairement chrétienne, les autorités juives – expulsées à la suite de la destruction du Temple à l’époque romaine – n’ayant pas été réintégrées à la ville sous les Byzantins. La mise par écrit du Coran peut vraisemblablement être rapportée à cette période.
Si tel est le cas, la grande différence entre l’écriture coranique de la Vulgate et les premiers écrits historiographiques d’au moins un siècle postérieurs serait la suivante : le Coran, comme discours et comme texte, serait largement resté sous contrôle arabe, même si l’on peut soupçonner certaines interpolations à partir de textes bibliques, par exemple justement le passage 29-35 dans la sourate19 dite « de Marie », concernant Jésus qui parle au berceau.
Au contraire, les textes postérieurs de la tradition musulmane seraient tous à considérer comme émanant de milieux devenus très composites et traversés d’influences culturelles diverses. La tradition dite prophétique, la sunna, autrement dit « la voie [à suivre] », qui donnera le mot sunnisme, entre justement dans ce cas de figure.
Remonter la piste du premier islam, c’est donc renoncer en grande partie aux textes musulmans de type hagiographique en ce qu’ils surestiment constamment le rôle du religieux dans la société d’origine. Mais c’est surtout refuser de mettre sur le même plan chronologique le Coran et le corpus des paroles prêtées à Mahomet (les hadiths) et cela quand bien même l’analyse historique heurterait frontalement le dogme religieux.
De la première époque, il ne reste guère que le texte du Coran lui-même, qui doit être confronté à ce que l’on peut savoir de sa société d’origine, aussi bien sur le plan des comportements que de l’imaginaire ou des croyances. Cette société aurait été d’abord celle de la tribu mecquoise d’appartenance de Mahomet. À la suite de son bannissement en 622 (date présumée), elle aurait été ensuite celle de l’oasis de Yathrib/Médine, plus différenciée du fait notamment de la présence massive de plusieurs tribus juives, liées par des relations d’alliance coutumière à deux tribus païennes résidant également dans l’oasis : les Aous et les Khazradj.
Les événements rapportés à ces deux cités dans l’islam de la période « prophétique », du vivant de Mahomet, sont totalement invérifiables directement, faute de témoignage crédible qui soit véritablement d’époque. De ce passé obscur, il reste simplement une localisation et un cadre de vie, donc ce qu’une approche d’anthropologie historique peut tenter de reconstruire comme un « paysage » dans lequel vit et agit un groupe humain organisé.
La Mecque, ville d’origine de Mahomet, était un site sacré antérieur à l’islam, du fait de la présence d’un point d’eau permanent dans un ensemble non oasien de vallées sèches. La Ka’ba, située dans la partie basse de la cité, faisait l’objet d’un culte bétylique local. Il n’avait évidemment rien à voir avec l’appartenance abrahamique que le Coran de la période médinoise – suite à une polémique avec les juifs de l’oasis – prête au site (2, 127), en allant jusqu’à le déclarer « première demeure divine » sur terre (3, 96). Manière polémique de délégitimer le judaïsme médinois en s’emparant de cette figure patriarcale qui, selon le Coran (3, 67), n’était ni juive (judéenne) ni chrétienne (nazaréenne), mais l’exemple même du hanif ou monolâtre primordial, muslim, au sens littéral.
D’après Jacqueline Chabbi il y a un gouffre entre le Coran comme discours, dans son environnement tribal premier, et ce que les sociétés musulmanes d’origine culturelle juive, chrétienne ou zoroastrienne y retrouvent à partir de leur mémoire religieuse et culturelle propre.
La thématique biblique massive à laquelle fait appel le texte de la Vulgate musulmane peut certes faire illusion, mais c’est moins à l’emprunt biblique manifeste qu’il faut s’attacher qu’à l’usage qu’en fait, pour son propre compte, le discours coranique destiné aux tribus.
L’approche coranique des thèmes bibliques est d’emblée utilitariste. Elle est la résultante d’un échec, celui d’un illuminé auquel le Coran ne donne pas de nom–, qui ne parvient pas à faire entendre aux siens les idées (monolâtrie, jugement dernier, fin des temps, enfer et paradis) qu’il s’autorise à leur transmettre comme émanant d’une source divine.
Bien avant que le nom d’Allah (littéralement « le Dieu », al-(i) lâh, avec valeur de nom propre) n’entre en scène et ne devienne prééminent, la source divine d’inspiration sera celle du « Seigneur de la Demeure », rabb al-baït. Les premières paroles coraniques reprennent en effet à leur compte la vieille dénomination païenne de rabb pour désigner le dieu protecteur de la cité, celui qui la préserve des attaques et de la famine. C’est ce que dit en quatre brefs versets la sourate 106, qui n’intègre encore aucun thème biblique et comporte une consonance purement locale.
« À cause du pacte des Couraïchites. De leur pacte [concernant] les voyages d’hiver et d’été. Qu’ils adorent donc le Seigneur de cette Maison qui les a nourris et rassurés ! »
Rien à voir donc avec le monothéisme, mais culte d’un dieu lunaire local ou tribal n’ayant rien à voir avec Abraham. La thématique biblique n’entrera en scène qu’ultérieurement, parce que certaines idées empruntées aux chrétiens par Mahomet lors de ses voyages (enfer et paradis, jugement dernier, fin des temps) seront rejetées par les gens de sa tribu et leur auteur accusé d’être un possédé (par un djinn) pouvant nuire, de par sa folie, à la tribu tout entière.
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Cette eschatologie du jugement et de la punition était en effet totalement étrangère à la majorité des païens de la Mecque. Dans les milieux tribaux non monolâtres de la péninsule, la vengeance des crimes commis n’était pas reportée à un au-delà post-mortem ; elle demeurait humaine et se transmettait en héritage. Ce qu’un aîné n’avait pu accomplir, ses descendants en étaient chargés… On retrouve cette thématique dans le récit pseudo-biblique de Noé (71, 11-12). Il s’agit là d’ailleurs d’un bel exemple de l’appropriation d’un nom biblique à seule fin de défendre une cause proprement coranique. C’est à cette aune qu’il faut analyser d’une façon générale le biblisme coranique. Il n’est présent que comme alibi pour défendre la cause d’un illuminé qui se heurte à l’hostilité grandissante des siens. Ils ne souscrivent ni aux promesses ni aux menaces eschatologiques (enfer jugement dernier fin des temps) et de guerre lasse finiront par bannir le trublion qui s’en prend à leur équilibre ancestral. …
C’est à ce prix que sera montée à Yathrib/Médine, après moult péripéties, non la communauté musulmane que l’on imagine souvent, mais une confédération tribale classique selon les règles politiques du temps et du lieu.
Et le dramatique conflit qui opposera le Mahomet médinois à ses contradicteurs inattendus que seront pour lui les rabbins de Médine s’inscrira dans le cadre de la politique tribale en question. Les juifs médinois seront victimes du rêve envolé de l’alliance avec les « Fils d’Israël » des récits mecquois (dont la représentation rassurante avait servi de point d’appui et nourri l’espérance de l’homme constamment ridiculisé aux yeux des siens qu’avait été le Mahomet mecquois, voir Coran 10, 94).
À l’issue de quelques combats, il ne s’agira jamais ensuite de « convertir à l’islam » le monde extérieur à la péninsule arabique, comme certains se l’imaginent aujourd’hui, mais bien de profiter du butin inouï offert à ses alliés humains par le dieu qui leur accordait la victoire. Une guerre intestine entre les grandes familles tribales mecquoises pour le contrôle du pouvoir politique clôturera cette période d’insolite abondance, avant que ne s’imposent les adaptations indispensables à la gestion d’un espace complètement nouveau, de la dimension d’un empire. Il faut dire que le pragmatisme natif de ces hommes de l’Arabie intérieure fit merveille, ne faisant peser sur les populations étrangères à l’Arabie aucune pression de type idéologique ou religieux *. Mais l’islam était-il déjà une religion ? C’est sans doute la première question à se poser. La réponse ne peut être que de nature anthropologique. L’islam expatrié de la seconde moitié du VIIe siècle et de la première partie du suivant était resté la religion des tribus, autrement dit une religion de l’alliance. Nul ne pouvait entrer dans cette alliance sans être admis d’abord dans une tribu originaire de la péninsule. Il ne fallut pas moins d’un siècle et demi, voire deux siècles, et le renversement brutal des califes de Damas, pour que s’opère l’évolution inéluctable qui devait faire de cet islam arabe une religion du Proche-Orient…
* En Égypte par exemple la langue arabe ne devint la langue de l’administration qu’à partir de 732 (avant c’était soit le grec soit le copte).
L’ISLAM DE CORDOUE (convivencia en espagnol).
La période comprise entre 711 et 756 est appelée époque de l’émirat dépendant parce que l’Espagne musulmane, ou Al-Andalous, dépendait alors du calife omeyyade à Damas. C’est avec la dynastie des Omeyyades andalous (756-1031) que la civilisation arabe d’Espagne a atteint son apogée. Son histoire peut être divisée en deux périodes majeures, celle de l’émirat indépendant (756-929) et celle
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du califat (929-1031) – et elle est marquée par trois personnalités ayant le même nom, Abd al-Rahman I (756-788), Abd al-Rahman II (822-852), Abd al-Rahman III (912-961), et le tout-puissant hadjib (Premier ministre) Mohamed ibn Abi Amir (976-1002) dit Almanzor.
Le but de ce chapitre n’est pas de procéder à une étude exhaustive et objective de cette forme d’islam localisée dans l’espace et le temps ; mais de déconstruire quelques clichés racistes diffusés par le salafisme ou les idiots utiles du salafisme et de voir s’il y a vraiment lieu d’en faire une situation idéale ; notamment pour ses citoyens de seconde zone que furent les maouali les juifs et les chrétiens.
LES MOUWALLADOUN OU CONVERTIS DE FRAÎCHE DATE.
Il y eut des troubles politiques, parfois sanglants, dus aux mouwalladoun. Mouwalladoun voulant dire convertis, ces convulsions politiques qui agitèrent l’islam de Cordoue sont considérées comme une discorde entre croyants (Fitna) par les historiographes musulmans. L’ambiguïté du terme de mouwallad (au pluriel : mouwalladoun) est symptomatique des tensions entre l’attachement des convertis à leur milieu d’origine et leur nouveau statut légal de musulmans.
Avec le temps était apparue en effet une nouvelle catégorie de population : celle des non-Arabes convertis à l’islam. Ces convertis devaient d’abord être adoptés par un clan arabe, pour en devenir en quelque sorte l’ex-esclave (maouala), car la conversion était d’abord sociale, et nullement religieuse. Le converti (persan, sémite du Nord, chrétien, juif, copte ou berbère) devait solliciter son entrée dans une famille arabe.
En principe, ils devaient jouir des mêmes droits et des mêmes avantages que les Arabes, puisqu’ils faisaient partie de la communauté des croyants, l’oumma ; mais dans la pratique leur statut resta très inférieur à celui des musulmans de naissance, les « vieux musulmans », d’où parfois des révoltes de leur part contre le pouvoir en place et les notables. En Orient, ces musulmans de seconde zone sont appelés mouwalladoun, en Espagne mouladi d’où plus tard l’inverse : les Morisques (les Mudéjars étant les musulmans assujettis à une sorte de dhimmitude à l’envers).
Les musulmans de fraîche date furent en effet assujettis à toutes sortes de restriction fiscale, sociale, politique, militaire, et autres. La conversion d’un village tout entier ou d’un quartier entraînant fiscalement parlant d’importantes pertes pour l’État musulman ; les maouali ou mouladi continueront souvent à être, eux aussi, soumis à l’impôt prélevé sur les dhimmis (la djizya en arabe), sous une forme ou sous une autre. La lutte pour l’égalité des droits entre musulmans (fitna) fut donc l’un des principaux problèmes des premiers siècles de l’islam. Un racisme d’autant plus stupide que l’islam n’est devenu une grande puissance qu’en adoptant les principes administratifs perses, la médecine indienne, et la philosophie hellénistique, ne l’oublions pas !
En Espagne, les révoltes de mouladi furent quasi permanentes contre les Arabo-Berbères immigrés qui s’étaient taillé de larges domaines exploités par les chrétiens, serfs ou esclaves. Les extorsions fiscales et les expropriations allumaient des foyers insurrectionnels continuels de mouladi et de mozarabes (chrétiens arabophones) dans toute la péninsule Hispanique. Les chefs rebelles étaient alors exécutés par crucifixion et les insurgés massacrés à coups d’épée.
La conversion comme changement de statut juridique était encadrée par le droit malékite sur un mode qui demeurait relativement simple. L’individu (sain de corps et d’esprit, libre de ses actes) en présence d’une autorité judiciaire (le plus souvent un cadi) et de trois témoins. La récitation de la chahâda, la profession de foi islamique, prouvait sa reconnaissance de Mahomet comme sceau des prophètes et la rupture avec le christianisme. L’acte était consigné par écrit afin qu’il reste une preuve juridique ; pour être valable en effet, la conversion devait être rendue publique. Ensuite, l’instruction du converti pouvait se limiter à la connaissance des pratiques rituelles obligatoires : ablutions, prière, aumône (zakât), jeûne de Ramadan et pèlerinage à La Mecque. L’intégration du nouveau musulman se manifestait par sa fréquentation régulière de la mosquée.
Quelques sources font état d’une évaluation du converti par le cadi, qui examinait la sincérité de son intention (niyya), mais ce type d’interrogatoire n’apparaît dans les documents que lorsqu’il s’agit de chrétiens qui s’étaient convertis à l’islam puis s’étaient rétractés – ces individus devenaient de ce fait des apostats. Il semble alors que le juge usait de divers procédés (intimidation, menace, emprisonnement) pour faire revenir à l’islam l’individu récalcitrant. En cas d’obstination, l’apostat encourait la peine capitale. Le juriste Abd-al-Malik Ibn Habib (Cordoue, IXe siècle) admettait l’usage de la force, des coups et de la prison, à l’égard des enfants encore mineurs nés d’un père chrétien qui s’était converti sur le tard à l’islam : étant musulmans par leur père, ces enfants devaient renoncer à leurs pratiques ou croyances chrétiennes. En revanche, les enfants majeurs de convertis ne pouvaient être contraints à accepter l’islam.
Néanmoins les sources, qu’elles soient arabes ou latines, témoignent de conversions inachevées ou douteuses. À côté de convertis considérés comme sincères, d’autres étaient accusés de n’être musulmans qu’en apparence. Dans certains cas, le converti ayant maintenu jusqu’à la mort une
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situation douteuse, on pouvait voir les membres de la famille, divisés eux-mêmes entre chrétiens et musulmans, hésiter sur l’appartenance religieuse du défunt et donc sur la dévolution de son héritage. Un cas limite est celui d’Omar ben Hafsoun (m. 918) qui dans cette période de troubles politiques mena une importante rébellion. Quelques années plus tard, après l’écrasement de la révolte par les troupes califales, le futur calife al-Nasir fit ouvrir le tombeau du rebelle et constater qu’il avait été enterré selon le rite chrétien.
L’accusation d’apostasie relève du discours politique émanant du pouvoir omeyyade. Tandis que les convertis ou les descendants de convertis proches du pouvoir omeyyade étaient qualifiés de maouali-s (terme qui se réfère à des liens d’obligation réciproque avec un patron arabe), ceux qui résistèrent au pouvoir en place furent soupçonnés d’être de mauvais musulmans, de faux convertis. Alors que dans les sources arabes, le mouwallad est un converti à l’islam en voie d’arabisation, dans les sources d’al-Andalus le terme fut aussi appliqué, de façon péjorative, à des figures de la « rébellion », renvoyant donc à une catégorie politique. Figures de l’entre-deux, entre les chrétiens indigènes situés au bas de l’échelle sociale et progressivement absorbés dans l’islam par la conversion, et, au sommet de la pyramide, les musulmans considérés comme « arabes », les mouwalladoun, descendants de convertis en voie de fusion dans l’islam « arabe », formaient un groupe mouvant, objet de suspicion. Cette fitna concerne aussi les chrétiens évidemment puisque les Mouwalladoun étaient d’origine chrétienne.
RAPPEL HISTORIQUE.
En 716 une nouvelle province de l’empire colonial musulman fut donc constituée, Al Andalous, l’Andalousie.
Quand l’Espagne fut rattachée au califat de Damas, cela fut sans doute perçu par beaucoup comme un simple changement de dynastie, au profit d’un souverain omeyyade, aussi lointain que l’avait été, quelques décennies plus tôt, le basileus byzantin. La nouvelle religion est, de plus, à l’époque, très peu connue, et n’est pas perçue comme l’ennemie privilégiée du christianisme. Les musulmans s’inscrivaient au contraire dans une tradition familière aux juifs et aux chrétiens, et leur religion était souvent considérée comme une nouvelle hérésie orientale ; un phénomène familier dans une Espagne où l’arianisme et le catholicisme romain s’étaient trouvés en concurrence jusqu’au rétablissement par le roi Reccarède – en 587, un peu plus d’un siècle auparavant – de l’unité religieuse du pays. Enfin, les Berbères, qui fournissaient le gros des premières troupes d’envahisseurs, étaient longtemps demeurés chrétiens au sein du même espace impérial romain ; et n’apparaissaient pas aussi radicalement étrangers ou hostiles que ne le seront les musulmans d’Al-Andalous vis-à-vis des royaumes chrétiens quelques siècles plus tard. Vainqueurs de l’Hispania wisigothique au début du VIIIe siècle, les musulmans vont donc contrôler la majeure partie de la péninsule ibérique jusqu’au XIe siècle. Fortement implantés dans la vallée du Guadalquivir, dans le Levant valencien et dans la vallée de l’Èbre, ils considèrent les régions du Nord-Ouest situées au nord de la cordillère centrale, comme des terres de razzia ; et n’accordent que peu d’intérêt aux petits royaumes chrétiens qui ont réussi à se maintenir dans la région cantabrique, d’où partira le lent et patient effort de reconquête (qui ne portera vraiment ses fruits qu’après l’an mil). Jusque-là, le rapport des forces demeurera favorable à l’émirat puis au califat de Cordoue ; et à la fin du Xe siècle, les raids dévastateurs menés par Al-Mansour jusqu’à Barcelone, ou jusqu’à Saint-Jacques-de-Compostelle, témoignent de la supériorité militaire que conservent encore les musulmans de Gibraltar aux Pyrénées.
CHARLES-EMMANUEL DUFOURCQ LA VIE QUOTIDIENNE, ETC. (Hachette 1978)
« Quant aux villes qui, après s’être ouvertes aux Arabes, se révoltaient contre eux, malheur à elles ! Dès le début de l’expansion musulmane en Europe, Tolède servit d’exemple à cet égard. Cette capitale du royaume wisigothique s’était livrée aux nouveaux venus, sans combat, dès 71 1 ou 712, car ils arrivaient en ennemis du souverain Rodéric (ou Rodrigue) contre lequel luttaient les partisans du prétendant Akhila, fils du feu roi Wittiza.
En 713, quand les Tolédans comprennent qu’Akhila ne sera pas rétabli sur le trône paternel, et que leurs alliés » arabes sont devenus les maîtres, ils déclarent rejeter cette autorité.
Peu après, le châtiment s’abat sur eux : dès cette année 713, leur ville est prise d’assaut ; son métropolitain, Sindered, a le temps de s’enfuir (il arriva à Rome), mais tous les notables de la cité qui n’ont pu en faire autant sont égorgés, et tout est pillé ; le général arabe s’empare, notamment, de la splendide « table de Salomon » ; on appelait ainsi une sorte de banc ou siège, monté en trône, tout en or incrusté de pierreries, qui se trouvait dans la cathédrale » (Charles-Emmanuel Dufourcq. La vie quotidienne 1978).
Cet auteur va même plus loin puisqu’il prend également en compte dans son panorama de la « Convivencia » LA VIE QUOTIDIENNE DANS LES RÉGIONS LIMITROPHES.
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« Dans les zones frontières du nord de l’Espagne, là où le pouvoir islamique n’est pas, ou pas encore, fermement établi, la panique s’instaure comme dans les terres de raid : en 730 par exemple, les Arabes ravagent la Cerdagne et, pour faire un exemple, ils y brûlent vif un évêque.
Voilà comment en Espagne même, des zones entières se vident. Un no man’s land prend forme, particulièrement large et durable dans la moitié occidentale de la péninsule Ibérique : dès le milieu du VIIIe siècle, les Arabes ont évacué tout le nord-ouest de l’Hispania ; le pays qui s’étend entre la Cordillère cantabrique au nord et la vallée du Douro au sud reste à peu près désert pendant longtemps : personne n’ose y demeurer, personne n’ose s’y installer.
Pour les régions chrétiennes qui s’étendent au-delà du no man's land, les mois critiques sont ceux de la belle saison. Dès février, en effet, commencent à se recruter et à se préparer des troupes musulmanes destinées à effectuer des raids en pays infidèle… Lorsque le printemps arrive. Galiciens, Asturiens, Castillans et Basques vivent dans l’attente de la sa’ifa (la campagne d’été) des musulmans » (Charles-Emmanuel Dufourcq. La vie quotidienne 1978).
Cette stratégie sera d’ailleurs théorisée sans complexe par un auteur lui-même andalou justement, bel exemple de convivencia, de la fin du 14e siècle, Ibn Houdaïl.
« Il est licite d’incendier les terres de l’ennemi, ses grains, de tuer ses bêtes de somme – s’il n’est pas possible aux musulmans de se les approprier –, ainsi que de couper ses arbres, de ruiner ses villes, de faire en un mot tout ce qui est de nature à l’abattre, pour peu que l’imam (c’est-à-dire le « guide » religieux de la communauté des croyants) juge ces mesures adéquates, de nature à hâter l’islamisation de cet ennemi ou à l’affaiblir. Tout cela concourt en effet à en triompher de vive force ou à le contraindre à composer ». Abou l-Hasan Ali b. Abd al-Rahman al-Fazari al-Andalusi, connu aussi sous le nom d’Ibn Houdaïl, écrivain grenadin de la fin du 14e siècle. Son kitab Touhfat al-anfous oua-shi’ar soukhan al-Andalus est traduit par Louis Mercier en « Ornement des âmes et devise des habitants d’al Andalus ». C’est un traité de guerre sainte islamique, un texte à tendance mystique visant à convaincre les musulmans andalous de l’opportunité de reprendre le métier des armes.
« Sans doute ces campagnes n’obéissent-elles pas à un rythme régulier ; tantôt elles sont séparées par des intervalles de plusieurs années, tantôt elles se succèdent tous les ans, mais la menace qu’elles représentent et la crainte qu’elles inspirent sont constantes : on pille, on enlève le bétail, les combattants vaincus sont massacrés, les hommes en état de porter les armes tués ou réduits en esclavage, ainsi que les femmes et les enfants… les populations des zones atteintes par les chevauchées, quand elles connaissent un répit, ne savent jamais combien de temps durera celui-ci […] Sous l’impact des raids arabes de reconnaissance, se créèrent, à l’intérieur des pays exposés à ces chevauchées (les algarades), des zones dont l’emplacement géographique se déplaça et se modifia au cours des siècles, mais où, toujours, régna l’angoisse et se creusa le vide : les terres y étaient abandonnées, les cultures cédaient la place à la friche, les populations se réfugiaient dans les villes abritées par des murailles… »
Sans oublier les guerres civiles ou leurs contrecoups sur les populations chrétiennes environnantes.
« Mais l’instabilité politique, si souvent caractéristique du dar al-Islam, ne permet pas toujours d’éviter de telles attaques soudaines : en 891 par exemple, à Séville, lors d’une révolte de la garnison arabe contre le gouverneur de la ville, la soldatesque se déchaîne à travers le quartier chrétien, pille les maisons, massacre hommes, femmes et enfants ; beaucoup d’entre ceux-ci cherchant à s’échapper, se jettent dans le Guadalquivir, où plusieurs se noient.
On vit ensuite leurs corps flotter longuement entre deux eaux…
La paix islamique avait donc ses limites ; comme l’a chanté, en une longue plainte, le poète évoquant ce jour de deuil sévillan :
À travers la cité peinte de sa chaux blanche,
Entre ses rosiers ses lys et ses pervenches,
S*élevaient des patios.
Sertis d’azulejos,
Des soupirs en volute,
Telles des notes de flûte !
La prière des chrétiens en pleurs montait vers le ciel dans ces pays conquis par l’Islam » (Charles-Emmanuel Dufourcq. La vie quotidienne 1978).
Il y a le mythe, et il y a les faits historiques. Si effectivement eut lieu une véritable effervescence intellectuelle multiculturelle à Tolède et à Cordoue, l’occupation musulmane de l’Espagne fut néanmoins perpétuellement émaillée d’exactions, de discriminations dues au statut de dhimmi des vaincus, de pillages et de persécutions.
LES MARTYRS DE CORDOUE.
Si l’on en croit l’historien espagnol José Javier Esparza en 850, le prêtre Perfectus (Parfait) fut décapité sur la place publique pour blasphème.
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Saint Parfait ou Perfectus était né à Cordoue, alors que la région était encore sous le contrôle des Maures et du califat omeyyade. Moine ordonné prêtre, il c’était le desservant de la basilique Saint-Acisclus. En 850 Parfait fut mis au défi par deux musulmans, de dire qui était le plus grand prophète, de Jésus ou de Mahomet.
