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LE COMPLEXE DE ROLAND.
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REGAIN, RÉSURGENCE ET RENAISSANCE, OUI !
RÉSURRECTION À l’IDENTIQUE, NON !
« C’est en suivant le cheminant que l’on trouve le chemin ».
La comparaison est un processus mental fondamental : regrouper certains faits dans des catégories communes, mais aussi observer les différences. De tels liens et relations sont à la base de la pensée et de la science. Sans cela il n’y a que des faits isolés sans liens entre eux. C’est donc sur la base de la comparaison que naissent les généralisations, les interprétations et les théories. La comparaison crée de nouvelles façons de voir et d’organiser le monde.
Le comparatisme religieux est donc vieux comme le monde. Hérodote en faisait déjà. En ce qui concerne les religions antiques, cette démarche intellectuelle a produit de nombreux ouvrages rangés dans les rayonnages « mythologie comparée » depuis Max Muller (1823-1900).
En ce qui concerne les religions non antiques il en va tout autrement.
Chaque religion s’est bien entendu comparée à celles avec lesquelles elle était en concurrence, mais d’abord pour les dénigrer ou affirmer sa supériorité.
Les premiers éléments d’un début de comparatisme religieux plus objectif se trouvent actuellement éparpillés sous l’étiquette « dialogue religieux » et proviennent généralement des religions se définissant elles-mêmes comme monothéistes vu leur extension de par le monde. Le tout dans un but apologétique ou missionnaire évidemment. D’où problème.
Nous trouvons également des réflexions utiles dans les cercles relevant plus ou moins de l’athéisme, mais elles sont…
— Soit détaillés, et focalisés sur une religion particulière.
Soit plus générales, mais assez sommaires.
Et relèvent d’ailleurs aussi le plus souvent de l’histoire des religions, mais le tout dans une optique non croyante.
De grands noms jalonnent cette histoire depuis William Robertson Smith (religion des Sémites) jusqu’à Mircea Eliade en passant par Émile Durkheim.
D’autres auteurs ont ouvert de nombreuses pistes en ce domaine.
Notre idée est D’EN PROLONGER UN CERTAIN NOMBRE EN ALLANT ENCORE PLUS LOIN DANS CE COMPARATISME RELIGIEUX (élargissement du champ des recherches anthropologiques, approfondissement des soubassements psychologiques, fin des survalorisations, décolonisation, antiracisme nouvelles hypothèses…) ET EN REPRENANT LE FIL INTERROMPU DE LEUR PASSIONNANTE QUÊTE DU GRAAL INACHEVÉE CAR l’ancien druidisme est un peu comme le célèbre conte du Graal de Perceval et de Gauvain.
C’est une histoire inachevée, qui s’interrompt brutalement après les 9000 premiers vers. Notre projet est d’en écrire la suite. Une continuation disait-on à l’époque. Ces petits cahiers destinés aux futurs très-sachants, se veulent à la fois une continuation et une mise en garde. Une continuation ou un ultime prolongement, car ils ont été composés à la manière des théologiens (chrétiens, bouddhistes, hindouistes, musulmans, etc.) du moins dans ce qu’ils avaient, tous, de meilleur (des éléments souvent d’origine païenne en fait). Une des fonctions de l’imitation a toujours été, en effet, dans les littératures orales populaires, de répondre à l’attente du public, frustré par l’interruption de la création originelle [en l’occurrence la philosophie druidique]. À cette attente a répondu au Moyen âge, la technique narrative cyclique de la poésie épique des chansons de geste ou celle des Romans de la Table ronde.
La voie du pastiche est celle qui consiste à enrichir l’original en le complétant par des touches successives, en développant des détails à peine esquissés, ou en interprétant ses ombres. Et ça, la pensée de nos ancêtres en avait bien besoin !
Mais cette compilation raisonnée, due à la plume de Pierre de La Crau, est aussi en un sens une mise en garde, car il ne fut jamais question, néanmoins, pour le maître d’œuvre de ce travail collectif, d’avaliser tel quel et sans réserve aucune, l’ensemble de ces doctrines. Il a au contraire souhaité, par toutes sortes de moyens littéraires (retournement des arguments, contre-pieds, ou autres…) en faire ressortir les aspects souvent négatifs, néfastes, aliénants ou obscurantistes ; et si ce texte peut sembler parfois, rendre indirectement hommage à la capacité de réflexion des diverses Écoles
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théologiques actuelles, chrétiennes, musulmanes, juives, ou autres, c’est involontairement ; car son but est bien de tout faire, pour leur arracher, des mains, le monopole du discours sur le divin (voir à ce sujet les propos d’Albert Bayet), quitte à achever de les discréditer définitivement aux yeux du public. Sauf en ce qui concerne ce qu’elles ont emprunté de mieux au paganisme, évidemment, et qui est énorme ; car dans ce dernier cas, il s’agit, rappelons-le encore une fois, de la part du maître d’œuvre de cette compilation, d’une réadaptation à notre monde, des réflexions de ces apprentis théologiens (le dieu des philosophes, l’Ahoura Mazda, l’immortalité de l’âme, les hommes-dieux, les fils de dieu, le messie Saoshyant, la trinité, le taouaf, les sacrifices, la vie après la mort, sans compter les chérubins le paradis, etc.)
En d’autres termes non pas de l’Histoire, mais une fiction historique, d’après les œuvres de… voir la bibliographie à la fin. En ce sens, notre « imitation » n’est qu’un retour aux sources. En bref un hommage.
« Le Druidisme » est une revue indépendante (indépendante de toute association religieuse ou politique) et qui n’a qu’un seul but : la recherche théorique ou fondamentale en matière de néopaganisme. La double question à laquelle essaie de répondre cette revue d’études théoriques pourrait se résumer ainsi :
« Que pourrait être ou que devrait être, un néo-druidisme actuel, moderne et contemporain ? »
Le « Druidisme » est une revue néopaïenne, strictement néopaïenne, héritière de tous les mouvements authentiques (c’est-à-dire non chrétiens) qui se sont succédé depuis deux mille ans, l’héritière indirecte, mais l’héritière, quand même !
À propos de notre tradition de référence ou de notre filiation intellectuelle soulignons que si les « poètes » du royaume de Domnall mac Muirchertach Ua Néill avaient toujours les imbas forosnai, les teimn laegda ainsi que les dichetal do chennaib 1) à leur répertoire (cf. la conclusion de l’histoire du pillage du château de Maelmilscothach, d’Urard Mac Coisé, un poète mort au XIe siècle), ils étaient peut-être déjà chrétiens quand même depuis plusieurs générations. Il est vrai que ces pratiques (imbas forosnai, teimn…) étaient formellement interdites par l’Église, mais qui sait, il y a eu peut-être des accommodements analogues à ceux des astrologues ou alchimistes du Moyen Âge.
Quoi qu’il en soit notre « Druidisme » est aussi une volonté, la volonté de se rapprocher, au maximum, du druidisme antique, tel qu’il fut (scientifiquement parlant). La volonté aussi néanmoins de moderniser ce druidisme, un retour total au druidisme antique étant exclu (il serait de toute façon impossible).
Exemples de modernisation de ce druidisme païen.
— Abandon aux associations laïques du côté culturel (médecine, poésie, mathématique, etc.). Principe de séparation de l’Église et de l’État.
— Spécialisation par contre dans la spiritualité celtique, ou païenne en général, l’histoire de la religion, la philosophie et la métapsychique (dite aujourd’hui parapsychologie).
— Utilisation dans certains cas du vocabulaire actuel (Église, religion, baptême, et ainsi de suite).
Un juste milieu est évidemment à trouver entre un retour total au druidisme antique (fondamentalisme ou intégrisme) et une modernisation radicale trop révolutionnaire (plus de saie).
L’AAP (athée agnostique panthéiste) celte ayant accepté de cosigner cette petite bibliothèque *, dont il n’est que le rassembleur, le druide Hesunertus (Pierre de La Crau), ne se considère pas comme l’auteur de cet ouvrage collectif. Mais comme le simple porte-parole de l’équipe l’ayant composé. Pour ce qui est des autres sources de cet essai sur le druidisme, voir les remerciements de la bibliographie.
* Ce petit camminus est néanmoins important aussi pour les jeunes… de 7 à 77 ans ! Mantalon siron esi.
1) Do ratath tra do Mael Milscothach iartain cech ni dobrethaigsid suide sin etir ecnaide 7 fileda 7 brithemna la taeb ogaisic a crech 7 is amlaidsin ro ordaigset do tabairt a cach ollamain ina einech 7 ina sa[ru]gad acht cotissad de imus forosnad [di]chetal do chollaib cend 7 tenm laida .i. comenclainn fri rig Temrach do acht co ti de intreide sin FINIT.
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AUTANT EN EMPORTE LE VENT.
Réflexion sur les vents d’antan qui soufflent dans le sud (humour) et sur le fait qu’un des dieu-ou-démons mineurs était le Circius ou Cercius, le vent de Cers.
Il y a cinq grandes sortes de dieu-ou-démons dans le panth-éon ou plérôme druidique (cinq grandes fonctions si l’on préfère).
PREMIÈRE SORTE DE DIEU-OU-DEMONS : LES FORCES DE LA NATURE (la pluie, le vent, et ainsi de suite).
La vie de l’Homme dépend de la fécondité de sa mère la nature. C’est évident sauf aux yeux des judéo-islamo-chrétiens. Or il suffit d’un rien, d’une grêle, d’un coup de froid sur les fleurs du printemps, d’une pluie qui tarde à venir, pour que la disette s’installe, avec mort des troupeaux et des hommes.
Les grands dieu-ou-démons préceltiques sont essentiellement à l’origine des êtres plus que naturels avons-nous dit : la lumière, l’énergie, la chaleur…
Ils sont alors conçus comme des êtres lumineux (leur nom aryen l’indique : deiwos) et la lumière était leur royaume, le soleil leur demeure. Taran/Toran/Tuireann fait penser au tonnerre, donc à la pluie pendant l’orage. Le nom de Lug lui-même (Lugos) est un nom en rapport avec l’idée d’éclair ou de lumière.
Ces êtres plus que naturels, l’homme préhistorique les entrevoit dans une nature aussi incompréhensible dans la régularité de son mécanisme que dans ses soubresauts (épidémies, orages, inondations).
Il se les représente à son image, mais en plus puissants (plus intelligents, et doués d’une vie sans fin). Il conçoit une société divine à la ressemblance de la sienne.
Il ne faut pas oublier que nos ancêtres vivaient dans un monde ne subissant pas encore la maîtrise de l’homme ; et faisaient donc en lui l’expérience de la présence d’une multitude de puissances intervenant pour perturber ou détruire, ou pour construire et maintenir, et pouvant donc ainsi influencer sa vie.
Ce sont là les puissances auxquelles l’homme a eu le plus immédiatement affaire. Aussi prennent-elles une place relativement importante dans la mythologie et les religions populaires.
L’exemple du vent du nord appelé Circius (vieux français Cers) en est l’illustration la plus flagrante.
Il y a ainsi des dieu-ou-démons aériens ou « célestes » (les devoi comme Circius, le Cers) et aussi des dieu-ou-démons souterrains, à ne pas confondre avec les divinités des « Autres Mondes » ; ni non plus avec les forces négatives, et que les croyances populaires ont mythifiées comme des vouivres anguipèdes, gigantesques (Andernas sur le Continent, Fomore en Irlandais).
Le polythéisme druidique antique se fonde sur des antagonismes ou dualismes relatifs : puissances de la lumière contre puissances des ténèbres, puissance de l’ordre opposant une résistance aux puissances du mouvement et de la vitalité.
Ces deux groupes de forces de la nature s’opposent mutuellement, et la vie des hommes est soumise à leurs influences contradictoires. Les relations avec les forces négatives dites souterraines sont évidemment difficiles. Elles sont analogues à celles que peuvent entretenir des ennemis qui en arrivent de temps à autre à des escarmouches ; mais qui peuvent aussi à l’occasion décider d’un armistice, ou d’une alliance. Cas de la tribu de la déesse-ou-démone Danu (bia) et des vouivres anguipèdes gigantesques.
Beaucoup de mythes mettant ainsi en cause les dieu-ou-démons, ne sont que l’expression imagée de ce que l’Homme ressent devant certains éléments du monde qui l’entoure. Les phénomènes naturels portent en eux des symboles que saisissent intuitivement – et poétiquement – les hommes des champs, les hommes des bois, et les hommes de la mer. La lune, c’est la nuit doc la mort, mais c’est aussi la régénération périodique, elle est maîtresse de la mer, de la pluie. L’arbre, c’est la vie par excellence, il est l’axe du monde, il unit la terre au ciel, il porte en lui l’espoir de la résurrection puisque, lorsqu’il perd ses feuilles, elles repoussent au printemps. L’eau, c’est la matrice universelle, la source de toutes les virtualités possibles, elle est purificatrice : ce que l’on y plonge retrouve l’état originel et peut renaître, lavé de toute souillure.
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Les scènes de la nature, qu’il s’agisse du vol des oiseaux, du comportement des animaux, de la germination des céréales, des couleurs du ciel, de la forme des nuages ; suggèrent à l’homme des âges anciens des réalités d’un autre ordre. Il les transpose d’instinct, en termes de théophanie. Et il y a aussi des mythes qui naissent des phénomènes d’apparence surnaturelle, généralement illusoires, qui se produisent la nuit.
La crainte qui s’empare de l’homme dans les ténèbres lui fait prendre le moindre bruit du vent dans les branches, le moindre battement d’ailes d’oiseau de nuit, le plus petit cri de rongeur agressé par un prédateur ; pour des plaintes, des appels, des ricanements, des menaces. Les formes vagues qu’il entraperçoit ainsi à la lueur des étoiles, pour peu qu’elles bougent, lui paraissent des êtres fantastiques appartenant à un autre monde.
Les savants de l’Antiquité celtique ne pouvaient pas conduire cette recherche des causes de la même manière dont nous le faisons aujourd’hui pour deux raisons.
La première, c’est que le monde qui les entourait alors était sensiblement différent de celui où nous vivons, il était moins artificiel et plus riche de signification. La seconde, c’est qu’eux, les hommes, avaient des lois du Bitos ou de l’univers une connaissance nécessairement inférieure à la nôtre, et pouvaient donc de la sorte croire possibles des choses que nous savons, nous, aujourd’hui, impossibles. Les mythes à l’origine étaient nécessairement très simples et se réduisaient à une croyance en un fait précis. Par exemple : il y a dans le ciel un dieu-ou-démon qui fait résonner le tonnerre en frappant avec un maillet.
Quand des grondements de tonnerre résonnaient au-dessus de leur tête, les anciens très-sachants en déduisaient l’existence d’une divinité céleste aux colères redoutables ; ils ne faisaient pas preuve d’illogisme ou de prélogisme, c’était tout simplement qu’ils ignoraient ce que sont les phénomènes électriques.
LA MAGIE DES LIEUX (les dieu-ou-démons strictement locaux ou topiques – du grec topos = local).
Qui n’a pas éprouvé en se promenant dans certains endroits d’étranges impressions d’angoisse… ou de détente ?
« Il est des lieux où souffle l’esprit… Il est des lieux qui tirent l’âme de sa léthargie, des lieux enveloppés, baignés de mystère, élus de toute éternité pour être le siège de l’émotion religieuse… »
écrivait un célèbre auteur du début du XXe siècle à propos de la Colline de Sion qui n’a pourtant que 542 m de hauteur.
Ne soyons pas surpris de voir l’homme actuel incapable de percevoir la présence de ce qu’on peut appeler des « fées ». Tous les vrais Celtes savent bien que, comparée aux animaux, notre perception du réel est en effet très limitée.
Les hirondelles, les oies sauvages et beaucoup d’oiseaux migrateurs ont un système de guidage à longue distance dont l’efficacité paraît surnaturelle ! Le chien possède un odorat très supérieur au nôtre ! Beaucoup d’animaux voient dans l’obscurité des objets qui nous échappent. Et dans la Bible, l’ânesse de Balaam voit l’Ange de l’Éternel, mais il faut que Dieu ou le Démiurge ouvre les yeux de Balaam lui-même pour qu’il puisse le voir (Nombres 22-32).
Les occultistes appellent élémentals ces émissions d’ondes surnaturelles. Certaines matres ou fées du druidisme sont la personnification de ces ondes vivaces et profondes. À l’image des forces de la nature se sont ajoutées les images des déesse-ou-démones mères (les fées apparaissent souvent par trois). Il ne faut pourtant pas les confondre.
L’immortel auteur des « dieux ont soif » n’écrivait-il pas : « Tant qu’il y aura des bois, des prés, des montagnes, des lacs et des rivières, tant que les blanches vapeurs s’élèveront au-dessus des ruisseaux, il y aura des fées. Elles sont la beauté du monde ».
Si c’est en Écosse qu’elles restent le plus populaires, c’est parce que cette terre est demeurée relativement épargnée par la pollution. L’Écosse est la région d’Europe où les eaux et les forêts sont les plus pures et où les ondes élémentales sont donc les moins brouillées.
Le nom celte de l’élémental aquatique est nisca ou nixa (gallo-romain nehalennia), pluriel niscai ou nixai. La présence de ces niscai ou nixai ou nehalenniae a dû être primordiale dans la découverte des sources sacrées, des fontaines, et, donc, du thermalisme.
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NB. Croire en ces fées ou en ces nains comme les corroï ou les leprechaun de nos correspondants irlandais, assurément est affaire purement personnelle et, sous cette forme aussi précise, ne fait pas partie des grandes lignes de notre néo-druidisme. Nous sommes entrés depuis longtemps dans une période d’occultation majeure des dieu-ou-démons, et il semble bien que les hommes ne puissent plus actuellement voir de tels élémentals. Leur espèce s’est éteinte à cause de la pollution, ou alors ils sont partis « ailleurs » puisque la vérité comme toujours est « ailleurs ». Cette croyance druidique dans les matres ou fées, a bien évidemment été altérée par 2000 ans de mélanges des souvenirs contraints à la clandestinité. Les contacts avec ces élémentals ont lieu par surprise (voyageur égaré dans la forêt profonde), par accident spatio-temporel (temps de Samon), ou par maladie provoquant une hyperesthésie cérébrale (exacerbation de la perception des sensations tactiles, thermiques, vibratoires).
Les archéologues et les historiens parlent de dieu-ou-démons topiques (du grec topos = local). Nos ancêtres, eux, étaient bien loin de tout ce vocabulaire et parlaient tout simplement de dieu-ou-démons voire de déesse-ou-démones (de fées, si l’on préfère ce terme).
Il y avait des élémentals topiques masculins (Alpis Penninos pour les Alpes Pennines, ou la chaîne montagneuse des Pennines en Grande-Bretagne, Vosegus pour les Vosges, Carros pour le rocher du Caire dans les Préalpes en France, etc.) ; ou féminins (Arduinna pour les Ardennes en Belgique et aussi d’autres sites abrupts de ce genre), Abnoba pour la Forêt-Noire en Allemagne, Alambrina pour les monts Alambre/Arambre, des Préalpes et des Cévennes, en France, Danu (bia), divinisation du Danube, et ainsi de suite). Plus tard on les appellera donc fées ou dames blanches.
LA MAGIE DE LA VIE. Les égrégores ou plus exactement âme/esprits animaux.
Les nouveaux très-sachants comme Gustave Le Bon appellent égrégore l’âme/esprit collective d’un groupe animal ou humain puissant. Cette notion part d’une idée analogue au constat de « l’intelligence collective » d’une fourmilière ou d’un essaim d’abeilles. Chaque groupe d’êtres vivants agissant dans un dessein commun génère donc une âme/esprit collective que l’on appelle égrégore (phénomène observé chez les animaux notamment dans le cas d’une meute de loups en action, on parle alors plus précisément d’âme/esprit animale). Les sangliers ont un embryon d’âme/esprit… une harde de sangliers a donc une puissante âme/esprit collective faite de tous ces embryons d’âme/esprit se conjuguant. Idem pour les chevaux, les ours, les groupes humains (voir Le Bon)…
Nos ancêtres assimilaient ces âme/esprits collectives appelées aujourd’hui égrégores, à des dieu-ou-démons voire à des déesse-ou-démones, ou à des fées si l’on préfère ce terme, et au cours des siècles, les très-sachants humaniseront les représentations de ces entités, ne laissant à l’animalité que ce qu’il faut pour permettre leur identification. Les monnaies celtes nous ont par exemple gardé l’image du dieu-ou-démon sanglier (un homme à corps de sanglier ou un sanglier androcéphale), du dieu-ou-démon cheval (un homme à corps de cheval ou un cheval androcéphale). La déesse-ou-démone correspondant à l’égrégore ou plus exactement à l’âme/esprit des ours, deviendra carrément une figuration uniquement humaine, mais associée à un ours, la déesse-ou-démone, ou fée, si l’on préfère ce terme, Artio. Même chose pour Épona, d’après certains.
Ces figurations de « dieux-ou-démons » entre guillemets, animales ou mi-homme mi-bête, voire en totalité anthropomorphes ; varient évidemment avec les régions de la Litavia celtica, en vertu du principe druidique bien connu du gallicanisme, ou autonomie religieuse de chaque peuple (voir l’Anglicanisme du roi Henri VIII d’Angleterre) ; mais dans la mythologie préhistorique, ces divinités auront toujours pour véhicule des animaux les symbolisant. Ainsi la jument est-elle la monture d’Épona ou de ses différents avatars sur terre (Niamh, la dame à la licorne).
NB. Croire en ces égrégores ou âme/esprits animaux sous une forme aussi précise est facultatif, et ne fait pas partie des grandes lignes du druidisme.
Les égrégores humains plus précisément.
Ces âme/esprits collectives sont le produit de la pensée de plusieurs personnes convergeant vers un même but. Cela peut commencer simplement par un mental et un accord communs sans que les personnes en question se connaissent nécessairement. Pour les humains l’égrégore le plus puissant
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est celui qui est engendré par un groupe de religieux en méditation ou en prière. Le sociologue français Gustave le Bon a très bien étudié tous ces phénomènes de psychologie des foules que l’on retrouve dans les phénomènes de masse : manifestations, réunions sportives…
Un clan, une tribu, une nation, émet également un égrégore. Et une communauté n’est pas seulement une somme d’individus, mais un ensemble de valeurs, d’expériences, de souvenirs, longuement bâti, qui génère de génération en génération l’identité (voir Jung).
On appelle génies ou matres, chez les gnostiques d’Occident que sont les très-sachants, ces âme/esprits collectives humaines (que nos ancêtres distinguaient donc mal des dieu-ou-démons proprement dits).
Les Trévires faisaient appel à leur génie national sous le nom de matres treverae ; mais il y avait aussi en Belgique les matres nervinae (le génie nervien), en France les matres vediantae (à Nice), sans oublier la déesse-ou-démone des Tricorii dans les Alpes (la dea tricoria), etc.
La diversité de leurs noms ne fait que mettre en évidence leur fonction essentielle : protéger le groupe humain dont elles sont l’émanation, aussi petit soit-il.
DEUXIÈME SORTE DE DIEU-OU-DÈMONS : LES QUALITÉS AINSI QUE LES DÉFAUTS DE L’HOMME.
Le premier des moyens pour mieux connaître la nature de l’Être supérieur qu’est le Bitos (ou Pariollon) est de partir des aspirations et des réflexions profondes de l’Humanité, en sublimant les qualités humaines. C’est en effet seulement dans une profonde méditation du discours sur la sagesse, des anciens très-sachants, que l’on peut le mieux rêver au Dieu des philosophes.
Les divinités symbolisent les qualités idéalisées de l’Homme. L’épanouissement de ces qualités s’accompagne de joie, leur destruction engendre l’angoisse, l’inhibition, l’impuissance, le tourment… le mythe, pour extérioriser ce combat intérieur, montre toujours l’Homme en lutte avec des monstres, symboles des penchants pervers. Les divinités sont imaginées alors, aidant l’homme ou lui prêtant des armes. Mais ce qui vient réellement au secours de l’Homme ce sont ses propres qualités (symbolisées par la divinité secourable – pacifique disent nos amis bouddhistes – et par les armes prêtées par les dieu-ou-démons). La victoire est due à la force inhérente à l’individu.
Bien sûr, s’il y a des actes divins tenus pour exemplaires, il en est d’autres qui sont considérés au contraire comme des anomalies, permises aux dieu-ou-démons, mais interdites aux hommes, et personne ne s’y trompe.
Dans la plupart des mythologies, en effet, on voit des dieu-ou-démons voire des déesse-ou-démones commettre toutes sortes de bévues ou de mauvaises actions (cas de la Bible par exemple) ; sans que jamais les fidèles en déduisent nécessairement que, pour vivre une existence propre à échapper au cercle vicieux de l’ategeneto, il faut en faire autant.
Comme l’a très bien compris Henri Lizeray dans sa D. S. D. D. : l’individu se développe par sa propre imagination. Par l’idéal, il se crée un futur à réaliser.
Quant aux défauts, bien sûr, ils sont plus exactement diabolisés, démonisés ; ou assimilés à des sous-dieux, à des an-dee comme on dit en Irlande).
Psychologie jungienne (ou quand les Dieu-ou-Démons existent dans nos têtes).
Différents auteurs pensent aujourd’hui que les dieu-ou-démons du paganisme antique correspondaient (correspondent encore) à ce que la psychologie selon Jung appelle des archétypes ; c’est-à-dire des éléments structurant la personnalité situés dans l’inconscient humain (au même titre que le programme génétique, contenu dans l’ADN, constitue l’organisateur de nos cellules).
L’archétype est un symbole que l’on retrouve dans toutes les races humaines, il représente « une tendance instinctive ». Il est comme un instinct commun à l’espèce humaine, qui se perpétue dans le temps et l’espace.
Les dieu-ou-démons et les déesse-ou-démones, ou les fées si l’on préfère ce terme, représentent les nombreuses qualités de la psyché humaine qui peuvent être exprimées par un individu, sans tenir compte du sexe.
La religion selon Jung est donc une attitude particulière de l’esprit vis-à-vis de certains facteurs dynamiques qui agissent en nous, et que nous concevons comme des puissances ; des dieux, des démons, des lois, des idées, quels que soient les noms que l’Homme leur a donnés. Puissances qu’il a trouvées assez dangereuses ou assez bienfaisantes pour en tenir compte. Pour les aimer, les vénérer ou leur vouer un véritable culte, lorsqu’elles se présentent à lui sous un aspect resplendissant
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de beauté ou de grandeur, et lorsqu’elles donnent un sens à sa vie. Les archétypes représentent des thèmes, mythes, images symboliques ou rêves de l’Humanité, ou encore des modèles de comportement instinctif. Les archétypes constituent un pilier de la théorie de l’humain de Jung. Il en a étudié largement leur mode de fonctionnement et leur rôle dans la vie psychique des sujets. Citons parmi les plus fondamentaux : la persona (le moi), l’ombre (l’inconscient personnel), l’anima (le côté féminin chez l’homme), l’animus (le côté masculin chez la femme)…
Le panth-éon grec comme personnification des archétypes jungiens a également été bien étudié par Jean Shinoda Bolen. D’après Bolen, ces schémas intérieurs puissants, ou archétypes, peuvent expliquer les différences majeures observées dans les comportements humains. Les stéréotypes associés aux femmes sont par exemple fondés sur des archétypes. Perséphone la jeune fille, Héra la femme jalouse, Aphrodite la tentatrice, et ainsi de suite. Différents archétypes sont à l’œuvre en chaque femme à une période donnée.
Bolen a aussi rencontré des hommes identifiant une part d’eux-mêmes à une déesse-ou-démone, ou à une fée si l’on préfère, spécifique. À l’inverse, il y a également des dieu-ou-démons en chaque femme.
NB. Le corollaire immédiat de cette approche jungienne des dieu-ou-démons est l’étude des rêves, car les dieu-ou-démons peuvent très bien apparaître en songe, cela est connu depuis la nuit des temps. Et pour analyser un rêve, il est indispensable de comprendre la dissociation, dans l’Homme dit « civilisé », du conscient et de l’inconscient (ce que les anciens très-sachants appelaient eux, dans leur langue, l’occultation des dieux)…
D’accord, sur le principe, mais reconnaissons tout de même dans ce cas que Jung a été particulièrement mal inspiré dans le choix du nom de ses archétypes. À ce compte-là, Mabon/Maponos/Oengus pourrait être le dieu-ou-démon de l’éternelle jeunesse, de l’extase (de nombreuses vedettes du monde du spectacle ont, par exemple, parfaitement incarné cet archétype, parfois jusqu’à l’extrême : une fin tragique…)
TROISIÈME SORTE DE DIEU-OU-DÉMONS : LES SEMNOTHÉES.
