au moins dans le chapitre 96 lui-même. Il n’en est rien, et pas davantage dans le reste du corpus coranique.Il s’agit donc d’un récit du genre littéraire des « Circonstances de la Révélation » (asbab al-nouzoul), reposant sur des « on-dit » (hadiths) des VIIIe et IXe siècles, à l’exclusion d’autres « on-dit ». Rien n’en subsiste même dans le plus ancien commentaire coranique que nous avons en entier.
Celui de Mouqatil ibn Souleïmane (mort en 767), pour les cinq premiers versets du chapitre 96, fournit de tout autres « circonstances », dans un cadre polémique mettant en scène un oncle du prophète réfractaire à la prédication de son neveu. Chaque fois que l’oncle païen présente une objection, un verset descend pour le contredire.
Le commentaire du Coran par Mouqatil fait partie des plus vieux tafsirs qui nous soient parvenus dans son intégralité ou presque. C’est un historien très décrié, mais John Wansbrough (1928-2002) en dit le plus grand bien dans son ouvrage intitulé « Études coraniques ».
Les détails diffèrent donc selon les récits traditionnels. Certains récits précisent que ceci se produisit durant son sommeil (et qu’il s’agissait donc d’un songe ou d’un cauchemar). C’est d’ailleurs également ce que disent certains chrétiens presque contemporains.
JEAN DE DAMAS OU LE DAMASCÈNE. Sur les Hérésies 100, 3.
Rappelons ici que, bien que chrétien, Jean de Damas (676-749) était arabe DONC PARLAIT L’ARABE.
« Beaucoup d’autres absurdités risibles sont rapportées dans cet Écrit [Le Coran], mais il se vante qu’il soit descendu sur lui venant de Dieu. Ce à quoi nous répondons :
— Qui témoigne que Dieu lui a confié ce message, ou qui, parmi les prophètes, a bien annoncé qu’un tel prophète devait venir ?
Et nous les mettons dans l’embarras quand nous leur faisons remarquer :
— Moïse a reçu la Loi sur le Sinaï, à la vue de tout le peuple, quand Dieu apparut dans la nuée, le feu, les ténèbres et la tempête ; et tous les prophètes, depuis Moïse, avaient tour à tour annoncé que le Christ devait venir, que le Christ est Dieu et que le fils de Dieu arriverait en prenant chair, serait crucifié, qu’il mourrait et ressusciterait ; et que c’est lui qui jugerait les vivants et les morts.
Mais quand nous disons :
— Pourquoi votre prophète n’est-il pas venu de la même façon, avec d’autres pour lui servir de témoin, et pourquoi Dieu, qui a donné la Loi ainsi à Moïse, aux yeux de tout le peuple, sur une montagne fumante ; ne lui a-t-il pas transmis de même le message dont vous parlez, en votre présence, pour asseoir votre certitude ?
Ils répondent que Dieu fait ce qu’il lui plaît.
— Cela, disons-nous, nous le savons bien nous aussi, mais nous vous demandons seulement comment l’Écriture a été révélée à votre prophète.
Ils répondent alors que c’est durant son sommeil que cette Écriture est descendue sur lui.
Pour nous moquer d’eux, nous leur répondons alors :
— Puisqu’il a reçu l’Écriture durant son sommeil, sans s’en rendre compte, l’adage populaire lui convient parfaitement (qui stipule…
Et nous leur demandons alors à nouveau :
— Puisque lui-même vous a ordonné, dans vos Écritures, de ne rien faire ou de ne rien recevoir sans témoins ; pourquoi ne lui avez-vous pas demandé, toi le premier : prouve à l’aide de témoins que tu es prophète, et que tu es bien envoyé de Dieu ; et quel Écrit témoigne en ta faveur ?
Gênés, ils restent alors silencieux, et avec raison nous leur rétorquons :
— Puisqu’il ne vous est pas permis d’épouser une femme, ni d’acheter, ni d’acquérir, sans témoins, et que vous n’admettez pas de posséder, ne fût-ce que des ânes, ou du bétail, sans un témoin ; vous ne prenez donc femme, biens, ânes, et le reste, que devant témoins ; mais la vérité d’une croyance et la sainteté d’un message par contre, vous les acceptez sans un seul témoin ! Car celui qui vous a transmis ce message ne possède de garant d’aucun côté, et l’on ne connaît aucun prophète qui ait témoigné en sa faveur par avance. Pire encore, ce message, il l’a reçu durant son sommeil ! »
Si nous comprenons bien saint Jean Mansour dit le Damascène, le Coran aurait donc été révélé à Mahomet à l’occasion d’un ou plusieurs rêves…
On peut ajouter à ce témoignage certains de ceux qui concernent les signes précurseurs ayant alors affecté Mahomet selon la tradition musulmane elle-même, dont on voit mal ce qui permet de les séparer du reste, et notamment ceux qui concernent les songes prémonitoires, que les érudits de l’islam appellent « les songes véridiques » (rou’ya sadiqa).
Les songes véridiques c’est un quarante-sixième de la prophétie (al-Boukhari, 6472 ; Muslim, 4201).
Tout ce que Mahomet voyait en songe se réalisait ensuite ou s’expliquait avec une clarté semblable à celle de l’aurore.
Sahih Boukhari tome 9, livre 87, hadith numéro 111.