Au début, il préféra ne pas répondre, afin de ne pas les provoquer, mais ils insistèrent pour qu’il leur donnât une réponse, en promettant de le protéger des représailles. Il leur répondit alors en arabe que Mahomet lui semblait être un faux prophète et un homme immoral pour avoir séduit l’épouse de son fils adoptif (Zenob, épouse de Zaïd. Voir Coran). Les musulmans respectèrent leur promesse et le laissèrent partir, mais quelques jours plus tard, certains d’entre eux changèrent d’avis et le firent arrêter.
Ils demandèrent à des amis de le saisir eux-mêmes (afin de ne pas être parjures) et le firent juger. Parfait fut convaincu de blasphème par le tribunal islamique et fut exécuté. La légende ajoute que ses derniers mots furent pour bénir le Christ et condamner Mahomet ainsi que son Coran.
Mais ce châtiment n’eut pas les conséquences espérées par les musulmans, bien au contraire : le nombre des martyrs s’accroît. Pas moins de quarante-huit notables de Cordoue, tous chrétiens, s’offrent en sacrifice. À partir de ce moment-là se déclenche une véritable vague de condamnations à mort qu’il est difficile de quantifier.
Ces martyres causèrent un profond malaise tant à Cordoue que parmi les chrétiens sous domination musulmane. Essayons de comprendre. Tandis que les missionnaires martyrisés en évangélisant les païens, frisons, normands, slaves, sont généralement des moines ou des clercs, à Cordoue il y a beaucoup de martyrs parmi les laïcs et les femmes. Il s’agissait, dans certains cas, d’individus issus de familles « mixtes » qui ont choisi le christianisme et qu’on pouvait donc accuser, selon la loi islamique, d’« apostasie », en tant que « musulmans » aux yeux de la loi : comme Flore, fille d’une chrétienne et d’un musulman, donc juridiquement musulmane, accusée par son frère et martyrisée en 851, ou Marie, fille d’un père chrétien et d’une musulmane convertie, ou encore Aurea, Aurelius, Leocritia, Liliosa, Nathalia, Sabigotho, etc.
On entrevoit aussi quelques exemples de double conversion : Félix, d’origine chrétienne, avait professé la foi musulmane avant de se rétracter ; Witesindus, issu d’une famille chrétienne, d’abord converti à l’islam, retourne ensuite au christianisme comme Alvare de Cordoue.
Inquiet de cette situation, Abd al-Rahman II convoqua un concile en 852. Le clergé officiel mozarabe, qui cherchait à établir des relations cordiales avec les dominateurs en adoptant en particulier la langue arabe pour garantir la continuité de la communauté chrétienne, n’a pas approuvé le choix des « martyrs », qui radicalisait la lutte entre chrétiens et musulmans en provoquant une forte réaction de ceux-ci. NDLR. Paul Alvare condamnera maintes fois cette « tiédeur » de la plupart des chrétiens espagnols.
Il s’agit d’une situation partiellement comparable aux tensions qui divisaient les chrétiens à l’époque des anciennes persécutions, on peut rappeler la question des lapsi, les chrétiens qui avaient accepté d’offrir de l’encens aux dieux de Rome pour éviter la mort.
Abd al-Rahman II meurt en 852. Son successeur Mahomet I durcit la répression. Le 13 mars 857 sont décapités saint Rodrigue et saint Salomon. Le premier, un prêtre, a été dénoncé par son propre frère, converti à l’islam. On connaît aussi d’autres noms. Par exemple Isaac, ancien domestique à la cour d’Abd al-Rahman, ordonné prêtre ; Sanche, un guerrier chrétien des Pyrénées devenu esclave dans la garde du sultan ; Pierre, prêtre ; Walabonse, diacre ; Sabinien, et Wistremond, le vieux Jérémie et Habence… Ces derniers se sont présentés devant un juge musulman et ils se sont offerts volontairement au martyre.
Tout comme les deux grandes persécutions officielles romaines à Carthage les persécutions musulmanes à Cordoue réussissent néanmoins à diviser la communauté chrétienne. Certains commencent à critiquer les martyrs, les traitant d’insensés, d’autres défendent ceux qui professent leur foi au risque de la mort. Au premier rang des défenseurs des martyrs se trouve Euloge. Son prestige au sein des Mozarabes est tel qu’il est élu évêque de Tolède en 858. Néanmoins, il ne sera jamais en mesure de prendre ses fonctions. Les Maures ont vite compris qu’ils ne viendraient jamais à bout de la résistance chrétienne sans en finir avec Euloge.
Saint Euloge est donc emprisonné en 859. On l’accuse d’avoir abrité Leocritia, une jeune fille de parents musulmans, qui a été convertie par une religieuse. Convaincue d’apostasie, la jeune fille est immédiatement exécutée. Quant à Euloge, il est conduit devant l’émir. On lui ordonne de se rétracter. Mais les juges n’obtiennent de lui qu’une défense passionnée de la foi chrétienne. Exaspérés par tant d’outrecuidance, les musulmans décapitent saint Euloge le 11 mars 859, à trois heures de l’après-midi.
En 900 sera prise une mesure radicale : l’interdiction pour les chrétiens de Cordoue de construire de nouvelles églises.
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En 978 Almanzor devient le Premier ministre du nouveau calife de Cordoue, Hicham II, et prend ainsi la réalité du pouvoir. Contrairement à ses prédécesseurs, il brille par sa violence et son intolérance religieuse. De nombreux juifs et Mozarabes se réfugient dans les États de la marche espagnole. Leurs connaissances vont enrichir celles qui sont conservées dans les monastères catalans.
En 985, Almanzor attaque et pille Barcelone, puis ramène avec lui de nombreux esclaves. Le comte Borrell II demande alors de l’aide à son suzerain Hugues Capet. Ce dernier ne daignant pas lui répondre, le comte prend de fait son indépendance. Cet événement marque paradoxalement le début d’une phase de développement de la Catalogne qui entraînera les autres États de la marche espagnole. Borell sécurise son territoire, même si dans un premier temps, il doit négocier.
En 1010 débute le massacre de centaines de juifs autour de Cordoue, qui se prolongera trois ans.
L’année 1066 sera marquée par le massacre de milliers de juifs à Grenade.
En 1102, la population chrétienne de Valence dut fuir vers l’Espagne du Nord récemment reconquise, pour échapper aux persécutions.
En 1125 l’expédition conduite jusqu’à Grenade par Alphonse d’Aragon, combinée avec un soulèvement des Mozarabes locaux (c’est-à-dire des chrétiens de langue arabe), entraîne, lors de la retraite du Batailleur, le départ de dix mille d’entre eux vers le nord ; les chrétiens demeurés sur place sont en majorité déportés en Afrique du Nord pour y être installés près de Meknès et de Salé, où l’interdiction de pratiquer leur religion entraîne la disparition rapide de ces communautés (Philippe Conrad. L’Espagne sous la domination almoravide et almohade).
En 1146, ce fut un autre exode, celui des chrétiens de Séville, fuyant l’invasion de l’Espagne par les Almohades, des Berbères islamisés, mais radicaux, provoquant expulsions des juifs ou conversions forcées.
Ces Almohades en 1184, imposent des signes distinctifs aux chrétiens et aux juifs, et en 1270 a lieu la ségrégation généralisée des juifs en Andalousie.
Mais, répétons-le encore une fois vu l’importance du sujet (repetere ars docendi), de cet ensemble de lois organisant la dhimmitude, la pire est sans doute le rituel imposé par la conclusion du verset 29 du chapitre 9 du Coran 1) pour le paiement de la capitation (djizya), tel qu’il est décrit dans un manuscrit arabe conservé à la bibliothèque de l’Escurial ; pour les dhimmi qui vivent non dans une zone ou ville autonome, mais dans le Dar al-Islam, comme membre d’une communauté infidèle dans un quartier urbain, dans un faubourg ou à la campagne. Ce paiement a lieu à jour fixe, une fois par mois, en public. Les musulmans qui assistent à cette séance ont le droit de bousculer ou rudoyer l’infidèle qui vient « faire acte de soumission » en payant son impôt personnel. C’est une sorte de spectacle. Chacun de ceux qui doivent payer cet impôt est tenu de se présenter personnellement, et ne peut envoyer quelqu’un à sa place. Il doit donc entrer dans la pièce où se trouve le percepteur musulman, qui se tient normalement assis à l’orientale, sur une natte ou un tapis ; il doit rester debout devant lui ; puis lui tendre son argent. Ce cérémonial s’applique d’une manière assez enjouée, voire non dénuée d’une certaine camaraderie condescendante. Il n’en est pas moins humiliant.
Églises et chapelles doivent être constamment ouvertes, de jour comme de nuit ; les voyageurs musulmans qui le désirent doivent y être logés ou nourris durant trois jours. À l’intérieur d’une église, on ne doit sonner cloches et clochettes que très doucement, « en faisant le moins de bruit possible », et il est interdit de « trop élever la voix » en priant, surtout si un musulman se trouve dans l’édifice. Aucune croix ne doit être placée à l’extérieur d’un bâtiment. Quand les prêtres se rendent au domicile d’un mourant ou d’un malade, ils ne doivent transporter d’une manière visible ni croix ni Évangiles, s’ils passent par des rues ou des chemins que des musulmans peuvent fréquenter. Lors des cortèges funèbres qui ne peuvent jamais être pompeux, les prières n’ont pas être dites à haute voix, et les cierges allumés sont prohibés dans les rues où vivent des musulmans. En aucune circonstance et sous aucun prétexte, des processions chrétiennes ne peuvent passer dans des rues musulmanes ni dans les souks, avec des statues, des palmes, des cierges ou des chandelles. Un « polythéiste » ne doit en aucune façon tenter de propager ses erreurs religieuses auprès des musulmans. D’ailleurs, un mahométan qui devient chrétien est immédiatement condamné à mort, même si c’est un ancien chrétien qui s’était seulement converti à l’islam à titre provisoire. Est aussi passible de la peine de mort tout chrétien, homme ou femme, qui nie la divinité de Dieu en prétendant que Jésus aussi est Dieu, en disant de Mahomet qu’il n’est pas un prophète, en dénigrant le Coran, ou en « blasphémant ». Toute une série de prescriptions variées régit ainsi les rapports entre infidèles et croyants. Le plus grave est qu’elles suscitent parfois la haine et la violence contre les « protégés » (dhimmis). Il arrive, ici ou là, qu’une foule musulmane, où les nouveaux convertis se distinguent par leur arrogance, insulte et trouble des célébrations du culte chrétien, surtout les enterrements ; au passage de ces cortèges funèbres, s’élèvent parfois des cris passionnés dictés par la haine : « Dieu ! Ne sois pas miséricordieux envers ces infidèles ! » Les plus excités lancent des pierres et des immondices sur le brancard mortuaire et les prêtres. Quand ceux-ci se déplacent sans être en groupe,
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ils sont parfois pris à partie par la populace, surtout par les enfants, qui s’amusent à leur jeter des pierres, en chantant quelque couplet burlesque tournant la croix en dérision (Charles Emmanuel Dufourcq. La vie quotidienne dans l’Europe médiévale sous domination arabe).
Averroès lui-même fut exilé pour hérésie, et ses livres brûlés en public à Cordoue. Ce n’était pourtant pas un mauvais musulman. Il était pour la déportation des chrétiens suspects de sympathie envers la Reconquista de leurs frères ; et de durs châtiments corporels pour les musulmans de fraîche date, considérés comme des citoyens de seconde zone ou des musulmans inférieurs : les maouali ou mouladi (de l’arabe mouwalladun), gardant quelques habitudes « chrétiennes ».
Ces conflits ensanglantèrent l’Espagne jusqu’au Xe siècle et alimentèrent des haines religieuses endémiques. Une lettre de Louis le pieux aux chrétiens de Mérida en 828 évoque leur situation sous Abd al-Rahman II et le règne précédent. Usurpation de leurs biens, augmentation injuste des tributs exigés, suppression de la liberté (esclavage ?), oppression par « de lourdes et iniques contributions ».
L’histoire de la France du Sud et de la Sicile est aussi émaillée d’exécutions de chrétiens accusés par des témoins musulmans d’avoir proféré des blasphèmes contre l’islam ; et de séances publiques de paiement de l’impôt réservé aux dhimmi, la djizya, sous les cris et les horions « légaux » de la populace. Légaux parce que la nécessité d’une telle humiliation est mentionnée dans le Coran (chapitre 9, verset 29) ainsi que nous l’avons vu et expliqué dans la note numéro 1. Les non-musulmans de Sicile durent porter la rouelle. À chaque révolte de sujets non musulmans, sans parler des razzias en terres françaises, les marchés d’esclaves en Espagne se peuplaient de chrétiens. Hormis cela, oui, on peut trouver des périodes de calme relatif qui permirent une cohabitation apaisée à condition de se soumettre à la pax islamica…
DÉCONSTRUCTION DE QUELQUES AUTRES CLICHÉS RACISTES MAINTENANT.
De même que la nation française a été une grande nation, il est vrai qu’il y a eu, jadis, un « âge d’or » de l’islam, comme il y a eu un « âge d’or » des civilisations précolombiennes d’Amérique du Nord. Ce que les idiots utiles de l’islam ou les islamistes oublient généralement de rappeler c’est que cet âge d’or de l’islam au point de vue scientifique et technologique n’eut rien à voir avec la religion, mais au fait qu’en quelques décennies d’importantes découvertes et technologies avaient pu circuler d’est en ouest dans un même Empire, des confins du monde indien ou chinois (le zéro, le papier) au sud de l’Europe (jusqu’à Poitiers et dans le sud de la France).
Les islamistes ou les idiots utiles de l’islam se gargarisent de cette richesse culturelle de l’islam, mais oublient de préciser que la culture arabo-musulmane fut essentiellement une culture d’assimilation ; qui emprunta beaucoup de choses à des cultures non arabes (comme les cultures perse, mésopotamienne ou grecque, par exemple).
— La poésie (diffusion du papier inventé par les Chinois, bibliothèques publiques, héritage de la métrique grecque, poèmes soufis).
— Les tapis (héritage persan).
— La peinture (les miniatures d’inspiration persane).
— Les contes des mille et une nuits (héritage de la Perse).
— Les bains publics (hammam, héritage grec et romain).
— L’architecture (héritages grec, romain, byzantin + aspect typiquement musulman).
— La philosophie (falasafa : héritage grec : Platon, Aristote + aspect mystique musulman).
— La médecine (diagnostic très précis, prise en compte de la totalité du patient, hygiène, chirurgie).
— L’astronomie (reprise et amélioration des travaux de Ptolémée : catalogue des astres, détermination des latitudes).
— Les mathématiques (généralisation des chiffres indiens).
Bien qu’appelés communément « chiffres arabes », les Indiens connaissaient et utilisaient déjà un système décimal proche de celui que nous connaissons aujourd’hui. Et le zéro était déjà utilisé par la pensée mathématique indienne.
Les premiers chiffres sont inventés au IIIe siècle avant notre ère en Inde par Brahmagoupta, un mathématicien indien. Ils apparaissent dans des inscriptions de Nana Ghât au IIIe siècle avant notre ère. La numération de position avec un zéro (un simple point à l’origine) a été développée au cours du Ve siècle. Dans un traité de cosmologie en sanscrit de 458, on voit apparaître le nombre 14 236 713 écrit en toutes lettres. On y trouve aussi le mot « sunya » (le vide), qui représente le zéro. C’est à ce jour le document le plus ancien faisant référence à cette numération. Ce n’est que bien plus tard, à la suite de conquêtes en Asie, que les mathématiciens musulmans découvrirent ce système. Leur existence est mentionnée en Syrie, au milieu du VIIe siècle par l’évêque Sévère Sebokht. Ils sont empruntés par la civilisation musulmane à partir du IXe siècle et décrits dans un ouvrage du mathématicien perse Al-Khawarizmi. Ces chiffres se sont graduellement imposés dans le monde entier parce qu’ils permettent une notation très aisée dans le système décimal utilisé en Occident et facilitent les opérations simples sur les grands nombres et les opérations complexes.
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Conclusion : Nous récusons donc totalement l’idée d’un âge d’or de l’islam. L’époque abbasside n’est absolument pas à envier. C’est une ère de despotisme absolu ET de terreur, où les assassinats politiques se succédaient, où les conflits religieux entre sectes musulmanes menaçaient à tout moment, où les problèmes sociaux s’accumulaient (incurie dispendieuse de la cour califale de Bagdad, à mettre en parallèle avec la misère des paysans et surtout des « dhimmi » écrasés d’impôts, ou des esclaves zandj révoltés).
Sur le plan artistique, l’islam brida totalement les forces créatrices de l’Empire (surtout en Perse où des poètes épicuriens comme Omar Khayyam ne purent s’exprimer comme ils l’entendaient) ; empêcha le développement des arts plastiques (interdiction de la figuration ; du coup la civilisation musulmane, contrairement à l’Afrique, l’Occident et l’Asie, ignore l’art pictural). Dans les domaines scientifique et philosophique, les musulmans ont été mis en contact avec les richesses culturelles des civilisations de Grèce, de Perse et d’Inde. Ils ont beaucoup emprunté, ils ont joué un rôle de transmetteur, mais la « valeur ajoutée », si l’on peut dire, s’avère très faible.
Le zéro et les chiffres « arabes » sont en fait d’origine indienne (même chose pour les contes des mille et une nuits ainsi que nous l’avons vu).
Ce sont surtout les penseurs grecs (Platon et Aristote pour la philosophie, Euclide, Pythagore, Thalès, Archimède pour les mathématiques, Ptolémée pour l’astronomie) que les scientifiques musulmans ont copiés ou traduits, ne parvenant d’ailleurs jamais véritablement à dépasser leurs modèles. Quand l’Occident prit son envol à la Renaissance, c’est à la redécouverte des richesses grecques qu’il le dut (d’où le terme de Re-naissance). Et s’il y eut des apports dans le monde musulman, la majorité d’entre eux vinrent de non-musulmans, de dhimmi par exemple, issus des anciennes civilisations, et qui poursuivaient tant bien que mal leurs traditions intellectuelles. 90 % des grands médecins « musulmans » étaient en fait des Assyriens chrétiens de langue syriaque ; les astronomes venaient du Sud de l’Irak et descendaient des Babyloniens. Ou alors des sabéens de Harran. Le célèbre mathématicien « arabe » Thabit Ibn Qourra Ibn Marouan al-Sabi al-Harrani (Harran 836 – Bagdad 901) était sabéen, un des plus célèbres astronomes « arabes », Al Battânï, aussi (né à Harrân vers 858).
Et que dire de l’apport des juifs ? Les savants de la fameuse école de Cordoue étaient en majorité juifs, et souvent chrétiens.
1) An yadin oua houm saghirouna. An yadin signifie personnellement, directement. C. Cahen in Arabica tome 9, fasc. I, Janv. 1966, pp. 76-79, fait le rapprochement avec la notion latine de manus (mainmise, contraire « main levée d’hypothèque »). Quant au terme arabe saghirouna il signifie sans équivoque quelque chose comme déshonoré, humilié, abaissé.
Les auteurs admettent le plus souvent l’humiliation des gens du Livre en interprétant comme une prescription la fin du verset 9, 29 « oua houm saghirouna ». C’est une phrase nominale (sans verbe) signifiant mot à mot « et eux humiliés ». Faut-il traduire « ils sont (ou seront) humiliés (simple constatation) ou comme un ordre du genre « ils devront se faire tout petits » ? Quoi qu’il en soit cette humiliation intervient d’abord au moment où les dhimmis payent la djizya.
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LA FIN DE « L’ÂGE D’OR » DE L’ISLAM OU DE L’ISLAM DE CORDOUE.
LES CAUSES PROFONDES.
LA RECONQUISTA.
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a) La fragmentation en communautés différentes (musulmans, juifs, chrétiens) de la société espagnole, du fait de l’application des lois de la charia par l’islam et du statut de dhimmi (ce qui empêcha le métissage total).
b) La bataille de Covadonga. Elle est racontée par des textes de la fin du IXe siècle, rédigés par des Mozarabes réfugiés dans le nord de la péninsule ibérique : les chroniques mozarabes justement. Selon ces textes, de nobles wisigoths élisent comme capitaine un dénommé Pélage (Pelayo, né en 681, élu en 718, mort en 737), fils de Favila ; un ancien dignitaire de la cour du roi Egica (687-700), qui fixe sa capitale à Cangas de Onís, et prend la tête d’un soulèvement contre les musulmans.
Cette bataille ayant eu lieu à une époque reculée, il est difficile de faire la part du vrai, de l’inventé ou de l’enjolivé, dans les différentes versions. Disons qu’une expédition punitive musulmane s’est laissée entraîner en terrain défavorable (une zone montagneuse), et qu’elle a ensuite essuyé de très lourdes pertes en poursuivant sans grands résultats les rebelles chrétiens en fuite.
Date : Été 722.
Lieu : Pics d’Europe, Cordillère Cantabrique. Actuelle Espagne.
Issue : victoire asturienne.
Belligérants : Royaume des Asturies contre Califat omeyyade.
Commandants : Pélage des Asturies pour les chrétiens, Mounouza et Al Qama pour les musulmans.
Forces en présence : 300 hommes pour les chrétiens, 800 hommes pour les musulmans.
Pertes : 290 morts du côté chrétien, inconnues du côté musulman.
c) Les crimes contre l’Humanité d’Almanzor.
De 977, date de son premier exploit guerrier, à sa mort, Almanzor mènera une bonne cinquantaine d’expéditions militaires victorieuses au nom de Dieu (djihad). Victorieux du roi de Leon, Ramire III, en 978, il relance la guerre sainte (980). Dans son royaume d’Andalousie, Almanzor maltraite et persécute les descendants des Romains ou des Wisigoths qui ne se sont pas encore convertis à l’islam (on les appelle les « mozarabes » : ceux qui ressemblent à des Arabes, mais sans en être vraiment). Cette intolérance religieuse aura des conséquences funestes pour le califat de Cordoue : les réfugiés mozarabes déplacés apportent les connaissances techniques du califat, et vont déclencher le rattrapage technologique de l’Occident chrétien. Les anciens États de la marche espagnole vont se muer en puissances pouvant rivaliser en tout point avec le califat. Profitant des désordres qui règnent en Andalousie à l’époque, ils vont mener la Reconquista. Les États « chrétiens » bénéficient du soutien de la population dans les territoires repris (l’instauration de la religion catholique obligatoire n’aura lieu qu’au XVe siècle).
La différence qui saute aux yeux donc entre la situation européenne et la situation nord-africaine, c’est le nombre des musulmans implantés sur les territoires en jeu : quelques dizaines de milliers dans un cas, des millions dans l’autre. Et aussi le fait que cette reconquête bénéficiait du soutien de la population en général.
Il ne faut pas néanmoins surestimer le rôle de la religion chrétienne dans les débuts de cette reconquête. L’exemple même du légendaire Cid Campéador en est la preuve, même si Espagnols et Français (ah, Corneille, Corneille) ont écrit beaucoup de bêtises à son sujet. Il sert d’abord le roi de Saragosse, puis en 1087, l’émir de la taïfa (petit royaume) de Dénia, au nom duquel il prend Valence, qu’Alphonse VI avait sous son contrôle (chancelant) depuis 1086. Mais il garde alors Valence pour lui et lève le tribut sur les villes voisines. Sa veuve, Chimène, tiendra Valence contre les Almoravides jusqu’en 1102, avec ses maigres forces, sans véritablement être aidée par le roi de Castille ou par son gendre le comte de Barcelone. Réputé invaincu, le Cid devint rapidement une figure légendaire. Son tombeau, ainsi que celui de sa femme Chimène, est toujours visible dans la Cathédrale Santa Maria de Burgos. Ses restes, volés par un soldat de Napoléon Bonaparte en 1809, seraient par contre aujourd’hui en France, en Saône-et-Loire.
LA FIN DU MOUTAZILISME.
Au départ il y a dans l’islam naissant le débat qui oppose la Qadariyya à la Jabariyya, des écoles soutenant respectivement l’existence du libre arbitre humain et la détermination complète de l’Homme par la toute-puissance de Dieu. Comme souvent en Islam, la lutte est aussi politique : les Omeyyades décadents apprécient la Jabariyya, qui les exonère de toute responsabilité dans leurs méfaits. Ils furent renversés par les Abbassides qui s’appuyaient sur les qadarites, ou plutôt sur les successeurs de ces derniers, les moutazilites.
On appelait alors moutazilites les oulémas dont l’école de pensée à Bagdad a acquis de l’importance dès le milieu du VIIIe siècle de notre ère et qui attribuaient un rôle essentiel à la raison dans leurs recherches, par opposition aux mouhaddithines qui se référaient constamment aux hadiths (mouhaddithines = collecteurs de hadiths). Pour un moutazilite, au contraire, il ne suffit pas de démontrer l’authenticité d’un hadith, il faut aussi étudier son contenu pour vérifier s’il est raisonnablement acceptable. Le bien et le mal sont donc fondés sur la raison. Les « moutazilites »
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furent les rationalistes de l’Islam des débuts. Nul doute que, si leurs doctrines avaient pu rester vivantes au sein des sociétés arabo-musulmanes, la face du monde en eut été changée (serait-on tenté de dire pour parodier Pascal).