C’est-à-dire les hommes (les grandes âmes) ayant volontairement replongé sur Terre pour y aider les autres mortels. Le dieu-ou-démon dans ce cas est un être qui, tout en ayant atteint le stade d’awenydd dans une vie antérieure, préfère se réincarner en ce monde plutôt que de rester au cœur de la terre pure du Mag Meld ; sacrifiant ainsi son bien-être à celui de l’Humanité.
Il y a beaucoup de vrai dans la théorie du penseur grec Évhémère qui, à la fin du IIIe siècle avant notre ère, professait que les personnages de la mythologie étaient des êtres humains divinisés par la crainte ou l’admiration des peuples. Lorsqu’un personnage qui a fortement marqué son époque est passé de vie à trépas, il prend dans la mémoire populaire des dimensions accrues. On lui prête des aventures plus extraordinaires encore que celles qu’il a vécues, et l’on finit par le faire accéder au rang de demi-dieu-ou-démon (comme Abarix ou Jésus) voire même de dieu-ou-démon immortel. On se met tout naturellement à lui prêter des attributs ou des faits et gestes dont on créditait jusque-là d’autres personnages (divins). On lui fait incarner un mythe préexistant. Dans les récits historiques qui nous ont été transmis uniquement par tradition orale, il est impossible de savoir quelles sont la part du mythe et la part de l’historicité. Il n’y a d’ailleurs pas de sens à chercher à le savoir. La seule erreur de l’évhémérisme a été d’y voir l’unique processus d’émergence des dieu-ou-démons ; car il y en a bien d’autres : la perception des symboles, la signification attribuée aux phénomènes naturels, l’interprétation des aislingi ou visions des prophètes et des songes, les assimilations entre des choses et des idées appartenant à des ordres différents de réalité.
Il va de soi que ces anatiomaroi (grec semnothées) se réincarnent alors en général de façon peu ordinaire, et que leur nouveau corps est dans ce cas doté de pouvoirs exceptionnels. Ces anatiomaroi, ou grands initiés appelés semnothées par les Grecs, avec le recul, finissent par être aussi considérés comme des dieu-ou-démons. Les chrétiens ont fait de même avec leur christ ou leurs saints ; et cela correspond en Extrême-Orient aux notions d’arhat, de bodhisattva, voire même de bouddha.
De la même façon que dans l’ancien monde aryen un roi devenait fils adoptif des dieu-ou-démons par son sacre (royauté sacrée) une grande âme/esprit (anatiomaros) le devenait par son accession à l’état d’awenydd. En devenant awenyddion, les grandes âme/esprits étaient dites fils de Dieu ou du
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Démiurge. Aucune trace de génération physique ou sexuelle dans cette notion. Ces anatiomaroi, ou grands initiés appelés semnothées donc, étaient engendrés comme fils des dieu-ou-démons, oui, mais à l’instant de leur accession à l’état d’awenydd et non dès leur naissance quand même. « Fils de dieu-ou-démons » dans ce cas ne signifie nullement origine divine ou filiation divine physique, mais dons exceptionnels (vieux celtique boudisme). Un choix et un sacre de cette grande âme/esprit par le Destin, c’est tout !
À strictement parler, ces dieu-ou-démons (les awenyddion appelés semnothées en grec) ne sont pas dans ce cas d’une autre nature que celle des hommes. Ce sont simplement des âme/esprits parvenues à des niveaux différents dans le mouvement de retour au Grand Tout.
Ils ont une plus grande puissance et de plus grandes possibilités, notamment celle de redescendre sur terre, s’ils le désirent, pour aider les autres mortels ; comme Vindosenos (Fintan en gaélique), qui vécut des siècles et des siècles grâce à diverses réincarnations successives ; car pour ce type de réincarnation, les grandes âme/esprits disposent non seulement des existences humaines, mais aussi de toute la diversité des êtres vivants liés au cycle du devenir et de la disparition : des habitants des mondes souterrains aux dieu-ou-démons en passant par les animaux et les hommes. Ce type de réincarnation peut donc conduire jusque dans le règne animal.
QUATRIÈME SORTE DE DIEU-OU-DÉMONS : LES ALLÉGORIES.
La présence de signes sacrés dans le cours de sa vie procure à l’homme des repères, auxquels il peut se référer, des valeurs qui l’obligent à se dépasser. Chacun, de ce fait, se sent obligé de donner le meilleur de lui-même pour ce qui lui semble sacré : sa patrie, sa liberté, ses droits, son amour, ses croyances, la défense de ses idées…
Cette catégorie de représentations du sacré s’avérant toujours très vivante de nos jours, nous n’insisterons que brièvement dessus, car cette fonction mythique subsiste encore..
L’intelligence rationnelle explique comment fonctionne le monde, elle ne donne aucune signification à la vie ou à la mort d’un l’homme, à l’amour et à la haine. La seule chose est que cette mythologie recourt aujourd’hui à d’autres thèmes et à d’autres images.
Le mythe d’une humanité pleinement réconciliée, qui aurait enfin évacué toutes ses causes de discorde ou de conflits (l’irénisme, l’angélisme) ; le mythe de la croissance infinie, dans un monde pourtant fini, le mythe du progrès infini de la civilisation, le mythe de la libre expansion de l’initiative individuelle aboutissant au bonheur pour tous (le libéralisme et le mythe ô combien illusoire de la main dite invisible chère à Adam Smith). Le monde moderne regorge d’hommes qui s’en tiennent si fermement à ces dogmes qu’ils ne réalisent même pas que ce sont des dogmes.
Rappel sur le mythe des temps modernes qu’est devenue la célèbre main de cet économiste anglais.
Adam Smith utilise l’expression « main invisible » à trois reprises. La première fois dans son histoire de l’astronomie et à propos du dieu-ou-démon grec Jupiter. C’est d’ailleurs la seule vraiment intéressante.
Dans le domaine socio-économique qui est celui de la deuxième et de la troisième occurrence (1759 et 1776) par contre, cette formule équivaut à l’idée que des actions guidées par l’égoïsme le plus sordide peuvent néanmoins contribuer à la richesse et au bien commun. Ce qui est parfois le cas (grâce à des conséquences inattendues), mais pas toujours.
L’origine religieuse de cette idée s’avère indubitable comme le montre son premier emploi dans l’œuvre d’Adam Smith.
Le précurseur le plus direct d’Adam Smith est en effet le très catholique Pierre de Boisguilbert, lequel a parfaitement su tenir la ligne de ses maîtres de Port-Royal. Admettant comme beaucoup que ce qui fait tenir les hommes ensemble est désormais l’utilité des travaux spécialisés, cet économiste français du XVIIe siècle pose en effet que la recherche de son propre bien-être est source d’ordre et d’équilibre puisque, pour satisfaire cet intérêt, chacun est conduit à livrer aux autres ce qui satisfera leurs intérêts. Cette complémentarité des besoins donne ainsi naissance à un système spontanément ordonné dans lequel chacun est gagnant. Ce qui laisse penser que Dieu ou le Démiurge, en suscitant la division du travail et la coordination des activités par le marché, a créé une machine parfaite qui tourne d’elle-même. Difficile d’être plus naïf (ou plus cynique ?)
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Hors du secteur politique, certains comportements apparaissent même comme des ersatz (produits de remplacement) de la religion, dans un monde désenchanté au sens webérien du terme (cf. son Entzauberung der Welt).
De la simple rencontre à la coupe du monde, le sport unit par exemple ses fanatiques dans un même élan. Pour les aficionados, la corrida est par exemple l’exaltation de la victoire de l’intelligence sur la force brute.
Le sport apparaît comme la nouvelle religion du peuple. La flamme olympique est le symbole de valeurs immortelles d’amitié universelle et de dépassement de soi.
Rassemblés dans ces cathédrales de béton que sont les stades pour vivre une extase hors du temps profane et quotidien, des milliers de cœurs battent au rythme des exploits de leurs héros. On s’identifie à ces vedettes impitoyables, à tel point que le salut personnel consiste à leur ressembler. L’offrande de sa vie au dieu-ou-démon du risque fait partie de nombreux sports. Si les dieu-ou-démons du sport sont de gloutons Moloch et réclament des corps défigurés, des carcasses calcinées, c’est que la sacralisation se garantit par l’immolation sacrificielle.
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Les lois de la nature que nous connaissons ne représentent qu’une infime partie des règles inexorables régissant ce Monde. Le déroulement des événements n’est jamais arbitraire, il n’est pas le fait du seul hasard au sens habituel ou chrétien du terme. Ce qui est vrai par contre c’est que, dans leur globalité, ces règles sont d’une très grande complexité, l’Homme ne peut donc les comprendre que partiellement.
Pour se manifester aux hommes, le gigantesque chaudron cosmique qu’est le Pariollon a donc besoin d’éclater en multiples facettes.
Le monde des dieu-ou-démons n’est rien d’autre qu’une forme supérieure de l’existence qui nous est en principe inaccessible à nous autres, simples mortels.
D’une certaine façon, ces dieu-ou-démons eux-mêmes ne sont cependant que des hommes. Leurs joies et leurs aventures ressemblent à celles des hommes. C’est bien aussi par définition ce qui les rend si accessibles aux besoins et aux souhaits ; mais puisqu’ils jouissent d’une forme d’existence qui surpasse de loin la nôtre, ils peuvent aider les mortels, en intervenant sur certains points (et sur certains plans) : pluie, fécondité, vent… et si l’on ne peut pas entrer en relation avec eux exactement comme avec ses semblables, on peut néanmoins aborder les dieu-ou-démons comme on aborderait un roi. La plus ancienne des triades druidiques insiste pour qu’on les honore. « Honorer les dieux, ne rien faire de mal et être un homme un vrai » (Diogène Laerce. Vies et doctrines célèbres. I Prologue 6). Ces dieu-ou-démons sont donc des partenaires de dialogue. L’Homme peut s’adresser à eux dans la prière et la méditation, il peut les louer dans la joie et la reconnaissance, il peut s’en prendre à eux dans la détresse et le désespoir. Des dieu-ou-démons devant lesquels l’Homme peut (sans y être obligé) lever les bras au ciel dans une attitude de crainte révérencieuse ; qu’il peut prier, auxquels il peut offrir des sacrifices, devant lesquels il peut jouer de la musique et danser.
« Certains auteurs affirment que les Gallaeci sont athées, tandis que les Celtibères et leurs voisins au nord sacrifient à un dieu-ou-démon sans nom, la nuit, à chaque retour de la pleine lune, devant les portes de leurs bourgades ; se livrant alors avec toute leur maisonnée, durant toute la nuit, à des rites divers agrémentés de danses » (Strabon, Géographie, III, 4, 16).
Sur ce point, Celtes, juifs, chrétiens et musulmans, se rejoignent. C’est la première étape obligée du passage de l’Immanent Absolu au relatif. Les dieu-ou-démons du panth-éon ou plérôme druidique, sont les manifestations de la totalité fonctionnelle d’un monde inconnu et incompréhensible, insaisissable, mais à l’origine de tout.
Les dieu-ou-démons, en tant qu’hypostases, sont des émanations fonctionnelles du chaudron cosmique universel connu sous le nom de Pariollon. C’est donc au figuré seulement que leur position intermédiaire peut les faire considérer comme issus/engendrés par l’Innommé faisant fonction de « Ollatir = père », autrement dit des participations à cet Être supérieur. Ces êtres contingents par leur réalité elle-même, sont tour à tour symbole et facette ou émanation spécialisée de l’Être supérieur (Bitos). Mais ces êtres intermédiaires entre le Pariollon et les hommes, que sont les dieu-ou-démons, dont la perception est une évidence pour certaines personnes douées d’une grande intuition comme les awenyddion, ne sont, à vrai dire, que des énigmes ; car nous ignorons l’un des termes de la
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relation qui les fait néanmoins exister : les contours exacts du chaudron cosmique qu’est le Pariollon. Car le Pariolon est un peu comme l’univers, on ne sait s’il est en expansion continue ou fini/infini.
Pour en revenir au domaine de la pensée discursive, les récits mythologiques sont des moyens, certes, indirects et imparfaits, d’approcher de la réalité immanente et indicible de l’Être supérieur. Les dieu-ou-démons sont des spécialisations et des concrétisations ou incarnations des innombrables facettes du Chaudron cosmique universel qui est appelé Pariollon. Ce que les hindous appellent vyouha et les musulmans du chirk (pour le condamner ou le combattre). Ce sont des êtres purement spirituels, mais pouvant revêtir des apparences humaines.
Pour certains très-sachants ces apparences de corps humain peuvent même aller jusqu’à l’exercice de fonctions plus ou moins analogues à celles de nos organismes.
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TRAITÉ SUR DIEU ET LES DIEUX ou
LES RAPPORTS DU UN ET DU MULTIPLE.
« À vous seuls [les très-sachants] il est donné de connaître les dieux et les puissances du ciel ou de les ignorer » (Lucain, Pharsale/Guerre civile I, 450).
« Ils discutent beaucoup […] de la nature des choses, de la puissance et du pouvoir des dieux immortels, et ils transmettent ces spéculations à la jeunesse » (B. G. VI, 14).
Ainsi que le remarque Henri Lizeray lui-même (dans sa D. S. D. D.) cet éternel problème des rapports de l’unité avec le nombre est évidemment celui qui a, de tout temps, défié l’intelligence humaine ; « puisque ce qui est Un nous paraît quelques fois Multiple ». Le jour qui éclaire la terre est par exemple unique, mais sur notre planète, ce que les hommes voient c’est, tantôt la nuit, tantôt le jour, ce qui n’est pas pareil).
Le panth-éon ou plérôme druidique est un gigantesque jeu de patience dont manquent plus de la moitié des pièces, et celles que nous avons sont dans le désordre.
Ce défi a peut-être été voulu par les anciens très-sachants eux-mêmes (voir leur tabou sur l’écriture) ; car cela nous oblige ainsi à faire un effort de reconstitution, de pénétration, beaucoup plus profitable à vrai dire que ne le serait la contemplation, passive, d’un ensemble complet déjà rassemblé.
Qu’avons-nous en effet aujourd’hui en tant qu’homme à retirer de la lecture des aventures apparemment cohérentes, logiques, et complètes ; de ces dieu-ou-démons que sont le dieu-ou-démon d’Abraham, d’Isaac, et de Jacob (ouf !) le petit Jésus, le Saint-Esprit, Marie, etc., etc. Le livre des juifs (la Bible) ne croit même pas en l’immortalité de l’âme…
Mais nous avons par contre un immense profit à retirer de l’étude et de la méditation des mythes où s’alimentait la spiritualité des anciens gnostiques d’Occident.
Dans de nombreuses langues du sud de l’Europe Dieu, avec un petit « d », est un mot d’origine celte (deivos ou dios, dia en Irlande) signifiant « être surhumain lumineux » (celui du ciel diurne). Chez les très-sachants antiques, ce mot ne désignait pas du tout l’Être supérieur évoqué par des périphrases du genre Bitos ou Pariollon. C’est à la suite d’une erreur de traduction de la Septante (on a rendu par le mot grec theos ce qu’il fallait signifier par Destin) que les premiers chrétiens ont aussi employé ce terme pour rendre la notion d’Être supérieur (appelé Bitos Pariollon ou Destin donc chez les très-sachants de la druidiaction).
L’erreur des traducteurs de la version des Septante s’explique par le fait que leur dieu-ou-démon supérieur avait, plutôt, effectivement, les dimensions d’un petit dieu-ou-démon tribal, et non celle d’un Englobant Universel. D’où, dans leur esprit, vu leur morgue et leur condescendance, la confusion avec la notion aryenne de deiwos.
Dans le monde indo-européen en effet, les dieu-ou-démons sont conçus comme des êtres personnels, mais dont on ne peut davantage préciser la nature : selon les peuples et selon les époques, elle est plus ou moins proche de celle de l’homme.
La recherche historique a pu établir une typologie des dieu-ou-démons, mais en réalité les récits les concernant sont rarement explicites.
La notion de « dieu-ou-démon » est la réponse personnifiée à une question qui n’en a pas d’autres possibles à une époque donnée : pourquoi le tonnerre et l’éclair ? Parce que Taran/Toran/Tuireann gronde et foudroie, pensent les Celtes de l’Antiquité.
L’eau des rivières ? C’est une déesse-ou-démone ! Ou bien une fée si l’on préfère ce terme !
La force qui fait pousser les récoltes au Printemps ? Un dieu-ou-démon !
Pourquoi la violence et la mort dans le monde ? Parce que la Catubodua s’y déchaîne.
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Personnifié ne signifie nullement absurde ou mensonger. Les dieu-ou-démons sont une façon de dire que la matière, les sentiments et les choses de la vie entretiennent des rapports avec une réalité invisible qui dépasse l’Homme.
Pour un très-sachant de l’Antiquité, le responsable de la fertilité des sols était la danna nommée Litavis ou Nerthus. Aujourd’hui nous disons : « ce sont les engrais » * et nous remercions Brigindo sa fille d’en avoir inspiré la découverte aux savants.
Un même dieu-ou-démon peut avoir une double ou une triple signification et même plus encore, à des niveaux différents. Il pourra par exemple s’agir d’un mythe historique au niveau le plus simple, mais aussi d’un mythe de salut sur un plan plus élevé.
Le rationalisme druidique n’exclut donc pas la recherche des dieu-ou-démons ou de la divinité, mais implique seulement la systématisation (et par conséquent la reconnaissance) de nos rapports avec ces principes supérieurs ; qui peuvent être des idées des vertus des idéaux, le souvenir d’êtres disparus, des dieu-ou-démons ou un seul Dieu-Démiurge comme dans le Judéo-Islamo-Christianisme, etc., etc.
* Par engrais, il faut bien sûr entendre les engrais naturels ou les techniques naturelles comme celle qui consistait simplement à répandre certaines terres dans les champs. Pline. Histoire naturelle ; Livre XVII.
« Il existe une autre méthode inventée à la fois en Gaule et en [Grande] Bretagne, pour apporter de l’engrais à la terre par elle-même* * * * cette sorte de terre est appelée marne. Cette terre est considérée comme contenant une plus grande quantité de principes fécondants, et agit comme une sorte de graisse vis-à-vis de la terre, exactement de la même façon qu’il existe des glandes dans le corps formées par une concentration en noyaux des particules graisseuses. Cette façon de procéder n’est pas non plus inconnue des Grecs ; et d’ailleurs de quoi n’ont-ils jamais parlé ? Ils appellent du nom de leucargile une terre argileuse blanche utilisée dans la région de Mégare, mais seulement pour les sols trop humides et froids.
C’est à juste titre que je vais m’appliquer à traiter de cette marne qui tend à enrichir les sols des provinces gauloises et des îles Britanniques. On n’en connaissait jadis que deux variétés, mais récemment, le progrès de l’agriculture aidant, d’autres ont commencé à être employées, ce sont, en fait, la blanche, la rouge, la colombine, l’argileuse, la tophacée, la sablonneuse ».
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FINITUDE/INFINITUDE.
— Si l’on appelle du mot dieu-ou-démon tous les êtres vénérés ou invoqués dans des prières ou des cantiques, voire par des sacrifices (offrandes, etc.) alors la plupart des chrétiens sont aussi polythéistes ; car ils croient de fait dans leur pratique religieuse quotidienne à plusieurs dieu-ou-démons, quel que soit le nom qu’ils leur donnent… (anges, archanges, saints, personnes de la trinité, sainte vierge, etc.).
Si l’on entend aussi par « Dieu ou le Démiurge » l’unique principe le plus haut et le plus profond de toutes choses, la réalité première et dernière de ce monde, dans les hommes et dans les choses ; alors les très-sachants peuvent aussi être dits en un sens monothéistes, ou plus exactement monistes ; car ils ne croient qu’en un seul Être (Bitos) qui est tout à la fois impersonnel et personnel (c’est une entité impersonnelle dont on peut faire personnellement l’expérience).
Alors que les chrétiens eux sont dualistes, puisque à côté de cet Être supérieur (de ce bon Dieu ou Démiurge) ils admettent l’existence d’une autre entité, spécialisée dans le mal cette fois-ci (le Diable). Même chose pour les musulmans d’ailleurs avec leur Grand Satan.
Les gnostiques d’Occident ont donc évité la difficulté dans laquelle pataugent les chrétiens (et les musulmans à leur suite) en refusant d’appeler aussi deivos (dieu) cet Être supérieur ; en refusant de lui donner un nom propre (donner un nom, c’est affirmer un droit sur ce que l’on nomme) ; en se contentant de le désigner par des noms communs adjectivés, par exemple, ou par des adjectifs substantivés au neutre comme Pariollon. Conclusion : le druidisme utilise donc des termes tout à fait différents pour évoquer Dieu-ou Diable et les dieu-ou-démons. Il a fallu l’ahurissant manque d’intelligence et de réflexion des premiers chrétiens (des rabbins ratés que l’on appelait « secte des nazoréens », voir Actes des Apôtres, 24, 5 et 14) pour les confondre.
Certaines personnes prétendent que la croyance en des dieu-ou-démons ou anges multiples représente une forme inférieure de l’approche du divin. Les dieu-ou-démons ou les anges voileraient plus sa vérité qu’ils ne la dévoileraient, d’où la nécessité de ne plus croire qu’à un seul d’entre eux pris au hasard (monothéisme).
En réalité, les dieu-ou-démons ne voilent la vérité du divin que pour ceux qui ne comprennent pas le langage des symboles, et donc ne savent pas. Pour ceux qui savent, les dieu-ou-démons dévoilent davantage, de la nature et de l’agir du Divin, que la conceptualisation théorique unitaire, parce qu’ils portent en eux la dimension même de sa dynamique.
Les dieu-ou-démons ne sont qu’un aspect partiel qui n’apparaît que lors du déploiement du Un dans le multiple. C’est à ce niveau-là seulement que se situent les personnalisations de l’aspect créateur de l’Incréé.
Il faut cependant leur reconnaître la place qui leur revient en propre dans la hiérarchie de l’être, sans contester leur fonction et leur signification. Les représentations de dieu-ou-démons sont affectées à des niveaux donnés dans le processus d’autodéploiement du Pariollon ; car le commencement originel, le fondement dernier de tout être, l’être immanent absolu, n’agit pas et ne donne pas forme pas par lui-même.
L’analyse des très-sachants de la druidiaction va même plus loin. Pour elle, il y a même des dieu-ou-démons pour, en quelque sorte, se salir les mains dans le cambouis, des dieu-ou-démons qui agissent, qui créent ; puis détruisent ce qu’ils ont fait (cas de l’aspect Catubodua de la grande déesse-ou-démone mère cosmique dans la tradition irlandaise, par exemple) pour reconstruire après.
La spécificité du druidisme est sans nul doute d’avoir fait des dieu-ou-démons la forme privilégiée de la connaissance de Dieu par l’Homme. ALORS QUE LES CHRÉTIENS, EUX, EN GUISE DE PARTICIPATION MYSTIQUE À LA VIE DIVINE, NE CONNAISSENT QUE CELLE LIÉE À L’EXPÉRIENCE DE LA SOUFFRANCE. La connaissance de Dieu est la connaissance des dieu-ou-démons ses fils. C’est pourquoi les mythes sont aussi un sujet important de méditation, tout comme la représentation symbolique, sculptée ou peinte, des sanctuaires ; ou les triades destinées à être méditées. Pour celui qui ne sait pas, les dieu-ou-démons voilent effectivement beaucoup de choses ; mais ils ne voilent jamais tout. Une pomme est belle à voir même si l’on ignore qu’elle constitue également une délicieuse nourriture.
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Les dieu-ou-démons par conséquent ont plusieurs niveaux de signification. Si l’un d’eux reste caché, on les comprend tout de même à un autre niveau, un niveau inférieur.
À ce niveau, les dieu-ou-démons offrent une image extériorisée des facettes du grand chaudron cosmique universel, des événements cosmogoniques, et de bien d’autres choses encore, dans lesquelles peut se manifester la puissance de l’Être supérieur (ou Bitos). Les dieu-ou-démons dévoilent quelque chose de l’Être du Pariollon aux ignorants eux-mêmes.
Leur ouverture à des interprétations différentes en fait une forme d’expression qui apporte à tout le monde, et dont on ne saurait par conséquent se passer. Le maître mot du druidisme est la différence, le droit à la différence, la différenciation. Ce qui est le mieux pour l’un, vu son niveau de développement intellectuel, son degré d’évolution, peut se révéler inapproprié pour l’autre qui n’y est pas encore préparé. À chaque niveau en effet, les dieu-ou-démons parlent aux hommes.
Il y a, certes, une vérité supérieure et unique. Celui qui y accédera n’aura plus qu’un pas à faire pour réussir le complet épanouissement de son âme. Mais tant qu’on ne la possède pas entièrement, il faut admettre que cette vérité se manifeste à tous les niveaux de l’existence, de façon différente pour chacun.
Chaque simple mortel peut d’ailleurs lui-même se placer à plusieurs niveaux à la fois. On peut très bien concevoir le divin de façon totalement abstraite et intuitive à l’instar des awenyddion et en même temps respecter ou honorer une statue de dieu-ou-démon. On peut très bien rendre présent dans son cœur le dieu-ou-démon avec tous les détails de l’image qu’en ont peu à peu forgée les artistes et les poètes (les bardoi) ; tout en sachant que cela n’est qu’apparence, la forme sous laquelle se manifeste sur terre un être immanent et transcendant à la fois.
Cette aptitude à penser les différents niveaux de la réalité, caractéristique du monisme (du monisme et non de la monolâtrie) druidique, est évidemment aux antipodes de la désastreuse monolâtrie des gens d’un seul livre ; dont le dieu-ou-démon est certes UN, mais anthropomorphique et non abstrait ; ce qui ne vaut pas mieux qu’une multitude de dieu-ou-démons anthropomorphiques (où est le progrès ?)
Le monothéisme a donc aussi sa place dans le druidisme, mais pas comme une loi s’imposant à tout le monde. Il ne doit pas être une simplification grossière, comme dans le judéo-islamo-christianisme (un seul dieu-ou-démon ANTHROPOMORPHE au lieu de plusieurs dieu-ou-démons ANTHROPOMORPHES), mais une abstraction (un « Être supérieur » origine unique de toute chose : le monisme).
Le niveau le plus élevé de la connaissance ou de l’expérience divine qui est celui des awenyddion correspond également à la plus haute abstraction. Mais, vu la différenciation des connaissances ou des expériences mystiques, les niveaux inférieurs ne sont pas non plus totalement sans valeur. S’ils n’existaient pas, le mouvement de montée qui conduit au monothéisme philosophique et réfléchi (la pensée discursive qui mène au monisme) ne pourrait même pas démarrer.
Rappel sur les dieu-ou-démons selon le druidisme médiéval.
L’étude de la philosophie druidique montre qu’elle ne peut être conçue sans une théologie (entendue au sens d’angélologie). Les anges les djinns ou les dieu-ou-démons évidemment ont existé avant leurs mythes, tel est le premier point à retenir de la notion druidique de méta-histoire. Toute la difficulté consiste par conséquent à remonter à leur vérité au-delà des textes. Il faut rendre au concept de dieu-ou-démon toute sa densité. Ils sont fondamentalement la condensation d’une énergie originelle.
L’existence de dieu-ou-démons spécifiques constitue le postulat essentiel de la religion druidique. Il n’y a pas là de vérité contradictoire. Dieu et dieu-ou-démons anges ou djinns sont une seule et même Vérité, correspondant à des plans d’interprétation ou de compréhension différents. Tout attribut divin (du Pariollon) peut même être à l’origine de plusieurs entités divines différentes, puisque chacun la comprend à sa manière.
Il n’y a dans cette conception du monde ni création ni procession successive, mais simultanéité. Le druidisme du 2e millénaire avant notre ère a fait voler en éclats l’univers clos de la monolâtrie néolithique primitive, en faisant percevoir à son entourage la multitude des êtres de lumière qui entourent l’Être supérieur ; en nous faisant ainsi accéder nous les simples mortels à la multitude des irradiations célestes du Bitos ; une source de lumière céleste dont Zoroastre fut aussi le prophète à l’autre bout du monde aryen.
Dans le druidisme médiéval, les dieu-ou-démons représentent l’altérité primordiale, le premier miroir des perfections ou des puissances surhumaines. Ces êtres sont tous relatifs au Tokade (au Destin) et
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n’existent que par lui en fait. Ils sont la manifestation des attributs, dont les dieu-ou-démons, les anges ou les djinns, sont les supports. Chaque entité divine représente un nom ou un attribut du chaudron cosmique universel (Pariollon). Il est impossible par conséquent, d’être plus proches de l’être supérieur que ne le sont ces miroirs du Destin.
L’expression la plus couramment utilisée pour qualifier les dieu-ou-démons est « fils du Destin, agents du Destin, causes secondes ». Ces réalités spirituelles que sont les dieu-ou-démons, les anges ou les djinns, sont les multiples facettes, voix, ou verbes (labarum) du chaudron cosmique géant. Les fils de Dieu ou du Démiurge, voire du Destin, ne sont pas Dieu ou le Démiurge ni le Destin lui-même évidemment, mais ils n’en sont pas séparables non plus. La lumière qui émane d’une torche n’est évidemment pas la torche elle-même, mais s’il n’y avait pas cette lumière, comment saurait-on ce qu’est la torche ? On ne saurait même pas s’il y a une torche et où elle est.
Le monde des dieu-ou-démons druidiques (Plérôme sous la plume de saint Irénée) apparaît donc comme le soubassement de l’ordre universel qu’il régit et maintient dans la durée.
Les dieu-ou-démons structurent le Bitos ou univers en degrés d’être auxquels correspondent des états de connaissance. Ils mettent en communication les mondes et nous montrent que Dieu ou le Démiurge est partout, à la fois immanent et transcendant. Les dieu-ou-démons constituent aussi d’ailleurs, des pôles célestes ou telluriques individuels pour chacun d’entre nous.
La hiérarchie des dieu-ou-démons traduit le dynamisme des forces (Bitos) issues du grand chaudron cosmique universel ou Pariollon. Les dieu-ou-démons sont la manifestation dynamique des puissances ou énergies que représentent les noms ou attributs de ce chaudron. Ce sont les idées ou les pensées du Pariollon, sa grammaire suprasensible qui met en forme la conscience immanente absolue, et dévoile la vie du Bitos. Sans eux le Bitos ou Pariollon ne peut ni s’exprimer ni se comprendre.
À l’autre bout du monde aryen, avec la réforme opérée par Zoroastre (Zerdusht), du mazdéisme ancien, ce polythéisme épuré bien proche du druidisme philosophique et réfléchi, se rapprochera encore plus d’une sorte de dualisme modéré. Ahoura Mazda devenant un Dieu ou Démiurge unique et les autres divinités des principes associés. Zoroastre prêchait un dualisme modéré reposant sur la bataille entre le Bien et le Mal, la Lumière et les Ténèbres, dualisme toujours présent d’ailleurs dans l’islam chiite duodécimain. Il existe un esprit saint (Spenta Mainyu), fils de Ahoura Mazda, et un esprit mauvais (Angra Mainyu, en pahlavi Ahriman), esprits incréés, mais opposés, car représentant le jour et la nuit, la vie et la mort. Ces deux esprits sont des jumeaux et coexistent dans chacun des êtres vivants. Selon l’Avesta, il existe donc toute une hiérarchie d’archanges et d’anges constituant l’armature invisible du Bitos (de l’Univers). Au sommet se placent les saints immortels, au nombre de sept, appelés Amshaspends, lesquels correspondent à la manifestation informelle. Viennent ensuite différentes catégories de Yazatas, les anges exécuteurs, qui correspondent aux entités du monde subtil parmi lesquelles figure le Feu, principe purificateur et véhicule de l’âme/esprit dans son ascension spirituelle. Parmi les diverses catégories de Yazatas, on trouve notamment celle des Fravrasis qui sont les mânes des défunts, auxquels il faut rendre un culte et qui, tout en restant cachés, sont des génies bienfaisants en communion réelle avec l’Humanité. Ce sont également des anges tutélaires ayant pour mission de protéger toute âme humaine et de recueillir le fruit de ses actes vertueux, accomplis sous leur inspiration et dont dépend leur existence.
N.B. Les zervanistes ou zourvanistes ont néanmoins une conception nettement plus pessimiste de ce processus et inclinent à une stricte dualité du Bien et du Mal, Ahoura Mazda et Ahriman, engendrés par un unique principe, Zurvan Akaran, le temps inconditionné.
Côté grec, les anges sont mentionnés pour la première fois chez les néoplatoniciens, Porphyre de Tyr (vers 260) et Jamblique de Chalcis (vers 320). « Tu t’enquiers de ce qui manifeste la présence d’un dieu, d’un ange, d’un archange, d’un démon ou de quelque archonte [gouverneur de planète] ou d’une âme. D’un mot, je prononce que les manifestations s’accordent à leurs essences, puissances et activités… D’une seule espèce sont les apparitions des dieux ; celles des démons variées ; celles des anges, plus simples que celles des démons, mais inférieures à celles des dieux ; celles des archanges, plus proches des causes divines ; quant à celles des archontes, si tu entends par là les maîtres du monde qui administrent les éléments sublunaires, elles sont variées, mais rangées en ordre » (Jamblique, Les Mystères d’Égypte, Réponse d’Abamon à la Lettre de Porphyre à Anébon. II, 3).
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Le mot grec aggelos/angelos, qui signifie « messager » dans la Bible, souligne une des nombreuses fonctions de ces êtres intermédiaires : la transmission d’un message.
Mais le mot hébreu originel, malakh, lui, a un deuxième sens. Le malakh est le bras armé du roi des Élohim, du Dieu ou Démiurge supérieur, l’exécuteur sur la terre de la volonté de Dieu ou du Démiurge.
La Bible mentionne plus de 370 fois ces entités surhumaines sous les noms d’anges, archange, séraphins, chérubins. Sans compter le Coran. Bible et Coran affirment donc l’existence des anges, mais ils sont le plus souvent invisibles aux yeux des hommes. À en croire la Bible néanmoins, de nombreuses personnes les auraient vus ou entendus, réellement ou en vision. Lot (Genèse 19,1), Jacob (Genèse 32,1), Gédéon (Juges 6,11), la femme de Manoach (Juges 13, 6), Nabuchodonosor (Daniel 3, 25).
Pour les musulmans pieux, les djinns représentent une autre race de créatures habitant la Terre, ce sont des entités qui habitent les endroits déserts, les points d’eau, les cimetières et les forêts. Pour se manifester, ils prennent diverses formes dont celles de l’homme ou des animaux, couramment des serpents. Leurs noms, paroles ou comportements, qui demeurent étranges, permettent de les distinguer des humains quand ils en prennent la forme. Comme les hommes, ils sont organisés en royaumes, États, tribus, peuples, ils ont des lois et des religions (dont celles de l’homme puisque pour les musulmans Dieu peut aussi leur envoyer des prophètes).
Les rapports entre le Destin ou Tokad (moyen gallois tynghed, breton tonket, destiné, vieil irlandais tocad, destin, toicthech « fortunatus », tonquedec en breton. Le labarum est son héraut) et ce type de dieu-ou-démon, sont donc difficiles à cerner.
Si certains dieu-ou-démons s’effacent derrière les signes du Destin, qu’ils transmettent, d’autres sont plus actifs et sont carrément ses agents.
Un dieu-ou-démon ce n’est donc pas seulement un messager au sens étroit du terme, contrairement à ce qu’affirme la propagande monolâtre parlant de malakh ou d’aggelos. Les dieu-ou-démons guident les hommes et les peuples, écartent les périls ou peuvent « châtier » en envoyant diverses maladies. À en croire la Bible, certains de ces dieu-ou-démons appelés anges pouvaient aussi exterminer les nouveau-nés (cf. Exode, 12, 29) ou répandre la peste (2 Samuel 24,16). Idée totalement inconnue du druidisme aussi bien médiéval qu’antique par contre (de drôles d’anges en tout cas !) Et ne parlons même pas des djinns du Coran, car c’est encore pire !
Le dieu-ou-démon celte est infiniment plus qu’un objet de croyances devenues surannées de nos jours. De par son statut paradoxal de prime abord paradoxal, il oblige à réfléchir et devient donc par là même vecteur ou voie d’accès à une connaissance supérieure, en mouvement ascensionnel vers le mystère de l’Être des êtres.
Privé de ces figures théophaniques que sont les dieu-ou-démons, la monolâtrie, elle, par contre, s’inflige un grave démenti à elle-même et sombre dans l’idolâtrie métaphysique : l’apparence littérale et ses dogmes. Elle méconnaît la fonction cognitive des dieu-ou-démons ainsi que leur fonction de manifestation des mystères du monde spirituel.
Connaissance du Destin, connaissance des dieu-ou-démons, connaissance de soi, sont les trois aspects d’une seule et même connaissance libératrice fondamentale. L’Homme a une puissance très faible, mais il peut néanmoins lui aussi participer aux mondes supérieurs. Celui qui meurt sans avoir connu son dieu (au minimum sa fée du genre matra nedsama) meurt de la mort des inconscients. Cette connaissance des dieu-ou-démons, chez l’Homme, présuppose néanmoins aussi la connaissance de soi. Celui qui se connaît soi-même connaît son dieu. D’où la célèbre inscription grecque gravée au fronton du temple d’Abellio à Delphes sur ordre du très-sachant Olenos : gnôthi seauton ; et la non moins célèbre formule d’Ausone : « Divinis Humana licet componere » : « aux choses divines, on peut comparer les choses humaines » (sur l’emploi du mot libra).
Au fond le paganisme celtique, c’est un fantastique espoir, celui d’être un jour transformé en dieux, puisque les dieux sont à la fois des êtres et des états (spirituels). Deuxième bonne nouvelle de notre mythologie, la première suscetlon étant celle de l’inexistence de l’enfer.
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PIERRE DE LA CRAU LE PREMIER DES WOKE
OU DES DÉCOLONIAUX.
La remise en cause de la culture classique gréco-romaine est à la mode actuellement dans nos facultés. Tout comme l’indigénisme le décolonialisme et quelques autres – ismes de cette nature.
Les enfants de Pierre de La Crau, Jean-Loup Alex et Millicent, font observer que leur père s’était déjà lancé dans cette voie en débarquant à Paris à la fin des années 1970.
Le numéro 20 de La revue d’Histoire populaire intitulée « Histoire du peuple français » figurait en bonne place dans sa modeste bibliothèque d’Oléron quand nous l’avons déménagée, ainsi que les œuvres de Pierre Lance qui faisait encore plus fort que nos modernes décoloniaux puisque selon lui la France était encore malade de ses cinq siècles de Pax Romana.
Réhabiliter les « Barbares » face aux Grecs et aux Romains a toujours été une des préoccupations majeures de notre père qui était donc en ce sens décolonial et ce bien avant Barbara Goff puisqu’il s’agissait des années 1970.
À la fin de sa vie, il était beaucoup moins sensible aux thèses de son vieux maître Pierre Lance sur la persistance de la mentalité romaine dans notre pays puisque selon lui il avait sombré corps et bien ; mais il est certain qu’étant jeune, ces thèses paradoxalement optimistes de Pierre Lance avaient motivé chez lui des études décoloniales remontant bien plus loin que le 19e ou le 18e siècle.
Voici par exemple ce qui avait été souligné par notre père dans le numéro 20 du trimestriel intitulé « Le peuple français ».
« Dès 1364, des navigateurs dieppois abordaient les côtes de Guinée et y fondaient un comptoir commercial « Le petit Dieppe ». Par ce geste, les Français s’engageaient dans un long processus de colonisation puis de décolonisation pas encore terminé de nos jours. Ce qui au début reste affaire de marins et de commerçants hardis est vite repris en main par les souverains (François Ier encourage la colonisation du « Canada »), par le clergé et par tout l’appareil d’État. Création de comptoirs, de colonies, explorations de régions nouvelles sont pour les Européens l’occasion de multiples affrontements armés, débouchant sur des querelles dynastiques, politiques, diplomatiques et religieuses. Portugais, Espagnols, Français, Anglais, Hollandais rivalisent sur tous les continents du XVIe au XIXe siècle. Le sang coule à flots. Sang des indigènes qui résistent les armes à la main à cette conquête impérialiste. Sang de marins, de paysans et d’ouvriers des métropoles que l’on fait combattre pour des intérêts qui ne sont pas les leurs. Au début du XX » siècle, ces empires………………
C’est pourquoi dans le numéro I nous avions intitulé un article : La paix romaine, 120 ans d’insurrections. Voici l’une des plus longues et puissantes rébellions paysannes qui ne dura pas moins de… deux siècles ! 120 ANS D’INSURRECTIONS.
Il était une fois un pays qui s’appelait la Gaule. Et ce pays était si riche qu’il attisa les convoitises de la Rome impérialiste. Avec ses 15 millions d’habitants (environ), ses terres céréalières, sa métallurgie de qualité et ses itinéraires sûrs, il ne pouvait qu’attirer les négociants romains. De 58 à 54 av. J.-C., la guerre embrasa les campagnes gauloises. César cherchait à ouvrir aux chevaliers-publicains les grandes voies commerciales de l’Occident. En septembre de l’an 52 av. J.-C., Alésia capitula. Mais la guerre continua. Une résistance sporadique s’installa. Elle devait être bientôt brisée par les atrocités de l’armée romaine et les divisions des Gaulois. En quelques années, 700 000 Gaulois s’étaient fait tuer en combats réguliers ou massacrer en dehors des champs de bataille pour sauvegarder leur indépendance. Jusqu’en 70 après J.-C., des millions de Gaulois se sacrifièrent pour leur libération. Après cette date, les classes dirigeantes firent cause commune avec l’envahisseur. Les nobles, les riches propriétaires fonciers, les négociants et l’élite municipale allaient prêter main-forte à I'occupant. Ces privilégiés se montrèrent prodigues des sommes issues du labeur campagnard. Les portaria (douanes, octrois et péages de toutes sortes…) et les vectigalia (lourde rente foncière) écrasaient de leur poids le peuple. Dès lors, la lutte allait devenir celle des esclaves, des serfs et des artisans gaulois contre leurs oppresseurs gallo-romains. Une sorte de guerre entre plébéiens et riches…
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Deux siècles durant, la Gaule servit d’arène aux prétendants au trône. D’innombrables empereurs furent proclamés, mais tous périrent assassinés par leurs compétiteurs…… La famine fauchait les vies. Partout, le brigandage sévissait. Quant à I'armée romaine (à 90 % composée de non-Latins), elle traversait une profonde crise de démoralisation. Les soldats mécontents de leurs conditions de vie ne pensaient plus qu’au pillage. De nombreuses mutineries éclatèrent, et les déserteurs vinrent grossir les rangs des paysans ruinés et les bandes de brigands. Des unités au complet prirent ainsi le large. Dans le peuple, on préféra souvent se réfugier dans des régions difficiles d’accès. Par contre, ceux qui ne purent quitter leur village durent acquitter un surcroît de charges pour compenser les pertes aux cours de transports, l’administration gallo-romaine exigea des paysans qu’ils lui fournissent denrées et équipements divers. Sans compter les levées en espèces pour la solde des troupes. En définitive, « la Gaule croupissait dans la servitude. Elle ne savait plus ce que signifiait le mot liberté ». Aussi ne nous étonnons pas si, dès la fin du IIe siècle, la réaction des classes pauvres fut massive. La révolte de Maternus débuta à cette époque. L’ÉPOPÉE DE MATERNUS ; LA PRÉHISTOIRE DES BAGAUDES.
Maternus était un soldat romain… Afin de clore cette polémique, laissons parler…un prêtre marseillais, plus explicite révèle les causes de la « bagaudicae : (Vocamus rebelles, vocamus perditos, quos esse compulimus criminosos. Quibus enim aliis rebus Bacaudae facti sunt, nisi iniquitatibus nostris. Nous appelons rebelles, nous appelons scélérats des hommes que nous avons réduits à la nécessité du crime. En effet, comment sont-ils devenus bagaudes, si ce n’est par notre injustice……?) Le mouvement continua… Quelque vingt ans plus tard, vers 216, un général romain fut envoyé en Gaule à la tête de quatre légions, afin d’exterminer les « dissidents et les rebelles ». Malgré leur nombre imposant, les forces gouvernementales ne remportèrent point d’éclatantes victoires. Et les « dissidents >continuèrent à opérer et à faire trembler les nantis. La raison était que le recrutement se faisait dans le peuple qui soutenait les révoltés. Chaque village représentait un gîte pour les résistants ; chaque maison citadine un centre pour préparer des coups de main. Peu à peu, les déshérités s’étaient constitués en une sorte (d’armée populaire), avec ses corps réguliers et ses détachements légers de partisans. D’agriculteurs écrasés par la « fatalité », ils s’étaient transformés en soldats-paysans. Si I'on n’emploie pas le nom de Bagaudes à cette époque, c’est tout simplement qu’il y avait des chefs romains à leur tête, anciens compagnons de Maternus…… Sa renommée grandissait de jour en jour. Si bien que les opprimés t d’Espagne rejoignirent en grand nombre son armée. De toutes parts accouraient les esclaves, les fermiers ruinés et les paysans dépouillés. À l’évocation de son nom et de ses exploits, les cœurs meurtris par les souffrances quotidiennes reprirent espoir. Dangereusement menacés, les privilégiés gallo-romains réagirent. Ils tentèrent de faire croire que Maternus n’était qu’un sanguinaire bandit. Mais les échecs répétés du gouverneur de la Lyonnaise à mettre un terme à ses activités devaient bientôt prouver la fallacité d’un tel jugement.
La force et I'originalité des bagaudes résidaient dans la rencontre de deux éléments. D’une part les déserteurs romains apportèrent aux paysans leur science du combat. D’autre part, les bagaudes, par leur connaissance des régions et des besoins du peuple, donnèrent à la révolte des objectifs « révolu-tionnaires ». Grâce à leur vision « révolutionnaire » de la société, ils allaient libérer des régions de la tutelle romaine. Ainsi naquit un véritable pouvoir populaire. Non seulement ils étaient devenus des « guerilleros », mais également des administrateurs. À la fin III siècle et pendant le IVe siècle, ils s’installèrent dans certains districts et les gouvernèrent, essentiellement dans l’ouest, le sud-ouest et les régions alpines. Au IVe siècle, le peuple était toujours « spolié, assassiné par des juges pervers et sanguinaires, subissant à l’excès la malhonnêteté des gouverneurs, de leurs confiscations et de leurs rapines ». C’est ce qui explique que la résistance ait pu durer aussi longtemps. Sans cesse, les bagaudes harcelaient les troupes romaines. Et ils étaient devenus si puissants qu’en 97-, le général romain qui avait levé le siège de Valence et désirait rentrer en Italie dut leur céder un important butin pour obtenir le libre passage des cols alpins……… Les chroniques rapportent qu’en 435, un nommé Tibatto dirigea une rébellion en Armorique et que… « le menu peuple fit différents complots en faveur des Bagaudes ». Avec le concours de I'armée des Bagaudes, les paysans et les esclaves d’Armorique exproprièrent les nobles de leurs terres et les leur firent labourer. Mais en 437 Tibatto fut pris et condamné à mort » (Philippe NOEL).
Certains trouveront notre jugement un peu exagéré (Pierre de La Crau le premier des décoloniaux et sa revue intitulée « Le triscèle » la première des études décoloniales françaises), mais il est indéniable et personne ne pourra dire le contraire………………………… QUE PIERRE DE LA CRAU N’ÉTAIT PAS UN ADMIRATEUR INCONDITIONNEL DE LA CULTURE CLASSIQUE GRÉCO-LATINE puisqu’il
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était celtisant et a toujours pensé dangereusement schizophrène de la part des antiracistes de soutenir simultanément que les races n’existaient pas, mais que le racisme existait quand même ou qu’il y avait des racisés. Voir ses brochures publiées à l’époque de façon artisanale par son ami Jacques Quatrebœufs des éditions La Bretagne réelle-Keltia (à Merdrignac). Sur le droit à la différence, voire le devoir de différence, le natio-ethnisme, etc. Nous avons même trouvé une lettre d’Olier Mordrel saluant son action, dans ses papiers, alors……
Signé : les héritiers de Pierre de La Crau : Jean Loup Alex et Millicent, de Cuers.
REMARQUE SUR LE COMBAT DES IDÉES.
Il existe donc une conception populaire, voire très utilitaire, de la religion (par exemple saint Antoine de Padoue faisant retrouver ce qui a été perdu, etc.) ; mais, disons-le tout net, dans ce petit catéchisme à l’usage des jeunes écoliers du druidisme ; NOUS ALLONS PRIVILÉGIER LA CONCEPTION FRANCHEMENT SPIRITUALISTE de notre antique religion internationale avant la lettre (les anciens druides n’étaient pas censés, d’après César, aller parfaire leur éducation en Grande-Bretagne ?) ; persuadés d’être en cela d’être plus fidèles au vrai druidisme que ne le sont les tenants d’interprétations relevant d’une conception beaucoup plus utilitaire : voyance, magie, astrologie, santé par les plantes, poursuite d’un combat politique, ou autre.
Ainsi que l’a très bien écrit le grand archéologue français Jean-Jacques Hatt, à qui ce résumé pour débutant doit beaucoup : « Avant toute chose je me suis efforcé de ne jamais oublier qu’à travers les mythes et les dieu-ou-démons, c’étaient les hommes et leurs conceptions de la vie, de l’univers ou de l’outre-tombe, qu’il fallait toujours essayer d’atteindre ; ainsi que les modifications subies par ces idées au cours des siècles, de la protohistoire et de l’histoire des Celtes, indépendants, puis colonisés. La civilisation et la culture celtiques d’abord, ensuite gallo – romaine, sont comparables à un Janus à double face.
Il s’agit de faire comprendre, en la faisant pour ainsi dire revivre sous nos yeux, la religion des très-sachants dans ses caractères profonds et permanents, mais aussi dans ses évolutions et ses transformations. Autrement dit une exigence de compréhension et de RÉANIMATION plus difficile et plus risquée… qu’un agnosticisme peu compromettant et bien commode… En dépit de tout ce qu’elle peut coûter d’efforts personnels et de possible incompréhension de la part de certains de nos frères ennemis de la communauté scientifique (ou autre. N.D.L.R), c’est la voie que nous avons choisie. Dans cette recherche, il fallait vaincre quelques préjugés, le premier sans doute étant le dogme de la séparation totale, de la différence totale, entre le monde religieux des Celtes du temps de l’indépendance et celui des Gallo-Romains.
Cette différence posée a priori est une des raisons de l’agnosticisme des historiens spécialisés.
Mais ce que des esprits humains ont exprimé, fût-ce par de simples images, peut (et doit) être compris par d’autres esprits humains, a aussi ajouté notre auteur, à propos de ce si commode agnosticisme ou de cette bien confortable hypercritique ; car cette religion fait partie du patrimoine intellectuel et spirituel de l’Humanité, au même titre que la culture classique, la civilisation chrétienne, ou l’islam, voire la Djahiliya. Car la Djahiliya fait elle aussi partie du patrimoine spirituel (à respecter) de l’Humanité.
Le plus grave, c’est que la foi païenne est aujourd’hui mise au défi, d’abord par l’indifférence. Et pourtant, les croyances païennes continuent de se manifester ici et là dans tous les domaines, même si elles sont si dégénérées qu’elles ne trouvent plus d’avocat pour les défendre.
L’exigence de vérité nous commande de ne pas affirmer comme vraies des choses incertaines, mais il ne nous interdit pas cependant d’espérer en ce qui nous plaît, même aux choses les plus invraisemblables, voire les plus abracadabrantes. Exemple les houris du paradis musulman.
Le droit de croire est le plus imprescriptible de tous les droits. Mais à une condition toutefois : c’est que nous mettions ces croyances à leur véritable place, et que nous ne les présentions pas pour des certitudes objectivement prouvées, quand ce n’est pas le cas ! C’est à ses risques et périls qu’un druidisant doit proclamer ses croyances et sous sa propre responsabilité.
Il n’a pas le droit pour cela de faire appel à des documents invérifiables ou non consultables tenus secrets… (archives privées, tradition orale de quelques individus seulement, etc.)
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Si, en dépit des résultats de la critique qui ont mis en doute la réalité historique de Guillaume Tell et du serment du Grütli ; un citoyen suisse préfère, malgré tout, se représenter les origines de sa patrie sous ces images qui lui sont chères, et qui font vibrer des fibres très profondes de son cœur ; qui oserait lui en faire grief ?
Il n’offensera la vérité que s’il donne les objets de sa croyance pour des réalités indiscutables. Ce que font hélas encore le gorsedd druidique breton, l’Ar Gaël ou le Message (du groupe druidique des Gaules ou du collège druidique des Gaules). Or l’essentiel de la foi des vrais très-sachants d’aujourd’hui ne doit pas être le sentiment, mais la volonté ainsi que l’intelligence. Il doit s’agir pour eux, à la différence des très-sachants bretons ou des très-sachants du collège druidique d’Ar Gaël de ne pas se permettre d’affirmer comme vrai ce dont on n’est pas certain.
Leur foi consiste seulement à vouloir quelque chose dont la réalité n’est ni prouvée, mais ni réfutée non plus. La sincérité dans ce cas, cela consiste alors simplement à désigner les choses par leur nom, à ne pas dire que l’on sait quand on sait qu’on ne sait pas, mais à reconnaître franchement qu’on VEUT plutôt ; que l’on n’est pas sûr de ne pas se tromper, mais que l’on est décidé à s’accrocher à cet espoir envers et contre tout.
Si parmi les éléments que ce petit résumé doctrinal a dégagés, certains se révèlent par la suite non prouvés, pourquoi y renoncerions-nous si ces croyances sont chargées d’une énergie potentiellement bienfaisante, animant et vivifiant les conduites éthiques ; et si leur abandon crée une sensation de vide menaçant la solidité de tout le reste ? Il convient cependant dans ce cas, pour rester honnête, de reconnaître que si on les adopte malgré l’incertitude de leur authenticité druidique, c’est parce qu’on le veut, et non parce que c’est prouvé.
À la différence de ces groupuscules qui fondent leur autorité sur de prétendues preuves historiques remontant toujours en définitive, à l’hérésie (et par là nous voulons seulement stigmatiser les inventions ou les forgeries de toutes pièces) du Gallois Iolo Moganwg ; qui ne peuvent évidemment, sans compromettre leur existence, admettre qu’on les discute ; les vrais très-sachants, eux, doivent pouvoir travailler librement à la recherche de la vérité en ce domaine. Ils ne doivent pas craindre les révisions que celle-ci exige constamment.
Aucune critique historique du genre de celles qui sont évoquées dans cette lettre ne peut atteindre leur foi. Celle-ci est à l’abri des bouleversements que peuvent provoquer, parfois, les progrès de la science. Leur druidisme doit tirer sa légitimité de son contenu intrinsèque, et non de l’autorité de ceux qui l’auraient prétendument transmis.
Les témoignages humains, même en toute bonne foi, sont toujours extrêmement fragiles. L’esprit humain déforme les événements mêmes les plus récents, voire même crée parfois de toutes pièces des souvenirs n’ayant aucun rapport avec la réalité.
Quelle impudence donc dans ces conditions que d’affirmer comme absolument certain, comme certain à cent pour cent, des faits dont le moins que l’on puisse dire est qu’ils ne le sont pas du tout. Les apparitions du grand rabbi Jésus le Nazoréen ressuscité par exemple (ses apparitions ne figurent pas, par exemple ; dans le chapitre 16 de Marc version Codex Vaticanus. C’est un rajout ! Idem pour le caractère incréé du Coran qui est bien entendu une œuvre humaine et même par trop humaine, voir sa sourate N° 8 sur le butin).
La recherche de la vérité implique une perpétuelle révision disions-nous.
Elle n’est pas un point de départ, mais un point d’arrivée.
Elle est enfin ce qui reste lorsque l’on est parvenu, au prix d’un incessant labeur, à éliminer les erreurs qui l’alourdissent.
La vérité en résumé demeure une incessante quête du Graal.
Celui qui ouvrira nos 12 livres et en parcourra quelques feuillets sera donc peut-être étonné : cette petite bibliothèque ne ressemble en rien aux livres habituels sur le druidisme, et pour cause !
Si ce lecteur est druidisant, il pourra même dire : je ne vois vraiment pas quel rapport tout ceci peut avoir avec le druidisme.
Or ces quelques pages tiennent pourtant à dire tout le message des très-sachants et de leur philosophie religieuse, sans rien négliger ni déformer, tout en l’exposant selon un axe et une structure qui mettent en relief l’essentiel.
Cette petite bibliothèque est destinée à faire partager l’essentiel de notre réflexion en la matière, et donc à encourager les druidisants à dire en adultes leur orientation religieuse.
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Nous devons faire résonner dans toute son intégralité ainsi que dans toute son authenticité, le message du druidisme.
Nous n’avons en aucune façon à choisir dans le Druidisme ce qui nous convient ou ce qui peut faire plaisir à nos interlocuteurs ; mais la fidélité même, au druidisme, exige qu’il soit en quelque sorte approfondi, réinterprété, ou réexprimé, en fonction de la culture où il est rappelé.
Contrairement aux catéchismes druidiques habituels des impostures ou des hérésies ; ce livre n’est pas fait d’une suite de gloses à l’infini sur les quelques lignes du pseudo-texte sacré appelé « Triades bardiques de l’Île de Bretagne ».
C’est un authentique résumé du savoir druidique qui, de façon dynamique, en présente le contenu comme un ensemble où tout se tient, mais où tout n’a pas la même place ni la même importance évidemment.