Pour les raisons que nous passées en revue ci-dessus (libre circulation des inventions et des techniques) la civilisation musulmane était alors d’une richesse incroyable dans tous les domaines : mathématiques, sciences de la nature, médecine, arts. Elle avait assimilé l’apport culturel du monde grec antique, mais aussi celui de l’Inde. Lorsque les djihadistes chrétiens arrivèrent en Terre sainte, ils apparurent – à juste titre – aux yeux des Arabes, comme des barbares grossiers et ignorants.
Il n’entre nullement dans nos intentions de retracer ici l’histoire du moutazilisme, mais seulement de mettre en lumière puis en perspective les traits les plus saillants de leurs doctrines. Contentons-nous de noter que le nom des moutazilites en arabe (mou'tazila, signifie les « séparés ») vient du fait qu’ils se sont séparés des autres courants de l’Islam sur un point de doctrine finalement moins anodin qu’il n’y paraît : le statut du pécheur au regard de l’Islam. L’Islam ne comporte rien qui ressemble de près ou de loin à la notion de corruption totale telle que la défend le calvinisme. L’homme chassé de l’Éden par Dieu n’en conserve pas moins, selon le Coran, son jugement et sa capacité de raisonnement dont il use, bien ou mal, lorsque se présente à lui un conflit moral. Le musulman ne se sent donc pas du tout concerné par le débat entre catholiques et réformés quant à la primauté de la foi ou des œuvres.
En revanche, le courant radical des kharidjites estima très tôt, c’est-à-dire dès l’époque du conflit pour le contrôle du califat entre Ali, gendre de Mahomet et fondateur du chiisme, et les Omeyyades, que le pécheur était un infidèle, un kafir.
Autrement dit, pour le kharidjisme, la faute morale, le péché, sont l’équivalent de l’apostasie et peuvent justifier la mise à mort du pécheur. À quoi les moutazilis répliquèrent, se séparant de la doctrine kharidjite et en méritant ainsi leur nom, que le pécheur était dans un stade intermédiaire (métaphoriquement nommé al-manzila baïna-l manzilataïn, « la demeure entre les deux demeures » [du bien et du mal]) entre l’apostasie et la soumission complète à la volonté de Dieu, soumission que l’arabe nomme tout simplement islam. Cette doctrine autorisait un Islam plus tolérant tout en maintenant sa rigueur morale puisque le pécheur n’était pas considéré comme un infidèle, mais n’était pas non plus un muslim, un « soumis à la volonté de Dieu », au sens plein du terme. Cette conception moutazilite correspondait à une réponse modérée, pragmatique et rationnelle au cas posé par celui qui professe l’Islam en paroles, mais ne le met pas en pratique.
Pour les Moutazilites, non seulement l’Homme est libre, mais la révélation et la justice divine sont accessibles à la raison… Ce qui permettait par ailleurs aux Abbassides de juguler le pouvoir des interprètes de la jurisprudence, les oulémas. Les Moutazilites, théologiens rationalistes, pensaient que le Coran n’était pas incréé [voir plus loin notre chapitre sur le Coran), qu’il pouvait donc être étudié rationnellement, que la raison avait des choses à dire sur la moralité et la nature de Dieu, notamment que ce dernier était bon et juste par nature. De même, pour eux la réalité existe objectivement, est connaissable, organisée selon des lois elles-mêmes connaissables ; en somme, des positions qu’on retrouvera plus tard en terre chrétienne par exemple chez Thomas d’Aquin. Pour les Moutazilites, la raison précède la révélation parce que la raison est la nature de Dieu. Ainsi, comme chez Aristote, une éthique purement rationnelle devient envisageable.
Le deuxième motif de séparation entre les moutazilis et les autres courants sunnites était la doctrine du Coran incréé, également défendue par le hanbalisme 1). Les hanbalites estimaient en effet que le caractère indiscutable et sacré du Coran, son infaillibilité, lui venait de son statut incréé. Comme le Christ du prologue de l’Évangile de saint Jean, le Coran était là dès l’origine du monde sous forme d’une tablette ou table écrite en arabe, et était consubstantiel à Dieu lui-même, coexistait avec lui de toute éternité, donc était inaltérable dans sa lettre. Les moutazilites récusèrent vigoureusement cette doctrine dans laquelle ils voyaient, à juste raison, une sorte de polythéisme au minimum une remise en cause de l’unicité et de la transcendance de Dieu et une déviation vers l’associationnisme (shirk) déjà reproché aux chrétiens. Rappelons en effet que Mahomet ou ses conseillers avaient clairement rejeté en la qualifiant d’associationnisme (chirk) la doctrine chrétienne de la Trinité, car elle « associait » d’autres personnes (le Fils et le Saint-Esprit) à la personne unique et transcendante de Dieu. Notons que c’est cette même remise en cause de l’associationnisme trinitaire qui est à l’origine de notre moderne unitarianisme chrétien.
La troisième raison de l’opposition des moutazilites au sunnisme hanbalite était leur égal rejet du jabrisme, c’est-à-dire de la doctrine de la prédestination (ou jabr en arabe) de l’Homme. Les hanbalites pensaient en effet que, Dieu étant tout puissant, tout ce qui arrivait sur terre, le bien comme le mal, avait été fixé par lui selon des décrets éternels. Pour les moutazilites, cette doctrine était incompatible avec l’affirmation récurrente de la miséricorde de Dieu dans le Coran. Il s’agissait par conséquent d’affirmer à la fois l’omnipotence de Dieu et son infinie miséricorde, tâche évidemment peu aisée comme on le sait depuis 2000 ans. C’est à cette tâche que les moutazilites employèrent la
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plus grande part de leur énergie. Leur réponse anticipe de huit siècles le molinisme de l’Église catholique 1) dont elle est très proche.
Note de la rédaction à ce sujet.
Primo : ainsi que nous allons le voir, comme dans maints créationnismes, Dieu dans le Moutazilisme a créé l’homme afin d’être adoré par lui, ce qui est la preuve par définition que sa plénitude ne lui suffisait pas. Dieu dans cette Weltanschauung a donc besoin d’être adoré, il ne se suffit pas à lui-même.
Secundo reste la contradiction logique entre l’affirmation d’une part de la toute-puissance de Dieu et de sa parfaite bonté, et le constat que le mal existe dans sa création. Certains courants religieux notamment gnostiques ont abordé le problème autrement. Ils n’ont pas fait de ce Dieu de toute bonté le créateur de notre univers et ont attribué ce rôle à une autre entité céleste ou surhumaine : le démiurge. Dans de telles spéculations religieuses donc ce n’est pas le dieu infiniment bon qui a créé le monde, mais une autre entité appelée le « démiurge ».
Pour en revenir à la tentative des Moutazilites de fournir une réponse satisfaisante à ce paradoxe, celle-ci s’articule en cinq points :
a) Dieu est infiniment bon et ne peut donc faire le mal dans le monde. Le mal qu’on y constate n’est pas de la responsabilité de Dieu, mais de l’homme seul.
b) Comme Dieu est bon, il a créé l’homme libre, car il serait absurde qu’il attendît d’un automate qu’il lui rendît un culte sincère. Le culte de Dieu n’a de sens que s’il est rendu par un être libre ou non de le rendre. Dieu ne saurait se satisfaire d’être adoré par un objet dont il aurait lui-même programmé la dévotion. La dévotion n’a de sens que si elle est un acte librement consenti.
c) Comme l’homme est libre, tantôt il fait librement le bien, tantôt il fait librement le mal. C’est d’ailleurs pour cette seule raison qu’il mérite les récompenses ou les châtiments que Dieu lui promet.
d) Comme on pourrait répliquer que certes Dieu a créé l’homme libre, mais qu’il aurait pu tout de même le placer dans un monde où, bien qu’étant libre, l’homme choisirait toujours le bien, les moutazilites répondent, anticipant là encore certaines doctrines occidentales, comme celle de Leibniz, que Dieu a placé l’homme dans le moins mauvais des mondes possibles réalisables. Cela permet d’expliquer du même coup pourquoi l’homme vit dans un monde où le mal ne se manifeste pas seulement dans la société, mais aussi dans la nature, à travers des catastrophes naturelles par exemple. Pour le moutazilisme, le monde est loin d’être parfait, mais il aurait pu être bien pire encore, il est le meilleur des mondes possibles et nous devons son caractère perfectible à la bonté de Dieu. Après tout, Dieu aurait pu s’abstenir de créer le monde afin de minimiser le mal, mais il aurait aussi minimisé par là même le bien.
e) Les apparentes contradictions dans le texte coranique peuvent être résolues par la raison, car le Coran n’est pas incréé, il est créé donc nullement exempt d’obscurités. Enfin, il n’est nul besoin d’avoir lu le Coran pour devenir un bon musulman, un muslim qui se soumet - islam - à la volonté bienveillante de Dieu. L’exercice de notre raison y suffit, c’est ce que les moutazilites appelaient le woujoub al-nazar, le « devoir de spéculation », c’est-à-dire l’obligation d’utiliser notre raison pour découvrir la nature et la volonté de Dieu.
Le drame intellectuel du Moutazilisme c’est que jusqu’à Al-Moutaouakkil et la première moitié du 9e siècle, il fut soutenu militairement politiquement et policièrement par les premiers califes, Inquisition (Mihna) à l’appui. Ibn Hanbal et ses partisans furent par exemple arrêtés ou persécutés, ce qui leur conféra l’auréole du martyre.
En 827, les Moutazilites réussirent à imposer leur doctrine d’un Coran créé donc humain par le biais du calife Al-Mamoun, connu pour sa Maison de la Sagesse et l’ouverture intellectuelle de son règne, sommet de l’Âge d’Or musulman.
Toutefois, cette officialisation n’est pas allée sans heurts : les juges devaient jurer qu’ils adhéraient à la doctrine, et une sorte d’Inquisition fut créée pour veiller à son respect. Il y eut des condamnations à mort, et beaucoup d’emprisonnements, comme pour Ibn Hanbal, fondateur de l’école de jurisprudence (madhab) hanbalite, la plus littéraliste des quatre madhabs.
Les moutazilites organisèrent en effet entre 833 et 848 des persécutions en bonne et due forme contre les érudits qui n’adhéraient pas à leurs thèses et qui refusaient d’admettre que le Coran était une création humaine. Les persécutions organisées par les moutazilites furent sans doute l’une des raisons de l’échec de ce courant. Le mouvement commença à décliner quand un calife, Al-Moutaouakkil (celui qui, le premier, imposa aux dhimmi de porter des signes distinctifs), décida finalement de ne plus les soutenir. Al-Moutaouakkil revint à une théologie traditionaliste, sous l’égide notamment des hanbalites, et se livra à une véritable chasse aux Moutazilites. Certains se réfugièrent en zone chiite, d’autres persévérèrent malgré les difficultés. La nature détestant le vide, ils furent remplacés par des oulémas, rattachés à des écoles de jurisprudence, ou maddhab (Hanafite, Malikite,
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Chaféite et Hanbalite) une orthodoxie sunnite qui considérait que la révélation divine n’avait pas à être soumise à la critique de la raison.
Il n’en reste pas moins que, comme le communisme russe originel THÉORIQUE, le moutazilisme fut une doctrine éminemment rationaliste et optimiste et que ses idées donnaient à l’Islam une cohérence et une tolérance qui font cruellement défaut à la religion musulmane telle qu’elle se manifeste aujourd’hui. Les thèses moutazilites anticipaient de plusieurs siècles des réponses philosophiques que l’Occident a redécouvertes seulement avec la Renaissance et les Lumières. La confiance en Dieu et en la capacité de l’homme à se libérer et à progresser, affirmée par le moutazilisme aurait pu et dû en faire le socle idéologique de véritables Lumières musulmanes. Nul doute que, si le moutazilisme avait gagné la partie qui l’opposa au hanbalisme, la créativité rationnelle de l’Islam que les moutazilites défendaient lui aurait aussi permis de conserver l’avance technologique qu’il avait encore à l’époque sur l’Occident, car c’est cette même liberté religieuse et cette revalorisation de la rationalité qui ont permis le décollage civilisationnel de l’Occident après le siècle des Lumières. L’histoire n’est pas écrite dans le marbre.
L’anéantissement de l’école moutazilite sous le calife abbasside Al-Moutaouakkil autour de 850 de notre ère fut le signe annonciateur de la fermeture de la « Porte de l’Interprétation », Bab-al Ijtihad. Al-Moutaouakkil rompit en effet avec la politique de ses prédécesseurs qui avaient promu le moutazilisme comme doctrine théologique officielle du califat et soutint des oulémas de tendance beaucoup plus intégriste inspirés par le hanbalisme. Cette volte-face est sans doute due à l’anti-intellectualisme populiste d’Al-Moutaouakkil qui cherchait ainsi à s’attirer les faveurs du petit peuple contre les savants et les universitaires.
Leurs écrits détruits au point qu’il faut deviner leurs idées à travers les ouvrages rédigés par leurs adversaires pour les critiquer. C’est seulement depuis un siècle environ, avec la découverte de manuscrits anciens, que nous avons directement accès à leurs textes. Avec l’écrasement des moutazilites un premier coup a donc été porté à l’ijtihad et c’est l’esprit d’imitation qui l’emportera peu à peu sur l’esprit de réflexion. Cette tendance normative se trouve dès le début : c’est le triomphe des courants normatifs au sein de l’islam qui a conduit à la « fermeture de l’ijtihâd » à partir du XIe siècle.
Après l’échec du moutazilisme, la liberté théologique n’aura donc plus d’autre choix, en terre d’Islam, que de se réfugier et se cacher dans l’ésotérisme soufi.
1) Du nom de Luis Molina, le jésuite qui la formula au XVIe siècle, en réponse à la fois à la prédestination calviniste et au jansénisme : le molinisme fut le fer de lance théologique de la Contre-Réforme catholique.
LA FERMETURE DES PORTES DE L’INTERPRÉTATION (BAB-AL IJTIHAD).
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Commentaires du livre de Robert R. Reilly, intitulé « De la fermeture de l’esprit musulman ».
Ci-dessous ce que nous en avons cru en comprendre. Il ne s’agit pas bien sûr de l’esprit de chaque musulman pris individuellement (nous sommes non racialistes par définition), mais de la capacité de la civilisation musulmane à intégrer des idées nouvelles. En effet, cet ouvrage traite d’un des grands drames intellectuels de l’histoire humaine : comment la civilisation islamique a découvert la raison, pour finir par la rejeter. Plus précisément, comment et surtout pourquoi l’essentiel de l’islam sunnite a abandonné l’idée d’interroger la réalité avec la raison humaine ?
Il existe deux manières de fermer son esprit à la réalité : nier la capacité de connaître quoi que ce soit par le moyen de raison, et nier que la réalité soit connaissable. Le monde islamique a fini par adopter ces deux manières. Cette lutte intellectuelle n’a rien d’abstrait : elle continue d’influencer la weltanschauung du monde sunnite, son (manque de) développement, et jusqu’à la crise islamiste qui le secoue et nous secoue par contrecoup.
L’islam a en effet connu une période florissante qui a vu un développement important de la pensée critique, alimenté notamment par la diffusion des traductions en arabe d’auteurs grecs. Cette période a subi un coup d’arrêt vers les XIe-XIIe siècles, qu’on désigne par l’expression « fermeture des portes de l’ijtihâd ».
Les auteurs musulmans interprètent aujourd’hui de manière diverse la « fermeture » de la recherche critique qui déclenche un long processus de décadence intellectuelle. Certains vont même jusqu’à nier cette fermeture.
Mahdi Elmandjra n’a pas tort de dire que jamais, à aucune époque, l’histoire ne nous a rapporté qu’un ouléma, docteur en fiqh, ou chef d’État a émis une fatoua, une loi ou un ordre de fermer la porte de l’ijtihâd. C’est plutôt la pensée arabe qui s’est figée sur ses positions au lieu de suivre le cours de l’histoire.
Le résultat de cette attitude est un état de léthargie, de régression et de sous-développement. Les facteurs de cette situation sont multiples et ne sont plus un mystère pour personne. L’ijtihâd vit une crise due à une stagnation intellectuelle dont les effets se sont répercutés sur tous les domaines. On assiste par conséquent à une régression de la création en matière d’ijtihâd.
Si le point de vue de M. Elmandjra est dans l’ensemble juste, on peut avancer cependant deux objections.
— Il y a effectivement eu, à l’époque, des hommes qui, se réclamant de l’orthodoxie islamique, ont tenté et souvent réussi à briser l’élan de l’ouverture culturelle de la civilisation musulmane, en particulier en Espagne. L’arrêt de toute réflexion critique (l’ijtihâd) dans une société aussi développée qu’était la société arabo-musulmane du XIe siècle ne peut être que le résultat de l’emprise extrêmement brutale d’une pensée orthodoxe. Un tel phénomène ne survient pas sans causes identifiables. Il ne survient pas non plus par le simple décret d’un ouléma ou d’un docteur en fiqh : il s’agit de la manifestation historique d’une crise globale, que nous tenterons de cerner.
— Il n’est pas certain que les causes de cette situation aient cessé d’être un mystère pour nombre d’auteurs musulmans. L’auteur continue en effet son exposé en affirmant qu’il y a eu un déséquilibre entre les différentes formes d’ijtihâd, entre la réflexion en matière de jurisprudence temporelle et de jurisprudence spirituelle. Autant cette dernière est riche, autant la première est pauvre. On peut se demander précisément si l’approche adoptée par M. Elmandjra n’est pas le symptôme même de la fermeture de l’ijtihâd dans la mesure où il limite l’effort de recherche aux domaines de la jurisprudence.
Une société qui concentre l’essentiel de ses efforts intellectuels dans le domaine de la jurisprudence au détriment de ce qu’on peut bien appeler l’activité créatrice de la société civile est inévitablement en régression. L’insistance mise sur le domaine prescriptif conduit à la conservation de ce qui est et empêche toute évolution.
Le constat de M. Elmandjra nous semble donc juste, mais en voulant faire porter l’ijtihâd sur la nouvelle réalité politique et économique de manière à ce que la charia continue à rayonner dans le monde musulman, il se situe dans la perspective même de la fermeture de l’ijtihâd, dans la mesure où il ne conçoit toute perspective d’évolution culturelle que dans le cadre de la religion ; or le principe même d’une religion révélée est de se référer à des textes fondateurs dont on peut douter que dix ou quinze siècles plus tard ils soient adaptables. Il devient plutôt tentant de s’arc-bouter sur des textes en proclamant que la société a dévié et doit s’y réadapter plutôt que de faire le constat que l’évolution de la société a rendu ces textes tout simplement caducs.
Et si, par analogie, on peut considérer que les « portes de l’ijtihâd » se sont ouvertes dans l’Occident chrétien au moment même où elles commençaient à se fermer dans le monde musulman, l’« ouverture » de ces « portes » se manifeste en Europe occidentale par la remise en cause, timide tout d’abord, puis progressive, de l’emprise du religieux sur la vie culturelle. Cette remise en cause commence au moment où la pensée d’Aristote pénètre les universités occidentales (grâce à un
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penseur musulman) et où se fait la distinction fondamentale entre théologie et philosophie (falasafa), distinction qui n’exista que timidement et de façon éphémère dans le monde musulman. On peut dire, pour résumer sommairement, que dans le conflit qui l’opposa à la philosophie, la théologie l’emporta dans le monde musulman, mais fut vaincue dans l’Occident chrétien.
Cristallisation de la pensée juridique.
En 1019, le calife Al Qadir fit lire au palais et dans les mosquées une épître dite « épître de Qadir » (Risala al-Qâdiriya) par laquelle il interdisait toute exégèse nouvelle et ferma ainsi la porte à l’effort de recherche personnel des musulmans (ijithad).
Tout en réfutant que la « fermeture de l’ijtihâd » ait été décrétée, Mohammed Iqbal fait un constat terrible de la situation dans laquelle se trouve le monde musulman. Mais point n’est besoin que la « fermeture des portes de l’ijtihâd » ait été décrétée par qui que ce soit, elle est simplement un fait qu’il suffit de constater et dont il faut définir les causes. Le parti-pris typiquement islamique de tout considérer d’un point de vue prescriptif empêche peut-être d’aborder la question sous cet angle.
Pour comprendre pourquoi et de quelle manière les « portes de l’ijtihâd » se sont fermées dans le monde musulman, il convient peut-être de comprendre pourquoi et comment elles se sont « ouvertes » dans le monde occidental. Pour Mohammed Iqbal, l’ijtihâd est le principe de mouvement dans la structure de l’islam ; aussi appelle-t-il à reconstruire la pensée religieuse de l’Islam afin qu’elle soit en phase avec le monde contemporain. Or précisément, le mouvement irrésistible de la culture de l’Europe occidentale vers la domination politique, économique et culturelle vient peut-être justement que son « ijtihâd » a consisté à ne pas envisager de « reconstruire la pensée religieuse » de la chrétienté, mais à la remettre en cause et à dissocier radicalement la sphère du religieux de la sphère du temporel, à éliminer autant que possible l’intervention du religieux dans les domaines culturel, politique, et scientifique.
De fait, l’évolution de la pensée, de la science et des arts de l’Europe occidentale va consister à s’affirmer contre le religieux, ce qui ne fut pas toujours sans risque, comme en témoigne l’interminable liste d’hommes et de femmes persécutés et brûlés vifs au nom de la religion qui, pendant des siècles, tenta de s’opposer à toute évolution intellectuelle vers une pensée libérée de l’emprise religieuse.
Et la principale erreur du monde musulman fut sans doute de fixer indéfiniment l’image négative qu’il se fit (à juste titre) des Occidentaux au moment des djihads chrétiens, et de ne pas la réactualiser après que ceux-ci, assimilant l’apport de la civilisation musulmane, dépassèrent leurs maîtres dans les domaines mêmes où la civilisation islamique avait été si florissante.
Cette fermeture du monde musulman est bien le résultat de l’emprise de l’orthodoxie religieuse sur la société civile, ce que reconnaît d’ailleurs M. Elmandjra. Ce n’est qu’à la fin du XIe siècle que d’aucuns décidèrent de fermer la porte de cet « Ijtihâd » en arguant que tout était clair dans le Coran, la Sounna et dans la Charia qui en découle. Ce fut une erreur énorme, pour la simple raison qu’on ne saurait faire une lecture du Coran que d’une manière dynamique qui présuppose et accepte le changement.
Mais là encore, le constat reste dans une perspective essentiellement religieuse puisque tout se détermine à partir de la lecture d’un livre sacré. Selon cette optique, la stagnation du monde musulman serait le résultat d’une décision inadéquate prise dans le domaine religieux.
La coupure principale entre le monde musulman et le monde occidental réside sans doute dans le fait que dans ce dernier la distinction entre la sphère religieuse et la sphère civile est accomplie. À de rares exceptions près, les chercheurs, dans quelque domaine que ce soit, ne se demandent pas si les résultats de leurs recherches concordent avec les prescriptions divines.
Cela ne signifie aucunement que la question est définitivement réglée : le danger d’une régression reste important, car les forces qui, dans le monde occidental, tentent d’imposer un retour du religieux restent puissantes. Il est significatif que dans ce combat, elles aient le soutien des religieux musulmans, et pas forcément les plus radicaux.
Personne aujourd’hui ne songe à expliquer l’évolution propre de l’Europe occidentale par une bonne interprétation des Écritures saintes. Or, encore aujourd’hui, nombre d’auteurs musulmans réclament l’insertion des sociétés islamiques dans la « modernité » par une réforme de l’interprétation des textes.
Les auteurs musulmans, y compris les auteurs contemporains, soulignent qu’il y a eu dans l’islam de nombreux mouvements de réforme. Depuis sa naissance voilà quatorze siècles, l’islam a connu des réformes en cascade. Comme les autres religions, il s’est scindé en une myriade de sectes et sous-sectes prétendant chacune incarner la version véritablement réformée de la foi. La plus importante de ces divisions a conduit au clivage entre sunnites et chiites. Mais regrette-t-on, les courants réformateurs n’ont jamais pu avoir la main sur le plan politique, la seule chose qui leur aurait permis de se renforcer.
L’opposition entre foi et raison.
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L’opposition entre foi et raison, qui apparaît dans l’Occident médiéval à partir du XIe siècle, est loin d’être absente de l’islam médiéval jusqu’au XIe siècle, et même après. Dans les deux cas, il ne s’agit pas d’une opposition dans le sens où la raison tente d’éliminer la foi, mais dans le sens d’une tentative de dialogue dans lequel la foi affirme sa prééminence et la raison tente de montrer qu’elle n’est pas incompatible avec la foi. À de très rares exceptions près, l’athéisme n’est pas encore au programme.
Les auteurs musulmans du Moyen Âge qui contestent la croyance en une révélation divine, qui nient la validité des Écritures révélées et la prophétie, ne sont certes pas nombreux, mais ils ne manquent pas. La croyance en la prophétie est un point central du dogme musulman puisqu’il ne suffit pas de croire en un seul Dieu, il faut aussi croire que Mahomet est son prophète, son ultime et dernier prophète. Citons au IXe siècle le théologien et philosophe néoplatonicien Ibn al-Rouanda, au XIe siècle le poète Abou‘l Ala’ al-Maarri et un philosophe, al-Razi (dit Rhazès).