Les vrais très-sachants comme John Toland ont toujours voulu que les Celtes d’aujourd’hui puissent régénérer leur foi dans un discours cohérent et rationnel sur le divin et le sacré. Cette petite bibliothèque, rassemblée à la hâte, a donc répondu à trois impératifs.
Le premier le voici.
Face à la multiplication des écrits pseudodruidiques, nuisant gravement à la foi celtique authentique, les druidisants au sens strict du terme ont décidé de réagir en mettant au plus vite en circulation un premier aperçu de ce qu’est le druidisme sérieux.
La rapidité de rédaction et la brièveté, des essais figurant dans cette bibliothèque, leur ont, certes, conféré un certain nombre d’insuffisances criantes, mais ces lacunes et ces erreurs seront redressées dans les publications suivantes.
Telles quelles, et malgré leurs défauts, ces quelques lignes suffiront néanmoins, dans un premier temps, à rétablir dans le public la vérité déformée par les plus ou moins orgueilleuses prétentions, émanant des principales sources d’erreurs, ou d’imposture, suivant les cas, ci-dessous.
Collège druidique des Gaules (publication Ar Gaël). Groupe druidique des Gaules (animateurs M. Petitjean et Mme Camou). Ar Gwyr (directeur Jean Thos). Clairière Asgard (animateurs Serge Bourez et Michelle Andréani) sans oublier, mais dans une moindre mesure le Gorsedd breton (responsable M. Gwenc’hlan Le Scouezec).
Il ne manque pas en effet de journalistes assez intéressés (ça doit les flatter) pour accepter sans esprit critique leurs mensonges n’ayant rien à voir avec l’histoire celte (l’authentique) et s’en faire les relais ; ou assez gogos pour ne pas déceler, sous la modestie apparente des attitudes, l’incroyable faiblesse du niveau intellectuel que tout cela implique (la rapide transformation en groupuscule druidique comme les autres, de l’ex-E. D. G. après 1993, en est la preuve).
Loin d’être des élites, ces groupes sont au contraire le refuge de toutes sortes de ratés voulant se donner ainsi l’illusion d’appartenir à une élite méconnue.
Comment faire comprendre à tous ces groupes enfermés dans leur médiocre repliement sur soi, ou dans leurs mensonges et leurs impostures, la liberté que peut apporter la vraie philosophie druidique ?
Avant de conclure la traversée éclair que représentera ce bref exposé du savoir druidique authentique, et de ses grandes lignes, il conviendra aussi de dire deux mots d’un autre problème, car le deuxième objectif le voici. Et il correspond à quelque chose d’encore plus ancien chez nous. Mettre en évidence tout ce qui, dans le christianisme, ou dans le catholicisme, est d’origine païenne (celtodruidique).
Ainsi que l’a écrit en 1928 Arthur Weigall (nous résumons ici son livre sur le paganisme dans la chrétienté), les dieu-ou-démons antiques n’ont jamais complètement disparu. Ils se sont en quelque sorte abrités derrière la nouvelle foi. Leurs sanctuaires comme celui d’Irminsul ont été détruits, et leurs autels abandonnés, mais ils se sont insinués dans le monde chrétien. C’est là que nous les retrouvons aujourd’hui, et qu’ils reçoivent, sous un autre nom, l’hommage qui leur fut refusé sous leurs aspects immémoriaux. Dans les premiers siècles, pour gagner au christianisme les païens qui peuplaient alors encore les campagnes par définition (le mot « païen » vient de paganus = paysan) ; l’Église chrétienne, fort habilement d’ailleurs, lorsqu’elle ne parvint pas en fait à supprimer cette spiritualité ni à détruire ses sanctuaires, les adapta tant bien que mal au christianisme.
La foule se portait-elle chaque année en procession vers un lac, objet d’un antique rituel ?
On construisait au bord une chapelle où l’on plaçait les reliques de quelque saint et, peu à peu, la dévotion qui s’adressait jadis à la dame du lac était détournée à son profit.
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C’est ainsi que la Vierge, les anges, les saints, et les démons, finirent par remplacer les dieu-ou-démons, demi-dieu-ou-démons, déesse-ou-démones, et nymphes ou nixes, de notre antique mythologie.
C’est ainsi que la statue même de l’apôtre Pierre, qui se dresse aujourd’hui dans la basilique du même nom à Rome, n’est autre qu’une statue de Jupiter rebaptisée.
Les baisers des fidèles, après comme avant, n’ont pas cessé d’user l’airain de son orteil. La croyance en la vertu magique de ce geste, a-t-elle vraiment varié avec le changement d’étiquette de l’idole, à laquelle il s’adressait ?
Le siège antique conservé au Vatican et que l’on suppose avoir été le trône pontifical de saint Pierre, est en réalité d’origine païenne. Il se peut même qu’il ait appartenu au culte de Mithra, car il est orné de sculptures qui rappellent ce dieu-ou-démon.
Le mot tiare désigna de toute façon une coiffure persane avant de s’appliquer à la mitre papale.
Sous son aspect maternel de Vierge mopatis (à l’enfant), Épona était représentée par des milliers de statuettes et de peintures ou de sculptures tenant dans ses bras l’enfant divin. Lorsque le christianisme s’établit, ces tableaux et ces images furent attribués immédiatement à la madone et à son enfant (Vierges Noires).
Bref, on christianisait le paganisme, mais du même coup, on paganisait le christianisme.
À la lumière des faits que nous ont révélés, depuis deux ou trois siècles, l’histoire des religions et la mythologie comparée ; nous apercevons que nombre de croyances admises par la plupart des chrétiens pourraient bien n’être, elles aussi, que le résultat du passage dans la théologie chrétienne de mythes ayant une origine plus ancienne que le Christ. C’est aussi à le montrer qu’est destiné le présent ouvrage ». (cf. Arthur Weigall et son ouvrage sur le paganisme dans le christianisme).
Une des meilleures méthodes pour repérer toutes ces idées ou ces notions d’origine païenne, dans le christianisme, est bien simple. Il s’agit de prendre comme point de départ le catéchisme pour adultes des évêques, et de le passer au peigne fin pour y chercher, chapitre par chapitre, ce qui peut être aisément transposé en mode païen (une sorte de réappropriation générale des idées qu’on nous a volées en quelque sorte). Car, chose incroyable, les résultats dépassent alors toutes les espérances. Merci donc aux évêques qui nous ont ainsi fourni l’occasion de prouver définitivement cette vieille hypothèse d’Arthur Weigall : le christianisme et notamment le catholicisme ont une importante racine païenne.
Tout ce qui, dans le catholicisme, ne vient pas du fond biblique strictement juif ou judéo-chrétien (les juifs qui considéraient que Jésus était seulement le messie annoncé) vient d’une acculturation païenne (ou alors d’inventions organisationnelles uniquement destinées à renforcer l’emprise du clergé). Encore une fois merci aux évêques de nous avoir donné l’occasion de le démontrer !
Quant au troisième objectif de ces 12 livres, le voici.
L’Ollotouta druidique s’est actuellement dissoute en groupes ésotériques plus restreints de comrunos (d’initiés) honorant une divinité leur servant de patron protecteur et autour desquels se rassemblent des communautés culturelles diverses. Leur idéal n’est plus le très-sachant tourné vers le monde, qui cherche avant tout à éclairer ses frères en Humanité ; mais le soi-disant sage en quête du salut pour lui-même, voire même le mage détenteur de pouvoirs surnaturels, qui atteint son objectif de façon miraculeuse.
Ce dont on fait personnellement l’expérience dans la transe a pris plus d’importance que les faits, personnes, lieux ou actes historiques. Certains « très-sachants » actuels insistent plus sur le côté mystique du message que sur son approche éthique : le quadruple chemin du druidisme, fir (vérité), cert (justice), dliged (devoir), téchtae (partage).
Ils préfèrent honorer Lug et Hesus en tant que dieu-ou-démons plutôt que de s’inspirer de l’idéal humain qu’ils représentent.
Ils sont plus touchés par les légendes entourant la bien mystérieuse triple naissance du Hesus incarné en Cuchulainn ; que par le fait qu’il fut aussi un homme ordinaire, qui eut à vaincre, durant le cours de sa vie terrestre, des difficultés semblables aux nôtres.
Cette tendance qui consiste à mettre en avant la divinité de certains êtres défunts, afin de leur rendre un culte, plutôt que de rendre hommage à leur personnalité de leur vivant, afin de la prendre en exemple, apparaît d’ailleurs dès le début du druidisme (Évhémérisme).
Or le message du néo-druidisme ne doit pas être un message secret, ou ésotérique, destiné à une soi-disant élite. Il doit s’adresser par principe à tous, mais sans crispation impatiente ; puisque chacun
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pourra en fait avoir autant de vies qu’il le faut dans l’Autre Monde appelé Vindomagos, Senomagos, ou autrement dans certains textes (Mag Meld, Tir na nOg en gaélique, et ainsi de suite) ; pour peu à peu s’élever vers les étoiles (dans le Grand Tout).
Face à une religion bouddhiste par trop spiritualisée ou à une cure des âmes sans soin des corps ; le néo-druidisme doit au contraire s’affirmer de plus en plus comme une prise de conscience de l’interconnexion entre tout ce qui existe ; un renouveau de la corporéité s’exprimant dans l’attention apportée aux sports et aux arts martiaux. Face à la négation des valeurs humaines de ce monde (famille, nation, beauté, féminité, nature, etc.) le néo-druidisme doit se préoccuper d’une façon renouvelée de l’accomplissement et du salut quotidien de l’Homme. Face à la dispersion des esprits dans la superficialité, l’affairement, la fébrilité, le morcellement intérieur, le néo-druidisme doit donc apporter un apaisement et une nouvelle concentration, par descente intuitive dans les profondeurs de notre propre intérieur ; un élargissement de la conscience. Mais l’homme ne peut parvenir à cet état d’awenydd en cette vie ou après, que dans la pleine liberté intérieure, un grand calme et une meilleure compréhension de lui-même, voire une sensibilité plus fine à toute réalité.
C’est pourquoi, rappelons-le, un des buts de cette petite bibliothèque est donc aussi de démontrer que le druidisme des groupes bretons actuels ; ou que le druidisme d’Ar Gaël (Collège druidique des Gaules) voire même celui de Message (groupe druidique des Gaules de Pierre Petitjean et de Mme Renée Camou), ou celui de M. Pierre Voilqué (très-sachant Trenos) ; découle au contraire en réalité, d’inspirations judéo-chrétiennes ou franc-maçonnes. Une grande partie de leur druidisme n’est qu’un judéo – christianisme déguisé, chez eux le véritable druidisme païen est plutôt occulté. Nos douze petits livres ont par conséquent pour vocation d’écarter du fond druidique, pour le retrouver dans toute sa pureté, la masse des concepts judéo-chrétiens qui le dissimulent à nos yeux.
Le premier souci de l’enseignement du vrai néo-druidisme n’est pas celui de l’existence de Dieu ou du Démiurge, celui d’un théisme par rapport à un autre, ou par rapport à l’athéisme ; mais plutôt la lutte contre la monolâtrie rebaptisée « monothéisme » par ses thuriféraires. Car il y a risque d’obscurantisme ou d’intolérance dans tout monothéisme absolu. Tout théisme est une idolâtrie, car l’expression le signifie et, par là, le fige ; son discours se nie lui-même et devient donc athée. Autrement dit, le seul Dieu ou Démiurge qui ne soit pas une idole est un Dieu ou Démiurge qui n’est pas un Théos. Ce que l’on peut traduire aussi de la façon suivante : le seul discours sur Dieu ou le Démiurge qui ne soit pas monolâtre ne peut être que le discours agnostique.
Notre méthode de recherche du vrai druidisme sera simple : le raisonnement par analogie et le consensus des historiens. Il y a consensus des historiens quand la grande majorité d’entre eux attestent la réalité de tel ou tel fait de civilisation celtique. Le raisonnement par analogie permet, à partir de ces faits dûment établis, le traitement parallèle des cas non explicités.
Il est par exemple parfaitement légitime, quoique très délicat, de consulter la tradition irlandaise pour se représenter l’ancien monde mythique des très-sachants. En Irlande, le paganisme celtique a survécu assez longtemps pour être consigné sous une forme littéraire. Nous ne pouvons pas cependant et pour autant, faire marche arrière vers la tradition de l’Ancien druidisme (du druidisme ancestral) contrairement à ce qu’affirme le groupuscule français qui a succédé à l’E. D. G. Druidisme et le très-sachant Pierre Voilqué. Il faut plutôt aller de l’avant… avec lui.
Il s’agit de comprendre l’ancien Druidisme comme l’ont compris les très-sachants du temps de l’Indépendance, mais pour l’interpréter de façon nouvelle ; pour l’appliquer aux conditions de vie qui sont les nôtres, et pour croire en lui dans la mesure où il s’adresse à nous, hommes du XXIe siècle. Ce nouveau groupe (la Fédération druidique des Gaules, bulletin Combutis) est donc dans l’erreur en accordant autant d’importance à la lettre de la Tradition celtique. Le risque de régression est grand et ce qui est encore pire, c’est que cette régression peut passer pour un retour à la vérité ; tant que les groupuscules néo-druidiques n’admettront pas que tout message religieux est, quant à la forme, influencé par son époque. La tradition doit être plutôt conçue comme un message vivant, toujours perçu de façon neuve dans sa mise en œuvre ; un témoignage constant, mais qui peut, et doit, être transmis, sous une forme sans cesse renouvelée, variable en fonction du temps, du lieu et des personnes ; pour résoudre ainsi de façon constructive et non équivoque les conflits spécifiques qui l’opposent aux sciences de la nature, à l’Histoire, à la conscience morale, ainsi qu’au Droit, modernes.
Le néo-druidisme a en fait besoin d’un renouveau spirituel « englobant », au sein duquel une éthique à fondement déontologique pourra servir de source d’inspiration, entre autres, pour l’élaboration d’un
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meilleur ordre politico-social en même temps que juridique. Fir (vérité), cert (justice), dliged (devoir), téchtae (partage).
La substance de l’ancien druidisme doit être préservée, mais dépassée, pour répondre aux exigences de notre temps.
TO DO
CANCELER L’IMPÉRIALISME ROMAIN.
L’impérialisme romain a été mis en cause par ses adversaires et une des meilleures critiques qui en soit restée nous est paradoxalement proposée par Cicéron, qui la réfute. Comme il veut que sa réfutation soit sérieuse, l’exposé de la critique a une grande cohérence : il s’agit d’un texte issu de La République où Cicéron met en scène une ambassade célèbre qui eut lieu en 155 avant notre ère. Athènes qui venait d’être condamnée à une forte amende pour une agression injustifiée va en appel à Rome en envoyant, pour plaider sa cause, trois responsables de la direction des plus prestigieuses écoles philosophiques. Certains pensent que, voulant attaquer les Romains, Carnéade, un des envoyés, fit dans une première conférence un éloge classique de la justice et que son discours fut fort apprécié. Le lendemain, il referme son piège en disant que si les Romains voulaient la justice, ils renonceraient à leurs conquêtes pour être justes, ce qui lui aurait valu l’expulsion immédiate. Cette manière de raconter l’ambassade, séduisante, est en opposition avec les données dont on dispose et en particulier avec le texte de Cicéron, où alternent deux justifications de l’impérialisme, l’une qui n’est pas acceptable, l’autre qui l’est.
La première justification de l’impérialisme part du principe qu’il n’y a pas une justice qui s’imposerait à tous de l’extérieur, comme un droit naturel antérieur aux lois civiles et que tous seraient obligés de respecter. Chaque législation veut l’intérêt de la communauté dans laquelle elle a été mise au point : dans les rapports entre communautés politiques, c’est l’intérêt propre qui devient la règle. La présentation qu’en fait Cicéron se veut ironique (« nous autres Romains qui sommes les plus justes de tous les hommes… »)
« Les Athéniens avaient coutume de jurer, au nom de la patrie même, qu’ils considéraient toute terre portant des oliviers ou du blé comme leur appartenant. Les Celtes jugent déshonorant de travailler la terre de leurs mains pour lui faire donner du blé ; voilà pourquoi ils vont en armes moissonner les champs des autres peuples. Nous autres, enfin, nous sommes les plus justes de tous les hommes, nous qui défendons aux nations qui habitent au-delà des Alpes de cultiver l’olivier et la vigne : nous voulons ainsi augmenter la valeur de nos oliveraies et de nos vignobles. On dit bien que cette conduite est sage, non qu’elle est juste. » (République Livre III).
Cette justification de l’impérialisme par la realpolitik n’est certes pas glorieuse, mais elle est très réaliste et correspond bien à une perception tant des intéressés que de leurs adversaires : l’intérêt est ce qui mène tant les individus que les collectivités. Si un droit régit les relations entre hommes ; entre collectivités, faute d’un droit international, règne la loi de la jungle. Un fragment du texte très corrompu de La République, placé à la suite par les éditeurs modernes le précise d’ailleurs. Comme Alexandre demandait à un pirate capturé pourquoi il infestait les mers, celui-ci répondit : « pour la même raison qui te pousse à infester le monde entier » (République Livre III). Ce type de justification serait adopté aujourd’hui par tous les réalistes, mais ils ne s’en vantent pas.
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La deuxième justification de l’impérialisme, celle qu’accepte Cicéron, relève à nos yeux de la bonne conscience que l’on se donne, voire de l’hypocrisie, car il nous dit qu’il y a des guerres justes, qui sont la réponse à une agression contre Rome ou des alliés et que de plus elles doivent être déclarées dans les règles. Enfin, il constate que la conquête faite a des aspects positifs, non seulement pour Rome, mais aussi pour les peuples conquis « quand les gredins sont mis dans l’impossibilité d’agir injustement » (résumé du discours de Lélius fourni par saint Augustin, Cité de Dieu, XIX, 21, 2).
Conclusion donc de ce livre III selon Cicéron.
Les guerres entreprises sans motif sont injustes. Et aucune guerre ne peut être réputée juste, si elle n’est pas annoncée, si elle n’est pas déclarée dans les règles, si elle n’est pas précédée d’une raisonnable demande de restitution. C’est en défendant ses alliés que notre république a conquis le monde » (Fin du Livre III).*
Cela peut nous sembler une hypocrisie puisque c’est en vertu de cet appel supposé d’alliés que par exemple César envahit la Celtique alors qu’il ne s’agit que d’un prétexte. Cependant le soin mis par César pour employer ce type de justification montre bien que l’exigence de ce motif est encore forte. Il est d’ailleurs possible que dans les origines, la conquête se soit faite sans plan précis et en répondant simplement à des opportunités.
L’impérialisme culturel romain est donc une volonté basée sur une idéologie, le sentiment de supériorité de la culture dominante, et le mépris des cultures dominées. Cet impérialisme culturel a pour but, dans un premier temps, de modifier les modes de vie pour les faire ressembler à celui de la civilisation dominante, c’est-à-dire l’assimilation à l’intérieur même de leurs frontières des populations dominées, en imposant la langue, la culture, le mode de pensée et de consommation, des vainqueurs. Quant au thème qui voit dans la conquête un bien en raison du progrès civilisationnel qu’elle suscite, il faudrait par exemple demander aux derniers occupants indiens de Manhattan (les Leni Lenape ou Loups découverts par les Français – de Verrazzano – en 1524) ou aux Powhatans de Virginie (encore 3000 personnes aujourd’hui), mais surtout pas à Pocahontas, ce qu’ils en pensent.
SINN FÉIN.
*Même cas de figure qu’avec l’Empire arabo-musulman du 9e siècle qui ne résulte que d’une série ininterrompue de guerres défensives. L’islam de cette époque était alors une vraie religion d’amour et ne faisait que se défendre ou défendre son prophète contre les persécutions antimusulmanes les blasphèmes le manque de respect, etc.).
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LA RÉALITÉ DE LA PAX ROMANA.
Ci-dessous ce qu’en a écrit Nicolas Tran dans son étude sur les hommes d’affaires romains et l’expansion de l’Empire (70 avant notre ère – 73 de notre ère). Dans le texte qui suit publicain, latin publicanus, signifie collecteur d’impôts et Cicéron agit surtout en avocat d’affaires pour ne pas dire marron..
L’expansion de Rome outre-mer, dans la mesure où elle fut soumise à des déterminations économiques, présente des caractéristiques – qui se manifestèrent alors pour la première fois dans l’histoire sous une forme aussi marquée et à un degré aussi fort – que l’on retrouva toujours par la suite et que l’on retrouve encore aujourd’hui dans leurs grandes lignes. Bien que la frontière qui les sépare d’autres types de domination économico-politique et culturelle ou linguistique, internationale demeure très fluide, elles sont typiques d’une forme spécifique de rapports – ou en constituent bien plutôt les conditions d’existence – que nous appellerons l’impérialisme.
Ce sont les intérêts de marchand ou de fermiers fiscaux comme Cépion ou Fonteius (le plaidoyer de Cicéron en sa faveur est très instructif) de créanciers des princes ou des États, de fournisseurs des armées. Leurs chances de profits se fondent entièrement sur l’exploitation directe de situations de contrainte politique violente, en l’occurrence d’une violence orientée vers l’expansion permanente.
Les conquêtes réalisées par l’armée romaine entre – 70 et + 73 eurent une influence notable sur les échanges économiques. L’horizon des marchands au long cours s’est progressivement élargi et des contrées fréquentées sporadiquement devinrent beaucoup plus familières. Cette observation est valable sous plusieurs cieux, dans les régions proches du Rhin et du Danube, par exemple. Les hommes d’affaires originaires du port d’Aquilée ont ainsi prospéré grâce aux échanges avec les régions danubiennes.
À l’époque républicaine et au début du Principat, la qualité de negotiator était intimement liée à la fréquentation d’un outre-mer plus ou moins lointain.
Les informations disponibles éclairent surtout le « haut du panier », non seulement les élites plus que les catégories inférieures, mais aussi la strate supérieure de chaque classe plus que les autres. Les negotiatores n’échappent pas à cet effet de sources. Grâce au corpus cicéronien, en particulier, les individus les mieux connus sont des financiers de haut vol, dont les plus importants appartenaient à l’élite ou s’en sont approchés de près. Ils étaient notamment les créanciers des cités soumises à Rome et à ses fortes exigences fiscales.
Puisque le prêt aux cités soumises à l’impôt était l’une des activités très lucratives à laquelle s’adonnaient les hommes d’affaires, il convient de s’intéresser au rapport qu’ils entretenaient avec les publicains (collecteurs d’impôts). La question est d’une certaine complexité, dans le sens où deux plans doivent être individualisés. D’une part, une série de textes issus du corpus cicéronien distinguent clairement negotiatores et publicani. Elle tend à indiquer un clivage entre les affaires et l’affermage des impôts. Si l’on suit K. Verboven, la qualité de publicain ne semble donc pas avoir impliqué en elle-même celle de negotiator, ce qui revient à dire que, sur le plan lexical au moins, les publicani ne constituaient pas une catégorie spécifique de negotiatores. Mais dans les faits, d’autre part, les deux catégories étaient proches, pour plusieurs raisons. Un publicain pouvait s’adonner ou s’être adonné à des negotia priuata, de même qu’un negotiator pouvait prendre à ferme un revenu
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public. Bref, un même individu pouvait être negotiator et publicain, en même temps ou successivement.
L’expansion de l’Empire et l’horizon des negotiatores sont liés de manière à la fois étroite et complexe. La fréquentation ou l’installation d’hommes d’affaires venus d’Italie dans un territoire a assez souvent précédé sa conquête militaire, sans qu’aucun lien causal simple ne puisse être établi entre ces deux dimensions. Néanmoins, dans certains cas, l’existence de relations économiques intenses entre la péninsule italienne et l’outre-mer a en partie modelé ce que le pouvoir romain considérait comme les intérêts stratégiques de la cité. Puis la conquête, la pacification et la transformation en provincia ont pu accélérer le rythme des échanges économiques. Des actes de souveraineté et de maintien de l’ordre – comme la répression de la piraterie en Méditerranée orientale au début de la période – ont en partie répondu à la volonté de protéger les activités des negotiatores. Ces hommes apparaissaient comme des représentants emblématiques du peuple romain. En conséquence, le meurtre de certains d’entre eux a donné le signal de soulèvements contre Rome.
Les negotiatores de la fin de la République et du début du Principat pratiquaient des affaires de natures très diverses, dont certaines relevaient du secteur primaire de l’économie. Vers 81 avant notre ère, les principaux protagonistes du discours Pour Quinctius de Cicéron étaient des entrepreneurs agricoles. Ils étaient mus par les espoirs d’enrichissement offerts par l’exploitation de l’ager publicus et peuvent être décrits comme des negotiatores.
De même, Strabon définit les concessionnaires des mines d’or prises aux Salasses, au moment des campagnes alpines d’Auguste, comme des démosioi (l’équivalent des publicani en latin), mais ils ressortissent aussi à un type particulier de negotiatores. Comme l’a souligné K. Verboven, le point commun de tous les negotiatores est à rechercher dans l’économie de marché, dans leur « engagement dans les affaires du marché ». Caius Quinctius et Sextus Naevius ont formé une société dans le but explicite de réaliser des profits, par le biais d’activités principalement agricoles. Ils n’avaient presque rien en commun avec les descendants des colons lotis sur le territoire de Narbonne, qui devaient pratiquer une agriculture de subsistance avant tout. Au contraire, ils avaient beaucoup en commun avec les commerçants au long cours et les financiers installés dans la Province.
Pour le début de la période envisagée, les financiers sont mieux représentés dans nos sources que les commerçants. Cela ne reflète pas leur nombre parmi les negotiatores, mais indique bien davantage qu’ils n’étaient pas assez importants socialement, et introduits dans les réseaux de l’élite, pour que Cicéron prenne le soin de les recommander, voire de les défendre en justice. Il en résulte que les negotiatores qui achetaient des marchandises pour les revendre sont mal connus. Dans son plaidoyer Pour Fonteius, prononcé en 69 avant notre ère, Cicéron ne les évoque pas directement, mais leur présence dans le pays peut tout de même être déduite de ses propos. Selon l’avocat de l’ancien gouverneur, qui se laisse aller à quelque exagération, la provincia était remplie de negotiatores. Certains se livraient à des opérations financières et étaient en partie responsables des dettes dont les indigènes étaient criblés. Toutefois, le crimen uinarium, les abus dont Fonteius se serait rendu coupable en instaurant des péages le long de l’axe d’acheminement du vin italien vers l’intérieur, implique que certains negotiatores étaient des négociants en vin.
Mais si l’horizon des negotiatores s’étendait au-delà de l’Italie, tous n’opéraient pas dans les mêmes contextes géographiques. Nous l’avons vu, certains œuvraient dans des provinces du peuple romain, d’autres au-delà des limites de l’Empire. Ces deux situations apparaissent dans le deuxième livre des Annales de Tacite. L’historien évoque tout d’abord les negotiatores établis dans le Barbaricum. S’étant avancé profondément dans le territoire des Marcomans, Drusus le Jeune y rencontre des negotiatores qui y avaient été attirés par l’appât du gain et le ius commercii : les Marcomans les avaient officiellement autorisés à développer leurs affaires.
A. Tchernia a aussi montré comment l’acheminement d’huile d’olive méditerranéenne, en particulier de Bétique, vers l’intérieur celte et germanique a commencé. De l’huile italienne, d’Apulie, a d’abord été expédiée en particulier vers la colonie de Lyon au lendemain de sa fondation. Les volumes en cause laissent à penser qu’elle était destinée à quelques grands personnages, aux administrateurs romains notamment. Vers 20 avant notre ère l’huile de Bétique apparaît sur ce marché et un processus s’enclenche, au terme duquel l’Apulie cède sa place. Or, à partir de 16 avant notre ère, la concentration de troupes sur le Rhin créa un important foyer de consommation. Les marchands hispaniques ont alors profité de l’expérience récemment acquise pour utiliser l’axe du Rhône et la
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place charnière de Lyon. En outre, les aménagements et les moyens de l’armée les aidèrent beaucoup à développer un commerce qui s’étendait désormais jusqu’aux confins septentrionaux de l’Empire.
Les hommes d’affaires entretenaient des relations différentes avec les classes dirigeantes, suivant le rang individuel qu’ils occupaient dans la hiérarchie sociale. Néanmoins, de telles relations existaient et leur solidité empêche de penser que les negotiatores formaient un monde à part. Certains d’entre eux entretenaient des rapports d’amitié et/ou de clientèle avec des membres de l’aristocratie. Les lettres de recommandation écrites par Cicéron montrent ce qu’un homme d’affaires pouvait en attendre. Cependant, il faut souligner qu’elles ne concernent guère que des financiers.
Qu’ils soient en contact avec eux ou non, les Grands portaient un regard paradoxal sur les hommes d’affaires. Le jugement que les Romains, en général, portaient sur cette classe sociale était probablement tout aussi ambigu. Les propos plus ou moins hostiles ne manquent pas dans la littérature latine. Cicéron se moque ainsi de Caius Vestorius, en écrivant que ce negotiator n’avait pas d’autre savoir qu’arithmétique. Il est plus cinglant encore dans son traité philosophique sur les devoirs, quand il évoque le commerce en général. Un passage du livre III envisage un cas d’école, la vente de blé d’Alexandrie à Rhodes durant une disette, révélant l’absence de morale des marchands. Ils s’empresseront de vendre au prix fort, sans dire à leurs clients que l’arrivée prochaine d’autres denrées mettra fin à la cherté, ce qui relève de la tromperie et de la fourberie.
En réalité, le regard porté sur les hommes d’affaires était loin d’être univoque. À ce sujet Cicéron écrit par ailleurs ceci : « Le commerce, s’il est réduit, est à considérer comme sordide, mais s’il est grand et abondant, important de partout beaucoup de choses, approvisionnant sans fraude beaucoup de gens, il n’est pas à blâmer absolument, et même si ce commerce, rassasié de gain ou plutôt satisfait, s’est transféré, comme souvent, de la haute mer au port, du port lui-même en possession de terres, il semble que l’on peut à très juste titre le louer. » (De Officiis 1.151.)
En somme, quel que soit leur rang personnel, les negotiatores étaient bien intégrés à la société romaine des premiers siècles avant et après notre ère. Les financiers et les commerçants n’avaient rien de marginaux, pratiquant en vase-clos des activités marginales elles aussi, par rapport aux structures économiques dominantes. Les réseaux de sociabilité et de financement dans lesquels ils prenaient place constituaient un ancrage très solide. Dans l’Empire, ils étaient souvent de véritables acteurs de la domination romaine. Le lien étroit entre les prêts consentis aux cités et la fiscalité romaine en donne une illustration éclatante ; l’implication d’acteurs privés dans l’annone de Rome et le ravitaillement des armées du limes aussi. Même quand les connexions entre les negotiatores et la puissance publique semblent moins évidentes, des citoyens romains d’Italie ont profité de l’Empire pour s’assurer une mainmise sur d’importants courants d’échanges. Pour l’essentiel, les échanges entre Rome et ses antennes portuaires, d’une part, et l’Empire, d’autre part, correspondaient alors à un commerce actif.
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LE DISCOURS WOKE DE CALGACUS (Tacite, Agricola 29-32).
Parmi les chefs, Calgacus se distinguait par sa bravoure et son lignage. Devant la foule qui s’agglutinait et réclamait le combat, il prit la parole. Voici les propos qu’on lui prête :
« Chaque fois que je pense à nos raisons de faire la guerre et à l’état d’urgence où nous sommes réduits, j’ai vraiment l’espoir que cette journée, qui scelle aujourd’hui notre entente, marquera pour toute la [Grande] Bretagne le début de sa liberté. Car c’est tous ensemble que vous êtes ici réunis, vous qui n’avez jamais connu l’esclavage. Au-delà de notre terre, il n’y a plus rien. La mer ne nous protège même plus : la flotte romaine nous y attend. Alors, prendre les armes pour combattre – un honneur que revendiquent les braves – c’est le choix le plus sûr, même pour les pleutres !
Ceux qui autrefois, avec des fortunes diverses, ont combattu les Romains, voyaient dans notre force armée l’espoir d’être secourus. Pourquoi ? Nous étions de toute la Bretagne les plus dignes et, pour cette raison, nous vivions dans son cœur même, sans voir les rivages où vivent des hommes asservis. Nous préservions même nos regards à l’abri des atteintes de l’oppression.
Nous occupons les confins du monde, la terre des derniers hommes libres, car c’est notre éloignement même et tout ce qui entoure notre réputation qui, jusqu’aujourd’hui, nous ont protégés ; or tout ce qui est inconnu est magnifié.
Mais maintenant voilà que s’ouvre l’extrémité de la Bretagne. Au-delà, il n’y a plus un seul peuple. Il n’y a plus rien. Rien que des vagues, des écueils et une menace encore plus grande, celle des Romains. Ne croyez surtout pas que vous échapperez à leur fierté méprisante en vous effaçant dans l’obéissance.
Le monde entier est leur proie. Ces Romains, qui veulent tout, ne trouvent plus de terre à ruiner. Alors, c’est la mer qu’ils fouillent ! Riche, leur ennemi déchaîne leur cupidité, pauvre, il subit leur tyrannie. L’Orient, pas plus que l’Occident, n’a calmé leurs appétits. Ils sont les seuls au monde qui convoitent avec la même passion les terres d’abondance et d’indigence.
Rafler, massacrer, saccager, c’est ce qu’ils appellent à tort asseoir leur pouvoir. Font-ils d’une terre un désert ? Ils diront qu’ils la pacifient (ubi solitudinem faciunt, pacem appellant).
La nature a voulu que les enfants et les proches soient aux yeux de chacun les êtres les plus chers. Les conscriptions les arrachent pour en faire ailleurs des esclaves. Même si en temps de guerre, épouses et sœurs ont échappé aux appétits sexuels des envahisseurs, ceux-ci attentent à leur pudeur en invoquant l’amitié et les lois de l’hospitalité.
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Les revenus des biens sont dévorés par l’impôt, chaque année les récoltes passent à donner du blé, les corps eux-mêmes et les bras s’épuisent, sous les coups et les injures, à défricher des forêts et assécher des marais.
Ceux qui sont nés pour servir ne sont qu’une seule fois pour toutes destinés à être vendus comme esclaves. Mieux, ils sont nourris par leurs maîtres. Mais la [Grande] Bretagne, c’est chaque jour qu’elle achète son asservissement, chaque jour qu’elle le repaît.
Au sein du personnel domestique, tout esclave acheté en dernier lieu est tourné en ridicule, même par ses compagnons d’esclavage. De la même façon, dans ce monde domestiqué depuis bien longtemps, on nous voue à l’extermination : nous qui sommes les derniers venus, nous ne valons rien ! Car il n’y a ici ni champs, ni mines, ni ports à exploiter pour lesquels nous serions réquisitionnés.
Bien plus, la bravoure et la fierté de peuples soumis sont insupportables pour qui leur impose sa loi. Leur éloignement aussi et leur isolement sont en eux-mêmes d’autant plus suspects, qu’ils sont un meilleur rempart.
Pour vous qui n’avez aucune chance d’inspirer la clémence, c’est le moment d’être braves, que vous teniez à votre vie ou à la gloire. Les Brigantes, eux, menés par une femme, ont incendié la colonie, ils ont pris d’assaut le camp et, si le succès ne les avait pas portés à l’inaction, ils auraient pu secouer le joug. Mais nous, qui sommes restés ce que nous sommes et ignorons la soumission, nous, qui porterons les armes pour rester libres et non vivre de regrets, montrons, dès le premier choc, quels guerriers la Calédonie s’est réservés.
Croyez-vous vraiment que les Romains soient aussi vaillants à la guerre que dévergondés dans la paix ? Il n’y a que nos divergences et nos différends pour mettre en valeur ces gens, qui font des défauts de leurs ennemis la gloire de leur propre armée. Or cette armée n’est qu’un ramassis des peuples les plus disparates. Seules des circonstances favorables préservent son unité, que des revers réduiront en miettes. Mais, peut-être, pensez-vous que, tout en offrant leur sang pour asseoir ce pouvoir étranger, des Gaulois et des Germains et – quelle honte ! – bien des [Grand] Bretons, qui furent plus longtemps les ennemis que leurs esclaves, se sentiront retenus par des sentiments de fidélité et d’attachement ?
La crainte et l’effroi sont de bien faibles liens d’amitié et, quand ils sont dépassés, ceux qui n’ont plus peur se mettent à haïr.
Tout ce qui fait vaincre est de notre côté. Ici, les Romains n’ont pas d’épouses qui enflamment leur courage, pas de familles pour les blâmer s’ils ont fui. Beaucoup n’ont pas de patrie ou peut-être est-ce une autre que Rome.
Ils ne sont que peu nombreux. Ils ne connaissent rien de cette terre et cela les fait trembler : le ciel lui – même, la mer, les forêts, c’est l’inconnu tout autour d’eux ! Tout se passe comme si les dieux nous avaient livré des prisonniers enchaînés !
Ne vous laissez pas impressionner par de vains dehors ni par l’éclat de l’or et de l’argent, qui ne protège ni ne blesse.
C’est dans les rangs mêmes de l’ennemi que nous recruterons nos propres troupes [NDLR. Alors là, on croirait vraiment que Calgacus parle des guerres modernes !] Les [Grand] Bretons reconnaîtront leur propre cause ! Les Gaulois se souviendront de leur liberté perdue ! Tout comme viennent de le faire des Usipiens, tous les autres Germains déserteront !
Après cela, qu’est-ce qui nous fera encore peur ? Des fortins vides ? Des colonies de vieillards ? Des municipes en mauvaise posture où se déchirent ceux qui se soumettent de mauvais gré et ceux qui les dominent injustement ?
Ici, il n’y a que leur général, ici, il n’y a que leur armée. Là d’où ils viennent, on paie des impôts, on peine dans les mines et tous les autres sévices s’abattent sur ceux qui sont asservis. Subirons-nous
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ces outrages à jamais ou nous en vengerons-nous tout de suite dans cette plaine ? Marchez au combat en pensant à vos aïeux et à vos fils ! ». SINN FÉIN ! (Tacite, Agricola 29-32.)
QUELLES SONT LES VALEURS LES PLUS IMPORTANTES QU’ENSEIGNE NOTRE RELIGION, CELLE DE LA VÉRITÉ ??
Afin de construire un homme nouveau avec le meilleur de l’ancien, ce qui est d’importance primordiale, c’est de chercher si la démarche ou la voie théologique druidique, dans son ensemble, peut encore recevoir l’approbation des esprits de notre époque.
Dans ces 12 opuscules sur le druidisme, nous aurons donc l’honnêteté de rendre évidentes les tendances de notre position en la matière : l’ancien druidisme n’est admissible qu’en partie, car il comporte des éléments inassimilables par les mentalités modernes.
L’intellectuel celtisant doit éliminer du druidisme tout ce qui le rend invraisemblable, tout ce qui répugne à l’intelligence, afin de rétablir, autant que faire se peut, les faits réels et la simple croyance qui en dépend.
Il est essentiel que le druidisme soit en mesure de répondre aux plus hautes exigences de la pensée moderne ; et ce serait commettre une très grave erreur pour son avenir que de s’abstenir de toute rectification, par peur des critiques des railleries ou des insultes.
[Paragraphe avec en marge la mention manuscrite « à supprimer », mais maintenu par les héritiers de Pierre de La Crau. Il est vrai que ce n’est pas le courage qui caractérise le néo-druidisme français d’aujourd’hui. Voir la fuite assez lâche des très-sachants Pierre Voilqué, Pierre Petitjean et Henri Duvivier, lors du solstice d’été de Brancion en 1987, auquel ils participaient.
Il ne faut pas maintenir à tout prix des positions indéfendables. Mieux vaut abandonner du terrain que de perdre des forces en une lutte inutile. En rejetant certaines affirmations néo-druidiques pourtant sanctifiées par l’usage, cette petite bibliothèque cherche simplement à resserrer la ligne de front du druidisme afin de le rendre défendable.
Car les motifs pour lesquels les hommes du XVIIIe siècle ont cru en ce néo-druidisme exercent sur nos mentalités du XXIe siècle une action à peu près opposée.
Ce que n’ont pas compris nos amis de la Fédération druidique des Gaules ayant succédé à l’E. D. G.-Druidisme (animateurs : MM. Pierre Collier, Bernard Hénot, Henri Larcher, Jean-Lionel Manquat, etc.) ou les très-sachants bretons ; c’est que le défi du druidisme actuel est celui du dépassement de la tradition de l’ancien druidisme ou druidisme ancestral ; par l’accomplissement, non de sa lettre, mais de son esprit. Fin du paragraphe en question]
La découverte du principe immanent ou transcendant à l’intérieur de soi-même, un peu comme dans le cas du panenthéisme, constitue effectivement une valeur centrale dans la religion druidique. Viennent immédiatement après celles qui suivent.
La responsabilité individuelle : chacun vient au monde avec une destinée à réaliser. Un capital de chances à saisir (gaefa diraient nos amis odinistes). On accepte les données de son destin personnel, et l’on fait pour le mieux dans le cadre que l’on a. Cela n’empêche aucunement de viser la réussite
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familiale, sociale, ou autre ; car le vrai Celte de cœur et d’esprit n’est pas fataliste, comme on l’entend si souvent dire, il est réaliste.
La réciprocité. Conformément aux principes généraux des Teasgasc Riogh, les très-sachants enseignent donc à ne pas faire subir aux autres ce qu’on ne veut pas subir soi-même, et à respecter les autres dans la mesure exacte où ils vous respectent. Principe mis en évidence par Marcel Mauss avec son célèbre « dadami se dehi me » sanscrit, formule grossièrement traduite par les Romains avec leur « do ut des ». Et inversement évidemment, il ne faut pas faire aux autres ce que l’on ne voudrait pas soi-même subir. Règle d’équilibre élémentaire.
Le respect des ancêtres et de sa propre culture. Pas de haine de soi-même, pas de racisme contre soi-même ou les siens, pas d’antiracisme qui soit en réalité un racisme anti quelque chose.
Travaux pratiques. Bien des localités portent un nom d’origine celte. Exemples : Londres, Vienne en Autriche, Milan, Paris, etc. Et vous, connaissez-vous l’origine du nom de votre ville ou de votre village ? Il existe plus d’une manière d’exprimer sa fidélité à ses origines, connaître l’origine du nom de son agglomération en est un. New York par exemple est une deuxième York, nom qui vient du celte Eburacum signifiant « la forêt d’ifs ». Le symbole de New York devrait donc être une baie d’if et non une pomme.
Si vous ne le savez pas, faites votre enquête, consultez les ouvrages concernant les noms de divinités, les toponymes. Quand vous aurez recueilli tous ces renseignements, faites apposer un panneau explicatif à l’entrée du village ou dans le centre-ville.
Croyez-vous en un seul Dieu ou le Démiurge, créateur du ciel et de la terre ?
Pour un vrai très-sachant, cette notion de Dieu ou Démiurge, en tant qu’Être supérieur, créateur du ciel et de la terre, n’est pas une bonne question, n’est pas une approche adéquate, car elle se réfère à un concept trop réducteur.
Création, conservation et transformation par la destruction, ne sont pas des actes divins posés une fois pour toutes. Bien que les durées en soient infiniment longues, ce processus est cyclique.
Pour un judéo-islamo-chrétien la création suppose un acte souverain ex nihilo. Rien de tel pour un très-sachant ! Entre deux cycles, le Bitos ou Univers se résorbe en eau primordiale et en feu primordial, indifférencié, en matière et en âme indifférenciées pourrait-on dire. Un dualisme relatif que nos amis brahmanes appellent pralaya.
Lorsque le Bitos ou Univers parvient à se manifester (diverses approches explicatives existent : panthéisme, panenthéisme), c’est par un processus qui va du plus subtil au plus grossier. L’Univers visible, matériel n’est que la dernière étape d’un processus ayant commencé avec le spirituel.
Bien qu’ils soient partout présents, le Destin et ses enfants les dieux, Taran/Toran/Tuirean, la GDMC et ainsi de suite, ne constituent la Réalité supérieure que pour leurs dagolitoi ou fidèles respectifs (hénothéisme).
Au-delà du Tocade, de Taran/Torann/Tuireann et de la GDMC, il y a une Réalité supérieure, dont on ne peut rien dire pour la définir, car elle englobe tout. La notion de Pariollon ou de Chaudron cosmique universel (et notre tradition par cette image souligne sa nature impersonnelle, ce n’est pas une personne dotée d’un sexe, mais une chose) exprime notre refus d’avoir un dieu-ou-démon supérieur créateur et personnel dans ce panenthéisme, à cause de notre incapacité fondamentale à concevoir le Divin Supérieur.
Croyez-vous aux miracles ?
Non, en principe pas du tout. Le miracle, à la différence du prodige, implique un fait absolument contre nature. Il s’oppose aux lois fondamentales de la nature. Il suppose une puissance infinie.
Or l’ensemble des Lois cosmiques qui gouvernent notre monde exclut les fantaisies arbitraires qu’un démiurge se permettrait pour satisfaire on ne sait quoi. Il n’y a pas de place dans notre panenthéisme pour un dieu créateur qui créerait le monde pour faire mumuse (par amour disent les chrétiens) avec et le détruire une fois qu’il en sera lassé (par amour de la justice disent les Judéo-islamo-Chrétiens).
Il existe des lois fondamentales de la nature qu’il est impossible de contredire.
En sciences physiques, il y a par exemple deux principes premiers.
Le principe de la conservation de la masse : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » (Anaxagore de Clazomènes, maxime reprise plus tard par Lavoisier). Il est impossible de créer à partir de rien ou, inversement, d’anéantir quoi que ce soit.
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L’entropie (Carnot) : Dans un système isolé, n’échangeant ni travail ni chaleur avec l’extérieur, la quantité totale d’énergie utile diminue constamment. C’est cette deuxième loi de la thermodynamique qui explique pourquoi le temps s’écoule dans une direction et non dans l’autre, et pourquoi toute forme d’organisation meurt un jour ou l’autre.
D’autres lois ne peuvent être dépassées sans une puissance infinie. « Il n’existe aucun mouvement instantané ».
« L’avenir ne peut être entièrement prévisible » (il est lié au hasard, à la liberté des individus).
Dans le domaine de la biologie, les lois de la nature sont bien plus nombreuses et remarquables. Un cadavre décomposé ne ressuscite pas, un organe ne repousse pas ou si peu, une moelle épinière sectionnée ne se recolle pas, et ainsi de suite.
Croyez-vous aux prodiges ?
Le prodige ne s’oppose pas aux lois de la nature. Il ne fait que les appliquer de manière curieuse, et invite à la recherche. Exemple de prodiges : lévitation, télépathie, rêve prémonitoire peu précis, guérison surprenante, mais explicable par la force d’une psychologie, stigmates. Les judéo-islamo-chrétiens ne reconnaissent d’ailleurs jamais leur Dieu ou le Démiurge comme auteur de prodiges en tant que tels, car, selon eux, ils n’ont pas nécessairement Dieu ou le Démiurge pour cause (cause psychologique, matérielle ou imputable à une créature surhumaine). CONTRAIREMENT AU CAS DE LEURS « MIRACLES » D’AILLEURS.
Ci-dessous le point de vue judéo-islamo-chrétien sur les prodiges. Il suffit de mettre le mot « dieu » à la place de celui d’ange pour avoir le point de vue véritablement païen en la matière !
« Les anges, qui sont des créatures, peuvent par leur propre puissance réaliser de nombreux prodiges : faire élever une personne dans les airs, lui faire parler une langue étrangère, qu’elle n’a jamais apprise, guérir certaines fièvres, cicatriser avec rapidité des plaies, etc. Tous ces prodiges, et bien d’autres, nécessitent une réelle puissance, mais une puissance limitée : quand on observe bien chaque phénomène, on s’aperçoit qu’il ne sort pas du cadre des lois de la nature. Il se contente de les activer. L’ange possède une telle capacité. Or, il existe des anges bons et des anges mauvais…
Les bons anges ont réalisé pour Dieu ou le Démiurge bien des prodiges qui, malgré tout, ne constituent pas des miracles. Quand ils firent s’enflammer devant Moïse un buisson qui ne se consumait pas, quand ils frappèrent de plaies les Égyptiens, jusqu’à la mort des premiers-nés, quand ils firent traverser la Mer Rouge au peuple juif à pied sec, quand ils lui donnèrent des cailles ou de la manne à manger au désert, ils ne firent qu’utiliser à bon escient les forces la nature ou leur propre force. Nul besoin dans tous ces cas d’une puissance infinie. La manne n’est que l’exsudation sucrée de certains arbustes comme le tamaris mannifera. De même, plus récemment, ce sont les anges qui donnèrent aux foules de Fatima l’impression que le soleil dansait sur lui-même. Ce n’était qu’une impression, puisque le phénomène ne fut observé qu’autour de ce lieu où apparaissait la Vierge. On peut parler de la même manière de certains saints canonisés ».
Les signes par contre sont des séries de coïncidences trop frappantes pour être dues au hasard. Le signe est plus subjectif, mais il est aussi très personnel. Il peut donc toucher la personne davantage qu’un miracle scientifiquement vérifiable, mais plus lointain. La personne se sent soudain entourée d’un autre monde invisible. Par contre, le signe ne prouve rien pour celui qui ne l’a pas reçu personnellement.
Croyez-vous dans les pouvoirs préternaturels de l’Homme ?
Oui et non !
Si l’on considère le passé, si l’on se réfère au passé, alors notre réponse est non. Il est faux, inexact et mensonger, d’affirmer ou de laisser entendre que l’être humain a jadis joui de pouvoirs préternaturels comme l’immortalité ou l’absence de concupiscence.
Maintenant si l’on se tourne vers l’avenir, alors notre réponse est oui ! L’Homme peut vivre en harmonie avec la Nature, accroître ses connaissances et sa faculté de connaître, faire reculer la souffrance, conquérir une certaine forme d’immortalité.
Est-ce que vous croyez en Jésus ? Comment le percevez-vous ?
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Jésus est parfois considéré par certains très-sachants comme un grand rabbi habité par l’Esprit. D’autres pensent qu’il n’a pas existé et qu’il n’est qu’un mythe messianique juif. Il est vraisemblable qu’il a existé un grand rabbi nommé Jésus, mais la réalité de son action fut sans doute bien en deçà de ce que nous en racontent les écrits de ses avocats regroupés sous le nom de Nouveau Testament.
La Bible est le livre sacré du christianisme, qu’en pensez-vous et comment la considérez-vous ?
Les vrais Celtes d’esprit fondent leurs croyances religieuses sur l’expérience intérieure et la tradition, non sur une quelconque révélation. À quelques exceptions près ils ne voient aucun intérêt à la Bible en tant que source d’inspiration spirituelle, ou plus exactement ils n’y voient pas plus d’intérêt que le Popol Vuh des Mayas ou la Bhagavad-Gîtâ des Indiens. Et d’ailleurs, d’après la Bhagavad-Gîtâ, bien que tous ces chemins diffèrent, leur but fondamental reste le même : échapper au cycle des renaissances (ategenetones) à travers la réalisation du Soi. Plus simplement, il s’agit de « découvrir » ce que l’être humain « Est » en profondeur, au-delà de la personnalité, des concepts, des émotions, et des sensations.
Croyez-vous à la vie après la mort ?
Le druidisme a toujours eu diverses conceptions à ce sujet.
Les mythes les plus anciens et qui sont également les plus simples ; sont ceux qui nous dépeignent des âmes personnalisées (l’âme de X ou Y) survivant dans un premier ciel ou un premier monde, à peu près comme on peut vivre dans celui-ci. La Terre Pure ou Vindomagos. Cette terre pure est un autre monde merveilleux, où les âmes individuelles peuvent achever leur purification avant de passer à un stade supérieur. Car d’autres mythes chez nous évoquent des ciels et des mondes célestes, où les âmes libérées de leur personnalisation, de leur individuation, peuvent ensuite passer, pour se fondre dans le courant universel de la vie.
Nous avons évoqué plus haut la notion d’Être Dieu ou Démiurge Unique. Il est dit aussi qu’au niveau de l’être humain, l’équivalent est l’anamone et nos traditions posent clairement l’équation : anamone = larme de feu de l’Être Dieu ou le Démiurge unique. Ainsi que l’a très bien écrit Ausone (sur l’emploi du mot libra) « Divinis humana licet componere » : « Aux choses humaines, on peut comparer les choses divines ».
Il n’existe aucune différence de nature entre la Réalité Ultime au niveau humain et la Réalité Ultime au niveau cosmique.
On voit donc qu’il est tout à fait inadéquat de traduire le terme anamon par esprit. Beaucoup font l’erreur. Pourquoi ? En Occident, on a tendance à penser que l’anamon est un petit quelque chose d’éternel en nous, qui nous survit pour s’affiner progressivement au contact de la Puissance Divine. Pour un très-sachant, ce concept correspond plutôt à la notion d’esprit, un composé de pensées, pulsions, désirs, angoisses, tout à fait fugace, et surtout nullement éternel, pour la bonne raison qu’il est illusoire.
Comment la mort affecte-t-elle nos vies, et comment la voyez-vous ?
La mort est un passage. Une expérience de vie s’achève, après un long moment, ou au contraire beaucoup trop vite à ce qu’il nous semble, mais il n’y a là aucune injustice. Phénomène normal et inévitable, la mort est la seule certitude dans la vie d’un homme. En toute bonne logique, la mort ne devrait affecter la vie de personne. Dans la pratique, ce n’est pas si clair, car il est évident qu’un très-sachant qui perd son enfant souffre autant et pleure autant qu’un pasteur, un pope, ou un rabbin… Il est toujours difficile de ne pas voir les sentiments interférer.
Comment voyez-vous le péché ?
La notion de péché, telle qu’elle est enseignée (ou comprise) dans le christianisme, crée une situation culpabilisante et le plus souvent paralysante. Pour un très-sachant, il est suffisant de développer une claire compréhension de ses erreurs ou de ses fautes. Les erreurs graves génèrent des situations dont tôt ou tard on subira les conséquences. La pratique bien facile de l’absolution n’existe pas dans le druidisme.
Est-ce que vous croyez en un endroit ou en un lieu appelé enfer, voire paradis ?
Le paradis ou vindomagos est un état de l’être et non un lieu ou un endroit physique ; même si nos traditions par commodité l’ont pendant longtemps situé dans des îles à l’ouest du monde, pour d’évidentes raisons de symbolique universelle (là où le soleil se couche).
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L’enfer ou anderodubnon est également un état de l’être et non un lieu ou un endroit physique ; et dans tous les cas un état de l’être transitoire, servant de sas avant une nouvelle réincarnation sur terre, par exemple en bacuceos (cinq ou six cas par siècle) ou en seibaros. Ce qui le rapproche donc plus de la notion chrétienne de purgatoire que de celle d’enfer au sens strict du terme, cet enfer étant éternel chez les judéo-chrétiens et les musulmans si je ne m’abuse. Voir aussi en Irlande le folklore relatif aux royaumes de Donn (Donnotegia) ou de Tethra, ainsi qu’au Pays de Galles l’imagerie populaire entourant l’Anwn (vieux celtique Andumno) autrement dit les royaumes d’Arawn et Gwynn.
Qu’est-ce qui peut bien alors vous pousser à vous comporter de façon éthique et de façon responsable ?
Les conditions dans lesquelles se déroule la présente vie (parents, éducation, environnement social, circonstances extérieures sur lesquelles on n’a pas de prise, ou autres) ne sont pas neutres dans la manière dont chacun mène sa vie. Dit autrement, il y a certes responsabilité individuelle, mais il est non moins évident qu’il est toujours plus ou moins difficile de suivre sa destinée personnelle, c’est-à-dire d’accomplir ce pour quoi on est fait.
Quelle est votre attitude envers les femmes et les minorités ?
Il convient de distinguer ce qu’enseigne la Tradition, d’une part, et les réalités sociales, d’autre part, qui n’en sont malheureusement pas toujours un fidèle reflet. L’attitude vraiment druidique envers les femmes, d’après notre littérature orale, est de la considérer comme la Puissance Divine qui donne, qui transmet la vie, et donc un peu comme une déesse, ou bien une fée si l’on préfère ce terme. La plupart de nos cours d’eau ont des noms féminins d’ailleurs. Mais trois fois hélas, bien sûr, la pratique sociale est souvent aux antipodes de ces bons principes.
Quant aux minorités (par exemple d’atectoi, voir les shoudras en Inde), elles sont respectées, pour autant qu’elles respectent les minorités plus importantes et qu’elles ne se montrent pas racistes à leur égard, car on est toujours la minorité de quelqu’un sur cette planète, le monde est fait de minorités vu du ciel. Il n’y a en réalité que des communautés « in » et des communautés « out », désolé si je ne trouve pas de meilleure formule, mais la question ne se posait pas en ces termes il y a 2500 ans, d’un point de vue subjectif et psychologique, le tout relevant de l’ordre du ressenti, devenu parfois ressentiment chez certains si j’en crois un de vos philosophes nommé Nietzsche. Excusez-moi si j’écorche son nom il ne fait pas partie de notre enseignement et il fait plutôt figure d’étranger dans notre tradition même si son petit côté Vauvenargues a de quoi faire réfléchir. En résumé, en tant que minorité nous-mêmes ainsi définie, nous respectons les autres minorités DANS L’EXACTE MESURE OU ELLES NOUS RESPECTENT NOUS (principe de réciprocité).