Ibn al-Raouandi et Rhazès écrivirent des ouvrages qui rejetaient explicitement la notion de prophétie. Leurs livres n’ont pas survécu et sont surtout connus par les citations qu’en font les auteurs qui les réfutent, ou par les ouvrages écrits par des admirateurs, qui les citent (c’est le cas de Raouandi). Ce qu’on en sait suffit cependant pour montrer le caractère radical de leur critique. Les prophètes y sont décrits comme des imposteurs, des charlatans qui exploitent la crédulité des gens grâce à leur connaissance des phénomènes naturels. Ils pensent que la raison suffisait pour mener l’humanité à la vérité, c’est-à-dire à Dieu. Ils rejettent également l’idée du mal et de la douleur comme justification d’une punition divine. Il ne faut pourtant pas voir ces auteurs comme des athées. Ils critiquent la religion, mais ne remettent pas en cause l’existence de Dieu.
Les penseurs non orthodoxes de l’islam n’ont jamais réussi à constituer au sein du monde musulman un mouvement équivalent à celui des Lumières en Europe occidentale. Il ne faut cependant pas mythifier ce mouvement. Il n’a jamais été une vague énorme de rationalisme submergeant la pensée religieuse dominante à l’époque. S’il était possible de faire des statistiques concernant la publication des livres au XVIIe et au XVIIIe siècle, on constaterait que les ouvrages bien-pensants allant dans le sens de l’idéologie dominante furent considérablement plus nombreux que ceux qui suivaient l’esprit nouveau. Ce qui caractérise cette époque, c’est que l’esprit des Lumières a touché d’abord un petit nombre de gens, mais situés en haut de l’échelle sociale, et qu’il a peu à peu descendu jusqu’aux classes moyennes pour finalement imprégner une partie importante de la société.
Les auteurs musulmans libéraux.
Les auteurs musulmans libéraux d’aujourd’hui pensent que les penseurs qui déviaient de l’orthodoxie ont pu malgré tout influencer la rigidité de l’islam institutionnel : on cite à loisir les mœurs éclairées de l’Espagne musulmane, la relative tolérance dont bénéficiaient les non-musulmans dans l’Empire ottoman, ou « la nature subversive d’une littérature arabe médiévale aussi espiègle que grivoise ». Tout cela est bien beau, mais il n’y a pas de quoi fouetter un chat. L’auteur de l’article confirme d’ailleurs que la « réforme » dans l’islam a le plus souvent emprunté l’autre direction, celle de la réaffirmation de la primauté des textes fondateurs et des premiers théologiens sur les interprétations ou les apports ultérieurs.
Loin de nous focaliser sur les symptômes – quand le sage pointe la lune de son index, les médias français regardent le doigt – occupons-nous en ce qui nous concerne de stigmatiser ou pointer du doigt les causes profondes de ces symptômes que sont le terrorisme islamique et le djihadisme.
Laissons aux politiques et aux militaires le soin de lutter politiquement ou militairement contre les aliénations mentales (la religion est l’opium du peuple) que sont l’intégrisme islamique et même plus précisément l’intégrisme sunnite qui n’ont rien à voir avec la raison, et occupons-nous plutôt de les déconstruire intellectuellement de l’intérieur en mettant bien en évidence que ces symptômes que sont le djihadisme ou le terrorisme islamique sont les conséquences d’une foi genre credo qui absurdum n’ayant rien à voir avec la raison et trahissant plutôt même une sérieuse et inquiétante régression de la raison.
Nous nous pencherons pour cela sur certains des réflexes conditionnés qui expliquent les réactions toujours passionnelles à chaud des musulmans pieux sur certains sujets.
Tout vient de l’éviction du courant de pensée mou’tazilite par les écoles de « pensée » hanafite, malikite, chaféite et hanbalite.
Ces écoles ou maddhabs sont au nombre de quatre, fondées à partir du VIIIe siècle. Les purges périodiques opérées par ces divers mouvements ont eu pour effet de réduire le canon sunnite à un petit échantillon de sources et d’interprétations. Pour reprendre une expression arabe, ils ont « fermé la porte de l’‘ijtihâd’ », ou raisonnement spéculatif, ce qui a permis aux savants traditionalistes de défendre une vision utopique de l’islam comme système clos n’attendant plus qu’à être appliqué à la lettre par un souverain juste. En d’autres termes, ce type de « réforme » a constamment entraîné la spiritualité musulmane dans une impasse philosophique. Jusqu’au XIIe siècle, ces écoles assuraient l’interprétation (ijtihad) du Coran ; mais après cette date, il devint généralement admis qu’il ne restait
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plus rien à interpréter, que le jugement personnel devait céder la place à l’application et l’imitation des précédents juridiques, et que, selon l’expression consacrée, les portes de l’ijtihad s’étaient refermées.
L’école hanbalite, la plus récente, est aussi la plus virulente contre la pensée grecque (falasafa), et la plus opposée à l’application de la raison : la révélation ayant eu lieu, la raison n’a plus de rôle à jouer. Malgré la dureté des propos d’Ibn Hanbal et de ses élèves, le travail de sape intellectuel fut néanmoins accompli par une nouvelle école de pensée, les acharites. Il n’est pas prouvé néanmoins que les acharites ont soutenu les hanbalites, le lien entre les deux groupes se limitant sans doute au fait d’avoir un ennemi commun, les moutazilites.
L’acharisme considère que la révélation prime la raison, utilisant les outils de la raison et de la philosophie pour soutenir la vérité de la révélation, mais non comme outils autonomes de connaissance. Son fondateur, Al-Achari, a été moutazilite jusqu’à 40 ans, mais a renoncé à ses croyances, soutenant que l’homme est déterminé et que Dieu est, avant toute autre considération, omnipotent.
LES CONSÉQUENCES DE CETTE POSITION PHILOSOPHIQUE SERONT INCALCULABLES DANS LA PSYCHÉ MUSULMANE ET MÊME POUR CE QUI EST DE LA MORALE OU DE L’ÉTHIQUE.
La nature n’est pas dotée de lois stables, puisque son existence et sa persistance sont l’œuvre d’un miracle permanent. Cette option philosophique, connue sous le nom de volontarisme, affirme que Dieu est la cause directe de tout : si la laine brûle au contact du feu, c’est parce que Dieu lui a ordonné de brûler. Parce qu’il est œuvre de volonté et non de raison, l’univers ne peut être connu : la volonté est sa propre finalité. Chercher à comprendre la volonté divine relève alors de l’impiété. Les raisons de Dieu sont inconnaissables.
Al-Achari était ce qu’on peut appeler un atomiste extrémiste : l’univers est composé d’atomes isolés les uns des autres et le temps de moments séparés les uns des autres. À chacun de ces moments, Dieu détruit l’univers pour le recréer l’instant d’après. Plus encore, comme la seule force motrice de l’univers est la volonté toute-puissante et arbitraire de Dieu, c’est l’idée même de causalité qui s’effondre. Ce point de vue est appelé occasionnalisme, et a été défendu en Occident par Malebranche surtout, mais aussi sous des formes affaiblies par Hume et Berkeley. Qu’il soit apparu plus tard en Occident, à un moment où la réalité de la réalité ne faisait plus de doute et que de nombreuses idées rivales étaient déjà présentes, est sans doute la raison de son innocuité relative en Occident.
Al-Ghazali 1) est souvent considéré comme le personnage musulman le plus important après Mahomet ; il est fréquemment cité parmi les Moujaddid, ceux dont la tâche est de revivifier l’Islam chaque siècle. C’est lui qui a poussé l’acharisme dans ses conclusions extrêmes.
Arbitraire, le monde ne peut plus être connu du tout, pas plus que l’éthique (hormis par la Révélation) : aucun acte n’est moral ni immoral, obligatoire ou interdit tant que Dieu ne l’a pas décidé. Il s’agit d’un avatar du droit du plus fort, et le plus fort, c’est Dieu, qui est au-delà du bien et du mal. Sans guide moral indépendant, les musulmans pieux en furent réduits à calquer leurs comportements sur ceux de Mahomet et de ses compagnons, à baser leur droit sur la seule jurisprudence, et leur éducation sur l’apprentissage par cœur. Ce n’est que par une pirouette que l’homme garde la responsabilité de ses actes, alors qu’il n’est même pas libre.
À part les hanbalites, opposés par principe aux raisonnements philosophiques, tous les autres maddhabs, plus précisément, tous les Malikites, les trois-quarts des chaféites, le tiers des hanafites (le reste adhère au maturidisme, une variante subtile de l’acharisme) ont fini par accepter l’acharisme. En effet, ce dernier a fini par incarner la voie du milieu entre moutazilisme et hanbalisme, bénéficiant entre autres de l’appui du puissant vizir Nizam al-Mulk et plus tard de Saladin.
L’acharisme enseignait la dépendance absolue vis-à-vis de la volonté divine ; le soufisme y ajoute une tendance à faire peu de cas de la réalité. Le tout aboutit pour eux à un quiétisme, une passivité, un fatalisme (source du fameux « Inch’Allah » (textuellement, « Si Dieu le veut », puisque tout l’univers dépend de sa volonté) qui aura moult conséquences.
Abandonner la causalité a mené à abandonner puis nier la réalité. « Inch’Allah » n’est pas qu’un tic de langage, mais reflète une pensée profonde, qui peut mener des théologiens à déclarer haram (interdit) l’idée d’une police d’assurance ou d’un vaccin, puisque tout événement est acte de Dieu. De même, la présence de pétrole en Arabie Saoudite est vue comme un signe que le ouahhabisme saoudien a les faveurs du ciel.
Les sociétés musulmanes perdirent progressivement leur intérêt pour la science, se vidèrent peu à peu de leur esprit d’initiative, de leur imagination, et se calcifièrent. Des personnages comme le hanbalite Ibn Taymiyya finirent de clouer le cercueil en plaçant l’obéissance au sommet de la hiérarchie des valeurs, et en terminant d’évacuer la raison. Exeunt philosophie, théologie, ouverture à la nouveauté et esprit critique.
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On commence mieux à voir pourquoi la démocratie n’est pas née en terre d’Islam (dar al islam), et pourquoi elle a tant de mal à s’y implanter, spécialement dans le monde arabe. Rappelons à toutes fins utiles que la possibilité d’une éthique rationnelle est le fondement ultime de la liberté de conscience. L’absence d’une référence morale déduite de la raison, d’une idée même de droit naturel ou de droits naturels, mais aussi la primauté du pouvoir pur sur la raison, engendre donc une forme très particulière de démocratie : un Dieu, un vote ; Dieu prenant en charge tout, absolument tout. À Dieu tyrannique, pouvoir tyrannique. Et à violence du pouvoir, violence des opposants, qui n’ont d’ailleurs plus que la religion comme base sur laquelle appuyer leur contestation.
Ce naufrage de la civilisation islamique est déjà ancien. La perte de vitalité intellectuelle, comme toujours, précéda la perte de vitalité politique, qui fut actée dès les invasions mongoles au 13e siècle. L’invasion des Tatars de 1258, qui fit tomber Bagdad, causa la mort d’un grand nombre d’oulémas et la perte de beaucoup de manuscrits. Devant cet affaiblissement général de la société musulmane, les oulémas ont alors perdu tout espoir dans l’avenir. Pensant qu’on ne ferait pas mieux que les prédécesseurs, ayant peur de surcroît que l’islam ne se perde par des interprétations de plus en plus éloignées de son essence, les oulémas ont alors décidé, par une sorte de consensus, « la fermeture de la porte de l’ijtihad » (de l’effort de réflexion) comme on dit en arabe.
Dès lors, les nouveaux chercheurs ne feront plus que reprendre les ouvrages des anciens en y ajoutant tantôt une précision, tantôt un commentaire timide. Mais, dans l’ensemble, ils se bornent à exposer et à commenter presque religieusement les idées de leurs prédécesseurs. De plus, avec le temps, même parmi les auteurs anciens, seuls les plus classiques feront dorénavant autorité. Le phénomène ira d’ailleurs en s’aggravant puisque, au bout d’un certain temps, un des commentateurs d’un ouvrage ancien s’imposera au point que les générations suivantes n’oseront plus le contredire et se contenteront à leur tour d’ajouter quelques justifications ou précisions.
C’est de cette époque que date le triomphe d’un Islam symbolisé par l’école hanbalite, du nom d’Ibn Hanbal, le principal représentant d’une interprétation littérale du Coran. La fermeture des portes de l’Interprétation eut pour conséquence concrète une inadaptation programmée de l’Islam aux défis qui jalonnèrent ensuite sa route puisque toute innovation, ou bid'ah en arabe, était désormais interdite pour répondre aux problèmes inédits qui ne manqueraient pas de se poser. C’est un peu le phénomène des glossateurs et des postglossateurs qu’a connu le droit romain après son âge d’or. La ressemblance se vérifie d’ailleurs, non seulement quant au fond, mais aussi dans la forme, dans la mesure où, pour certains ouvrages de droit musulman comme de droit romain on trouve entremêlés le texte initial (matin) d’un grand auteur avec les textes du glossateur et du postglossateur.
NDLR. On peut d’ailleurs en dire autant de la Bible. Certaines gloses au fil du temps ont fini par être incorporées dans le texte initial. Prenons un exemple : l’épisode de l’évangile selon Matthieu où scribes et pharisiens sont démasqués.
La précision « ce qu’il y a de plus important » (Matthieu 23,23) est une glose qui a fini par se fondre dans le texte original. Le passage de Luc correspondant se contente de mentionner la justice et l’amour de Dieu.
La fin du verset « c’est ceci qu’il fallait faire sans négliger cela » est sans doute également une glose (que Luc connaît aussi d’ailleurs) incorporée dans le texte initial.
Cette ressemblance extrêmement frappante n’est pas un hasard. Elle prouve que, dans des circonstances similaires, les sociétés, même apparemment les plus différentes, réagissent souvent de la même manière. Peut-être est-ce là une sorte de fin de cycle que toutes les civilisations anciennes ont connue. Après l’âge d’or est arrivé le crépuscule de la vieillesse où l’imagination est réduite, les facultés créatrices diminuées et la pensée ankylosée.
Depuis cette époque et jusqu’à nos jours, la même attitude a prévalu chez les oulémas, c’est-à-dire les magistrats des tribunaux charaïques, les muftis, les professeurs des universités de théologie, telles que El Azhar en Égypte ou la Zitouna en Tunisie, ceux qu’on pourrait appeler les représentants de l’islam officiel. Quelques rares exceptions peuvent être signalées. Par exemple, l’Égyptien Mohamed Abdou a adopté des positions novatrices courageuses. Bien que ses idées aient été reprises par certains auteurs modernistes, c’est resté un cas isolé chez les théologiens. Dans leur très grande majorité, ces derniers ne font que répéter les thèses des anciens.
Quand, au début du siècle dernier, le gouvernement égyptien, dans le cadre des nombreux efforts qu’il a fournis pour amorcer le développement de la société et l’ouvrir sur le monde moderne, a voulu introduire en Égypte l’enseignement des mathématiques et des sciences exactes, il s’est cru obligé de consulter le cheikh d’El Azhar pour se « couvrir » avant de « commettre » cette innovation (bidah). Ce dernier a cru faire preuve d’un grand modernisme en approuvant le projet, mais, ajouta-t-il, à condition qu’on en démontre l’intérêt. Voilà le type d’innovation dont l’islam officiel est capable.
Tous les intégrismes musulmans actuels, à la notable exception du radicalisme chiite, se réclament du hanbalisme et c’est une chaîne ininterrompue qui relie le fanatique Ibn Hanbal, qui préconisait de
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mettre à mort les adversaires de ses thèses, à commencer par les moutazilites, à Ben Laden en passant par Abd-oul Ouahhab, le fondateur du wahhabisme, doctrine officielle de l’Islam séoudien.
1) Revenons sur la personne de Al-Ghazali. Adoptant une démarche hypercritique, il remet en doute tout ce qu’il croit savoir, pour aboutir à une profonde crise psychologique, qui ne fut guérie, dit-il, que par la grâce divine. Et plus précisément, par l’expérience mystique soufie, qu’il connut en vivant en ermite. Chez lui, c’est l’intuition directe qui remplace la raison, qui dépasse la raison. Pour Al-Ghazali, le point de contact entre l’Homme et son Créateur n’est pas la raison, mais bel et bien la volonté : je veux, donc je suis. Autre conclusion (teintée de soufisme) d’Al-Ghazali : seul Dieu existe vraiment ; la réalité de l’univers est bien pâle en comparaison, presque une illusion. « L’incohérence des philosophes » d’Al-Ghazali porta un coup fatal à la philosophie en terre d’Islam (Dar al Islam), en exposant que le seul but de la raison était de démontrer sa propre inutilité. Près d’un siècle après, Averroès tenta d’allumer un contre-feu, écrivant « L’incohérence de l’incohérence » (Tahafout al-Tahafout) pour réfuter l’ouvrage précédent… mais trop tard : les œuvres d’Averroès finirent brûlées.
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LE PROBLÈME PLUS GÉNÉRAL : L’ISLAM ET LES MINORITÉS RELIGIEUSES.
Ainsi que nous avons eu l’occasion de le voir, des chrétiens de Nadjran autorisés par Mahomet à prier dans sa mosquée de Médine en 631 aux chrétiens regroupés autour de l’ermite médinois de la tribu khazradj appelé Abou Amer Ar-Raheb ; la politique de Mahomet vis-à-vis des non-musulmans a beaucoup varié.
La seule chose qui n’ait jamais varié par contre c’est la place qu’il a toujours réservée aux non musulmans n’appartenant pas à la catégorie d’individus dite « gens du Livre » : AUCUNE !
Les musulmans considèrent donc que toute Loi (din) doit venir de Dieu, mais que Dieu a promulgué des lois différentes au cours des siècles selon les peuples considérés.
Les non-musulmans autorisés à vivre en terres d’islam peuvent par conséquent s’autoadministrer (boire du vin manger de la viande de porc, etc.), mais dans le cadre général de la charia à laquelle ils restent en définitive soumis, et ce contrairement aux lois personnelles du type loi Gombette (lex burgundionum) de 502 en Europe.
Le culte des gens du Livre est autorisé dès lors qu’ils ont payé la djizya. Chez certains auteurs on trouve des restrictions diverses : interdiction de faire sonner les cloches, de faire des processions, etc. Il y a une quasi-unanimité des docteurs de la Loi pour dire qu’il est interdit de bâtir une nouvelle église ou synagogue dans le Dar al-islam, et qu’il est seulement permis de réparer les anciennes.
Cette disposition est à relier à bien d’autres, concernant le mariage (interdiction pour un dhimmi d’épouser une musulmane), la garde des enfants (en cas de divorce la dhimmie se voit retirer son enfant afin qu’elle ne puisse pas lui enseigner sa religion), l’apostasie (l’apostat est condamné à mort par les hadiths, en sorte que les religions non islamiques ne puissent gagner du terrain), le blasphème (impossible donc de critiquer l’Islam pour mettre en valeur le christianisme ou le judaïsme), etc.
Autres obligations des protégés. Comme le protégé temporaire, le dhimmi doit avant tout respecter l’Islam, le Prophète, le Coran. Il ne doit pas l’attaquer ni chercher à faire des conversions (sous peine de mort). Il ne peut donner l’amane (asile) à un harbi *, il ne doit aider le Dar al-harb * en aucune manière (espionnage, exportation de produits stratégiques, etc.). Il ne peut épouser une musulmane, ni avoir de rapports sexuels avec elle. Il peut certes boire du vin et manger du porc, mais pas en public. Le commerce de ces denrées donne lieu à des divergences.
Les auteurs admettent le plus souvent l’humiliation des gens du Livre lors du paiement de leur impôt spécifique en interprétant comme une prescription la fin du verset 9, 29 : « oua houm saghiroun ». C’est une phrase nominale (sans verbe) signifiant mot à mot « et eux humiliés ». Faut-il traduire « ils sont (ou seront) humiliés » (simple constatation) ou comme un ordre « qu’ils se fassent tout petits » ?
Cette humiliation intervient d’abord au moment où ils payent la djizya. Ensuite, les gens du Livre doivent se distinguer des musulmans par leurs costumes, leurs montures, leurs selles, leurs coiffures. Ils devront monter des mules ou des ânes, porter des vêtements distinctifs (bleus pour les chrétiens, jaunes pour les juifs), ne pas porter d’arme, ne pas avoir des maisons plus hautes que celles des musulmans. Ils devront respecter les musulmans, leur céder le passage, ne pas imiter ce qui est « propre aux gens de science et d’honneur ».
Les métiers délaissés par la société musulmane – société militaire à l’origine – sont dévolus aux non-musulmans, qui souvent y excellent d’ailleurs. À certaines périodes, les activités pénibles leur reviennent. Les Juifs yéménites étaient par exemple tenus d’enlever les charognes et de nettoyer les latrines publiques le jour de sabbat.
Toutes ces mesquineries et bassesses quotidiennes ne faisaient guère honneur à l’Islam ! Cet islam-là est en effet aux antipodes du lavement des pieds par Jésus le jeudi saint veille de sa mort (évangile selon saint Jean 13, 1-15).
*Dar al Harb= pays ennemi. Harbi = ressortissant d’un pays ennemi.
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LE CAS DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN.
Le premier génocide du vingtième siècle, précurseur de la Shoah, a été infligé par un pays musulman à l’encontre de sa population chrétienne : il s’agit du génocide de 1915 de la minorité arménienne de Turquie.
Deux thèses s’affrontent à ce sujet.
Première thèse. En gros la thèse turque. C’est un drame purement politique. Certains Arméniens profitaient des difficultés de l’Empire ottoman pour devenir indépendants avec la complicité de diverses puissances européennes. C’est la thèse dite de la trahison.
Deuxième thèse. Ce fut une guerre de religion, un petit djihad, musulmans contre chrétiens.
Essayons de trancher.
Il a tout d’abord lieu de noter que ce génocide de 1915 fut précédé par le massacre quasi génocidaire de cent mille à deux cent mille âmes en 1894-1896, sous le règne du sultan Abdul-Hamid II (1877-1909), et par celui de trente mille autres en 1909 dans la région d’Adana. Les premières violences furent perpétrées sous l’autorité traditionnelle du sultan…
Le facteur religieux est évident dans le premier, puisque l’État ottoman était au moins en théorie une société sacralisée que dirigeait le sultan-calife ; celui-ci, en tant que calife, était généralement reconnu comme le successeur du Prophète. Selon Vaan N. Dadrian, le principe de droit commun fondamental qui au sein de l’Empire ottoman régissait les relations entre l’élite musulmane et les sujets « infidèles » était un contrat quasi légal, l’Akdi Zimmet (contrat avec les nations vassales), au terme duquel le souverain garantissait la sécurité des personnes, des libertés civiles et religieuses, et sous certaines conditions, des propriétés, en échange du paiement de l’impôt et des taxes locales, et de la soumission à une série d’interdictions sociales et légales.
Or fondamentalement, la substance et l’esprit de l’Akdi Zimmet étaient la dhimma, le pacte de soumission musulman qui met un terme à l’état de guerre en stipulant les conditions sous lesquelles chrétiens, juifs et zoroastriens sont autorisés à demeurer en pays musulman.
La tradition islamique n’envisage jamais, à proprement parler, de véritable paix entre musulmans et infidèles. Il peut y avoir une trêve lorsque le combat ne paraît pas devoir tourner à l’avantage des premiers. Il peut aussi y avoir une forme de tolérance religieuse au sein d’un empire plurinational comme l’Empire ottoman, à condition qu’elle s’établisse sur une hiérarchie des statuts et qu’elle conserve les distinctions entre musulmans et infidèles, entre maîtres et vassaux. Cependant il n’y a aucun droit humain inaliénable en faveur des peuples assujettis : leurs droits demeurent contractuels et conditionnels, et sont strictement liés au respect scrupuleux de la dhimma. Chaque fois qu’un dhimmi ou une communauté dhimmie manque à ses obligations, le contrat de soumission et de protection devient ipso facto caduc et l’état de guerre rentre en vigueur.
Les réformes engagées en 1839 par le sultan Abdul-Medjid garantirent l’honneur, la sécurité, et les biens de tous ses sujets, sans considération de race ni de religion. En 1856 un second édit plus détaillé affirma l’égalité des sujets de l’empire, musulmans et non musulmans. Étant donné la subordination traditionnelle des infidèles aux musulmans, et sa justification religieuse, le décret connu sous le nom de hatti humayun, fut amèrement ressenti par l’écrasante majorité de ces derniers, surtout en raison des pressions étrangères qui avaient abouti à cette abolition du statut de dhimmi. Les musulmans traditionalistes prirent donc l’émancipation des juifs et des chrétiens comme une véritable attaque contre eux. Avant l’émancipation, le paiement de la djizya, l’impôt frappant tout dhimmi mâle, symbolisait leur sujétion, leur statut d’infériorité et l’arrêt du djihad. Mais pour les traditionalistes si les discriminations étaient annulées la dhimma en tant que protection ou sauf-conduit devenait caduque : l’émancipation des dhimmi restaurait contre eux l’état de guerre. Les traditionalistes croyaient que dans ces circonstances l’Oumma, la communauté musulmane, avait cette fois encore, au moins en théorie, le droit de saisir leurs propriétés, de mettre à mort les adultes mâles, et de réduire en esclavage les femmes et les enfants. Bien plus, ces actions paraissaient non seulement justifiées, mais prescrites et honorables d’après l’historienne égyptienne Bat Ye’or.