N.B. Au niveau linguistique, pour respecter la grammaire du vieux celtique, nous distinguons dans nos textes ; les atectai : les sujets, ou citoyens non druidisants, quand on en parle comme d’une collectivité ou d’un tout, du passé le plus lointain ou de l’Antiquité. Les atectoi : les mêmes, idem, mais de nos jours. Et atectos/a : quand on parle d’un de ses membres. Atectioi, au pluriel.
Mais attention, rappelez-vous de ce que je vous ai dit, une minorité ou une majorité peut être relative. On est toujours la minorité d’une majorité. C’est donc à la façon dont elle traite ses minorités réelles (réelles et non ressenties seulement, subjectivement parlant) que l’on reconnaît une démocratie ; et il ne faut surtout pas confondre antiracisme et racisme anti… quelque chose d’autre. Car trop souvent hélas l’antiracisme n’est qu’un racisme à rebours, ce qui n’est pas mieux. On peut par exemple reconnaître la nature réelle du régime politique zimbabwéen, à la manière dont il traite sa minorité blanche.
Croyez-vous que le druidisme soit la seule vraie religion ?
Surtout pas ! Cette prétention à l’hégémonie et au « dieu-ou-démon unique » est bien caractéristique des religions qui se veulent « révélées », c’est-à-dire des monolâtries juive, chrétienne et musulmane. L’extrême diversité des courants, de ce qu’on appelle le druidisme, permet à chacun de trouver des manières d’exprimer sa sensibilité religieuse.
En général, comment caractériseriez-vous votre religion ?
Englobante, tolérante. On pourrait, certes, citer des exemples multiples d’absence de tolérance ou d’affrontements interreligieux, mais ils n’affectent les vrais druidisants qu’à la marge.
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Quand vous avez besoin de soutien moral, vers qui ou quoi vous tournez-vous ?
Le premier des moyens en dehors de la prière, des prières, des longues prières, évidemment, est de rentrer en soi-même et de pratiquer une certaine introspection. Pour les hommes ou les femmes qui en ont la capacité, la pratique de la méditation est bien évidemment la voie royale à suivre dans ce cas.
La méditation druidique est néanmoins bien différente de la contemplation monastique chrétienne ou bouddhiste. Cette voie spirituelle a pour but l’épanouissement par fusion dans le Divin du Grand Tout. Un semnothée est quelqu’un qui est passé au-delà de la psyché ordinaire.
La prière est une concentration ou tentative de concentration de toutes les forces positives de notre être. Sous cette forme, la prière ne constitue donc pas une solution spécifiquement druidique, mais une force universellement pratiquée par ceux qui sont en attente.
Le troisième et dernier des moyens à utiliser dans ce cas, est le rituel.
Les très-sachants ont en effet toujours cru en la puissance du rite et de la parole. Le rituel consiste en des oblations (offrandes de feu, de lait, de nourriture, ou autres) devant les diverses représentations de la divinité, ce qu’on appelle des arcanes en sanscrit, et en des récitations de prières.
Ceux qui n’ont pas les compétences nécessaires peuvent faire appel pour cela aux spécialistes de ces questions que sont les gutuatres/gutumatres (ou les vates pour ce qui est des problèmes de santé). Les rituels, encore une fois répétons-le, sont des occasions de contact avec les Puissances Supérieures. Bien entendu, certains rites peuvent aussi avoir pour but de demander que les circonstances soient favorables, à ce que telle ou telle chose se produise, ou ne se produise pas. Leur efficacité dépend largement de ce que l’on entend par effet placebo, car l’effet placebo est bien réel.
L’effet placebo (du latin : « je plairai », sous-entendu : « à qui me demande de prescrire… » si ma mémoire est bonne) est l’écart positif constaté entre le résultat thérapeutique observé lors de l’administration d’un médicament ; et l’effet thérapeutique prévisible en fonction des données strictes de la pharmacologie.
[Paragraphe avec la mention manuscrite suivante en marge « à rajouter ». Tout geste thérapeutique, valide ou non, comporte d’ailleurs évidemment une part plus ou moins grande d’effet placebo. Cet écart est de l’ordre de 30 % habituellement et peut atteindre 60-70 % dans les migraines ou les dépressions. Ce phénomène a été mis en lumière notamment par Bernheim au cours de ses recherches sur la suggestion, dont le placebo constitue, avec l’hypnose, une des figures majeures.
Un placebo est une mesure thérapeutique d’efficacité intrinsèque faible, sans rapport logique avec la maladie, mais agissant, si le sujet pense recevoir un traitement actif, par un mécanisme psychologique ou psychophysiologique].
Si de nouveaux membres veulent se joindre, avez-vous une cérémonie pour cela ?
La conversion au druidisme était évidemment au départ une chose impensable. On naissait druidisant de plein droit, on ne le devenait pas. 2000 ans de christianisation ou d’islamisation forcée (en Galatie en Turquie) ont évidemment tout changé, nous avons maintenant des cérémonies appropriées. En gros celles que l’on destinait aux enfants, mais appliquées à des adultes.
Après la mort, prônez-vous l’inhumation ou l’incinération ?
Tous les rites ont été un jour ou l’autre acceptés par les très-sachants, crémation, exposition des corps aux vautours ou aux corbeaux, et, bien entendu, l’inhumation.
Dans vos cours d’enseignement religieux, qu’apprennent les enfants ?
À honorer les dieux c’est-à-dire la forme du Divin la plus proche de son tempérament.
Ensuite beaucoup de culture générale, car on ne peut pas être un bon druidisant si l’on ignore trop des choses de la vie ou du monde. Il faut donc savoir parler, voire même aujourd’hui savoir lire et aussi écrire. Nos ancêtres ont mis au point au VIIe siècle avant notre ère une écriture remarquable, l’écriture cisalpine ou lépontique, inspirée de l’alphabet étrusque. Ils ont également utilisé l’alphabet grec, un alphabet grec adapté à leur langue, tout comme ils ont adapté ensuite l’alphabet latin avec le tau gallicum (sic). N’oublions pas non plus l’Histoire, la Géographie, des rudiments de science (calcul – il faut savoir compter – mathématique) sciences de la nature, instruction civique, art (musique…) ainsi que des langues étrangères (le grec par exemple). Mais aussi bien entendu, les grands mythes structurant notre foi. Ceux qui concernent la vie dans l’autre monde par exemple.
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Quels sont les symboles exposés dans vos temples ?
La partie la plus sacrée d’un sanctuaire (la cella, disent les archéologues) est le lieu où se concentre la Divinité, symbolisée ou représentée par différents moyens (simulacra ou arcana, etc.). Personne, normalement, ne pénètre dans cette cella excepté les druides en charge des rituels. Dans les autres parties du sanctuaire, à l’intérieur comme à l’extérieur, les images divines et de nombreux personnages divins secondaires sont représentés. Les peintures murales sont plus rares, mais connues dans certains fana (temples). L’une d’entre elles, représentant Ogmios, a par exemple fait couler beaucoup d’encre (voir Lucien de Samosate, Héraklès).
Est-ce que vous vous efforcez de convertir, et si oui, comment ?
Non, pas du tout, quelle horreur ! On voit ce que cela donne. De toute façon se convertir n’a jamais été une preuve d’intelligence, car la foi n’a rien à voir avec la raison.
Nous proposons un cheminement, une voie, un itinéraire, une carte, que celui qui s’y retrouve et s’y intéresse nous rejoigne, un point c’est tout !
Il va de soi par contre, que nous nous reconnaissons le droit de nous défendre, individuellement ou collectivement, si nécessaire en prêtant main-forte aux nôtres dans le besoin. Ce que l’on appelle une bagaude ou un ambicatus (très précisément un ver sacrum ambicatusien).
Vous parlez d’autodéfense, mais où voyez-vous cela ?
C’est ce que l’on peut déduire de l’attitude des Celtes lors des guerres puniques. Du moins d’après Tite-Live.
Livre XXI. Chapitre XX. « Dans un discours où ils vantaient la gloire, la valeur du peuple romain, et la grandeur de leur empire ; les envoyés de Rome demandèrent de ne point donner passage, sur leurs terres et par leurs villes, aux Carthaginois qui allaient porter la guerre en Italie. On entendit alors des éclats de rire si violents et de tels murmures, que les magistrats et les vieillards purent à peine calmer les jeunes guerriers. Quelle impudence ! Quelle sottise ! s’écriait-on. Demander que nous attirions sur nous la guerre, pour l’empêcher de passer en Italie ! Que nos campagnes soient dévastées, pour préserver du pillage celles de l’étranger !
Le tumulte enfin apaisé, on répondit aux ambassadeurs que l’on n’avait ni à se louer des Romains, ni à se plaindre des Carthaginois, pour servir la querelle de Rome contre ses ennemis. En outre on savait très bien que le peuple romain chassait les Celtes du territoire et des frontières de l’Italie, leur faisait payer tribut et subir mille outrages. Cette réponse fut à peu près celle des autres peuplades ».
Autrement dit une nette condamnation des méthodes romaines habituelles : l’expulsion des peuples vaincus hors de leurs terres (encore une fois, rappelons-le, les Celtes laissaient vivre à l’intérieur de leurs royaumes les peuples qu’ils avaient vaincus, en tant qu’atectai, voir le cas des Galates) et les outrages.
Quelle est l’opinion du druidisme sur l’homosexualité ?
Le druidisme n’est pas une religion mentalement « centralisée » comme, par exemple, le catholicisme, même s’il existe des autorités chargées de coordonner les actions ou de le représenter à l’étranger.
Il n’appartient à personne pas même à moi, de dire à un de nos frères « notre religion t’interdit telle ou telle chose ». C’est une affaire de conscience personnelle. Ne réitérons pas la malheureuse affaire de la reine morte. Devenu roi en 1357 Pierre 1er du Portugal annonça au pays qu’il avait secrètement épousé Inès de Castro avant son assassinat, et avait donc fait de cette dernière la reine du Portugal. Il fit alors exhumer le corps d’Inès et, revêtue d’un manteau de pourpre, assise sur le trône, Inès de Castro fut couronnée reine. Puis Pierre obligea tous les grands du royaume qui s’étaient jadis opposés à son mariage à venir lui baiser la main. Cela déclencha un énorme scandale dans tout le pays et ensuite une véritable guerre civile.
Ce que je déplore personnellement par contre c’est que l’on mettre sur le même plan social l’alliance passée entre deux familles, deux clans ; (le contrat civil passé entre un homme et une femme pour gérer leurs rapports au vu et au su de tous avec les conséquences sociales que cela entraînera, notamment par la venue au monde d’enfants communs : voir le cas de Sabinus et Éponine) et les simples amours individuelles.
Pour le reste étant donné qu’il n’y a pas de sacrement du mariage hétérosexuel chez les très-sachants (pour ce qui est des couples hétérosexuels, ce sont les conjoints qui s’engagent, le très-
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sachant ne faisant que bénir leur engagement afin qu’il soit fécond et fertile en enfants dont ils puissent être fiers) ; il va de soi qu’il ne saurait pas non plus y en avoir pour les homosexuels.
Votre religion accepte-t-elle les catharsis sexuelles comme ceux qui sont décrits par Strabon, Géographie, Livre IV, Chapitre IV. 6.
« Dans l’Océan, non pas tout à fait en pleine mer, mais juste en face de l’embouchure de la Loire, Posidonius nous signale une île de peu d’étendues, qu’habitent soi-disant les femmes des Namnètes. Ces femmes, possédées de la fureur bachique, cherchent, par des mystères et d’autres cérémonies religieuses, à désarmer le dieu-ou-démon qui les tourmente. Aucun homme ne met le pied dans leur île, et ce sont elles qui passent sur le continent toutes les fois qu’elles sont pour avoir des relations charnelles avec des hommes, après quoi elles regagnent leur île ».
Denys le Périégète.
« Il y a une autre série de petits îlots, où les femmes des Amnites, à l’opposé, c’est-à-dire en face, dans leurs transports, célèbrent selon les rites, le culte de Dionysos. Cela se fait la nuit, et elles se couronnent des corymbes du lierre au noir feuillage, c’est-à-dire de branches de cet arbre avec leurs fruits en forme de grappes ; le bruit des tambours et des cymbales qu’elles frappent retentit au loin. Nulle part sur les rives thraces de la rivière Absinthe les Bistonides n’invoquent le braillard Iraphiote, ni les Indiens le long du Gange aux noirs tourbillons ne célèbrent les fêtes du bruyant Dionysos, avec l’ardeur que mettent ces femmes des Amnites à chanter à pleins poumons : Évohé Bacchos !
Réponse.
Le Bacchus en question (Dionysos chez Posidonios) n’est bien sûr que l’interpretatio romana ou graeca d’un dieu-ou-démon celtique, restant à identifier. Les femmes en question devaient danser nues et le corps tatoué de peintures bleu sombre, comme le signale le même auteur pour les Celtibères.
La prostitution sacrée n’est en aucun cas la débauche sexuelle que certains l’imaginent. En réalité, il s’agit d’un ensemble de concepts et de pratiques dont l’origine se perd dans la nuit des temps. Pour le commun des mortels d’aujourd’hui, une prostitution sacrée paraît plus dangereuse que recommandée du point de vue de la morale bourgeoise. Elle implique de vivre sa sexualité de façon aussi naturelle que le fait de se nourrir, de se désaltérer, ou de respirer. Seul celui qui est capable de faire couple avec un autre être humain exactement comme il respire ou boit un verre d’eau ; peut se lancer dans la maîtrise de ces forces constitutives de l’être, en suivant une ascèse difficile sous la direction de maîtres qualifiés.
Après 2000 ans de judéo-christianisme, seule une infime minorité des nôtres demeure en mesure de le faire. C’est pourquoi il est à mon avis plus efficace plus réaliste et plus honnête donc de voir les choses comme l’a théorisé le philosophe grec Jamblique dans son étude du culte du phallus dans les mystères d’Égypte, à savoir une catharsis *.
*P.S. Et à ceux qui trouveraient anormal que je cite un auteur grec du 4e siècle (Jamblique) je répondrai qu’au 2e siècle un de mes confrères marseillais a bien discuté en grec et de la littérature grecque, d’Hercules plus précisément, avec Lucien de Samosate de passage dans la région. En était-il moins druide pour autant ce Marseillais ?
Lors de vos rites d’adoration, quels genres de chants et d’instruments sont-ils utilisés ?
Le chant n’est pas le principal élément des rituels dans nos sanctuaires. Il s’agit plutôt de récitations qui, pour l’essentiel, sollicitent le Divin, sous tel ou tel aspect, au moyen de très longues litanies. Une variété de harpes très rustique, la rote, est alors utilisée par les bardes.
Lors des rituels certains desservants utilisent des trompettes appelées cornyx, afin d’une part d’attirer l’attention des dagolitoi ou fidèles, d’autre part, symboliquement parlant, d’attirer l’attention des dieu-ou-démons. Certaines Écoles druidiques ajoutent également « afin de faire fuir les âme/esprits maléfiques ».
La communauté celtodruidique est à la fois le signe sur terre et le moyen de l’union avec les dieu-ou-démons petits fils ou agents du Tokad (du destin). La communauté celtodruidique est un perpétuel feu
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rituel en l’honneur des dieu-ou-démons. Autrement dit, c’est dans cette Touta, et rien qu’en elle, que commence l’épanouissement de notre âme/esprit, dans le cadre du pacte conclu avec les dieu-ou-démons.
Il ne faut pas préjuger pour autant de la situation de ceux qui, sans qu’il y ait faute de leur part, mais par suite des circonstances (islamisation ou christianisation forcée de leurs villages, que ce soit dans les rochers brûlant d’Afghanistan-Nouristan ou dans les neiges de Lituanie) ; ne sont pas des pratiquants de notre religion (ne sont pas des druidisants) ou n’ont pas compris que la touta celtodruidique est le lieu privilégié de l’épanouissement des âmes humaines sur terre et dans l’autre monde, ne serait-ce que parce qu’elle fut la première communauté humaine à comprendre que l’Enfer n’existe pas.
Réussir à faire s’épanouir son âme n’est pas impossible à un non-druidisant, mais c’est un processus facilité par le fait d’être dagolitus, c’est-à-dire par le fait d’être un membre sincère de l’Ollotouta druidique. Un peu comme dans l’amidisme. Il faut assez logiquement au minimum croire en l’existence et dans les pouvoirs du bouddha que l’on appelle Amitabha pour être sauvé. L’Amidisme est en effet principalement fondé sur la foi et la croyance, avec pour objectif d’accéder après cette vie à la terre de ce bouddha (buddhakshetra) où la lumière, la longévité ainsi que le bonheur, sont tous presque infinis.
Et bien il en va de même pour le druidisme. Il faut assez logiquement au minimum croire en l’existence et dans les pouvoirs de ses bouddhas que l’on nomme Cornunnos, Taranis, Hesus, Epona, etc. pour être sauvé par ces divinités secourables (anextlomaros, virotoutis, iovantucaros, dunatis, toutatis, contrebis, mopatis, etc.) paisibles disent nos amis bouddhistes, et accéder après cette vie au bouddhakshetra de ces divinités où la lumière, la longévité ainsi que le bonheur, sont presque infinis.
Dire que la Touta celtodruidique est en quelque sorte un feu rituel permanent ne veut donc pas dire pour autant non plus que c’est une société close, refermée sur elle-même.
Passez-vous beaucoup de temps à prier ? Environ combien de temps par jour ?
Le Celte de cœur ou d’esprit est profondément religieux (« admodum dedita religionibus » reconnaît César) et se rend au fanum (temple) fréquemment, par exemple tôt le matin avant de partir au travail.
Il ne va pas au temple uniquement pour y prier ou y déposer une offrande en solitaire, mais aussi éventuellement pour assister à l’un des nombreux rituels que les très-sachants desservant le lieu (Ausone, Commemoratio professorum Burdigalensium, X, 22. « Je me garderai d’omettre le nom, de Phoebicius, un vieil homme qui fut aedituus d’un temple de Belenus ») exécutent tout au long de la journée, à des moments déterminés.
Il fait une offrande (de la nourriture, des fruits de son travail, de la menue monnaie…) et ressort après avoir ainsi établi un contact personnel avec la divinité. Principe mis en évidence par Marcel Mauss avec son célèbre « dadami se dehi me » sanscrit, formule grossièrement traduite par les Romains avec leur « do ut des ».
Ne faites-vous que prier ?
Non ! Un de nos devoirs sacrés (ver sacrum ambicatusien) est de venir en aide à ceux de nos frères qui souffrent, comme le Yézidis en Irak par exemple.
Il ne faut pas confondre les Kingetes et les Culdées actuels qui sont des moines copistes ou d’habiles artisans, des artistes ou des poètes dirions-nous aujourd’hui. Les Culdées actuels peuvent garder des conditions de vie normales, semblables à celles de leurs contemporains. Les Kingetes, eux, ressemblent plutôt à des Fénianes.
Ce qui est arrivé à nos frères Yézidis en plein 21e siècle a de quoi faire réfléchir. Nous autres païens d’esprit celte nous sommes pacifiques, mais nous ne sommes pas pacifistes à tout prix ! Nous admettons la légitime défense et le droit d’être armé s’il le faut.
Parmi les membres de la touta celtodruidique, hommes ou femmes, certains peuvent choisir un état de vie adapté à un permanent combat d’abord contre soi-même (combat auquel tous les néopaïens sont eux aussi appelés en un sens, d’une façon ou d’une autre). D’autres, les kingetes, ou seigneurs de guerre, vont même plus loin si nécessaire en ces temps troublés.
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Cette voie des kingetes revêt des formes diverses (lugienne ou cuchulininenne). Ces kingetes s’engagent par un serment solennel à pratiquer l’ascèse, le jeûne, la pauvreté à la soldur, la méditation sur la mort, etc. qu’ils vivent en communauté ou pas.
Don du Destin à la touta, exposée aux défis du monde bien qu’en retrait par rapport à lui ; cette vie (des kingetes) doit constituer, pour les membres de la Touta celtodruidique, un rappel constant de leur vocation initiale, et un exemple à méditer. Elle doit témoigner aussi, par les choix et les ruptures qu’elle implique, d’une vie véritablement d’esprit celte.
Quant aux autres, aux non-kingetes, ils doivent tout faire pour les aider. « Tout pour le front » comme on disait jadis en 1943. Y no passaran (en espagnol).
Les druidisants sont-ils meilleurs que les autres ? Peut-on appliquer à l’ollotouta ce qu’Allah dit de son Oumma ? (Vous êtes la meilleure communauté qu’on ait fait surgir dans l’Histoire, vous ordonnez ce qu’il est convenable de faire, vous interdisez ce qui n’est pas bien. Chapitre 3 verset 110 le passage du Coran justifiant l’inquisition musulmane appelée Hisbah).
Réponse. Communauté mystique ou sacerdotale en ce qui nous concerne est un qualificatif que beaucoup évidemment peuvent avoir du mal à reconnaître à la Touta celtodruidique d’aujourd’hui.
Mystique ou sacerdotal ne signifie donc pas parfaite du point de vue de la morale, mais seulement « à part et parlant la même langue que les dieu-ou-démons » (homophonon en grec selon Diodore).
Ainsi défini, ce caractère sacro-saint peut alors être appliqué à notre communauté. La Touta celtodruidique est sacro-sainte parce qu’elle est consacrée aux dieu-ou-démons et qu’elle est animée par l’esprit de Taran/Toran/Tuireann leur chef suprême, dieu au-dessus de tous les dieux ; qui ne lui a jamais fait défaut en réalité, même aux heures les plus sombres de son histoire. Elle est sacro-sainte par sa profession de foi (le cantelon), par ses rituels, par les vocations qui lui permettent de remplir sa mission ou de marquer des points. Mais la Touta celtodruidique ne cessera jamais pour autant de réclamer la plus grande indulgence à son égard, de notre part vu sa pauvreté en moyens et en hommes. Ses membres ne sont en effet que des hommes et en tant que tels, de simples mortels, y compris son primat inter pares. Perdus dans la masse des 7 milliards de nos congénères. Son histoire n’est-elle pas entachée de médiocrité ou de violences (voir affaire du Glas, les coups échangés entre MM. J……… et…… G…, les pressions physiques auxquelles a cédé M. A…… pour signer certains documents, etc.).
Dire que la touta est « Ollo », c’est donc la voir dans sa théorie, dans sa source et dans son projet, proprement divin (un homme nouveau à partir du meilleur de l’ancien). La dire « ollo », c’est la situer dans la diversité du monde où elle prend corps (voir l’image du géant qui dort, quand il se réveillera…). Affirmer qu’elle est traditionnelle, c’est considérer son adéquation avec l’Histoire authentique, même si ce degré d’adéquation n’atteint plus les 100 %. Disons « se situe quelque part entre 0 % et 100 % ».
Ces deux caractéristiques réunies doivent être comprises comme une preuve manifeste du caractère profondément humain et donc universel de l’Ollotouta.
Un « ollo » qui serait pensé indépendamment de l’exigence d’unité risquerait de se dissoudre dans la diversité des formes du monde, et une tradition qui ne serait pas en même temps ollo, par exemple, risquerait d’amener l’uniformisation et le nivellement par le bas.
Alors, l’Ollotouta est-elle la meilleure des oumma (des communautés) ? A-t-elle le droit voire l’obligation morale de commander le bien et d’interdire le mal comme le pensent les musulmans de leur communauté ?
Ni hansa ! La réponse à cette question n’offre aucune difficulté.
L’ollotouta vient de renaître. À l’échelle des âges et du fait de cette renaissance, elle n’est donc encore qu’une enfant, et de l’enfance elle a tous les défauts.
Nous pouvons que lui appliquer ce que notre bon maître Ernest Renan (oui oui l’auteur de la formule faisant de la nation une communauté de destin) a dit des Celtes en 1854, dans la Revue des deux Mondes.
« Mythologie, lyrisme, épopée, imagination romanesque, enthousiasme religieux, rien n’a manqué aux Celtes ; pourquoi la réflexion leur manquerait-elle ?… Il me semble que de cette combinaison sortiraient des produits fort originaux, une manière fine et discrète de prendre la vie, un mélange singulier de force et de faiblesse, de rudesse et de douceur ».
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Bref, il s’agit d’une histoire d’amour ! Il ne saurait donc dans ces conditions être question d’interdire ou d’ordonner quoi que ce soit à qui que ce soit. Nous ne pouvons que nous efforcer nous-mêmes de donner l’exemple, car en l’occurrence le seul précepte qui vaille est « noblesse oblige ! »
* Dans une conférence donnée à la Sorbonne le 11 mars 1882. La formulation exacte est « le désir de vivre ensemble ».
LE COMPLEXE DE ROLAND.
Homme d’esprit celte mon frère quelle est ta devise ? « Le soleil est mon père, la terre est ma mère rien de ce qui est humain ne n’est étranger, un peu d’internationalisme éloigne de la patrie beaucoup y ramène, la Terre est mon vaisseau spatial ».
Se vouer à la défense et à l’illustration du néopaganisme celtique implique un héroïsme personnel quotidien, vu l’idéologie dominante, y compris au sein du milieu familial.
Car les idéologies dominantes ça existe, surtout dans les sociétés qui pensent en être débarrassées. La plus grande ruse d’une propagande omniprésente c’est de faire croire qu’elle n’existe pas.
Avec le recul cela se voit particulièrement dans les conflits internationaux comme la guerre en Irak au début du 21e siècle. Noam Chomsky a appelé ça « la fabrique du consentement ».
Exemple d’idéologie dominante en France.
— En France, le 13 juillet 1789, autrement dit à la veille de la révolution, l’idée reçue était celle-ci. Le roi est un homme bon (ce qui était d’ailleurs plus ou moins vrai). Il est comme un père pour nous. Mais il est mal entouré, mal conseillé. Par ses ministres notamment. Et surtout par sa femme, qui est une salope d’étrangère (Marie-Antoinette était autrichienne effectivement. Voir le film de Coppola sur le sujet).
— en 1941 être pour la Résistance c’était être pour les Anglais et pour les communistes. Rares sont les journalistes antifascistes d’aujourd’hui qui auraient sauté le pas à l’époque. Être pour les résistants en 1941 c’était rompre totalement avec le bien confortable conformisme ambiant et se ranger aux côtés des gens « pas bien » !
— En France toujours hélas ; à propos de l’islam. Le vrai islam est une religion d’amour et de tolérance qui a toujours été victime de beaucoup de persécutions et Mahomet est mort en martyr.
— Autre idée reçue en France, mais à propos du parti politique qu’est le Front national cette fois-ci.
« Oui, mais ils ne veulent pas vraiment arriver au pouvoir ! ». J’avoue que ce genre de remarque à son propos m’a toujours personnellement laissé songeur et qu’elle me semble plus émaner de faiseurs d’opinion à la Chomsky voulant absolument prouver leur rectitude politique tout en faisant
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profession de neutralité quand ils sont journalistes, sondeurs, ou politologues. Mais qui ne savent pas trop quoi trouver à redire de négatif en l’occurrence, à son sujet. Puisqu’il faut toujours dire ou écrire quelque chose de négatif à propos du Front national.
Si Jean-Marie Le Pen ou Staline à six ans avait noté dans son cahier d’écolier que 2 + 2 = 4 ; l’intellectuel français s’évertuera immédiatement à démontrer que 2 + 2… ça fait 3, ou 5, ou 3,5 si ce n’est 4,5 (pour les plus honnêtes intellectuellement parlant). Bref, tout sauf 4.
Mais revenons au cas de l’islam qui est exemplaire (comme aliénation religieuse, pas comme modèle à suivre).
a) Le véritable islam, celui des origines, celui de Mahomet, celui du Coran, celui de Dieu donc, est gentil et intelligent, il est doux, pacifiste, humaniste, et profondément tolérant, ouvert au doute et à la raison, féministe, et ainsi de suite.
b) Mais certains des extrémistes qui ont suivi, ne comprenant pas ce qu’est le véritable islam initial, celui de Mahomet, ont trahi son esprit originel. Mahomet n’est donc en rien responsable de ces dérives, mais eux le sont.
c) Les gens gentils et intelligents, ceux qui savent (le journaliste qui écrit ou anime le débat par exemple) reconnaissent d’emblée le point a) ; c’est-à-dire le caractère tolérant, pacifiste, humaniste, rationnel, scientifique, etc., etc. du véritable islam originel.
d) A contrario, ceux qui sont loin d’être convaincus sont, au mieux des ignorants, qui ne savent pas, voire carrément d’odieux individus aux penchants criminels avérés (ils sont bêtes et méchants).
e) Remarque. L’hypothèse que l’on puisse considérer l’islam comme une soumission ou une aliénation de l’individu justement parce que l’on sait, parce qu’on le connaît bien (cas des yézidis en Irak) ; n’est en général pas envisagée dans ce cas.