Une autre raison du ressentiment éprouvé par les Turcs venait du fait que les Arméniens faisaient figure de minorité économiquement « dominante ». Très souvent lorsque des minorités font l’objet de discriminations sociales et professionnelles, et se trouvent interdites de servir dans l’armée ou la fonction publique, elles comptent davantage sur l’éducation et l’instruction que les majorités indigènes, pour assurer leur survie économique et leur bien-être. Elles se concentrent aussi plus volontiers dans les grands centres urbains, se consacrant au commerce, à la finance et aux professions libérales, à tous les savoir-faire citadins. Leur capital se résume à ce qu’elles ont dans leur cerveau, qui ne peut leur être retiré. Souvent sujettes à expulsion, elles constituent des réseaux au sein de leur diaspora, qui se révèlent intrinsèquement avantageux dans la finance ou le commerce. Ce fut le cas des Juifs
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européens avant la Seconde Guerre mondiale, des Chinois en Asie du Sud-Est, des Libanais en Afrique occidentale, et des Arméniens dans l’Empire ottoman.
Les plus terribles massacres eurent lieu dans la ville d’Urfa (autrefois Édesse) en 1895. Les mosquées furent des lieux d’émulation ; les églises chrétiennes étaient des abattoirs. Les imams dépêchaient leurs foules meurtrières. Les pires boucheries se produisaient souvent après le prêche du vendredi. Dadrian relève aussi le rôle des autorités religieuses locales dans le déclenchement des massacres. Le sultan, pour les susciter depuis sa lointaine Constantinople, pouvait donner des ordres souvent à mots couverts, mais il fallait l’autorité des notables locaux pour interpréter ceux-ci, les planifier et les exécuter. Du fait de la nature théocratique du régime, ce sont les chefs religieux du pays qui assurèrent les foules de la conformité avec la charia de ces massacres. En leur conférant cette légitimité religieuse, les muftis, les cadis, les oulémas et les mollahs jouèrent un rôle crucial à très peu d’exceptions près. Deux mille cinq cents Arméniens furent brûlés vifs dans la cathédrale d’Urfa.
Les défenseurs de l’Islam à tout prix font valoir que cela n’eut rien à voir avec la religion, qu’il y avait eu trahison ou intelligence avec l’ennemi de la part des Arméniens. Nous n’avons pas les compétences qui permettraient de trancher entre les spécialistes. Ce n’est pas à nous modernes druides d’Occident de trancher entre les deux camps (trahison politique ou rupture du contrat de dhimma) ce qui est certain c’est que le facteur religieux a joué un rôle significatif dans les massacres d’Urfa de 1895 (Vahak N. Dadrian. Histoire du génocide arménien).
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ANNEXES.
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LA JOURNÉE D’UN MUSULMAN PIEUX.
L’imposture majeure du christianisme fut de rattacher nombre de ses rites ou d’éléments de sa doctrine à la révélation de la partie juive de la Bible, alors qu’ils venaient, en fait, du paganisme hellénistique ou d’Asie Mineure. L’imposture majeure de l’islam sera aussi de rattacher nombre de ses rites ou éléments de sa doctrine à la révélation abrahamique alors qu’ils viennent en droite ligne du paganisme arabe de l’époque (taouaf autour de la Kaaba, etc.).
Bentinck, Noldeke et Goldziher, ont étudié en détail les éléments des rites musulmans. Dans la préparation aux cinq prières quotidiennes, les ablutions rituelles n’ont par exemple aucun rapport avec l’hygiène corporelle au sens strict du terme. Leur objectif est plutôt de libérer le fidèle de la présence ou de l’influence des esprits du mal. Mahomet par exemple, ayant remarqué que quelqu’un avait mal fait ses ablutions rituelles, lui ordonna de les recommencer en disant : « Quand un musulman ou un croyant se lave le visage, les péchés commis par ses yeux sont emportés par la dernière goutte d’eau. Quand on se lave les mains, les péchés commis par la main sont emportés par la dernière goutte d’eau. Et quand on se lave les pieds, tous les péchés que les pieds ont commis sont emportés par la dernière goutte » (Sahih Muslim 244).
Cela va dans le sens de Goldziher pour qui, selon la pensée sémitique, l’eau chasse les démons. Cela dit, Mahomet avait aussi l’habitude de se laver les pieds en passant simplement sa main sur le dessus de ses sandales.
Autre exemple, à propos de la pollution démoniaque. À en croire un des hadiths rapportés par la tradition, Mahomet aurait dit : « Quand vous vous réveillez, mouchez-vous trois fois, car le diable a passé la nuit dans ses narines » (Sahih Muslim chapitre 2, hadith numéro 462).
Traditionnellement aussi, un musulman doit se couvrir la tête, en particulier l’arrière du crâne. Wensinck pense que c’était pour empêcher les esprits du mal d’entrer dans le corps.
Il va de soi que nous sommes vigoureusement pour un minimum d’hygiène, et que nous recommandons à tous d’en faire preuve à chaque instant en tous lieux ; sinon gare aux maladies nosocomiales, nous parlons par expérience personnelle hélas (trois opérations du rein en 17 ans !) L’hygiène doit faire partie de nos soucis quotidiens, mais la question que nous nous posons est quand même la suivante : que vient faire Dieu dans tout cela ? Le soldat perdu dans sa tranchée ou le malheureux otage enfermé dans un trou, qui ne peut satisfaire à ces règles d’hygiène élémentaires, ira-t-il vraiment brûler en enfer à cause de cela ?
Sinon, si notre sort dans l’au-delà ne dépend pas de cela, si seul en dépend notre sort ici-bas ; bref s’il ne s’agit que de simples règles d’hygiène élémentaire (à conseiller fermement quand elles sont valables, ce qui n’est pas toujours le cas) ; alors, pourquoi en faire quasiment des commandements divins ? La caution divine est-elle vraiment indispensable au savoir-vivre ? ! L’hygiène est une chose humaine. Elle peut évoluer au fil des siècles en fonction du progrès des connaissances ou des technologies. La mise en évidence de l’existence des microbes par le Français Pasteur par exemple, un vrai bienfaiteur de l’Humanité, lui, sans être pour autant un saint, pieux et vertueux ; a montré la nécessité de stériliser les instruments chirurgicaux (en autoclave) et de ne pas se contenter à leur sujet d’un simple nettoyage à l’eau, même poussé. Mais ça, Dieu apparemment n’y a pas pensé en dictant ses volontés à son dernier prophète, par le truchement de l’archange Gabriel. Et cela prouve bien qu’en matière d’hygiène les hommes ne peuvent se contenter de ce que Dieu a dit à ce propos. L’hygiène est une question purement humaine, relevant de la science ou du bon sens, et ne devrait rien avoir à faire avec la théologie. Toute religion faisant intervenir Dieu dans les moindres détails de ce chapitre de l’histoire humaine commet une dramatique erreur, une erreur lourde de conséquences, comme chaque fois que l’on mêle Dieu à tout ça. Que les croyants, s’ils y tiennent, nous apprennent que Dieu conseille AUSSI pour le salut de nos âmes et de nos esprits d’éviter tout comportement à risque en ce domaine, suffit. Nul besoin de se fourvoyer dans les détails.
PRÉCISION : dans le texte qui suit, nous avons systématiquement traduit le terme arabe « misouak » par « brosse à dents » ; car la traduction traditionnelle par « cure-dents » ne nous a pas semblé correspondre à la taille d’un misouak, qui est bien plus gros qu’une simple allumette.
AUTRE PRÉCISION pour comprendre ce texte passablement ésotérique. Bien que simple « répétiteur » d’une religion révélée antérieurement, la hanifya du dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob (apparemment bien oubliée malgré le judaïsme) ; l’emprise de Mahomet a été telle sur les premiers musulmans que le moindre de ses faits et gestes (dormir, faire sa toilette, etc.) a été érigé en modèle à imiter à tout prix (isma = al-tibb al-nabaoui). Les anecdotes nous parlant de ces faits et gestes de Mahomet sont appelées hadiths et ont été consignées dans quatre grands livres, ceux des théologiens dénommés Boukhari, Tirmizi, Abou Daoud, et Muslim – le bien nommé -. Ces noms et quelques autres reviennent donc constamment sous la plume des musulmans pieux, l’islam étant une religion de la lettre beaucoup plus que de l’esprit ; accompagnés de quelques autres noms propres qui
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sont ceux des commentateurs de ces hadiths ou les titres des livres qu’ils ont écrits (Tibb-é-Nabaoui, Michkaate par exemple). NE PAS S’AFFOLER, ON S’Y HABITUE TRÈS VITE !
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AL-TIBB AL-NABAOUI (littéralement : médecine du prophète).
Sources secondaires ou principales : Michqate al Masabi, Hisn al Hassine, Mirqate al Mafati, etc.
Quatre choses aiguisent l’intelligence :
— Éviter les propos futiles [NDLR. Alors là, bien sûr, nous sommes absolument d’accord !]
— Utiliser la brosse à dents (misouaak).
— S’asseoir en compagnie de gens pieux.
— Et s’asseoir en compagnie des oulémas.
AVANTAGE ET BÉNÉFICES DE LA BROSSE À DENTS SELON LES THÉOLOGIENS MUSULMANS.
Hazrat Aïcha : l’utilisation constante de la brosse à dents (misouaak) soigne toutes les maladies sauf la mort. Hadith rapporté par Daïlami dans Firdaus. [NDLR Voilà maintenant que même les remèdes de grand-mères servent de relais à la parole de Dieu. C’est consternant !]
1) La brosse à dents (misouaak) ramène une bonne haleine dans la bouche.
2) La brosse à dents (misouaak) soigne les maux de tête. [NDLR Mais cela n’a quand même pas empêché Mahomet de mourir.]
3) La brosse à dents (misouaak) élimine les maux de dents.
4) La brosse à dents (misouaak) met de la lumière sur le visage de celui qui l’utilise.
5) La brosse à dents (misouaak) rend la vue perçante.
6) La brosse à dents (misouaak) éclaircit la voix.
7) Abou Horaïra : la brosse à dents (misouaak) augmente l’éloquence. [Al Jaami.]
8) L’utilisation de la brosse à dents est une habitude qui facilite le départ de l’âme, quand vient son heure. [Sharhous Soudoor.]
9) L’utilisation de la brosse à dents (misouaak) est une habitude qui fait mériter un rang élevé au paradis.
10) Les anges chantent les louanges de celui qui utilise la brosse à dents (misouaak).
11) Se servir de la brosse à dents (misouaak) déplaît à Satan.
12) L’utilisation de la brosse à dents (misouaak) permet de bénéficier de la compagnie des anges.
13) Le plus grand bénéfice de l’usage de la brosse à dents (misouaak) est de faire plaisir à Dieu.
14) La prière récitée après avoir utilisé la brosse à dents (misouaak) est 70 fois supérieure à celle qui est faite sans l’avoir utilisé. [Mishkaate.]
DE LA MANIÈRE DE SE COUPER LES ONGLES.
Commencer par l’index de la main droite celle avec laquelle on témoigne de l’unicité de Dieu, et continuer jusqu’à l’auriculaire. Puis, poursuivre avec l’auriculaire de la main gauche et continuer jusqu’au pouce gauche. Enfin terminer en coupant l’ongle du pouce droit. Pour les orteils, commencer par le plus petit du pied droit, continuer jusqu’au gros orteil. Puis, poursuivre avec le gros orteil gauche et terminer avec le petit orteil gauche [Source : Fatouas Alamguiri et Ibn Abidin al-Shami].
Il est conforme à la tradition religieuse (sunna) de réciter la formule suivante lorsque l’on est assailli par les tentations vicieuses ou les insinuations conduisant à l’infidélité : « Je cherche refuge auprès de Dieu contre Satan le Rejeté. Je place ma foi en Dieu et en son Envoyé ».
Réciter cette prière lorsque l’on est tenté de regarder des choses interdites ou obscènes est très efficace. On ressent immédiatement la crainte du tout-puissant et Satan s’enfuit.
Lorsque l’on décide d’avoir des rapports sexuels avec son épouse, réciter la prière suivante, sinon le sperme de Satan pénètre en même temps que celui du mari et les enfants eux-mêmes en seront affectés. « J’accomplis cet acte au nom de Dieu. Ô Dieu ! Mets-nous hors de portée de Satan et garde-le éloigné des enfants que Tu nous accorderas ». [NDLR Voilà une explication de la transmission du péché originel et de la nécessité du baptême plus précise que dans le christianisme effectivement. À noter : nous ne trouvons trace nulle part du consentement de la femme et de ses désirs ou de ses initiatives à elle. Visiblement ce vénérable théologien musulman, si tant est que le terme théologien puisse lui convenir, n’y a pas pensé].
POSITION POUR DORMIR.
Il est conforme à la tradition religieuse :
a) De verrouiller la porte.
b) D’éteindre la lampe. Un hadith nous apprend en effet que Satan peut inciter les rats de la maison à tirer la chandelle allumée pour l’emmener. C’est le moyen par lequel ils provoquent des incendies [Hisn al Hassine].
c) De bien obturer les orifices des outres (bouteilles ou autres récipients destinés à conserver l’eau, l’huile, etc.)
d) De refermer les récipients avec leurs couvercles. Si l’on ne trouve rien pour les recouvrir, alors mettre simplement un morceau de bois en travers (sur tout le diamètre).
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Selon un hadith du célèbre recueil de Muslim, l’Envoyé de Dieu nous a en effet appris que les épidémies s’abattent une fois par an sur terre, et que tout récipient ouvert en reçoit dès lors nécessairement une partie [Hisn al Hassine]. Note de la rédaction, dans l’intérêt de l’Humanité, il est moins dangereux de faire confiance aux médecins et aux scientifiques en ce domaine qu’aux idées de Mahomet ou de Dieu à ce sujet : l’épidémiologie.
Chez les chiites il est conseillé de réciter la Tasbi de Fatima juste avant de dormir : 33 fois Alhamdoulillah « Dieu soit loué », 34 fois Allahou Akbar « Allah est le plus grand ! » [Source : Boukhari, Muslim, Abou Daoud et Tirmizi].
L’imam Chafi considère qu’il y a 4 types de position pour dormir.
1- Sur le dos, c’est le sommeil des prophètes.
2- Sur le côté droit – c’est le sommeil des pratiquants.
3- Sur le côté gauche – c’est le sommeil des rois.
4- Sur le ventre, c’est le sommeil de Satan [d’après Boukhari, Muslim, Al-Tirmizi et Abou Daoud].
NDLR. Et pour les tout-petits ou la mort subite du nourrisson, que dit Dieu ?
AU RÉVEIL.
1) Se frotter les yeux et le visage avec la paume des mains pour éloigner le sommeil (Chama’il de Tirmizi).
2) Lorsque les yeux s’ouvrent le matin, réciter trois fois : « Alhamdoulillah « Dieu soit loué ». Puis, après avoir récité : « Il n’y a d’autre Dieu que Dieu et Mahomet est son prophète », réciter la prière (doah) suivante : que toute louange revienne à Dieu, celui qui nous a redonné la vie après nous avoir donné la mort ; c’est vers Lui que nous monterons ressusciter ». (Référence : Boukhari, Abou Daoud, Nassaï.)
3) Se brosser les dents.
Note : durant les ablutions mineures (wouzou), on se brossera de nouveau les dents. Car l’hygiène de la bouche par la brosse à dents à l’occasion du réveil même est un usage en soi de la tradition religieuse musulmane.
4) Commencer par le côté droit en s’habillant : pour le pantalon, enfiler la jambe droite d’abord, puis celle de gauche. Pour le vêtement du haut, commencer par le bras droit et ensuite celui de gauche. Procéder de même, aussi bien pour la chemise que pour la veste même sans manche. Pour les chaussures également, le pied droit d’abord, celui de gauche ensuite.
BESOINS NATURELS.
La religion musulmane a des règles particulières concernant l’hygiène personnelle quand on va aux toilettes. Ces usages sont connus sous le nom de Qadaahoul Haajah.
La seule chose mentionnée par le Coran est de se laver les mains et la figure avant de prier (5, 6). Le fait d’utiliser la main gauche ou la main droite ainsi que le pied utilisé pour entrer ou sortir des toilettes vient des hadiths.
Il est donc strictement interdit de faire ses besoins près des eaux courantes, ou de se tenir à côté en faisant ses besoins (simple bon sens).
Il est préférable d’entrer dans la salle de bain du pied gauche et d’en sortir du pied droit (superstition).
On se doit de rester silencieux quand on est dans les toilettes. Parler, répondre aux salutations ou saluer les autres est fortement déconseillé. Sauf s’il est absolument nécessaire de le faire. Ne pas réciter d’invocations (Zikr. Source : Michkate).
On ne doit ni tourner le dos ni faire face à la qibla (La Mecque) en faisant ses besoins.
Réciter la prière suivante avant d’entrer : « Ô Dieu ! Je cherche refuge auprès de Toi contre le Diable et ses démons (Zad al Ma’ad : l’exemple de Mahomet).
Note de la rédaction : mon Dieu… quel gaspillage des énergies intellectuelles de l’Humanité ! Ces obsessions puériles ressemblent beaucoup aux idées de certains moines chrétiens de la même époque à l’autre bout du monde.
Point N° 42 de la Règle des Culdées selon saint Maelruain de Tallaght : « Toilettes et urinoirs sont des lieux où rôdent les esprits maléfiques. Le signe de croix doit être fait sur ces lieux et l’on doit se signer en y entrant, il est interdit d’y réciter des prières, sauf le Deus in adiutorium (jusqu’à festina ». Jusqu’où le diable ne va-t-il pas se nicher ?
« L’utilisation de papier toilette est acceptable, mais l’eau est toujours nécessaire pour la pureté et pour empêcher les germes présents dans les excréments de contaminer la peau ».
Note de la rédaction. Se servir d’eau pour ses ablutions est évidemment une prescription rituelle vieille comme le monde, mais attribuer comme raison d’être à son usage la volonté de se débarrasser des germes microbiens… est bien évidemment une justification moderne relevant de la taqiya.
Autres usages pieux et traditionnels (sunna) à observer pour faire ses besoins naturels.
1) Avant de se rendre aux toilettes, il faut ôter la bague ou toute autre chose sur laquelle est gravé, ou écrit, un verset du Saint Coran, ou le nom du Prophète. Il faut les laisser à l’extérieur lorsque l’écriture
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est visible, et les remettre au doigt après être sorti. Mais s’il s’agit d’un Tarouiz (talisman autorisé) qui a été préalablement recouvert de cire ou cousu dans un tissu, alors il est permis de le porter dans un tel endroit (Nassaï).
2) Il est préférable (moustahab) d’utiliser trois poignées de terre ou trois cailloux. Si le lieu choisi en a déjà, il n’est pas nécessaire d’en prendre avec soi évidemment. Note : L’équipement sanitaire des toilettes d’aujourd’hui ne permettant pas l’utilisation de sable ou de cailloux, on utilisera le papier hygiénique, comme l’a conseillé le Mufti Rachid Ahmad, afin de ne pas endommager le système d’évacuation des eaux usées.
3) Pénétrer avec le pied gauche dans les W.-C.
4) Monter sur la cuvette sanitaire à la turque avec le pied droit et de redescendre avec le pied gauche (Zad-oul-Maad).
5) En se déshabillant, autant que l’on peut découvrir le bas du corps, cela est mieux (afin de protéger ses vêtements le plus possible des gouttelettes d’impuretés).
6) Ne pas utiliser la main droite pour se nettoyer, mais au contraire réserver la main gauche à cet usage (Boukhari et Muslim).
7) Prendre toutes les précautions nécessaires pour éviter les gouttelettes d’urine ou les éclaboussures d’eau impure provoquées par les excréments, car la majeure partie des supplices de la tombe sera occasionnée par la négligence ou l’inattention en ce domaine (Tirmizi).
8) Sortir avec le pied droit des W.-C. puis réciter la prière suivante : « Je te demande Pardon. Toute louange est pour Dieu, qui a éliminé de moi le mal et m’a donc accordé la santé ».
Certains endroits étant dépourvus de sanitaires, il faut alors chercher un emplacement inaccessible au regard pour faire ses besoins ou bien se placer derrière un obstacle nous soustrayant à la vue des autres (Abou Daoud).
Choisir un endroit où le sol est meuble pour éviter que les gouttes d’urine rejaillissent. (Tirmizi. NDLR Très bonne idée ! Pourtant est-il vraiment nécessaire d’impliquer Dieu et la Religion dans une telle affaire ?)
Les ablutions mineures (wouzou) comportent dix-huit pratiques pieuses (sunna). C’est en les respectant intégralement que votre wouzou pourra être parfait.
1) Commencer par indiquer le but de ce wouzou.
Exemple : J’accomplis ce wouzou pour dire ma prière (salat).
2) Se laver les deux mains trois fois jusqu’au coude.
3) Se nettoyer les dents avec une brosse à dents, et en l’absence de brosse à dents, se frotter les dents avec les doigts (le pouce et l’index).
4) Se rincer la bouche trois fois.
5) Inspirer de l’eau par les narines trois fois.
6) Expirer aussi trois fois cette eau des narines.
7) Se laver chaque membre ainsi que le visage à trois reprises.
9) Se passer les doigts mouillés au milieu de la barbe en se lavant le visage (Khilal).
10) Se passer les doigts mouillés d’une main entre ceux de l’autre main, en les superposant.
Pour le soin des pieds, passer l’auriculaire mouillé entre chaque orteil lors du lavage, en commençant par le pied droit.
11) Se passer les mains mouillées sur toute la surface de la tête une fois (massah).
12) Se nettoyer les oreilles avec la tête.
13) Se frictionner les parties du corps qui sont lavées dans le wouzou.
14) Accomplir les actes qui forment le wouzou d’une manière continuelle, sans les espacer.
15) Respecter l’ordre des gestes du wouzou.
16) Se laver le côté droit d’abord.
17) Après avoir terminé le wouzou, asperger la partie du vêtement recouvrant la partie intime, de quelques gouttes d’eau. Ceci pour éliminer les suggestions de Satan qui créent le doute sur la pureté du linge. Réciter ensuite la prière suivante : « Ô Dieu ! Fais de moi un de ceux qui se repentent et fais de moi un de ceux qui se purifient ».
LES GRANDES ABLUTIONS (ghousl).
Tout d’abord, se laver les mains jusqu’au coude à trois reprises. Si sur une partie du corps, il y a du sperme ou toute autre impureté, la nettoyer. Effectuer ensuite les besoins naturels (même s’il n’y en a pas nécessité).
Ensuite, se nettoyer (istindja) les parties intimes, puis faire le wouzou. Si l’on fait le wouzou dans un endroit où l’eau stagne, alors ne pas se laver les pieds tout de suite ; achever de se laver les pieds dans un autre endroit.
Dans le cas contraire, on peut se laver les pieds pendant le wouzou. Ensuite, verser de l’eau (à l’aide d’un récipient) d’abord sur la tête, puis sur le côté droit, et ensuite sur le côté gauche. Verser assez
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d’eau de façon à bien mouiller tout le corps, de la tête aux pieds. Tout en versant de l’eau, frotter le corps avec les mains. Faire la même chose une deuxième fois, c’est-à-dire verser de l’eau sur sa tête, puis sur le côté droit, et sur le côté gauche.
Si l’on craint qu’une partie du corps soit restée sèche, alors s’efforcer d’y faire venir l’eau tout en frottant.
Enfin, se laver une troisième fois en renouvelant ces gestes, de la tête jusqu’aux pieds [Tirmizi].
Note : Après avoir procédé à ces ablutions, on trouve dans certains hadiths qu’il faut s’essuyer le corps avec un linge, et dans d’autres qu’il ne faut pas le faire. En conséquence, que l’on choisisse de s’essuyer ou de ne pas le faire, ayons néanmoins la ferme intention de respecter la sunna.
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HYGIÈNE * ET VIE PRIVÉE.
Plutôt que la loi divine, ce qui est fondamental dans l’étude de la pensée théologico-juridique islamique est le fiqh, soit la science de la loi et de la jurisprudence qui régit le comportement personnel des musulmans et encadre leur engagement dans la société (Goldziher, 1920, p. 39) ou comme le formule Morabia (1993, p. 179) « l’effort de compréhension et de méditation humaines sur les devoirs du Croyant ».
Ce qui est stupéfiant dans le texte coranique en effet c’est qu’y figurent de très nombreuses prescriptions dans tous les domaines : faites ceci ou ne faites pas cela [alors que le grand rabbi nazaréen Jésus lui parlait surtout par paraboles.
Note de la rédaction. Le texte de l’évangile selon saint Luc 11, 37, qui suit, s’en prend à ceux qui sont spirituellement pharisiens et non aux musulmans salafistes puisqu’il n’y en avait pas à l’époque par définition.
« Pendant que Jésus parlait, un pharisien l’invita pour le repas de midi. Jésus entra chez lui et prit place. Le pharisien fut étonné en voyant qu’il n’avait pas fait d’abord les ablutions précédant le repas. Le Seigneur lui dit : « Bien sûr, vous les pharisiens, vous purifiez l’extérieur de la coupe et du plat, mais à l’intérieur de vous-mêmes vous êtes remplis de cupidité et de méchanceté. Insensés ! Celui qui a fait l’extérieur n’a-t-il pas fait aussi l’intérieur ? Donnez plutôt en aumône ce que vous avez, et alors tout sera pur pour vous.
— Malheur à vous, pharisiens, parce que vous payez la dîme sur toutes les plantes du jardin, comme la menthe et la rue et vous passez à côté du jugement et de l’amour de Dieu. Ceci, il fallait l’observer, sans abandonner cela.
— Malheur à vous, pharisiens, parce que vous aimez le premier siège dans les synagogues, et les salutations sur les places publiques.
— Malheur à vous, parce que vous êtes comme ces tombeaux qu’on ne voit pas et sur lesquels on marche sans le savoir ».
Alors un docteur de la Loi prit la parole et lui dit : « Maître, en parlant ainsi, c’est nous aussi que tu insultes ».
Jésus reprit : « Vous aussi, les docteurs de la Loi, malheur à vous, parce que vous chargez les gens de fardeaux impossibles à porter, et vous-mêmes, vous ne touchez même pas ces fardeaux d’un seul doigt.
— Malheur à vous, parce que vous bâtissez des tombeaux pour les prophètes, alors que vos pères les ont tués.
Ainsi vous témoignez que vous approuvez les actes de vos pères, puisqu’eux-mêmes ont tué les prophètes, et vous, vous bâtissez leurs tombeaux.
C’est pourquoi la Sagesse de Dieu elle-même a dit : je leur enverrai des prophètes et des apôtres ; parmi eux, ils en tueront et en persécuteront.
Ainsi cette génération devra rendre compte du sang de tous les prophètes qui a été versé depuis la fondation du monde, depuis le sang d’Abel jusqu’au sang de Zacharie, qui a péri entre l’autel et le sanctuaire. Oui, je vous le déclare : on en demandera compte à cette génération.
— Malheur à vous, docteurs de la Loi, parce que vous avez enlevé la clé de la connaissance ; vous-mêmes n’êtes pas entrés, et ceux qui voulaient entrer, vous les en avez empêchés ». Quand Jésus fut sorti de la maison, les scribes et les pharisiens commencèrent à s’acharner contre lui et à le harceler de questions ; ils lui tendaient des pièges pour traquer la moindre de ses paroles ».
Le mode de détermination des prescriptions coraniques est intéressant en lui-même : lorsqu’un problème se posait, Mahomet avait un rêve, Dieu lui apparaissait qui lui révélait la solution. Parfois le problème soulevé concernait directement le Prophète, et les solutions trouvées allaient toujours dans le sens de son intérêt (chapitre 33, verset 51). Ce qui fit dire à Aïcha, un jour, d’après un hadith recueilli par Boukhari : « Il me semble que ton seigneur se hâte de satisfaire tes désirs » (Livre 60, hadith numéro 311) ????????????
Il existe quelques autres contradictions dans ce Coran humain, mais comme elles ne portent pas sur des prescriptions ou des injonctions, elles ne soulèvent pas de problèmes majeurs sinon qu’elles portent quelque peu atteinte à la crédibilité du coran céleste incréé dont elles sont censées provenir.
Ce que beaucoup d’idiots utiles occidentaux ne savent pas (car en fait ce sont tous ces idiots utiles… qui ne savent pas… ce qu’il faudrait savoir, et non ceux qu’ils caricaturent ou dénoncent en prenant l’opinion publique à témoin), bien qu’ils soient d’invétérés donneurs de leçons ; c’est que le corpus constitué par le Coran EST TRÈS PRESCRIPTIF.
Dieu parle ordonne demande exige condamne ou plus exactement son prophète ordonne demande exige condamne, y compris dans les domaines les plus futiles (nourriture hallal ou pas).
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Dans le Coran (ou les hadiths) Dieu (ou son envoyé) ne s’exprime pas en subtiles paraboles genre parabole de la femme adultère, du mauvais intendant, du retour du fils prodigue, des ouvriers de la onzième heure ; ou du bon samaritain ; mais en des termes plus directs ou grossiers, bénit ou maudit, approuve ou désapprouve, exige demande ordonne, à tour de bras.
En outre, en plus d’être inimitable ou insurpassable (i’djaz) le Coran prétend être complet, prétend que rien ne manque dans son corpus.
Chapitre 6, verset 38 : « Nous n’avons rien négligé dans le livre ».
Chapitre 16, verset 89 : « Nous avons fait descendre le livre sur toi pour tout éclaircir ».
ET LA SPIRITUALITÉ DANS TOUT ÇA ?? TOUT CELA EST CONSTERNANT ! Jusqu’où Dieu et Satan ne vont-ils pas se nicher ?
* Il ne s’agit pas de négliger les principes de l’hygiène élémentaire, mais de souligner qu’avoir les mains rudes et calleuses parce qu’on a travaillé comme marin pêcheur ou vigneron ou berger…… importe moins qu’avoir le cœur pur parce qu’on respecte son prochain et que l’on pratique la philanthropie.
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LE PETIT CATÉCHISME MUSULMAN.
(D’après une association réunionnaise francophone).
Q : Quel est le nom de notre prophète ? 1)
R : Mouhammad Ahmad 2).
Q : Quel était le nom de son père ?
R : Son père s’appelait Abdoullah 3).
Q : Comment s’appelait sa mère ?
R : Sa dadi s’appelait Aminah 4).
Q : Comment s’appelait son grand-père maternel (nana) ?
R : Son grand-père maternel s’appelait Wahab.
Q : Comment s’appelait sa grand-mère maternelle (nani) ?
R : Sa grand-mère maternelle s’appelait Ban’ah.
Q : Lorsqu’on lit ou lorsqu’on entend le nom de notre prophète que faut-il dire ?
R : On doit dire sallal laahou aleihi wassallam 5).
Q : Quelle est la traduction de Salla Allah aleihi was sallam ?
R : Que la paix et la bénédiction de Dieu soient sur lui !
Q : Quels étaient ses surnoms ?
R : Ses surnoms étaient : « Amine et Saadique » (le pur et le véridique).
Q : Quelle est la date de naissance exacte du prophète ?
R : Notre prophète est né le lundi 12 du mois de Rabbiyoul Awoual, 20 avril 571 de l’ère chrétienne.
Q : À quel moment de la journée est né le prophète ??
R : Le prophète est né à l’heure de la salatoul fadjr, 6) à l’aube, avant le lever du soleil.
Q : Par qui fut-il nourri à sa naissance ?
R : Au début, notre prophète a bu le lait de sa mère. Puis, il fut allaité par Soweibia, et enfin il but le lait de Halima Saadiyah.
Q : Où est né le prophète ?
R : Le prophète est né en Arabie, dans la ville de Makkah Mokan’ama 7).
Q : Qui est venu jadis habiter la ville de Makkah ?
R : En premier, ce fut hazrat 8) Aadam 9) qui l’a construite pour adorer Dieu. Ensuite, hazrat Ibrahim 10) et hazrat Ismaïl 11) ont rénové la Kaabah.
Q : Quelle était la situation de ce bas monde à la naissance du prophète ?
R : La situation de ce monde était très mauvaise :
— On avait oublié les bonnes paroles.
— L’adoration d’un seul Dieu avait été abandonnée 12) et l’on adorait des statues de pierre, des arbres, des forêts, ou encore la lune, les étoiles, la mer… Etc. 13).
— On buvait de l’alcool 14).
— On jouait aux jeux de hasard 14).
— On enterrait les filles vivantes 15).
— On brûlait vives les veuves 16).
— On se mariait avec ses sœurs ou sa mère 17).
— On versait le sang pour des paroles insignifiantes 18).
— On dilapidait la fortune des orphelins 19).
— Les hommes et les femmes faisaient le taouaf de la Kaabah en état de nudité totale 20).
— Les chrétiens disaient qu’Issa (Jésus) était le fils de Dieu 21) et les juifs, eux, disaient qu’hazrat Ouzeïr 22) était le fils de Dieu.
— Le monde était en perdition.
— Ben voyons ! 23)
Q : Quel est le nom de la tribu dont est issu le prophète ?
R : Il est issu de la tribu des Couraïchites.
Q : Pendant combien de temps le prophète a-t-il bu le lait d’Halima Saadiyah ?
R : Le prophète a bu le lait de celle-ci pendant deux ans.
Q : Pourquoi est-ce hazrat Halima Saadiyah qui allaita le prophète ?
R : Parce qu’il était de coutume chez les Arabes de faire allaiter les enfants par des nourrices du village, afin qu’ils se portent bien physiquement et que leur langue soit bien nettoyée 24).
Q : À quel endroit hazrat Halima a-t-elle emmené le prophète ?
R : Elle l’a emmené à Taïf.
Q : Quel était l’âge du père de Mouhammad ?
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R : Le père du prophète avait vingt-quatre ans et mourut deux mois avant la naissance du Rassoul de Dieu 25).
Q : Où est-il mort ?
R : Il est mort à Madinan Mounawouarah 26).
Q : Quand et où mourut la mère du prophète ?
R : Sa mère mourut à Iwa qui est un village situé entre Makkah et Madinan. (La Mecque et Médine).
Le prophète était alors âgé de six ans.
Q : Qui eut responsabilité de s’occuper de lui, à la mort de sa mère ?
R : Après la mort de sa mère, hazrat Oummé Eyman et son grand-père Abdoul Mouttalib s’occupèrent de lui 27).
Q : Quel âge avait le prophète lorsque son grand-père mourut ?
R : Le prophète était alors âgé de huit ans et dix jours 28).
Q : Qui le prit en charge après la mort de son grand-père ?
R : Ce fut son oncle Abou Taalib.
Q : Quel âge avait-il à la mort de son oncle ?
R : Le prophète avait cinquante ans.
Q : Quel était le caractère du prophète avant la prophétie ?
R : Notre prophète était très intelligent, compréhensif et patient 29).
Q : Quel était le travail du prophète avant la prophétie ?
R : Il s’occupait des troupeaux et faisait aussi du commerce, ce qui l’a conduit à voyager deux fois vers la Syrie.
Q : Quel âge avait le prophète et qui l’accompagnait lors de son premier voyage en Syrie ?
R : Il était avec son oncle Abou Taalib et avait à ce moment-là douze ans deux mois et dix jours 28).
Q : Quel âge avait le prophète et qui l’accompagnait lors de son deuxième voyage en Syrie ?
R : Cette fois il était accompagné de Maïsara qui était l’esclave d’hazrat Khadidja. Il était alors âgé de vingt-cinq ans et partait en Syrie pour vendre des marchandises appartenant à Khadidja.
Q : Qui était Khadidja ?
R : C’était une riche et pieuse 30) veuve de Makkah.
Q : Avec qui le prophète a-t-il fait nikah 31) pour la première fois ?
R : Il fit nikah en premier avec hazrat Khadidja.
Q : Quel âge avait alors le prophète ?
R : Il avait vingt-cinq ans.
Q : Quel âge avait Khadidja ?
R : Elle avait quarante ans.
Q : Comment s’appelaient les parents de Khadidja ?
R : Son père s’appelait Khouweilid et sa mère Faatémah.
Q : Combien d’enfants le prophète et Khadidja eurent-ils ensemble ?
R : Ils eurent six enfants : deux garçons et quatre filles.
Q : Comment s’appelaient-ils ?
R : Les garçons s’appelaient Quassim et Tahir et les filles Zeinob, Oummé Koulsoum, Rouquaya et Faatémah. L’aînée fut hazrat Rouquaya.
Q : Avec qui se marièrent les filles du prophète ?
R : Zeinob épousa Abdoul Aass Bin Rabeiy. Oummé Koulsoum fut donnée en nikah à hazrat Osman qui, à la mort de sa femme, épousa Rouquaya, l’autre fille du prophète ; Hazrat Faatémah épousa hazrat Ali.
Q : Qui perpétua la descendance du prophète ?
R : Seule hazrat Faatémah eut des enfants pour perpétuer la descendance du prophète.
Q : De quelle union est né Ibrahim le fils du prophète et quand est-il mort ?
R : Cet enfant était celui d’hazrat Maria Quibtya 32) et il est mort en bas âge.
Q : Qu’appelle-t-on nabi ou rassoul ?
R : Le nabi ou le rassoul est une personne à qui Dieu Taala 33) a ordonné de transmettre ses lois aux hommes. C’est une personne qui ne commet pas de péché 34).
Q : Quelle différence y a-t-il entre un nabi et un rassoul ?
R : L’envoyé de Dieu qui a reçu un nouveau livre et une nouvelle religion s’appelle un rassoul. Celui qui prêche la religion d’un prophète venu avant lui s’appelle un nabi 35).
Q : Est-ce que quelqu’un peut devenir prophète par ses seuls efforts et ses seules prières ?
R : Non, personne ne peut devenir prophète de lui-même ; c’est Dieu seul qui le choisit.
Q : Combien de prophètes sont-ils déjà venus en ce monde ?
R : Plus de 124 000 prophètes sont déjà venus en ce monde 36)
Q : Qui fut le premier et qui fut le dernier des prophètes ?
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R : Le premier prophète fut hazrat Aadam (Adam) et le dernier fut hazrat Mouhammad (Mahomet).
Q : Qui est le meilleur de tous les prophètes ?
R : Le meilleur, c’est hazrat Mouhammad et il est supérieur à tous les autres.
BIEN ENTENDU 37).
Q : À quel âge le prophète a-t-il reçu la prophétie ?
R : Notre prophète a reçu la prophétie alors qu’il était âgé de quarante ans et un jour selon le calendrier lunaire.
Q : Quelle était la date exacte de cet événement ?
R : C’était le lundi 9 rabbiyoul awoual ; c’est-à-dire le 12 février 610.
Q : Où reçut-il la prophétie ?
R : Cela se passa dans la grotte de Hira, qui se trouve dans une montagne près de Makkah (La Mecque).
Q : Pourquoi le prophète se rendait-il dans cette grotte ?
R : Selon une habitude de hazrat Ibrahim 38), le prophète se rendait dans cette grotte pour adorer Dieu dans la solitude.
Q : Qui est venu lui annoncer sa mission de prophète ?
R : C’est hazrat Djibrail (Gabriel).
Q : Qui est Djibrail ?
R : C’est le plus grand de tous les anges de Dieu.
Q : Qu’est-ce qu’un farishta ou ange ?
R : Les anges sont des créatures de Dieu faites de lumière. Ils ne désobéissent jamais aux ordres de Dieu. Ce ne sont ni des hommes ni des femmes 39).
Q : En combien d’années le Coran a-t-il été révélé entièrement ?
R : Le Coran fut révélé en vingt-trois ans.
Q : Combien y a-t-il de parties (paras) 40) dans le Madjid Coran ? 41)
R : Dans le Coran, il y a 30 paras.
Q : Combien y a-t-il de chapitres (sourates) dans le Coran ?
R : Dans le Coran, il y a 114 sourates. 42).
Q : Que signifient les termes chapitre makki 43) et chapitre madani 44) ??
R : Les chapitres makki sont ceux qui ont été révélés avant l’émigration ; les chapitres madani sont ceux qui ont été révélés après l’émigration.
Q : Combien y a-t-il de versets dans le Coran ?
R : Dans le Coran, il y a 6 666 versets.
Q : Quelle est la récompense de la lecture du chérif 45) Coran ?
R : Pour chaque lettre qu’on lit, on aura la récompense de dix sawaabs 46).
Q : Que fit le prophète après avoir été envoyé par Dieu ?
R : Le prophète a commencé par inviter ses compatriotes à devenir musulmans. Cela se passait en cachette.
Q : Quelles furent les premières personnes qui acceptèrent l’islam ?
R : Parmi les femmes, ce fut Khadidja. Parmi les hommes libres, ce fut Abou Bakr Siddiq. Parmi les enfants, ce fut son cousin Ali. Parmi les esclaves de sexe masculin, ce fut Zaïd Bin Haritha et parmi les esclaves de sexe féminin, ce fut Oumm Aymane.
Q : Pendant combien de temps, le prophète a-t-il invité son peuple à se convertir en secret ?
R : Il dut inviter les gens à la religion de Dieu en secret pendant 3 trois ans.
Q : Combien de personnes se sont converties à l’islam durant ces trois années ?
R : Environ trente personnes.
Q : Qu’a fait le prophète après ?
R : Au bout de trois ans, le prophète a réuni toutes les familles couraïchites sur la montagne de Sala et les a invitées à se convertir publiquement à l’islam.
Q : Les Couraïchites ont-ils accepté les paroles de l’envoyé de Dieu ?
R : Non, ils l’ont persécuté et lui ont infligé de nombreuses épreuves.
Q : Combien d’émigrations a connues le prophète ??
R : Le prophète a connu trois émigrations. Par deux fois, il envoya des compagnons en Abyssinie et une fois il dut émigrer avec eux à Madinah.
Q : Quelles sont les conditions dans lesquelles se déroula la première émigration vers l’Abyssinie ?
R : Cela s’est passé lors de la cinquième année de la prophétie. Hazrat Ousman Rani commandait le groupe qui était composé de douze hommes et de quatre femmes.
Q : Quelles sont les conditions dans lesquelles se déroula la deuxième émigration vers l’Abyssinie ?
R : Cela s’est passé lors de la septième année de la prophétie. Le groupe était composé de 83 hommes et de 18 femmes.
316
Q : Quels étaient le nom et le titre du roi d’Abyssinie à l’époque ?
R : Il se nommait As’Hama et on l’appelait le Négus. Par la suite, il embrassa l’islam 47).
Q : Pourquoi les musulmans ont-ils émigré ?
R : Les infidèles de Makkah persécutaient les musulmans et les empêchaient de pratiquer l’islam. Ils ont donc été obligés de partir.
Q : Comment voulaient-ils anéantir les musulmans ?
R : Lors de la septième année de la prophétie, ces infidèles ont boycotté le prophète et sa famille.
Q : Où se sont réfugiés les musulmans et comment vécurent-ils cette époque ?
R : Loin de Makkah, il y avait une caverne célèbre du nom de Ché Ebé Abi Talib. Les musulmans y demeurèrent et se nourrissaient de feuilles qu’ils mâchaient 48).
Q : Combien de temps dura ce boycott, et quel âge avait alors le prophète ?
R : Ce boycott dura trois ans et le prophète était âgé de cinquante ans.
Q : Qu’appelle-t-on l’année de la tristesse ?
R : À la fin du boycott, Abou Taalib, l’oncle du prophète, qui avait beaucoup aidé les musulmans, mourut à l’âge de quatre-vingt-cinq ans. Cette même année, son épouse Hazrat Khadidja mourut, à l’âge de soixante-cinq ans. Ces deux pertes affectèrent énormément le prophète, c’est pourquoi l’on appela cette année « l’année de la tristesse » 49).
Q : Pourquoi le prophète se rendit-il à Taïf pour propager l’islam ?
R : Les gens de Makkah l’ayant repoussé, le prophète pensa qu’il aurait plus de succès auprès des habitants de Taïf.
Q : Où se trouve la ville de Taïf ?
R : Elle se trouve à 80 km de Makkah et elle est réputée pour son climat.
Q : Pendant combien de temps, le prophète a-t-il propagé 50) à Taïf et qui l’accompagnait ?
R : Accompagné de Zaïd Bin Aarihsa le prophète a prêché pendant un mois à Taïf.
Q : Quel en fut le résultat ?
R : Les gens de Taïf n’ont pas accepté et n’ont pas cru en notre prophète. Les responsables de la ville ont même envoyé de mauvais garçons lancer des pierres sur lui et le sang coula de ses pieds bénis.
Q : Quel fut le doah 51) que le prophète a fait pour les gens de Taïf ?
R : Le prophète a fait le doah suivant : « Ô ! Dieu, montre la voie à mon peuple, car ils ne me connaissent pas vraiment ».
Q : Qu’appelle-t-on le miraj ? 52)
R : De Makkah, le prophète s’est rendu à la Beitoul Mouquaddas 53) de Jérusalem où il rencontra tous les prophètes avec qui il fit deux « rakaates » de « salat nafil » 54). Il a ensuite visité les sept cieux, le paradis et l’enfer. Enfin, il eut la vision de Dieu 55). Après cela, il revint à Makkah.
Q : Le miraj s’est-il passé le jour ou la nuit ?
R : Le miraj s’est passé de nuit.
Q : Où se trouvait le prophète à ce moment-là ?
R : Le prophète se reposait chez Oumm Hani sa tante paternelle.
Q : À quelle date se passa exactement cet événement ?
R : Le miraj s’est passé le 27e jour du mois de radjab de la onzième année de la prophétie.
Q : Quel âge avait alors le prophète ?
R : II avait cinquante et un ans.
Q : Qui l’accompagnait lors de ce voyage ?
R : Les anges hazrat Djibraïl (Gabriel) et hazrat Mickael (Michel) ainsi que d’autres.
Q : Par quel moyen le prophète a-t-il fait ce voyage ?
R : De Makkah à la Beitoul Mouquaddas, le prophète chevauchait une monture ailée appelée Bouraq 56). De là, il se rendit aux cieux par une échelle du paradis.
Q : Qui fut le premier à croire au miraj et quel surnom lui a-t-on alors donné ?
R : Ce fut hazrat Abou Bakr et de ce fait Dieu lui a donné le surnom de véridique 57).
LES PIEUSES ET VERTUEUSES 58) ÉPOUSES DU PROPHÈTE.
Q : Combien d’années dura le nikah avec Khadidja et à quel âge mourut-elle ?
R : Leur nikah dura vingt-cinq ans et elle mourut à l’âge de soixante-cinq ans.
Q : Quel mois mourut Khadidja et où se trouve sa tombe ?
R : Elle décéda durant le mois de ramadan et sa tombe se trouve à un endroit appelé Hadjoun.
Q : Après la mort de Khadidja, quelles furent les épouses du prophète ?
R : II eut dix épouses dont voici les noms…
1 – Hazrat Saouda Binté Zama (RA) 2 – Hazrat Aïcha (RA) 3 – Hazrat Hafsa (RA) 4 – Hazrat Zeinob Binté Khouzeïmah (RA) 5 – Hazrat Oummé Salman (RA) 6 – Hazrat Zeïnob Binté Djahash (RA) 7 – Hazrat Djouweïrya (RA) 8 – Hazrat Oummé Habiba (RA) 9 – Hazrat Safia (RA) 10 – Hazrat Meïmouna (RA).
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MAWLAANAN Y. KAZI. Madrassah Taalimoud Deen. Saint-André. Île de La Réunion. FRANCE. Imprimé par O.K. Imprimerie – Saint-Denis – & 41 12 74.
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TAFSIR DE PIERRE DE LA CRAU.
Document intéressant à plus d’un titre que ce catéchisme, car très révélateur du lavage de cerveau n’ayant rien à voir avec la réalité qu’est tout catéchisme, qu’il soit juif, chrétien ou musulman. Un bourrage de crâne d’autant plus scandaleux qu’il est effectué par des adultes sur des enfants innocents, incapables de se défendre (psychiquement parlant).
Les musulmans (et les journalistes français avec) se demandent comment nous pouvons être assez mauvais pour attaquer ainsi le Coran. Eh bien la raison la voici (texte démarqué de ce que Robert G. Ingersoll a dit de la Sainte Bible en 1894).
Ce livre a interrompu et arrêté la marche en avant de l’espèce humaine. Ce livre a empoisonné les sources du savoir et détourné les énergies de l’Homme. Ce livre est l’ennemi de la liberté, ce livre est le pire soutien de l’esclavage. Ce livre a semé la haine dans les familles et les nations, alimenté les guerres, et appauvri le monde. Ce livre est la bastille des rois et des tyrans, il a réduit en esclavage les femmes et les enfants. Ce livre a fait des écoles des foyers de diffusion de l’erreur ou de la haine de la science. Ce livre a rempli le monde de sectes haineuses, cruelles, ignorantes, et guerrières. Ce livre a enseigné aux hommes à tuer leur prochain pour le salut de leur âme. Ce livre a inventé l’Inquisition (Hisba/Mihna), construit les geôles dans lesquelles les meilleurs ou les plus malheureux ont pourri, forgé les chaînes qui ont meurtri leurs chairs, dressé les échafauds où ils moururent. Exemples, les zandaqua ibn al-Mouqaffa (mort en 760), Bachar Ibn Bourd (mort en 785), Abou Nouwas, (mort en 810), Al Moutanabbi (mort en 965), Abou-l-Ala al-Maari, (mort en 1057), Al Souhraouardi (1154-1191).
Ce livre a fait perdre la raison et l’esprit à des millions de personnes. Ce livre a rempli les pistes africaines ou les cales des marchands d’esclaves dans l’Océan indien et fait de la chair humaine une marchandise. Ce livre a aussi été le pilier des bûchers qui ont vu périr des hérétiques comme Mansour Al-Halladj en 922. Ce livre a rempli les corps des hommes et femmes de démons ou de djinns. Ce livre a pollué l’âme des hommes avec sa croyance en l’enfer et en des souffrances éternelles.
Saint Coran chapitre VI verset 68. « Si tu vois des non-croyants commencer une conversation sur nos enseignements, éloigne-toi d’eux jusqu’à ce qu’ils abordent un autre sujet. Le Diable peut te faire oublier ce précepte, mais dès que tu t’en ressouviendras, éloigne-toi d’eux ».