Et il existe bien d’autres idées aussi stupides dans la cervelle des faiseurs d’opinions qui nous gouvernent. Du genre : la croissance peut être sans fin, car les progrès de la Science le permettront…
Du genre : l’autoharmonisation des intérêts privés, une idée née au XVIIIe siècle. Selon Mandeville par exemple, les vices privés font la fortune publique, et selon Adam Smith il existe une Providence supérieure qui veille à l’harmonisation des intérêts (la main prétendue « invisible »). Dit autrement, il ne faut entraver en rien la recherche égoïste de l’intérêt personnel, car c’est elle qui produit de la richesse pour tout le monde.
Ou encore : le meilleur moyen de promouvoir la diversité, c’est de tout mélanger le plus rapidement possible et de métisser tout le monde.
N.B. Le seul fait d’hésiter ou de se demander si une telle démarche est bien judicieuse, bien pertinente, notamment par rapport à son objectif théorique (la défense de la diversité)… prouve que vous êtes un dangereux criminel à dénoncer immédiatement à l’opinion publique, voire aux juges compétents.
Le seul fait d’hésiter ou de se demander si la croissance peut vraiment se développer à l’infini… dans un monde fini, prouve que vous êtes un dangereux individu de type Staline, un criminel à dénoncer immédiatement à l’opinion publique, voire aux juges compétents.
RESPONSABILITÉ DES LAÏCS.
Commune est la dignité des membres de la Touta, du fait de leur appartenance au corps du géant qui dort encore, qu’est l’Ollotouta. Cette dignité commune, conférée à tous les Celtes de cœur ou d’esprit, par la cérémonie du nom et l’adoubement, rend les laïcs également responsables, pour leur part, de la mission de la Touta. Les laïcs sont, eux aussi, appelés par le Destin à travailler au retour ou à la parousie des dieux. Cette mission des laïcs doit s’exercer dans tous les domaines de la vie sociale, culturelle, scientifique ou politique. Ils peuvent s’associer, si nécessaire, et dans certains cas ; pour s’entraider dans leurs actions de ce genre.
Au sein de la Touta celtodruidique, tout le monde est donc appelé à faire preuve d’héroïsme ! Rien que l’usage du nom implique d’ailleurs cette vocation, commune à tous les membres du peuple des
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dieu-ou-démons, qu’ils soient laïcs ou très-sachants, qu’ils vivent dans le monde ou en communautés religieuses, qu’ils soient mariés ou célibataires. Quelle que soit sa condition physique, culturelle, intellectuelle, ou sociale, qu’il soit homme ou femme, enfant ou vieillard ; tout païen celte d’esprit sera un jour lapidé par la foule hideuse des bien-pensants ; laissé sans défense par les autorités de son pays censées le protéger ; et enfin socialement mis à mort, au mieux dans l’indifférence générale, voire sous les crachats, symboliques ou non, et les cris de joie, de tous les lâches (journalistes évêques, sportifs, hommes politiques, chanteurs…).
De cet héroïsme au quotidien dépendent donc la mission et la responsabilité des païens dans le monde ; et la source la plus abondante de la fécondité missionnaire de la Touta celtodruidique, prêchant le retour au paganisme philosophique et réfléchi de nos ancêtres, demeurera toujours l’héroïsme quotidien de ses membres.
INSPIRATION HISTORIQUE ET CRÉATION LITTÉRAIRE.
Le nouveau druidisme est caché dans l’ancien et l’ancien ne se comprend vraiment que dans le nouveau.
Malgré la richesse de son dépôt mythologique à valeur universelle, le druidisme n’en est pas devenu pour autant une religion du livre (de douze livres peut-être, mais pas d’un seul).
Pour plus de détails voir notre chapitre sur les indigitamenta du druidisme, les dii certi de Varron. C’est de part et d’autre le même système d’analyse à outrance, le fractionnement de l’intervention divine en une multitude de petites besognes distinctes, accomplies par autant d’acteurs différents, dénommés d’après leur besogne même. L’assimilation une fois faite, il faut se garder de la pousser trop loin, car il paraît bien que Varron avait classé parmi les dii certi tous ceux dont il connaissait la fonction (tous ceux qui n’étaient pas incerti) et il y avait même fait entrer pour cette raison un certain nombre de grands dieu-ou-démons, de dii selecti.
Le druidisme est donc une religion du faire ou de l’agir, et non une religion de la lettre qui tue, et non une religion destinée à rester lettre morte. Le druidisme est toujours une religion du verbe, une religion de verbes incarnés (les dieux).
Avec ou sans l’aide du destin leur père les miracles qui sont attribués à tous ces dieu-ou-démons (guérison de la Morrigu, et ainsi de suite.) montrent bien que la parousie de leur règne (Erdathe) est en marche.
Notons aussi que l’image de Lug, telle qu’elle est développée dans la mythologie celtique, était propre à faire réfléchir à la destinée surhumaine attendant les hommes. Lug était un « samildanach » c’est-à-dire un « polytechnicien », ne l’oublions pas !
Mais revenons à la figure de proue de notre druidisme depuis 2000 ans au moins. Dès le début de sa nouvelle vie sur cette terre (la première se perd dans les brumes de la métahistoire, les brumes de la Thulé ou Falias du gaélique Morfessa), et rien que pour son éducation, qui fut trifonctionnelle, le Hesus Setanta aura réuni autour de lui, toujours à en croire la tradition irlandaise, tout un peuple de parents adoptifs, d’amis et de compagnons, tous membres du peuple celte, certes, mais d’une grande diversité (cochers, très-sachants, etc.). La légende insiste même sur les femmes, notamment celles
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qui seront les premiers témoins de sa montée au ciel (apothéose) sur un char tiré par deux chevaux (les 150 princesses d’Emain Macha). Tous ces membres de la race des seigneurs (les Ulates) l’accompagneront, vivront dans son intimité (Cuchulainn fera même un beau mariage d’amour avec une princesse répondant au doux nom d’Aemer) ; et certains recevront de lui peut-être un enseignement, plus profond ou plus exigeant (il écrivait en runes oghamiques) que celui qui nous est parvenu au travers des légendes rapportées par les moines copistes bien des siècles plus tard.
D’où d’ailleurs les distorsions entre les contes et légendes irlandais (généralement apocryphes) parlant du chien de Culann, et ce que montrent les données continentales. Ces distorsions viennent du fait que ce qui a été couché par écrit en Irlande, à propos de l’enseignement de Setanta et de sa vie, voire de sa mort, ce sont surtout les traits les plus frappants, les plus gros, destinés à la classe des guerriers, ou des rois. Car le feu sacré habita le thane de Muirthemné dès sa conception et il habitait toujours notre seigneur quand il défendait les petits et les faibles, les justes et les innocents (voir ses conseils à Lugaid) quand il guérissait la fée Morrigu et soignait ses adversaires après un rude, mais loyal combat singulier (Ferdiad). Tout ceci n’est devenu évident qu’après sa mort et sa montée au ciel sur un char tiré par deux chevaux, en une sorte d’équivalent celtique de l’apothéose des demi-dieux grecs comme Hercule voire Enée.
Sans aller jusqu’à supposer qu’il y a eu un enseignement ésotérique prodigué en petit comité par le hésus Cuchulainn à un nombre réduit de fidèles (LEQUEL ?) force est de constater que l’on peut déjà déduire de sa vie et de son œuvre une masse d’enseignements devenue considérable au fil du temps, vu les pertes de savoir engendrées par le progrès technologique ; et qu’au dixième siècle en Irlande il y avait encore, est-ce un hasard, des hommes facturant des prestations (le sommet de l’iceberg ?) en principe prohibées par Saint Patrice.
On en a la preuve dans la conclusion d’un conte en gaélique à la tonalité rabelaisienne intitulé « le sac du château de Mael-Milscothach ou de Mael aux paroles de miel » dû à la plume d’un dénommé Urard Mac Coisé, le plus grand des poètes irlandais de son époque (il est mort en 990). Urard y relate non sans humour le pillage de sa propre demeure par des hommes du roi Domnall avant, in fine, de lui en présenter la facture.
Une compensation supplémentaire sera également décidée pour les poètes (sic) maîtrisant l’art des dichetal do chennaibh, mais aussi des imbas forosnai et des teinm leaghdha, deux pratiques pas très catholiques (d’ailleurs formellement interdites par Saint Patrick).
De tout cela on peut donc déduire a minima qu’il y avait encore sur les terres du roi Domnall à la fin du X ème siècle en Irlande des hommes pratiquant ces rituels païens.
N’en voulons pas trop néanmoins à tous ces moines copistes pour leur vandalisme, leur amour des de l’Irlande et des traditions ancestrales a quand même permis à toutes ces vérités de subsister, à la différence du Pays de Galles, y compris aux heures les plus sombres de leur histoire.
Domnall mac Muirchertach Ua Néill (O’Neill) roi d’Ailech de 943 à 980 et Ard ri Érenn de 956 à 980 est en effet mort (officiellement) chrétien.
Heureusement, comme l’a très bien écrit Henri Lizeray dans sa D. S. D. D. « Il y eut alors l’époque de la Renaissance et la véritable pensée druidique, tapie dans les manuscrits grecs et romains, fut répandue à nouveau par l’imprimerie ». Assez paradoxalement d’ailleurs pouvons – ajouter !
Et depuis lors le feu sacré en question n’a jamais cessé d’habiter les très-sachants et la communauté celtodruidique qu’est la Touta, autrement dit le peuple de ceux qui ont choisi la liberté d’être des enfants de dieux avec un X.
Ce temple dans lequel officie une nation hyperboréenne, c’est-à-dire une nation sacrée, une nation sainte, est constitué de pierres vivantes. Anciennement on aurait dit d’ailleurs : « Cette clairière au fond des bois est constituée d’arbres vivants faisant cercle autour du roi des arbres ».
Certes, ainsi qu’ Henri Lizeray l’a noté, l’esprit en question est aussi à l’œuvre dans le reste de l’Humanité, car Taran/Toran/Tuireann envoie ses éclairs de génie, ses esses ou son labarum, où il veut ; y compris en dehors des limites historiques de l’Ollotouta ; mais à cause de l’omniprésence des religions de masse d’un seul livre, cela se fait de façon plus ténue ; ainsi que le montrent toujours excellemment les remarques d’Henri Lizeray sur le caractère pseudoscientifique de la Bible et de la tradition arabe.
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La communauté celtodruidique ce n’est donc certes pas le Graal, car il ne faut pas méconnaître l’aspect humain de sa vie. Mais il ne faut pas non plus les opposer : la communauté celtodruidique croit d’une foi druidique en ses dieux, à faire s’écrouler des montagnes (comme lors du fameux siège de Knocklong) et vit de leur présence. Elle en relaie leur message d’espoir pour l’Homme, ne sont-ils pas virotoutis, iovantucaros, dunatis, toutatis, contrebis, mopatis, anextlomaros et d’autres choses encore ?
On ne peut prétendre être très-sachant aujourd’hui en refusant cette solidarité avec les dieux c’est pourquoi nous pouvons donc nous aussi en un sens, comme la fée Morrigan à la fin de la deuxième bataille de la plaine aux tumuli, nous exclamer (des millénaires plus tard)…
« Oui, nous avons des nouvelles !
La paix jusqu’au ciel
La paix de la terre au ciel
La paix sur la terre
Et sous les cieux
La Force et la prospérité pour tous ! »
Car la Touta druidique a une mission universelle rendue par l’expression « Ollotouta » justement. Entrer dans la Touta en accueillant sa bonne nouvelle (la suscetla dont elle est porteuse), c’est avoir accès au travail des dieux dans les esprits.
PRINCIPE ET MÉTHODE DE CES OPUSCULES DESTINÉS AUX ÉCOLIERS DU DRUIDISME
AVANT QU’ILS NE SE LANCENT DANS DES ÉTUDES (DRUIDIQUES) SUPÉRIEURES.
Le druidisme a émergé dès l’âge du bronze, à la fin du IIe millénaire avant notre ère ou au début du 1er. Au départ, les rois celtes, comme ceux de l’ancienne Rome, avaient des fonctions sacerdotales. Mais de plus en plus, sur des questions graves qui engageaient le sort de la Communauté – par exemple, le moment propice pour déclencher une guerre – ; ils ont fait appel à des spécialistes de la divination, issus de la classe aristocratique, qui observaient la position des astres. C’est ainsi qu’apparurent les très-sachants. Le même phénomène s’est d’ailleurs produit dans d’autres sociétés indo-européennes, notamment avec les mages de Perse.
Le fidèle celto-romain (britto – ou gallo – romain) d’il y a 2100 ans pratiquait en fait au moins deux religions différentes.
— Une religion commune aux Celtes, traditionnelle, tournée vers le passé, conservée dans les fêtes saisonnières, préservant les mythes et les grandes conceptions cosmiques de la Tène.
— Une religion consistant surtout en un culte rendu à des divinités chargées de protéger la richesse, les récoltes, la santé, la destinée des individus ainsi que des groupes. Cette dernière religion, plus utilitaire, présentait une grande variété de dieu-ou-démons régionaux ou même topiques, choisis et groupés au gré des relations entre groupes humains.
Il faut se garder d’omettre d’ailleurs, que la première, la religion druidique de La Tène elle-même, telle qu’est nous est apparue dans le symbolisme de l’art celtique, présentait déjà un double aspect. Un aspect didactique, concernant l’existence des dieu-ou-démons et leurs rapports mythologiques, un aspect pratique, magique (une valeur talismanique étant attribuée aux signes et aux symboles).
Ce dédoublement, cette dichotomie, du culte et de la religion, allaient-ils tôt ou tard éclipser ou même détruire, pour le plus grand bénéfice d’une pratique purement utilitaire, les mythes et la doctrine fondamentale de la religion druidique ? Nous verrons qu’il n’en a rien été, en dépit de certaines apparences.
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Les religions interprétatives comme le druidisme ont eu pour atout majeur d’être capables de s’adapter aux évolutions des techniques et des mœurs. Elles restent en contact avec les préoccupations des individus et constituent encore un choix avantageux pour le principe d’économie à la Occam.
N.B. Quand deux hypothèses sont en concurrence, et que l’on ne peut pas les départager pratiquement, par l’expérimentation scientifique par exemple, on doit choisir la plus simple, c’est-à-dire celle qui possède le moins d’hypothèses, ou celle dont les hypothèses sont les plus facilement démontrables. Ce principe est aussi connu sous le nom de rasoir d’Ockham (ou d’Occam).
Il est en général de bon ton de se moquer de la piété populaire. Tel n’est pas notre cas, même si nous nous en démarquons. Cette piété populaire a été celle de nos aïeux, de nos pères et de nos mères, elle les a aidés à surmonter les dures épreuves de la vie ; et cela mérite le respect, cela mérite même d’être étudié, et, donc, compris, voire mis à contribution.
Il suffit en outre de regarder la statuaire ou les bas-reliefs caractéristiques des classes aisées d’après la conquête, pour s’apercevoir que c’est dans ces milieux que l’esprit romain a pénétré le plus rapidement et le plus aisément.
C’est parmi les pauvres gens au contraire, dans le petit peuple, malgré la faible valeur des statuettes ou des objets en cause (le prix d’une assiette) que la foi druidique la plus pure s’est le plus longtemps maintenue ; malgré la trahison des clercs et des élites carriéristes, plus soucieux de collaborer avec les puissants de l’époque que d’y résister. Tout le monde ne s’appelle pas Mariccos. Et d’ailleurs on peut encore assister au même phénomène aujourd’hui pour ce qui est des métiers intellectuels, des hommes de médias, des journalistes, de l’industrie du spectacle. Le vrai courage y est rare, par contre les fausses audaces et sans risque y abondent.
Obligée par la conquête de Jules César de lutter contre l’influence romaine, la « Celtie profonde » va en effet passer d’une religion officielle, avec très-sachants ; à une religion familiale sans très-sachant, mais avec encore autel domestique (les autels romains étaient placés contre un mur. Les Celtes plaçaient les leurs de manière que l’on puisse en faire le tour). La religiosité avait ses degrés ; les plus pieux plaçaient leurs simulacra ou leurs arcana (presque toujours des Vénus) dans des sortes de crèches.
Le peuple continuera de fréquenter les lieux de culte public, dans lesquels il pénétra, vers – 25, pour y déposer des bratou decantem (ex-voto) réalisés en tôle de bronze.
Vers l’an 40, la population équipera ses autels familiaux de statuettes ; et il en naîtra une nouvelle représentation du panth-éon ou plérôme, qui se fixera vers + 100.
Dans le cadre de l’Empire romain, au 1er ainsi qu’au IIe siècle de notre ère, sur le territoire des actuelles communes d’Yzeure, Toulon, Thiel-sur-Acolin, Saint-Pourçain-sur-Besbre, et même Vichy… des potiers ont réalisé des milliers de ces figurines en terre blanche.
Les dimensions des statuettes varient de 7,5 cm à plus de 45 cm, mais l’immense majorité va de 10 à 20 cm, ce qui implique des autels de très modestes dimensions.
Cette production variée a été diffusée très loin (jusqu’en Écosse et en Hongrie), et correspondit par conséquent à une véritable attente des populations d’alors. Ce nouveau panth-éon ou plérôme est encore un bon reflet des préoccupations des Celtes peu romanisés. D’où l’intérêt de son étude.
Les collections réunies dans les musées montrent bien l’influence initiale du « goût romain » sur une clientèle pourtant restée fidèle à ses croyances ancestrales, mais on note en fin de production une simplification des formes, prouvant la recherche d’acheteurs plus modestes que les précédents.
Le panth-éon représenté ainsi est presque essentiellement féminin, à plus de 80 %, à l’inverse de celui des Romains qui est masculin dans les mêmes proportions.
Si Épona est la seule déesse-ou-démone, ou bonne fée, druidique adoptée par les Romains, c’est certainement que ces derniers n’ont jamais possédé leur propre cavalerie et ont eu recours à des mercenaires en général celtes.
L’osmose avec un taureau, un lion, un ours, a une signification très archaïque que la protectrice des chevaux a occultée : vraisemblablement la domination humaine sur le monde animal.
Même si l’on accepte les parallèles que prétend trouver Jules César entre les dieu-ou-démons des uns et des autres ; il faut, soit admettre que le général n’est qu’un piètre théologien, soit que ces
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statuettes (qui apparaissent un siècle après la perte de l’indépendance) sont la preuve d’une rapide évolution.
La vérité comme d’habitude est peut-être entre les deux.
À côté d’une aristocratie romanisée, opulente, vit donc un petit peuple inquiet. Ce pays que les historiens à part Maurice Bouvier-Ajam nous présentent comme calme et heureux ne fut ni calme (il se révolta plusieurs fois : cf. les bagaudes) ni heureux ; la preuve en est fournie par ces dizaines de milliers de figurines de terre cuite (le métal du pauvre) réparties de l’Écosse à la Hongrie. Par un étrange phénomène passé sous silence dans l’ensemble des livres d’histoire, ces valeureux guerriers si redoutables et (paraît-il) si cruels ; vont, du moins les classes sociales populaires, s’en remettre, pour leur survie quotidienne, à des femmes mythiques, à de toutes jeunes filles souvent dénudées, à des déesse-ou-démones mères ou à des déesse-ou-démones nourrices, bref à des fées si l’on préfère ce vocable.
C’est dans la spiritualité (la protection divine obtenue par des intermédiaires ou des intercesseurs dont la seule force est leur faiblesse) que cette société cherche les moyens de sa survie de tous les jours. Il n’y a pas de statuette portant des armes et l’équivalent (ou presque) des Minerves romaines, a juste un bouclier, symbole de la protection. Par contre, 60 % de la production (donc de la religiosité) se porte sur une très jeune fille nue qui a visiblement pouvoir sur les eaux…
— de la terre (symbole de naissance et de survie).
— du ciel (symbole de la puissance divine, dispensatrice de bienfaits comme de calamités).
Nous ne connaissons pas leur nom celte (matra nessama ???), mais il faut admettre par contre que la main posée sur un objet dans un tel cas est un signe de puissance. La main droite serre sa mèche de cheveux mouillés par la pluie, et l’on rejoint là en quelque sorte la Vénus grecque ; sa main gauche, au bout d’un bras trop long, signe divin de puissance (même notion dans l’expression irlandaise Lug lamhfada qui signifie Lug au bras long), est posée sur une source dont elle paraît commander le débit. À l’origine, devant sans doute être nue pour opérer de façon efficace, sa tunique était posée sur son poignet. Puis la tunique disparaît rapidement et la source devient aussi un motif décoratif.
On note la présence, d’ailleurs assez faible en proportion, de Vénus que le XIXe siècle qualifia de « pudiques » et « impudiques ».
En fait, l’une a puissance sur le lait maternel et l’eau des sources (le lait de la terre), l’autre a pouvoir sur la fécondité ou l’allaitement.
Il faut ajouter que 20 % de ce panth-éon est consacré aux fées de type matres lubicae ou nessamae, ou déesse-ou-démones-nourrices, dites proxumae en latin.
Elles sont amplement vêtues et semblent dénuées de toute sensibilité maternelle. Assises dans un fauteuil d’osier (dont le caractère « aristocratique » nous échappe) elles tiennent un ou deux enfants qui, encore emmaillotés dans leurs langes, ont donc moins de sept mois. Ils doivent eux-mêmes saisir le sein nourricier, d’ailleurs très symboliquement représenté comme une caverne contenant une source. C’est, semble-t-il, l’illustration de la terre nourricière, impassible, inerte, qui assure en partie la protection, mais n’accorde ses fruits qu’à ceux qui font l’effort de cultiver, de chasser, de cueillir.
Cette protection peut être d’essence divine, et la couronne de fortifications placée sur la tête de la déesse-ou-démone, ou de la fée si l’on préfère ce terme, en fait le symbole défensif d’un groupement humain.
D’autres femmes participent à cet « Olympe celte » ; la déesse-ou-démone, ou fée, Brigindo Brigantia Brigitte par exemple, sous forme d’une jeune fille protectrice, d’abord de deux fillettes, qui elles-mêmes protègent un très jeune garçon (tenant une pomme ou une grenade, deux fruits hautement symboliques) ; l’autre assurant de son aide deux jeunes garçons, pas encore adolescents, chacun appuyant sur son sexe la main de l’autre. On connaît au moins cinq versions de ce modèle. Elles diffèrent par des détails minimes, mais sont des copies fidèles d’un prototype antérieur dont elles respectent même la hauteur des socles.
La signification de cet ensemble nous échappe. L’Église a repris la gestuelle, mais sans en avoir intégré le sens (une illustration de la morale ?)
Dans le même état d’esprit figurent des déesse-ou-démones, ou fées si l’on préfère, de l’abondance (Rosemartha). Munies de la corne d’où s’échappent fleurs et fruits, elles traduisent aussi la nécessité de bonnes récoltes. Ces représentations n’ont pas la majesté de leurs homologues romaines : les prétentions sont bien moindres !
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De la même façon que le Mercure celte, cette Rosemartha est adolescente, car le pays n’espère plus qu’en sa jeunesse. Il a perdu plus de deux million d’hommes dans la guerre, un million de morts un million d’esclaves. Une véritable Shoah !
Sa population d’alors était évaluée à 12 millions d’individus, soit 6 millions de sexe masculin, ce qui donne 4 millions d’adultes mâles et 2 millions en âge (15 à 30 ans) de procréer ou faire prospérer le pays. La moitié ont disparu, tués, réduits en esclavage, mutilés pour différentes raisons.
Les Rosemartha sont donc révélatrices de ce climat : elles sont jeunes et modestes. On est loin des fastes de la romanité des nantis et de l’autosatisfaction des auteurs latins. Autre remarque, le nombre des Rosemartha est minime face à celui des Suleviae ou Nessamae : l’Abondance, on n’y croit plus !
Les Minerves sont de la même veine, mais plus pathétiques. L’espoir d’abondance a fait place à la peur et la corne est devenue bouclier. Pour se protéger de qui ? Et la Gorgone devait faire peur à qui ?
Les historiens si prolixes en matière guerrière ne se sont pas penchés sur l’angoisse du petit peuple et nous ne savons pas ce que protégeaient ces sœurs jumelles.
N.B. Bien entendu, il ne saurait être question de tomber dans ces excès néopaïens qui ont fait à la fois l’expansion et l’effondrement allemand au XXe siècle. Du fait même des conditions ayant présidé à l’élaboration du druidisme (naissance à la fin de l’âge du bronze quelque part en Europe centrale, puis extension progressive à d’autres territoires par conquêtes ou assimilation des atectai, dits shoudras en Inde, Dhimmis en terre d’islam) ; sa vision a fini par englober, en les hiérarchisant, les valeurs positives élaborées par des siècles de civilisation, et leurs contraires. Comme l’Homme, le Divin est différencié en ce monde, dont il est le point ogham (éabhadh) le point d’équilibre entre toutes les oppositions (lle bo cydbwys pob gwrth). Il est à la fois un et multiple, suivant le point de vue considéré. Il n’y a pas d’exclusive et Jésus, Mahomet, ou Bouddha, sont aussi des formes du divin pour un très-sachant d’aujourd’hui.
Allons même plus loin. Comme l’a très bien vu Arthur Weigall dans son livre sur les éléments païens dans la chrétienté, la christianisation de la vieille Europe a eu de curieux effets secondaires. L’apparition de saints et de saintes bien étranges, ou de fées, ultimes avatars des dieu-ou-démons ou des déesse-ou-démones du paganisme.
Pour finir, mettons donc nous aussi un pied dans ce « royaume des fées ». La réalité physique n’est pas belle ; la naissance, la vie, la mort, ont besoin de beaucoup de poésie. La réalité sociale vaut-elle mieux ? Hélas ! Quels qu’ils soient, les forts oppriment toujours les faibles, l’individu est toujours écrasé par le groupe et ce sont les menteurs, les tricheurs, ou plus généralement ceux qui sont sans scrupule envers leurs frères humains, envers autrui, qui triomphent. Encore faut-il noter que, dans les pays de démocratie parlementaire, ce sont les électeurs eux-mêmes qui mettent au pouvoir les voleurs et les menteurs, qui les grugent et les exploitent sans vergogne. Un cercle vicieux dont on ne sortira que par les progrès de la culture historique ou philosophique ; mais peut-on attendre une telle évolution des responsables de la communication de tous ces profiteurs du système ? En outre, à trop vouloir faire le paradis sur terre, on y fait sûrement l’enfer. L’homme n’est ni ange ni bête et le malheur est que, qui veut faire l’ange fait la bête.
Cependant, pour les malchanceux, pour les malheureux, il y a toujours à l’horizon l’invisible royaume des fées. Par précaution les mères y conduisent leurs enfants et les enfants ne demandent qu’à y entrer. Par chance, il nous reste quelques images pieuses des temps lointains où, comme en Hyperborée, tout était pur et magnifique. De ces images émane encore de la « grâce ». Par-delà les injustices humaines, par-delà les misères terrestres, cette grâce est une ouverture de l’esprit sur l’harmonie de l’univers. Aujourd’hui, géants et fées, devenus inoffensifs, sans exigence, ne peuvent plus que nous rattacher à notre Patrie spirituelle. Ils le peuvent parce que, dans leurs noms mêmes, ils en sont les caractéristiques. Et ils peuvent faire plus : en des temps où des évolutions mentales en sens contraire suscitent dans ce pays des milieux parfois hostiles les uns aux autres, ils peuvent jeter un pont entre les uns et les autres, en aidant à renouveler, par des éléments restés frais, notre conscience collective. Notre druidisme y veillera.
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ANNEXE N°1.
LE DRUIDISME EST-IL UNE RELIGION ET SOMMES-NOUS DES LUCIFÉRIENS ?
Par Jean Martin.
La religion se caractérise par plusieurs critères, dont nous ne retiendrons que quelques-uns.
Elle est une expression de l’être humain dans son approche du sacré. Dans ce dessein elle élabore un ensemble de rites qui ont pour but premier d’établir cette relation entre l’Homme et les divinités, ou plus largement le sacré. L’homme des sociétés primitives ne se considère pas comme « achevé », tant qu’il est seulement dans l’état où il a été propulsé sur cette terre par sa naissance biologique. Pour devenir homme au sens plein du terme à ses yeux, il doit mourir à cette vie première (naturelle) et renaître à une vie supérieure, qui est à la fois religieuse et culturelle. En d’autres termes, le primitif place son idéal d’humanité sur le plan surhumain.
La limite entre la religion selon les judéo-islamo-chrétiens et la religion de type druidique, est celle qui peut exister entre un être à genoux, humilié devant Dieu ou le Démiurge, aspirant à l’union divine ; et un être debout, regardant Dieu ou le Démiurge face à face, agissant volontairement pour se hisser dans cette dimension du sacré. C’est-à-dire celle de l’homme, de l’action, de la loyauté ainsi que de la volonté.