Ce livre fait de la crédulité une vertu, et de la recherche scientifique le plus grand des crimes. Ce livre place le djihadiste ignorant et malpropre au-dessus du philosophe et du philanthrope. Nous combattons donc ce livre parce qu’il est l’ennemi de la liberté humaine, le plus grand obstacle sur la longue route du progrès humain.
Laissez-nous poser une question aux journalistes et aux intellectuels de notre pays : comment pouvez-vous être assez mauvais pour défendre ce livre ?
Comment la nation française qui fut jadis une grande nation (le pays des lumières et de Voltaire) a-t-elle pu tolérer un tel festival de bêtises ou de contrevérités, seuls les historiens nous le diront un jour ? (Peut-être qu’elle n’existe plus !). Si les esprits peuvent être des champs cultivés alors il en est aussi de « bornés », et ces champs de la médersa musulmane française de Saint-André de la Réunion sont apparemment aussi incultes que ceux des quartiers créoles catholiques les environnants (Champ Borné. Nous parlons d’expérience personnelle !). Et si c’est ce que l’on enseigne aux petits enfants dans les écoles réunionnaises, Diable, qu’est-ce que cela doit être à Mayotte, autre île française de l’Océan Indien dans le même cas ?
Pourtant comme le dit le Coran lui-même : « Quoi de plus impie, que de faire Dieu complice d’un mensonge ? Ou que celui qui dit « j’ai reçu de Dieu une révélation » alors que rien ne lui a été révélé » (Le saint Coran, chapitre 6, verset 93).
NOTES.
1) L’auteur fait bien de le préciser, car le nom de Mahomet n’apparaît que 4 fois dans le Coran (contre 12 fois pour Jésus qui est qualifié de messie ou d’esprit de Dieu). 5 fois si on y adjoint la forme Ahmed. Le nom est inexistant auparavant. Il s’agit du participe passif du verbe « louer ». Ce vocable n’est pas un prénom et ne put être donné comme tel. Il s’agit probablement d’un surnom – peut-être posthume, à l’instar du « Bien-aimé » donné à Jésus dans l’Épître aux Éphésiens ou l’Ascension d’Isaïe. Notons que qualifier Mahomet de prophète est aussi déjà une manipulation des esprits, à tout le moins un manque total d’objectivité ! Si l’historicité du personnage semble assurée, plusieurs milliards de non-musulmans ne le considèrent pas pour autant comme un envoyé de Dieu. En outre théologiquement parlant Mahomet n’a jamais prétendu fonder une religion nouvelle, il a seulement toujours prétendu rappeler aux Arabes (et en langue arabe donc), une religion ayant déjà été révélée, mais ensuite oubliée (dans cette partie du monde). Mahomet n’a toujours prétendu être que l’ultime aboutissement d’une lignée de prédécesseurs trahis.
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2) À l’origine Mahomet dans notre langue. Pourquoi ne pas traduire ?
3) Serviteur de Dieu. Même remarque.
4) Amine. Nombre des noms propres, ou communs, qui suivent, sont certes conformes à la langue ourdoue du Pakistan, mais en aucune façon à la nôtre ; et nous avouons humblement ignorer, par exemple, pourquoi l’auteur de ce catéchisme musulman a cru bon de maintenir (entre parenthèses) les termes dadi, nani, nana (si la traduction par mère, grand-mère, grand-père, ou mère, était suffisante). Du langage familier pour dadi ?? (Daddy ???). C’est d’ailleurs une des caractéristiques fréquemment rencontrées dans l’islam d’aujourd’hui, sa nature toujours étrange ou étrangère ; due notamment à sa notion de langue élue : Dieu et l’archange Gabriel ont parlé en arabe à l’exclusion de toute autre langue.
5) En abrégé « SAAW » ou au moins « RAA » voire « PSL ». Cette eulogie n’étant pas encore entrée dans notre législation, pour plus de clarté dans le débat, j’ai donc systématiquement éliminé ces formules.
6) Prière du matin. Comme il y a beaucoup de prières dans la journée d’un musulman pieux, tout comme dans la journée d’un moine chrétien par exemple ; quelle que soit la naissance, même la mienne (un 13 janvier) cela ne peut que correspondre à une heure de prière. Mais quelle importance à part pour l’escroquerie intellectuelle qu’est l’astrologie ?
7) La Mecque évidemment ! Pourquoi diable ce besoin de s’exprimer en une langue étrangère ?
8) Terme signifiant quelque chose comme « saint », ou « honorable ». L’honorable Abraham, etc.
9) Aadam… Adam évidemment. Pourquoi toujours ce refus de traduire ou d’adapter ?
10) Abraham. Toujours ce même refus d’acculturation.
11) Ismaël évidemment ! De toute façon, il n’y a rien de vrai là-dedans. Adam et Ève n’ont jamais existé, ce sont des mythes sumériens, ils n’ont donc jamais pu construire la Kaaba de La Mecque. Idem ou presque pour Abraham, personnage plus légendaire qu’historique et qui, de toute façon, n’a jamais mis les pieds à La Mecque… S’il a existé ! Quant à Ismaël, ancêtre prétendu des peuples arabes (ce qui est encore faux évidemment) voir la Bible.
12) Si ce que cette réponse insérée de force dans le cerveau de nos enfants implique… est que la religion d’Abraham d’Isaac et de Jacob a été la première religion de l’Humanité… ALORS C’EST ÉVIDEMMENT FAUX ET ARCHI FAUX ! Quelle était la religion de l’Humanité il y a 100 000 ans ? On en est réduit aux hypothèses !
13) Respecter la nature n’était pas une idée si bête que cela. On appelle ça l’écologie.
14) Boire un peu d’alcool ou jouer aux jeux de hasard n’est nullement répréhensible en soi SI ON LE FAIT SANS ABUS, SANS EXAGÉRER. De toute façon, cela vaut mieux que de lapider des femmes ayant eu des relations sexuelles hors mariage, ou de marier des fillettes de 6 ans à des hommes de 58 ans.
15) L’existence même de la première femme de Mahomet, Khadidja, prouve que le statut des femmes arabes antiques était meilleur que celui des musulmanes intégralement voilées, d’aujourd’hui. La femme arabe de ce temps-là était souvent lettrée (poétesse, comme la malheureuse mère de famille médinoise nommée Asma bint Marouane, que Mahomet fit assassiner) prêtresse (Kahina) ; et pouvait avoir des biens propres ne passant pas automatiquement sous la férule de son mari : cas de Khadidja justement. Les biens de la femme chez les Mecquois ne devenaient pas au mariage les biens du mari, la propriété absolue en restait à la femme. Il est vrai par contre que la société arabe d’alors vivait très mal la naissance des filles, un peu comme en Inde ou en Chine aujourd’hui. L’imbécile coutume de la dot ruinait les familles d’où évidemment la tentation de l’infanticide des filles. Notre religion à nous n’étant qu’une religion de la vérité, il ne saurait être question de nier qu’il y a peut-être eu À LA MECQUE ET AUX ALENTOURS des fillettes enterrées vives ; et qu’à chaque fois ce furent donc des crimes odieux, mais plus par malthusianisme qu’autre chose.
Ou alors il s’agissait de sacrifices humains ? Le verset 59 du chapitre 16 du Coran qui en parle est assez énigmatique. Il fait beaucoup penser à la pratique romaine liée au culte de la déesse Levana.
Il ne suffit pas en effet de naître dans une famille romaine, pour y être élevé : le nouveau-né doit être soulevé (tollere) de terre où l’a déposé la sage-femme, puis pris dans les bras par son père. Ce geste signifie que le père reconnaît son fils, s’engage à le nourrir et en même temps établit ses droits sur lui. Si l’enfant est une fille, le père ordonne seulement de l’alimenter. Dans le cas contraire, le nouveau-né est exposé sur la voie publique, étouffé ou simplement privé d’aliments. Un second rite marque l’entrée de l’enfant dans la vie sociale : neuf jours après sa naissance si c’est un garçon, huit jours après si c’est une fille (dies lustricus), l’enfant reçoit son nom.
N’oublions pas en outre que le « bienfaiteur » de l’Humanité que fut Mahomet a fait pire, en maints domaines (guerres, exécutions sommaires ou après simulacre de jugement, lapidation, pogroms antijuifs). Disons-le tout net, nous commençons à en avoir marre de tous ces bienfaiteurs de
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l’Humanité, qui ne font en réalité que compliquer un peu plus la situation entre nous autres, pauvres humains.
16) Nous ignorons à quel peuple fait allusion ce petit catéchisme musulman de Saint-André de la Réunion. L’atroce coutume consistant à obliger les veuves à se suicider sur le bûcher funéraire de leurs maris (sati) a effectivement existé (chez certains peuples, des Indes à la Gaule, voir César), mais pas chez les Arabes, du moins pas à notre connaissance. Nouveau mensonge inculqué aux enfants ??
17) Nous ignorons une fois encore à quel peuple fait allusion ce petit catéchisme français de Saint-André de la Réunion. Les Égyptiens et leurs pharaons ? Les peuples arabes, eux, semblent avoir eu au contraire des lois strictes en la matière, comme l’assimilation des enfants adoptifs à des enfants biologiques. Dans la société arabe de l’époque, on n’avait pas, par exemple, le droit de se marier avec la femme de son fils, y compris adoptif ; et cet interdit était si sévère que Dieu a dû envoyer l’archange Gabriel lui-même pour mettre les choses au point à ce sujet. En expliquant par exemple que Mahomet avait le droit d’épouser qui lui plaisait, même la femme de son fils (adoptif justement : Zaïd) après l’avoir obligé à s’en séparer. Voir chapitre 33, le chapitre des factions et les hadiths ad hoc correspondants. Encore un mensonge, un de plus ??
Chapitre 33, verset 4. « Dieu n’a pas fait… ni que vos enfants adoptifs soient comme vos propres enfants ».
Chapitre 33, verset 50. « Prophète ! Nous avons rendu licites pour toi les femmes à qui tu as donné leur douaire (dot), les captives [ou esclaves] que Dieu t’a données comme butin, les filles de ton oncle paternel, les filles de tes tantes paternelles, les filles de ton oncle maternel, et les filles de tes tantes maternelles, celles qui ont émigré en ta compagnie. Ainsi que toute femme croyante si elle fait don de sa personne au Prophète, pourvu que le Prophète consente à se marier avec elle : c’est là un privilège pour toi uniquement, à l’exclusion des autres croyants ». Mais, ajoute le verset 52 : « Il ne te sera plus permis désormais de prendre [d’autres] femmes ni de changer d’épouse, même si leur beauté te plaît – à l’exception des esclaves que tu possèdes ».
18) Situation inchangée de nos jours ! Voir les blasphèmes en terre d’islam, les fatouas, Jérusalem, la Sainte-Trinité, la Laïcité, la nature du Christ, etc., etc. Heureuse exception ? Le roi Henri IV pour qui Paris valait bien une messe.
19) Situation inchangée. Mais ne serait-ce pas plutôt là une allusion de Dieu au cas personnel du malheureux Mahomet ?
20) Enfin quelque chose de vrai ! Les païens de La Mecque faisaient en effet de la sorte le tour de la Kaaba, car ce n’est pas la nudité qui est un mal ou un péché, mais le regard que l’on peut jeter à un homme ou à une femme… nu…
L’homme n’a pas un corps, il est un corps, ou plus exactement l’union indissociable d’un esprit et d’un corps. La Nature (et donc Dieu nécessairement) nous a dotés d’une sexualité, celle-ci est aussi naturelle que le fait de respirer ou de boire un verre d’eau. Seul son abus est condamnable (pédophilie quand la partenaire a moins de dix ans par exemple, viols, etc.).
21) Situation inchangée. Les païens et les chrétiens pensent qu’une divinité peut avoir des enfants. Issa (Jésus) dans le cas des chrétiens.
22) Critique voilée du raciste Esdras ??
23) Commentaire de Pierre de La Crau évidemment ! Vous en doutiez ??
24) Que veut dire exactement : que leur langue soit bien nettoyée ? Ce n’est pas très clair ! Des aphtes sur la langue ou alors nationalisme linguistique et refus de tout métissage en ce domaine ? Nous, tout ce que l’on sait, c’est que la coutume des gens de La Mecque à l’époque était de placer les enfants chez des bédouins vivant à l’extérieur de la ville ; afin de leur apprendre le bon arabe, afin de leur apprendre à parler en bon arabe. Pourquoi pas ? Notre position à ce sujet a toujours été fort claire. Contrairement aux antiracistes, nous, nous sommes pour la diversité culturelle et le pluralisme linguistique, facteur d’enrichissement de l’Humanité. Toute langue qui meurt et disparaît, serait-ce le rhéto-romanche des Grisons suisses ou tel dialecte d’une tribu amazonienne, appauvrit l’Humanité. Prendre une langue A et une langue B, pour en faire une troisième, une langue C, tout en laissant précieusement subsister les deux premières ? Oui ! Mais prendre une langue A et une langue B, pour en faire une C faisant disparaître les deux autres, alors non à un tel anti racisme ! Non à un tel métissage linguistique ! Qu’on utilise dans ce cas une langue artificielle neutre comme interlingua ou l’espéranto pour communiquer !
25) Bien que non-arabophones les pieux musulmans du département français de La Réunion, auteurs de ce catéchisme, n’ont pas jugé utile de traduire. Nous ne sommes pas linguistes, mais cela doit vouloir dire quelque chose comme « envoyé de Dieu ».
26) Là encore même remarque à propos de ce méprisant refus de toute acculturation. Il doit s’agir de Médine.
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27) Celui qui a raconté à Mahomet enfant l’histoire des oiseaux magiques (voir le chapitre 105, le chapitre de l’éléphant).
28) Bigre ! Quelle précision pour un homme dont on ne connaît même pas de façon incontestable la date de naissance !
29) Qu’en pensent ceux qu’il a fait assassiner (des juifs de Yathrib/Médine à ses opposants de La Mecque) ?
30) Pieuse oui, mais pas dans la religion musulmane. C’était une païenne ou une hénothéiste, voire une croyante proche du judéo-christianisme, mais pas une musulmane. Du moins au début.
31) Encore une fois, ce méprisant refus de tout essai d’acculturation ou de traduction. Nikah doit signifier quelque chose comme mariage ou alliance.
32) Marie la Copte. Pourquoi ne pas traduire ? Il s’agissait d’une des esclaves sexuelles de Mahomet.
33) Doit signifier quelque chose comme « Le Très-Haut ».
34) Allusion à ce que l’on appelle la doctrine de l’impeccabilité (isma) des prophètes. Abraham n’a jamais péché de sa vie et c’était un petit saint. Osons l’affirmer avec assurance : notre conviction à nous est que Mahomet a quand même dû commettre quelques péchés dans sa vie. Il n’y a qu’à demander aux six à neuf cents juifs médinois jetés dans une fosse commune sur ses ordres (après condamnation à mort par le chef des Banou Aous nommé Sa'd ibn Mou'adh). Comment peut-on seriner de telles choses à des enfants ? Que Mahomet n’ait pas été un Hitler est certain, mais ce ne fut pas un ange non plus !
35) Tout messager (rassoul) est prophète, mais tout prophète n’est pas messager… Un messager (rassoul) est un prophète à qui a été révélé un livre c’est-à-dire une Loi rendant caduque celle qui existait auparavant. À la différence des nabis (ou prophètes mineurs), les rassouls ou messagers sont donc des prophètes majeurs. Les juifs ont d’ailleurs considéré au départ Jésus comme un simple prophète (nabi) alors qu’il a quand même aboli les deux lois majeures du judaïsme qu’étaient le Sabbat et le « divorce » ; ce qui prouve bien qu’il était un prophète majeur (messager-rassoul) et non un simple nabi (prophète mineur). Il l’a d’ailleurs confirmé lui-même en refusant le titre de prophète. Le mot nabi est un terme utilisé dans le Coran pour désigner de manière générale les prophètes mineurs du judaïsme tels que Daniel ou Isaac…
Il s’agissait donc de prophètes intervenant dans le cadre de la loi de Moïse, ils n’abolissaient pas les lois de Moïse, ne révélaient pas de nouvelles lois, mais étaient souvent des guides ou des conseillers des souverains du royaume d’Israël. Des conseillers divins en quelque sorte, pour empêcher ces derniers de sortir de droit chemin. Certains rois étaient d’ailleurs également eux-mêmes des prophètes comme David ou Salomon.
Par ailleurs, la manière dont ils recevaient leur révélation différait de celle des messagers, le plus souvent c’était en rêve comme dans le cas du prophète Daniel.
Le seul hic, c’est que je croyais justement que Mahomet n’était pas venu prêcher une nouvelle religion, mais en rappeler une antérieure, la hanifya, la religion du Dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob. Ce n’était donc qu’un nabi et non un rassoul ? Je n’y comprends plus rien.
36) Des prophètes comme s’il en pleuvait ! N’en jetez plus, la cour est pleine ! Au fait pourquoi 124 000 et pas 144 000 comme chez les Témoins de Jéhovah ?
37) Commentaire de Pierre de La Crau. Vous en doutiez ?
38) C’est évidemment faux et archifaux. Pourquoi tant de gens sont-ils persuadés qu’en matière de spiritualité le mensonge est nécessaire à la manifestation de la vérité ? Répétons-le encore une fois : Abraham n’a jamais pu venir à La Mecque pour deux raisons. La première est que son historicité est très douteuse et ressemble plus à une légende qu’à autre chose, la seconde est que, s’il a vraiment existé, il n’est jamais passé par là.
39) Il y en a quand même eu, capables de faire des enfants aux filles des hommes, de la façon la plus simple du monde, et non comme dans le cas de Marie plus tard, d’après la Bible (la Torah. Genèse 6, 1 à 4).
40) Vous avez dit paras ???
41) Terme signifiant sans doute quelque chose comme « le glorieux » « le radieux » (Coran).
42) Tiré de l’arabe sourate : chapitre. Pourquoi ne pas traduire ?
43) Mecquois. Pourquoi ne pas le dire tout simplement ?
44) Médinois. Même remarque !
45) Terme signifiant sans doute quelque chose comme « le noble » « l’illustre » (Coran).
46) Alors là j’avoue me poser des questions. Risquons une traduction : quelque chose comme « pouvoir ou grâce » ???
47) Énième mensonge ou contrevérité. Le négus d’Éthiopie se convertissant à l’islam ?? Cela se serait su !
48) La situation ne semble nullement avoir été si dramatique.
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49) Innombrables furent alors à La Mecque D’APRÈS LA TRADITION MUSULMANE les martyrs comme Soumaya ou Bilal auxquels on peut appliquer cette courte description des dix lectures sur le martyre de Paul Allard.
« D’une part on se trouve en face d’opinions contradictoires chez les historiens et les critiques, d’autre part, nous manquons de documents statistiques. L’auteur a su naviguer entre les récifs. Il s’est bien gardé d’emboîter le pas à ceux qui affirment qu’il y eut dix ou douze millions de martyrs : il n’a pas cru non plus pouvoir souscrire au jugement des critiques qui croient n’avoir rien fait s’ils n’ont tout ramené à un minimum. Avec la plus grande sagacité, il discute des témoignages qui nous ont été transmis sur chacune des persécutions, et, en ne faisant appel qu’à des documents d’une sécurité et d’une sincérité hors de doute, il conclut que « la thèse du grand nombre des martyrs est l’exacte traduction de la vérité historique ». Quant au chiffre précis ou même approximatif, « Dieu seul le connaît »… La mort de son oncle le chef du clan, Abou Talib, fut effectivement un coup dur pour Mahomet, car elle laissa les mains libres à ceux qui le considéraient comme un dangereux malade ; et notamment un autre oncle de Mahomet appelé Abou Lahab. Pour ce qui est de Khadidja notons simplement qu’il se remaria quelques semaines après sa mort avec une « femme » beaucoup plus jeune, c’est le moins que l’on puisse dire (une fillette de six ans : Aïcha).
50) Curieuse expression. Prêché serait peut-être le mot juste si l’on veut dire propager la foi. Il est bien dommage que l’islam soit encore et toujours une religion d’étrangers dans tous les sens du terme (non-citoyens ou citoyens, mais ne partageant pas les mêmes valeurs).
51) Comme chacun sait, le doah est une sorte de courte prière improvisée, une invocation.
52) Terme arabe signifiant ascension et à ne surtout pas confondre avec le voyage nocturne ayant eu lieu à cette occasion. Elle est aussi vraie que la résurrection du Nazaréen Jésus. Ce qui est tout dire !
53) L’auteur de ce texte a sans doute en vue, en écrivant cette réponse, la grande mosquée de Jérusalem ou dôme du rocher. Rappelons néanmoins que cette dernière n’existait pas encore à l’époque. Ce n’était que la décharge publique d’Aelia/Iliya.
54) Encore une avalanche de mots non traduits. On ne se trompera pas beaucoup en supposant que tout cela doit signifier quelque chose comme « des prières, des prières et encore beaucoup de prières » accompagnées d’un certain nombre de gestes rituels (prosternation, inclinaison du buste, etc.). La rakate est l’unité de base de la prière islamique. Chaque prière rituelle est composée de 2 à 4 de ces rakates. Une rakate est la succession, à partir de la station debout…
— d’une inclinaison du buste (jusqu’à ce qu’il soit à l’horizontale, les mains solidement posées sur les genoux) suivie d’un redressement, puis
— d’une prosternation (on pose le front et le nez sur le sol, les mains posées à plat de chaque côté du visage, les genoux et les pieds posés eux aussi au sol) suivie d’un redressement du torse (en restant agenouillé), puis
— d’une nouvelle prosternation identique à la précédente et d’un redressement.
Chacune de ces rakates est accompagnée de formules rituelles.
55) Au sens strict du terme, la mythologie musulmane parle non de voir, mais d’entendre. Mahomet n’aurait pas vu, mais entendu Dieu (en train d’écrire sur le livre de la Destinée).
56) Une sorte de cheval magique ou divin comme le Pégase de la mythologie grecque.
57) Dieu ne peut pas mentir, soit parce qu’il n’existe pas, soit parce que, s’il existe, il ne saurait dire n’importe quoi, n’est-ce pas John (Toland) ? Le surnom de « véridique » n’a donc certainement pas été donné à Abou Bakr par Dieu… mais par des hommes, Mahomet le premier.
58) LE HAREM DE MAHOMET.
Pieuses et vertueuses… Sont-ce bien là les adjectifs qui conviennent ? La polygamie ne peut en effet que pousser les épouses à se jalouser ou se dénoncer mutuellement. On trouve d’ailleurs dans le Coran un verset mettant en garde contre la déloyauté, la fornication, ou la prostitution, des femmes de Mahomet : « Ô vous, les femmes du prophète ! Celle d’entre vous qui se rendra coupable d’une turpitude manifeste, recevra deux fois le double du châtiment prévu » (chapitre 33, verset 30).
Où est la vertu dans tout ça ? Dieu (ou Omar ? ?) fut d’ailleurs obligé de stigmatiser le manque de dignité voire de retenue des femmes du prophète, en leur intimant l’ordre de ne plus parler à des hommes que derrière un rideau. « Ô vous les femmes du Prophète ! Vous n’êtes comparables à aucune autre femme… Ne vous rabaissez pas dans vos propos afin que celui dont le cœur est mauvais ne vous convoite pas. Usez d’un langage convenable. Restez dans vos appartements, ne vous montrez pas dans vos atours, comme le faisaient les femmes du temps du paganisme » (chapitre 33 versets 32-33).
L’entrée des hommes chez Mahomet fut d’ailleurs après cela interdite a priori : « Ô vous les croyants, n’entrez pas dans la demeure du prophète sans avoir obtenu la permission d’y prendre un repas, et attendu que ce repas soit préparé. Et retirez-vous après avoir mangé » (chapitre 33, verset 53). Dieu s’occupe vraiment de tout ! « Si vous avez quelque chose à demander (aux épouses du prophète),
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faites-le derrière un voile » (chapitre 33, verset 53 ». Et puisqu’apparemment les femmes de Mahomet se faisaient beaucoup désirer, se marier avec elles après répudiation ou veuvage, fut formellement interdit par Dieu (vous ne devez pas… vous marier avec ses anciennes épouses, ce serait de votre part une énormité devant Dieu. Chapitre 33, verset 53).
Où est la vertu dans tout ça ? Voir chapitre 66 versets 3 à 5 (Mahomet menace ses femmes de répudiation à cause de leurs complots) et aussi le chapitre 24 versets 4 à 17 (l’adultère d’Aïcha, mariée à Mahomet à l’âge de neuf ans. Elle devait être en avance sur son âge il n’y a donc pas eu pédophilie de la part du prophète, mais quand même ! Aïcha savait-elle vraiment ce qu’elle faisait ? De toute façon, seul le résultat compte à propos de cette accusation d’adultère, car comme le dit un célèbre adage « romain/rom » : la femme de César est au-dessus de tout soupçon, c’est-à-dire ne saurait être soupçonnée en aucune façon. Apparemment Dieu était du même avis à propos de la femme de Mahomet).
Où est la vertu dans tout ça ?
Du côté de la femme du fils adoptif de Mahomet ? Le malheureux fut contraint de la répudier (ainsi que nous avons pu le voir ci-dessus, note numéro 17) pour permettre à Mahomet de l’épouser. La chose fit beaucoup jaser à l’époque dans la communauté. Mahomet fit taire les critiques par une nouvelle « révélation divine ». Coran 33, 37-38 : « Lorsque tu as dit à celui que Dieu avait enrichi de ses grâces, et que tu avais comblé de biens [Zaïd] : garde ton épouse et crains le Seigneur, tu cachais dans ton cœur un amour que le ciel allait manifester ; tu appréhendais les discours des hommes alors que c’est seulement Dieu qu’il faut craindre [pauvre Mahomet]. Nous t’avons lié à elle, afin que les fidèles aient la liberté d’épouser les femmes de leurs fils adoptifs, après leur répudiation. Un précepte divin doit être exécuté. Le Prophète n’est pas coupable d’avoir usé d’un droit accordé par le Ciel, conformément aux lois divines établies avant lui. Les préceptes du Seigneur assurent le destin ».
Et hop, circulez, il n’y a rien à voir ! Mais où est la vertu dans tout ça ?
Du côté de Saouda ? Saouda était une excellente ménagère certes, mais il a suffi que son mari Chakrane ibn Amr se convertisse au christianisme, durant son exil en Éthiopie, pour qu’elle se croie autorisée à se mettre en ménage avec un autre homme. Car Mahomet n’était bien qu’un homme et pas un Dieu comme Jésus, non ? (Ou alors c’est que nous n’avons rien compris ni au christianisme ni à l’islam). Sans renier ce que nous avons déjà eu l’occasion d’écrire sur le caractère sain, normal, et naturel, de la sexualité ; disons tout net à nos amis musulmans que la vertu ne nous semble pas du tout de son côté, même si c’était une bonne cuisinière, mais bien plutôt du côté de femmes comme Camma ou Khiomara.
KHIOMARA.
Khiomara était la femme d’un notable de la région d’Ankara (Turquie) nommé Ortiagon. Polybe, qui la connut personnellement et admirait son héroïsme, nous a rapporté son histoire. Elle avait été capturée à l’époque où les Romains écrasaient les Galates. Cette femme d’une rare beauté se trouvait, avec une foule de prisonniers comme elle, sous la garde d’un centurion avide et débauché (un vrai soudard). Voyant que ses propositions infâmes la faisaient reculer d’horreur, il fit violence à la pauvre captive que les hasards de la guerre mettaient à sa merci.
Puis, pour pallier cette indignité, il flatta sa victime de l’espoir d’être rendue aux siens, et encore ne lui donna-t-il pas gratuitement cet espoir, comme eut fait un amant. Il fixa un prix, et, pour ne mettre aucun des siens dans la confidence, il permit à la captive de choisir un de ses compagnons d’infortune pour aller traiter de son rachat avec ses parents. Rendez-vous fut donné près du fleuve : deux amis de la captive, deux seulement, devaient s’y rendre, avec l’or, la nuit suivante, pour opérer l’échange. Par un hasard fatal au centurion, se trouvait précisément dans la même prison, un esclave de cette femme. Ce fut donc lui qu’elle prit pour cette mission et, à la nuit tombante, le centurion le conduisit hors du camp romain. La nuit suivante, se trouvent au rendez-vous les deux parents, et le centurion avec sa captive. On lui montre l’or ; pendant qu’il s’assure que la somme convenue y est, la femme ordonne, dans sa langue, de tirer l’épée et de tuer le centurion penché sur sa balance [d’après Plutarque « qui l’embrassait et lui faisait des caresses »]. On l’égorge, on lui coupe la tête, et, l’enveloppant dans sa robe, la captive va rejoindre son mari. Celui-ci, rescapé de la bataille du mont Olympe, était retourné dans sa maison. Avant de l’embrasser, elle fit rouler à ses pieds la tête du centurion, et comme il s’en étonnait et lui rétorquait : « il est bien de tenir sa parole » ; elle lui répondit : « Il est encore mieux qu’il n’y ait de vivant sur terre qu’un seul homme qui ait eu des relations avec moi ». Viol, vengeance, elle avoua tout à son mari ; et, tout le temps qu’elle vécut depuis (ajoute-t-on), sa conduite soutint jusqu’au dernier moment la gloire de cette action.
Plutarque. Des vertus des femmes. XX Camma. XXII Khiomara. Tite-Live. Histoire romaine XXXVIII 24.
Que l’on nous permette ici une nouvelle remarque de fond. La nature et donc Dieu nous ont dotés d’une sexualité, et en user doit être aussi naturel que de respirer ou se reposer. Mais la cohabitation
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de plusieurs femmes entre elles autour d’un même homme (comme le prône l’islam) peut-elle vraiment les pousser à la vertu et à la sérénité ? Nous en doutons fortement, il suffit de regarder l’Histoire ; comment peut-on affirmer de telles choses ?
Considérer d’office comme pieux et vertueux un certain nombre de personnages au comportement très critiquable (Abraham et sa femme ou demi-sœur Sarah, qu’il vend au pharaon par exemple) ; est une manie raciste des monolâtres, qu’ils soient juifs ou chrétiens, et donc aussi apparemment musulmans (isma). L’inventeur de la vaccination était-il nécessairement pieux et vertueux ?? Et, pourtant, il a été plus utile à l’Humanité que le Coran. La seule épouse du prophète à s’être montrée pieuse et vertueuse fut Khadidja, mais elle n’était pas musulmane. Elle était chrétienne (ou à tout le moins appartenait à une famille de hanifs hénothéistes, plus ou moins proches du judéo-christianisme !).
CONCLUSION : L’ISLAM EXPLIQUÉ AUX ENFANTS SANS IJTIHAD *, C’EST CONSTERNANT !
Il y a plus d’erreurs, de mensonges, ou d’approximations, que de vérité objective ! Quelle est l’utilité pour l’Humanité de transmettre à de jeunes esprits pleins d’avenir autant d’erreurs de traduction, ou de contrevérités, au kilomètre ? Est-ce moralement bien défendable ?? Totale liberté des adultes en matière de culte, objecteront les antiracistes !
Si une religion admet les sacrifices humains ou l’esclavage, alors on doit respecter ces pratiques, l’antiracisme, c’est ça !
Certes, oui, mais quid de la future liberté des enfants ? Y a-t-on seulement pensé ? Les enfants ne sont pas des choses. Ils ne nous appartiennent pas comme on peut avoir des meubles ou du bétail, et nous n’avons que des devoirs envers eux ; le premier de tous étant d’en faire des adultes meilleurs et plus heureux que nous, libres et épanouis, quels qu’ils soient, sans considération de sexe, de couleur, ou de lignage ; et à la foi en l’Homme éclairée par la Raison.
Nous sommes donc résolument pour la non-transmission aux jeunes générations de telles idées fausses et aliénantes ! Entre adultes consentants oui ! Vis-à-vis des enfants non ! Car transmis aux enfants, voici ce que cela donne quand ils deviennent adultes.
* Ijtihad = esprit critique à la manière des moutazilites.
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POSTFACE À LA JOHN TOLAND.
Les pseudo-druides à la filiation initiatique mirobolante (la fameuse et inénarrable tradition primordiale) s’étant multipliés depuis quelque temps ; il nous a paru nécessaire de mettre à la disposition de tout un chacun ces quelques notes, hâtivement rédigées un soir de novembre, afin de donner à nos lecteurs envie d’en savoir plus sur le vrai druidisme. Ce travail se veut honnête, mais en aucune façon neutre. Il s’est donné pour objectif de défendre ou de réhabiliter la cluto (renommée) de cette antique religion.
Rien ne remplace la méditation personnelle y compris sur les lais obscurs ou incompréhensibles parsemant ces livres et qui ont été insérés à dessein afin de vous obliger à réfléchir pour trouver votre propre voie. Ces livres ne sont pas des dogmes à suivre aveuglément et à la lettre. Ainsi que vous le savez sans doute, il faut se méfier comme de la peste de la lettre. La lettre tue, seul l’esprit vivifie. Rien ne remplace non plus l’expérience personnelle et c’est en cheminant que l’on trouve le chemin. Ne comptez donc que sur vos propres forces pour cette quête du Graal. Ce qui compte c’est l’attitude à adopter dans la vie et non les détails du dogme. Le druidisme a moins d’importance que la druidiaction. (Jean-Pierre Martin.)
Ces quelques feuillets griffonnés à la va-vite ne sont néanmoins en aucune façon LES LIVRES À LIRE SUR LE SUJET, ils n’en sont qu’un pâle reflet. La seule bibliothèque druidique digne de ce nom n’est pas en effet composée de seulement 12 (ou 27) livres, mais de plusieurs centaines.
Les quelques opuscules constituant cette mini-bibliothèque ne constituent pas un approfondissement et ne sont que quelques manuels destinés aux écoliers du druidisme. Ces résumés simplifiés destinés aux cours primaires de druidisme seront remplacés par des cours d’un niveau quelque peu supérieur, pour ceux qui voudront vraiment l’étudier de façon plus pertinente.
Cette petite bibliothèque est par conséquent un premier essai d’adaptation (destinée aux jeunes adultes) des diverses réflexions sur le savoir et la vérité druidiques, auxquelles ont abouti les premiers résultats de la nouvelle laïcité positive et ouverte, mondiale, en train de s’instaurer.
À la différence du judaïsme, du christianisme, et de l’islam, qui fourmillent littéralement, à propos de l’Être supérieur, d’anthropomorphismes puérils pris au pied de la lettre (fondamentalisme) ; notre druidisme, lui, n’en utilisera que très peu, et s’en tiendra, en ce domaine, au minimum absolu.
Mais pour parler de Dieu-ou-Diable nous allons bien être obligés, nous aussi, d’utiliser un langage, et donc un certain nombre de ces anthropomorphismes. Ou alors il faudrait totalement renoncer à en discuter.
Ce premier rayon de notre future bibliothèque consacrée au sujet a pour objet de montrer avec précision l’harmonieuse authenticité de la volonté et du savoir néo-druidiques. De montrer à quel point ses grandes thèses actuelles ont des racines anciennes, car la Mythologie, c’est notre Bible à nous. Les adaptations de ce bref exposé, exigées par les différences de culture, d’âge, de maturité spirituelle, de situation sociale, etc. seront à faire par les druides concernés (les vellèdes et les autres ?).
À noter cependant. Important ! Ce que ces quelques notes, hâtivement jetées sur le papier au cours d’une trop courte vie, ne sont pas (en vrac).
Une révélation divine. Une loi (toujours aussi divine). Une loi (profane ou laïque). Une loi (scientifique). Un dogme. Un Ordre ? Ce que je cherche surtout à faire partager c’est un état d’esprit, rien de plus. Ainsi que l’a très bien dit un jour notre vieux maître :
« NOTRE CIVILISATION N’A PAS LE CHOIX : CE SERA LE CELTISME OU CE SERA LA MORT » (P. Lance).
Ce que ces quelques notes, hâtivement jetées sur le papier au cours d’une trop courte vie, sont. Du rêve. Une aventure. Un voyage. Une évasion. Un cri de révolte contre la laideur morale et matérielle de cette société.
Une tentative d’atteindre à l’universel en partant du particulier. Un défi. Un obstacle fécond à surmonter. Une incitation à la réflexion. Un guide pour l’action. Une carte. Un plan. Une boussole. Une étoile polaire ou l’étoile du berger là-haut dans la montagne. Un feu la nuit dans une clairière ?
Ce que le rassembleur de ce noyau de bibliothèque, Pierre de La Crau, n’est pas.
— Un dieu.
— Un demi-dieu.
— Un quart de dieu.
— Un petit saint.
— Un philosophe (reconnu, officiel, et breveté ou patenté, comme ceux qui passent à la télévision. Sauf évidemment à prendre le terme en son sens originel, qui est celui d’amateur de sagesse et de savoir).
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Ce qu’il est : un homme, et rien de ce qui est humain ne lui est donc étranger. Pierre de la Crau n’a aucun pouvoir surhumain ou exceptionnel. Rien de ce qu’il a dit écrit ou fait ne saurait avoir de valeur intemporelle. Tout au plus espère-t-il que son extrême lucidité à propos de notre société et de son idéologie dominante (voir ses philosophes officiels, ses journalistes, ses masses médias et le politiquement correct des bien-pensants) ; ainsi que son non-conformisme, et son franc-parler, alliés à un solide esprit de contradiction (qui lui ont d’ailleurs valu pas mal de déboires ou d’avanies) ; pourront être utiles.
La présente petite bibliothèque pour débutant « contient la dose d’humanité exigée par l’état actuel de la civilisation » (Henri Lizeray). Elle n’est d’ailleurs qu’un rassemblement de matériau attendant l’architecte ou le maçon ? ad hoc.
Prochainement paraîtra toute une série de fascicules approfondissant ces éléments de base. Cette présentation différente du savoir druidique préservera néanmoins l’unité et la profonde harmonie entre ces divers exposés d’une seule et même philosophie.
Cas des traductions dans une langue étrangère (espagnol, allemand, italien, polonais, etc.)
Les fautes d’orthographe de grammaire de style, ainsi que l’écriture des noms propres, pourront être corrigées. Toute autre amélioration du texte pourra également être apportée si nécessaire (par ajout suppression ou modification, de détails) ; Pierre de La Crau ayant toujours regretté de ne pouvoir atteindre à la perfection en ce domaine. Mais à condition de n’altérer ni trahir en rien la pensée de l’auteur de cette compilation raisonnée. Toute illustration sans légende peut être changée. De nouvelles illustrations peuvent être apportées. Mais les illustrations ayant une légende ne devront être qu’améliorées (par substitution d’une bonne photo à un mauvais croquis par exemple ?)
Il va de soi que le coordonnateur de cette rapide et sommaire compilation raisonnée, Pierre de La Crau, ne prétend nullement avoir inventé (ou découvert) lui-même, tout ceci ; qu’il ne prétend en aucune façon que ceci est le fruit de ses recherches personnelles (sur le terrain ou en bibliothèque) ! Ce qui suit est en effet essentiellement issu des excellents ouvrages ou sites internet référencés en bibliographie et dont la consultation directe est fortement recommandée. Nous n’insisterons jamais assez sur notre volonté de ne pas être les hommes d’un livre (du Livre), mais d’au moins douze, comme les Fénianes d’Irlande, pour d’évidentes raisons d’ouverture d’esprit, la vérité étant notre seule religion.
Encore une fois, répétons-le ; le coordonnateur de la mise par écrit de ces quelques notes hâtivement jetées sur le papier ne prétend nullement avoir passé sa vie dans la poussière des bibliothèques ; ou sur le terrain, dans la boue des fouilles archéologiques de sauvetage ; afin d’exhumer des témoignages inédits sur le passé de l’Irlande (ou du Pays de Galles ou des Indes ou de la Chine ?)
PIERRE DE LA CRAU NE SE VEUT DONC EN AUCUNE FAÇON L’AUTEUR DES TEXTES QUI PRÉCÈDENT.
IL N’ESSAIE NULLEMENT DE S’EN ATTRIBUER LES MÉRITES. Il n’en est que l’éditeur ou le compilateur. Il s’agit pour la plupart de documents diffusés sur internet à quelques exceptions près. IL EN REVENDIQUE PAR CONTRE TOUS LES DÉFAUTS ET TOUTES LES INSUFFISANCES. Pierre de La Crau ne revendique qu’une chose, les fautes erreurs ou imperfections diverses de ce livre. Lui seul est à blâmer dans ce cas. Mais il fait confiance à ses contemporains (la nature humaine étant ce qu’elle est) pour les lui signaler avec vigueur.
Note retrouvée par les héritiers de Pierre de La Crau et insérée par eux à cet endroit.
Par respect pour l’Humanité, afin de gagner du temps, et ne pas lui en faire perdre, je vais faciliter le travail de ceux qui tiennent absolument à être du bon côté de la barrière en combattant (héroïquement bien sûr) afin de sauver le monde de mes griffes (mes idées ou mes penchants, mes tendances).
À ces courageux et implacables détracteurs, dont la profondeur de réflexion digne d’un marquis de Vauvenargues n’a d’égale que l’ampleur de la culture générale, digne d’un Pic de la Mirandole, je dis…
Prenez une feuille de papier, de traitement de texte si vous préférez, mettez-y par ordre d’importance les 20 caractéristiques qui vous semblent les plus graves, les plus odieuses, les plus haïssables, dans l’histoire de l’Humanité, depuis les hommes préhistoriques et Nabuchodonosor, selon vous… ET DITES-VOUS BIEN QUE JE SUIS TOUT LE CONTRAIRE DE VOUS, CAR JE LES AI TOUTES !
On a toujours besoin de boucs émissaires ! Hérétique au Moyen âge, sorcière à Salem au 17siècle, raciste au 20e siècle, lézard extraterrestre au 21e, je suis l’homme que vous aimerez haïr pour vous sentir supérieur.
Je suis au choix et dans l’ordre d’importance que vous voulez : athée, sataniste, stupide, mongolien, raciste, bestial, homosexuel, pervers, communiste, nazi, menteur pathologique, voleur, suffisant, psychopathe, un monstre d’orgueil faussement modeste, et que sais-je encore, à vous de voir.
Voilà, je ne peux pas faire mieux (pour vous aider à sauver le monde).
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[À la différence de mes contempteurs qui sont tous des gens bien, c’est-à-dire jeunes ou modernes et dynamiques, courageux, positifs, gentils, intelligents, instruits, ou du moins qui savent ; faisant preuve de beaucoup de recul dans leur méditation en profondeur sur les tendances lourdes de l’Histoire ; et sur le plan moral ou éthique : généreux, altruistes, mais pauvres évidemment, car donnant tout aux autres ; en outre profondément respectueux de la volonté de Dieu et de la Constitution…
Moi je suis un vieux réactionnaire ankylosé, conformiste, déconnecté de son temps, parano, schizophrène, incohérent, capricieux, jamais content, méchant, bête, n’ayant fait aucune étude ou du moins ignorant tout sur le sujet en question ; coutumier des jugements à l’emporte-pièce fondés sur des préjugés dénués de toute réflexion ; égoïste et riche ; suppôt de Satan et nazo-bolchévick ou stalino-hitlérien de nature. On disait hitléro-trotskiste quand j’étais jeune. En bref un criminel psychopathe dès le petit-déjeuner… ce qui me permet donc de penser ce que je veux, mes critiques aussi d’ailleurs, et d’essayer de le faire savoir à la cantonade].
Signé : le coordonnateur des travaux, Pierre de la Crau dit Hésunertus, chercheur en druidisme. Un homme à qui rien de ce qui est humain ne fut étranger. Chômeur, facteur, divorcé, sans domicile fixe, vagabond, contribuable, justiciable, électeur cocufié ? Un des huit milliards d’êtres humains ayant transité sur ce vaisseau spatial donc. Né sur la planète Terre le 13 janvier 1952.
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TABLE DES MATIÈRES.
Avertissement au lecteur
Le problème des sources
L’Arabie d’Abou Talib
La doctrine de l’I’djaz (du Coran)
Histoire de l’édition du Coran
Structure et qualité du raisonnement
Autres obscurités du texte
Les contradictions lourdes de conséquences
Les contradictions secondaires
Les écarts avec les données bibliques
Autres contradictions
Synthèse
Style du Coran
Critiques d’antan
Les versets tolérants
Les versets sataniques
Les versets abrogeant
La taqiya des versets abrogés
----------- ------------ -------------------------------------------------------------------- ---------
Le poids de la personnalité de Mahomet
Le problème de l’Isma
Les grandes lignes de la vie de Mahomet
La vie sexuelle de Mahomet
Conséquences sur la morale musulmane
Le cadre normatif
L’enfermement religieux
---------------------------------------------------------------------- ---- ---------------------------
La succession de Mahomet
Le kharidjisme
Les origines du chiisme
Rappel sur le chiisme
Le sunnisme
------ -- -------------- ----------------------------------------------------------- ------------------
La quintuple hiérarchisation des êtres humains
Les sous-hommes
Les kouffar et le koufr.
Les kouffar de type mouchriqoun
L’oxymore chrétien
Versets divers sur les incroyants
Conclusion
Ce que les Coran et les hadiths disent des juifs ou des chrétiens
Statut légal des polythéistes
Les gens du livre et la dhimmitude
Le Pacte d’Omar
Conclusion
Le complexe du dhimmi
La dhimmitude selon Bat Ye’or
Communautariologie comparée
Les musulmans de fraîche date
Les musulmans de base
Les bons musulmans
Les mosquées de la discorde
Les premières inquisitions
La première vraie Inquisition (Mihna)
Les hérétiques
Conclusion
Ceux qui choisissent carrément une autre religion
Le statut juridique des femmes
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Le sort des femmes du vaincu
L’esclavage sexuel
La polygamie subie
Les mariages temporaires
Répudiation ou divorce
Voile islamique
Prescriptions diverses
Héritage testament et témoignage
Travail ou femme au foyer
Sort dans l’au-delà
Conclusion
----- ------------- ----------------------------------------------------------- -----------------------
Les esclaves
L’esclavage
---------------------- --------------------------------------- ----------------------------------------
À chacun sa religion ou…
Une spiritualité loin d’être pacifique
Les premières guerres de religion musulmanes
Le petit djihad dans le Coran
Le petit djihad est donc un devoir
Hadiths appelant au petit djihad
Conclusion
La doctrine du petit djihad
Djihad offensif ou défensif ?
Moyens et conditions du petit djihad
Partage du butin
Le droit international selon l’Islam
La taqiya et les règles de la guerre
Trêves et traités
Dieu est le plus grand des fourbes
Taqiya et kitman
La stratégie de l’Ikhtilaf
Quelques exemples
Le problème des faux amis
Les citations tronquées
Un cas d’école
La fin justifie-t-elle toujours les moyens ?
--------------------- ------------------------------------ -------------------------------------------
Din Daoula et Dounya
Le problème des droits de Dieu dans la loi
Une religion envahissante
Le droit musulman
Une (contre) société holistique et théocratique
La lutte contre les dissidences
La lutte idéologique
---- ------------- ------ -----------------------------------------------------------------------------
Science et philosophie
L’islam de Cordoue
La fin de l’âge d’or de l’islam de Cordoue
Les causes profondes
La fermeture des portes de l’interprétation (Ijtihad)
L’islam et les minorités religieuses
Le génocide arménien
ANNEXES.
La journée d’un musulman pieux
La médecine du prophète
Hygiène et vie privée
Le petit catéchisme musulman
Tafsir de Pierre de La Crau
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Postface à la John Toland
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DU MÊME AUTEUR.
1. Citations des auteurs antiques parlant des Celtes ou des druides.
2. Généralités liminaires diverses sur les Celtes.
3. Histoire du pacte avec les dieux tome 1.
4. La Bible du druidisme : histoire du pacte avec les dieux tome 2.
5. Histoire du pacte avec les dieux tome 3.
6. Histoire de la paix avec les dieux tome 4.
7. Histoire de la paix avec les dieux tome 5.
8. Des Fénianes aux Culdées ou « la Grande science qui illumine » tome 1.
9. Textes apocryphes irlandais.
10. Des Fénianes aux Culdées ou « la Grande science qui illumine » tome 2.
11. Des Fénianes aux Culdées ou « La Grande science qui illumine » tome 3.
12. Les cent voies du paganisme. Science et philosophie tome 1 (mythologie druidique).
13. Les cent chemins du paganisme. Science et philosophie tome 2 (mythologie druidique).
14. Les cent chemins du paganisme. Science et philosophie tome 3 (mythologie druidique).
15. Le grand Camminus : éléments de théologie druidique tome 1.
16. Le grand catéchisme : éléments de théologie druidique tome 2.
17. Le plérôme druidique : anges djinns ou démons tome 1.
18. Le plérôme druidique : anges djinns ou démons tome 2.
19. Mystagogie ou théâtre sacré des Celtes antiques.
20. Poèmes celtes.
21. Le génie du paganisme celte tome 1.
22. Le complexe de Roland.
23. Au pied de la lanterne des morts.
24. Les secrets du vieux druide de la forêt ménapienne.
25. Le génie du paganisme celte tome 2 (liberté réciprocité simplicité).
26. Rhétorique : la trahison des clercs).
27. Petit dictionnaire de théologie druidique tome 1.
28. Des philosophes antiques au druide irlandais.
29. Judaïsme christianisme et islam : première partie.
30. Judaïsme christianisme et islam : deuxième partie tome 1.
31. Judaïsme christianisme et islam : deuxième partie tome2.
32. Judaïsme christianisme et islam : deuxième partie tome 3.
33. Troisième partie tome 1 : Qu’est-ce que l’Islam ? Bref historique de l’ensemble COR. HAD. SIR. et CHAR. FIQ. MAD.
34. Troisième partie tome 2 : Qu’est-ce que l’Islam ? Premières approches de l’ensemble COR. HAD. SIR. et CHAR. FIQ. MAD.
35. Troisième partie tome 3 : Qu’est-ce que l’Islam ? Les 5 vrais piliers de l’ensemble COR. HAD. SIR. et CHAR. FIQ. MAD.
36. Troisième partie tome 4 : Qu’est-ce que l’Islam ? Coups de sonde dans l’ensemble COR. HAD. SIR. et CHAR. FIQ. MAD.
37. Couiro anmenion ou Petit dictionnaire de théologie druidique tome 2.
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