Dans le néopaganisme celtique, nous rencontrons deux courants. Ceux qui adorent les anciens dieu-ou-démons de la nature environnante et recréent un lien avec ces derniers ; ceux qui considèrent ces dieu-ou-démons comme l’équivalent de forces de la psyché, qu’il convient de diriger ou de mettre en
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œuvre par une juste utilisation des correspondances (Jung). Remarquons toutefois que ces deux positions ne s’excluent pas, et que la deuxième peut, d’une certaine manière, contenir la première. Dans tous les cas, et du moins au début de cette voie, une dynamique est installée qui vise à établir un lien réel avec ces divinités, le reste ne prenant de l’importance qu’un petit peu plus tard.
À la différence de la plupart des religions contemporaines (il n’y a pas de tribu de lévites professionnels chez les Celtes, le recrutement des prêtres est ouvert), la religion néo-druidique implique que tout participant peut aspirer à l’initiation ; c’est-à-dire au franchissement de seuils de conscience par l’intermédiaire d’un rituel précis. Les différentes techniques sont étudiées puis pratiquées avant l’initiation, car celle-ci requiert la maîtrise de certaines bases.
En ce qui nous concerne, nous envisageons les initiations comme des rituels ayant une réelle valeur opérative (on en revient toujours changé), se déroulant dans des lieux particuliers (forêt, grotte…) et conservant les anciennes pratiques.
La plupart des courants contemporains ont épuré les rituels d’initiation ; en enlevant une grande part de leur dimension « magique » et en assouplissant considérablement ce qu’il est convenu d’appeler les épreuves afférentes au degré franchi ; parvenant ainsi à quelque chose de seulement symbolique.
Bien que cela soit utile et profitable dans certains cas, nous pensons que c’est là une erreur et c’est pour cette raison que nous les avons replacées dans des conditions plus authentiques. Elles nécessitent donc une pratique préalable proposée, car là, face à soi-même, il n’est pas question de tricher.
Il faut cependant préciser que les initiations sont sensiblement différentes pour les femmes et les hommes, et nous respectons en cela l’équilibre que réclament les rites quant aux deux sexes.
Les rituels druidiques actuels, contrairement à ceux de l’Antiquité (les anciens très-sachants étaient plus ou moins misogynes) nécessitent la présence non seulement de très-sachants, mais aussi de prêtresses. Les très-sachants d’aujourd’hui ont étendu en effet à la vie religieuse, l’égalité entre les sexes qui avait cours dans la vie civile des sociétés celtiques antiques.
Pour la même raison, il est tout à fait intéressant qu’il y ait aussi équilibre entre le nombre des hommes et des femmes dans la sodalité. Il est nécessaire que nous ayons une présence réelle de vrais hommes et de vraies femmes, et non de moitiés d’homme ou de femme.
La femme doit découvrir sa féminité, la cultiver, tant sur le plan physique que psychosomatique. Pour comprendre cela, nous ne pouvons que renvoyer aux magnifiques livres de notre consœur Marion Zimmer Bradley, consacrés au thème d’Avallon.
C’est là par conséquent la voie que nous recommandons aux femmes, même si les techniques préliminaires sont identiques. Il ne s’agit donc pas d’un érotisme forcené, mais de la simple reconnaissance de la nature féminine et de ses spécificités.
Il existe habituellement deux orientations de travail dans le néopaganisme.
La première fonde l’essentiel de son œuvre, et ce dès le début, sur le travail de groupe. Il s’agit de construire une synergie socialement efficace et contagieuse (un puissant égrégore disent les occultistes) permettant de libérer le maximum d’hommes et de femmes de l’aliénation sous-humanisante des religions de masse monolâtres actuelles.
La deuxième consiste à mettre l’accent sur une pratique individuelle préalable. Après une période de rituels de purification, destinés à éprouver ou à purifier le nouveau venu, il peut, après la première initiation, et s’il le souhaite, rejoindre ou constituer un groupe.
Nous pensons que le deuxième cas, plus proche du tempérament national celte effectivement, peut se révéler utile, mais peut aussi présenter de graves dangers. Identification du groupe au très-sachant l’animant, et ainsi de suite. Il faut reconnaître que ces derniers ne font habituellement rien pour éviter cela. De plus, le pratiquant, dans ces conditions, n’est nullement assuré de progresser d’une façon équilibrée jusqu’à la maîtrise de toutes ses facultés, car tout repose sur un seul homme. Il est possible bien évidemment que le très-sachant en question soit quelqu’un de valeur, mais l’expérience nous a montré que c’était là quelque chose de rare de nos jours.
La médiocrité intellectuelle ou morale des néo-très-sachants d’aujourd’hui et notamment en France, est en effet consternante (cf. le cas du vellède français Bernard Jacquelin et les conditions dans lesquelles il a fondé son École druidique des Gaules).
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Il faut bien le dire, le druidisme d’aujourd’hui est une sous-culture s’apparentant plus à une « nouvelle » superstition (il n’est rien de nouveau que ce qui a été oublié) qu’à autre chose.
Sommes-nous « Lucifériens » maintenant ?
Il est de coutume d’expliquer que Lucifer signifiant « porteur de lumière », on ne peut qu’adorer cette idée ou prendre comme idéal ce qu’elle symbolise. Il est cependant nécessaire de faire quelques réserves, car nombreux sont ceux qui, en se référant à ces forces, ne savent de quoi ils parlent. Il faut en effet faire la différence entre des invocations et des références à « Lugifer », et le rattachement au néo-druidisme.
La morale ne saurait être définie d’une façon identique pour tous, mais les idéaux du chevalier ou de l’adepte doivent se retrouver dans une même quête du Graal, dans laquelle les notions de respect, de devoir et de sacré, remplacent celles de puissance et de pouvoir.
Agir avec force et par la puissance des divinités peut être louable, mais uniquement dans le but de parvenir au salut individuel et collectif, c’est-à-dire à l’épanouissement de notre âme, à la conquête de la forteresse de notre être.
Nous ne revendiquons comme seule nécessité que la volonté d’œuvrer dans le sens de l’être. Quant à l’adoration de « Lugifer » ou de Belin/Belen ou de la fée Morgane, ou d’autres encore, en particulier ou de préférence à d’autres ; elle ne peut être le fait que du libre choix d’un individu préférant se vouer à telle ou telle divinité ; mais ne doit pas tenir lieu de ligne de conduite générale.
Il est vrai que le druidisme a toujours accepté la pratique de la dévotion à telle ou telle divinité plutôt qu’une autre.
La dévotion consiste à se vouer à un dieu-ou-démon. Elle est attestée avant les batailles. Les guerriers consacrent leurs armes au dieu-ou-démon de la guerre ou au dieu-ou-démon forgeron. Ils peuvent leur offrir leurs cheveux.
Les forgerons, eux, par contre, avaient une dévotion toute particulière pour Gobannos ou Ucuetis, comme le prouve l’inscription d’Alise Sainte-Reine. On appelle d’ailleurs dugiiontiioi ceux qui se sont dévoués au culte de tel ou tel dieu-ou-démon. Martialis Dannotali ieuru Ucuete sosin celicnon 1) etic gobedbi dugiiontiio Ucuetin in Alisia.
Mais peu importe ce que chacun décide de faire dans le secret de son temple intérieur ou de son cœur, pourvu que cela ne se transforme pas en une adoration dogmatique, ce qui serait contraire à l’esprit de notre démarche (Jean Martin, chercheur en druidisme).
N. B. Le celicnon en question était une sorte de local servant à la fois aux banquets et à l’entrepôt de matériel divers. Ses pièces étaient circulaires et en cas de besoin on pouvait y installer une table, ronde bien entendu.
ANNEXE N° 2
LE MYTHE DES SUPÉRIEURS INCONNUS.
Y a-t-il des dieu-ou-démons déjà de nouveau vivants, c’est-à-dire ayant déjà commencé à se dés-occulter progressivement, parmi nous ? Les autres étant toujours « morts » c’est-à-dire toujours en sommeil ?
Toute une École de pensée druidique estime en effet que certains dieu-ou-démons de jadis ont amorcé leur désoccultation, et qu’ils auraient par exemple recommencé d’apparaître à des humains (des savants, des philosophes ou de grands esprits de ce type) ; afin de faire de nouveau progresser la société par la révélation de certains secrets techniques ou scientifiques.
Un exemple (certains pensent que l’étranger inconnu en question était Gobannos, le dieu-ou-démon de la forge et du travail des métaux).
« Jean-Frédéric Schweitzer, dit Helvétius, violent adversaire de l’alchimie, rapporte que, dans la matinée du 27 décembre 1666, un étranger se présenta chez lui. C’était un homme d’apparence honnête et grave, et de mine autoritaire, vêtu d’un simple manteau, comme un mennonite. Ayant demandé à Helvétius s’il croyait à la pierre philosophale (ce à quoi le fameux docteur répondit par la négative) l’étranger ouvrit une petite boîte d’ivoire « contenant trois morceaux d’une substance
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ressemblant à du verre ou à de l’opale ». Son propriétaire déclara que c’était la fameuse pierre, et qu’avec une quantité aussi minime, il pouvait produire vingt tonnes d’or. Helvétius en tint un fragment dans la main […] Prié de fournir la preuve de ses dires, en réalisant une transmutation, l’étranger répondit qu’il reviendrait trois semaines plus tard, et montrerait à Helvétius une chose susceptible de l’étonner. Il revint ponctuellement au jour dit, mais refusa d’opérer, affirmant qu’il lui était interdit de révéler ce secret. Il condescendit pourtant à donner à Helvétius un petit fragment de la pierre « pas plus gros qu’un grain de sénevé » […] L’homme promit de revenir le lendemain matin, à neuf heures, et de réaliser le miracle, mais il ne vint pas, et le surlendemain non plus. Ce que voyant, la femme d’Helvétius le persuada de tenter lui-même la transmutation. Helvétius procéda conformément aux directives de l’étranger. Il fit fondre trois drachmes de plomb, entoura la pierre de cire, et la laissa tomber dans le métal liquide. Celui-ci se changea en or […] La nouvelle se répandit comme une traînée de poudre, Spinoza, que nous ne pouvons compter au nombre des naïfs, voulut avoir le fin mot de l’histoire. Il rendit visite à l’orfèvre qui avait donc expertisé l’or. Le rapport fut plus que favorable : au cours de la fusion, de l’argent incorporé au mélange s’était aussi transformé en or […] Spinoza se rendit alors chez Helvétius qui lui montra l’or et le creuset qui avait servi à l’opération. Des bribes du précieux métal adhéraient encore à l’intérieur du récipient ». L’étrange inconnu était-il Gobannos, le dieu-ou-démon des métaux ?
Telle est la première question qui vient à l’esprit.
Les manifestations extérieures de ces mystérieux inconnus ont toujours été rares. En voici une autre. « La prodigieuse destinée de l’un des hommes les plus mystérieux de l’Occident : le pape Sylvestre II, connu aussi sous le nom de Gerbert d’Aurillac. Né en Auvergne en 920, mort en 1003. Gerbert fut moine bénédictin, professeur de l’Université de Reims, archevêque de Ravenne, et pape, par la grâce de l’empereur Othon III. […] Il possédait dans son palais une tête de bronze qui répondait par OUI ou NON aux questions qu’il lui posait sur la politique et la situation générale de la chrétienté. […] Il s’agirait d’un automate analogue à nos modernes machines binaires. Cette « tête » magique fut détruite à sa mort, et les connaissances rapportées soigneusement dissimulées […] Le bruit courut évidemment que Gerbert n’avait été capable de produire cette machine que parce qu’il était en relation avec le Diable et lui avait juré une éternelle fidélité ».
La question est : quel est donc le dieu-ou-démon caché derrière ce diabolisme de mauvais aloi ?
Le dieu-ou-démon de la médecine et des prothèses en tout genre ? (dit Medocios ou Miach en Irlande ?)
Notre conclusion sera prudente.
Il y a eu, après la fin de la grande période mythologique des dieu-ou-démons, et avant même que leur occultation soit terminée, des apparitions « en privé » de certains d’entre eux, « en privé », c’est-à-dire n’appartenant pas au cycle mythologique en cours.
Leur raison d’être n’était pas d’améliorer ou de compléter l’enseignement mythologique (qui a été définitivement clos avec l’occultation des dieu-ou-démons) ; mais uniquement d’aider divers individus. Le caractère « privé » de ces apparitions divines doit inciter à la plus grande prudence.
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POSTFACE À LA JOHN TOLAND.
Les pseudodruides à la filiation initiatique mirobolante (la fameuse et inénarrable tradition primordiale) s’étant multipliés depuis quelque temps ; il nous a paru nécessaire de mettre à la disposition de tout un chacun ces quelques notes, hâtivement rédigées un soir de novembre, afin de donner à nos lecteurs envie d’en savoir plus sur le vrai druidisme. Ce travail se veut honnête, mais en aucune façon neutre. Il s’est donné pour objectif de défendre ou de réhabiliter la cluto (renommée) de cette antique religion.
Rien ne remplace la méditation personnelle y compris sur les lais obscurs ou incompréhensibles parsemant ces livres et qui ont été insérés à dessein afin de vous obliger à réfléchir pour trouver votre propre voie. Ces livres ne sont pas des dogmes à suivre aveuglément et à la lettre. Ainsi que vous le savez sans doute, il faut se méfier comme de la peste de la lettre. La lettre tue, seul l’esprit vivifie. Rien ne remplace non plus l’expérience personnelle et c’est en cheminant que l’on trouve le chemin. Ne comptez donc que sur vos propres forces pour cette quête du Graal. Ce qui compte c’est l’attitude à adopter dans la vie et non les détails du dogme. Le druidisme a moins d’importance que la druidiaction. (Jean-Pierre Martin.)
Ces quelques feuillets griffonnés à la va-vite ne sont néanmoins en aucune façon LES LIVRES À LIRE SUR LE SUJET, ils n’en sont qu’un pâle reflet. La seule bibliothèque druidique digne de ce nom n’est pas en effet composée de seulement 12 (ou 27) livres, mais de plusieurs centaines.
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Les quelques opuscules constituant cette mini-bibliothèque ne constituent pas un approfondissement et ne sont que quelques manuels destinés aux écoliers du druidisme. Ces résumés simplifiés destinés aux cours primaires de druidisme seront remplacés par des cours d’un niveau quelque peu supérieur, pour ceux qui voudront vraiment l’étudier de façon plus pertinente.
Cette petite bibliothèque est par conséquent un premier essai d’adaptation (destinée aux jeunes adultes) des diverses réflexions sur le savoir et la vérité druidiques, auxquelles ont abouti les premiers résultats de la nouvelle laïcité positive et ouverte, mondiale, en train de s’instaurer.
À la différence du judaïsme, du christianisme, et de l’islam, qui fourmillent littéralement, à propos de l’Être supérieur, d’anthropomorphismes puérils pris au pied de la lettre (fondamentalisme) ; notre druidisme, lui, n’en utilisera que très peu, et s’en tiendra, en ce domaine, au minimum absolu.
Mais pour parler de Dieu-ou-Diable nous allons bien être obligés, nous aussi, d’utiliser un langage, et donc un certain nombre de ces anthropomorphismes. Ou alors il faudrait totalement renoncer à en discuter.
Ce premier rayon de notre future bibliothèque consacrée au sujet a pour objet de montrer avec précision l’harmonieuse authenticité de la volonté et du savoir néo-druidiques. De montrer à quel point ses grandes thèses actuelles ont des racines anciennes, car la Mythologie, c’est notre Bible à nous. Les adaptations de ce bref exposé, exigées par les différences de culture, d’âge, de maturité spirituelle, de situation sociale, etc. seront à faire par les druides concernés (les vellèdes et les autres ?).
À noter cependant. Important ! Ce que ces quelques notes, hâtivement jetées sur le papier au cours d’une trop courte vie, ne sont pas (en vrac).
Une révélation divine. Une loi (toujours aussi divine). Une loi (profane ou laïque). Une loi (scientifique). Un dogme. Un Ordre ? Ce que je cherche surtout à faire partager c’est un état d’esprit, rien de plus. Ainsi que l’a très bien dit un jour notre vieux maître :
« NOTRE CIVILISATION N’A PAS LE CHOIX : CE SERA LE CELTISME OU CE SERA LA MORT » (P. Lance).
Ce que ces quelques notes, hâtivement jetées sur le papier au cours d’une trop courte vie, sont. Du rêve. Une aventure. Un voyage. Une évasion. Un cri de révolte contre la laideur morale et matérielle de cette société.
Une tentative d’atteindre à l’universel en partant du particulier. Un défi. Un obstacle fécond à surmonter. Une incitation à la réflexion. Un guide pour l’action. Une carte. Un plan. Une boussole. Une étoile polaire ou l’étoile du berger là-haut dans la montagne. Un feu la nuit dans une clairière ?
Ce que le rassembleur de ce noyau de bibliothèque, Pierre de La Crau, n’est pas.
— Un dieu.
— Un demi-dieu.
— Un quart de dieu.
— Un petit saint.
— Un philosophe (reconnu, officiel, et breveté ou patenté, comme ceux qui passent à la télévision. Sauf évidemment à prendre le terme en son sens originel, qui est celui d’amateur de sagesse et de savoir).
Ce qu’il est : un homme, et rien de ce qui est humain ne lui est donc étranger. Pierre de la Crau n’a aucun pouvoir surhumain ou exceptionnel. Rien de ce qu’il a dit écrit ou fait ne saurait avoir de valeur intemporelle. Tout au plus espère-t-il que son extrême lucidité à propos de notre société et de son idéologie dominante (voir ses philosophes officiels, ses journalistes, ses masses médias et le politiquement correct des bien-pensants) ; ainsi que son non-conformisme, et son franc-parler, alliés à un solide esprit de contradiction (qui lui ont d’ailleurs valu pas mal de déboires ou d’avanies) ; pourront être utiles.
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La présente petite bibliothèque pour débutant « contient la dose d’humanité exigée par l’état actuel de la civilisation » (Henri Lizeray). Elle n’est d’ailleurs qu’un rassemblement de matériau attendant l’architecte ou le maçon ? ad hoc.
Prochainement paraîtra toute une série de fascicules approfondissant ces éléments de base. Cette présentation différente du savoir druidique préservera néanmoins l’unité et la profonde harmonie entre ces divers exposés d’une seule et même philosophie.
Cas des traductions dans une langue étrangère (espagnol, allemand, italien, polonais, etc.)
Les fautes d’orthographe de grammaire de style, ainsi que l’écriture des noms propres, pourront être corrigées. Toute autre amélioration du texte pourra également être apportée si nécessaire (par ajout suppression ou modification, de détails) ; Pierre de La Crau ayant toujours regretté de ne pouvoir atteindre à la perfection en ce domaine. Mais à condition de n’altérer ni trahir en rien la pensée de l’auteur de cette compilation raisonnée. Toute illustration sans légende peut être changée. De nouvelles illustrations peuvent être apportées. Mais les illustrations ayant une légende ne devront être qu’améliorées (par substitution d’une bonne photo à un mauvais croquis par exemple ?)
Il va de soi que le coordonnateur de cette rapide et sommaire compilation raisonnée, Pierre de La Crau, ne prétend nullement avoir inventé (ou découvert) lui-même, tout ceci ; qu’il ne prétend en aucune façon que ceci est le fruit de ses recherches personnelles (sur le terrain ou en bibliothèque) ! Ce qui suit est en effet essentiellement issu des excellents ouvrages ou sites internet référencés en bibliographie et dont la consultation directe est fortement recommandée. Nous n’insisterons jamais assez sur notre volonté de ne pas être les hommes d’un livre (du Livre), mais d’au moins douze, comme les Fénianes d’Irlande, pour d’évidentes raisons d’ouverture d’esprit, la vérité étant notre seule religion.
Encore une fois, répétons-le ; le coordonnateur de la mise par écrit de ces quelques notes hâtivement jetées sur le papier ne prétend nullement avoir passé sa vie dans la poussière des bibliothèques ; ou sur le terrain, dans la boue des fouilles archéologiques de sauvetage ; afin d’exhumer des témoignages inédits sur le passé de l’Irlande (ou du Pays de Galles ou des Indes ou de la Chine ?)
PIERRE DE LA CRAU NE SE VEUT DONC EN AUCUNE FAÇON L’AUTEUR DES TEXTES QUI PRÉCÈDENT.
IL N’ESSAIE NULLEMENT DE S’EN ATTRIBUER LES MÉRITES. Il n’en est que l’éditeur ou le compilateur. Il s’agit pour la plupart de documents diffusés sur internet à quelques exceptions près. IL EN REVENDIQUE PAR CONTRE TOUS LES DÉFAUTS ET TOUTES LES INSUFFISANCES. Pierre de la Crau ne revendique qu’une chose, les fautes erreurs ou imperfections diverses de ce livre. Lui seul est à blâmer dans ce cas. Mais il fait confiance à ses contemporains (la nature humaine étant ce qu’elle est) pour les lui signaler avec vigueur.
Note retrouvée par les héritiers de Pierre de La Crau et insérée par eux à cet endroit.
J’avoue tout de suite afin de faciliter le travail de mes juges que les hommes comme moi étaient chrétiens à Rome sous Néron, païens à Jérusalem, sorciers à Salem, hérétiques anglais, catholiques irlandais, et aujourd’hui racistes, sexistes, homophobes, islamophobes, en attendant d’être demain koufar ou de nouveau chrétien l’antéchrist le plus bestial de toutes les apocalypses, etc. Bref ainsi qu’on l’aura compris je suis pour le néant la mort la maladie la souffrance……
Par respect pour l’Humanité, afin de gagner du temps, et ne pas lui en faire perdre, je vais faciliter le travail de ceux qui tiennent absolument à être du bon côté de la barrière en combattant (héroïquement bien sûr) afin de sauver le monde de mes griffes (mes idées ou mes penchants, mes tendances).
À ces courageux et implacables détracteurs, dont la profondeur de réflexion digne d’un marquis de Vauvenargues n’a d’égale que l’ampleur de la culture générale, digne d’un Pic de la Mirandole, je dis…
Prenez une feuille de papier, de traitement de texte si vous préférez, mettez-y par ordre d’importance les 20 caractéristiques qui vous semblent les plus graves, les plus odieuses, les plus haïssables, dans l’histoire de l’Humanité, depuis les hommes préhistoriques et Nabuchodonosor, selon vous… ET DITES-VOUS BIEN QUE JE SUIS TOUT LE CONTRAIRE DE VOUS, CAR JE LES AI TOUTES !
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On a toujours besoin de boucs émissaires ! Hérétique au Moyen âge, sorcière à Salem au 17siècle, raciste au 20e siècle, lézard extraterrestre au 21e, je suis l’homme que vous aimerez haïr pour vous sentir supérieur.
Je suis au choix et dans l’ordre d’importance que vous voulez : athée, sataniste, stupide, mongolien, raciste, bestial, homosexuel, pervers, communiste, nazi, menteur pathologique, voleur, suffisant, psychopathe, un monstre d’orgueil faussement modeste, et que sais-je encore, à vous de voir.
Voilà, je ne peux pas faire mieux (pour vous aider à sauver le monde).
[À la différence de mes contempteurs qui sont tous des gens bien, c’est-à-dire jeunes ou modernes et dynamiques, courageux, positifs, gentils, intelligents, instruits, ou du moins qui savent ; faisant preuve de beaucoup de recul dans leur méditation en profondeur sur les tendances lourdes de l’Histoire ; et sur le plan moral ou éthique : généreux, altruistes, mais pauvres évidemment, car donnant tout aux autres ; en outre profondément respectueux de la volonté de Dieu et de la Constitution…
Moi je suis un vieux réactionnaire ankylosé, conformiste, déconnecté de son temps, parano, schizophrène, incohérent, capricieux, jamais content, méchant, bête, n’ayant fait aucune étude ou du moins ignorant tout sur le sujet en question ; coutumier des jugements à l’emporte-pièce fondés sur des préjugés dénués de toute réflexion ; égoïste et riche ; suppôt de Satan et nazo-bolchevick ou stalino-hitlérien de nature. On disait hitléro-trotskiste quand j’étais jeune. En bref un criminel psychopathe dès le petit-déjeuner… ce qui me permet donc de penser ce que je veux, mes critiques aussi d’ailleurs, et d’essayer de le faire savoir à la cantonade].
Signé : le coordonnateur des travaux, Pierre de la Crau dit Hésunertus, chercheur en druidisme. Un homme à qui rien de ce qui est humain ne fut étranger. Chômeur, facteur, divorcé, sans domicile fixe, vagabond, contribuable, justiciable, électeur cocufié ? Un des huit milliards d’êtres humains ayant transité sur ce vaisseau spatial donc. Né sur la planète Terre le 13 janvier 1952.
BIBLIOGRAPHIE DES GRANDES LIGNES.
Pour ce qui est de la bibliographie des détails, voir annexe de la dernière leçon, car, comme le dit si bien Henri Lizeray, les traditions, ça doit s’interpréter. C’est là toute la différence qu’il peut y avoir entre ancien druidisme et néo-druidisme.
Le Lebar gabala ou Livre des invasions. Paris 1884 (William O’Dwyer)
Base de l’église druidique. Le druidisme restauré. Henri Lizeray, Paris, 1885.
Les traditions nationales retrouvées. Paris 1892.
Aesus ou la doctrine secrète des druides. Paris 1902.
Ogmios ou Orphée. Paris 1903.
TABLE DES MATIÈRES.
Autant en emporte le vent
Traité sur Dieu et les dieux ou les rapports du Un et du Multiple.
Finitude/Infinitude
Page 004
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Pierre de La Crau le premier des penseurs décoloniaux
Note sur le combat des idées
L’impérialisme romain
La réalité de la Pax Romana
Discours de Calgacus
Valeurs les plus importantes
Le complexe de Roland
Inspiration historique et création littéraire
Principe et méthodes de ces opuscules destinés aux écoliers du druidisme
Annexe N°1 : Sommes-nous Lucifériens ?
Annexe N°2 : Le mythe des supérieurs inconnus ?
Postface à la John Toland.
Bibliographie des grandes lignes
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DU MÊME AUTEUR.
1. Citations des auteurs antiques parlant des Celtes ou des druides.
2. Généralités liminaires diverses sur les Celtes.
3. Histoire du pacte avec les dieux tome 1.
4. La Bible du druidisme : histoire du pacte avec les dieux tome 2.
5. Histoire du pacte avec les dieux tome 3.
6. Histoire de la paix avec les dieux tome 4.
7. Histoire de la paix avec les dieux tome 5.
8. Des Fénianes aux Culdées ou « la Grande science qui illumine » tome 1.
9. Textes apocryphes irlandais.
10. Des Fénianes aux Culdées ou « la Grande science qui illumine » tome 2.
11. Des Fénianes aux Culdées ou « La Grande Science qui illumine » tome 3.
12. Les cent voies du paganisme. Science et philosophie tome 1 (mythologie druidique).
13. Les cent chemins du paganisme. Science et philosophie tome 2 (mythologie druidique).
14. Les cent chemins du paganisme. Science et philosophie tome 3 (mythologie druidique).
15. Le grand Camminus : éléments de théologie druidique tome 1.
16. Le grand catéchisme : éléments de théologie druidique tome 2.
17. Le plérôme druidique : anges djinns ou démons tome 1.
18. Le plérôme druidique : anges djinns ou démons tome 2.
19. Mystagogie ou théâtre sacré des Celtes antiques.
20. Poèmes celtes.
21. Le génie du paganisme celte tome 1.
22. Le complexe de Roland.
23. Au pied de la lanterne des morts.
24. Les secrets du vieux druide de la forêt ménapienne.
25. Le génie du paganisme celte tome 2 (liberté réciprocité simplicité).
26. Rhétorique : la trahison des clercs).
27. Petit dictionnaire de théologie druidique tome 1.
28. Des philosophes antiques au druide irlandais.
29. Judaïsme christianisme et islam : première partie.
30. Judaïsme christianisme et islam : deuxième partie tome 1.
31. Judaïsme christianisme et islam : deuxième partie tome2.
32. Judaïsme christianisme et islam : deuxième partie tome 3.
33. Troisième partie tome 1 : Qu’est-ce que l’Islam ? Bref historique de l’ensemble COR. HAD. SIR. et CHAR. FIQ. MAD.
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34. Troisième partie tome 2 : Qu’est-ce que l’Islam ? Premières approches de l’ensemble COR. HAD. SIR. et CHAR. FIQ. MAD.
35. Troisième partie tome 3 : Qu’est-ce que l’Islam ? Les 5 vrais piliers de l’ensemble COR. HAD. SIR. et CHAR. FIQ. MAD.
36. Troisième partie tome 4 : Qu’est-ce que l’Islam ? Coups de sonde dans l’ensemble COR. HAD. SIR. et CHAR. FIQ. MAD.
37. Couiro anmenion ou Petit dictionnaire de théologie druidique tome 2.